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Document 52021AE3317

Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — «Stratégie pour un espace Schengen pleinement opérationnel et résilient» [COM(2021) 277 final] et sur la proposition de règlement du Conseil relatif à la création et au fonctionnement d’un mécanisme d’évaluation et de contrôle destiné à vérifier l’application de l’acquis de Schengen et abrogeant le règlement (UE) n° 1053/2013 [COM(2021) 278 final — 2021/0140 (CNS)]

EESC 2021/03317

JO C 105 du 4.3.2022, p. 108–113 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

4.3.2022   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 105/108


Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil — «Stratégie pour un espace Schengen pleinement opérationnel et résilient»

[COM(2021) 277 final]

et sur la proposition de règlement du Conseil relatif à la création et au fonctionnement d’un mécanisme d’évaluation et de contrôle destiné à vérifier l’application de l’acquis de Schengen et abrogeant le règlement (UE) no 1053/2013

[COM(2021) 278 final — 2021/0140 (CNS)]

(2022/C 105/17)

Rapporteur:

Ionuț SIBIAN

Consultation

Commission européenne, 10.8.2021

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section «Emploi, affaires sociales et citoyenneté»

Adoption en section

6.10.2021

Adoption en session plénière

20.10.2021

Session plénière no

564

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

232/1/5

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) accueille favorablement la stratégie de la Commission européenne pour un espace Schengen pleinement opérationnel et résilient.

1.2.

Le CESE réaffirme le soutien sans réserve qu’il a apporté, dans sa résolution du 17 février 2016, aux principes qui sous-tendent la coopération Schengen, à savoir l’exercice sans entrave des libertés fondamentales prévues par les traités au sein d’un espace commun de liberté, de sécurité et de justice, et la nécessité de renforcer la responsabilité conjointe et la solidarité concernant la gestion des frontières extérieures.

1.3.

Le CESE rappelle que, s’agissant de la conception et de la mise en œuvre de la politique de l’Union relative à la gestion des frontières, à l’interopérabilité, à la migration, à l’asile et à la coopération policière et judiciaire en matière pénale, l’Union et ses États membres sont à tout moment liés par la charte des droits fondamentaux et tenus non seulement de respecter ses dispositions, mais aussi de les promouvoir.

1.4.

Le CESE est profondément préoccupé par les violations des droits fondamentaux signalées aux frontières extérieures de l’Union; il invite la Commission et l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex) à prendre sans délai des mesures pour remédier à la situation, la contrôler, assurer le suivi des signalements et veiller à ce que les mécanismes de responsabilité prévus par le règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes soient effectivement mis en œuvre. Il demande en outre que le forum consultatif sur les droits fondamentaux soit renforcé et que la société civile organisée puisse y participer par le truchement du Comité.

1.5.

Le CESE s’inquiète du rétablissement semi-permanent des contrôles sur certaines portions des frontières intérieures des États membres et des répercussions économiques et sociales négatives que ces contrôles ont eues dans l’Union pour les entreprises, les citoyens, et plus particulièrement les travailleurs frontaliers, les communautés frontalières et les eurorégions. Il invite la Commission à contrôler et à évaluer soigneusement et à intervalles réguliers le caractère nécessaire et proportionné de ces contrôles et à prendre des mesures, le cas échéant. Il se félicite que la Commission ait l’intention de faire preuve de davantage de diligence concernant l’exercice de ses compétences d’exécution lorsque les évaluations de Schengen sont de nature à déclencher une action de sa part.

1.6.

Le CESE se déclare préoccupé par le fait que l’acquis de Schengen ne s’applique toujours pas dans son intégralité dans certains États membres, à savoir Chypre, la Roumanie, la Bulgarie et la Croatie. Il se joint à la Commission pour inviter le Conseil à prendre rapidement des mesures décisives à cet égard.

1.7.

Le CESE constate que bon nombre des éléments constitutifs de la stratégie restent des propositions législatives. Il souligne qu’il a adopté des avis spécifiques sur certaines de ces propositions, notamment celles relatives au nouveau pacte sur la migration et l’asile ainsi qu’à l’interopérabilité, et invite la Commission à tenir dûment compte de ces avis.

1.8.

