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Document EESC-2021-00022-AC

Avis - Comité économique et social européen - Législation sur les services numériques

EESC-2021-00022-AC

FR

INT/929

Législation sur les services numériques

AVIS

Comité économique et social européen

Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à un marché unique des services numériques (législation sur les services numériques) et modifiant la directive 2000/31/CE

[COM(2020) 825 final – 2020/0361 (COD)]

Rapporteur: Gonçalo LOBO XAVIER

Consultation

Conseil de l’Union européenne, 11/02/2021

Parlement européen, 08/02/2021

Base juridique

Article 114 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section «Marché unique, production et consommation»

Adoption en section

31/03/2021

Adoption en session plénière

27/04/2021

Session plénière nº

560

Résultat du vote
(pour/contre/abstentions)

235/3/5



1.Conclusions et recommandations

1.1Le CESE accueille favorablement la proposition relative à un marché unique des services numériques (législation sur les services numériques) à une époque où sont apparus des services (numériques) de la société de l’information nouveaux et innovants, qui modifient la vie quotidienne des citoyens de l’UE et façonnent et transforment la manière dont ils communiquent, se connectent, consomment et commercent. Ces services ont apporté une contribution importante à la transformation sociétale et économique dans l’UE et dans le monde, et la crise de la COVID-19 a démontré à quel point ils sont essentiels pour créer une société meilleure.

1.2Le CESE soutient les efforts de la Commission visant à empêcher le marché intérieur d’être fragmenté par une prolifération de règles et réglementations nationales susceptibles de fragiliser le système et d’empêcher toutes les entreprises européennes de bénéficier d’un marché unique solide. Par conséquent, le CESE appelle de ses vœux une déclaration claire concernant le caractère exhaustif de la législation sur les services numériques. Le Comité estime qu’il s’agit là d’une occasion d’établir, pour les marchés numériques, des normes mondiales qui puissent guider l’Europe dans cette nouvelle ère, en garantissant un niveau élevé de sécurité et de protection des consommateurs en ligne.

1.3Le CESE est conscient que le débat sur la législation sur les services numériques prendra du temps et que des compromis seront nécessaires sur le long terme. Malgré cela, le Comité invite la Commission et les États membres à définir un calendrier raisonnable pour organiser le débat et une consultation publique inclusive et mettre en œuvre le règlement et la stratégie. Il est fondamental que les partenaires sociaux et les organisations de la société civile jouent un rôle dans ce processus afin de créer des conditions de concurrence équitables pour tous les acteurs, qu’ils soient ou non établis dans l’Union européenne.

1.4Le CESE estime également que, compte tenu de l’importance des technologies numériques, la nécessité de nouvelles règles et réglementations pour résoudre les problèmes et les difficultés liés à ces technologies est devenue une priorité. Une nouvelle économie appelle de nouvelles approches.

1.5Le CESE se félicite de la transparence accrue des systèmes de recommandation et de la publicité. Toutefois, ces systèmes de recommandation ne doivent pas être diabolisés, même s’il convient de veiller à ce que les consommateurs ne reçoivent que les publicités qu’ils veulent. Les règlements devraient donc mettre l’accent sur l’autonomie individuelle et le CESE estime que les articles 29 et 30 du règlement devraient en conséquence permettre d’atteindre un juste équilibre.

1.6Le CESE pointe du doigt les nombreuses lacunes concernant le principe du pays d’origine, et demande que l’on se penche attentivement sur l’emploi d’autres méthodes, par exemple le principe du pays de destination, en particulier pour les questions liées à la fiscalité, au travail et aux consommateurs, sauf s’il existe une réglementation plus stricte au niveau de l’UE, afin de garantir une concurrence loyale et le niveau le plus élevé possible de protection des consommateurs. Il convient de veiller à ce que les dispositions en matière de droit du travail qui s’appliquent aux travailleurs des plateformes soient les mêmes que celles en vigueur dans le pays où le service est fourni, sachant que de mauvaises conditions de travail des salariés apparaissent désormais comme un sérieux obstacle à une concurrence loyale. L’objectif général est de renforcer le marché intérieur et d’en faire appliquer les règles en garantissant des conditions de concurrence équitables pour tous les acteurs.

