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Document 52024DC0081

    LIVRE BLANC Comment maîtriser les besoins de l’Europe en matière d’infrastructures numériques?

    COM/2024/81 final

    Bruxelles, le 21.2.2024

    COM(2024) 81 final

    LIVRE BLANC

    Comment maîtriser les besoins de l’Europe en matière d’infrastructures numériques?


    - Livre blanc –

    «Comment maîtriser les besoins de l’Europe en matière d’infrastructures numériques?»

    1.    INTRODUCTION    

    2.    TENDANCES ET DÉFIS DANS LE SECTEUR DES INFRASTRUCTURES NUMÉRIQUES    

    2.1.    Défis de l’Europe en matière d’infrastructures de connectivité    

    2.2.    Défis technologiques    

    2.3.    Défis à relever pour que les services de connectivité de l’UE atteignent une échelle suffisante    

    2.3.1.    Besoins d’investissement    

    2.3.2.    Situation financière du secteur des communications électroniques de l’UE    

    2.3.3.    Absence de marché unique    

    2.3.4.    Convergence et conditions de concurrence équitables    

    2.3.5.    Défis en matière de durabilité    

    2.4.    Nécessité d’assurer la sécurité d’approvisionnement et d’exploitation des réseaux    

    2.4.1.    Défi des fournisseurs de confiance    

    2.4.2.    Normes de sécurité pour la connectivité de bout en bout    

    2.4.3.    Infrastructures de câbles sous-marins sûres et résilientes    

    3.    MAÎTRISER LA TRANSITION VERS LES RÉSEAUX NUMÉRIQUES DE DEMAIN — QUESTIONS POLITIQUES ET SOLUTIONS POSSIBLES    

    3.1.    Pilier I: Création du «réseau 3C» — «Informatique collaborative connectée»    

    3.1.1.    Renforcement des capacités grâce à l’innovation ouverte et aux capacités technologiques    

    3.1.2.    Prochaines étapes    

    3.1.3.    Résumé des scénarios possibles    

    3.2.    Pilier II: réaliser le marché unique numérique    

    3.2.1.    Objectifs    

    3.2.2.    Champ d’application    

    3.2.3.    Autorisation    

    3.2.4.    Lever les obstacles à la centralisation des réseaux centraux    

    3.2.5.    Spectre radioélectrique    

    3.2.6.    Désactivation du réseau en cuivre    

    3.2.7.    Politique en matière d’accès dans un environnement intégralement fibré    

    3.2.8.    Service universel et caractère abordable des infrastructures numériques    

    3.2.9.    Durabilité    

    3.2.10.    Résumé des scénarios possibles    

    3.3.    Pilier III: Des infrastructures numériques sûres et résilientes pour l’Europe    

    3.3.1.    Des technologies quantiques et post-quantiques pour des communications sécurisées    

    3.3.2.    Vers des infrastructures de câbles sous-marins sûres et résilientes    

    3.3.3.    Résumé des scénarios possibles    

    4.    CONCLUSIONS    



    1.INTRODUCTION

    L’économie et la société numériques ne peuvent prospérer sans la mise en place d’infrastructures de réseaux numériques de pointe. La mise à disposition d’infrastructures numériques sûres et durables constitue l’un des quatre axes principaux du programme d’action de l’UE pour la décennie numérique à l’horizon 2030, dont l’actuelle Commission a fait l’une de ses priorités majeures. Ce type d’infrastructures suscitent également un vif intérêt de la part des citoyens, qui ont formulé plusieurs propositions concernant le domaine du numérique dans le cadre de la conférence sur l’avenir de l’Europe. Sans infrastructures de réseaux numériques avancées, l’utilisation de certaines applications deviendra difficile, et les consommateurs seront privés des avantages qu’offrent les technologies avancées. Ces infrastructures devront fonctionner au niveau de performance le plus élevé pour que, par exemple, les patients puissent téléconsulter leur médecin rapidement et en toute sécurité, que les drones soient en mesure d’améliorer les récoltes et de réduire l’utilisation d’eau et de pesticides, et que les capteurs de température et d’humidité connectés permettent de surveiller en temps réel les conditions dans lesquelles les aliments frais sont stockés et acheminés vers le consommateur.

    L’ensemble de l’économie regorge également d’exemples qui illustrent la manière dont les entreprises ont besoin d’infrastructures de calcul et de connectivité avancées permettant un traitement des données plus adapté à leurs activités et à leurs clients, pour utiliser ou fournir des applications et services innovants. Cela s’avère particulièrement important pour les applications qui nécessitent de traiter des données en temps réel, telles que les dispositifs de l’internet des objets (dispositifs IoT), les véhicules autonomes et les réseaux intelligents, ainsi que pour réduire le temps de latence des applications utilisées pour la maintenance prédictive, la surveillance en temps réel et l’automatisation, ce qui permet d’augmenter l’efficacité et la rentabilité des activités. Les infrastructures et services de réseaux numériques avancés deviendront un catalyseur essentiel pour les technologies et services numériques transformateurs tels que l’intelligence artificielle (IA), les mondes virtuels et le web 4.0, ainsi que pour relever les défis de société tels que ceux qui se posent dans les domaines de l’énergie, des transports ou des soins de santé, et pour soutenir l’innovation dans les industries créatives.

    La compétitivité future de tous les secteurs de l’économie européenne dépend de ces infrastructures et services de réseaux numériques avancés, car ceux-ci constituent la base d’une croissance du PIB mondial comprise entre 1 000 et 2 000 milliards d’euros 1 et de la double transition numérique et écologique de notre société et de notre économie. Selon de nombreuses sources, il existe un lien étroit entre le déploiement accru du haut débit fixe et mobile et le développement économique 2 . La demande de connectivité est essentielle pour stimuler l’économie. L’augmentation du débit des réseaux mobiles et l’apparition de nouvelles générations de ces réseaux ont un effet positif sur le PIB 3 . De même, il ressort de certaines études qu’une infrastructure de base résiliente fondée sur des câbles sous-marins sécurisés peut stimuler le PIB 4 . Compte tenu des tendances démographiques actuelles, la compétitivité européenne est tributaire des technologies permettant de dynamiser la productivité, et les infrastructures et services numériques sont essentiels à cet égard.

    Parallèlement, les réseaux numériques subissent actuellement une transformation à la faveur de laquelle les infrastructures de connectivité convergent avec les capacités de calcul en nuage et de périphérie. Pour tirer parti des avantages de cette transformation, le secteur des communications électroniques doit passer du marché traditionnel de l’internet pour les consommateurs aux services numériques dans des secteurs économiques clés, tels que l’internet industriel des objets (IIoT). En outre, le secteur des équipements connaît également d’importantes transformations technologiques liées à l’évolution vers des réseaux logiciels et en nuage et des architectures ouvertes. La convergence des écosystèmes informatiques et de communications électroniques ouvre des possibilités de services innovants et à moindre coût, mais elle comporte aussi de nouveaux risques de goulets d’étranglement et de dépendances en ce qui concerne les infrastructures et services en nuage, ainsi que les plateformes des principaux fabricants de semiconducteurs électroniques 5 . Pour garantir la sécurité économique, il est donc absolument capital que l’innovation dans ce domaine continue d’être stimulée dans l’Union et menée par son industrie. Pour y parvenir, dans le contexte géopolitique actuel, l’Union doit miser sur sa force actuelle sur le marché de l’approvisionnement en équipements de réseau, compte tenu du fait que deux des trois fournisseurs mondiaux sont européens.

    D’un point de vue sociétal, il est indispensable qu’une connectivité de haute qualité, fiable et sécurisée soit disponible pour tous et partout dans l’Union, y compris en zones rurales et dans les régions éloignées 6 . Des investissements massifs sont nécessaires 7 . Pour veiller à ce que l’Europe dispose des infrastructures de calcul et de communication avancées et sécurisées dont elle a besoin, il faut qu’elle se dote d’un cadre réglementaire moderne qui encourage la transition des réseaux en cuivre historiques vers des réseaux en fibre optique, le développement des réseaux 5G et autres réseaux sans fil et des infrastructures en nuage, ainsi que l’expansion des opérateurs au sein du marché unique, et qui tienne compte des technologies émergentes telles que la communication quantique. Sans cela, l’UE risque de ne pas atteindre les cibles numériques qu’elle a fixées pour 2030 et de prendre du retard par rapport à d’autres régions de premier plan en ce qui concerne la compétitivité et la croissance économique et leurs avantages pour les utilisateurs.

    Enfin, les récentes évolutions géopolitiques ont mis en évidence l’importance de la sécurité et de la résilience des infrastructures face aux risques, qu’ils soient d’origine naturelle ou anthropique, ainsi que le rôle complémentaire des solutions de connectivité terrestre, satellitaire et sous-marine, pour garantir la disponibilité ininterrompue des services en toutes circonstances. Compte tenu de l’évolution rapide de la situation en matière de sécurité, il est essentiel, pour la sécurité économique de l’UE, d’adopter une approche stratégique à l’échelle de l’Union en matière de sécurité et de résilience des infrastructures numériques critiques, en s’appuyant sur le cadre législatif robuste en vigueur, et notamment la directive SRI 2 8 , la directive sur la résilience des entités critiques 9 et la recommandation du Conseil relative à une approche coordonnée à l’échelle de l’Union pour renforcer la résilience des infrastructures critiques 10 11 .

    C’est dans ce contexte que le présent livre blanc recense les défis à relever et examine les scénarios possibles pour mener des actions de politique publique, telles qu’une éventuelle future législation sur les réseaux numériques, qui visent à encourager la mise en place des réseaux numériques du futur, à maîtriser la transition vers de nouvelles technologies et de nouveaux modèles d’entreprise, à répondre aux besoins futurs de connectivité de tous les utilisateurs finals, à soutenir la compétitivité de notre économie et à garantir la sécurité et la résilience des infrastructures ainsi que la sécurité économique de l’Union, comme en témoignent les engagements conjoints pris par les États membres de l’UE dans le cadre du programme d’action pour la décennie numérique 12 .

    2.TENDANCES ET DÉFIS DANS LE SECTEUR DES INFRASTRUCTURES NUMÉRIQUES

    2.1.Défis de l’Europe en matière d’infrastructures de connectivité

    Les infrastructures de connectivité de l’Union ne sont pas encore en mesure de relever les défis actuels et futurs de la société et de l’économie fondées sur les données ni de répondre aux futurs besoins de tous les utilisateurs finals.

    Du côté de l’offre, le rapport de 2023 sur l’état d’avancement de la décennie numérique 13 fait notamment état d’une couverture limitée en fibre optique (56 % de l’ensemble des ménages et 41 % des ménages en zones rurales) 14 et de retards dans le déploiement des réseaux 5G autonomes dans l’UE. Les tendances actuelles concernant les trajectoires pour la réalisation des cibles en matière d’infrastructures numériques fixées dans le programme d’action pour la décennie numérique à l’horizon 2030 15 sont préoccupantes. Pour ce qui est de la fibre optique, il semble peu probable qu’une couverture de plus de 80 % sera atteinte d’ici à 2028, ce qui remet en question la réalisation de l’objectif de 100 % fixé pour 2030. Le pourcentage de couverture en fibre optique dans l’UE en 2022 s’élevait à 56 %; aux États-Unis, qui ont traditionnellement recours au câble, il était de 48,8 %, tandis qu’au Japon comme en Corée du Sud, il atteignait 99,7 % 16 , en raison de stratégies claires en faveur de la fibre optique.

    Pour ce qui est du déploiement de la 5G, les chiffres de la couverture de base par la 5G s’élèvent actuellement à 81 % de la population dans l’UE (contre seulement 51 % de la population en zones rurales), mais ils ne reflètent pas la réalité en ce qui concerne les performances améliorées de la 5G. Le plus souvent, lorsque la 5G est déployée, elle n’est pas «autonome», c’est-à-dire que le réseau sur lequel elle est fournie n’est pas distinct des réseaux de générations précédentes. Les perspectives de déploiement de réseaux 5G autonomes garantissant une fiabilité élevée et un faible temps de latence, deux éléments essentiels pour que cette technologie puisse se prêter à des cas d’utilisation industriels, ne sont pas bonnes. On peut estimer que ces réseaux ont été déployés dans bien moins de 20 % des zones habitées de l’UE. Bien que des progrès aient été accomplis en ce qui concerne les essais de premières phases, les opérateurs n’ont lancé cette architecture que dans un petit nombre d’États membres et uniquement dans certaines zones urbaines 17 . Ce déploiement limité pourrait être lié, entre autres, au stade précoce auquel se trouve le déploiement de la bande de 3,6 GHz. La couverture par la 5G dans cette bande moyenne, nécessaire pour augmenter le débit et la capacité, ne concerne actuellement que 41 % de la population. La 5G devra toutefois être déployée au-delà des zones habitées, afin de permettre la fourniture de services avancés, tels que l’agriculture de précision. En outre, si la couverture de base par la 5G dans les États membres les plus grands est relativement similaire à celle des États-Unis, d’autres régions du monde telles que la Corée du Sud et la Chine sont mieux préparées au déploiement de réseaux 5G autonomes. Selon le tableau de bord international de l’observatoire européen de la 5G, la Corée du Sud a déployé plus de cinq fois le nombre de stations de base 5G pour 100 000 habitants que l’UE, et la Chine l’a presque triplé 18 .

    Enfin, le haut débit par satellite permet de proposer des services à haut débit fournissant des débits descendants allant jusqu’à 100 Mbps en zones très rurales et dans des régions très éloignées, où aucun réseau à très haute capacité n’est disponible, même si l’accessibilité financière demeure essentielle pour faciliter l’adoption de cette technologie dans ces zones. Des services d’urgence résilients peuvent également être fournis en cas de catastrophe ou de crise. Cependant, si les services par satellite peuvent permettre de combler la fracture numérique, ils ne sont actuellement pas en mesure de remplacer les performances des réseaux terrestres.

    Dans l’ensemble, abstraction faite de la densité de population et de la qualité de la connectivité, l’UE dispose d’une couverture fixe et mobile similaire à celle des États-Unis, mais elle accuse un retard considérable par rapport à d’autres régions du monde, en particulier en ce qui concerne la couverture en fibre optique et les réseaux 5G autonomes. Toutefois, il importe davantage de savoir quelles zones restent encore à couvrir et, surtout, si l’UE est en mesure d’atteindre ses objectifs pour la décennie numérique en matière de couverture universelle en fibre optique et par la 5G. À cet égard, l’adoption de services à haut débit revêt une importance capitale, car elle a une incidence sur la capacité du secteur à investir. Du côté de la demande, le taux d’adoption du haut débit d’au moins 1 Gbps est très faible (14 % en 2022 au niveau de l’UE), et le haut débit d’au moins 100 Mbps a été adopté par à peine plus de la moitié des ménages européens (55 %). La souscription à des abonnements à haut débit fixe est moins répandue dans l’UE qu’aux États-Unis, en Corée du Sud ou au Japon 19 . L’adoption du haut débit mobile standard est plus répandue et se situe à 87 %, malgré une couverture presque universelle par des réseaux 4G au minimum.

    Ces retards constituent une vulnérabilité critique pour l’ensemble de l’économie européenne, étant donné que la fourniture de services de données avancés et d’applications fondées sur l’IA dépend de ces technologies. Il en va de même pour le déploiement d’infrastructures d’informatique de périphérie, un autre catalyseur essentiel pour les applications et capacités de calcul critiques soumises à des contraintes temporelles en lien avec des cas d’utilisation à forte intensité de données en temps réel et l’IoT. Il existe une forte corrélation entre le déploiement de réseaux numériques capables de fournir ces services et l’adoption de technologies modernes, qui ne se développent actuellement pas à grande échelle. Conformément aux objectifs fixés dans le programme d’action pour la décennie numérique, 10 000 nœuds périphériques hautement sécurisés et neutres pour le climat devront être déployés d’ici à 2030 et les entreprises européennes devront adopter des éléments de technologies numériques, tels que les services d’informatique en nuage, les mégadonnées et l’intelligence artificielle. Le rapport de 2023 sur l’état d’avancement de la décennie numérique a mis en évidence les risques qui pèsent sur la réalisation de ces objectifs. L’informatique de périphérie n’en est encore qu’à ses balbutiements en Europe 20 . Il ressort des premières données collectées par l’Edge Observatory 21 que l’Europe est sur la bonne voie en ce qui concerne la phase initiale du déploiement des nœuds périphériques. Compte tenu des tendances actuelles, et en l’absence de nouveaux investissements et incitations, il est toutefois peu probable que les objectifs soient atteints d’ici à 2030.

    Des réseaux numériques modernes ayant un potentiel d’expansion et susceptibles de parvenir au stade de la maturité stimuleraient le développement de nouveaux cas d’utilisation et créeraient ainsi des débouchés commerciaux contribuant à la transformation numérique de l’Europe. Ne pas réussir à atteindre les cibles en matière d’infrastructures numériques pour la décennie numérique aurait des conséquences considérables qui ne se limiteraient pas au secteur du numérique, et se traduiraient par des occasions manquées dans des domaines d’innovation tels que la conduite automatisée, la fabrication intelligente et les soins de santé personnalisés.

    2.2.Défis technologiques

    Les évolutions technologiques concernant l’économie des applis, l’IoT, l’analyse des données, l’IA ou les nouvelles formes de fourniture de contenus, telles que la diffusion vidéo en continu de haute qualité, favorisent l’apparition de nouveaux modèles commerciaux et des marchés totalement nouveaux. Ces applications nécessitent une augmentation continue et exponentielle des capacités de traitement, de stockage et de transmission des données. La capacité de traiter et de transférer de grandes quantités de données sur l’ensemble de l’internet à l’échelle mondiale a abouti au stockage et au traitement à distance de données dans le nuage, entre le nuage et l’utilisateur final par l’intermédiaire de réseaux de diffusion de contenu, et à proximité de l’utilisateur final (informatique de périphérie). Cela a mené à la virtualisation des fonctions des réseaux de communications électroniques dans les logiciels et à un transfert de ces fonctions vers le nuage ou la périphérie 22 .

    Ce nouveau modèle de fourniture de réseaux et de services repose non seulement sur des équipements de communications électroniques et des fournisseurs de réseaux et de services traditionnels, mais aussi sur un écosystème complexe constitué, entre autres, de fournisseurs d’informatique en nuage, d’informatique de périphérie, de contenus, de logiciels et de composants. Les frontières traditionnelles entre ces différents acteurs sont de plus en plus floues car elles s’inscrivent dans ce que l’on peut décrire comme un continuum informatique, qui est notamment constitué de semi-conducteurs et autres composants pour processeurs ultra-rapides intégrés dans des dispositifs, de l’informatique de périphérie fonctionnant en cohésion avec des services en nuage centralisés, et d’applications fondées sur l’IA gérant le réseau. Cela permettra d’intégrer le calcul dans l’ensemble du réseau.

    Il est nécessaire d’organiser ces différents éléments. Cette gestion coordonnée des ressources de calcul et de réseau permettra aux utilisateurs finals de bénéficier d’un service ininterrompu, qu’ils soient sur leur téléphone portable, chez eux, dans leur voiture ou dans le train. En effet, le processus d’organisation fait en sorte qu’un large éventail d’environnements de calcul interagissent en arrière-plan.

    Prenons l’exemple des véhicules connectés et autonomes, qui utiliseront de plus en plus des technologies de communication et de calcul avancées à grande vitesse et à faible temps de latence pour communiquer en temps réel avec le réseau et l’infrastructure routière. Ainsi, ces véhicules pourront contribuer à optimiser les flux de trafic et à réduire les embouteillages et les accidents.

    Un autre exemple est l’utilisation d’une connectivité à haut débit sécurisée pour fournir des services avancés de santé en ligne, y compris des services avancés de suivi de la santé en ligne et de soins en ligne dans les régions éloignées, au moyen de dispositifs à faible coût. Pour y parvenir, il faudra utiliser l’intelligence artificielle et migrer les fonctionnalités vers le réseau, qui devrait être situé le plus près possible de l’utilisateur. Les autres technologies qui pourraient faire partie du système de soins de santé de 2030 sont, par exemple, les systèmes de suivi par capteurs, la réalité étendue (XR) et les drones.

    Cette évolution technologique favorise l’émergence de nouveaux modèles commerciaux dans le secteur des services de communications électroniques. La complexité croissante du fonctionnement du réseau pousse les entreprises des différents segments de la chaîne de valeur à collaborer au niveau de la couche «infrastructures», tandis que la concurrence au niveau de la couche «services» se complexifie. Parmi les principales tendances figurent le partage de réseau, la séparation de l’infrastructure et de la couche «services», et la création de plateformes de services fondées sur des concepts tels que le réseau en tant que service (NaaS) et l’IoT. Le NaaS crée un cadre commun et ouvert aux opérateurs qui permet aux développeurs de travailler plus facilement en partenariat avec de grands fournisseurs d’informatique en nuage et d’applications de contenu pour mettre au point des applications et des services qui communiquent entre eux de manière fluide et fonctionnent sur tous les appareils et pour tous les clients. Dans le même temps, il permet également aux acteurs non conventionnels du domaine des services en réseau, tels que les opérateurs à l’hyper-échelle, de commencer à fournir des services d’entreprise dans cet espace 23 .

