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Document 51996IR0148

    Avis du Comité des régions sur «Le rôle des collectivités locales et régionales dans les services publics»

    CdR 148/96 fin

    JO C 116 du 14.4.1997, p. 52–58 (ES, DA, DE, EL, EN, FR, IT, NL, PT, FI, SV)

    51996IR0148

    Avis du Comité des régions sur «Le rôle des collectivités locales et régionales dans les services publics» CdR 148/96 fin

    Journal officiel n° C 116 du 14/04/1997 p. 0052


    Avis du Comité des régions sur «Le rôle des collectivités locales et régionales dans les services publics»(97/C 116/07)

    LE COMITÉ DES RÉGIONS,

    vu la décision du Comité des régions du 15 novembre 1995, de confier l'élaboration de l'avis à la sous-commission 1, en vertu de l'article 198C, paragraphe 4;

    vu l'avis de la sous-commission 1, adopté le 11 décembre 1996, (rapporteur: M. Ken Bodfish) (CdR 148/96 rév. 3);

    vu la communication de la Commission sur «Les services d'intérêt général en Europe» (COM(93) 443 final);

    vu le Traité instituant la Communauté européenne et en particulier son article 94;

    vu le rapport du Centre européen des entreprises à participation publique (CEEP) intitulé «Europe, concurrence et services publics»;

    a adopté lors de sa 16e session plénière des 15 et 16 janvier 1997 (séance du 16 janvier) à l'unanimité l'avis suivant.

    1. Observations générales

    1.1. Le Comité des régions (CdR) se félicite de l'occasion qui lui est donnée d'examiner les questions abordées par le document du CEEP traitant d'un nouvel équilibre entre le marché et le rôle du secteur public au sein de l'Union européenne. Ce document offre une vue d'ensemble de l'évolution de la Communauté européenne qui, simple union douanière à l'origine, est devenue une organisation complexe possédant des compétences étendues dans le domaine de la réglementation des services publics, dont certains sont traditionnellement fournis par le secteur public. Il retrace également la tendance croissante à la promotion de la concurrence dans la fourniture des services publics en Europe ainsi que l'émergence du concept de séparation entre d'une part, la réglementation de ces «services d'intérêt économique général» et d'autre part, la prestation de ces services et la protection des droits des consommateurs par un système de chartes.

    1.2. Commentant le document du CEEP, la sous-commission 1, dans son avis, profite de l'occasion pour exprimer son point de vue sur

    - le rôle des collectivités locales et régionales dans la fourniture des services publics,

    - l'importance croissante des droits des citoyens et de la protection des consommateurs et

    - le rôle des collectivités locales et régionales dans la régulation des services publics.

    1.3. L'avis traduit un certain nombre de préoccupations quant aux propositions du CEEP, préoccupations qui trouvent, dans une certaine mesure, un écho dans la communication de la Commission sur «Les services d'intérêt général en Europe». En conséquence, l'avis comporte des observations portant à la fois sur les propositions du CEEP et sur la communication de la Commission.

    2. Le rôle des collectivités locales et régionales dans la fourniture des services

    2.1. Le rapport du CEEP constitue un apport précieux au débat en cours sur la manière de concilier les effets de la libéralisation des politiques communautaires de la concurrence et la sauvegarde des exigences économiques générales, que l'on associe traditionnellement à la fourniture des services publics. Au coeur de ce débat se trouve la question du droit des ressortissants des États membres à bénéficier, à la fois en tant que citoyens et en tant que consommateurs, d'un service de qualité, que le prestataire soit public ou privé. L'interaction de la concurrence, de la fourniture des services publics et de l'intérêt du consommateur est un élément central de ce débat, comme le reconnaît la Commission dans sa communication.

    2.2. Le Comité des régions est fermement convaincu que les collectivités locales et régionales et leurs représentants élus ont un rôle à la fois central et crucial à jouer dans ce domaine. Leur responsabilité est double: fournir des services publics et, en tant que représentants élus démocratiquement, protéger les droits de leurs administrés.