1.7Les obligations de transparence ne devraient pas empêcher les progrès technologiques, en particulier dans le domaine de l’intelligence artificielle et de la science informatique. Même si la boîte noire de l’intelligence artificielle présente des risques, elle peut également apporter des avantages considérables. Le CESE souligne la nécessité de veiller à ce que la législation soit affinée et n’entrave pas le progrès technique, tout en gardant à l’esprit le niveau le plus élevé possible de protection des consommateurs et des travailleurs. Il demande qu’un cadre adéquat soit élaboré pour permettre aux entreprises d’affirmer l’équité, la fiabilité et la sécurité de leurs systèmes d’IA.

1.8L’exemption de responsabilité pour l’hébergement ne devrait cesser de s’appliquer que lorsque sont concernés des contenus manifestement illicites ou qui ont été reconnus comme illégaux par une décision de justice. Le CESE recommande de mettre en place un régime de responsabilité positif pour les places de marché en ligne, applicable dans certaines circonstances.

1.9Les définitions utilisées devraient être rationalisées et, dans la mesure du possible, harmonisées avec les textes juridiques connexes tels que la législation sur les marchés numériques, la directive sur le droit d’auteur dans le marché unique numérique et le règlement relatif aux relations de plateforme à entreprise.

1.10La législation sur les services numériques s’inscrit dans le cadre d’une approche réglementaire plus vaste ayant trait à l’économie des plateformes, qui doit également porter sur la fiscalité, les droits des travailleurs (y compris la protection sociale, la santé et la sécurité, le droit d’organisation et de négociation collective), la répartition des richesses et la durabilité, ou encore la sécurité des produits. Le CESE attire l’attention sur l’immense tâche qui consiste à assurer une bonne coordination entre tous les instruments et initiatives pertinents, notamment dans les domaines de la propriété intellectuelle, des télécommunications, des données et de la vie privée, de la responsabilité et de la sécurité des produits, du secteur audiovisuel et, bien entendu, de la directive sur le commerce ‑électronique. Il importe d’avoir une bonne vision globale de la manière dont peuvent être intégrées ces différentes perspectives ayant une incidence sur la législation sur les services numériques.

1.11Le CESE accordera une attention particulière à la fiscalité, à la gouvernance des données, au statut professionnel, aux conditions de travail et à la protection des consommateurs, car ce sont là des facteurs importants de la concurrence parfois déloyale qui sévit dans les économies numériques. Il souligne que ces questions doivent être traitées dans le respect des objectifs de développement durable, de la stratégie numérique, de la charte des droits fondamentaux et du socle européen des droits sociaux.

2.Observations générales

2.1Les technologies numériques peuvent être essentielles pour notre vie quotidienne. Elles peuvent être d’une grande utilité pour la société et l’économie, et il est désormais universellement reconnu qu’elles sont indispensables au fonctionnement du marché et aux relations que nous entretenons avec les autres, et que la communauté dans son ensemble en tire de réels avantages. Toutefois, les services numériques posent également des défis majeurs aux particuliers, à la société et au marché. Une Europe plus juste passe par une réglementation appropriée du secteur du numérique, une répartition adéquate de ces avantages et une protection idoine de tous les acteurs du marché (citoyens, consommateurs, travailleurs et entreprises, quelle que soit leur taille).

2.2La réponse qu’apporte la Commission européenne à plusieurs documents, à l’évolution de la jurisprudence‑ et à des demandes qui préconisent d’une part d’apporter des réformes ambitieuses au cadre juridique qui régit actuellement le commerce électronique dans l’UE tout en maintenant les principes essentiels de son régime de responsabilité, l’interdiction d’une surveillance générale et la clause relative au marché intérieur, et d’autre part de favoriser un marché numérique mis à jour, plus équitable et compétitif, porte sur deux domaines principaux que sont la législation sur les services numériques et la législation sur les marchés numériques.

2.3Avec la législation sur les services numériques, l’UE devrait garantir un niveau élevé de protection des consommateurs européens concernant plusieurs aspects de l’économie numérique, s’agissant notamment des plateformes numériques en ligne. La lutte contre les contenus illicites et le renforcement de la transparence dans la manière dont la publicité cible le public comptent parmi les aspects les plus importants et les plus controversés de la proposition à l’examen.

2.4Avec la loi sur les marchés numériques, la Commission se concentre sur le fonctionnement du marché numérique européen tout en s’efforçant de le rendre plus équilibré, plus compétitif et plus innovant, en offrant aux citoyens des services plus nombreux et de meilleure qualité grâce à l’instauration de conditions de concurrence équitables au profit de chaque acteur du marché.

