COMMISSION EUROPÉENNE
Bruxelles, le 23.11.2016
COM(2016) 853 final
2016/0363(COD)
Proposition de
DIRECTIVE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL
modifiant la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne le rang des instruments de dette non garantis dans la hiérarchie en cas d’insolvabilité
(Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)
{SWD(2016) 377}
{SWD(2016) 378}
EXPOSÉ DES MOTIFS
1.CONTEXTE DE LA PROPOSITION
•Justification et objectifs de la proposition
Les modifications proposées pour la directive 2014/59/UE (directive sur le redressement et la résolution des banques ou «BRRD») font partie d’un train de mesures législatives comprenant aussi des modifications du règlement (UE) nº 575/2013 (règlement sur les exigences de fonds propres, ou «CRR»), de la directive 2013/36/UE (directive sur les exigences de fonds propres, ou «CRD») et du règlement (UE) nº 806/2014 (règlement instituant le mécanisme de résolution unique ou «règlement MRU»).
Ces dernières années, l’UE a réformé en profondeur le cadre réglementaire applicable aux services financiers, en se fondant largement sur les normes internationales définies avec ses partenaires internationaux, pour accroître la résilience des établissements financiers de l’UE. C’est dans le cadre de cette réforme qu'ont notamment été adoptés le règlement (UE) nº 575/2013 (règlement sur les exigences de fonds propres, ou «CRR») et la directive 2013/36/UE (directive sur les exigences de fonds propres, ou «CRD»), concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements et leur surveillance, la directive 2014/59/UE (directive sur le redressement et la résolution des banques ou «BRRD»), concernant le redressement et la résolution des établissements, et le règlement (UE) nº 806/2014 sur le mécanisme de résolution unique («règlement MRU»).
Ces mesures ont été prises en réaction à la crise financière qui a éclaté en 2007-2008. L’absence de dispositifs adéquats pour la gestion des crises et pour la résolution des défaillances a contraint les gouvernements du monde entier à venir à la rescousse des banques à la suite de la crise financière. L’incidence sur les finances publiques de cette socialisation des coûts des défaillances bancaires et l’incitation inopportune qu’elle constitue ont confirmé qu’une approche différente s'imposait pour gérer les crises bancaires et protéger la stabilité financière.
Au sein de l’Union, conformément aux mesures importantes prises dans les enceintes internationales, la directive 2014/59/UE (BRRD) et le règlement (UE) nº 806/2014 (règlement MRU) ont mis en place un solide cadre de résolution bancaire permettant de gérer efficacement les crises bancaires et de réduire leur impact négatif sur la stabilité financière et les finances publiques. La solidité d’un tel cadre tient notamment à l’existence d’un instrument fondamental, l’instrument de «renflouement interne», qui consiste à déprécier des dettes ou autres engagements ou à les convertir en fonds propres, selon une hiérarchie prédéfinie. Cet instrument peut être utilisé pour absorber les pertes et recapitaliser en interne un établissement défaillant ou susceptible d’être défaillant, de manière à le rendre à nouveau viable. La défaillance d’un établissement sera donc supportée par ses actionnaires et ses créanciers, et non plus par le contribuable.
L’un des principaux objectifs de la BRRD est de faciliter l’absorption des pertes par le secteur privé en cas de crise bancaire. Pour atteindre cet objectif, toutes les banques sont tenues de satisfaire à une exigence minimale de fonds propres et d’engagements éligibles (Minimum Requirement for own funds and Eligible Liabilities, ci-après, la «MREL») afin de disposer de suffisamment de ressources financières pouvant être dépréciées ou converties en fonds propres. Dans le cadre de la BRRD, il n’est pas imposé d’obligation générale de subordination des instruments éligibles aux fins de la MREL. Cela signifie, concrètement, qu’un engagement éligible aux fins de la MREL peut, dans une procédure d'insolvabilité, avoir le même rang (pari passu) que d’autres engagements non utilisables pour un renflouement interne selon la BRRD, comme les prêts interbancaires à court terme, ou que d’autres engagements utilisables pour un renflouement interne mais qui peuvent en être exclus de manière discrétionnaire par l’autorité de résolution, si celle-ci peut justifier que, pour des raisons d’exécution opérationnelle ou de risque de contagion systémique (par exemple les produits dérivés), il serait difficile de les y inclure. Cela pourrait conduire à ce que des détenteurs d’obligations utilisées à des fins de renflouement interne se plaignent d'avoir été moins bien traités dans le cadre de la procédure de résolution qu'ils ne l'auraient été dans une procédure d'insolvabilité. Dans ce cas, il faudrait les indemniser sur les ressources du Fonds de résolution. Pour éviter ce risque, les autorités de résolution peuvent décider que l’exigence de MREL soit remplie au moyen d’instruments de rang inférieur, en cas d’insolvabilité, à celui d’autres engagements qui ne peuvent légalement servir à un renflouement interne ou qui s’y prêtent difficilement («obligation de subordination»).
