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Document 62006CJ0045

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 8 mars 2007.
Campina GmbH & Co. contre Hauptzollamt Frankfurt (Oder).
Demande de décision préjudicielle: Finanzgericht des Landes Brandenburg - Allemagne.
Lait et produits laitiers - Prélèvement supplémentaire - Dépassement minime du délai de communication du relevé des décomptes - Sanction pécuniaire - Règlement (CEE) nº 536/93, tel que modifié par le règlement (CE) nº 1001/98 - Article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa - Règlement (CE) nº 1392/2001 - Article 5, paragraphe 3 - Règlement (CE, Euratom) nº 2988/95 - Article 2, paragraphe 2, seconde phrase - Principe de l'application rétroactive de la peine plus légère.
Affaire C-45/06.

Recueil de jurisprudence 2007 I-02089

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2007:154

Affaire C-45/06

Campina GmbH & Co., anciennement TUFFI Campina emzett GmbH

contre

Hauptzollamt Frankfurt (Oder)

(demande de décision préjudicielle, introduite par

le Finanzgericht des Landes Brandenburg)

«Lait et produits laitiers — Prélèvement supplémentaire — Dépassement minime du délai de communication du relevé des décomptes — Sanction pécuniaire — Règlement (CEE) nº 536/93, tel que modifié par le règlement (CE) nº 1001/98 — Article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa — Règlement (CE) nº 1392/2001 — Article 5, paragraphe 3 — Règlement (CE, Euratom) nº 2988/95 — Article 2, paragraphe 2, seconde phrase — Principe de l'application rétroactive de la peine plus légère»

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 8 mars 2007 

Sommaire de l'arrêt

1.     Droit communautaire — Principes — Principe de l'application rétroactive de la peine plus légère

2.     Agriculture — Organisation commune des marchés — Lait et produits laitiers — Prélèvement supplémentaire sur le lait

(Règlements de la Commission nº 536/93, tel que modifié par le règlement nº 1001/98, art. 3, § 2, al. 2, et nº 1392/2001, art. 5, § 3),

1.     Le principe de l'application rétroactive de la peine plus légère doit être respecté par le juge national lorsqu'il a à sanctionner un comportement non conforme aux prescriptions édictées par la réglementation communautaire.

(cf. point 40 et disp.)

2.     S'agissant d'un dépassement minime du délai de communication du relevé des décomptes imparti aux acheteurs, tel qu'un jour ouvrable, le régime des sanctions pécuniaires prévu à l'article 5, paragraphe 3, du règlement nº 1392/2001, portant modalités d'application du prélèvement supplémentaire sur le lait, est moins sévère que celui prévu à l'article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa, premier tiret, du règlement nº 536/93, fixant les modalités d'application dudit prélèvement, tel que modifié par le règlement nº 1001/98.

(cf. point 40 et disp.)




ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

8 mars 2007 (*)

«Lait et produits laitiers – Prélèvement supplémentaire – Dépassement minime du délai de communication du relevé des décomptes – Sanction pécuniaire – Règlement (CEE) nº 536/93, tel que modifié par le règlement (CE) nº 1001/98 – Article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa –Règlement (CE) nº 1392/2001 – Article 5, paragraphe 3 – Règlement (CE, Euratom) n° 2988/95 – Article 2, paragraphe 2, seconde phrase – Principe de l’application rétroactive de la peine plus légère»

Dans l’affaire C-45/06,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Finanzgericht des Landes Brandenburg (Allemagne), par décision du 9 novembre 2005, parvenue à la Cour le 30 janvier 2006, dans la procédure

Campina GmbH & Co., anciennement TUFFI Campina emzett GmbH

contre

Hauptzollamt Frankfurt (Oder),

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. R. Schintgen, président de chambre, MM. M. Ilešič (rapporteur) et E. Levits, juges,

avocat général: M. P. Mengozzi,

greffier: M. R. Grass,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées:

–       pour le gouvernement grec, par M. G. Kanellopoulos et Mme S. Papaioannou, en qualité d’agents,

–       pour la Commission des Communautés européennes, par M. J. Schieferer et Mme C. Cattabriga, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1       La demande de décision préjudicielle porte sur la proportionnalité de l’article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement (CEE) nº 536/93 de la Commission, du 9 mars 1993, fixant les modalités d’application du prélèvement supplémentaire dans le secteur du lait et des produits laitiers (JO L 57, p. 12), tel que modifié par le règlement (CE) n° 1001/98 de la Commission, du 13 mai 1998 (JO L 142, p. 22, ci‑après le «règlement n° 536/93»).