2.5Par conséquent, le CESE se félicite des efforts déployés par la Commission pour réglementer davantage l’économie numérique et la rendre fiable tant pour la société que pour l’économie. Les citoyens, le travailleurs et les opérateurs économiques, et tout particulièrement les PME et les personnes vulnérables, doivent être protégés dans leurs relations avec les plateformes numériques et la sécurité doit être garantie dans toutes les opérations, tant en termes de contenu que de transactions économiques, voire de droits de propriété intellectuelle.

2.6Les règles de l’UE relatives au cyberespace deviennent de plus en plus complexes et fragmentées. Il convient de s’efforcer d’améliorer leur lisibilité et leur cohérence. Des règles trop complexes peuvent être néfastes pour les entreprises comme pour les citoyens, en freinant l’innovation, en augmentant les coûts et en rendant plus difficile l’exercice de leurs droits par les citoyens. Le CESE se félicite dès lors que la Commission ait l’intention de coordonner et de rationaliser les aspects procéduraux des règles d’application au sein des États membres et qu’elle ait opté pour un instrument juridique directement applicable.

2.7Le CESE souligne que la législation sur les services numériques devrait être cohérente avec le cadre juridique potentiel régissant d’autres questions pertinentes liées à l’économie des plateformes, telles que les droits des travailleurs (y compris la protection sociale, la santé et la sécurité, le droit d’organisation et de négociation collective) 1 , la fiscalité, la répartition de la richesse et la durabilité, et insiste sur la nécessité de traiter ces questions au niveau européen et dans le respect des objectifs de développement durable, de la stratégie numérique, de la charte des droits fondamentaux et du socle européen des droits sociaux. Parmi les futures initiatives de la Commission, le Comité économique et social européen sera particulièrement vigilant en ce qui concerne la fiscalité, la gouvernance des données, le statut professionnel, les conditions de travail et la protection des consommateurs, car ce sont là des facteurs importants de la concurrence parfois déloyale qui sévit dans les économies numériques.

2.8La réglementation du cyberespace devrait être aussi pérenne et technologiquement neutre que possible. Cela apportera de la clarté et ouvrira des débouchés commerciaux pour tous, en mettant l’accent sur la protection et la sécurité des consommateurs.

2.9Il importe que, dans le domaine de la fiscalité de l’économie numérique, la Commission prenne des initiatives dans le cadre des discussions internationales en instaurant des principes d’équité et de transparence, de répartition des richesses et de durabilité, et souligne la nécessité de traiter ces questions au niveau européen et conformément aux objectifs de développement durable, à la stratégie numérique, à la charte des droits fondamentaux et au socle européen des droits sociaux.

3.Observations spécifiques

3.1Une législation de meilleure qualité et plus efficace, notamment pour éviter une concurrence déloyale, est l’un des principaux thèmes de cette nouvelle économie. La Commission estime ‑clairement, et le CESE en convient, ‑que de nouveaux moyens et approches sont nécessaires afin de réguler un marché pour lequel il n’est pas envisageable d’utiliser les mêmes outils qu’auparavant ni de maintenir le statu quo. Il s’avère que le cadre réglementaire «normal» en matière de concurrence n’est pas suffisant pour remédier de manière efficace aux défis et aux difficultés engendrés par l’existence des grandes entreprises technologiques.

3.2Le CESE plaide en faveur de règles plus claires, à l’instar de celles que la Commission envisage, et qui reposent sur un cadre réglementaire simplifié et rapide, régissant le marché intérieur et applicable au monde numérique. L’UE doit mettre à jour son éventail d’outils réglementaires afin de traiter efficacement la question des marchés numériques en plus de celles liées aux plateformes ayant le statut de contrôleur d’accès. La nouvelle économie exige des mesures différentes et le CESE se félicite donc également de l’initiative relative à la législation sur les marchés numériques 2 .

3.3La souveraineté numérique européenne doit être prise en compte dans tous les exercices réglementaires, afin de protéger non seulement les entreprises, mais aussi les travailleurs, les consommateurs et les citoyens. Avec la crise de la COVID-19, la vente de produits dangereux, les faux commentaires, les pratiques commerciales déloyales et d’autres violations du droit de la consommation, le piratage et la contrefaçon sur les plateformes numériques ont atteint des niveaux inacceptables. Cela témoigne de l’importance de la législation sur les services numériques et de la nécessité urgente d’agir.