À l’échelon international, le Conseil de stabilité financière (CSF) a publié, le 9 novembre 2015, un tableau des modalités d'application («term sheet») de la norme de capacité totale d’absorption des pertes (TLAC) (ci-après, la «norme TLAC») que le G20 a adoptée une semaine plus tard lors de son sommet en Turquie. La norme TLAC impose aux banques d’importance systémique mondiale, dénommées «établissements d’importance systémique mondiale» (EISm) dans la législation de l’Union, de détenir un montant minimal suffisant d’engagements (utilisables pour un renflouement interne) présentant une très grande capacité d’absorption des pertes («exigence minimale de TLAC») afin de garantir un processus rapide et sans heurts d’absorption des pertes et de recapitalisation en cas de résolution. Dans sa communication du 24 novembre 2015, la Commission s’est engagée à présenter une proposition législative d’ici la fin de cette année, de façon à ce que la norme TLAC puisse être appliquée dans les délais prévus, à savoir d'ici 2019.
La présente proposition s’inscrit dans le cadre des efforts déployés par la Commission pour mettre en œuvre la norme TLAC dans l’Union, de même qu’un certain nombre d’autres propositions visant à modifier le cadre actuel de l’Union en matière de redressement et de résolution.
Elle comporte en particulier des modifications ciblées de la BRRD concernant le rang, en cas d’insolvabilité, des détenteurs d'instruments de dette émis par des banques de l’Union aux fins du respect de la BRRD et des exigences de TLAC en matière de capacité d’absorption des pertes et de recapitalisation des banques. Afin d’améliorer l’exécution opérationnelle, de renforcer les pouvoirs en matière de renflouement interne et d’éviter toute insécurité juridique, la norme TLAC exige que ne soient éligibles au titre de la TLAC que les engagements subordonnés, c’est-à-dire censés, en cas d’insolvabilité ou de résolution, être consacrés à l’absorption des pertes avant d’autres engagements (dits «privilégiés») qui sont expressément inéligibles au titre de la TLAC, comme les produits dérivés, les dépôts garantis ou les dettes fiscales. La norme TLAC impose donc une obligation de subordination, sous réserve de certaines exemptions, mais ne prescrit pas la manière de la faire respecter.
Cette obligation de détention d’instruments subordonnés aux fins de la TLAC, conjuguée à la possibilité pour les autorités de résolution de l’Union de demander de manière discrétionnaire que la MREL soit également remplie au moyen d'instruments subordonnés, a conduit certains États membres à réévaluer leur classement national des créances en cas d’insolvabilité. Un certain nombre d’entre eux ont modifié (ou entrepris de modifier) le rang de certains créanciers des banques dans la hiérarchie prévue par leur législation nationale en matière d’insolvabilité, afin de permettre l’application éventuelle de l’instrument de renflouement interne conformément à la BRRD et de faire en sorte que leurs EISm respectent l’obligation de subordination de la norme TLAC. Dans certains États membres, le stock existant de créances de rang supérieur non garanties a été subordonné avec effet immédiat, afin que les banques puissent respecter toute obligation de subordination découlant de la BRRD ou de la norme TLAC. Dans d’autres États membres, les banques doivent émettre de nouveaux titres de dette remplissant le critère de subordination. Compte tenu des divergences sensibles existant entre les règles nationales adoptées jusqu’à présent, il existe un large consensus des parties prenantes et des États membres sur le fait que la coexistence d’approches divergentes en matière de classement légal des créanciers des banques est une source d’incertitude pour les émetteurs comme pour les investisseurs et rend plus difficile l’utilisation de l’instrument de renflouement interne pour les établissements transfrontières. Cette incertitude pourrait aussi provoquer des distorsions de concurrence, dans la mesure où les détenteurs de créances non garanties pourraient être traités différemment selon les États membres, et où le coût du respect des exigences TLAC et MREL pourrait varier d’un État membre à l’autre. En outre, en raison de cette diversité des régimes nationaux en matière d’insolvabilité, les créanciers ayant acheté des instruments de dette émis par des banques recevraient un traitement très différent selon le régime national de hiérarchisation des créanciers dont relèvent ces banques.