Le CESE fait observer que de nombreux aspects du pacte reposent sur une mise en œuvre en temps utile de la législation récemment adoptée, en particulier le règlement relatif à l’interopérabilité et le règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes 2.0. Le CESE s’inquiète de l’évolution de la situation en la matière et invite la Commission à suivre de près les éventuels retards et dépassements de budgets et à prendre des mesures efficaces pour y remédier.

1.9.

Le CESE approuve les propositions visant à améliorer le fonctionnement du mécanisme d’évaluation de Schengen, en particulier celles portant sur l’accélération du suivi, le renforcement des synergies avec le mécanisme d’évaluation de la vulnérabilité et l’attention accrue et plus horizontale accordée aux droits de l’homme, y compris le rôle envisagé pour l’Agence des droits fondamentaux. Il convient toutefois de veiller à ce que le mécanisme d’évaluation de Schengen ne politise pas des questions de nature plus technique.

1.10.

Le CESE est d’avis que le forum Schengen est en mesure d’imprimer une impulsion politique à la sauvegarde et au développement de l’espace Schengen, mais insiste pour qu’il n’entraîne pas un retour à l’approche intergouvernementale des débuts qui, conjuguée à un manque de transparence, avait compromis son fonctionnement. Les autres institutions de l’Union, ainsi que le CESE, devraient demeurer informés à tout moment et pouvoir participer à ce forum.

1.11.

Le CESE est conscient que les secteurs connexes que sont la coopération policière et la coopération judiciaire en matière pénale, y compris la coopération renforcée aux fins de la prévention du terrorisme, sont de la plus haute importance pour garantir la confiance des citoyens de l’Union et des États membres dans l’espace Schengen. Cette coopération devrait toutefois s’exercer en veillant à ce que les droits fondamentaux, y compris la sauvegarde d’un système judiciaire indépendant, soient à tout moment pleinement respectés dans l’ensemble des États membres afin que les instruments de confiance réciproque, tels que le mandat d’arrêt européen, puissent fonctionner correctement.

1.12.

Le CESE est fermement convaincu que la coopération avec les pays tiers ne devrait pas se cantonner au contrôle des migrations et de l’asile, mais plutôt prendre la forme d’un véritable partenariat ayant également pour visée l’amélioration de la situation des migrants et des réfugiés dans les pays tiers, et plus particulièrement celle des victimes de la traite des êtres humains; il s’agit également de lutter contre les causes profondes de la migration et de favoriser une migration sûre et ordonnée.

1.13.

Comme l’a souligné Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, dans son discours sur l’état de l’Union de 2021, il est crucial de convenir d’un système européen commun en matière de gestion de nos frontières extérieures, de migration et d’asile afin de ne pas permettre à des pays tiers de tirer parti d’un manque d’unité.

2.   Contexte de l’avis

2.1.

En 1985, un certain nombre d’États membres ont adopté l’accord international de Schengen et décidé d’abolir l’ensemble des contrôles aux frontières intérieures. La convention d’application de l’accord de Schengen de 1990 prévoyait les «mesures d’accompagnement» nécessaires destinées à compenser les effets externes de la levée de ces contrôles.

2.2.

Le traité d’Amsterdam a intégré l’acquis de Schengen dans l’ordre juridique de l’Union et réglé la situation particulière du Royaume-Uni, de l’Irlande et du Danemark.

2.3.

La conclusion d’accords bilatéraux avec la Norvège, l’Islande, la Suisse et le Liechtenstein a permis à ces pays de participer à la coopération menée dans le cadre de Schengen.

2.4.

La Bulgarie, la Roumanie et la Croatie appliquent certaines parties de l’acquis de Schengen, mais la levée des contrôles à leurs frontières intérieures nécessite que le Conseil prenne une décision en ce sens à l’unanimité, ce qu’il a refusé de faire même si la Commission a estimé que ces pays étaient techniquement prêts.

2.5.