    Ces évolutions sont progressivement introduites pour exploiter le plein potentiel des réseaux 5G, notamment dans les secteurs industriels dits «verticaux», tels que l’industrie manufacturière ou la mobilité. Grâce à ses partenariats industriels et public-privé fructueux, l’UE est actuellement à la pointe (avec la Chine) du développement de ces futures applications industrielles de la 5G dans les secteurs industriels verticaux. À titre d’illustration, citons notamment les réseaux de campus opérationnels, par exemple dans les usines, les ports et les mines 24 , ainsi que le déploiement prévu de corridors 5G le long des réseaux de transport de l’UE 25 . Ces changements constitueront des éléments constitutifs essentiels du futur continuum informatique 6G, qui se trouve encore au stade du développement, mais qui induira un nouveau réalignement des réseaux et des activités commerciales, et qui entraînera de nouveaux besoins en matière d’investissement pour les opérateurs.

    La convergence des réseaux de communications électroniques et des services en nuage européens vers un «Telco Edge Cloud» (continuum nuage-périphérie des télécoms) de l’UE, comme le prévoit l’alliance européenne pour les données industrielles, la périphérie et le nuage dans sa feuille de route sur les technologies industrielles 26 , pourrait devenir un catalyseur majeur pour l’hébergement et la gestion de fonctions virtualisées de réseau, ainsi que pour la mise en place de services complémentaires s’adressant aux marchés en croissance rapide des produits et services liés à l’IoT. Cela devrait permettre la transition vers un internet industriel sur lequel des services essentiels seraient accessibles dans des secteurs et domaines d’activité très divers présentant un grand intérêt tant pour les citoyens que pour les entreprises. Parmi les exemples concrets figurent les services de robotique et de drones pour l’industrie, les véhicules connectés et autonomes qui interagissent avec des réseaux de périphérie déployés le long des routes pour une mobilité et des systèmes de transport intelligents, ou encore les cas d’utilisation soumis à des exigences strictes en matière de confidentialité des données, tels que les services de soins de santé à distance. Pour fournir les capacités de transmission et de traitement des données requises par ces applications novatrices, il faudra que des ressources de calcul totalement intégrées aux ressources de réseau soient largement disponibles. L’alliance européenne pour les données industrielles, la périphérie et le nuage élabore actuellement une autre feuille de route thématique sur le «Telco Edge Cloud», qui devrait être prête d’ici à la mi-2024.

    Cela est surtout évident dans les villes et les grandes agglomérations où ces secteurs et activités se conjuguent. Les données qu’ils génèrent peuvent être traitées et combinées localement, afin de réduire l’utilisation des ressources de réseau, d’organiser la mobilité et les services en temps réel, et d’optimiser les services de santé et de soins médicaux pour les citoyens. Si les différents acteurs de cet écosystème collaborent, le «Telco Edge Cloud» pourrait potentiellement permettre le développement d’une nouvelle génération de systèmes d’organisation des calculs et des données capables de gérer des ressources en réseau dans des environnements tels que les villes intelligentes et de fournir des services interopérables pour développer et optimiser l’exécution d’applications d’IA à forte intensité de données et de calcul.

    Toutefois, cette ouverture inévitable du réseau de communications électroniques traditionnellement «fermé» dans le cadre d’une approche NaaS expose les capacités de réseau à des tiers et comporte l’éventuel risque que de grands fournisseurs de pays tiers deviennent des acteurs de premier plan dans ces écosystèmes. Dans le contexte géopolitique actuel et du point de vue de la sécurité économique, cela constituerait un risque important de dépendance supplémentaire à l’égard d’acteurs de pays tiers dans l’ensemble du secteur des services numériques. Il est donc primordial que les acteurs européens développent les capacités et atteignent l’échelle nécessaires 27 pour devenir des fournisseurs de plateformes de services.

    Cela crée des possibilités énormes pour le secteur, en particulier pour les fournisseurs d’équipements. La capacité des fournisseurs européens à saisir ces possibilités et à devenir les principaux fournisseurs mondiaux d’équipements 6G dépendra en grande partie de la manière dont ils aborderont les grandes évolutions technologiques du secteur et adhéreront au changement de paradigme qui en découle (voir la section 2.4.1). Le document de 2023 «EU-US Beyond 5G/6G Roadmap» (feuille de route sur la coopération entre l’UE et les États-Unis pour l’après-5G/le développement de la 6G) constitue une évolution positive à cet égard.

    Au cours des 5 à 10 prochaines années, nos infrastructures et nos systèmes de chiffrement risquent d’être compromis par une force brute de calcul toujours plus puissante et par l’avènement de l’informatique quantique elle-même. Cela pourrait mettre en péril tous les systèmes de chiffrement clés existants et, partant, rendre les réseaux et services de communication et les données sensibles de l’Europe (en lien avec la santé, les finances, la sécurité ou encore la défense) extrêmement vulnérables. Pour l’UE, la nécessité de commencer immédiatement à préparer ses actifs numériques à faire face à ce risque est manifeste. Un certain nombre d’évolutions récentes fondées sur les technologies quantiques, telles que la distribution quantique de clés, offrent un potentiel important en matière de protection des données sensibles et des infrastructures numériques de l’UE.

    Par exemple, l’UE s’emploiera à déployer, au cours des dix prochaines années, une infrastructure de communication quantique de bout en bout (EuroQCI) pleinement certifiée pour la distribution de clés utilisées dans les technologies de chiffrement qui sera progressivement intégrée dans l’infrastructure de l’UE pour la résilience, l’interconnexion et la sécurité par satellite (IRIS2). Les évolutions technologiques à venir engloberont également les constellations de satellites en orbite terrestre basse (LEO) ou en orbite terrestre moyenne (MEO) et d’autres dispositifs de connectivité non terrestres, tels que les plateformes de haute altitude (HAP).

    Pour conclure sur les défis technologiques, les secteurs des réseaux et services de communications électroniques européens et des équipements de réseau sont aujourd’hui à la croisée des chemins: soit ils tireront parti de la transformation technologique et y adhéreront, soit ils laisseront la place à de nouveaux acteurs, principalement extérieurs à l’UE, ce qui aura des conséquences en termes de sécurité économique de l’UE.

    2.3.Défis à relever pour que les services de connectivité de l’UE atteignent une échelle suffisante

    2.3.01.Besoins d’investissement

    D’après une étude récente menée pour le compte de la Commission européenne 28 , le montant total des investissements nécessaires pour atteindre les objectifs actuels de la décennie numérique en matière de connectivité gigabit et de 5G pourrait s’élever à 148 milliards d’EUR dans l’hypothèse où seraient déployés de manière indépendante les réseaux fixes et mobiles, et en particulier la 5G autonome, qui permettra aux citoyens et aux entreprises de l’Union d’exploiter pleinement les capacités des réseaux mobiles 5G. Selon différents scénarios, il faudrait 26 à 79 milliards d’EUR d’investissements supplémentaires pour couvrir intégralement les axes de transport, notamment les routes, les chemins de fer et les voies navigables, ce qui porterait le montant total des besoins d’investissement requis pour la seule connectivité à plus de 200 milliards d’EUR. Malgré la nécessité de densifier les réseaux mobiles pour qu’ils soient plus performants, les opérateurs de l’UE privilégient la réutilisation de sites existants pour les déploiements en bande basse ou moyenne. Toutefois, pour le passage à une prochaine génération de réseau, telle que la 6G ou le WiFi 6, le besoin de densification des réseaux, ne serait-ce que dans les zones de demande à forte densité, pourrait doubler ou tripler d’ici la fin de la décennie.

    Au-delà de la connectivité terrestre, il est nécessaire de réaliser d’autres investissements pour l’intégration de services avancés par satellite offrant des solutions complémentaires en matière de collecte, de connectivité des appareils dans les zones reculées non couvertes par les technologies terrestres ou de continuité des services en cas de crise ou de catastrophe.

    L’élaboration de solutions logicielles et en nuage indispensables à la fourniture de NaaS nécessitera d’importantes capacités d’investissement supplémentaires. Pour ce qui concerne l’informatique en nuage, le déficit d’investissement dans l’UE est estimé à 80 milliards d’EUR pour la période allant jusqu’en 2027 29 30 . Une transition trop lente des acteurs européens vers des solutions en nuage pour les services de communications électroniques, mais aussi pour d’autres types de services, risquerait de créer de nouvelles dépendances dans le domaine des services numériques.

    2.3.02.Situation financière du secteur des communications électroniques de l’UE

    La capacité de l’UE à réaliser les investissements nécessaires pour transformer avec succès le secteur de la connectivité et lui permettre de relever les défis technologiques dépendra de la situation financière de son secteur des communications électroniques.

    Or, il est à craindre, au vu de sa situation financière actuelle, que ce secteur ne soit pas à même de financer les investissements colossaux indispensables pour suivre le rythme des mutations technologiques.

    Le revenu moyen par client (ARPU) des opérateurs de communications électroniques de l’UE est relativement faible par rapport à celui, par exemple, des États-Unis, du Japon ou de la Corée du Sud 31 , d’où un rendement du capital engagé (RCI) 32 en baisse. Les dépenses en capital (Capex) par habitant sont également plus faibles dans l’UE: 109,1 EUR en 2022, contre 270,8 EUR au Japon, 240,3 EUR aux États-Unis et 113,5 EUR en Corée du Sud 33 . Au cours de la dernière décennie, les titres des fournisseurs de réseaux et de services de communications électroniques européens ont obtenu des résultats inférieurs à la moyenne, tant dans les indices mondiaux de communications électroniques que sur les marchés boursiers européens 34 . Les fournisseurs de réseaux et de services de communications électroniques européens affichent en outre de faibles ratios valeur de l’entreprise/EBITDA, ce qui semble dénoter un manque de confiance du marché dans le potentiel de croissance durable des revenus du secteur à long terme.

    Dans ce contexte, le ratio dette nette/EBITDA d’une partie au moins des opérateurs de communications électroniques a continué d’augmenter. En outre, l’accès au financement apparaît dégradé: en effet, les taux d’intérêt, qui se situaient à des niveaux historiquement bas, ont connu une forte hausse, et l’aversion au risque généralisée, induite par les nouvelles crises mondiales, a créé une incertitude macroéconomique. Comme les autres fournisseurs d’infrastructures, les fournisseurs de réseaux de communications électroniques mettront des décennies pour rentabiliser leurs investissements, et même une légère modification du taux d’intérêt a des répercussions sur la viabilité financière d’un projet d’investissement.

    Dès lors, la perception qu’ont les investisseurs privés de l’attractivité des réseaux numériques avancés revêt une importance cruciale pour l’avenir de la connectivité. Certains investisseurs ont indiqué que, pour mobiliser des investissements privés, il faudrait des arguments économiques solides permettant de conclure à la rentabilité de l’investissement et à l’existence de marges élevées. La rentabilité dépend de la demande en réseaux fixes et mobiles améliorés, qui est elle-même liée au développement d’applications à forte intensité de données et de cas d’utilisation (fondés, par exemple, sur l’informatique de périphérie, l’IA et l’internet des objets), ainsi qu’à l’augmentation de la demande pour ces applications et utilisations.

    Des parties prenantes ont d’ailleurs souligné l’importance d’adopter des mesures axées sur la demande. À cet égard, l’Union soutient l’adoption des technologies numériques par les PME dans le cadre des objectifs et des cibles définis dans le programme d’action pour la décennie numérique, notamment ceux concernant les pôles européens d’innovation numérique, le déploiement d’espaces de données permettant aux parties prenantes de partager et de réutiliser les données industrielles dans un environnement digne de confiance, et l’accès aux futures «fabriques d’IA» 35 . L’utilisation accrue des services de communications électroniques avancés par les entreprises renforcera la numérisation des écosystèmes locaux participant aux chaînes d’approvisionnement à l’échelle de l’UE et favorisera l’accès aux applications à forte intensité d’infrastructures telles que l’IA générative, le calcul à la périphérie et le supercalcul, sans fausser indûment la concurrence.

    Certains investisseurs considèrent que la réglementation prudentielle des banques et des entreprises d’assurance inhibe le déploiement du capital et l’animation des marchés des actions. Ils plaident pour une réduction des exigences de fonds propres prévues par cette réglementation. Selon eux, par exemple, la directive Solvabilité II 36 encourage les entreprises d’assurance à réduire leur exposition aux actions pour des raisons prudentielles 37 , compte tenu de la volatilité des actions. Dès lors, un accroissement des investissements en fonds propres aboutirait probablement à des ratios de solvabilité plus faibles 38 . La révision en cours du cadre Solvabilité II, qui a récemment fait l’objet d’un accord, apporte des réponses à cet égard: les exigences de fonds propres seront considérablement allégées grâce à une réduction de la marge de risque, à des modifications de l’ajustement symétrique et à la définition de critères clairs pour les fonds propres à long terme 39 . Les investissements, en particulier dans les infrastructures, pourraient être stimulés par le renforcement de la capacité d’investissement du secteur de l’assurance dans les entreprises de l’UE 40 .

    Néanmoins, comme les investissements dans les titres d’entreprises non cotées, telles que les entreprises innovantes et les nouveaux opérateurs de communications électroniques, restent souvent considérés comme plus risqués, un soutien public est nécessaire pour les encourager. En outre, les investisseurs considèrent que le soutien public, en particulier celui fourni par la facilité pour la reprise et la résilience et d’autres fonds de l’UE [NextGenerationEU, Fonds structurels, mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE), etc.], permettra d’atteindre plus facilement les zones où le marché est défaillant, c’est-à-dire les zones où il n’est pas possible, faute d’une demande suffisante, de rémunérer adéquatement les investissements privés. Les investisseurs estiment également que les partenariats public-privé, dans lesquels les capitaux publics prennent la forme de garanties ou de co-investissements juniors, pourraient être un bon moyen d’aider le secteur des communications électroniques à financer sa transformation.

    Enfin, selon certains investisseurs, si le marché européen des communications électroniques attire peu les grands investisseurs, c’est aussi parce qu’il est fragmenté et compte, de ce fait, peu d’actifs présentant une envergure suffisante. Il n’est pas rare qu’en raison de leur capacité limitée à gérer leur portefeuille ou à le surveiller, les grands investisseurs définissent des seuils minimaux pour leurs investissements. Cela signifie qu’il y a moins de bailleurs de fonds en concurrence pour les petits investissements que pour les grands, d’où des conditions de financement moins favorables pour les petits investissements. De plus, si les grands investissements peuvent bénéficier de meilleures conditions, c’est aussi parce que leur coût de gestion relatif est plus faible que celui des petits investissements. L’intégration des marchés nationaux pourrait être l’occasion de disposer, pour les investissements dans les communications électroniques, d’un réservoir potentiellement plus large d’investisseurs et de conditions de financement. En outre, plus un projet est grand, meilleurs pourront être son rapport coût-efficacité et sa viabilité financière. Un meilleur profil de rendement améliorera son attractivité et, en fin de compte, ses conditions de financement.

    2.3.03.Absence de marché unique

    À l’heure actuelle, l’UE n’a pas un marché unique des réseaux et services de communications électroniques, mais 27 marchés nationaux qui diffèrent du point de vue des conditions d’offre et de demande, de l’architecture de réseau, du niveau de couverture des réseaux à très haute capacité ou des procédures, conditions et calendriers relatifs à l’autorisation du spectre au niveau national, ou encore des approches réglementaires (qui sont néanmoins partiellement harmonisées). La fragmentation ne concerne pas uniquement l’offre. Du côté de la demande, c’est-à-dire des utilisateurs finals, les conditions du marché diffèrent, elles aussi, d’un État membre à l’autre. Cette fragmentation a été signalée par la majorité des participants à la consultation exploratoire sur l’avenir du secteur des communications électroniques et de ses infrastructures 41 . Ceux-ci ont déclaré que la suppression des obstacles, et notamment de la réglementation sectorielle, lorsqu’elle est lourde ou fragmentée – quand ce n’est pas les deux à la fois –, pourrait favoriser la consolidation transfrontière et l’émergence d’un marché unique numérique pleinement intégré. En ce qui concerne les obstacles à l’intégration du marché, la majorité des participants à la consultation exploratoire 42 ont notamment appelé de leurs vœux une plus grande intégration du marché du spectre et une meilleure harmonisation de l’approche en matière de gestion du spectre dans l’ensemble de l’UE. Selon eux, il conviendrait d’harmoniser les approches relatives, par exemple, à la durée des licences, aux prix de réserve, au coût annuel du spectre ou aux pratiques de partage du spectre.

    La politique en matière de spectre radioélectrique relève d’un domaine de compétence partagée entre l’UE et les États membres. L’UE adopte des règles, en particulier pour la désignation, à l’échelle de l’Union, de bandes de fréquences dans le respect de conditions techniques harmonisées, tandis que les États membres concentrent leur action sur la mise en œuvre de l’autorisation, de la gestion et de l’utilisation du spectre. Toutefois, la manière dont le spectre est géré et utilisé dans un État membre a une incidence sur le marché intérieur dans son ensemble, par exemple en cas de décalage dans les calendriers de démarrage des travaux de mise au point d’une nouvelle technologie sans fil ou d’un nouveau service ou de brouillage transfrontière préjudiciable, ce qui peut avoir des répercussions sur la compétitivité, la résilience et le rayonnement technologique de l’UE. Par conséquent, il est impératif de veiller à ce que le spectre soit géré de manière plus coordonnée entre tous les États membres afin de maximiser sa valeur sociale et économique et d’améliorer la connectivité terrestre et par satellite dans l’ensemble de l’UE.

    Les tentatives passées de renforcer, au niveau de l’UE, la coordination, la convergence et la sécurité en matière de gestion du spectre, par exemple dans le contexte de la proposition de règlement relatif au marché unique des télécommunications 43 et du code des communications électroniques européen (ci-après le «code») 44 , ont été infructueuses à bien des égards, ce qui a eu des conséquences préjudiciables pour l’UE dans son ensemble. Par exemple, le processus d’autorisation des bandes de fréquences prévu pour permettre le déploiement futur de la 5G, engagé en 2015 dans les premiers États membres 45 , n’est toujours pas achevé aujourd’hui, en 2024, malgré les délais fixés au niveau de l’UE. Le processus d’autorisation de l’utilisation des bandes 800 MHz et 2,6 GHz pour la 4G, qui n’a pourtant pas été retardé, comme le processus de la 5G, par une pandémie ou un événement tout aussi exceptionnel, a duré six ans pour 26 États membres, et même dix ans si l’on compte les 27 États membres 46 . Il en a résulté un déploiement fragmenté de la 4G et de la 5G dans l’UE, certains États membres accusant, dans le domaine des technologies sans fil, un retard de presque une génération sur les autres.

    En outre, dans certains cas, les soumissionnaires ont dû payer des prix plus élevés en raison d’une rareté artificielle provoquée par les modalités de conception des enchères, et cela s’est accompagné d’une réduction des capacités d’investissement ainsi que de retards dans le déploiement des services par les fournisseurs de réseaux et de services de communications électroniques. Cette situation a été préjudiciable, non seulement aux consommateurs et aux entreprises utilisatrices, qui n’ont pas pu bénéficier d’une qualité de service optimale, mais aussi, en dernier ressort, à la croissance économique, à la compétitivité et à la cohésion de l’UE.

    Au-delà de la législation sectorielle sur les communications électroniques, des règles nationales imposant des obligations en matière, par exemple, d’interception légale, de conservation des données ou de localisation des centres d’opérations de sécurité ont également été considérées, par certains participants à la consultation exploratoire, comme des obstacles à la pleine intégration du marché unique 47 . Dans ces domaines, l’absence de législation uniforme au niveau de l’UE a contribué à la fragmentation importante du marché (qui se traduit, par exemple, par des obligations différentes en matière de durée de conservation des données ou de localisation des centres d’opérations de sécurité, ou par l’absence de reconnaissance mutuelle de l’habilitation de sécurité du personnel concerné), empêchant un fournisseur qui exploite un réseau dans plusieurs États membres de bénéficier d’économies d’échelle.