    2.3. En premier lieu, les collectivités locales et régionales des États membres sont responsables de la fourniture d'une gamme étendue de services publics: éducation, services culturels, logement, transports, prestations sociales, services médicaux, etc. Les combinaisons de services dont sont responsables les collectivités locales et régionales varient considérablement d'un pays à l'autre mais, dans l'ensemble, ces services ont un impact non négligeable sur la qualité de vie des citoyens de l'Union.

    2.4. Le fait que les collectivités locales et régionales soient responsables de la fourniture de tel ou tel service n'implique pas que ce service doive être fourni directement par les collectivités en question. C'est souvent un prestataire privé, travaillant sous contrat pour le compte d'une collectivité locale ou régionale, qui se charge de la prestation de service. Cependant, quel que soit le cas de figure, c'est la collectivité locale ou régionale qui est responsable; dès lors, la qualité du service fourni au citoyen constitue pour la collectivité locale ou régionale une préoccupation essentielle. La collectivité locale ou régionale a donc un rôle essentiel à jouer dans la définition des services à fournir et dans la garantie de l'efficacité de la prestation.

    2.5. Le second aspect du rôle des collectivités locales et régionales dans le présent débat réside dans leur qualité d'organes élus démocratiquement. En tant que tels, elles doivent tout naturellement se préoccuper de la protection des droits des citoyens. Lorsque le service est fourni par des tiers, qu'il s'agisse d'organismes publics ou d'entreprises privées, les collectivités locales et régionales peuvent assurer le rôle de «défenseur» du citoyen. Ce rôle peut être officialisé, la collectivité locale ou régionale agissant en tant que «régulateur» statutaire des services fournis au citoyen. La collectivité locale ou régionale aurait ainsi la responsabilité de veiller à ce que le prestataire se conforme aux obligations de service envisagées pour la Charte européenne proposée: continuité du service, égalité d'accès, qualité et efficacité, normes de performance.

    2.6. Toutefois, le cas le plus fréquent est celui où la collectivité locale ou régionale n'a pas de rôle régulateur statutaire. Cependant, la collectivité peut considérer que son rôle démocratique consiste également à agir en tant que porte-parole des citoyens et à contrôler l'efficacité des prestataires de services sur son territoire. Même si elles ne sont pas officiellement investies d'un rôle régulateur, les collectivités peuvent veiller à ce que les fournisseurs de services respectent leurs obligations; elles peuvent représenter les citoyens lors des discussions portant sur la qualité des services et engager des actions au nom des particuliers. Le rôle de «défenseur des citoyens» est de plus en plus considéré comme une composante importante du rôle démocratique des collectivités locales et régionales. Le CdR voit dans ce rôle une manière de contribuer à la responsabilité des prestataires de services publics envers les citoyens.

    3. Droits des citoyens et protection des consommateurs

    3.1. Il ne fait aucun doute que les droits des citoyens en tant que consommateurs de services publics revêtent une importance croissante dans les États membres. Le document du CEEP, en proposant une charte européenne des services publics, énumère un certain nombre de principes fondamentaux - accessibilité, universalité, égalité, continuité, qualité, transparence et participation du consommateur. La Commission, dans sa communication COM(96) 443 final, souscrit pleinement à ces principes.

    3.2. Ces principes sont applicables aux services publics quel qu'en soit le prestataire. Ils sont importants pour les collectivités locales et régionales dans leur rôle de prestataires de services. Il convient toutefois d'admettre que par le passé, les organismes officiels, dans leur activité de prestataires de services, ne les ont pas toujours respectés. Les raisons de cette situation sont complexes, mais le résultat s'est souvent traduit par des pratiques de monopole, un service de piètre qualité, un manque de souplesse et l'absence de recours en cas de litige.