Depuis que l’acquis de Schengen a été intégré dans l’ordre juridique de l’Union, il s’est progressivement étoffé, notamment avec l’adoption du code frontières Schengen, du code des visas et du règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes. La coopération en matière de frontières, de visas, de migration et d’asile est soutenue par une série de bases de données informatiques à grande échelle pour l’échange d’informations, qui sont aujourd’hui interopérables. Il s’agit du système d’information Schengen (SIS), du système d’information sur les visas (VIS), du système européen de comparaison des empreintes digitales (Eurodac), du système d’entrée/de sortie (EES), du système européen d’information et d’autorisation concernant les voyages (ETIAS) et du système européen d’information sur les casiers judiciaires pour les ressortissants de pays tiers (ECRIS-TCN).

2.6.

Bien que la responsabilité des frontières extérieures soit partagée entre l’ensemble des États membres, chacun d’eux reste responsable de sa portion de frontière extérieure; toute gestion lacunaire des frontières extérieures d’un État membre est par conséquent susceptible d’avoir de graves répercussions sur l’ensemble de l’espace de liberté, de sécurité et de justice.

2.7.

Au cours de ces cinq dernières années, l’espace Schengen a été soumis à une pression considérable en raison du rétablissement répété et continu des contrôles aux frontières intérieures par certains États membres. Ces mesures ont été adoptées en réponse à la crise des réfugiés et des migrants de 2015 et à la menace terroriste en Europe.

2.8.

La pandémie de COVID-19 a entraîné de nouvelles fermetures des frontières et restrictions à la libre circulation des personnes.

2.9.

En 2016, en réponse à la crise des réfugiés et des migrants de 2015, Frontex, l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle entre les États membres aux frontières extérieures, a été réformée et est devenue l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes. En 2019, elle a fait l’objet d’un nouveau renforcement.

2.10.

Dans son nouveau pacte sur la migration et l’asile, la Commission européenne a affirmé que «la gestion intégrée des frontières est un instrument d’action indispensable» pour assurer l’intégrité de l’espace Schengen ainsi qu’«une composante essentielle de toute politique migratoire globale». Elle a annoncé l’élaboration d’une stratégie distincte sur l’avenir de Schengen, qui a été publiée le 2 juin 2021.

2.11.

La stratégie, qui vise à rendre l’espace Schengen plus fort et plus résilient, dresse le bilan des défis auxquels celui-ci a été confronté ces dernières années, y compris pendant la crise pandémique, et définit une trajectoire qui préserve les avantages de Schengen.

2.12.

La stratégie poursuit les objectifs suivants:

1)

assurer une gestion efficace des frontières extérieures de l’Union;

2)

renforcer l’espace Schengen au niveau interne;

3)

améliorer la préparation et la gouvernance;

4)

achever l’espace Schengen.

2.13.

La nouvelle stratégie est accompagnée de la proposition de règlement du Conseil relatif à la création et au fonctionnement d’un mécanisme d’évaluation et de contrôle destiné à vérifier l’application de l’acquis de Schengen, et abrogeant le règlement (UE) no 1053/2013 (1).

2.14.

La Commission propose une révision du mécanisme d’évaluation et de contrôle de Schengen. Les modifications présentées comprennent notamment l’accélération du processus d’évaluation ainsi qu’une procédure accélérée en cas de manquements importants susceptibles de mettre en péril l’ensemble de l’espace Schengen.

3.   Observations générales

3.1.   Une gestion moderne et efficace des frontières extérieures

3.1.1.

Le CESE est favorable à l’adoption rapide d’une politique stratégique pluriannuelle pour la gestion européenne intégrée des frontières dans le cadre du système de gestion intégrée prévu à l’article 77, paragraphe 2, point d), du TFUE. Il demande à être consulté sur cette stratégie avant qu’elle ne soit adoptée (2).

3.1.2.

Si le CESE reste favorable à une Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes qui soit efficace et à la mise en place de son bras opérationnel, il est toutefois préoccupé par l’évolution de la situation en la matière. En particulier, il attire l’attention sur les récentes conclusions de la Cour des comptes de l’Union européenne, selon lesquelles l’Agence ne s’est pas pleinement acquittée du mandat qui lui a été confié en 2016 et plusieurs risques et lacunes ont été constatés en lien avec l’exécution de son mandat de 2019 (3).

3.1.3.

