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Document 62018CJ0031

    Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 17 octobre 2019.
    « Elektrorazpredelenie Yug » EAD contre Komisia za energiyno i vodno regulirane (KEVR).
    Demande de décision préjudicielle, introduite par l'Administrativen sad Sofia-grad.
    Renvoi préjudiciel – Directive 2009/72/CE – Marché intérieur de l’électricité – Article 2, points 3 à 6 – Notions de réseau de transport d’électricité et de réseau de distribution d’électricité – Critères de distinction – Niveau de tension – Propriété des installations – Article 17, paragraphe 1, sous a) – Gestionnaire de réseau de transport indépendant – Articles 24 et 26 – Gestionnaire de réseau de distribution – Article 32, paragraphe 1 – Libre accès des tiers – Accès à l’électricité à moyenne tension – Points d’interconnexion entre les réseaux de transport et de distribution – Marge de manœuvre des États membres.
    Affaire C-31/18.

    Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:2019:868

    ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

    17 octobre 2019 ( *1 )

    « Renvoi préjudiciel – Directive 2009/72/CE – Marché intérieur de l’électricité – Article 2, points 3 à 6 – Notions de réseau de transport d’électricité et de réseau de distribution d’électricité – Critères de distinction – Niveau de tension – Propriété des installations – Article 17, paragraphe 1, sous a) – Gestionnaire de réseau de transport indépendant – Articles 24 et 26 – Gestionnaire de réseau de distribution – Article 32, paragraphe 1 – Libre accès des tiers – Accès à l’électricité à moyenne tension – Points d’interconnexion entre les réseaux de transport et de distribution – Marge de manœuvre des États membres »

    Dans l’affaire C‑31/18,

    ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Administrativen sad Sofia-grad (tribunal administratif de Sofia, Bulgarie), par décision du 4 janvier 2018, parvenue à la Cour le 17 janvier 2018, dans la procédure

    « Elektrorazpredelenie Yug » EAD

    contre

    Komisia za energiyno i vodno regulirane (KEVR)

    en présence de :

    « BMF Port Burgas » EAD

    LA COUR (cinquième chambre),

    composée de M. E. Regan (rapporteur), président de chambre, Mme R. Silva de Lapuerta, vice-présidente de la Cour, MM. I. Jarukaitis, E. Juhász et C. Lycourgos, juges,

    avocat général : M. G. Pitruzzella,

    greffier : Mme R. Şereş, administratrice,

    vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 6 février 2019,

    considérant les observations présentées :

    pour « Elektrorazpredelenie Yug » EAD, par Mes H. Nihrizov, P. Stanchev, A. Todorov, B. Petrov, M. Baykushev et G. Dimitrov, advokati, assistés de M. S. Radev, conseiller juridique,

    pour la Komisia za energiyno i vodno regulirane (KEVR), par M. I. Ivanov,

    pour « BMF Port Burgas » EAD, par Mes T. Dimitrova, M. Derelieva, M. Peneva et I. Todorov, advokati,

    pour le gouvernement français, par Mme C. Mosser, en qualité d’agent,

    pour la Commission européenne, par Mmes O. Beynet et Y. G. Marinova, en qualité d’agents,

    ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 16 mai 2019,

    rend le présent

    Arrêt

    1

    La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 2, points 3 et 5, de la directive 2009/72/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et abrogeant la directive 2003/54/CE (JO 2009, L 211, p. 55).

    2

    Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant « Elektrorazpredelenie Yug » EAD (ci-après « ER Yug »), gestionnaire du réseau de distribution d’électricité sur une partie du territoire de la Bulgarie, à la Komisia za energiyno i vodno regulirane (commission de régulation de l’énergie et de l’eau, Bulgarie) (ci-après la « KEVR »), au sujet de la facturation à « BMF Port Burgas » EAD (ci-après « BMF ») des tarifs pour l’accès à ce réseau et pour le transport d’électricité sur celui-ci.