Pour les raisons indiquées ci-dessus, le Parlement européen a invité la Commission, dans son rapport sur l’union bancaire, à présenter des propositions visant à réduire encore les risques juridiques de plaintes invoquant le principe selon lequel aucun créancier ne doit être moins bien traité qu’en cas de liquidation (no-creditor-worse-off principle) et le Conseil ECOFIN l’a invitée, dans ses conclusions du 17 juin 2016, à présenter une proposition d’approche commune de la hiérarchie des créanciers des banques.
Une proposition portant spécifiquement sur la hiérarchie des créanciers des banques se justifie par la nature distincte des questions à traiter et par la nécessité urgente de doter l’Union de règles harmonisées pour prévenir de nouvelles distorsions de concurrence sur le marché intérieur. .
1.1.Cohérence avec les dispositions existantes dans le domaine d’action
Le cadre de résolution des défaillances bancaires dont dispose actuellement l’Union impose déjà à toutes les banques de l’Union de détenir un montant suffisant d’engagements (utilisables pour un renflouement interne) présentant une forte capacité d’absorption des pertes, qui sont censés participer au renflouement interne en cas de résolution. En facilitant la mise en œuvre de l’instrument de renflouement interne, grâce à l’obligation de subordination prévue par la BRRD et la norme TLAC, la proposition permettra d’améliorer l’application des règles existantes et contribuera à la mise en œuvre de la norme TLAC dans l’Union. Elle est donc conforme à l’objectif général du cadre de résolution des défaillances bancaires de l’Union, à savoir réduire la participation des contribuables à la résolution des défaillances bancaires.
1.2.Cohérence avec les autres politiques de l’Union
La proposition s’inscrit dans le cadre d’un réexamen plus large de la législation financière de l’Union visant à réduire les risques dans le secteur financier tout en promouvant un financement durable de l’activité économique. Elle est pleinement conforme aux objectifs fondamentaux de l’UE consistant à promouvoir la stabilité financière, à réduire la participation des contribuables à la résolution des défaillances bancaires et à contribuer à un financement durable de l’économie.
2.BASE JURIDIQUE, SUBSIDIARITÉ ET PROPORTIONNALITÉ
2.1.Base juridique
La présente proposition de directive vise à modifier une directive existante, la BRRD. Elle a la même base juridique que la BRRD, à savoir l’article 114 du TFUE. Cette disposition permet l’adoption de mesures visant le rapprochement des dispositions nationales ayant pour objet l’établissement et le fonctionnement du marché intérieur.
La proposition harmonise les dispositions nationales sur le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement, notamment en ce qui concerne leur capacité d’absorption des pertes et de recapitalisation en cas de résolution, dans la mesure nécessaire pour doter les États membres et les banques de l’Union des mêmes outils et de la même capacité de faire face à une défaillance bancaire dans le respect des normes internationales reconnues (norme TLAC).
En établissant à l’échelle du marché intérieur des règles harmonisées sur le traitement de certains créanciers des banques en cas de résolution, la proposition réduit considérablement les divergences entre les règles nationales relatives à la capacité d’absorption des pertes et de recapitalisation des banques, divergences qui risqueraient de fausser la concurrence dans le marché intérieur. Il s’ensuit qu’elle a bien pour objet l’établissement et le fonctionnement du marché intérieur.