    La structure du marché est le reflet de la fragmentation réglementaire. Alors que l’UE compte une cinquantaine d’opérateurs de réseau mobile et plus d’une centaine d’opérateurs de réseau fixe, seuls quelques opérateurs européens (Deutsche Telekom, Vodafone, Orange, Iliad et Telefónica, par exemple) sont présents sur plusieurs marchés nationaux. S’agissant des marchés de la téléphonie mobile, considérés du point de vue des services, 16 États membres ont trois opérateurs de réseaux mobiles; neuf en ont quatre, et deux en ont cinq. Dans certains États membres, le nombre d’infrastructures distinctes, pour les réseaux de communications électroniques mobiles, est inférieur au nombre de fournisseurs de services en raison des accords de partage de réseau existants (par exemple au Danemark ou en Italie). Même les opérateurs de téléphonie mobile qui font partie de groupes d’entreprises solidement implantés dans l’UE opèrent à l’intérieur des marchés nationaux et ne semblent pas, en raison de la diversité intrinsèque des marchés et des réglementations, harmoniser leurs offres et leurs systèmes opérationnels au niveau de l’UE au-delà de ce qui est nécessaire pour répondre à la nécessité de proposer des prix abordables dans les États membres à faible pouvoir d’achat.

    Dans ce contexte de fragmentation (qui distingue l’UE des autres régions du monde) et de faibles niveaux de rentabilité, il y a lieu de se demander si des mesures de politique industrielle facilitant davantage la fourniture transfrontière de réseaux de communications électroniques ou des formes de coopération différentes en amont pourraient permettre aux opérateurs d’atteindre une échelle suffisante, sans compromettre la concurrence en aval. Certains opérateurs estiment que les seuls obstacles à la fourniture transfrontière de réseaux et de services sont (malgré les économies que permettrait une plus grande centralisation des opérations, en particulier dans les réseaux virtualisés) les synergies et les gains d’efficacité négatifs nets, qui sont dus à la fragmentation des conditions réglementaires. La consolidation transfrontière en tant que telle n’a jamais posé de problème du point de vue de la concurrence en raison de la dimension nationale des marchés des communications électroniques de l’UE. Toutefois, tant que les avantages qu’elle procure seront limités par la persistance de cadres réglementaires nationaux et l’absence d’un véritable marché unique, elle ne pourra pas remédier seule aux inconvénients décrits plus haut.

    Alors que les prix et la couverture des réseaux varient considérablement d’un État membre à l’autre 48 , en raison de la diversité intrinsèque des marchés et des réglementations, et si l’on exclut la nécessité de proposer des prix abordables dans les États membres à faible pouvoir d’achat, la grande majorité des prix du haut débit mobile et fixe pratiqués dans l’UE sont généralement inférieurs à ceux des États-Unis, ce qui est synonyme d’avantages considérables à court terme pour les consommateurs. Dans le même temps, la couverture en fibre optique est plus large dans l’UE, tandis que la couverture 5G de base y est comparable à celle des États-Unis. Toutefois, si les objectifs du marché unique en matière de prix ont globalement été atteints, ceux concernant le déploiement massif d’infrastructures et de services avancés tels que la 5G autonome ou la multiplication des services avancés dans le secteur industriel et de l’internet des objets 49 ne l’ont pas été.

    Dans l’ensemble, la fragmentation du marché des réseaux et services de communications électroniques de l’UE selon les frontières nationales entrave la capacité des opérateurs à atteindre l’échelle dont ils auraient besoin pour investir dans les réseaux de demain, notamment en vue de fournir des services transfrontières, indispensables pour un déploiement efficace de l’internet des objets et un fonctionnement plus centralisé.

    2.3.04.Convergence et conditions de concurrence équitables

    La convergence des réseaux et services de communications électroniques et des infrastructures en nuage concerne non seulement la couche infrastructurelle, mais aussi les services. Comme expliqué à la section 2.2 ci-dessus, les marchés de la connectivité font face à des évolutions technologiques transformatrices qui auront pour effet de faire converger à la fois l’offre (c’est-à-dire la fourniture de réseaux et de services) et la demande (utilisateurs finals). Demain, la séparation qui existait hier entre les fournisseurs «traditionnels» de réseaux ou services de communications électroniques et les fournisseurs de services en nuage ou d’autres services numériques disparaîtra au profit d’un écosystème convergent complexe. Ces évolutions soulèvent une question: ne faudrait-il pas que les acteurs de cet écosystème convergent soient soumis à des règles équivalentes applicables à tous et que les utilisateurs finals et, en particulier, les consommateurs (qui forment la «demande») bénéficient de droits équivalents?

    Actuellement, le cadre réglementaire de l’UE applicable aux réseaux et services de communications électroniques ne prévoit pas d’obligations liées aux activités des fournisseurs d’informatique en nuage ni ne réglemente les relations entre les différents acteurs du nouvel écosystème complexe d’infrastructures numériques. Plus précisément, la fourniture d’infrastructures et de services en nuage n’entre pas dans le champ d’application du code (mais bien dans celui, par exemple, de la directive SRI 2 50 , adoptée récemment). Les fournisseurs d’informatique en nuage exploitent de vastes réseaux (dorsaux) de communications électroniques, mais ces réseaux sont exemptés de certaines dispositions du cadre réglementaire des communications électroniques, notamment dans le domaine de la réglementation de l’accès et du règlement des litiges.

    Plus de 60 % 51 du trafic international passe par des câbles sous-marins qui n’appartiennent pas à des «opérateurs de réseaux de communications électroniques publics» au sens du code. En outre, les grands fournisseurs d’informatique en nuage exploitent leurs propres réseaux dorsaux et centres de données et acheminent le trafic jusqu’au cœur des réseaux des opérateurs de réseaux de communications électroniques publics. Par conséquent, le trafic passe principalement par des réseaux privés, qui sont en grande partie non réglementés, plutôt que par des réseaux publics.

    Le code distingue également les fournisseurs selon le type de service qu’ils fournissent; par exemple, les fournisseurs de services d’accès à l’internet et de services de communications interpersonnelles fondés sur la numérotation (NBICS) sont soumis à la plupart des obligations, tandis que les fournisseurs de services de communications interpersonnelles non fondés sur la numérotation (NIICS) ne sont soumis qu’à un certain nombre d’entre elles et sont exemptés, par exemple, de la contribution au financement du service universel ou du financement de la réglementation sectorielle. Si les NIICS et les services d’informatique en nuage relèvent bien du champ d’application du règlement sur les marchés numériques 52 , celui-ci ne s’applique qu’aux contrôleurs d’accès désignés pour ces services de plateforme essentiels spécifiques.

    2.3.05.Défis en matière de durabilité

    Le secteur des TIC représente entre 7 et 9% de la consommation mondiale d’électricité (et devrait passer à 13% d’ici à 2030) 53 , soit environ 3% des émissions mondiales de gaz à effet de serre 54 , et un volume croissant de d’équipements électriques et électroniques (e-déchets). Pourtant, si elle est correctement utilisée et gérée, la technologie numérique peut contribuer à réduire les émissions mondiales de 15 % 55 , contrebalançant ainsi les émissions causées par le secteur. Par exemple, la conception intelligente des bâtiments est susceptible de générer des économies d’énergie allant jusqu’à 27 % 56 et il a été démontré que les applications de mobilité intelligente pouvaient permettre des réductions d’émissions dans les transports allant jusqu’à 37 % 57 . La mobilité connectée et automatisée devrait être l’un des principaux moteurs de la décarbonation du secteur des transports et la 5G devrait en être l’un des principaux vecteurs. Toutefois, d’importants efforts supplémentaires sont nécessaires pour utiliser systématiquement la technologie numérique et veiller à ce qu’elle suscite des solutions soigneusement conçues selon des principes circulaires et régénératifs.

    La «logiciellisation» et la «mise en nuage» des prochaines générations de réseaux de communications électroniques promettent des gains d’efficacité pour tous les secteurs, mais posent également de nouveaux défis en termes de consommation d’énergie (par exemple, le réseau ouvert d’accès radio — RSR — dans les réseaux cellulaires). L’augmentation de la consommation d’énergie due à des changements importants dans le volume de trafic a en soi un coût qui a considérablement augmenté ces dernières années avec la hausse des prix de l’énergie. Dans le même temps, les coûts élevés de l’énergie pourraient encourager les investissements dans des opérations et des technologies de réseau plus économes en énergie et à faibles émissions de carbone générant moins d’e-déchets.

    Les réseaux numériques modernes peuvent contribuer de manière significative à la durabilité. Parmi les exemples concrets figurent le déploiement et l’adoption de nouvelles technologies plus efficaces telles que la fibre optique, la 5G et la 6G, ainsi que la suppression progressive des réseaux fixes et mobiles existants. En outre, il est essentiel d’utiliser des codecs (codeurs-décodeurs) 58 plus efficaces pour la transmission des données. Les codecs vidéo de nouvelle génération sont intrinsèquement plus durables car ils réduisent au minimum l’énergie et la puissance sortantes sans perte de qualité vidéo. Dans le même temps, une attention et des investissements appropriés, y compris un financement durable, s’imposent afin que la connectivité puisse accélérer et concrétiser l’accès aux services numériques afin d’écologiser d’autres secteurs, grâce à des solutions numériques intelligentes qui réduisent l’empreinte climatique et environnementale dans l’ensemble des processus industriels, des systèmes énergétiques, des bâtiments, de la mobilité et de l’agriculture, et soutiennent les efforts en faveur de villes intelligentes et neutres pour le climat.

    2.4.Nécessité d’assurer la sécurité d’approvisionnement et d’exploitation des réseaux

    2.4.01.Défi des fournisseurs de confiance

    Dans un environnement géopolitique de plus en plus marqué par les tensions et les conflits, l’exigence croissante de sécurité et de résilience des technologies de communication clés génériques et des infrastructures critiques souligne la nécessité de s’appuyer sur des fournisseurs diversifiés et fiables, afin de prévenir les vulnérabilités et les dépendances, avec des répercussions potentielles sur l’ensemble de l’écosystème industriel. La boîte à outils de cybersécurité de l’UE 59 pour la 5G, par exemple, a proposé un ensemble de mesures recommandées en vue d’atténuer les risques pour les réseaux 5G, notamment l’évaluation du profil de risque des fournisseurs et l’application de restrictions pour les fournisseurs considérés comme présentant un risque élevé, y compris les exclusions nécessaires des actifs clés. À cet égard, dans sa communication du 15 juin 2023 sur la «Mise en œuvre de la boîte à outils pour la cybersécurité de la 5G» 60 , la Commission a estimé que Huawei et ZTE présentaient en fait des risques sensiblement plus élevés que les autres fournisseurs de la 5G et a confirmé que les décisions adoptées par les États membres pour restreindre ces fournisseurs étaient justifiées et conformes à la boîte à outils 5G.

    Les lacunes laissées par ces fournisseurs à haut risque dans la chaîne d’approvisionnement nécessitent le développement de nouvelles capacités fournies par des acteurs existants ou nouveaux. Dans ce contexte, les efforts de recherche et d’innovation (R&I) dans les technologies clés pertinentes pour la sécurité des réseaux de communications devront être intensifiés afin de garantir qu’un niveau suffisant de propriété intellectuelle et de capacité de production reste disponible à tout moment tout au long de la chaîne d’approvisionnement de l’UE. L’objectif est non seulement de faire en sorte que l’UE reste parmi les leaders mondiaux en matière de systèmes de communication, mais aussi de jouer un rôle de premier plan dans le développement de nouvelles capacités dans des domaines connexes tels que le continuum nuage-périphérie, la technologie des puces d’identification par radiofréquence, les communications quantiques, la cryptographie quantique résiliente, la connectivité non terrestre et les infrastructures de câbles sous-marins.

    2.4.02.Normes de sécurité pour la connectivité de bout en bout

    Pour parvenir au niveau de sécurité et de résilience le plus élevé possible, l’UE devrait également diriger l’élaboration de normes de sécurité couvrant l’ensemble de la pile de valeur, de bout en bout et depuis la couche «matériel» jusqu’à la couche «services» (par exemple, normes de messagerie sécurisée et de visioconférence). Le défi pour l’UE consiste à faire en sorte que ces évolutions débouchent sur des normes de sécurité communes et interopérables pour tous les éléments d’infrastructure essentiels qui sous-tendent les infrastructures de communication sensibles. La Commission collabore avec les États membres pour mettre en place le système de communication critique de l’UE (EUCCS) afin de connecter les réseaux de communication de tous les responsables des services répressifs, de la protection civile et de la sécurité en Europe d’ici à 2030, pour permettre une communication critique et une mobilité opérationnelle fluide dans l’ensemble de l’espace Schengen 61 . La définition connexe de normes critiques pour les missions renforcera l’autonomie stratégique dans un segment particulièrement sensible du secteur de la communication.

    La nouvelle ère numérique sera fondée, entre autres, sur les technologies quantiques pour la connectivité sécurisée et l’informatique quantique. Les réseaux de communication et la manière dont les données sont protégées connaîtront un changement de paradigme en conséquence directe des progrès de l’informatique quantique. Étant donné que la préservation de nos données et la sécurisation de la communication sont essentielles pour notre société, notre économie, nos infrastructures, nos services et notre prospérité, ainsi que pour notre stabilité politique, nous devons anticiper les menaces découlant d’une éventuelle utilisation malveillante des futurs ordinateurs quantiques qui pourrait mettre en péril nos méthodes traditionnelles de cryptage.

    La législation sur la cyberrésilience, qui devrait entrer en vigueur dans le courant de l’année, contribuera de manière significative à la sécurisation des infrastructures numériques de l’UE. Elle impose des obligations de sécurité dès la conception aux fabricants de produits matériels et logiciels, couvrant l’ensemble du cycle de vie de ces produits, depuis leur conception et leur développement jusqu’à leur maintenance. La législation sur la cyberrésilience couvre non seulement un grand nombre de produits déployés dans les infrastructures numériques, tels que les routeurs, les commutateurs ou les systèmes de gestion de réseau, mais exige également des fabricants de produits matériels et logiciels connectés au sens large qu’ils protègent la confidentialité et l’intégrité des données par des moyens de pointe. Cela pourrait impliquer, le cas échéant, l’utilisation de la cryptographie post-quantique. Afin de soutenir les fabricants dans la mise en œuvre de ces dispositions, la Commission demandera l’élaboration de normes européennes par les organisations européennes de normalisation. En outre, le système européen de cybersécurité sur les critères communs (EUCC) récemment adopté permettra aux fabricants de composants technologiques, tels que les puces électroniques, de fournir une assurance de sécurité de manière harmonisée au titre du règlement de l’UE sur la cybersécurité.

    2.4.03.Infrastructures de câbles sous-marins sûres et résilientes

    Une condition préalable à la sécurité des communications est un niveau plus élevé de résilience et d’intégration de tous les canaux de communication: terrestre, non terrestre et, tout particulièrement, sous-marin. Dans le contexte actuel de menaces accrues en matière de cybersécurité et de sabotage, les gouvernements de toutes les régions sont très attentifs à leur dépendance à l’égard des câbles sous-marins critiques. En effet, plus de 99 % du trafic intercontinental de données passe par des câbles sous-marins, et trois États membres insulaires de l’UE, Chypre, l’Irlande et Malte, ainsi qu’un certain nombre d’îles d’autres États membres et de régions ultrapériphériques en dépendent fortement.

    En particulier, la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine a eu une incidence significative sur la sensibilisation à la sécurité des réseaux de communications, y compris des câbles sous-marins, étant donné qu’elle pourrait donner lieu à des dommages à ces câbles et vu les activités suspectes de surveillance des navires russes.

    L’Europe compte des entreprises de premier plan mondial dans la production de fibres. Toutefois, depuis 2012, les grands fournisseurs hors UE investissent de plus en plus dans leurs propres infrastructures, ce qui entraîne déjà des dépendances stratégiques, qui pourraient encore être exacerbées à l’avenir.

    Dans l’UE, des appels répétés ont été lancés en faveur du renforcement de la sécurité et de la résilience des infrastructures de câbles sous-marins, notamment en augmentant les financements publics destinés à soutenir les investissements privés dans un environnement difficile. Par exemple, l’appel de Nevers de mars 2022 62 a reconnu l’importance capitale des infrastructures critiques, telles que les réseaux de communications électroniques et les services numériques, pour de nombreuses fonctions critiques, et le fait que ces dernières sont la cible privilégiée des cyberattaques. Dans ses conclusions du 23 mai 2022 sur la posture cyber de l’UE dans le domaine de la cybersécurité et sur la politique de cyberdéfense de l’UE du 22 mai 2023, le Conseil a demandé que des évaluations des risques et des scénarios soient effectuées. Dans sa recommandation sur la résilience des infrastructures critiques du 8 décembre 2022 relative à une approche coordonnée à l’échelle de l’Union pour renforcer la résilience des infrastructures critiques, le Conseil a défini des actions ciblées au niveau de l’UE et des États membres pour améliorer la préparation, la réaction et la coopération internationale. Ces actions se concentrent sur les infrastructures critiques, y compris celles ayant une incidence transfrontière significative et dans les secteurs clés de l’énergie, des transports, de l’espace et des infrastructures numériques.

    Dans le rapport 2023 sur l’état d’avancement de la décennie numérique, la Commission a souligné qu’il importait de progresser vers des réseaux plus résilients et plus souverains et, en particulier, de limiter la vulnérabilité des infrastructures clés de l’UE, notamment les réseaux sous-marins. Il a également adressé aux États membres une recommandation claire visant à stimuler les investissements nécessaires à la sécurité et à la résilience de ces infrastructures. Les États membres se sont également engagés à renforcer la connectivité internet entre l’Europe et ses partenaires, dans la déclaration ministérielle intitulée «Les passerelles européennes de données en tant qu’élément clé de la décennie numérique de l’UE».

    En outre, le groupe de travail UE-OTAN sur la résilience des infrastructures critiques a discuté à plusieurs reprises des infrastructures sous-marines. Son rapport d’évaluation final recommande aux services de l’UE et de l’OTAN d’«accroître les possibilités d’échanges sur la manière d’améliorer la surveillance et la protection des infrastructures critiques dans le domaine maritime par les autorités compétentes et d’examiner les moyens d’améliorer la connaissance de la situation maritime». Les échanges de personnel se sont intensifiés dans le cadre du dialogue structuré sur la résilience, notamment à la lumière de la mise en place de la cellule de coordination des infrastructures sous-marines critiques de l’OTAN afin d’assurer la sécurité, entre autres, des câbles sous-marins.

    Des incidents tels que ceux survenus en mer Baltique 63 , à la suite desquels la Finlande a activé le mécanisme de la boîte à outils hybride de l’UE 64 , ont toutefois démontré que les éléments des infrastructures de câbles sous-marins restent vulnérables, même si le système lui-même est résilient en raison de multiples redondances. Cela souligne la nécessité de faire progresser et de coordonner davantage les travaux au niveau de l’UE pour favoriser la sécurité et la résilience des infrastructures câblées. En conséquence, le Conseil européen du 27 octobre 2023 a souligné «la nécessité de mesures efficaces visant à renforcer la résilience et à assurer la sûreté des infrastructures critiques», tout en soulignant «l’importance d’une approche globale et coordonnée».

    Conformément à la recommandation du Conseil de 2022 en ce qui concerne les infrastructures de câbles sous-marins, la Commission a réalisé des études et consulté les parties prenantes et les experts concernés sur les mesures appropriées en lien avec d’éventuels incidents importants touchant des infrastructures sous-marines. Les résultats de l’étude seront communiqués aux États membres au niveau de confidentialité approprié.

    L’une des principales conclusions est que le cadre actuel de l’UE ne permet pas de relever pleinement les défis recensés. Parmi les éléments concrets qui font actuellement défaut figurent une cartographie précise des infrastructures câblées existantes, en vue d’une évaluation consolidée à l’échelle de l’UE des risques, des vulnérabilités et des dépendances, une gouvernance commune des technologies par câble et des services de pose de câbles garantissant une réparation et une maintenance rapides et sûres des câbles, ainsi que l’identification et le financement de projets critiques de câbles à l’intérieur de l’UE et à l’échelle mondiale.

    3.MAÎTRISER LA TRANSITION VERS LES RÉSEAUX NUMÉRIQUES DE DEMAIN — QUESTIONS POLITIQUES ET SOLUTIONS POSSIBLES

    3.1.Pilier I: Création du «réseau 3C» — «Informatique collaborative connectée»

    Comme décrit dans les sections précédentes, les personnes et les appareils qui communiquent entre eux, les médecins qui s’occupent de leurs patients à distance, les bâtiments qui deviennent intelligents grâce à des capteurs et d’autres applications futures facilitant les activités commerciales et améliorant la vie des citoyens dépendent de la disponibilité d’infrastructures numériques hautement performantes.