    3.3. Les principes énumérés dans le document du CEEP peuvent constituer des orientations précieuses pour les collectivités locales et régionales tant dans leur rôle de prestataires de services que de défenseurs des intérêts des consommateurs. Ils demeurent valables quel que soit le service fourni et quel qu'en soit le prestataire, mais doivent pouvoir intégrer toute la gamme des arrangements existant en matière de prestation de services ainsi que les pratiques traditionnelles et les fluctuations d'ordre économique.

    4. Les propositions du CEEP

    4.1. Le rôle considérable des collectivités locales et régionales dans la fourniture des services publics explique le contexte dans lequel le Comité des régions a examiné le rapport du CEEP; le CdR relève notamment que ce rapport, dans sa conclusion, souligne que le cadre juridique actuel de l'UE n'offre pas une reconnaissance suffisante du rôle du secteur public. L'avis présente le point de vue du CdR sur les trois propositions figurant dans le rapport, à savoir:

    - une modification du Traité sous la forme d'un nouvel article 94A,

    - l'adoption d'une Charte européenne du service d'intérêt économique général définissant des principes pouvant être appliqués tant par la Communauté dans l'exercice de ses compétences que par les États membres dans le contexte de la subsidiarité et

    - la création d'une instance d'évaluation chargée, en collaboration avec tous les partenaires concernés, d'assurer le suivi des politiques nationales et communautaires.

    4.2. Le rapport du CEEP illustre à l'évidence la grande disparité des traditions en matière de fourniture de services publics dans les différents États membres, ainsi que les contrastes, dans certains États, entre l'approche libérale et l'approche interventionniste, l'une et l'autre ayant souvent une origine qui remonte au XIXe siècle. Le rapport souligne également les différences considérables en ce qui concerne la situation constitutionnelle et juridique du secteur public dans les États membres. Cette disparité est au coeur d'un certain nombre de préoccupations du CdR quant à la réalisation pratique des propositions du CEEP.

    4.3. Bien que le rapport replace cette diversité des approches dans leur contexte, l'on peut se demander pourquoi il n'offre pas une vision d'ensemble de cette diversité; en effet, les auteurs du document ne semblent pas avoir suffisamment pris en considération l'évolution de la situation dans certains des États membres (Scandinavie).

    4.4. Le rapport semble également fonder sa conclusion, laquelle pourrait avoir un impact considérable sur les services publics, sur une gamme de services relativement limitée - les transports et les communications - ce qui reflète sans doute les domaines de responsabilité des membres les plus actifs du CEEP, et plus particulièrement l'origine professionnelle du groupe de travail responsable de l'élaboration du document.

    4.5. Il est préoccupant de constater que le rapport ne semble pas avoir pris en considération la grande diversité des services publics qui sont le plus souvent l'apanage des collectivités locales et régionales. Cette approche pour le moins étroite laisse supposer que les implications de la mise en oeuvre des propositions formulées par le CEEP sur les services publics fournis par les collectivités locales et régionales n'ont pas réellement été prises en considération.

    5. La communication de la Commission sur «Les services d'intérêt général en Europe»

    5.1. La communication constitue une contribution précieuse au débat portant sur le rôle des services d'intérêt général dans l'Union, la fourniture de ces services et la nécessité de prendre en compte les exigences du marché unique en matière de concurrence.

    5.2. La communication revêt une importance toute particulière dans le contexte du présent avis car elle reconnaît un certain nombre de points:

    - le rôle des services d'intérêt général comme «ciment de la société», reflet d'un lien d'appartenance;

    - la variété des modes d'organisation des services d'intérêt général;

    - la variété des opérateurs de services (organismes publics, partenariat public-privé);

    - le rôle des collectivités locales et régionales en tant que régulateurs;

    - l'importance économique de ces services, qui suppose de relever «le défi du changement»;

    - le rôle des consommateurs.

    5.3. La Commission souligne le fait que les services d'intérêt général doivent servir la société dans son ensemble et qu'un certain nombre de «principes de fonctionnement essentiels» en découlent: continuité, égalité d'accès, universalité, transparence. Elle reconnaît qu'il est nécessaire de créer un équilibre entre le devoir de fournir des services d'intérêt général et la promotion de l'efficacité du marché, et accepte l'existence de limites au mécanisme du marché dans ce domaine.