L’article 114 du TFUE est donc la base juridique appropriée.
2.2.Subsidiarité
En vertu du principe de subsidiarité énoncé à l’article 5, paragraphe 3, du TFUE, dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, l’Union intervient seulement si, et dans la mesure où, les objectifs de l’action envisagée ne peuvent pas être atteints de manière suffisante par les États membres, tant au niveau central qu’au niveau régional et local, mais peuvent l’être mieux, en raison des dimensions ou des effets de l’action envisagée, au niveau de l’Union.
L’Union et ses États membres se sont engagés à mettre en œuvre le cadre de redressement et de résolution bancaires de l’Union conformément aux normes internationales. En l’absence d’action de l’Union, ce seraient les États membres eux-mêmes qui, pour faciliter l’application de l’instrument de renflouement interne prévu par la BRRD et mettre en œuvre la norme TLAC définie au niveau international, auraient à adopter des règles sur le traitement des créanciers des banques en cas de résolution. L’existence de divergences significatives entre les réglementations nationales expose les banques et leurs créanciers (investisseurs) à une insécurité juridique et à des coûts différents et potentiellement plus élevés qu’en cas d’action de l’Union. L’action de l’Union est donc souhaitable pour faciliter l’application harmonisée de l’instrument de renflouement interne dans le respect de la norme internationale TLAC, afin d’alléger autant que possible les coûts de mise en conformité des banques et de leurs créanciers, tout en assurant une résolution optimale des défaillances bancaires.
2.3.Proportionnalité
En vertu du principe de proportionnalité, le contenu et la forme de l’action de l’Union ne doivent pas excéder ce qui est nécessaire pour atteindre ses objectifs, conformes aux objectifs généraux des traités. La proposition n’affecterait pas sensiblement la charge qu’impose aux banques le respect des règles existantes en matière de capacité d’absorption des pertes et de recapitalisation et elle réduirait au minimum leurs coûts de mise en conformité avec la norme TLAC. Elle n’affecterait pas non plus les droits des créanciers et des investisseurs bancaires en ce qui concerne le stock existant des dettes des banques. Ses dispositions sont donc proportionnées à ce qui est nécessaire pour atteindre ses objectifs.
3.RÉSULTATS DES ANALYSES D’IMPACT
3.1.Analyse d'impact
S’inscrivant dans le cadre d’un réexamen plus large de la législation financière de l’Union visant à réduire les risques dans le secteur financier, la proposition a fait l'objet d’une analyse d’impact approfondie. Un projet de rapport d’analyse d’impact a été soumis le 7 septembre 2016 au comité d’examen de la réglementation de la Commission, qui a rendu un premier avis négatif. Après le renforcement des éléments factuels du train de mesures, le comité a émis un avis positif le 27 septembre 2016.
Conformément à sa politique visant à «mieux légiférer», la Commission a analysé l’impact de plusieurs options différentes. Ces options ont été évaluées au regard des objectifs clés de renforcement de la capacité d’absorption des pertes et de recapitalisation des banques en cas de résolution et de renforcement de la sécurité juridique et de la cohérence du cadre régissant les procédures de résolution. L’analyse a consisté à examiner l’efficacité de chaque option en termes de réalisation de ces objectifs et le rapport coût-efficacité de sa mise en œuvre.