    Le cadre juridique

    Le droit de l’Union

    3

    Les considérants 1 à 3, 9, 11, 16, 17, 19 et 44 de la directive 2009/72 sont libellés comme suit :

    « (1)

    Le marché intérieur de l’électricité, dont la mise en œuvre progressive dans toute [l’Union européenne] est en cours depuis 1999, a pour finalité d’offrir une réelle liberté de choix à tous les consommateurs de l’Union européenne, qu’il s’agisse de particuliers ou d’entreprises, de créer de nouvelles perspectives d’activités économiques et d’intensifier les échanges transfrontaliers, de manière à réaliser des progrès en matière d’efficacité, de compétitivité des prix et de niveau de service et à favoriser la sécurité d’approvisionnement ainsi que le développement durable.

    (2)

    La directive 2003/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2003 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité [JO 2003, L 176, p. 37] a contribué pour beaucoup à la création d’un tel marché intérieur de l’électricité.

    (3)

    Les libertés que le traité [FUE] garantit aux citoyens de l’Union – entre autres, la libre circulation des marchandises, la liberté d’établissement et la libre prestation de services – ne peuvent être effectives que dans un marché entièrement ouvert qui permet à tous les consommateurs de choisir librement leurs fournisseurs et à tous les fournisseurs de fournir librement leurs produits à leurs clients.

    [...]

    (9)

    Sans une séparation effective des réseaux par rapport aux activités de production et de fourniture (“découplage effectif”), il existe un risque de discrimination non seulement dans l’exploitation du réseau, mais aussi dans les éléments qui incitent les entreprises verticalement intégrées à investir suffisamment dans leurs réseaux.

    [...]

    (11)

    Seule la suppression des éléments qui incitent les entreprises verticalement intégrées à pratiquer des discriminations à l’encontre de leurs concurrents en matière d’accès au réseau et d’investissements est de nature à garantir un découplage effectif. La dissociation des structures de propriété, qui implique que le propriétaire du réseau soit désigné comme gestionnaire de réseau et qu’il soit indépendant des structures de fourniture et de production, est clairement un moyen efficace et stable de résoudre le conflit d’intérêts intrinsèque et d’assurer la sécurité de l’approvisionnement. C’est pourquoi, dans sa résolution du 10 juillet 2007 sur les perspectives du marché intérieur du gaz et de l’électricité [JO 2008, C 175 E, p. 206], le Parlement européen considère que la séparation entre la propriété et le transport est le moyen le plus efficace de promouvoir de façon non discriminatoire l’investissement dans les infrastructures, un accès équitable au réseau pour les nouveaux arrivants et la transparence du marché. Conformément au principe de la dissociation des structures de propriété, les États membres devraient par conséquent être tenus de faire en sorte que la ou les mêmes personnes ne puissent exercer un contrôle sur une entreprise de production ou de fourniture et, simultanément, un contrôle ou des pouvoirs sur un réseau de transport ou un gestionnaire de réseau de transport. Inversement, il ne devrait pas être possible d’exercer un contrôle ou des pouvoirs sur une entreprise de production ou de fourniture en même temps qu’un contrôle sur un réseau de transport ou un gestionnaire de réseau de transport. [...]

    [...]

    (16)

    La mise en place d’un gestionnaire de réseau ou de transport indépendant des structures de fourniture et de production devrait permettre à une entreprise verticalement intégrée de conserver la propriété des actifs du réseau en garantissant par ailleurs une séparation effective des intérêts, pour autant que le gestionnaire de réseau ou de transport indépendant assume toutes les fonctions d’un gestionnaire de réseau et qu’il existe une réglementation précise et des mécanismes de contrôle réglementaire complets.

    (17)

    Si, le 3 septembre 2009, une entreprise propriétaire d’un réseau de transport fait partie d’une entreprise verticalement intégrée, les États membres devraient donc pouvoir choisir entre la dissociation des structures de propriété et la mise en place d’un gestionnaire de réseau ou de transport indépendant des structures de fourniture et de production.