    5.4. La communication spécifie deux principes de base qui régissent l'approche de la Commission vis-à-vis des services publics:

    - la neutralité à l'égard du prestataire de services;

    - la liberté des États membres de définir la nature des missions d'intérêt général.

    5.5. Toute aussi importante, compte tenu des préoccupations exprimées par la sous-commission, est la déclaration selon laquelle «les conditions de l'article 90 du Traité ne s'appliquent pas aux activités non économiques.» Ces domaines sont souvent du ressort des collectivités locales et régionales. En fait, les services auxquels il est fait expressément référence sont principalement de type transnational - télécommunications, services postaux, transports, électricité et radiodiffusion.

    5.6. La communication propose de modifier l'article 3 du Traité en y ajoutant un paragraphe (u) formulé comme suit:

    «(u) une contribution à la promotion des services d'intérêt général».

    5.7. Cet ajout aurait pour but de réaffirmer le point de vue de la Commission selon lequel les services d'intérêt général font déjà partie des domaines d'action de la Communauté et permettrait à cette dernière de prendre ces services en compte dans l'élaboration de ses politiques. Cette proposition est assortie d'une déclaration selon laquelle ces services constituent «un domaine d'action privilégié des États membres». La Commission n'a pas l'intention de modifier l'article 90 du Traité.

    6. Propositions du CEEP en vue de modifier l'article 94 du Traité

    6.1. Le CEEP, dans son rapport, suggère de redéfinir le rôle du secteur public dans l'économie de marché au sein de l'Union européenne et propose un certain nombre de modifications qui permettrait à l'Union d'élaborer «une conception d'ensemble des principes d'organisation et de fonctionnement des services dans l'intérêt économique général» et «la réglementation de la prestation de tels services».

    6.2. Le CdR comprend parfaitement que certains milieux s'inquiètent des interactions entre la politique de concurrence communautaire et la fourniture des services publics. Il croit comprendre que l'objectif des propositions du CEEP est en partie de veiller à ce que la mise en oeuvre de la politique communautaire de la concurrence ne porte pas préjudice à la fourniture de services publics universels aux citoyens d'un État membre. En fait, le CdR exprime dans les grandes lignes son accord avec la liste des thèmes à aborder en matière de fourniture de services d'intérêt économique général, liste qui figure dans le projet de charte. Il apporte plus particulièrement son soutien aux principes fondamentaux du service public, dont il a été question plus haut.

    6.3. Une grande incertitude demeure toutefois quant à l'étendue des pouvoirs actuels en matière de concurrence en ce qui concerne l'ensemble de la gamme des services publics fournis dans les États membres. Les fonctionnaires de la Commission, dans leur contribution aux débats de la sous-commission 1, ont avancé que les pouvoirs existant dans le cadre de l'article 90, paragraphe 2 permettent d'accorder, dans une certaine mesure, des exemptions pour les services d'intérêt économique général et d'imposer certaines contraintes à la concurrence - par exemple, la fourniture d'un service universel. Plus important toutefois pour les collectivités locales et régionales est le point de vue de la Commission selon lequel, s'agissant des services fournis par ces collectivités, les articles du Traité relatifs à la concurrence ont un impact relativement limité, sauf dans les domaines où les services sont effectivement ou potentiellement de nature transnationale; c'est le cas par exemple des transports, des télécommunications, des services postaux et de l'énergie. Ce sont là les domaines sur lesquels le CEEP semble se concentrer dans son rapport et sur lesquels il fonde ses propositions de modification du Traité.

    6.4. Toutefois, comme il a été dit précédemment, la plupart des prestations de services publics effectués par les collectivités locales et régionales n'est pas de nature transnationale; le CdR estime dès lors qu'ils ne ressortissent pas au champ d'application de la politique communautaire en matière de concurrence, étant entendu que les collectivités locales et régionales doivent continuer à honorer leurs obligations découlant de la législation actuelle en matière de concurrence.