3.4Il est également clair que les mécanismes visant à assurer le respect des règles en matière de lutte contre la fraude et les activités illicites associées aux plateformes numériques constituent un défi et existent pour veiller à ce que les entreprises qui tirent le plus profit de l’économie numérique aient également davantage de responsabilités. Le CESE estime que la législation sur les services numériques a un rôle essentiel à jouer pour rétablir la confiance dans le marché et inciter les États membres à définir un mécanisme d’application rapide et efficace qui leur convienne à tous, tout en tenant compte des différences qui existent entre eux. Le CESE se félicite que les lacunes en matière d’application de la législation dans le domaine de la publicité illégale en ligne seront très probablement réduites grâce à la législation sur les services numériques.

3.5Quelle que soit l’approche adoptée pour les systèmes et les mécanismes de contrôle, la Commission et les États membres doivent allouer des fonds suffisants pour investir dans les ressources humaines, les systèmes de formation, les logiciels et le matériel permettant de renforcer la confiance au sein du marché et parmi les particuliers. Il est donc prioritaire de définir les coûts liés à la mise en œuvre de la législation sur les services numériques, ainsi que les coûts anticipés pour la société si aucune mesure n’est prise, et de garantir les conditions nécessaires afin d’obtenir l’adhésion de tous les États membres.

3.6S’agissant du champ d’application de la législation sur les services numériques, la taille est un élément important: toutes les entreprises du secteur ne devraient pas être traitées de la même manière, afin d’éviter une concurrence déloyale fondée sur la puissance financière et l’envergure. Toutefois, le critère proposé, à savoir le nombre de travailleurs, pourrait s’avérer inadéquat et facile à contourner. Cet aspect est d’autant plus fondamental que, dans une large mesure, les obligations imposées aux plateformes par la proposition de règlement ne s’appliquent pas aux micro-entreprises ou petites entreprises, en ce qui concerne par exemple le traitement des plaintes, les comportements abusifs, le signalement d’infractions pénales, la transparence de la publicité, les audits indépendants et les signaleurs de confiance.

3.7Le CESE souligne néanmoins qu’il importe de protéger les PME, les micro-entreprises et les entreprises de l’économie sociale. Il se peut que celles-ci ne soient pas en mesure de supporter les coûts de mise en conformité et d’investissement, et il convient de veiller à ce qu’elles ne pâtissent pas de la mise en œuvre d’un règlement censé garantir une concurrence loyale. Par conséquent, le CESE demande que des critères alternatifs soient trouvés pour définir les micro et les petites entreprises (article 16); il pourrait s’agir du chiffre d’affaires annuel, de la structure de leur propriété ou de leur modèle organisationnel.

3.8Le CESE se félicite de la période d’adaptation prévue pour les entreprises qui entrent dans la catégorie des très grandes plateformes en ligne (article 25, paragraphe 4). Souvent, ces entreprises se développent très rapidement et devraient avoir une chance équitable de s’adapter aux exigences et aux obligations plus strictes instaurées dans la proposition.

3.9Bien que la proposition indique clairement qu’elle doit être comprise comme une lex generalis, il semble que différents instruments comportent de nombreuses définitions étroitement liées, qui pourraient devenir trop complexes du point de vue de la conformité, imposant ainsi des coûts supplémentaires aux entreprises et aux consommateurs. À titre d’exemple, la notion de «plateforme en ligne» est définie dans la proposition; ce concept n’est pas défini mais utilisé dans le règlement (2019/1150) relatif aux relations de plateforme à entreprise; la directive [(UE) 2019/790] sur le droit d’auteur dans le marché unique numérique emploie le terme «fournisseur de services de partage de contenus en ligne»; et la proposition de législation sur les marchés numériques évoque les «contrôleurs d’accès» et les «services de plateforme essentiels».

3.10Avec l’essor des services numériques, les modèles commerciaux ont évolué et se complexifient et les distinctions entre les différents acteurs se brouillent. Compte tenu de l’évolution rapide du secteur, qui représente un défi pour les régulateurs, il est nécessaire de disposer de définitions claires. Le CESE recommande de définir plus clairement les plateformes, les utilisateurs ou les bénéficiaires (la proposition emploie les deux termes, mais le terme «bénéficiaires» est beaucoup plus fréquent), les consommateurs et les travailleurs de l’économie numérique.