Le CESE est particulièrement préoccupé par les violations des droits fondamentaux qui ont été signalées dans le cadre des activités opérationnelles coordonnées de Frontex et par le fait que l’Agence en aurait eu connaissance, une situation dont différents médias et différentes ONG se sont fait l’écho et sur laquelle s’est penché le rapport du groupe de travail de la commission LIBE du Parlement européen sur le contrôle de Frontex. Le Comité se félicite de la nomination récente d’un nouvel officier aux droits fondamentaux et du recrutement en cours de contrôleurs des droits fondamentaux, mais souligne que le bureau des droits fondamentaux doit disposer de ressources suffisantes pour s’acquitter de ses tâches en toute indépendance. Il invite l’Agence à mettre pleinement en œuvre les mécanismes et structures prévus dans son règlement fondateur en matière de responsabilité.

3.1.4.

Le CESE regrette que la stratégie mette l’accent sur le système de filtrage préalable à l’entrée; si, dans son avis sur le pacte sur la migration et l’asile, le Comité voyait ce système comme une contribution novatrice méritant d’être prise en considération, il nourrissait toutefois également des doutes quant à son application dans la pratique et le considérait comme inadéquat du point de vue des droits fondamentaux (4). Le Comité souligne qu’il y a lieu de mettre en place un mécanisme de contrôle indépendant par les États membres, comme le prévoit le règlement sur le filtrage.

3.1.5.

Le CESE a toujours considéré que des systèmes informatiques pleinement interopérables étaient une étape nécessaire pour élaborer une politique européenne cohérente et efficace. Dans cette optique, il soutient également la poursuite des efforts de numérisation des procédures en matière de visa et de dématérialisation des documents de voyage.

3.1.6.

Le CESE est préoccupé par la déclaration de la Commission selon laquelle les retards enregistrés dans certains États membres risquent d’entraver la mise en œuvre de l’interopérabilité des systèmes à l’échelle européenne. Compte tenu de l’expérience acquise avec la mise en œuvre du SIS II et de l’état d’avancement des travaux relatifs à la mise en œuvre du système d’entrée/de sortie et du système européen d’information et d’autorisation concernant les voyages (5), le Comité souhaiterait savoir quelles mesures concrètes la Commission prévoit d’adopter pour garantir une mise en œuvre rapide de l’interopérabilité dans le cadre du budget envisagé.

3.1.7.

Le CESE souligne que la poursuite du développement technologique et l’interopérabilité complète des systèmes doivent être assurées en respectant pleinement la protection des données à caractère personnel et les droits fondamentaux. S’agissant de la proposition de révision du système Eurodac et de l’utilisation des bases de données à grande échelle en général, le CESE réaffirme que la protection des droits fondamentaux doit être dûment prise en considération au moment d’assurer l’interopérabilité complète des systèmes. Compte tenu du caractère sensible des données, en particulier en ce qui concerne les personnes qui sollicitent une protection internationale et la confidentialité de la procédure, les mesures doivent être strictement nécessaires et proportionnées. Il convient de souligner que les données à caractère personnel traitées dans le cadre de la gestion des frontières et des retours relèvent du règlement général sur la protection des données et ne sont pas considérées comme des données opérationnelles à caractère personnel au sens du règlement (UE) 2018/1725 du Parlement européen et du Conseil (6).

3.1.8.

Le CESE souligne que dans le cadre de la coopération avec les pays tiers, en particulier lorsque Frontex opère sur le territoire de ces pays, les droits fondamentaux, y compris le droit à la protection des données à caractère personnel, doivent être pleinement respectés et des mécanismes appropriés de responsabilité doivent être établis.

3.2.   Mesures de renforcement de l’espace Schengen au niveau interne

3.2.1.

Le CESE se félicite de l’attention accordée aux mesures qui, bien qu’elles ne concernent pas à proprement parler le développement de l’acquis de Schengen, sont néanmoins liées au fonctionnement de l’espace Schengen.

3.2.2.

Une coopération accrue et renforcée entre services répressifs apporte une réponse plus efficace aux préoccupations sécuritaires des États membres que le rétablissement des contrôles aux frontières intérieures.

3.2.3.

Le CESE souligne que toute forme de coopération policière et judiciaire en matière pénale doit respecter pleinement les droits fondamentaux, y compris les droits de la défense (7) et ceux des victimes (8). Cela signifie également qu’en cas de violation des droits fondamentaux, le partage des responsabilités entre les différents acteurs (au niveau de l’Union et des États membres) ne doit pas déboucher sur un déficit de responsabilité.