    [...]

    (19)

    Il convient d’assurer la pleine efficacité des solutions impliquant la mise en place d’un gestionnaire de réseau indépendant ou d’un gestionnaire de transport indépendant au moyen de règles spécifiques supplémentaires. Les règles concernant le gestionnaire de transport indépendant fournissent un cadre réglementaire adapté pour garantir une juste concurrence, des investissements suffisants, l’accès des nouveaux venus sur le marché et l’intégration des marchés de l’électricité. Le découplage effectif par les dispositions relatives au gestionnaire de transport indépendant devrait reposer sur un pilier de mesures organisationnelles et de mesures relatives à la gouvernance des gestionnaires de réseau de transport et sur un pilier de mesures relatives aux investissements, au raccordement au réseau de nouvelles capacités de production et à l’intégration des marchés par la coopération régionale. [...]

    [...]

    (44)

    [...] La mise en place et la maintenance de l’infrastructure de réseau nécessaire, y compris la capacité d’interconnexion, devraient contribuer à un approvisionnement stable en électricité. La maintenance et la construction des infrastructures de réseau nécessaires, y compris la capacité d’interconnexion et la production d’électricité décentralisée, sont des éléments importants pour assurer un approvisionnement stable en électricité. »

    4

    L’article 1er de la directive 2009/72, intitulé « Objet et champ d’application », prévoit :

    « La présente directive établit des règles communes concernant la production, le transport, la distribution et la fourniture d’électricité, ainsi que des dispositions relatives à la protection des consommateurs, en vue de l’amélioration et de l’intégration de marchés de l’électricité compétitifs dans [l’Union]. Elle définit les modalités d’organisation et de fonctionnement du secteur de l’électricité, l’accès ouvert au marché, les critères et les procédures applicables en ce qui concerne les appels d’offres et l’octroi des autorisations ainsi que l’exploitation des réseaux. Elle définit également les obligations de service universel et les droits des consommateurs d’électricité, et clarifie les obligations en matière de concurrence. »

    5

    Aux termes de l’article 2 de cette directive, intitulé « Définitions » :

    « Aux fins de la présente directive, on entend par :

    [...]

    3.   “transport”, le transport d’électricité sur le réseau à très haute tension et à haute tension interconnecté aux fins de fourniture à des clients finals ou à des distributeurs, mais ne comprenant pas la fourniture ;

    4.   “gestionnaire de réseau de transport”, une personne physique ou morale responsable de l’exploitation, de la maintenance et, si nécessaire, du développement du réseau de transport dans une zone donnée et, le cas échéant, de ses interconnexions avec d’autres réseaux, et chargée de garantir la capacité à long terme du réseau à satisfaire une demande raisonnable de transport d’électricité ;

    5.   “distribution”, le transport d’électricité sur des réseaux de distribution à haute, à moyenne et à basse tension aux fins de fourniture à des clients, mais ne comprenant pas la fourniture ;

    6.   “gestionnaire de réseau de distribution”, une personne physique ou morale responsable de l’exploitation, de la maintenance et, si nécessaire, du développement du réseau de distribution dans une zone donnée et, le cas échéant, de ses interconnexions avec d’autres réseaux, et chargée de garantir la capacité à long terme du réseau à satisfaire une demande raisonnable de distribution d’électricité ;

    7.   “client”, un client grossiste ou final d’électricité ;

    8.   “client grossiste”, une personne physique ou morale qui achète de l’électricité pour la revendre à l’intérieur ou à l’extérieur du réseau où elle est installée ;

    9.   “client final”, un client achetant de l’électricité pour sa consommation propre ;

    [...]