    L’évolution de l’informatique de périphérie intégrée à l’appareil devrait faciliter la présence d’une capacité de calcul importante, en particulier pour ceux équipés de processeurs d’IA, dans un large éventail de dispositifs, y compris des robots, des drones, des dispositifs médicaux, des portables et des voitures autonomes. Le calcul n’est plus lié à des environnements informatiques spécialisés tels que les centres de données. Au lieu de cela, il est devenu intégré et omniprésent dans presque tout. Cela permettra de combiner l’informatique de périphérie intégrée à l’appareil avec le reste du large éventail de catégories d’informatique de périphérie et de différents types de services en nuage dans les environnements informatiques collaboratifs 65 . Toutefois, l’intégration de ces différentes ressources informatiques à diverses capacités de réseau nécessitera une orchestration intelligente afin d’optimiser également les aspects liés à la sécurité et à la durabilité.

    Comme le décrit la section 2.2, tout comme la connectivité et l’informatique convergent, les entreprises de ces différents segments de la chaîne de valeur doivent également travailler ensemble, y compris les fabricants de puces électroniques, les fournisseurs d’équipements de réseaux de communications électroniques ainsi que les fournisseurs de services en périphérie et en nuage. Mais les différents secteurs sont fragmentés et, outre qu’ils manquent d’ampleur, ils ne disposent pas d’une approche commune de l’innovation nécessaire pour assurer la connectivité et le calcul de nouvelle génération. Ainsi, outre l’orchestration au sens technique, ces secteurs nécessitent une collaboration étroite pour réussir.

    Nous devons veiller à ce que ces innovations soient mises en œuvre dans l’UE et préserver notre sécurité économique et notre prospérité. En particulier, il est essentiel que l’industrie de l’UE dispose de capacités technologiques suffisantes dans les parties clés de la chaîne d’approvisionnement numérique et qu’elle soit en mesure de profiter d’avantages économiques dans les parties les plus attrayantes de la chaîne de valeur numérique. L’objectif est de promouvoir une communauté dynamique d’innovateurs européens, en créant le réseau «Informatique collaborative connectée» («réseau 3C»), un écosystème qui englobe les semi-conducteurs, la capacité de calcul dans tous les types d’environnements informatiques de périphérie et en nuage, les technologies radio, les infrastructures de connectivité ainsi que la gestion des données et les applications.

    3.1.01.Renforcement des capacités grâce à l’innovation ouverte et aux capacités technologiques

    Étant donné que les réseaux hybrides, l’informatique de périphérie et la migration complète vers l’informatique en nuage modifient l’architecture des infrastructures de connectivité, la position forte de longue date de l’Europe dans le secteur des équipements de réseau et des services est menacée. Il est donc important de préserver la primauté mondiale de l’UE dans le domaine des équipements de réseaux de communications électroniques et de faciliter le renforcement des capacités industrielles dans cette transition vers des réseaux interopérables en nuage et l’intégration des infrastructures et services en nuage des télécoms. Outre les capacités industrielles, il est tout aussi important que l’UE renforce ses capacités d’innovation technologique et développe les connaissances et les compétences nécessaires.

    Les entreprises de l’UE collaborent de plus en plus avec des acteurs de pays tiers, tant au sein de l’écosystème des services de communications électroniques que dans le secteur de l’approvisionnement. Si ces partenariats avec des acteurs de pays partageant les mêmes valeurs peuvent générer des synergies et des avantages, une dépendance potentielle à l’égard d’un petit nombre de fournisseurs d’infrastructures et de services critiques, tels que les outils d’informatique en nuage, de périphérie ou d’IA, ou les infrastructures de câbles sous-marins, risque de créer de nouveaux goulets d’étranglement ou verrouillages 66 . L’objectif doit être de créer une dynamique tout aussi forte pour le partenariat entre entreprises en Europe.

    Dans le domaine des semi-conducteurs, l’UE a réagi pour inverser cette tendance: avec le règlement sur les semi-conducteurs 67 , l’UE a présenté un programme ambitieux qui a déjà mobilisé plus de 100 milliards d’euros d’investissements publics et privés. Toutefois, en ce qui concerne les infrastructures de connectivité, une politique industrielle d’une ampleur similaire visant à encourager les investissements des acteurs de l’UE et à catalyser le réseau 3C pour permettre de futures applications fait actuellement défaut.

    Néanmoins, dans le secteur des équipements, l’UE dispose d’une base solide sur laquelle elle peut s’appuyer. Aujourd’hui, deux des trois principaux fournisseurs d’équipements de réseau numérique, tant en ce qui concerne la part de marché des ventes mondiales que celle des brevets essentiels liés à une norme, ont leur siège dans l’UE. Après des décennies de succès en ce qui concerne l’élaboration des normes de communication mobile et la stimulation de l’innovation dans l’UE et dans le monde, le défi consiste à s’appuyer sur cette position de premier plan pour l’étendre à l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement et de valeur, par exemple dans le domaine de l’informatique de périphérie et en nuage, mais aussi des puces électroniques, où l’Europe part d’une position plus faible. Cela englobe les infrastructures complémentaires, telles que les câbles sous-marins ou même la connectivité non terrestre.

    En ce qui concerne les capacités de production, de déploiement et d’exploitation, l’Europe peut également s’appuyer sur sa force en ce qui concerne la R&I en amont de la chaîne de valeur numérique. L’UE abrite déjà une base solide en matière de R&I dans le domaine des réseaux, dotée d’une excellence scientifique renommée à l’échelle mondiale, sur laquelle pourront s’appuyer les futurs écosystèmes de R&I. Le contexte géopolitique et la tendance à des applications toujours plus critiques, telles que la chaîne de blocs dans la finance, les camions connectés dans le domaine de la logistique, ou encore la télémédecine, rendent nécessaires la sécurité des infrastructures et la résilience dès la conception. Ces critères de conception doivent donc être placés à l’avant-garde de nos efforts en matière de R&I.

    Toutefois, la transformation de l’industrie de la connectivité de l’UE nécessite d’importantes capacités d’investissement, en particulier par rapport aux investissements massifs réalisés par les grands fournisseurs de services en nuage dans les capacités en nuage, de périphérie et d’IA. Il existe un certain nombre d’instruments et de programmes de financement de l’UE qui soutiennent déjà les investissements privés dans la R&I en ce qui concerne le secteur des communications. Il s’agit notamment de l’entreprise commune Réseaux et services intelligents dans le cadre d’Horizon Europe, mais aussi d’InvestEU, du programme pour une Europe numérique et du mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE).

    L’entreprise commune Réseaux et services intelligents est l’actuelle plateforme de l’UE pour le financement de la R&I en faveur des systèmes 6G dans le cadre de la coopération entre l’industrie et les acteurs publics. L’un de ses principaux objectifs est de tirer parti des atouts de l’UE en matière d’approvisionnement en réseau au profit de l’ensemble de la chaîne de valeur, y compris l’informatique en nuage et les logiciels, ainsi que les dispositifs et composants. L’entreprise commune Réseaux et services intelligents répond déjà à plusieurs besoins de R&I (principalement en prévision de la 6G): recherche sur les concepts, les architectures et les composants essentiels des systèmes 6G, essais et projets pilotes à grande échelle, normalisation, virtualisation des réseaux, logiciels en nuage, ainsi que les réseaux d’accès radio fondés sur l’IA. Ce champ d’application actuel est toutefois trop restreint pour relever les défis recensés. En outre, le budget existant de 900 millions d’euros pour la période 2021-2027 est axé sur les activités de R&I. Ce montant est faible au regard des défis en jeu, si l’on considère ce qui serait nécessaire pour mettre en place l’écosystème de connectivité de nouvelle génération couvrant l’ensemble du continuum informatique.

    En décembre 2023, la Commission a autorisé jusqu’à 1,2 milliard d’euros d’aides d’État accordées par sept États membres en faveur d’un projet important d’intérêt européen commun (PIIEC) dans le domaine des infrastructures et services en nuage de nouvelle génération (PIIEC CIS), qui devrait débloquer 1,4 milliard d’euros supplémentaires d’investissements privés 68 . Dès juin 2023, la Commission a approuvé un autre PIIEC visant à soutenir la recherche, l’innovation et le premier déploiement industriel de technologies de microélectronique et de communication tout au long de la chaîne de valeur (PIIEC ME/CT), impliquant 14 États membres, représentant 8,1 milliards d’euros de financement public, suscitant 13,7 milliards d’euros d’investissements privés. Les principaux fournisseurs de puces électroniques et d’équipements de réseau participent au développement de puces avancées pour les réseaux de communications électroniques.

    3.1.02.Prochaines étapes

    Afin de garantir une utilisation plus efficace des ressources, l’UE doit mettre en place une approche coordonnée du développement d’infrastructures de connectivité et de calcul intégrées, en veillant à ce que les fournisseurs de connectivité d’aujourd’hui deviennent des fournisseurs de connectivité et d’informatique collaboratives de demain, capables d’orchestrer les différents éléments informatiques dont cet écosystème a besoin. Pour ce faire, il faut non seulement développer un écosystème synergique entre les acteurs des différents secteurs, mais aussi repenser les interactions et les synergies qui peuvent être établies entre les programmes de financement existants de l’UE. Cela est nécessaire pour maximiser l’impact de la R&I sur les réseaux de communication et de calcul, mais aussi le renforcement des capacités et les éléments préalables au déploiement, compte tenu notamment de la convergence des technologies et des services (continuum nuage-périphérie, IA, connectivité). Ces programmes pourraient s’articuler autour des objectifs généraux consistant à améliorer les capacités industrielles de l’UE, à contribuer à une connectivité et à une infrastructure informatique sûres et résilientes et à renforcer la compétitivité de l’Europe. En fin de compte, cela pourrait créer un environnement propice aux futurs réseaux et applications en cours de développement, d’essai, de déploiement et d’intégration dans l’UE.

    Une étape essentielle vers le réseau 3C pourrait être franchie en proposant, dans les prochains programmes de travail, un certain nombre de projets pilotes à grande échelle qui mettent en place des infrastructures et des plateformes intégrées de bout en bout et rassemblent des acteurs de différents segments de la chaîne de valeur de la connectivité et au-delà. Ces projets pourraient être pris en considération en vue d’un financement au titre du programme Horizon Europe ou de ses successeurs.

    Si elles sont menées à bien, ces infrastructures pilotes seraient utilisées pour tester des technologies et des applications innovantes (y compris les démonstrations, la validation de concepts et le déploiement précoce des technologies). Elles pourraient être rattachées, le cas échéant, au réseau européen de centres de compétences dans le domaine des semi-conducteurs, qui maximisent les synergies avec les pôles européens d’innovation numérique. Les premiers projets pilotes pourraient se concentrer sur les corridors 5G, la santé en ligne et les communautés intelligentes. Ces premiers projets pilotes à grande échelle, trois au maximum, encourageraient non seulement les échanges entre les acteurs de la chaîne de valeur traditionnelle des communications électroniques et les acteurs tout au long du continuum informatique au sens large, mais aussi avec les secteurs non numériques, en veillant à mettre l’accent sur des applications concrètes. Les infrastructures et plateformes intégrées rassembleraient non seulement les technologies clés, des jeunes pousses aux grandes entreprises, mais aussi les chercheurs, et attireraient des talents pour développer leurs connaissances et leurs compétences.

    Là encore, l’Europe peut s’appuyer sur des initiatives existantes pour développer des technologies et des applications innovantes. Un exemple est le développement de corridors 5G, financés au titre du programme numérique du MIE, dans lequel les corridors peuvent être utilisés pour tester et éprouver dans des projets pilotes de nouvelles technologies et applications, en particulier la conduite connectée et autonome, mais aussi des applications avancées dans le domaine de la logistique et de l’internet des objets. Un autre exemple est celui des communautés intelligentes, dans lesquelles des architectures pilotes pourraient être utilisées pour expérimenter des systèmes et des applications d’IA financés au titre de l’initiative phare de l’UE en matière d’IA, afin de maximiser les synergies et de faire en sorte que l’informatique de périphérie serve de station d’approvisionnement pour les algorithmes fondés sur l’AI. Outre les agglomérations urbaines, un projet pilote de communautés intelligentes pourrait tenir compte des défis spécifiques de l’environnement rural, de sorte que toutes les solutions soient adaptées aux zones rurales.

    Pour réussir, l’Europe doit mobiliser tous les acteurs concernés dans un écosystème d’informatique collaborative. Outre l’association de l’industrie de la 6G, les principaux partenaires du secteur privé au sein de l’entreprise commune Réseaux intelligents, l’Alliance européenne pour les données industrielles, la périphérie et le nuage rassemble des acteurs de l’environnement en nuage et de périphérie. Concrètement, au cours des prochaines années, l’entreprise commune «Réseaux et services intelligents» pourrait coordonner la création de synergies immédiates avec les programmes pertinents et les PIIEC. À la suite de la publication du présent livre blanc, la Commission commencera rapidement à élaborer, avec les parties prenantes, les spécifications de cette tâche, en s’appuyant notamment sur les travaux en cours visant à développer et à déployer les capacités du continuum nuage-périphérie européen des télécoms (Telco Edge Cloud) comme le prévoit la feuille de route pour les technologies industrielles élaborée par l’Alliance européenne pour les données industrielles, la périphérie et le nuage.

    Les PIIEC existants, en particulier dans le domaine de la microélectronique et de la connectivité, ainsi que des infrastructures et services en nuage de nouvelle génération, pourraient être utilisés pour structurer l’innovation et accélérer la pénétration sur le marché. En octobre 2023, la Commission a lancé un forum européen conjoint pour les projets importants d’intérêt européen commun (JEF-IPCEI), qui se concentre sur l’identification et la priorisation des technologies stratégiques pour l’économie de l’UE susceptibles de faire l’objet de futurs projets importants d'intérêt européen commun (PIIEC). Dans le cadre du JEF-PIIEC, et sur la base de l’expérience acquise dans le cadre de l’entreprise commune Semi-conducteurs (EC Semi-conducteurs), du CEF2, du programme pour une Europe numérique et des fonds nationaux et régionaux pertinents, la possibilité de compléter ces mesures par un nouveau PIIEC afin de répondre à la nécessité de déployer des infrastructures de grande ampleur et d’étudier l’intégration d’autres domaines cibles tout au long du continuum informatique, tels que les puces électroniques, afin de répondre de manière adéquate aux futures demandes massives de calcul de l’intelligence artificielle, pourrait être examinée.

    En outre, la plateforme «Technologies stratégiques pour l’Europe» (STEP) stimulera les investissements dans les technologies critiques en Europe, y compris les technologies profondes et numériques. Elle introduit également le label de souveraineté, un label de qualité de l’UE pour les projets contribuant à sa souveraineté.

    À plus long terme, pour tirer davantage parti des capacités technologiques de l’UE, il conviendrait de déterminer si des domaines connexes essentiels pour les futurs réseaux pourraient être regroupés dans le cadre d’une gouvernance coopérative unique, et de quelle manière. Il conviendrait également de déterminer la combinaison appropriée de sources budgétaires au niveau de l’Union, au niveau national et au niveau de l’industrie, y compris le rôle des différents programmes de l’UE possibles. On pourrait s’inspirer des exemples du récent train de mesures sur l’innovation dans le domaine de l’IA 69 et du règlement sur les semi-conducteurs, qui ont prorogé les mandats des entreprises communes respectives pour le calcul à haute performance et les semi-conducteurs européens (EuroHPC et Semi-conducteurs). Les futures priorités de recherche pourraient inclure des solutions de sécurité dans les modules matériels et logiciels critiques, l’interopérabilité et la fédération des infrastructures de périphérie et en nuage soutenues par des activités en open source, des chaînes d’approvisionnement diversifiées pour les produits, les composants et les matériaux, tout en renforçant le savoir-faire dans l’UE, et des solutions de durabilité couvrant divers aspects du domaine de la mise en réseau («6G durable») et diverses industries verticales, telles que la fabrication, les transports, l’énergie et l’agriculture («6G pour la durabilité»).

    Des activités accrues et mieux alignées en matière de R&I qui soient intégrées dans une stratégie industrielle pourraient renforcer la capacité technologique de l’Europe, créer des synergies, garantir la cohérence et tirer parti de l’effet multiplicateur des actions de l’UE en faveur des investissements privés. Elles pourraient également fournir les moyens de garantir la sécurité et la résilience de l’UE dans ce domaine et d’améliorer la coopération entre les acteurs européens dans un écosystème qui couvre l’ensemble du continuum informatique, en les aidant à affronter la concurrence sur un pied d’égalité avec les concurrents mondiaux. L’objectif serait de garantir la disponibilité de solutions européennes capables d’établir un point d’entrée unique pour le financement de l’UE sur l’ensemble du continuum, depuis radiofréquences jusqu’à la capacité de calcul en périphérie et en nuage en passant par les puces, les logiciels et les algorithmes, de sorte que les réseaux en tant que service ne soient pas une fin en soi, mais un outil de l’orchestration, alimentant des services et des applications «fabriqués en Europe».

    3.1.03.Résumé des scénarios possibles

    ·Scénario 1: la Commission pourrait envisager de proposer des projets pilotes à grande échelle consistant à mettre en place des infrastructures et des plateformes intégrées de bout en bout pour le télénuage et la périphérie. Dans un deuxième temps, ces infrastructures pilotes seraient utilisées pour orchestrer le développement de technologies innovantes et d’applications d’IA pour différents usages.

    ·Scénario 2: le forum européen conjoint de la Commission pour les projets importants d’intérêt européen commun (JEF-IPCEI), qui est chargé de l’identification et de la priorisation des technologies stratégiques pour l’économie de l’UE susceptibles d’être des candidats pertinents pour de futurs projets importants d’intérêt européen commun (PIIEC), pourrait étudier la possibilité de donner suite aux réalisations de l’IPCEI-CIS en mettant sur pied un nouveau PIIEC axé sur les infrastructures.

    ·Scénario 3: des investissements massifs dans les capacités de connectivité sont nécessaires pour soutenir la création d’un écosystème de connectivité et d’informatique collaboratives. La Commission pourrait envisager différentes options pour encadrer ces investissements par un cadre de soutien simplifié et coordonné pour un véritable marché unique numérique s’appuyant sur des investissements européens et nationaux, publics et privés.

    oCela devrait permettre de rationaliser les procédures et d’améliorer les synergies entre les instruments et les programmes existants (notamment grâce à l’expérience acquise avec l’entreprise commune Semi-conducteurs, les projets importants d’intérêt européen commun, le mécanisme pour l’interconnexion en Europe et le programme pour une Europe numérique), en confiant éventuellement un rôle de coordination plus important à l’entreprise commune «Réseaux et services intelligents» (SNS JU), sous la forme d’un projet pilote au titre du cadre financier pluriannuel actuel, et en assurant la liaison avec des parties prenantes telles que l’alliance européenne pour les données industrielles, la périphérie et le nuage, le cas échéant.

    oIl s’agirait d’étudier les moyens de renforcer la cohérence, la simplification et la clarté des futures actions de soutien, sans préjudice de la conception des programmes institutionnels et des prérogatives en matière d’allocation budgétaire au titre du prochain cadre financier pluriannuel.

    3.2.Pilier II: réaliser le marché unique numérique

    3.2.01.Objectifs

    L’un des principaux objectifs du code est de favoriser la connectivité en établissant un cadre réglementaire propice à l’accroissement des investissements dans les réseaux à très haute capacité. Dans cette optique, diverses dispositions législatives ayant trait aux règles en matière d’accès et à la gestion du spectre radioélectrique ont été conçues pour faciliter les investissements et réduire les formalités administratives. Cependant, malgré l’introduction d’un certain nombre de dispositions nouvelles dans le code, les résultats n’ont pas été satisfaisants (par exemple, les dispositions concernant la procédure d’autorisation conjointe pour l’octroi de droits d’utilisation individuels du spectre radioélectrique, le co-investissement et les entreprises uniquement de gros n’ont pas été beaucoup utilisées dans la pratique). Cela s’explique non seulement par les retards de transposition dans plusieurs États membres, mais aussi par la complexité du cadre et de ses procédures.

    Tout en renforçant les objectifs d’investissement, le code vise également à promouvoir la concurrence (tant au niveau des infrastructures qu’au niveau des services), à contribuer au développement du marché intérieur et à procurer des avantages à l’utilisateur final. Il est présupposé que la concurrence stimule l’investissement pour répondre la demande du marché et profite aux consommateurs et aux entreprises. Si tous ces principes demeurent valables, il convient également, en raison des évolutions technologiques récentes et des nouveaux défis planétaires, de réfléchir à un élargissement du cadre d’action en vue d’y intégrer des problématiques plus vastes telles que la durabilité, la compétitivité industrielle et la sécurité économique.

    Quelles que soient les mesures qui pourraient être prises à l’avenir pour relever ces nouveaux défis, la protection des utilisateurs finals, y compris des consommateurs, conservera une place importante parmi les objectifs poursuivis. En définitive, toute législation future devrait avoir pour fondement constant la «déclaration européenne sur les droits et principes numériques pour la décennie numérique» du 15 décembre 2022, qui place les citoyens au cœur de la transformation numérique dans l’Union européenne et dont toutes les entreprises, y compris les PME, devraient tirer profit.