2       Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Campina GmbH & Co., anciennement TUFFI Campina emzett GmbH (ci-après «Campina»), ayant cause à titre universel de l’entreprise de transformation et des achats de lait Meierei-Zentrale GmbH (ci-après «MZ»), au Hauptzollamt Frankfurt (Oder) au sujet d’un dépassement minime du délai de communication du relevé des décomptes (ci-après la «communication»).

 Le cadre juridique communautaire

3       L’article 3, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement nº 536/93 dispose:

«Avant le 15 mai de chaque année, l’acheteur communique à l’autorité compétente de l’État membre le relevé des décomptes établis pour chaque producteur ou, le cas échéant, selon la décision de l’État membre, le volume total, le volume corrigé conformément à l’article 2 paragraphe 2 et la teneur moyenne en matière grasse du lait et/ou de l’équivalent-lait qui lui a été livré par des producteurs, ainsi que la somme des quantités de référence individuelles et la teneur représentative moyenne en matière grasse dont disposent ces producteurs.»

4       L’article 3, paragraphe 2, second alinéa, du règlement nº 536/93, dans sa version initiale, énonçait:

«En cas de non-respect du délai, l’acheteur est redevable d’une pénalité égale au montant du prélèvement dû pour un dépassement correspondant à 0,1 % des quantités de lait et d’équivalent-lait qui lui ont été livrées par des producteurs. Cette pénalité ne peut être supérieure à 20 000 écus.»

5       Cette dernière disposition a été déclarée disproportionnée par l’arrêt de la Cour du 6 juillet 2000, Molkereigenossenschaft Wiedergeltingen (C‑356/97, Rec. p. I-5461).

6       Dans l’intervalle, la Commission des Communautés européennes a adopté le règlement nº 1001/98. L’article 1er de celui-ci prévoit:

«L’article 3, paragraphe 2, second alinéa, du règlement (CEE) n° 536/93 est remplacé par le texte suivant:

‘En cas de non-respect du délai, l’acheteur est redevable d’une pénalité calculée comme suit:

–       si la communication visée au premier alinéa est faite avant le premier juin, la pénalité est égale au montant du prélèvement dû pour un dépassement correspondant à 0,1 % des quantités de lait et d’équivalent-lait qui lui ont été livrées par des producteurs. Cette pénalité ne peut être inférieure à 500 écus ni supérieure à 20 000 écus,

[…]’»

7       L’article 5 du règlement (CE) nº 1392/2001 de la Commission, du 9 juillet 2001, portant modalités d’application du règlement (CEE) n° 3950/92 du Conseil établissant un prélèvement supplémentaire dans le secteur du lait et des produits laitiers (JO L 187, p. 19), énonce:

«[…]

3. […] [s]i l’acheteur ne respecte pas le délai visé au paragraphe 2, il est redevable d’un montant égal au prélèvement dû pour un dépassement correspondant à 0,01 % par jour de calendrier de retard, des quantités de lait et d’équivalent-lait qui lui ont été livrées par les producteurs. […] Ce montant ne peut être inférieur à 100 euros ni supérieur à 100 000 euros.

[…]»

8       L’article 2, paragraphe 2, seconde phrase, du règlement (CE, Euratom) n° 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (JO L 312, p. 1), prévoit:

«En cas de modification ultérieure des dispositions portant sanctions administratives et contenues dans une réglementation communautaire, les dispositions moins sévères s’appliquent rétroactivement.»

 Le litige au principal et la question préjudicielle

9       MZ a présenté, par formulaire signé le 17 mai 1999 et parvenu le même jour au Hauptzollamt Cottbus (ci-après le «HZA»), la communication relative aux quantités de lait qui lui avaient été livrées par les producteurs au cours de l’exercice 1998-1999.

10     Le verso de ce formulaire porte la mention que cette communication doit être parvenue au HZA le 14 mai au plus tard. Ayant reçu ladite communication avec un retard de trois jours, le HZA, se fondant sur l’article 3, paragraphe 2, second alinéa, du règlement n° 536/93, a décidé que le dépassement du délai ainsi imparti appelait l’imposition d’une pénalité d’un montant égal à celui du prélèvement dû pour un dépassement correspondant à 0,1 % des quantités de lait et d’équivalent-lait livrées par les producteurs. Sur la base des indications fournies par MZ relatives à la quantité de lait livrée et compte tenu du plafond de 20 000 écus, la pénalité infligée s’élevait donc à 39 116,60 DEM.