    19.   “fourniture”, la vente, y compris la revente, d’électricité à des clients ;

    [...] »

    6

    Les chapitres IV et V de la directive 2009/72, qui comportent les articles 9 à 23 de celle-ci, prévoient les dispositions applicables, respectivement, à l’exploitation des réseaux de transport et aux gestionnaires de réseau de transport indépendants, tandis que le chapitre VI de ladite directive, qui comprend les articles 24 à 29 de celle-ci, concerne l’exploitation des réseaux de distribution.

    7

    Figurant au chapitre IV de la directive 2009/72, relatif à l’exploitation des réseaux de transport, l’article 9 de cette directive, intitulé « Dissociation des réseaux de transport et des gestionnaires de réseau de transport », prévoit :

    « 1.   Les États membres veillent à ce que, à compter du 3 mars 2012 :

    a)

    chaque entreprise qui possède un réseau de transport agisse en qualité de gestionnaire de réseau de transport ;

    b)

    la ou les mêmes personnes ne soient pas autorisées :

    i)

    ni à exercer de contrôle direct ou indirect sur une entreprise assurant une des fonctions suivantes : production ou fourniture, et à exercer de contrôle direct ou indirect ou un quelconque pouvoir sur un gestionnaire de réseau de transport ou un réseau de transport ;

    ii)

    ni à exercer un contrôle direct ou indirect sur un gestionnaire de réseau de transport ou un réseau de transport et à exercer un contrôle direct ou indirect ou un quelconque pouvoir sur une entreprise assurant une des fonctions suivantes : production ou fourniture ;

    c)

    la ou les mêmes personnes ne soient pas autorisées à désigner les membres du conseil de surveillance, du conseil d’administration ou des organes représentant légalement l’entreprise d’un gestionnaire de réseau de transport ou d’un réseau de transport, et à exercer un contrôle direct ou indirect ou un quelconque pouvoir sur une entreprise assurant une des fonctions suivantes : production ou fourniture ; et

    d)

    la même personne ne soit pas autorisée à être membre du conseil de surveillance, du conseil d’administration ou des organes représentant légalement l’entreprise à la fois d’une entreprise assurant une des fonctions suivantes : production ou fourniture, et d’un gestionnaire de réseau de transport ou d’un réseau de transport.

    [...]

    8.   Lorsque, le 3 septembre 2009, le réseau de transport appartient à une entreprise verticalement intégrée, un État membre peut décider de ne pas appliquer le paragraphe 1.

    En pareil cas, l’État membre concerné :

    a)

    désigne un gestionnaire de réseau indépendant, conformément à l’article 13 ; ou

    b)

    se conforme aux dispositions du chapitre V.

    [...] »

    8

    Figurant au chapitre V de la directive 2009/72, relatif aux gestionnaires de réseau de transport indépendants, l’article 17 de cette directive, intitulé « Actifs, équipement, personnel et identité », dispose :

    « 1.   Les gestionnaires de réseau de transport possèdent toutes les ressources humaines, techniques, matérielles et financières nécessaires pour s’acquitter des obligations qui leur incombent en vertu de la présente directive et pour exercer l’activité de transport d’électricité, en particulier :

    a)

    les actifs nécessaires pour l’activité de transport d’électricité, y compris le réseau de transport, sont la propriété du gestionnaire de réseau de transport ;

    [...] »

    9

    Figurant au chapitre VI de la directive 2009/72, relatif à l’exploitation des réseaux de distribution, l’article 24 de cette directive, intitulé « Désignation des gestionnaires de réseau de distribution », énonce :

    « Les États membres désignent, ou demandent aux entreprises propriétaires ou responsables de réseaux de distribution de désigner, pour une durée à déterminer par les États membres en fonction de considérations d’efficacité et d’équilibre économique, un ou plusieurs gestionnaires de réseau de distribution. Les États membres veillent à ce que les gestionnaires de réseau de distribution agissent conformément aux articles 25, 26 et 27. »

    10

    Au même chapitre, l’article 26 de ladite directive, intitulé « Dissociation des gestionnaires de réseau de distribution », prévoit :

    « 1.   Lorsque le gestionnaire de réseau de distribution fait partie d’une entreprise verticalement intégrée, il est indépendant, au moins sur le plan de la forme juridique, de l’organisation et de la prise de décision, des autres activités non liées à la distribution. Ces règles ne créent pas d’obligation de séparer la propriété des actifs du gestionnaire de réseau de distribution, d’une part, de l’entreprise verticalement intégrée, d’autre part.