    3.2.02.Champ d’application

    Eu égard aux évolutions décrites plus haut (voir le point 2.3.4), et en particulier aux progrès rapides de la convergence entre les réseaux de communications électroniques et l’informatique en nuage, il pourrait être envisagé de repenser le champ d’application du cadre réglementaire des communications électroniques. Actuellement, un utilisateur final envoie ou reçoit des données qui «voyagent» sur différents réseaux ou segments de réseau (pouvant comprendre aussi bien des câbles sous-marins que des réseaux d’accès locaux, par exemple) et auxquelles s’appliquent des règles différentes. Une telle différence dans les règles applicables (par exemple, en matière d’interception légale) paraît difficilement justifiable.

    Or, les changements technologiques récents offrent la possibilité de conjuguer l’activité des communications électroniques et des services en nuage avec la mise en place d’opérateurs de réseau central paneuropéens. Ainsi, la mise en nuage des réseaux 5G peut présenter des avantages considérables pour les fournisseurs de réseaux de communications électroniques et leur permettre de profiter des mêmes économies d’échelle que les fournisseurs d’informatique en nuage, notamment en unifiant dans le nuage la fonctionnalité de réseau central partagée par plusieurs réseaux de communications électroniques nationaux. Cependant, en ce qui concerne les réseaux de communications électroniques, cette intégration des fonctionnalités dans des centres de données en nuage centralisés qui offrent des fonctionnalités de réseau central à l’échelle transfrontière se heurte actuellement à divers obstacles juridiques dus à l’absence d’harmonisation des cadres juridiques dans les États membres, notamment dans le domaine des autorisations.

    Du point de vue des services, la fourniture homogène d’applications selon le modèle NaaS reposant sur des réseaux centraux 5G autonomes, sur le découpage en tranches du réseau et sur les ressources du spectre disponibles dans les différents États membres pourrait offrir un nouvel attrait économique aux opérations transfrontières.

    Du point de vue des réseaux, il convient de rappeler que, contrairement au trafic vocal (qui est facturé selon le principe dit «calling party’s network pays», selon lequel c’est le réseau appelant qui paie), l’interconnexion IP s’avère reposer actuellement sur des accords de transit et d’échange de trafic fonctionnant généralement selon une approche «bill-and-keep» dans laquelle le fournisseur de services internet ne perçoit pas de paiements au niveau de gros pour la terminaison d’appels. Selon le modèle généralement attribué au marché de l’interconnexion IP, le fournisseur de services internet récupère en principe ses coûts au niveau de détail en vendant la connectivité internet à ses utilisateurs finals, qui génèrent du trafic internet lorsqu’ils récupèrent des données/contenus proposés par les fournisseurs d’applications de contenu. Pour l’échange de trafic payant supplémentaire et pour le transit, le paiement se fait généralement sur la base de la capacité fournie au point d’interconnexion. Les principaux changements intervenus récemment dans l’ensemble de l’architecture mondiale de l’internet et de l’interconnexion sont causés et alimentés par l’expansion, assurée par les fournisseurs d’applications de contenu, de leurs propres infrastructures dorsales et de transmission. Cette situation modifie la relation d’interconnexion sous forme de transit et d’échange de trafic 70 , l’échange «on-net» étant désormais prédominant 71 , en ce sens que les serveurs de stockage locaux dédiés (serveurs cache) des réseaux de diffusion de contenu sont colocalisés directement sur les réseaux des fournisseurs de services internet. Il en résulte une interaction très directe et coopérative entre les fournisseurs d’applications de contenu et les fournisseurs de services internet, étant donné qu’ils doivent déterminer de manière bilatérale les conditions techniques et commerciales applicables au transit et à l’échange de trafic (par exemple, en ce qui concerne l’emplacement des points de transfert de trafic, le niveau des tarifs de transit, la question de l’échange de trafic gratuit ou payant, ou encore les aspects relatifs à la qualité et à l’efficience).

    Il existe très peu de cas connus d’intervention (par une autorité de régulation ou par un tribunal) dans les relations contractuelles entre les acteurs du marché 72 , qui fonctionne bien d’une manière générale, comme le font également les marchés du transit et de l’échange de trafic. Ce point fait néanmoins l’objet d’un vif débat 73 . En outre, une augmentation du nombre de cas ne peut être exclue à l’avenir. Si tel était le cas, sous réserve d’une évaluation rigoureuse, des mesures d’intervention pourraient être envisagées pour garantir un règlement rapide des litiges. Par exemple, il serait possible de faciliter davantage les négociations et les accords commerciaux en prévoyant un calendrier spécifique et en envisageant le recours à des mécanismes de règlement des litiges dans l’hypothèse où des accords commerciaux n’auraient pas pu être conclus dans un délai raisonnable. En pareil cas, les ARN ou (dans les affaires revêtant une dimension transfrontière) l’ORECE pourraient être sollicités, car ils disposent des connaissances techniques nécessaires et d’une expérience importante en matière de règlement des litiges et d’analyse du fonctionnement du marché.

    3.2.03.Autorisation

    Le régime d’autorisation générale établi en 2002 et maintenu dans le code a remplacé l’ancien régime de licences et d’autorisations individuelles, en fixant au préalable des conditions d’application générale pour la fourniture de réseaux et de services de communications électroniques. Toutefois, compte tenu du caractère local des réseaux physiques et du fait que les fréquences radioélectriques sont considérées comme une ressource nationale (voir le point 3.2.5), les autorisations sont soumises à des conditions établies par les autorités compétentes des États membres et sont accordées et mises en œuvre au niveau national.

    Or, en raison du développement de l’informatique en nuage et de la logiciellisation, la fourniture de réseaux est de moins en moins liée à la réalité géographique. En outre, la couverture des réseaux sans fil, tels que les réseaux satellitaires, peut s’étendre au-delà des frontières nationales, voire européennes. Bien qu’il subsiste des avantages manifestes à conserver la mise en œuvre des régimes d’autorisation au niveau national, en particulier pour l’accès local et les services de détail, la diversité des conditions d’attribution des fréquences radioélectriques d’un État membre à l’autre peut manquer d’efficience, notamment pour les communications par satellite. Il pourrait donc se justifier, sur le plan économique et technique, d’adopter une approche plus européenne.

    Le développement rapide des services de la société de l’information s’explique notamment par la possibilité de les fournir dans l’ensemble de l’Union en se conformant simplement à la législation de l’État membre d’établissement (principe dit du «pays d’origine»), sans qu’il soit nécessaire de se conformer à la législation de chaque État membre dans lequel les services sont fournis. Si la virtualisation des réseaux peut techniquement permettre la fourniture de réseaux centraux à l’échelle transfrontière et créer un marché des services de réseau central, le modèle économique ne pourra pas se développer s’il n’atteint pas un volume suffisant ou s’il est entravé par des régimes réglementaires différents. Pour permettre au modèle économique de se développer, l’instauration d’un ensemble unique de règles permettant d’octroyer des autorisations aux fournisseurs de réseaux centraux et de services de réseau central selon le principe du «pays d’origine» pourrait créer une approche équilibrée à l’égard de tous les types de fournisseurs de réseaux et de services numériques en favorisant leur égalité. Au sein de l’écosystème convergent, dans lequel la limite entre les fournisseurs «traditionnels» de réseaux et de services numériques, d’une part, et les fournisseurs de services en nuage, par exemple, d’autre part, tend à s’estomper, le traitement réglementaire de ces services devrait être plus global. Il pourrait également réduire la charge administrative en favorisant une éventuelle rationalisation des obligations déclaratives des différents acteurs.

    L’application d’un ensemble unique de règles fondées, par exemple, sur le principe du «pays d’origine» pour les réseaux centraux et les services de réseau central permettrait aux opérateurs de réseau central de l’UE d’exploiter pleinement le potentiel du marché intérieur pour atteindre une taille critique, de profiter d’économies d’échelle et de réduire leurs dépenses en capital et leurs coûts de fonctionnement, ce qui renforcerait leur situation financière, attirerait davantage d’investissements privés et contribuerait, en définitive, à la compétitivité de l’UE. Dans ce scénario, la législation applicable et l’autorité compétente pour la régulation de l’accès aux réseaux et aux services de détail fournis aux utilisateurs finals resteraient les mêmes. Ce seraient aussi les plus proches des utilisateurs finals, c’est-à-dire celles de l’État membre de fourniture du réseau d’accès et du service de détail. Cela permettrait également de prendre dûment en considération les spécificités des marchés locaux pour définir les mesures correctrices appropriées en matière d’accès et garantir aux utilisateurs finals le niveau de protection le plus élevé.

    3.2.04.Lever les obstacles à la centralisation des réseaux centraux

    Outre les obstacles réglementaires de nature sectorielle mentionnés plus haut, les contributeurs à la consultation exploratoire ont fait état d’autres obstacles réglementaires à l’établissement d’un véritable marché unique numérique, tels que la disparité des obligations dans l’ensemble de l’UE en ce qui concerne les exigences relatives au signalement des incidents de réseau/service ou aux enquêtes de sécurité, la mise en place de capacités d’interception légales, les régimes de conservation des données, les exigences en matière de respect de la vie privée et de relocalisation ou les obligations en matière de cybersécurité et de communication d’informations 74 .

    Compte tenu de la souveraineté des États membres et de leur compétence pour les questions de sécurité, il convient de se demander si et comment ces autres obstacles pourraient être levés pour atteindre une échelle suffisante et renforcer l’innovation. Par exemple, en ce qui concerne les incidents de sécurité ou les enquêtes de sécurité, en vue d’assurer une harmonisation accrue et un niveau de sécurité élevé, diverses mesures pourraient être envisagées, telles que l’instauration d’une coopération étroite entre les États membres hébergeant un réseau central; la garantie offerte aux opérateurs de réseau central de pouvoir exiger de toutes les autorités compétentes des États membres dans lesquels ils fournissent des réseaux d’adopter un ensemble de conditions et d’exigences devant être appliquées de manière cohérente sur l’ensemble du réseau et vérifiées par l’intermédiaire d’un guichet unique; la définition d’exigences de sécurité pour les opérateurs de réseau central sous la forme d’orientations au niveau de l’UE, etc. En ce qui concerne les obligations en matière de contrôle de l’application des règles, telles que l’interception légale, les opérateurs de réseau central pourraient, par exemple, désigner dans chaque État membre dans lequel ils opèrent un point de contact pour les autorités répressives nationales compétentes. Des mesures non contraignantes, telles qu’une recommandation ou des lignes directrices de l’UE, pourraient être utiles pour déterminer et préciser ces solutions en matière de sécurité et de contrôle de l’application des règles.

    3.2.05.Spectre radioélectrique

    Le spectre radioélectrique joue un rôle essentiel dans la connectivité sans fil et devrait être géré de la manière la plus coordonnée possible entre tous les États membres pour atteindre les objectifs de l’Union en matière de développement durable, de croissance économique équilibrée, de cohésion économique, sociale et territoriale et de solidarité entre les États membres. Les tentatives antérieures visant à renforcer la coordination au niveau de l’UE en matière de gestion des fréquences radioélectriques n’ont pas été totalement couronnées de succès et, parallèlement, des divergences et des retards ont été observés dans les procédures d’autorisation de l’utilisation du spectre pour le déploiement de la 5G dans les États membres. Il en résulte que l’Europe accuse aujourd’hui un retard par rapport à ses concurrents internationaux en ce qui concerne l’adoption de la 5G. Il ressort des observations formulées dans la section 2 qu’il est possible d’améliorer encore la politique en matière de spectre radioélectrique dans l’ensemble de l’UE et de mettre la gestion du spectre en phase avec les besoins et les objectifs de la décennie numérique.

    Adapter la gestion du spectre radioélectrique aux besoins de la décennie numérique: enseignements tirés des efforts législatifs antérieurs

    Un certain nombre de propositions de la Commission européenne visant à harmoniser davantage la libération des fréquences et l’octroi de licences d’utilisation du spectre radioélectrique pour les services mobiles se sont heurtées à une résistance considérable au cours des dix dernières années. Compte tenu des retards, de la fragmentation et, dans certains cas, d’une rareté artificielle ayant entraîné des prix très élevés pour le spectre radioélectrique, il convient d’examiner si certaines solutions proposées dans le cadre d’initiatives législatives antérieures, mais qui n’ont finalement pas été retenues par les colégislateurs, auraient permis d’éviter une partie des effets négatifs qui se manifestent aujourd’hui, comme en témoigne le retard qu’accuse le déploiement de la 5G. Vu la nécessité d’achever le déploiement de la 5G et d’assurer celui de la 6G en temps utile, il est capital, pour la compétitivité de l’UE, de pratiquer une approche plus coopérative entre le niveau national et le niveau européen. Dans ce contexte, les aspects qui méritent l’attention pour déboucher, le cas échéant, sur des actions utiles sont les suivants: i) la planification au niveau de l’UE d’une quantité de radiofréquences suffisante pour les futurs scénarios d’utilisation, ii) le renforcement de la coordination au niveau de l’UE du calendrier des enchères et iii) la recherche d’une plus grande uniformité en matière d’autorisations d’utilisation du spectre radioélectrique.

    Aucun service sans fil ne peut être déployé en l’absence de ressources radioélectriques suffisantes. Il faut notamment tenir compte de domaines nouveaux et en évolution tels que les utilisations verticales, la 6G, les applications de l’internet des objets, le WiFi et l’utilisation du spectre à l’échelon local. À ces impératifs s’ajoutent le développement rapide des communications par satellite, la nécessité de garantir la sécurité des applications gouvernementales et commerciales, y compris la connectivité par satellite directe à l’appareil, et l’utilisation des fréquences attribuées aux services mobiles par satellite et, le cas échéant, de Terre. À cet égard, il convient d’examiner s’il est opportun, pour garantir le déploiement simultané des nouveaux perfectionnements technologiques dans l’ensemble de l’UE, d’inscrire dans la législation une feuille de route de l’UE en matière de spectre radioélectrique en vue du déploiement de la 6G, dont le contrôle de l’application se ferait de manière coordonnée par l’ensemble des États membres.

    Une libération et une redistribution coordonnée des fréquences seraient essentielles dans ce contexte. Un exemple majeur réside dans la désactivation coordonnée des réseaux 2G et 3G (assortie de la libération des fréquences correspondantes pour d’autres utilisations), parallèlement à la mise en œuvre de solutions de continuité pour d’importants services traditionnels tels que les communications d’urgence et les communications critiques (par exemple, eCall 75 ).

    Dans le même temps, il importe de renforcer l’efficacité de l’utilisation du spectre afin de répondre à l’accélération des besoins des applications sans fil existantes et futures. Ainsi, il pourrait être envisagé d’assortir de conditions plus strictes les droits d’utilisation du spectre, le cas échéant, notamment selon le principe «use it or lose it» (utilisé ou perdu) afin d’éviter la création d’obstacles à l’entrée sur le marché et l’attribution inefficace de ressources rares. Des gains d’efficience pourraient également être réalisés, dans la mesure des possibilités, par une utilisation partagée et flexible du spectre radioélectrique au moyen de solutions innovantes et dynamiques ou de nouvelles formes de licences et de nouvelles méthodes reposant, par exemple, sur des bases de données et un accès partagé sous licence (LSA), la géolocalisation et l’intelligence artificielle. Outre la possibilité de créer de nouveaux services, l’efficacité du spectre peut améliorer considérablement l’expérience des consommateurs, la qualité du service, la compétitivité et la durabilité environnementale. Dans le même temps, il convient de tenir compte des besoins des utilisateurs finals, tels que les personnes handicapées qui dépendent de technologies d’assistance nécessitant une disponibilité suffisante et stable du spectre radioélectrique.

    De plus, dans l’optique du déploiement des prochaines technologies de communication sans fil ou du renouvellement des licences existantes pour les communications sans fil à haut débit, l’Europe ne peut pas se permettre d’étaler une nouvelle fois sur près de dix ans le processus d’autorisation d’utilisation du spectre pour la nouvelle génération de technologies mobiles, avec d’énormes disparités entre les États membres quant au calendrier des enchères et au déploiement des infrastructures de réseau. Afin d’éviter que les mêmes problèmes ne se posent à l’avenir, il convient d’étudier les moyens de mieux coordonner le calendrier des enchères et de le resserrer dans l’ensemble de l’UE.

    Le marché unique pourrait tirer profit d’une meilleure coordination des conditions et des droits en matière d’autorisation et d’utilisation du spectre, y compris en leur conférant une durée appropriée pour favoriser l’efficience des investissements dans l’ensemble de l’UE. Dans ce contexte, le mécanisme volontaire d’évaluation par les pairs en matière d’autorisation du spectre qui a été adopté en vertu du code ne s’est pas révélé efficace à ce jour. Par conséquent, au lieu de ce mécanisme, un mécanisme de notification similaire à celui utilisé pour l’analyse de marché, tel qu’il résulte de l’article 32 du code, pourrait être envisagé pour renforcer la coordination des procédures d’autorisation et des conditions d’utilisation du spectre radioélectrique dans le marché intérieur.

    Nouveaux défis pour la gestion du spectre radioélectrique

    Dans le cadre de la réflexion sur les réseaux centraux (faisant l’objet du point 3.2.4), il convient d’étudier la possibilité, du point de vue de la gestion des fréquences, d’habiliter les opérateurs de réseaux centraux de l’UE et les opérateurs plurinationaux à exiger des autorités compétentes qu’elles alignent davantage les procédures et les conditions d’autorisation au niveau national afin d’accroître leurs capacités de communication. Cette exigence pourrait s’appliquer en premier ressort aux droits d’utilisation du spectre ou aux autorisations générales en vigueur, notamment en ce qui concerne la durée des licences, les conditions d’utilisation du spectre, telles que les objectifs/obligations en matière de qualité de service dans le cadre des objectifs de connectivité à l’horizon 2030, ainsi que la possibilité d’intégrer les réseaux satellitaires et terrestres dans de nouveaux réseaux hybrides. Leur alignement pourrait permettre aux opérateurs paneuropéens ou plurinationaux d’opérer dans un environnement transfrontière plus harmonisé. Il pourrait également accroître l’efficience et garantir la sécurité juridique pour les opérateurs de réseaux centraux de l’UE et les opérateurs plurinationaux, tout en respectant les droits déjà accordés.

    En outre, le développement rapide du secteur des satellites et sa nature transfrontière appellent en particulier de nouvelles réflexions sur l’instauration de régimes d’octroi de licences renforcés ou communs (comprenant même la sélection et l’autorisation au niveau de l’UE, le cas échéant), afin de favoriser l’émergence d’opérateurs transfrontières ou véritablement paneuropéens, tout en laissant aux États membres les recettes du spectre. Cette approche compléterait la future proposition d’acte législatif de l’Union pour des activités spatiales sûres, résilientes et durables dans l’Union (législation spatiale de l’UE), qui doit donner corps à des activités spatiales sûres, résilientes et durables dans un souci de cohérence pour tous les exploitants d’infrastructures spatiales.

    L’efficacité du spectre et les incitations à l’investissement devraient être considérées comme une priorité, dans le respect des exigences liées à la concurrence, pour définir les mesures destinées à modeler le marché, par exemple en ce qui concerne la réservation de parties du spectre pour les nouveaux entrants ou la fixation de plafonds en matière de spectre ainsi que la conception générale des procédures d’enchères. À cet égard, il est à noter que, sans égaler le montant des enchères pour la 3G et la 4G, les enchères pour la 5G qui se sont tenues en Europe entre 2015 et 2023 ont néanmoins permis de lever quelque 26 milliards d’euros 76 , sans parler des taxes administratives dues aux autorités nationales pour la gestion du spectre. Ce montant payé par les opérateurs s’est ajouté aux investissements nécessaires pour le déploiement de l’infrastructure de réseau. Il en a résulté (notamment lorsque le prix du spectre a connu des hausses artificielles indues au regard du marché) des retards de déploiement et des insuffisances dans la qualité et les performances du réseau, au détriment des consommateurs et des entreprises. Afin de pallier l’important déficit d’investissement dans le déploiement de réseaux de communications avancés, la charge financière pourrait être allégée par l’adoption de procédures d’adjudication axées sur les investissements dans les infrastructures.

    Étant donné que la portée des tâches qu’il faudra développer au niveau de l’UE en ce qui concerne le spectre radioélectrique pourrait s’étendre, pour englober notamment les sélections ou autorisations coordonnées, harmonisées ou communes, il convient d’envisager un mécanisme de gouvernance du spectre plus intégré au niveau de l’UE.