11     MZ a introduit une réclamation contre cette décision ainsi qu’une demande de sursis à l’exécution de celle-ci. MZ a soutenu que le collaborateur auquel elle avait confié la préparation ainsi que l’expédition des communications était, le 14 mai 1999, surchargé de travail parce qu’il devait également respecter d’autres délais importants. Étant donné que le 14 mai 1999 était un vendredi, la communication aurait été remise au HZA le jour ouvrable suivant, c’est-à-dire le lundi 17 mai 1999.

12     Dès lors, selon MZ, même si le HZA n’a pas reçu la communication à la date prévue, le dépassement serait minime, car le HZA ne pouvait la traiter au plus tôt que le 17 mai 1999 et, par conséquent, le dépassement n’aurait eu aucune conséquence. MZ en a conclu que la pénalité qui lui avait été infligée était disproportionnée par rapport au dépassement constaté.

13     Après avoir refusé de faire droit au sursis à l’exécution de sa décision le HZA a suspendu la procédure de réclamation jusqu’à ce que la Cour de justice des Communautés européennes se prononce sur l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Molkereigenossenschaft Wiedergeltingen, précité.

14     Puis, le HZA a, par décision du 4 juillet 2001, rejeté la réclamation de MZ comme dépourvue de fondement. Se fondant sur l’article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement nº 536/93, le HZA a souligné, d’une part, que, au sens de cette disposition, la pénalité a été, pour les communications faites après le 14 mai 1999 et avant le 1er juin de la même année, égale à 0,1 % des quantités de lait et d’équivalent‑lait livrées par les producteurs, sans toutefois que cette pénalité ne puisse être inférieure à 500 écus ou supérieure à 20 000 écus et, d’autre part, que la faute éventuelle de MZ n’était pas un critère pertinent, d’après les termes dudit règlement.

15     Campina a introduit un recours en annulation contre cette décision.

16     S’agissant de l’argumentation du HZA fondée sur l’article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement nº 536/93, Campina a soutenu que ce règlement est invalide et donc privé d’effet en tant qu’il n’a pas prévu un mécanisme pour tenir compte de l’étendue du dépassement et de la faute de l’entreprise concernée lorsqu’une pénalité au sens dudit règlement est infligée. Or, ce serait précisément ce que la Cour, dans son arrêt Molkereigenossenschaft Wiedergeltingen, précité, aurait critiqué dans la version initiale de cette disposition.

17     Le Hauptzollamt Frankfurt (Oder) a conclu au rejet de ce recours, soutenant que l’article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement nº 536/93 prend déjà suffisamment en compte la durée du dépassement par l’échelonnement des pénalités en fonction de la durée du dépassement. Il a précisé que le texte de ce règlement ne s’attache pas aux critères de la faute ou du préjudice objectif.

18     La juridiction de renvoi estime que le régime des sanctions pécuniaires prévu à l’article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 536/93 est disproportionné, en tant qu’il n’apporte, en cas de retard minime, aucune amélioration à la situation de l’acheteur de lait par rapport à celui résultant de l’article 3, paragraphe 2, second alinéa, du règlement n° 536/93, dans sa version initiale, qui a été déclaré invalide par la Cour dans l’arrêt Molkereigenossenschaft Wiedergeltingen, précité.

19     Elle précise qu’au moins la période du 15 mai au 1er juin est trop étendue et produit des effets disproportionnés en tant qu’elle aboutit à infliger une sanction pécuniaire au taux plein même pour des dépassements qui n’excédent pas un jour ouvrable, comme c’est le cas en l’espèce, et qui n’ont eu aucun effet apparent sur le paiement du prélèvement supplémentaire que l’acheteur doit effectuer avant le 1er septembre en vertu de l’article 3, paragraphe 4, du règlement nº 536/93. Elle ajoute que, en outre, la laiterie en cause n’a aucun prélèvement supplémentaire à acquitter.

20     Enfin, la juridiction de renvoi constate que la sanction pécuniaire ne tient pas compte de la question de savoir si le dépôt tardif de la communication a eu une incidence sur la procédure administrative, en particulier sur le paiement au 1er septembre. À cet égard, elle précise que la Cour a déjà souligné qu’un dépassement minime du délai du 15 mai ne mettrait pas en péril le versement du prélèvement supplémentaire avant le 1er septembre (voir arrêt Molkereigenossenschaft Wiedergeltingen, précité, point 41).

21     Dans ces conditions, le Finanzgericht des Landes Brandenburg a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«Le régime des pénalités prévu à l’article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement [n° 536/93] est-il contraire au principe de proportionnalité lorsqu’il n’y a qu’un dépassement minime du délai, qui n’a en outre eu aucun effet sensible?»