    2.   En plus des exigences visées au paragraphe 1, lorsque le gestionnaire de réseau de distribution fait partie d’une entreprise verticalement intégrée, il est indépendant, sur le plan de l’organisation et de la prise de décision, des autres activités non liées à la distribution. À cet effet, les critères minimaux à appliquer sont les suivants :

    [...]

    c)

    le gestionnaire de réseau de distribution doit disposer de pouvoirs de décision effectifs, indépendamment de l’entreprise intégrée d’électricité, en ce qui concerne les éléments d’actifs nécessaires pour exploiter, entretenir ou développer le réseau. Pour exécuter ces tâches, le gestionnaire de réseau de distribution dispose des ressources nécessaires, tant humaines que techniques, matérielles et financières. [...] »

    11

    Figurant au chapitre VIII de la directive 2009/72, intitulé « Organisation de l’accès au réseau », l’article 32 de cette directive, lui-même intitulé « Accès des tiers », dispose, à son paragraphe 1 :

    « Les États membres veillent à ce que soit mis en place, pour tous les clients éligibles, un système d’accès des tiers aux réseaux de transport et de distribution. Ce système, fondé sur des tarifs publiés, doit être appliqué objectivement et sans discrimination entre les utilisateurs du réseau. [...] »

    Le droit bulgare

    12

    L’article 86, paragraphe 1, de la Zakon za energetikata (loi sur l’énergie) (DV no 107, 2003, ci-après la « ZE »), dispose :

    « Le transport d’électricité est effectué par le gestionnaire de réseau de transport d’électricité qui a obtenu une licence pour le transport d’électricité [...] »

    13

    Aux termes de l’article 88, paragraphe 1, de la ZE :

    « La distribution de l’électricité et l’exploitation des réseaux de distribution d’électricité sont effectuées par les gestionnaires des réseaux de distribution d’électricité – propriétaires de ces réseaux sur un territoire donné et titulaires d’une licence pour l’exercice de la distribution d’électricité sur le territoire correspondant. [...] »

    14

    L’article 1er des dispositions complémentaires de la ZE (DV no 54, 2012) contient les définitions suivantes :

    « 20.   “réseau de transport d’électricité” : l’ensemble des lignes électriques et des systèmes électriques destinés au transport, à la transformation de l’électricité de la haute à la moyenne tension, et à la redistribution des flux d’énergie ;

    [...]

    22.   “réseau de distribution d’électricité” : l’ensemble constitué par les lignes électriques et les systèmes électriques à haute, moyenne et basse tension, qui servent à la distribution de l’électricité ;

    [...]

    44.   “transport d’énergie électrique [...]” : le transport d’énergie électrique [...] à travers un réseau de transport [...] ;

    [...]

    49.   “distribution” : le transport de l’électricité [...] par des réseaux de distribution ».

    15

    Les articles 124 et 125 de Naredba no 6 za prisaedynyavane na proizvoditeli i klienti na elektricheska energyia kam prenosnata ili kam razpredelitelnite elektricheski mrezhi (règlement no 6 sur la connexion des producteurs d’électricité et des clients aux réseaux de transport ou de distribution d’électricité), du 24 février 2014, établissent la limite de la propriété entre les installations du gestionnaire du réseau de transport et celles du gestionnaire du réseau de distribution.