3.11Dans la proposition actuelle, les règles relatives à la traçabilité des professionnels ne s’appliquent que «lorsqu’une plateforme en ligne permet aux consommateurs de conclure des contrats à distance avec des professionnels» (article 22). Une autre solution consiste à assimiler ces fournisseurs/plateformes qui permettent aux consommateurs de conclure des contrats à distance avec des professionnels à des «places de marché» et à préciser quelles règles s’appliquent à cette catégorie d’intermédiaires.

3.12L’élaboration de codes de conduite conformément aux articles 35 et 36 devrait suivre une approche ouverte et participative. Les organisations représentant les utilisateurs et les destinataires, les organisations de la société civile, les partenaires sociaux et les autorités compétentes devraient y être associés.

3.13Le CESE pointe du doigt les nombreuses lacunes concernant le principe du pays d’origine, et demande que l’on se penche attentivement sur l’emploi d’autres méthodes, par exemple le principe du pays de destination, en particulier pour les questions liées à la fiscalité, au travail et aux consommateurs, sauf s’il existe une réglementation plus stricte au niveau de l’UE, afin de garantir une concurrence loyale et le niveau le plus élevé possible de protection des consommateurs. Il convient de veiller à ce que les dispositions en matière de droit du travail qui s’appliquent aux travailleurs des plateformes soient les mêmes que celles en vigueur dans le pays où le service est fourni, sachant que de mauvaises conditions de travail des salariés apparaissent désormais comme un sérieux obstacle à une concurrence loyale. L’objectif général est de renforcer le marché intérieur et d’en faire appliquer les règles en garantissant des conditions de concurrence équitables pour tous les acteurs.

3.14En outre, le système prévu aux articles 8 et 9 de la proposition ne devrait pas être considéré comme une alternative à la reconnaissance et à l’exécution des décisions, et il convient de préciser que les règles relatives au refus de reconnaissance et au refus d’exécution demeurent valables et applicables.

3.15Le CESE se félicite de la précision selon laquelle les enquêtes d’initiative propre n’affectent pas l’applicabilité des sphères de sécurité (article 6) et du maintien du principe général de l’absence d’obligation de surveiller (article 7). Ces règles ne devraient toutefois pas avoir d’incidence sur l’obligation des plateformes en ligne d’effectuer des contrôles réguliers sur les professionnels et sur les produits et services proposés prévue à l’article 22.

3.16La première phrase de l’article 12, paragraphe 1, devrait être clarifiée; il convient de préciser si la disposition couvre des informations telles que des données techniques fournies à un vendeur de logiciels dans le cadre d’un accord SaaS («logiciel en tant que service»).

3.17Le CESE se félicite de la réglementation détaillée de la procédure de notification et de traitement interne des réclamations, ainsi que des garanties instaurées par la proposition. Toutefois, le CESE estime qu’une sphère de sécurité (article 5) ne devrait être exclue que lorsque le contenu est manifestement illicite en vertu du droit national du pays d’origine ou d’une loi européenne d’applicabilité directe, ou qu’il a été reconnu comme illégal par une décision de justice. Sans cela, les intermédiaires seront incités à supprimer des contenus par défaut. L’appréciation juridique de certains types de contenus peut être très complexe et les intermédiaires ne devraient pas être tenus pour responsables s’ils ne les ont pas supprimés. Cela est conforme à l’obligation de suspension établie à l’article 20, qui concerne les contenus manifestement illicites.

3.18La création de services numériques repose essentiellement sur la capacité de gérer des données et d’y accéder. À cet égard, il est important de rappeler l’acte sur la gouvernance des données [COM(2020) 767 final], qui évoque la possibilité de créer des «coopératives de gestion et d’échange de données», un instrument favorisant les petites entreprises, les entreprises et les entrepreneurs individuels qui pourraient ne pas être en mesure d’accéder à de grandes quantités de données ou de les traiter individuellement. Ces structures pourraient fournir une gouvernance participative partagée pour la gestion des services d’intermédiation, d’échange ou de partage de données entre entreprises et entre entreprises et entrepreneurs, qui pourraient fournir des données, mais aussi en tirer profit et les utiliser.

4.Stratégie de mise en œuvre – faire avancer la situation

4.1Il est indiqué que le rapport d’analyse d’impact a clarifié les liens entre la législation sur les services numériques et le cadre réglementaire plus large, en présentant des descriptions plus précises des options politiques et une analyse plus détaillée des données sous-jacentes prises en considération dans le rapport d’analyse d’impact révisé. Ce point est essentiel, mais cela ne signifie pas que la société ne s’inquiétera plus en raison de toutes les variables qui sont en jeu; elle continuera à faire preuve de prudence. L’importance des services numériques dans notre économie et notre société, mais aussi les risques croissants qu’ils comportent, continueront de croître.