 Sur la question préjudicielle

 Observations soumises à la Cour

22     Le gouvernement grec soutient que le respect du délai du 15 mai est, dans l’affaire au principal, nécessaire pour le bon fonctionnement du système du prélèvement supplémentaire ainsi que de l’organisation commune du marché du lait et des produits laitiers, parce que le calcul de ce prélèvement est mis en péril par le retard dans la communication des données visées à l’article 3, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement nº 536/93.

23     Ce même gouvernement précise que les sanctions pécuniaires prévues à l’article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 536/93 varient en fonction de l’importance du retard et de la gravité de l’infraction, ce qui permet, d’une part, d’inciter les acheteurs de lait à respecter le délai du 15 mai et, d’autre part, d’éviter que les laiteries qui ne sont pas soumises au prélèvement supplémentaire ne respectent pas ce délai. Enfin, le créneau de quinze jours environ prévu à l’article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement nº 536/93 n’apparaîtrait pas audit gouvernement comme une mesure manifestement impropre à la réalisation du but poursuivi.

24     Selon la Commission, il conviendrait, conformément au principe de l’application rétroactive de la sanction pécuniaire qui sanctionne de la manière la moins sévère la violation en cause au principal, d’appliquer le règlement n° 1392/2001.

25     Elle souligne que ce règlement a, d’une part, fixé le pourcentage à 0,01 % par jour calendrier de retard contre 0,1 % prévu par le règlement n° 536/93 et, d’autre part, diminué la pénalité minimale à 100 euros. Selon elle, l’applicabilité du règlement n° 1392/2001 ne pourrait être affectée par le fait que la sanction pécuniaire fondée sur le règlement n° 536/93 avait déjà été infligée à la partie requérante au principal, car la décision au principal infligeant cette sanction aurait été attaquée. Dès lors, la sanction ainsi prononcée ne constituerait pas une situation juridique déjà acquise.

26     En ce qui concerne le principe de proportionnalité au regard des dispositions de l’article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement nº 536/93, la Commission rappelle le large pouvoir d’appréciation dont elle dispose en matière de politique agricole.

27     En vertu de ce pouvoir, elle n’aurait pas été tenue de prévoir un échelonnement quotidien du montant de la sanction pécuniaire et pouvait, par conséquent, adopter le régime en cause au principal, sur le fondement duquel les acheteurs qui n’avaient pas respecté le délai du 15 mai auraient ainsi été incités à effectuer la communication avant le début de la période qui suivait, afin d’éviter une sanction plus élevée. En ayant choisi de retenir un créneau de quinze jours environ pour chaque phase de dépassement du délai de cette communication, la Commission considère ne pas avoir manifestement excédé les limites de son pouvoir d’appréciation.

28     En outre, la condamnation à une sanction pécuniaire sur le fondement de l’article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement nº 536/93 n’irait pas au-delà de ce qui est nécessaire et approprié pour atteindre l’objectif visé, à savoir inciter les acheteurs à transmettre la communication en temps utile.

29     Enfin, la Commission soutient que tout dépassement du délai par les acheteurs entraîne une réduction du délai dont disposent les autorités nationales compétentes pour calculer le montant du prélèvement supplémentaire et représente donc un risque pour le bon fonctionnement de ce régime. Partant, une obligation de prouver si le dépassement du délai a eu une incidence sur la procédure administrative aurait mis en péril l’effet dissuasif et l’efficacité des sanctions pécuniaires.

 Réponse de la Cour

30     Dans le cadre de la procédure de coopération entre les juridictions nationales et la Cour instituée à l’article 234 CE, il appartient à celle‑ci de donner au juge national une réponse utile qui lui permette de trancher le litige dont il est saisi. Dans cette optique, il incombe, le cas échéant, à la Cour de reformuler les questions qui lui sont soumises (arrêt du 4 mai 2006, Haug, C-286/05, Rec. p. I-4121, point 17 et jurisprudence citée).

31     En outre, il convient de rappeler que la Cour a pour mission d’interpréter toutes les dispositions de droit communautaire dont les juridictions nationales ont besoin afin de statuer sur les litiges qui leur sont soumis, même si ces dispositions ne sont pas indiquées expressément dans les questions qui lui sont adressées par ces juridictions (arrêt du 11 décembre 1997, Immobiliare SIF, C-42/96, Rec. p. I-7089, point 28 et jurisprudence citée).