L’analyse d’impact écarte l’option d’un statu quo en ce qui concerne la hiérarchie des créanciers des banques en cas d’insolvabilité bancaire dans l’Union, car cette option créerait des distorsions de concurrence sur le marché intérieur des créances de rang supérieur non garanties, des différences de statut des créanciers des banques selon les États membres pouvant faire varier les coûts de financement des banques. En termes d’harmonisation, plusieurs sous-options ont été examinées et il ressort de l’analyse d’impact que la création d’une catégorie spécifique «non privilégiée» de rang supérieur pour les titres de dette non garantis est le moyen le moins coûteux pour les EISm de respecter l’obligation de subordination de la norme TLAC et l'exigence, que peuvent imposer au cas par cas les autorités de résolution, de se conformer à la MREL au moyen de titres de dette subordonnés. Contrairement aux instruments de fonds propres, cette catégorie de titres de dette ne pourrait être utilisée à des fins de renflouement interne dans une procédure de résolution qu’après la dépréciation ou la conversion de tous les instruments de fonds propres et avant l’utilisation aux mêmes fins des autres titres de dette de rang supérieur. Le principal avantage de cette option serait de permettre aux banques de continuer d’émettre de la dette de premier rang (moins coûteuse) pour leurs besoins de financement ou de fonctionnement, la nouvelle catégorie de dette pouvant servir principalement à la mise en conformité avec les règles en matière de capacité d’absorption des pertes et de recapitalisation.
3.2.Droits fondamentaux
La présente proposition, qui respecte les droits fondamentaux et observe les principes reconnus, en particulier, par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, notamment le droit de propriété et la liberté d’entreprise, doit être appliquée conformément à ces droits et principes. Elle veille en particulier à empêcher toute atteinte disproportionnée aux droits de propriété des créanciers des banques. Elle empêchera que les créanciers affectés ne subissent de pertes plus importantes que celles qu’ils auraient subies si l’établissement avait été liquidé selon une procédure normale d’insolvabilité au moment où la résolution a été décidée.
4.INCIDENCE BUDGÉTAIRE
La proposition n’a aucune incidence sur le budget de l’UE.
5.AUTRES ÉLÉMENTS
5.1.Plans de mise en œuvre et modalités de suivi, d'évaluation et d'information
La proposition impose aux États membres de transposer les modifications de la BRRD dans leur législation nationale d’ici [à juin 2017] et aux banques de se conformer aux règles modifiées d’ici [à juillet 2017].
5.2.Explication détaillée des différentes dispositions de la proposition
La proposition modifie l’article 108 de la BRRD en harmonisant partiellement la hiérarchie des créanciers en cas d’insolvabilité, pour ce qui est du niveau de priorité des détenteurs de dette bancaire de rang supérieur non garantie éligible aux fins des dispositions de la BRRD et de la norme TLAC sur la capacité d’absorption des pertes et de recapitalisation des banques, et en particulier de l’obligation de «subordination».
Tout en maintenant la catégorie existante de créances de rang supérieur, cette nouvelle disposition crée une nouvelle catégorie d’actifs constituée des créances de rang supérieur «non privilégiées» qui ne devraient être utilisée à des fins de renflouement interne qu’après les autres instruments de fonds propres, mais avant les autres créances de rang supérieur. Les établissements restent libres d’émettre de la dette dans les deux catégories, mais seule la catégorie de rang supérieur «non privilégiée» est éligible aux fins de l’exigence de TLAC ou de toute obligation de subordination que pourraient imposer les autorités de résolution au cas par cas.
La directive proposée ne devrait pas avoir d’incidence sur le stock existant de titres de dette bancaire et sur leur rang de priorité en cas d’insolvabilité; en revanche, une fois entrée en application, elle s’appliquera à toute émission de dette bancaire. En ce qui concerne les titres de dette émis avant l’entrée en application de la présente directive visée à l’article 2, paragraphe 1 [juillet 2017], leur rang en cas d’insolvabilité devrait être régi par les dispositions du droit national adoptées au [31 décembre 2016].
La directive impose aux États membres de l'avoir transposée au plus tard le [juin 2017] et sa date d’entrée en application est fixée au [juillet 2017].