3.2.4.

Il convient de respecter à tout moment la protection des données à caractère personnel conformément aux cadres juridiques appropriés, en particulier lorsqu’il s’agit de données hautement sensibles telles que celles relevant des décisions Prüm.

3.2.5.

S’agissant de l’utilisation de l’intelligence artificielle à des fins de coopération policière transfrontière, le CESE renvoie à son avis sur le règlement sur l’intelligence artificielle (9).

3.2.6.

Le CESE souligne que l’annexe à la proposition relative à une législation sur l’intelligence artificielle (10) prévoit la possibilité d’utiliser celle-ci dans le cadre de la gestion des migrations, de l’asile et des contrôles aux frontières. Le CESE s’inquiète plus particulièrement de la référence à l’utilisation de «polygraphes et outils similaires, ou [d’outils] pour analyser l’état émotionnel d’une personne physique», la fiabilité de ces méthodes n’étant pas prouvée scientifiquement.

3.2.7.

S’agissant des mesures spécifiques proposées dans le nouveau pacte sur la migration et l’asile, le CESE renvoie à son avis du 17 décembre 2020 (11).

3.2.8.

Le CESE s’interroge sur la valeur ajoutée d’une utilisation accrue des informations préalables sur les passagers combinées aux dossiers passagers et estime que la Commission n’a pas présenté d’arguments convaincants en faveur de l’échange systématique et massif de données à caractère personnel au sein de l’espace Schengen, lequel concernerait par défaut également les citoyens de l’Union qui exercent leur droit à la libre circulation.

3.2.9.

S’agissant de l’utilisation du mandat d’arrêt européen et d’autres instruments qui facilitent la coopération en matière répressive, tels que la décision d’enquête européenne, le CESE souligne que la confiance mutuelle est indispensable au bon fonctionnement de ces instruments de reconnaissance réciproque. À cette fin, les institutions de l’Union doivent surveiller encore plus efficacement l’état de droit et les États membres prendre la responsabilité de le défendre, en particulier pour ce qui est du droit à une protection juridictionnelle effective prévu à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après dénommée la «charte») et à l’article 19, paragraphe 1, du traité sur l’Union européenne.

3.3.   Une gouvernance améliorée

3.3.1.

Le CESE se félicite que le forum Schengen puisse offrir aux États membres une enceinte de discussion pour examiner des questions politiques importantes liées à la coopération Schengen. Toutefois, les autres institutions de l’Union, ainsi que le Comité, devraient être tenus au courant et avoir le droit de participer à ces discussions. Le forum et ses initiatives devraient être aussi transparents que possible et les documents élaborés dans ce contexte devraient être accessibles. À cet égard, si le CESE salue la décision de relancer l’adoption du rapport sur la situation dans l’espace Schengen, il considère toutefois que cette mesure n’est pas suffisante.

3.3.2.

Le CESE soutient l’idée selon laquelle le code frontières Schengen doit être modifié pour y intégrer certains des enseignements tirés de la pandémie de COVID-19. Il souligne que ces enseignements dépassent la question des frontières intérieures et concernent le fonctionnement du marché intérieur lui-même. Toute modification de ce type devrait dès lors faire partie d’un examen plus vaste portant sur la pertinence du cadre réglementaire européen en matière de libre circulation dans un monde où la COVID-19 est susceptible de rester une réalité. Le CESE soutient l’idée qu’une telle démarche devrait également s’intéresser aux règles concernant les voyages à destination de l’Union, qui ne sont actuellement pas couverts par le code frontières Schengen. Il souhaiterait en outre que la Commission lui indique si elle a l’intention de modifier le règlement relatif au petit trafic frontalier.

3.3.3.

Le CESE estime que la Commission devrait adopter une position plus ferme en faveur des voyages sans frontières en Europe. Le traité sur l’Union européenne dispose clairement que l’Union doit offrir un espace sans frontières à ses citoyens. Le droit des États membres de rétablir des contrôles aux frontières constitue une dérogation à ce droit, laquelle doit faire l’objet d’une interprétation restrictive. Le rétablissement des contrôles ne peut être considéré comme une prérogative souveraine étant donné qu’il est soumis aux règles du code frontières Schengen. Toute révision du code doit tenir pleinement compte du caractère exceptionnel du rétablissement des contrôles aux frontières.