32     Il importe de relever que le principe de l’application rétroactive de la peine plus légère fait partie des traditions constitutionnelles communes aux États membres, de sorte qu’il doit être considéré comme un principe général de droit communautaire dont la Cour assure le respect et que le juge national est tenu d’observer (voir, en ce sens, arrêt du 3 mai 2005, Berlusconi e.a., C-387/02, C-391/02 et C-403/02, Rec. p. I-3565, points 67 à 69).

33     Ce principe trouve son expression plus particulièrement à l’article 2, paragraphe 2, seconde phrase, du règlement n° 2988/95, disposition selon laquelle il incombe aux autorités compétentes d’appliquer rétroactivement à un comportement les sanctions prévues par une réglementation sectorielle, au motif que celles-ci sont moins sévères (voir, en ce sens, arrêt du 1er juillet 2004, Gerken, C‑295/02, Rec. p. I‑6369, point 61).

34     Il ressort de la décision de renvoi que, dans l’affaire au principal, est en cause un dépassement minime du délai du 15 mai, puisque la communication est parvenue à l’autorité nationale compétente le premier jour ouvrable suivant.

35     Afin de fournir une réponse utile à la juridiction de renvoi, il convient, dès lors, de déterminer si, s’agissant d’une situation particulière, telle que celle en cause au principal caractérisée par un dépassement minime du délai du 15 mai, le règlement nº 1392/2001 doit être considéré comme prévoyant un régime des sanctions pécuniaires moins sévère que celui imposé par le règlement nº 536/93.

36     Or, aux termes de l’article 5, paragraphe 3, du règlement n° 1392/2001, la sanction pécuniaire pour le non-respect du délai du 15 mai, tel que celui en cause au principal, est, d’une part, fixée à un montant égal au prélèvement dû pour un dépassement correspondant à 0,01 % par jour de calendrier de retard, de la quantité de référence «ventes directes» dont l’acheteur dispose et, d’autre part, ce montant ne peut être inférieur à 100 euros ni supérieur à 100 000 euros.

37     En revanche, en vertu de l’article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa, premier tiret, du règlement n° 536/93, la sanction pécuniaire pour le non-respect du délai du 15 mai, tel que celui en cause au principal, d’une part, correspond à 0,1 % des quantités de lait et d’équivalent-lait qui ont été livrées à l’acheteur par des producteurs et, d’autre part, ladite sanction ne peut être inférieure à 500 écus ni supérieure à 20 000 écus.

38     Dès lors, force est de constater, ainsi que la Commission l’a fait remarquer à juste titre dans ses observations soumises à la Cour, que, s’agissant d’un dépassement minime du délai du 15 mai comme en l’occurrence, le régime des sanctions pécuniaires au titre de l’article 5, paragraphe 3, du règlement n° 1392/2001 est moins sévère que celui prévu à l’article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa, premier tiret, du règlement n° 536/93.

39     Compte tenu de l’interprétation qui précède, il n’y a pas lieu de statuer sur la proportionnalité du régime des sanctions pécuniaires prévu à l’article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 536/93.

40     Eu égard à tout ce qui précède, il convient de répondre à la question posée que

–       le principe de l’application rétroactive de la peine plus légère doit être respecté par le juge national lorsqu’il a à sanctionner un comportement non conforme aux prescriptions édictées par la réglementation communautaire;

–       s’agissant d’un dépassement minime du délai imparti tel que celui en cause au principal, le régime des sanctions pécuniaires prévu à l’article 5, paragraphe 3, du règlement n° 1392/2001 est moins sévère que celui prévu à l’article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa, premier tiret, du règlement n° 536/93.

 Sur les dépens

41     La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit:

Le principe de l’application rétroactive de la peine plus légère doit être respecté par le juge national lorsqu’il a à sanctionner un comportement non conforme aux prescriptions édictées par la réglementation communautaire.

S’agissant d’un dépassement minime du délai imparti tel que celui en cause au principal, le régime des sanctions pécuniaires prévu à l’article 5, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 1392/2001 de la Commission, du 9 juillet 2001, portant modalités d’application du règlement (CEE) n° 3950/92 du Conseil établissant un prélèvement supplémentaire dans le secteur du lait et des produits laitiers, est moins sévère que celui prévu à l’article 3, paragraphe 2, deuxième alinéa, premier tiret, du règlement (CEE) n° 536/93 de la Commission, du 9 mars 1993, fixant les modalités d’application du prélèvement supplémentaire dans le secteur du lait et des produits laitiers, tel que modifié par le règlement (CE) n° 1001/98 de la Commission, du 13 mai 1998.

Signatures


* Langue de procédure: l’allemand.

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