2016/0363 (COD)
Proposition de
DIRECTIVE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL
modifiant la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne le rang des instruments de dette non garantis dans la hiérarchie en cas d’insolvabilité
(Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)
LE PARLEMENT EUROPÉEN ET LE CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE,
vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 114,
vu la proposition de la Commission européenne,
après transmission du projet d'acte législatif aux parlements nationaux,
vu l'avis de la Banque centrale européenne,
vu l’avis du Comité économique et social européen,
statuant conformément à la procédure législative ordinaire,
considérant ce qui suit:
(1)Le Conseil de stabilité financière (CSF) a publié le 9 novembre 2015 un tableau des modalités d'application («term sheet») de la norme de capacité totale d’absorption des pertes (TLAC) (ci-après, la «norme TLAC») que le G20 a adoptée en novembre 2015. La norme TLAC impose aux banques d’importance systémique mondiale, dénommées «établissements d’importance systémique mondiale» (EISm) dans le cadre de l’Union, de détenir un montant minimal suffisant d’engagements (utilisables pour un renflouement interne) présentant une très grande capacité d’absorption des pertes afin de garantir un processus rapide et sans heurts d’absorption des pertes et de recapitalisation en cas de résolution. Dans sa communication du 24 novembre 2015, la Commission s’est engagée à présenter avant la fin de 2016 une proposition législative qui permettrait la mise en œuvre de la norme TLAC avant l'échéance de 2019 convenue au niveau international.
(2)La mise en œuvre de la norme TLAC dans l’Union doit tenir compte de l’exigence minimale existante de fonds propres et d’engagements éligibles (MREL) applicable au cas par cas à tous les établissements de crédit et entreprises d’investissement de l’Union et définie dans la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil. Dans la mesure où la TLAC et la MREL poursuivent le même objectif, à savoir faire en sorte que les établissements de crédit et entreprises d’investissement de l’Union aient une capacité d’absorption des pertes suffisante, ces deux exigences devraient être des éléments complémentaires d’un cadre commun. D’un point de vue opérationnel, le niveau minimal harmonisé de la norme TLAC pour les EISm (l’«exigence minimale de TLAC») devrait être inclus dans la législation de l’Union au moyen de modifications du règlement (UE) nº 575/2013 du Parlement européen et du Conseil , alors que l’obligation supplémentaire au cas par cas pour les EISm et l'exigence au cas par cas pour les établissements qui ne sont pas d'importance systémique mondiale devraient l’être au moyen de modifications ciblées de la directive 2014/59/UE et du règlement (UE) nº 806/2014 du Parlement européen et du Conseil. Les dispositions pertinentes de la présente directive relatives au rang des titres de dette non garantis dans la hiérarchie en cas d’insolvabilité sont complémentaires de celles des actes législatifs précités et de la directive 2013/36/UE.
(3)Les États membres devraient veiller à ce que les établissements de crédit et les entreprises d’investissement aient une capacité d’absorption des pertes et de recapitalisation suffisantes pour garantir, en cas de résolution, un processus rapide et sans heurts d’absorption des pertes et de recapitalisation, avec un impact minimal sur la stabilité financière et les contribuables. Cet objectif devrait être atteint par le respect permanent, par les établissements de crédit et les entreprises d’investissement, d’une exigence minimale de TLAC prévue dans le règlement (UE) nº 575/2013 et d’une exigence de fonds propres et d’engagements éligibles prévue par la directive 2014/59/UE.
(4)La norme TLAC, telle que transposée dans le droit de l’Union par le règlement (UE) nº 575/2013, impose aux EISm de respecter l’exigence minimale de TLAC, sauf exception, en recourant à des engagements subordonnés résultant d’instruments de dette d’un rang inférieur aux engagements de rang supérieur(«obligation de subordination»). La directive 2014/59/UE permet aux autorités de résolution de demander, au cas par cas, à des EISm et à d'autres établissements de remplir l’exigence spécifique qui s’impose à chacun à l'aide d’engagements subordonnés, de façon à réduire le risque de recours juridictionnels introduits par des créanciers estimant que leurs pertes dans le cadre de la résolution sont plus élevées que celles qu’entraînerait une procédure normale d’insolvabilité.
(5)Un certain nombre d’États membres ont modifié ou ont entrepris de modifier le rang des créances de rang supérieur non garanties dans la hiérarchie définie par la législation nationale en matière d’insolvabilité, afin de permettre à leurs établissements de crédit et entreprises d’investissement de respecter l’obligation de subordination prévue dans le règlement (UE) nº 575/2013 et la directive 2014/59/UE.