3.3.4.

Le CESE se félicite des propositions visant à améliorer le fonctionnement du mécanisme d’évaluation de Schengen, en particulier celles qui ont pour but d’assurer un suivi plus rapide et de renforcer les synergies avec le mécanisme d’évaluation de la vulnérabilité, et celles qui accordent une attention accrue aux droits de l’homme et adoptent une approche transversale en la matière. Il convient toutefois de veiller à ce que le mécanisme d’évaluation de Schengen ne politise pas des questions de nature plus technique.

3.3.5.

Le CESE encourage la Commission à exercer activement les compétences d’exécution que lui confèrent les traités pour faire respecter la législation lorsque aucune suite n’est donnée aux manquements constatés dans le cadre des évaluations de Schengen. À cet égard, il convient de lutter en priorité contre les pratiques d’ordre systémique qui constituent une violation des règles en matière de droits fondamentaux. Il importe que la Commission ne se fonde pas uniquement sur les conclusions du mécanisme d’évaluation de Schengen, mais qu’elle surveille aussi activement, de sa propre initiative, la situation en matière de droits fondamentaux.

3.4.   Achèvement de l’espace Schengen

3.4.1.

Le CESE se félicite de la position adoptée par la Commission concernant l’achèvement de l’espace Schengen et met l’accent sur le lien qui existe entre libre circulation, citoyenneté de l’Union et absence de contrôles aux frontières. Actuellement, les citoyens bulgares, croates et roumains ne jouissent pas pleinement de leurs droits de citoyens européens consacrés par les traités.

3.4.2.

Le CESE souligne que ces États membres contrôlent déjà leurs frontières extérieures conformément au code frontières Schengen. Leur entrée pleine et entière dans l’espace Schengen renforcerait le fonctionnement et la sécurité de l’Union européenne grâce à leur pleine participation à l’ensemble des bases de données à grande échelle dans le secteur de la justice et des affaires intérieures (JAI).

3.4.3.

Le CESE invite la Commission à présenter une feuille de route plus détaillée en vue d’une totale intégration de ces États membres à l’espace Schengen, et invite le Conseil à y donner suite dans les meilleurs délais.

Bruxelles, le 20 octobre 2021.

La présidente du Comité économique et social européen

Christa SCHWENG


(1)  COM(2021) 278 final.

(2)  Voir paragraphe 4.8: JO C 110 du 22.3.2019, p. 62.

(3)  Rapport spécial de la Cour des comptes européenne intitulé «Soutien de Frontex à la gestion des frontières extérieures: pas assez efficace jusqu’ici», 2021.

(4)  Avis du CESE sur la migration, JO C 123 du 9.4.2021, p. 15, JO C 155 du 30.4.2021, p. 58, et JO C 155 du 30.4.2021, p. 64.

(5)  Note de la Commission européenne sur la «Mise en œuvre de l’interopérabilité: état d’avancement de la mise en œuvre du système d’entrée/de sortie et du système européen d’information et d’autorisation concernant les voyages», juin 2021.

(6)  Règlement (UE) 2018/1725 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions, organes et organismes de l’Union et à la libre circulation de ces données, et abrogeant le règlement (CE) no 45/2001 et la décision no 1247/2002/CE (JO L 295 du 21.11.2018, p. 39).

(7)  Conformément au titre VI de la charte des droits fondamentaux et au droit dérivé applicable.

(8)  Directive 2012/29/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2012 établissant des normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes de la criminalité et remplaçant la décision-cadre 2001/220/JAI du Conseil (JO L 315 du 14.11.2012, p. 57), ainsi que la législation applicable à certaines catégories de victimes de la traite des êtres humains, de l’exploitation sexuelle et de la pédopornographie, ainsi que du terrorisme.

(9)  INT/940 (JO C 517 du 22.12.2021, p. 61).

(10)  COM(2021) 206 final, p. 4 et 5.

(11)  JO C 123 du 9.4.2021, p. 15.


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