    6.5. Compte tenu des préoccupations exprimées, le CdR se félicite de ce que la Commission précise, dans sa communication, qu'elle n'a pas l'intention de modifier l'article 90.

    7. La Charte des services d'intérêt économique général

    7.1. Le rapport du CEEP propose une charte européenne qui définirait les services d'intérêt économique général pouvant être soumis à ladite charte, les obligations des entreprises chargées de ces services, les règles d'organisation et de gestion de ces derniers et le rôle de l'Union dans l'harmonisation des services mis en place dans les États membres ainsi que, dans certaines circonstances, l'instauration d'un régime de services d'intérêt économique général au niveau communautaire.

    7.2. Le CdR soutient dans les grandes lignes le principe selon lequel, lorsque des services publics sont fournis aux citoyens, il peut être bénéfique d'élaborer des normes explicites que les citoyens peuvent être en droit d'exiger. Pour cette raison, le CdR est prêt à soutenir la liste des obligations imposées aux opérateurs de services et figurant au chapitre III du projet de charte, à savoir la continuité du service, l'égalité d'accès, l'adaptabilité, la qualité et l'efficacité du service, la consultation des citoyens et les procédures de recours adéquates. Le CdR considère ces obligations ou ces principes comme un guide précieux pour tous les prestataires de services - y compris les collectivités locales et régionales.

    7.3. Toutefois, à la lumière de l'expérience acquise dans le domaine de la mise en oeuvre des chartes en tant qu'outil de maintien et d'amélioration de la qualité des services publics, le CdR estime que ce type d'instrument est plus efficace lorsque les dispositions de la charte en question sont établies en tenant compte de la nécessité d'un équilibre entre la capacité du prestataire de service à atteindre des objectifs particuliers et les aspirations légitimes des citoyens destinataires de ce service. Cet équilibre est fragile; les organisations le mieux placées pour le réaliser sont celles qui sont le plus près de la fourniture du service ainsi que les représentants des préoccupations des citoyens. De l'avis du CdR au cas où la question de la compatibilité des dispositions du Traité sur la concurrence avec l'accès général des citoyens aux services serait abordée dans le cadre de la CIG, il conviendrait de veiller à ce que la définition de critères pour les services publics soit confiée aux instances nationales, régionales et locales; la définition de ces critères doit avoir la priorité sur les considérations du Traité en matière de concurrence.

    7.4. Dans le contexte des collectivités locales et régionales, les organisations qui sont le mieux placées pour négocier, s'agissant des normes, la gamme des services offerts au public dans les États membres sont d'une part celles qui sont statutairement responsables de la fourniture des services et d'autre part les citoyens.

    7.5. Comme il a été souligné plus haut, une charte peut être utile en tant que guide ou de cadre de référence aux prestataires de services et aux consommateurs en matière de fourniture de services. Compte tenu toutefois de la grande diversité des traditions historiques, constitutionnelles et juridiques, de l'étendue de la gamme des services fournis, des différences entre les économies des États membres et de la disparité actuelle des attentes parmi les consommateurs, l'on ne saurait considérer la charte comme une norme rigide: elle doit être perçue davantage comme un instrument de soutien plutôt que comme un carcan.

    7.6. La proposition du CEEP à l'examen prévoit de laisser à chaque État membre le soin de décider quels services devront être soumis à la charte. Une telle situation produirait inévitablement une grande pluralité d'approches compte tenu de la diversité des dispositions en vigueur en matière de prestation de services dans les différents États membres. Si l'on y ajoute la diversité des normes pour les services particuliers d'un État membre à l'autre, voire à l'intérieur d'un même État membre, on risque de se trouver face à une quantité de normes hallucinante. Il n'y a rien à redire à cela, le principe de la subsidiarité encourageant la diversité des approches. Toutefois, au chapitre I, le rapport prévoit que la Communauté prend les mesures nécessaires afin d'harmoniser les différents services. Le CdR émet les plus vives réserves quant à l'opportunité pour la Commission de tenter d'étendre sa compétence à l'harmonisation de la gamme de services publics actuellement fournis par les collectivités locales et régionales ainsi que sur les possibilités de succès d'une telle tentative.