(6)Les règles nationales adoptées jusqu’ici présentent des divergences significatives. L’absence de règles harmonisées de l’Union crée une incertitude tant pour les établissements de crédit émetteurs que pour les entreprises d’investissement et les investisseurs et rend plus difficile l’utilisation de l’instrument de renflouement interne pour les établissements transfrontières. Cela provoque aussi des distorsions de concurrence sur le marché intérieur, étant donné que les coûts que doivent supporter les établissements de crédit et les entreprises d’investissement pour se conformer à l'obligation de subordination prévue par le règlement (UE) nº 575/2013 et par la directive 2014/59/UE et les coûts supportés par les investisseurs lors de l’achat de titres de créance émis par des établissements de crédit et des entreprises d’investissement peuvent varier considérablement d'un État membre de l’Union à l'autre.
(7)Dans son rapport sur l’Union bancaire, le Parlement européen a invité la Commission à présenter des propositions pour réduire encore les risques juridiques de plaintes invoquant le principe selon lequel aucun créancier ne doit être moins bien traité qu’en cas d'insolvabilité (no-creditor-worse-off principle) et le Conseil l’a invitée, dans ses conclusions du 17 juin 2016, à présenter une proposition d’approche commune de la hiérarchie des créanciers des banques, afin de renforcer la sécurité juridique en cas de résolution.
(8)Il est donc nécessaire de lever ces obstacles importants au bon fonctionnement du marché intérieur, d’éviter les distorsions de concurrence résultant de l’absence de règles harmonisées de l’Union concernant la hiérarchie des créanciers des banques et d’empêcher la réapparition future de tels obstacles ou distorsions. En conséquence, la base juridique appropriée pour la présente directive devrait être l’article 114 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), tel qu’il est interprété conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne.
(9)Afin de réduire au minimum les coûts que doivent supporter les établissements de crédit et les entreprises d'investissement pour se mettre en conformité avec l’obligation de subordination, ainsi que d'éventuels impacts négatifs sur leurs coûts de financement, la présente directive devrait autoriser les États membres à maintenir la catégorie existante des titres de dette non garantis de rang supérieur, qui se situe au rang le plus élevé parmi les instruments de dette en cas d’insolvabilité et dont l'émission coûte moins cher aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement que celle de tout titre subordonné. Elle devrait cependant imposer aux États membres la création d’une nouvelle catégorie d’actifs constituée de titres de créance de rang supérieur «non privilégiés», qui ne devraient être utilisés à des fins de renflouement interne qu’après les autres instruments de fonds propres, mais avant les autres créances de rang supérieur. Les établissements de crédit et les entreprises d’investissement devraient rester libres d’émettre de la dette dans les deux catégories, mais seule la catégorie de rang supérieur «non privilégiée» devrait être éligible aux fins du respect de l’obligation de subordination du règlement (UE) nº 575/2013 et de la directive 2014/59/UE. Cela devrait leur permettre d’utiliser à des fins de financement ou à toute autre fin opérationnelle les titres de dette de rang supérieur, moins coûteux, et d’émettre des titres de dettes de la nouvelle catégorie «non privilégiée» pour se conformer à l’obligation de subordination.
(10)Pour que la nouvelle catégorie de titres de dette de rang supérieur «non privilégiés» remplisse les critères d’éligibilité du règlement (UE) nº 575/2013 et de la directive 2014/59/UE, les États membres devraient veiller à ce que leur échéance contractuelle initiale couvre un an, qu’ils ne présentent pas de composante dérivée et que les documents contractuels relatifs à leur émission indiquent explicitement le rang qui est le leur dans le cadre d'une procédure normale d’insolvabilité.
(11)Pour renforcer la sécurité juridique des investisseurs, les États membres devraient veiller à ce que leur législation nationale en matière d’insolvabilité reconnaisse aux instruments de dette de rang supérieur classiques un niveau de priorité supérieur à celui reconnu à la nouvelle catégorie d’instruments de dette de rang supérieur «non privilégiés» lors d’une procédure normale d’insolvabilité. Les États membres devraient aussi veiller à ce que la nouvelle catégorie d’instruments de dette de rang supérieur «non privilégiés» ait un niveau de priorité plus élevé que celui reconnu aux instruments de fonds propres ou autres engagements subordonnés et que, contrairement auxdits instruments et engagements, les instruments de dette de rang supérieur «non privilégiés» ne puissent participer au renflouement interne que si l'établissement émetteur fait l’objet d’une procédure de résolution.