4.2En ce qui concerne la valeur ajoutée apportée par l’application des mesures, l’initiative génère des gains d’efficacité substantiels dans la coopération entre les États membres et met en commun certaines ressources pour l’assistance technique au niveau de l’UE en ce qui concerne l’inspection et l’audit des dispositifs de modération des contenus, les systèmes de recommandation et la publicité en ligne sur les très grandes plateformes en ligne. Cela rendra les mesures d’exécution et de surveillance plus efficaces étant donné que le système actuel repose dans une large mesure sur la capacité limitée de surveillance dans un petit nombre d’États membres. Toutefois, des améliorations doivent être portées à la proposition afin de garantir l’efficacité et la célérité de l’application des règles et des recours pour les consommateurs. La législation sur les services numériques doit prévoir des recours pour les consommateurs, y compris une indemnisation des dommages subis, lorsque les entreprises manquent aux obligations que celle-ci leur impose.

4.3Il est indiqué que la Commission établira un cadre global pour le suivi continu des résultats et des incidences de cet instrument législatif à compter de la date de son application. Sur la base du programme de suivi établi, une évaluation de l’instrument est envisagée dans les cinq ans suivant son entrée en vigueur. Le CESE estime qu’il ne s’agit pas d’un délai raisonnable qui inspirera confiance au marché et aux citoyens et garantira la cohérence avec la révision de la directive sur le commerce électronique. La Commission devrait prévoir une évaluation régulière tous les deux ans.

4.4Les règles devraient faire l’objet d’une communication efficace et ne devraient pas ternir l’image de l’UE. La protection des citoyens et des consommateurs de l’UE devrait constituer à l’avenir l’un des principaux axes de la communication et de la mise en application des règles. L’UE est, et doit rester, un lieu d’accueil pour les entreprises, les travailleurs et les citoyens, y compris en dehors de l’UE. Le règlement ne doit pas être perçu comme une charge ou un obstacle, mais plutôt comme porteur d’une approche équilibrée visant à réglementer l’internet au 21e siècle, en établissant la norme à suivre pour une économie numérique meilleure et plus juste, un espace en ligne plus sûr et la préservation de démocraties dynamiques.

5.Droits fondamentaux

5.1Les droits des travailleurs, la garantie d’un niveau élevé de protection des consommateurs, de la vie privée et des données personnelles, et les libertés fondamentales telles que la liberté d’entreprise et de prestation de services ainsi que la liberté d’expression, de pensée et d’opinion doivent être dûment protégés, conformément à la législation et à la charte des droits fondamentaux. La proposition devrait viser à trouver un juste équilibre à cet égard.

5.2L’équité procédurale constitue un aspect important de la proposition. Toutefois, cela peut ne pas suffire à garantir une équité réelle et effective si les incitations ne sont pas dûment alignées. Un concept large de contenu illicite ou, comme certains l’ont proposé, de «contenu préjudiciable» peut aboutir à restreindre la liberté d’expression et d’opinion.

5.3La dignité humaine est garantie par des règles solides et claires visant à protéger les citoyens et les consommateurs. Ces aspects jouent un rôle important dans la proposition et devraient être préservés.

5.4Le cadre proposé par la législation sur les services numériques fournit aux autorités les outils nécessaires pour prévenir et surveiller la manipulation, le risque de discrimination et d’autres abus, et pour pouvoir y réagir. Le CESE estime que l’UE et ses États membres doivent investir des ressources considérables et veiller à ce que celles-ci soient mobilisées au profit de la société dans son ensemble.

5.5Afin d’atténuer le risque de discrimination, le CESE demande instamment à l’UE et à ses États membres d’investir des ressources qui devront être suffisantes afin de contrôler et de surveiller les algorithmes utilisés par les plateformes. Il salue l’accès renforcé aux données et aux algorithmes, et il recommande que celui-ci soit garanti aux pouvoirs publics à tous les niveaux ainsi qu’aux chercheurs indépendants agréés, issus notamment d’organisations de la société civile indépendantes qui œuvrent pour l’intérêt général.

Bruxelles, le 27 avril 2021.

Christa SCHWENG

Présidente du Comité économique et social européen

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