    7.7. Le CdR relève que la Commission, tout en se référant dans sa communication aux «principes de fonctionnement de base», ne fait pas référence à la rédaction d'une charte. En réalité, la communication, dans son approche des services d'intérêt général, met l'accent sur le principe de la subsidiarité.

    7.8. Tout en soutenant vigoureusement l'intérêt de disposer de normes explicites pour les services, le CdR demeure sceptique quant à l'opportunité d'une charte européenne, sauf peut-être en ce qui concerne le petit nombre de services transnationaux sur lesquels la communication attire l'attention.

    8. Le rôle des régulateurs

    8.1. Le chapitre IV de la charte vise à amener l'Union européenne à apporter son soutien à la séparation entre les régulateurs et les opérateurs. Le CdR se félicite de ce que la Commission, dans sa communication, reconnaisse le rôle de la régulation. Ce modèle, qui a fait l'objet d'un intérêt croissant ces dernières années, a été adopté progressivement dans certains États membres, particulièrement en ce qui concerne la régulation des organismes publics en situation de monopole. Dans le contexte de la démocratie locale, un rôle de régulateur pourrait être envisagé pour les collectivités locales et régionales. Ce rôle pourrait être particulièrement adapté s'agissant de services dont la fourniture incombe à la collectivité mais est assurée dans la pratique par un prestataire privé. Dans des cas de ce type, les collectivités pourraient - ce qu'elles font d'ailleurs fréquemment - préciser les détails concernant le service à fournir et veiller à ce que le service soit effectivement fourni. Des arrangements similaires pourraient être envisagés lorsque la responsabilité du service incombe à un autre organisme public ou à une société privée, mais que le service revêt une importance particulière pour la population au niveau local - par exemple l'approvisionnement en eau ou les systèmes de transports. Dans ce cas, la collectivité locale ou régionale pourrait être désignée comme régulateur pour ce service précis et agir au nom des citoyens en tant que consommateurs. Le CdR se réjouit que la Commission, dans le document COM(96) 443, reconnaisse que les collectivités locales et régionales puissent jouer le rôle de régulateurs.

    8.2. L'élément crucial à cet égard est l'obligation de rendre compte. Le régulateur doit être clairement responsable devant les citoyens destinataires des services prestés. Ce lien peut varier en fonction du service, mais l'obligation de rendre compte devant un organe démocratique est essentielle. L'expérience de la mise en oeuvre de ce modèle est encore relativement limitée, mais certaines critiques ont été émises lorsque l'obligation pour le régulateur de rendre compte était soit incertaine, soit floue. Le CdR ne souhaite pas voir la Commission adopter une approche prescriptive en matière de régulation; en effet, il est souvent préférable de trouver un accord au niveau de l'État membre concerné.

    9. La proposition du CEEP concernant la création d'un observatoire des services d'intérêt économique général

    9.1. Les préoccupations du CdR concernant les principales propositions figurant dans le rapport du CEEP sont dues au fait que ces propositions donnent l'impression d'avoir été élaborées sans qu'une attention suffisante ait été accordée à la gamme de services fournis par les collectivités locales et régionales. Le CdR demande que la proposition de création d'un poste d'observation des services d'intérêt économique général soit examinée de manière plus approfondie. Nous fondant - entre autres - sur le principe de subsidiarité, nous considérons que l'UE ne devrait pas réglementer la manière dont les prestataires de services publics organisent leurs activités, notamment lorsqu'il s'agit de services fournis par les collectivités locales et régionales. La Commission européenne assume déjà la responsabilité de la surveillance générale des aspects juridiques au niveau européen, un rôle reconnu par la Commission. La participation des collectivités locales et régionales permettrait toutefois de renforcer ce rôle. Il serait souhaitable, lorsque des questions de service public sont en jeu, d'associer à cette surveillance des comités ou des groupes spécialisés comprenant des représentants des autorités nationales et locales.