(12)Étant donné que les objectifs de la présente directive, à savoir établir des règles uniformes de hiérarchisation des créanciers des banques aux fins du cadre européen de redressement et de résolution, ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les États membres et peuvent donc, en raison de l'ampleur de l'action à mener, être mieux réalisés au niveau de l'Union, celle-ci peut prendre des mesures, conformément au principe de subsidiarité consacré par l'article 5 du traité sur l'Union européenne. Conformément au principe de proportionnalité tel qu'énoncé audit article, le présent règlement n'excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre ces objectifs.
(13)Il convient que les modifications de la directive 2014/59/UE prévues par la présente directive s’appliquent aux dettes émises à la date ou après la date d’entrée en application de cette dernière et à l’encours de dette existant à cette date. Cependant, dans un souci de sécurité juridique et pour limiter autant que possible les coûts de transition, les États membres devraient veiller à ce que le traitement de tous les titres de dette qui ont été émis avant cette date par les établissements de crédit et les entreprises d’investissement soit régi par les dispositions nationales telles qu’adoptée au [31 décembre 2016]. Ces titres devraient donc continuer de relever des exigences de la directive 2014/59/UE et de la législation nationale pertinente dans la version adoptée au [31 décembre 2016].
ONT ADOPTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE:
Article premier
Modifications de la directive 2014/59/UE
1.À l’article 108, les termes «des dépôts» sont supprimés du titre et les termes «non privilégiés» sont supprimés du premier alinéa, point a).
2.À la fin de l'article 108, les paragraphes suivants sont ajoutés:
«2.
Les États membres veillent à ce que, pour les entités visées à l’article 1er, paragraphe 1, points a), b), c) et d), les créances ordinaires non garanties résultant des instruments de dette qui ont le plus haut rang de priorité parmi les instruments de dette selon la législation nationale régissant la procédure normale d’insolvabilité aient un niveau de priorité plus élevé que les créances non garanties résultant des instruments de dette qui remplissent les conditions suivantes:
(a)l’échéance contractuelle initiale de ces instruments de dette couvre un an;
(b)ils ne comportent pas de composante dérivée;
(c)les documents contractuels relatifs à leur émission font explicitement référence à leur rang selon le présent alinéa.
3.Les États membres veillent à ce que les créances ordinaires non garanties résultant des instruments de dette visés au paragraphe 2 aient un rang de priorité plus élevé, selon la législation nationale régissant la procédure normale d’insolvabilité, que celui des créances résultant des instruments visés à l’article 48, paragraphe 1, points a) à d).
4.Les États membres veillent à ce que leur législation nationale régissant la procédure normale d’insolvabilité, telle qu’adoptée au [31 décembre 2016], s’applique aux créances ordinaires non garanties résultant d'instruments de dette émis par les entités visées à l’article 1er, paragraphe 1, points a), b), c) et d) avant le [date d’entrée en application de la présente directive. - juillet 2017].»
Article 2
Transposition
1.Les États membres adoptent et publient, au plus tard le [juin 2017], les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive. Ils communiquent immédiatement le texte de ces dispositions à la Commission.
Les États membres appliquent ces mesures à partir du [juillet 2017].
2.Lorsque les États membres adoptent les dispositions visées au paragraphe 1, celles-ci contiennent une référence à la présente directive ou sont accompagnées d’une telle référence lors de leur publication officielle. Les modalités de cette référence sont arrêtées par les États membres.
3.Les États membres communiquent à la Commission et à l’Autorité bancaire européenne le texte des dispositions essentielles de droit interne qu’ils adoptent dans le domaine régi par la présente directive.
Article 3
Entrée en vigueur
La présente directive entre en vigueur le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne.
Article 4
Destinataires
Les États membres sont destinataires de la présente directive.
Fait à Bruxelles, le
Par le Parlement européen
Par le Conseil
Le président
Le président