    Dans une perspective internationale, une approche plus cohérente de la gestion du spectre s’impose afin de garantir la souveraineté numérique de l’UE et de défendre ses intérêts à l’extérieur. À cet égard, l’UE devrait conserver le contrôle total des décisions relatives à l’utilisation du spectre radioélectrique en son sein, en particulier face aux défis géopolitiques et de sécurité à relever pour garantir la cybersécurité, l’indépendance et l’intégrité de ses réseaux de communication. Cela comprend notamment l’élaboration de mesures d’harmonisation technique pour l’utilisation du spectre radioélectrique dans l’Union 77 et la préparation de négociations internationales telles que les conférences mondiales sur les radiocommunications. Les États membres, le cas échéant au niveau du Conseil, devraient pouvoir prendre position sur la gestion du spectre en toute indépendance par rapport aux acteurs de pays tiers. Ainsi, il conviendrait de reconsidérer le rôle de la Conférence européenne des administrations des postes et des télécommunications (CEPT) dans le processus de décision de l’UE, compte tenu de la représentation d’États non membres de l’UE au sein de cet organisme international. À l’avenir, tout en continuant à s’appuyer sur l’expertise technique de la CEPT, la Commission pourrait être assistée par un groupe ad hoc composé uniquement de représentants des États membres lorsque des questions liées à la souveraineté de l’UE sont susceptibles de se poser.

    Les intérêts de l’UE et des États membres devraient également être défendus aux frontières extérieures de l’UE et à l’échelle mondiale au moyen d’actions communes adoptées par l’ensemble des États membres et l’UE dans un esprit de solidarité pleine et entière. Ainsi, une action forte et efficiente s’impose pour lutter contre les brouillages radioélectriques préjudiciables qui touchent les États membres et trouvent leur origine dans des pays tiers, non seulement de la part de la Commission, mais aussi au niveau de tous les États membres agissant conjointement à l’appui des négociations bilatérales et des négociations multilatérales menées avec les pays tiers, y compris dans des enceintes internationales telles que l’Union internationale des télécommunications.

    Une meilleure harmonisation des droits d’utilisation du spectre existants et futurs, des orientations stratégiques claires pour la décennie à venir et de plus grandes certitudes dans la gestion du spectre dans l’ensemble de l’Union pourraient favoriser l’investissement, stimuler la compétitivité et l’effet d’échelle de l’UE et éliminer les obstacles qui subsistent en raison de la fragmentation causée par les pratiques nationales. Cela favoriserait, par là même, le développement du marché intérieur des communications à haut débit sans fil ultrarapides convergentes et permettrait la planification et la fourniture de services et réseaux multiterritoriaux intégrés et la réalisation d’économies d’échelle, afin d’encourager l’innovation et la croissance économique et de procurer des avantages à long terme aux utilisateurs finaux.

    3.2.06.Désactivation du réseau en cuivre

    La migration de l’ancien réseau en cuivre vers les nouveaux réseaux en fibre optique est un processus essentiel pour faciliter la transition vers le nouvel écosystème de connectivité et contribue à la réalisation des objectifs écologiques de l’UE 78 . Par ailleurs, elle favorisera l’adoption des nouveaux services et contribuera ainsi à accroître le rendement des investissements dans la fibre optique et à réaliser l’objectif de la décennie numérique selon lequel, d’ici à 2030, tous les utilisateurs finals en un lieu fixe devraient être couverts par un réseau en gigabit jusqu’au point de terminaison du réseau 79 .

    Si, en raison de la baisse de la consommation d’énergie, le démantèlement des réseaux en cuivre est susceptible de réduire les coûts d’exploitation des opérateurs qui fournissent en même temps une infrastructure plus durable, le processus nécessite une coordination entre toutes les parties prenantes. Des mesures prévisibles et équilibrées sont nécessaires pour éviter que la migration n’annule les gains concurrentiels, comme le déploiement d’infrastructures compétitives, dans le cadre du régime réglementaire en vigueur. Les besoins des utilisateurs finals, en particulier des groupes vulnérables et des utilisateurs finals handicapés, devraient également faire l’objet d’une attention particulière. Si le code contient déjà des dispositions sur les processus de migration et que la nouvelle recommandation sur le gigabit 80 a pour objet de fournir des orientations actualisées aux autorités de régulation, une trajectoire claire pour la migration enverrait un signal fort au secteur, encourageant d’autant les investissements.

    Le processus de désactivation du réseau en cuivre demande un suivi attentif. Les ARN devraient veiller à ce que l’organisation du processus de désactivation par l’opérateur disposant d’une puissance significative sur le marché (PSM), notamment en ce qui concerne son calendrier et sa programmation, n’autorise pas de comportement stratégique de nature à affaiblir la concurrence sur le marché de gros ou de détail. Certains opérateurs, du moins dans un premier temps, ne désactiveraient pas le réseau en cuivre (notamment s’il bénéficie du vectoring, qui permet d’améliorer la qualité des services à large bande sans approcher toutefois les performances offertes par les réseaux à très haute capacité). Il ne peut être exclu que certains opérateurs tentent de passer faire passer des clients du cuivre à la fibre optique par des stratégies de verrouillage qui compromettraient le modèle économique des autres opérateurs FTTH. Les opérateurs réduiraient les prix de gros de l’accès au réseau FTTH dans la perspective d’offres FTTH concurrentes afin de conserver les clients de gros. Par conséquent, les incitations réglementaires en faveur de la désactivation, telles qu’une augmentation temporaire des prix du cuivre pendant la phase de désactivation, comme il est proposé la recommandation sur le gigabit, devraient être accompagnées de garanties suffisantes pour préserver la concurrence (du même ordre que celles prévues à titre provisoire dans le règlement sur les infrastructures gigabit 81 et décrites dans la section suivante). En outre, une réglementation plus légère de l’accès aux réseaux à très haute capacité pourrait être imposée en appliquant une flexibilité tarifaire, sous réserve des mécanismes de sauvegarde prévus dans la nouvelle recommandation sur le gigabit.

    Eu égard aux considérations qui précèdent, la fixation d’une date recommandée pour la désactivation du réseau en cuivre offrirait une sécurité de planification dans l’ensemble de l’Union et procurerait aux utilisateurs finals des possibilités de connexion à la fibre optique dans des délais similaires. Compte tenu des circonstances nationales et des cibles en matière de connectivité fixées par le programme d’action pour la décennie numérique, il semble approprié de viser une désactivation du réseau en cuivre pour 80 % des abonnés dans l’UE d’ici à 2028 et pour les 20 % restants d’ici à 2030. Par sa clarté, une telle feuille de route pour la désactivation du réseau en cuivre contribuerait aux cibles en matière de connectivité à l’horizon 2030 et enverrait un signal fort aux investisseurs en traçant clairement la voie vers un retour sur investissement dans les réseaux en fibre optique.

    3.2.07.Politique en matière d’accès dans un environnement intégralement fibré

    La libéralisation du secteur des communications électroniques de l’UE avait pour objectif, conformément à la tendance observée à l’échelon mondial, d’ouvrir à la concurrence un secteur caractérisé par un monopole légal et de remédier aux conséquences historiques négatives qui en découlaient (inefficacité, absence d’innovation, piètre qualité, rentes de monopole, etc.). Cependant, dès le départ, le but a toujours été de limiter la réglementation sectorielle dans le temps pour favoriser, après une période de transition et en fonction de l’évolution de la concurrence, la migration du secteur vers un environnement fondé sur le marché et uniquement soumis aux règles de la concurrence.

    L’intervention réglementaire ex ante a, dans une large mesure, permis de lever les obstacles à la concurrence sur le marché national des réseaux fixes historiques. L’apparition de la concurrence après l’intervention réglementaire a permis de faire passer de 18 à 2 le nombre de marchés que les régulateurs nationaux ont dû évaluer ex ante entre 2003 et 2020 82 . Le nombre des marchés soumis à la réglementation ex ante et celui des opérateurs désignés comme puissants sur le marché ayant diminué 83 compte tenu de la progression du déploiement d’infrastructures de réseau concurrentes, il est opportun d’étudier la possibilité de ne formuler aucune recommandation concernant les marchés devant faire l’objet d’une réglementation ex ante au niveau de l’UE. La possibilité de ne soumettre les réseaux de communications électroniques qu’à une évaluation ex post pourrait être digne d’intérêt dans certaines circonstances, étant donné que la concurrence par les infrastructures se développe notamment dans de nombreuses zones densément peuplées où les clients finals bénéficient de divers services concurrents fondés sur au moins deux réseaux fixes à haut débit indépendants (par exemple, le câble coaxial et la fibre optique).

    Malgré ces progrès, certains obstacles subsistent (et pourraient persister dans un avenir proche) dans certaines zones géographiques (en particulier rurales/éloignées) et, dans de tels cas, l’intervention ex ante reste nécessaire. Toutefois, dans le but de favoriser le déploiement progressif de réseaux en fibre optique de substitution et de remplacer à terme les réseaux historiques d’anciens opérateurs historiques par des réseaux gigabit, la Commission et les ARN devront continuer à adapter leur intervention pour suivre le rythme de l’évolution du marché et assurer l’existence d’incitations à l’investissement, qui sont actuellement limitées par les craintes de doublonnement. En particulier, les ARN devraient surveiller le degré de concurrence entre les infrastructures, éventuellement en définissant des marchés géographiques distincts et en limitant la réglementation ex ante aux domaines où elle reste nécessaire ou en appliquant des mesures correctrices différenciées, en veillant à leur adéquation et à leur proportionnalité 84 .

    Afin de favoriser le déploiement d’un réseau paneuropéen, on pourrait envisager d’élaborer, en ce qui concerne la réglementation de l’accès, une boîte à outils qui se situerait plutôt à l’échelon de l’UE pour compléter ou remplacer, le cas échéant, l’approche nationale/locale. En effet, dans un environnement intégralement fibré, les produits d’accès peuvent être fournis de manière plus centralisée et au niveau supérieur du réseau sans que ni la capacité des demandeurs d’accès à entrer en concurrence sur le plan des services ni la qualité offerte aux utilisateurs finals n’en pâtisse. Ces mesures correctrices à l’échelon de l’UE existent déjà dans le cadre actuel et elles ont permis de résoudre des problèmes communs à l’ensemble de l’UE (par exemple, l’introduction de tarifs uniques de terminaison d’appel mobile à l’échelle de l’Union ou l’itinérance). Elles ont débouché sur une réglementation moins contraignante mais cependant efficace, réduisant la fragmentation. Dix ans après la première proposition de la Commission relative à des mesures correctrices harmonisées en matière d’accès 85 , la fourniture transfrontière de produits et de services de communications électroniques n’existe toujours pas. Par conséquent, il semble que le moment soit venu d’envisager, en matière d’accès, l’introduction de mesures correctrices à l’échelon de l’UE. Si les réseaux d’accès à haut débit resteront essentiellement locaux (en raison des schémas de demande et d’offre), un produit d’accès unifié et normalisé pourrait, en revanche, être de nature à faciliter la poursuite de l’intégration du marché unique. Cet outil devrait favoriser l’émergence d’opérateurs paneuropéens. Par exemple, l’accord provisoire concernant le règlement sur les infrastructures gigabit introduit une réglementation symétrique pour l’accès aux actifs de génie civil, notamment des dispositions spécifiques visant à protéger le modèle économique des opérateurs FTTP (bien que la mise en œuvre de ces dispositions par les États membres soit facultative dans certains cas). Les opérateurs qui investissent dans de nouveaux réseaux en fibre optique pourront refuser l’accès à leur infrastructure physique (nouvellement déployée) s’ils fournissent, selon des modalités et à des conditions équitables et raisonnables, un accès de gros tel que la fibre noire, le dégroupage de la fibre ou, dans certaines conditions, l’accès bitstream, permettant la fourniture de réseaux à très haute capacité 86 . Dans le même temps, parallèlement à la levée progressive de la réglementation ex ante pour favoriser les incitations à l’investissement en faveur du déploiement de réseaux physiques en fibre optique dans l’ensemble de l’UE, il est toujours possible de préserver la concurrence en prévoyant un accès virtuel afin de réduire les obstacles au déploiement de réseaux paneuropéens sur une base virtuelle.

    En particulier, dans les cas où la réglementation symétrique et harmonisée offerte par des mesures correctrices standard ne serait pas suffisante et où des défaillances du marché persisteraient, il serait possible de maintenir un filet de sécurité permettant de maintenir une réglementation ex ante locale. À cette fin, le «test des trois critères» 87 devrait permettre aux ARN de déterminer les marchés (infranationaux) qu’il reste nécessaire de soumettre à une réglementation ex ante pour remédier aux défaillances persistantes du marché. Dans ces zones géographiques (limitées), la réglementation concernant la PSM pourrait permettre de faire en sorte que les demandeurs d’accès locaux restent sur le marché et empêchent la reconstitution de monopoles dans des zones moins densément peuplées ou, plus généralement, en l’absence de pressions concurrentielles. La réglementation limitée fondée sur la PSM pourrait être accessoire ou remplacée par des règles symétriques plus générales et harmonisées concernant l’accès aux infrastructures de génie civil, assorties de garanties assurant la sécurité des investissements, pour tenir compte, par exemple, du risque de doublonnement déraisonnable.

    3.2.08.Service universel et caractère abordable des infrastructures numériques

    La disponibilité de services internet à haut débit adéquats, de la qualité nécessaire pour accomplir en ligne des tâches élémentaires, tels que l’utilisation de services d’administration électroniques ou de médias sociaux, la navigation sur internet ou l’exécution d’appels vidéo, est assurée partout dans l’UE. Par conséquent, dans la plupart des États membres, les obligations de service universel concernent plus particulièrement les consommateurs ayant de faibles revenus ou des besoins particuliers.

    Toutefois, à l’avenir, il se pourrait que les utilisateurs finals les plus faibles ne soient pas en mesure de bénéficier des meilleurs réseaux disponibles pour des raisons géographiques (s’ils se trouvent, par exemple, dans des zones rurales/isolées) ou à cause du prix des services, ce qui conduirait à une autre forme d’exclusion sociale. Il y a lieu de veiller à ce que cela n’entraîne pas de fracture numérique sociale et à ce que tous les utilisateurs finals puissent profiter des avantages d’une connectivité à très haut débit. Il est donc important de faire en sorte que les États membres prennent des mesures afin d’aider ces utilisateurs finals et de garantir une couverture géographique appropriée.

    Le Parlement européen, le Conseil et la Commission ont reconnu l’importance de garantir un service universel à l’avenir dans la «déclaration européenne sur les droits et principes numériques pour la décennie numérique». Conformément au principe 3 de cette déclaration, «Toute personne, où qu’elle se trouve dans l’UE, devrait avoir accès à une connexion numérique à haut débit et d’un prix abordable» et ils se sont engagés à «(...) garantir l’accès à une connectivité de haute qualité, et notamment un accès à internet, pour tous, où que ce soit dans l'UE, y compris pour les personnes à faible revenu».

    Les obligations de service universel sectorielles reposent sur deux modes de financement: le financement public et le financement sectoriel, ce dernier étant le mode prédominant. Jusqu’à présent, le financement sectoriel est resté limité aux fournisseurs de communications électroniques et les fournisseurs de NIICS en étaient exclus.

    Outre les mesures prises dans le domaine du service universel, un certain nombre d’États membres se sont efforcés de garantir l’accessibilité financière des réseaux par des financements publics prenant la forme de chèques en faveur de la connectivité, en vue de stimuler l’adoption des offres à haut débit. Les dernières lignes directrices relatives aux aides d’État en faveur du haut débit ont clarifié les conditions dans lesquelles ces chèques en faveur de la connectivité peuvent être conformes aux règles de l’UE en matière d’aides d’État et le règlement général d’exemption par catégorie exempte désormais certains types de chèques de l’obligation de notification. Ces chèques, financés par les États membres, peuvent être utilisés pour éviter toute fracture dans l’accès aux réseaux à très haute capacité ou pour y remédier.

    3.2.09.Durabilité

    L’attention portée aux aspects de durabilité environnementale de la transformation numérique de l’économie et de la société est une exigence essentielle du programme d’action pour la décennie numérique. En s’appuyant sur les propositions et actions de l’UE dans ce domaine, la récente COP 28 a lancé une «action numérique verte» destinée à renforcer le rôle du numérique dans la réalisation des objectifs internationaux en matière de changement climatique (par exemple, dans le domaine du réchauffement climatique, des déchets électriques et des combustibles fossiles), en accordant une place essentielle à la participation des secteurs des communications électroniques mobiles et des systèmes satellitaires. Cette évolution renforce l’action entreprise par l’Europe pour intégrer la durabilité dans les normes numériques dès la conception et lui confère une dimension internationale.

    Il est également important de sensibiliser davantage à la question de la durabilité des réseaux numériques. À cet égard, la Commission a évoqué, dans sa communication intitulée «Façonner l’avenir numérique de l’Europe» 88 , la possibilité d’introduire des «mesures de transparence sur l’empreinte environnementale des opérateurs de télécommunications» au niveau de l’UE. Dans le plan d’action de l’UE concernant la transition numérique du système énergétique 89 , la Commission a annoncé qu’elle collaborerait, en consultation avec la communauté scientifique et les parties prenantes, à l’élaboration d’indicateurs communs pour mesurer l’empreinte environnementale des services de communications électroniques. En outre, le plan d’action prévoit l’élaboration, d’ici à 2025, d’un code de conduite de l’UE pour la durabilité des réseaux de communications électroniques afin de contribuer à orienter les investissements vers des infrastructures durables. Dans le droit fil de cette annonce, la Commission a lancé, en 2023, une enquête visant à recueillir des contributions sur les indicateurs de durabilité auprès des parties prenantes participant à la conception, au développement, au déploiement et à l’exploitation de réseaux de télécommunications fournissant des services de communications aux clients tant professionnels que résidentiels 90 . Les résultats des travaux sur les indicateurs de durabilité seront publiés dans les semaines à venir.

    Outre qu’elles permettent de poursuivre des objectifs de politique publique en matière de durabilité, ces mesures en faveur de la transparence pourraient servir de base pour créer des incitations de nature à attirer des investissements vers le secteur des communications électroniques afin de rendre les TIC plus respectueuses de l’environnement («TIC vertes») et, par ricochet, favoriser l’écologisation d’autres secteurs («TIC pour l’écologie»), en particulier lorsque les fonds d’investissement orientent de plus en plus les capitaux vers des infrastructures vertes et durables. La Commission coopérera avec le secteur afin d’améliorer encore la facilité d’utilisation et le champ d’application potentiel de la taxinomie de l’UE pour les investissements verts dans les réseaux de communications électroniques, en veillant à ce qu’elle repose sur des indicateurs scientifiques solides et crédibles. À cet égard, la Commission pourrait également évaluer les indicateurs élaborés par la coalition européenne pour le numérique vert 91 pour estimer le bilan carbone net des solutions numériques dans des secteurs critiques pour le climat tels que l’énergie, les transports, la construction, l’agriculture, les villes intelligentes et l’industrie manufacturière. L’objectif devrait être de rendre ces indicateurs utilisables par les acteurs industriels, les acheteurs et les entités financières pour mesurer les gains nets en matière de réduction des émissions, ce qui permettra à la finance durable de déployer et de mettre à l’échelle des solutions numériques, y compris les infrastructures numériques nécessaires.

    Néanmoins, pour que les objectifs en matière de durabilité puissent être atteints, il est essentiel que tous les acteurs de l’écosystème des réseaux numériques, y compris les fournisseurs de contenus et d’applications, coopèrent en vue d’une utilisation efficace des ressources tout en répondant aux besoins énergétiques. Au-delà des actions concrètes visant à réduire l’empreinte carbone, ces acteurs pourraient également contribuer à accroître la transparence en ce qui concerne les émissions liées à l’utilisation de leurs services, par exemple en s’intéressant aux labels de performance des codecs.

    3.2.010.Résumé des scénarios possibles

    ·Scénario 4: Face à la convergence du secteur de la connectivité et des services de communications électroniques et pour faire en sorte que les avantages qui en découlent profitent à tous les utilisateurs finaux, où qu’ils se trouvent, la Commission peut envisager d’élargir le champ d’application et les objectifs du cadre réglementaire actuel afin de garantir des conditions de concurrence égales sur le plan réglementaire et des droits et obligations équivalents pour tous les acteurs et utilisateurs finaux de réseaux numériques, le cas échéant, afin d’atteindre les objectifs réglementaires correspondants. Compte tenu de l’ampleur et de l’incidence que les évolutions technologiques et toute modification réglementaire éventuelle sont susceptibles d’avoir au niveau mondial, il convient d’évaluer correctement toute réforme du cadre actuel du point de vue des conséquences économiques sur tous les acteurs et de tenir un vaste débat sur ce sujet avec toutes les parties prenantes.