    10. Conclusion

    10.1. Proposition du CEEP visant à modifier le Traité

    10.1.1. Le CdR exprime son accord avec le point de vue exprimé dans la communication, à savoir qu'aucune modification de l'article 90 n'est nécessaire.

    10.2. Proposition du CEEP en vue d'une charte européenne

    10.2.1. Le CdR a pris note de la conclusion provisoire du Conseil européen selon laquelle la CIG devrait examiner la question de la compatibilité des dispositions du Traité relatives à la concurrence avec les principes de l'accès général aux services publics dans l'intérêt des citoyens. Il a également pris note de l'examen consacré au principe du maintien et de l'amélioration des services publics par le biais de chartes spécifiant les droits et les obligations des prestataires et des citoyens. Le CdR soutient le principe selon lequel l'existence de chartes locales spécifiant les droits et les obligations entre les opérateurs et les citoyens peut, dans de nombreux cas, contribuer au maintien et à l'amélioration des services publics. Il estime toutefois que le niveau le plus approprié pour la négociation de telles chartes est celui qui est le plus proche des citoyens, particulièrement dans les cas où le service concerné n'a pas d'impact transnational et devra être totalement compatible avec les dispositions constitutionnelles et statutaires de l'État membre concerné. Tout en reconnaissant qu'une charte européenne qui fonctionnerait davantage comme un cadre de référence plutôt que comme un instrument d'harmonisation pourrait, en principe, constituer un soutien et un encouragement précieux à la mise en place de services publics de qualité, le CdR demeure sceptique quant à la viabilité d'un tel document, compte tenu notamment de l'accent qui est mis dans la communication de la Commission sur le caractère limité de l'harmonisation envisagée et sur le rôle primordial des États membres dans ce domaine précis. Selon le CdR, les collectivités locales et régionales on un rôle déterminant à jouer en tant que fournisseurs des services, et ce rôle pourrait s'étendre au contrôle et à la régulation de services fournis par d'autres organismes publics ou par le secteur privé.

    10.3. La communication de la Commission

    10.3.1. Le CdR accueille favorablement la communication de la Commission; ce document constitue en effet une contribution précieuse au débat sur la fourniture des services publics d'intérêt général.

    10.3.2. Le CdR estime avec la Commission que les services d'intérêt général sont essentiels à la bonne santé de la Communauté, tant sur le plan social que sur le plan économique.

    10.3.3. Le CdR se réjouit notamment de:

    - la reconnaissance de la distinction entre fourniture et régulation;

    - la reconnaissance du rôle des collectivités locales et régionales en matière de régulation;

    - la déclaration selon laquelle la politique communautaire n'est pas concernée par le statut de l'organisme chargé de prester le service;

    - la confirmation du fait que la définition des services d'intérêt général relève en premier lieu de la compétence des États membres.

    10.3.4. Le CdR soutient:

    - la proposition visant à développer le concept de service universel ou d'obligations de service public, notamment pour ce qui est de la qualité du service et des droits des usagers;

    - l'idée selon laquelle la fourniture de services d'intérêt général tels que la santé, les services sociaux, l'éducation, l'eau et le logement relève du niveau national ou régional (bien qu'une intervention de la Communauté soit envisageable).

    10.3.5. Concernant la proposition de modification de l'article 3 du Traité, le CdR:

    - prend note de l'accent mis par la Commission dans sa communication sur l'importance du principe de subsidiarité dans les prestations de services effectuées le plus souvent par les collectivités locales et régionales;

    - accueille avec satisfaction la confirmation que les services d'intérêt général demeureront en premier lieu du ressort des États membres;

    - n'est pas opposé à une modification de cet article, à condition que la modification se limite à confirmer que les services sont déjà du ressort de la Communauté.

    Bruxelles, le 16 janvier 1997.

    Le Président du Comité des régions

    Pasqual MARAGALL i MIRA

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