    ·Scénario 5: Alors que l’évolution des technologies et du marché exigent de modifier le paradigme réglementaire, de réduire la charge pesant sur les entreprises et d’améliorer l’efficacité de la fourniture de services, tout en continuant à protéger les utilisateurs finals vulnérables et à promouvoir la couverture géographique, la Commission peut envisager:

    ode prendre des mesures destinées à accélérer la désactivation du réseau en cuivre (telles qu’un horizon fixé à 2030, aligné sur l’objectif de la décennie numérique pour la connectivité en gigabit, et un soutien au passage du cuivre à la fibre à partir de 2028);

    ode modifier la politique d’accès pour tenir compte d’un environnement intégralement fibré, en proposant un produit d’accès de gros européen et en ne formulant aucune recommandation concernant les marchés devant faire l’objet d’une réglementation ex ante au niveau de l’UE, tout en maintenant un filet de sécurité permettant aux ARN de maintenir la réglementation s’il est satisfait au «test des trois critères» (charge de la preuve inversée). Une solution alternative consisterait à envisager de soumettre uniquement les marchés des infrastructures de génie civil à une réglementation ex ante (car ils constituent le goulet d’étranglement le plus persistant) en combinaison avec la mise en œuvre d’une réglementation allégée en matière d’accès (pas de réglementation des prix ou de flexibilité tarifaire), conformément à la recommandation gigabit récemment adoptée.

    ·Scénario 6: Afin de faciliter l’achèvement du marché unique et d’accroître l’échelle des activités de tous les acteurs, la Commission peut envisager:

    oun renforcement de l’intégration de la gouvernance du spectre au niveau de l’Union, ce qui permettrait, le cas échéant, d’harmoniser davantage les procédures d’autorisation du spectre et créerait ainsi les conditions requises pour parvenir à l’échelle de marché nécessaire pour que les opérateurs paneuropéens accroissent leur capacité d’investissement; elle peut également envisager des solutions permettant un meilleur alignement des conditions d’autorisation et de sélection, voire des procédures uniques de sélection ou d’autorisation, pour les communications terrestres et par satellite et d’autres applications innovantes dont la contribution à l’achèvement du marché unique est manifeste;

    oune approche plus harmonisée de l’autorisation (en instaurant éventuellement le principe du «pays d’origine» pour certaines activités moins liées aux marchés de détail de la consommation et aux réseaux d’accès locaux).

    ·Scénario 7: La Commission peut envisager de faciliter l’écologisation des réseaux numériques en promouvant la désactivation en temps utile des réseaux en cuivre et le passage à un environnement intégralement fibré et à une utilisation plus efficace des réseaux (codecs) sur l’ensemble du territoire de l’Union.

    3.3.Pilier III: Des infrastructures numériques sûres et résilientes pour l’Europe

    Afin de protéger la valeur des investissements massifs que l’Europe doit entreprendre pour construire les infrastructures de pointe dont elle a besoin pour créer de la croissance économique et apporter des avantages à la société, il est important de veiller à ce que ces infrastructures soient sûres. Les menaces décrites à la section 2 ci-dessus justifient qu’on accorde une attention appropriée à la sécurité physique, notamment en ce qui concerne l’infrastructure dorsale, ainsi qu’à la transmission de données de bout en bout du réseau.

    3.3.01.Des technologies quantiques et post-quantiques pour des communications sécurisées

    Les progrès de l’informatique quantique ne sont pas sans répercussions sur les méthodes de chiffrement actuelles, dont le rôle est crucial pour garantir la sécurité de bout en bout des réseaux numériques, notamment les réseaux de communications électroniques et les infrastructures critiques qui reposent sur ceux-ci. Bien qu’il n’existe encore aucun ordinateur quantique capable de casser les algorithmes de chiffrement actuels, les premiers ordinateurs quantiques opérationnels sont déployés dans le monde entier. Par conséquent, l’UE doit anticiper l’évolution des ordinateurs quantiques et commencer dès maintenant à élaborer des stratégies de transition vers une infrastructure numérique capable de résister à des attaques d’ordinateurs quantiques. À défaut, les efforts et les investissements réalisés dans les infrastructures numériques de pointe pour fournir des applications d’importance sociétale critique, par exemple dans le domaine de la mobilité ou des soins de santé, pourraient être mis en péril.

    La cryptographie post-quantique (PQC) est une approche prometteuse pour rendre nos communications et nos données résistantes aux attaques quantiques, car elle repose sur des problèmes mathématiques difficiles à résoudre, même par des ordinateurs quantiques. Comme il s’agit d’une solution logicielle ne nécessitant pas de nouveau matériel spécifique, la PQC permet une transition rapide vers des niveaux de protection plus élevés.

    De nombreux pays ont déjà placé la PQC en tête de leurs priorités. Les autorités nationales, ainsi que l’Agence de l’Union européenne pour la cybersécurité (ENISA), ont publié des rapports sur la préparation de la mise en œuvre et du déploiement de la PQC 92 . L’Agence américaine pour la sécurité des infrastructures et de la cybersécurité (CISA) a mis en place une initiative PQC afin d’unifier et de fédérer les efforts déployés par les agences pour faire face aux menaces posées par l’informatique quantique 93 .

    Toutefois, il n’est pas possible, dans le cadre actuellement fourni par l’Union, de résoudre tous les problèmes que pose la migration vers une infrastructure numérique sûre. Pour y parvenir, il est nécessaire de coordonner les efforts au niveau de l’UE, en associant principalement les agences publiques à ce processus. Afin d’assurer une transition efficace vers la PQC, il convient de synchroniser les efforts en veillant à aligner les feuilles de route au niveau de l’Union et à établir des calendriers concrets pour chaque étape de la transition. L’évaluation de la mise en œuvre des plans de transition sera utile non seulement pour recueillir des informations sur les difficultés pratiques et les lacunes constatées, mais aussi pour anticiper les besoins en matière de futures exigences réglementaires de l’UE.

    Par conséquent, il est important d’encourager les États membres à mettre au point une approche coordonnée et harmonisée, garantissant la cohérence dans l’élaboration et l’adoption de normes de l’UE en matière de cryptographie post-quantique dans l’ensemble des États membres. Cette cohérence favoriserait l’interopérabilité, en permettant aux systèmes et aux services de fonctionner sans discontinuité par-delà les frontières, en évitant la fragmentation et les différences de niveaux d’efficacité dans la transition, et garantirait une approche européenne de la PQC. On s’attend à voir apparaître des effets mesurables de la transition aux alentours de 2030. Cette étape semble impérative et nécessaire pour préserver les options stratégiques futures dans un paysage technologique en mutation. C’est pourquoi la Commission formulera des recommandations à cet effet en temps utile.

    À long terme, la distribution quantique de clés 94 (QKD) renforcera la sécurité de nos communications, au niveau du réseau physique. Les mécanismes hybrides PQC/QKD figurent parmi les lignes directrices publiées par différentes agences nationales de sécurité et vont faire l’objet de discussions sur la conception d’actions coordonnées au niveau de l’UE. La combinaison de la QKD et de la PQC permettra de garantir totalement la sécurité de bout en bout dans nos communications numériques. La distribution quantique de clés constitue une solution fondée sur le matériel qui repose sur les propriétés uniques de la physique quantique et non sur des fonctions mathématiques, et elle est en principe intrinsèquement résistante aux attaques par force brute, ainsi qu’aux nouvelles découvertes mathématiques qui sont le point faible sous-jacent de la cryptographie classique. Des travaux de recherche intensifs sont en cours sur différents fronts afin de résoudre les difficultés pratiques que présente actuellement cette technologie, et les premiers bancs d’essai de déploiement sont actuellement fournis dans le cadre de l’initiative EuroQCI 95 financée par le programme pour une Europe numérique et SAGA 96 . L’initiative EuroQCI sera progressivement intégrée au programme IRIS2. En principe, la distribution quantique de clés représentera un changement de paradigme complet pour l’écosystème des infrastructures numériques. Cette technologie tournée vers l’avenir et hautement compétitive présente d’ores et déjà un grand intérêt pour de futures applications telles que l’internet quantique.

    3.3.02.Vers des infrastructures de câbles sous-marins sûres et résilientes

    La section 2.4 ci-dessus a déjà montré que la sécurité et la résilience des infrastructures de réseau et de calcul de l’UE étaient une composante essentielle de notre autonomie numérique. En particulier, il est évident que la sécurité des infrastructures de câbles sous-marins revêt un caractère particulièrement urgent pour la souveraineté de l’UE et constitue un défi pour la résilience de l’Union.

    Pour surmonter les défis recensés et protéger les intérêts européens, il convient d’envisager des mesures structurelles. Si le champ d’application exact de ces mesures reste encore à définir, il y a lieu de se concentrer sur l’intensification des activités avancées de R&I visant à accroître la sécurité économique de l’UE, en particulier pour promouvoir les nouvelles technologies fondées sur la fibre optique et le câble dans le cadre du renforcement de la capacité technique de l’UE évoqué à la section 3.1 ci-dessus.

    À long terme, il faudra se pencher sur une autre question essentielle, à savoir le financement de nouvelles infrastructures stratégiques de câbles sous-marins et le renforcement de la sécurité et de la résilience des infrastructures existantes. À cet égard, on pourrait envisager de modifier par acte délégué la partie V de l’annexe du règlement MIE afin d’établir une liste de projets de câbles d’intérêt européen stratégiques (ci-après les «PCIE») assortie d’un système de label visant à faire face aux risques, vulnérabilités et dépendances recensés. La conception des PCIE pourrait obéir aux normes technologiques les plus avancées, telles que des systèmes de capteurs pour la surveillance du fonctionnement de l’installation, et permettre de soutenir les politiques de l’UE dans les domaines de la sécurité, de la durabilité ou de la protection civile.

    Plus généralement, il sera important de faire en sorte que les PCIE bénéficient d’un financement approprié et de mettre en commun les instruments de financement européens et nationaux, ainsi que d’étudier la faisabilité et l’effet multiplicateur potentiel des instruments financiers en tant que modes de mise en œuvre possibles pour créer des synergies et assurer un financement suffisant des PCIE. Le cas échéant, les États membres peuvent également décider de concevoir des PIIEC portant sur des câbles conformément aux critères fixés dans la communication relative aux PIIEC 97 . Les États membres peuvent également examiner si un soutien financier public supplémentaire doit être octroyé au déploiement et à l’exploitation de certains PCIE, conformément aux règles en matière d’aides d’État, ou si ce soutien peut être assuré par l’achat de capacités destinées à un usage public.

    En conséquence, on pourrait envisager, pour les infrastructures de câbles sous-marins, un système de gouvernance commun de l’UE comprenant notamment: i) des éléments supplémentaires à prendre en considération pour atténuer les risques, les vulnérabilités et les dépendances et y faire face, dans le cadre d’une évaluation consolidée à l’échelle de l’Union, ainsi que les priorités pour accroître la résilience; ii) des critères révisés pour la mise à niveau des câbles existants ou le financement de nouveaux câbles; iii) une mise à jour de la liste des priorités des PCIE élaborée conjointement, sur la base de l’importance stratégique et du respect des critères susmentionnés, tant au sein de l’UE qu’au niveau international; iv) la mise en commun, pour ces projets, de financements provenant de différentes sources, y compris éventuellement par des fonds de capital-investissement auxquels l’Union pourrait participer avec les États membres afin de réduire les risques liés aux investissements privés et v) de nouvelles mesures visant à sécuriser les chaînes d’approvisionnement et à éviter la dépendance à l’égard de fournisseurs de pays tiers à haut risque.

    Le point iv) pourrait inclure des mesures spécifiques concernant le renforcement des capacités d’entretien et de réparation au niveau de l’UE, qui atténueraient l’incidence de toute tentative de sabotage d’infrastructures de câbles sous-marins. Cet axe de travail pourrait mettre à profit l’expérience acquise dans le cadre du mécanisme de protection civile de l’Union et de rescEU, en particulier en ce qui concerne la lutte contre les incendies, en vue de constituer une flotte de navires d’entretien et de réparation financée par l’UE.

    Enfin, il convient aussi de se pencher sur la nécessité d’œuvrer à la mise en place d’exigences harmonisées en matière de sécurité et de la promouvoir dans les enceintes internationales, notamment en recensant les normes les plus élevées de leur catégorie, tirant parti des dernières évolutions en matière de sécurité et d’auto-surveillance des câbles et des équipements de routage et de relais associés, qui pourraient être reconnues au moyen d’un système de certification spécifique de l’UE.

    Tout en ménageant la possibilité de futures options stratégiques, il importe, dans le contexte géopolitique actuel décrit ci-dessus et en réponse à la recommandation du Conseil en ce qui concerne les infrastructures de câbles sous-marins, de prendre des mesures pour jeter les bases d’une réaction coordonnée de l’UE. Par conséquent, parallèlement au présent livre blanc, la Commission recommande aux États membres d’entreprendre immédiatement certaines actions pour préparer des mesures à plus long terme. Ces actions, qui sont spécifiquement liées aux infrastructures de câbles sous-marins, peuvent être adoptées par les États membres dans le cadre de la mise en œuvre de la recommandation du Conseil sur la résilience des infrastructures critiques en ce qui concerne les infrastructures de câbles sous-marins. La recommandation de la Commission vise à faire en sorte que les États membres et la Commission collaborent à la mise en œuvre d’une approche coordonnée et solide qui précédera la détermination du niveau approprié de financement par l’UE des activités pertinentes de R&I en fonction de l’ampleur du défi à relever, et d’un cadre de gouvernance plus centralisé à plus long terme.

    3.3.03.Résumé des scénarios possibles

    ·Scénario 8: La Commission encouragera le renforcement des activités avancées de R&I dans l’ensemble de l’UE à l’appui des nouvelles technologies fondées sur la fibre optique et le câble.

    ·Scénario 9: La Commission peut envisager d’établir une liste de PCIE et un système connexe de label au moyen d’un acte délégué au titre du mécanisme pour l’interconnexion en Europe.

    ·Scénario 10: La Commission peut procéder à un examen des instruments disponibles, en particulier les subventions, les marchés publics, les opérations de financement mixte au titre d’InvestEU et les mécanismes de combinaison avec des subventions, en mettant particulièrement l’accent sur la mobilisation d’investissements privés pour soutenir les PCIE, y compris la possibilité d’un fonds de capital-investissement.

    ·Scénario 11: La Commission peut envisager de proposer un système de gouvernance commun de l’UE pour les infrastructures de câbles sous-marins.

    ·Scénario 12: La Commission peut envisager d’entreprendre, dans les enceintes internationales, des travaux d’harmonisation des exigences en matière de sécurité qui pourront être reconnues au moyen d’un système de certification spécifique de l’UE.

    4.CONCLUSIONS

    Étant donné que nous nous trouvons au carrefour de grandes évolutions technologiques et réglementaires, il est primordial d’organiser un vaste débat sur le sujet avec l’ensemble des parties prenantes et des partenaires partageant les mêmes valeurs. La Commission lance donc, dans le cadre du présent livre blanc, une large consultation des États membres, de la société civile, des entreprises et du milieu universitaire afin de recueillir leurs points de vue sur les scénarios présentés dans le présent livre blanc et de leur donner l’occasion de contribuer aux futures propositions de la Commission dans ce domaine.

    Parmi ces idées figurent à la fois des moyens d’action visant à garantir la sécurité et la résilience des infrastructures numériques et des scénarios possibles pour définir les éléments clés d’un futur cadre réglementaire. Cette consultation sera l’occasion d’entamer un dialogue approfondi avec toutes les parties concernées, qui orientera les prochaines mesures de la Commission.

    La Commission invite les parties intéressées à formuler leurs observations sur les propositions exposées dans le présent Livre blanc dans le cadre d’une consultation publique ouverte disponible à l’adresse suivante: https://ec.europa.eu/info/law/better-regulation/have-your-say_fr. Les parties intéressées sont invitées à soumettre leurs observations jusqu’au 30 juin 2024.

    (1)

         «Connected World: An evolution in connectivity beyond the 5G evolution», McKinsey, 2020, disponible à l’adresse suivante: https://www.mckinsey.com/industries/technology-media-and-telecommunications/our-insights/connected-world-an-evolution-in-connectivity-beyond-the-5g-revolution

    (2)

         Voir « Analyzing the Economic Impacts of Telecommunications» , «Exploring the Relationship Between Broadband and Economic Growth», document d’information préparé pour le «World Development Report 2016: Digital dividends», Michael Minges, 2015; «Europe’s internet ecosystem: socio-economic benefits of a fairer balance between tech giants and telecom operators», Axon Partners Group, mai 2022; Kongaut, Chatchai; Bohlin, Erik (2014): «Impact of broadband speed on economic outputs: An empirical study of OECD countries», 25e conférence régionale européenne de l’International Telecommunications Society (ITS): «Disruptive Innovation in the ICT Industries: Challenges for European Policy and Business», Bruxelles, Belgique, 22-25 juin 2014, International Telecommunications Society (ITS), Calgary.

    (3)

         En particulier, l’impact de la connectivité mobile de référence augmente d’environ 15 % lorsque les connexions sont modernisées vers la 3G. Lorsque les connexions passent de la 2G à la 4G, l’impact augmente d’environ 25 % selon le document de travail « Mobile technology: two decades driving economic growth », GSMA Intelligence.

    (4)

          https://copenhageneconomics.com/publication/the-economic-impact-of-the-forthcoming-equiano-subsea-cable-in-portugal/

    (5)

         «Cybersecurity of Open Radio Access Networks», rapport du groupe de coopération SRI, mai 2022.

    (6)

         Ce constat a été validé dans le programme d’action pour la décennie numérique à l’horizon 2030 [Décision (UE) 2022/2481 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 établissant le programme d’action pour la décennie numérique à l’horizon 2030 (JO L 323 du 19.12.2022, p. 4)]. Conformément à l’article 4, paragraphe 1, point 2 a), de ladite décision, d’ici à 2030, tous les utilisateurs finals en un lieu fixe devraient être couverts par un réseau en gigabit jusqu’au point de terminaison du réseau, et toutes les zones habitées devraient être couvertes par des réseaux sans fil à haut débit de nouvelle génération dont les performances sont au moins équivalentes à celles de la 5G, conformément au principe de neutralité technologique.

    (7)

         https://digital-strategy.ec.europa.eu/en/library/investment-and-funding-needs-digital-decade-connectivity-targets.

    (8)

         Directive (UE) 2022/2555 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 concernant des mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de cybersécurité dans l’ensemble de l’Union, modifiant le règlement (UE) nº 910/2014 et la directive (UE) 2018/1972, et abrogeant la directive (UE) 2016/1148 (directive SRI 2) (JO L 333 du 27.12.2022, p. 80).

    (9)

         Directive (UE) 2022/2557 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 sur la résilience des entités critiques, et abrogeant la directive 2008/114/CE du Conseil (JO L 333 du 27.12.2022, p. 164).

    (10)

         Recommandation du Conseil du 8 décembre 2022 relative à une approche coordonnée à l’échelle de l’Union pour renforcer la résilience des infrastructures critiques (2023/C 20/01) (JO C 20 du 20.1.2023, p. 1).

    (11)

       Cette approche devrait également prendre en considération les défis et les possibilités concernant les politiques d’élargissement de l’UE.

    (12)

         Décision (UE) 2022/2481 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 établissant le programme d’action pour la décennie numérique à l’horizon 2030 (JO L 323 du 19.12.2022, p. 4).

    (13)

         https://digital-strategy.ec.europa.eu/en/library/2023-report-state-digital-decade.

    (14)

         https://digital-strategy.ec.europa.eu/en/library/broadband-coverage-europe-2022.

    (15)

         Le programme d’action pour la décennie numérique fixe une série d’objectifs et de cibles visant à promouvoir le développement d’infrastructures numériques résilientes, sûres, efficaces et durables dans l’Union, y compris une cible numérique, pour la Commission et les États membres, visant à mettre en œuvre la connectivité en gigabit pour tous d’ici à 2030. Le programme devrait assurer la connectivité dans toute l’Union et dans le monde entier, en faveur des citoyens et des entreprises, y compris, mais sans s’y limiter, en fournissant un accès à haut débit abordable qui peut contribuer à supprimer les zones mortes en matière de communication et à renforcer la cohésion dans toute l’Union, y compris dans ses régions ultrapériphériques, ses zones rurales, périphériques, éloignées et isolées et ses îles.

    (16)

         Voir la fiche «Fibre Development Index: 2023», Omdia.

    (17)

         Rapport semestriel de l’observatoire européen de la 5G, octobre 2023, p. 8, https://5gobservatory.eu/wp-content/uploads/2023/12/BR-19_October-2023_Final-clean.pdf.

    (18)

         Nombre de stations de base 5G pour 100 000 habitants: 419 (Corée du Sud), 206 (Chine), 77 (UE), 118 (Japon), 30 (États-Unis).

    (19)

         Voir l’indice DESI International (devant être publié sur la base des données de l’OCDE). 24,07 abonnements pour 100 habitants (nombre plus élevé que pour le haut débit d’au moins 100 Mbps dans l’UE), contre 29,60 aux États-Unis, 33,36 au Japon et 43,60 en Corée du Sud.

    (20)

         Rapport de 2023 sur l’état d’avancement de la décennie numérique, document de travail des services de la Commission, Axes de la décennie numérique, point 2.4.

    (21)

         https://digital-strategy.ec.europa.eu/en/policies/edge-observatory.

    (22)

         Ce transfert technologique et ce nouveau paradigme ont été confirmés par la grande majorité des participants à la consultation exploratoire lancée l’année dernière par la Commission afin de recueillir des avis et de déterminer les besoins de l’Europe en matière d’infrastructures de connectivité pour prendre les rênes de la transformation numérique. Les participants ont notamment indiqué que la virtualisation du réseau, le découpage en tranches du réseau et le réseau en tant que service [Network-as-a-service (NaaS)] constituent les avancées technologiques qui auront le plus grand impact dans les années à venir. Ces technologies devraient entraîner l’abandon des réseaux de communications électroniques traditionnels au profit de réseaux en nuage, virtualisés et définis par logiciel, ce qui permettrait de réduire les coûts, de renforcer la résilience et la sécurité des réseaux et d’introduire de nouveaux services innovants, tout en transformant les modèles écosystémiques et commerciaux.

    Les résultats de la consultation exploratoire ont été publiés en octobre 2023 et sont disponibles à l’adresse suivante: https://digital-strategy.ec.europa.eu/en/news/consultation-electronic-communications-highlights-need-reliable-and-resilient-connectivity.

    (23)

         Voir, par exemple, la section «Integrated Private Wireless on AWS» du livre électronique «Private Wireless and Cloud», https://pages.awscloud.com/rs/112-TZM-766/images/AWS%20Integrated%20Private%20Wireless%20eBook.pdf ; et l’article de blog «Announcing private network solutions on Google Distributed Cloud Edge», https://cloud.google.com/blog/products/networking/announcing-private-network-solutions-on-google-distributed-cloud-edge.

    (24)

         Rapport semestriel de l’observatoire européen de la 5G, octobre 2023, Service d’intelligence pour l’infrastructure mobile d’Omdia.

    (25)

         https://digital-strategy.ec.europa.eu/en/policies/cross-border-corridors.

    (26)

         «European industrial technology roadmap for the next generation cloud-edge offering», mai 2021, disponible à l’adresse suivante: https://ec.europa.eu/newsroom/repository/document/2021-18/European_CloudEdge_Technology_Investment_Roadmap_for_publication_pMdz85DSw6nqPppq8hE9S9RbB8_76223.pdf

    (27)

         Dans un environnement NaaS, la notion d’échelle peut être très différente en termes de nature et d’ampleur par rapport aux économies d’échelle des réseaux de communications électroniques traditionnels actuels.

    (28)

         https://digital-strategy.ec.europa.eu/en/library/investment-and-funding-needs-digital-decade-connectivity-targets.

    (29)

         Alliance européenne pour les données industrielles, la périphérie et le nuage: «European industrial technology roadmap for the next-generation cloud-edge», extrapolation jusqu’en 2030 du déficit d’investissement estimé dans le document de travail des services de la Commission (27.5.2020): Identifying Europe's recovery needs, SWD(2020) 98 final/2 , Bruxelles, p. 17.

    (30)

         Synergy Research Group, sur la base, par exemple, des données relatives au 1er trimestre 2023 , investissements liés aux capacités générales en matière d’informatique en nuage, adaptés au modèle économique de chaque fournisseur de services en nuage et ne correspondant pas réellement aux investissements dont l’UE a généralement besoin dans le domaine de la connectivité.

    (31)

         En 2022, l’ARPU «mobile» était de 15,0 EUR en Europe, contre 42,5 EUR aux États-Unis, 26,5 EUR en Corée du Sud et 25,9 EUR au Japon, et l’ARPU «haut débit fixe», de 22,8 EUR en Europe, contre 58,6 EUR aux États-Unis, 24,4 EUR au Japon et 13,1 EUR en Corée du Sud. ETNO, State of Digital Communications 2024, janvier 2024.

    (32)

         S’agissant des marchés de la téléphonie fixe, l’ETNO, dans son rapport de 2023 sur l’état des communications numériques, fait mention d’un ARPU de 21,8 EUR pour ses membres, contre un ARPU de 50,6 EUR aux États-Unis et 26,2 EUR au Japon, seules la Corée du Sud et la Chine faisant moins bien (13 EUR et 4,9 EUR, respectivement).

    (33)

         Ibid.

    (34)

         État des communications numériques 2023, ETNO.

    (35)

         Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions intitulée «Stimuler les start-up et l’innovation dans le domaine de l’intelligence artificielle digne de confiance», COM(2024) 28 final.

    (36)

         Directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 sur l’accès aux activités de l’assurance et de la réassurance et leur exercice (solvabilité II) (JO L 335 du 17.12.2009, p. 1).

    (37)

         Financer la quatrième révolution industrielle, Philippe Tibi, 2019.

    (38)

         Deloitte Belgium et CEPS pour la Commission européenne, direction générale de la stabilité financière, des services financiers et de l’union des marchés des capitaux, Study on the drivers of investments in equity by insurers and pension funds, décembre 2019.

    (39)

          Confirmation du texte de compromis final en vue d’un accord , proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2009/138/CE, 2021/0295/COD.

    (40)

         Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil sur le réexamen du cadre prudentiel de l’UE pour les assureurs et réassureurs dans le contexte de la reprise de l’UE après la pandémie, COM(2021) 580 final.

    (41)

       Les résultats de la consultation exploratoire ont été publiés en octobre 2023 et peuvent être consultés à l’adresse suivante: https://digital-strategy.ec.europa.eu/en/news/consultation-electronic-communications-highlights-need-reliable-and-resilient-connectivity . À cet égard, la grande majorité des répondants à la question (y compris les associations d’entreprises de télécommunications et de systèmes satellitaires, les vendeurs, les opérateurs et les ONG) ont noté que le marché unique numérique était entravé par le morcellement du secteur en marchés nationaux. Cette situation tient à la fois à des circonstances culturelles et à des conditions de marché divergentes, mais aussi à l’harmonisation incomplète des règles sectorielles (en ce qui concerne, par exemple, la mise en place de capacités d’interception légales, la conservation et la protection des données, les exigences en matière de relocalisation, les obligations en matière de cybersécurité et de communication d’informations ou les exigences relatives au signalement des incidents de réseau/service, les conditions des enchères du spectre, etc.), qui s’explique également par une mise en œuvre à la fois trop lente et parcellaire des règles de l’UE au niveau national et par la fragmentation des approches en matière de contrôle de l’application des règles.

    (42)

         La majorité des participants à la consultation – principalement des entreprises (fournisseurs de réseaux de communications électroniques et plateformes numériques), des associations professionnelles et des organisations de consommateurs – ont accueilli favorablement l’idée d’une plus grande intégration du marché du spectre et d’une harmonisation des modalités de gestion du spectre dans l’ensemble de l’UE.

    (43)

         COM(2013) 627 final.

    (44)

         Directive (UE) 2018/1972 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 établissant le code des communications électroniques européen (JO L 321 du 17.12.2018, p. 36).

    (45)

         Étude de la Commission sur l’évaluation de l’efficacité des procédures d’attribution du spectre radioélectrique dans les États membres, et notamment des effets de l’application du code des communications électroniques européen, disponible à l’adresse suivante: https://digital-strategy.ec.europa.eu/en/library/study-assessing-efficiency-radio-spectrum-award-processes-member-states-including-effects-applying .

    (46)

         Étude de la Commission sur l’assignation des fréquences radioélectriques dans l’Union européenne, disponible à l’adresse suivante: https://op.europa.eu/en/publication-detail/-/publication/2388b227-a978-11e7-837e-01aa75ed71a1/language-en.

    (47)

         Les résultats de la consultation exploratoire ont été publiés en octobre 2023 et peuvent être consultés à l’adresse suivante: https://digital-strategy.ec.europa.eu/en/news/consultation-electronic-communications-highlights-need-reliable-and-resilient-connectivity . À ce sujet, voir page 12, point ii). Obstacles au marché unique numérique.

    (48)

         Les prix du haut débit mobile et fixe varient considérablement d’un État membre à l’autre, non seulement en valeur nominale, mais aussi en parité de pouvoir d’achat. Voir Commission européenne, Direction générale des réseaux de communication, du contenu et des technologies, Mobile and fixed broadband prices in Europe 2021 — Final report and executive summary, Office des publications de l’Union européenne, 2022, disponible à l’adresse: https://data.europa.eu/doi/10.2759/762630.

    (49)

         Rapport 2023 sur l’état d’avancement de la décennie numérique, consultable à l’adresse suivante: https://digital-strategy.ec.europa.eu/en/library/2023-report-state-digital-decade.

    (50)

         Directive (UE) 2022/2555 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 concernant des mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de cybersécurité dans l’ensemble de l’Union, modifiant le règlement (UE) nº 910/2014 et la directive (UE) 2018/1972, et abrogeant la directive (UE) 2016/1148 (directive SRI 2), JO L 333 du 27.12.2022, p. 80.

    (51)

         BoR (23) 214, Draft BEREC Report on the general authorization and related frameworks for international submarine connectivity.

    (52)

         Règlement (UE) 2022/1925 du Parlement européen et du Conseil du 14 septembre 2022 relatif aux marchés contestables et équitables dans le secteur numérique et modifiant les directives (UE) 2019/1937 et (UE) 2020/1828 (règlement sur les marchés numériques), JO L 265 du 12.10.2022, p. 1.

    (53)

         Rapport de prospective stratégique 2022Plan d’action de l’UE sur la numérisation du système énergétique

    (54)

         Le projet Shift, «Déployer la sobriété numérique», octobre 2020, p. 16; Banque mondiale, 2022. 

    (55)

         Forum économique mondial 2019.

    (56)

         https://www.buildup.eu/en/news/overview-smart-hvac-systems-buildings-and-energy-savings-0.

    (57)

         TransformingTransport.eu, projet phare sur la valeur des mégadonnées financé par l’UE au titre d’Horizon 2020.

    (58)

         Un codec est un processus qui compresse de grandes quantités de données — le plus souvent un flux vidéo — avant leur transmission et les décompresse après la réception.

    (59)

         https://digital-strategy.ec.europa.eu/en/news/connectivity-toolbox-member-states-agree-best-practices-boost-timely-deployment-5g-and-fibre.

    (60)

         C(2023) 4049.

    (61)

         L’EUCCS se fonde sur des projets financés par le programme de recherche de l’UE en matière de sécurité et le Fonds pour la sécurité intérieure. Le déploiement actuel de bancs d’essai dans les États membres établira également le lien avec les moyens de connectivité de l’UE dans l’espace, conformément à la stratégie spatiale de l’UE pour la sécurité et la défense.

    (62)

         https://presse.economie.gouv.fr/08-03-2022-declaration-conjointe-des-ministres-de-lunion-europeenne-charges-du-numerique-et-des-communications-electroniques-adressee-au-secteur-numerique/.

    (63)

         Un gazoduc sous-marin (entre la Finlande et l’Estonie) et des câbles de communications électroniques (entre FI et EE, et entre SE et EE) ont été endommagés.

    (64)

         Conclusions du Conseil du 21 juin 2022 sur un cadre pour une réponse coordonnée de l'UE aux campagnes hybrides.

    (65)

         Les environnements informatiques collaboratifs ont également été désignés dans la littérature sous le nom d’«informatique en essaim», «informatique ambiante» et «internet tactile», entre autres termes supplémentaires.

    (66)

         Étude pour le compte de la Commission sur les tendances du marché de l’approvisionnement 5G, août 2021, disponible à l’adresse https://digital-strategy.ec.europa.eu/en/library/commission-publishes-study-future-5g-supply-ecosystem-europe .

    (67)

         Règlement (UE) 2023/1781 du Parlement européen et du Conseil du 13 septembre 2023 établissant un cadre de mesures pour renforcer l’écosystème européen des semi-conducteurs et abrogeant le règlement (UE) 2021/694 (règlement sur les puces) (JO L 229 du 18.9.2023, p. 1).

    (68)

         https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/ip_23_6246.

    (69)

    COM/2024/28 final.

    (70)

         Voir, par exemple, WIK-consult: Rapport d’étude final «Competitive conditions on transit and peering markets», Bad Honnef, 28.2.2022.

    (71)

         Seuls quelques fournisseurs de services internet ne permettent pas l’échange de données «on-net», mais continuent à échanger du trafic en dépassant les limites des réseaux et les points d’interconnexion.

    (72)

         Pour une vue d’ensemble des cas connus, voir WIK-Consult: Rapport d’étude final «Competitive conditions on transit and peering markets», Bad Honnef, 28.2.2022.

    (73)

         Pour une vue d’ensemble des différents arguments soulevés dans le cadre de ce débat, voir, par exemple, les réponses à la section correspondante de la consultation exploratoire à l’adresse https :// digital-strategy.ec.europa.eu/en/news/consultation-electronic-communications-highlights-need-reliable-and-resilient-connectivity.

    (74)

         Les résultats de la consultation exploratoire ont été publiés en octobre 2023 et sont disponibles à l’adresse suivante: https://digital-strategy.ec.europa.eu/en/news/consultation-electronic-communications-highlights-need-reliable-and-resilient-connectivity. Pour ce point spécifique, voir à la page 12, point ii). Obstacles au marché unique numérique

    (75)

         Règlement (UE) 2015/758 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2015 concernant les exigences en matière de réception par type pour le déploiement du système eCall embarqué fondé sur le service 112 et modifiant la directive 2007/46/CE (JO L 123 du 19.5.2015, p. 77).

    (76)

         Plus de 109 milliards d’euros pour la 3G et plus de 40 milliards d’euros pour la 4G. ETNO, Rapport 2024 sur l’état d’avancement de la communication numérique.

    (77)

         En application de la décision nº 676/2002/CE (décision «spectre radioélectrique»), en vue de l’adoption de mesures d’harmonisation technique destinées à garantir la disponibilité et l’utilisation efficiente du spectre radioélectrique, la Commission coopère avec la CEPT, réunissant à cette fin les experts des autorités nationales responsables de la gestion du spectre radioélectrique dans 46 pays européens, dont les 27 États membres de l’UE.

    (78)

         À l’heure actuelle, l’état d’avancement de la désactivation du réseau en cuivre varie considérablement d’un État membre à l’autre. En 2023, les principaux exploitants de lignes fixes avaient annoncé des projets de désactivation de leur réseau en cuivre dans 16 États membres (BE, EE, EL, ES, FI, FR, HU, IE, IT, LU, MT, PL, PT, SE, SI, SK), l’arrêt effectif ayant déjà commencé dans 10 États membres (BE, EE, ES, FI, LU, MT, PL, PT, SE, SI). Toutefois, les progrès accomplis au sein de ces États membres varient considérablement. Voir également le rapport de synthèse de l’ORECE sur les résultats de l’atelier interne sur la migration des infrastructures existantes vers les réseaux en fibre optique, 5 décembre 2019, BoR (19) 23.

    (79)

         Un autre scénario envisageable consiste à remplacer au moins partiellement les réseaux en cuivre par des produits d’accès fixe sans fil (basés sur la 5G). En outre, l’existence de différences significatives dans le rythme de déploiement de la fibre optique risque de conduire à des marchés plus petits et géographiquement limités, ce qui ne permettrait pas l’émergence d’un véritable marché unique.

    (80)

         Recommandation de la Commission du 6 février 2024 sur la promotion réglementaire de la connectivité gigabit, C (2024) 523 final.

    (81)

         https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/ip_24_669.

    (82)

       Recommandation (UE) 2020/2245 de la Commission du 18 décembre 2020 concernant les marchés pertinents de produits et de services dans le secteur des communications électroniques susceptibles d’être soumis à une réglementation ex ante conformément au code, ci-après la «recommandation de 2020 concernant les marchés pertinents» (JO L 439 du 29.12.2020, p. 23).

    (83)

       Sur le marché de la fourniture en gros d’accès local principal, qui revêt une importance essentielle car il constitue un goulet d’étranglement, la réglementation a été progressivement supprimée en Bulgarie, en Roumanie et aux Pays-Bas en raison de la concurrence existante. En Tchéquie, au Danemark, en Hongrie et en Pologne, les marchés sont partiellement déréglementés. En Autriche, aucun opérateur n’a été désigné comme disposant d’une puissance significative sur le marché et les produits d’accès de gros sont fournis sur la base de conditions commerciales.

    (84)

       Voir le considérant 172 du code.

    (85)

       Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des mesures relatives au marché unique européen des communications électroniques et visant à faire de l’Europe un continent connecté, et modifiant les directives 2002/20/CE, 2002/21/CE et 2002/22/CE ainsi que les règlements (CE) n° 1211/2009 et (UE) n° 531/2012, COM(2013) 627 final du 11.9.2013

    (86)

         Les États membres pourraient autoriser les opérateurs de réseau et les organismes du secteur public à refuser l’accès à l’infrastructure physique s’ils proposent un accès actif, tel que le bitstream en lieu et place de l’accès physique, moyennant certaines conditions, à savoir que le projet de déploiement de l’opérateur demandeur concerne la même zone de couverture, qu’il n’existe pas d’autre réseau en fibre optique desservant cette zone de couverture qui permette le raccordement des locaux de l’utilisateur final (FTTP), et qu’une telle possibilité de refus, ou une possibilité équivalente, soit appliquée à la date d’entrée en vigueur du règlement dans l’État membre conformément au droit national conforme au droit de l’Union. En outre, les réseaux déployés par des entreprises détenues ou contrôlées par des organismes du secteur public dans des zones rurales ou isolées et exploités en tant que réseau d’accès de gros uniquement pourraient bénéficier d’une protection supplémentaire contre la concurrence si un État membre les autorise à refuser les demandes de coordination des travaux de génie civil.

    (87)

         Conformément à l’article 67, paragraphe 1, du code et au considérant 22 de la recommandation de 2020 sur les marchés pertinents, les autorités nationales de régulation peuvent également définir d’autres marchés pertinents de produits et de services ne figurant pas dans la recommandation concernant la réglementation ex ante, si elles peuvent prouver que, dans leur contexte national, les marchés satisfont au «test des trois critères». Un marché peut être considéré comme justifiant l’imposition d’obligations réglementaires si tous les critères suivants sont remplis: a) il existe des obstacles à l’entrée importants et non transitoires d’ordre structurel, juridique ou réglementaire; b) la structure du marché ne présage pas d’évolution vers une concurrence effective au cours de la période visée, compte tenu de la situation de la concurrence fondée sur les infrastructures et d’autres facteurs influant sur la concurrence, indépendamment des obstacles à l’entrée; c) le droit de la concurrence ne suffit pas à lui seul à remédier à la ou aux défaillance(s) observée(s) du marché.

    (88)

         COM(2020) 67 final.

    (89)

         COM(2022) 552 final.

    (90)

         https://joint-research-centre.ec.europa.eu/scientific-activities-z/green-and-sustainable-telecom-networks/sustainability-indicators-telecom-networks_en.

    (91)

         Voir greendigitalcoalition.eu.

    (92)

         Voir Avis scientifique et technique de l’ANSSI sur la migration vers la cryptographie post-quantique, disponible à l’adresse anssi-avis-migration-vers-la-cryptographie-post-quantique.pdf ; et BSI, Migration zu post-Quanten-Kryptografie. Migration zu Post-Quanten-Kryptografie — Handlungsempfehlungen des BSI (Bund.de);  et les études de l’ENISA « Post-Quantum Cryptography »: Current state and quantum mitigation — (europa.eu) ; Et Post-Quantum Cryptography - Integration study — (europa.eu) .

    (93)

    https://www.cisa.gov/news-events/news/cisa-announces-post-quantum-cryptography-initiative.

    (94)

         La Commission collabore avec les 27 États membres de l’UE et l’Agence spatiale européenne (ESA) à la conception, au développement et au déploiement de l’infrastructure européenne de communication quantique (EuroQCI). Celle-ci fera partie intégrante d’IRIS2, le nouveau système de l’Union pour des télécommunications spatiales sécurisées.

    (95)

         L’initiative «infrastructure européenne de communication quantique» (EuroQCI). Façonner l’avenir numérique de l’Europe (europa.eu)

    (96)

         La composante spatiale d’EuroQCI, connue sous le nom de SAGA (Security And cryptoGrAphic mission), est développée sous la responsabilité de l’ESA et se compose de systèmes de communication quantique par satellite de portée paneuropéenne.

    (97)

         Communication concernant les critères relatifs à l’analyse de la compatibilité avec le marché intérieur des aides d’État destinées à promouvoir la réalisation de projets importants d’intérêt européen commun, JO C 528 du 30.12.2021, p. 10.

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