    Le litige au principal et les questions préjudicielles

    16

    ER Yug est titulaire d’une licence exclusive de distribution d’électricité délivrée, le 13 août 2014, par la KEVR, sur le fondement de laquelle elle assure, par un réseau de distribution dont elle est la gestionnaire, la distribution de l’électricité sur le territoire défini dans cette licence, à savoir le sud-est de la Bulgarie.

    17

    Ce territoire comprend la zone dans laquelle se trouvent les terminaux portuaires « Burgas Ouest » et « Burgas Est 2 », dont BMF, en tant que concessionnaire, assure la gestion et fournit des services connexes.

    18

    Les établissements de BMF afférents au terminal portuaire « Burgas Est 2 » sont reliés au réseau électrique par une ligne à moyenne tension (20 kV), dénommée « Novo pristanishte » (« Nouveau port »), elle-même raccordée au dispositif à moyenne tension (également de 20 kV) de la sous-station électrique de transformation « Ribari » (« Pêcheurs »). La ligne électrique « Novo pristanishte », propriété de l’État, a été confiée à BMF en tant qu’élément d’actif nécessaire au fonctionnement des terminaux portuaires concédés. La sous-station électrique « Ribari » est la propriété du gestionnaire du réseau de transport en Bulgarie, « Elektroenergien sistemen operator » EAD (ci-après « ESO »).

    19

    L’électricité transportée sur le réseau de transport à haute tension géré par ESO est transformée au niveau des points d’interconnexion entre le réseau de transport et le réseau de distribution, dans les transformateurs nos 1 et 2, de manière à permettre une commutation de la tension de 110 kV (haute tension) vers la tension de 20 kV (moyenne tension), pour pouvoir être exploitée dans le dispositif à moyenne tension (20 kV) de la sous-station « Ribari ». Les instruments de mesure commerciale de l’électricité acheminée du réseau de transport d’ESO vers le réseau de distribution d’ER Yug, qui sont la propriété de cette dernière, sont installés immédiatement après les transformateurs nos 1 et 2, au niveau des branchements relatifs aux cellules nos 26 et 39 du dispositif à moyenne tension (20 kV) de la sous-station « Ribari ». La ligne électrique « Novo pristanishte » est raccordée à ce dispositif au niveau de la cellule no 44. Cette ligne est utilisée pour transporter et fournir de l’électricité exclusivement à BMF.

    20

    Le 30 septembre 2013, ER Yug et BMF ont conclu un contrat portant sur des services de réseau, en vertu duquel la première fournissait à la seconde l’accès au réseau de distribution d’électricité et assurait le transport d’électricité sur ce réseau, aux fins de la fourniture d’électricité aux établissements de BMF situés dans la zone portuaire de Burgas.

    21

    Estimant être directement raccordée au réseau de transport, BMF a résilié unilatéralement, le 6 octobre 2016, le contrat conclu avec ER Yug et a conclu avec ESO des contrats ayant pour objet l’accès au réseau de transport, la prestation de services de réseau et le transport d’électricité aux fins de la fourniture d’électricité aux établissements précités de BMF. Sur le fondement de ces contrats, ESO a installé ses propres instruments de mesure commerciale de l’électricité transportée par la ligne électrique « Novo pristanishte ».

    22

    Considérant, toutefois, que ces établissements étaient toujours raccordés au réseau de distribution, ER Yug a continué à facturer à BMF le tarif pour l’accès au réseau de distribution et le transport d’électricité sur ce réseau.

    23

    Saisie par BMF, la KEVR a estimé, par sa décision no Zh-37, du 28 février 2017, que, à l’expiration du délai de préavis prévu pour la résiliation du contrat avec BMF, ER Yug n’était plus fondée à facturer à cette dernière les droits pour l’accès au réseau de distribution d’électricité et pour le transport sur ce réseau. La KEVR a considéré que les établissements de BMF en cause étaient directement reliés au réseau de transport d’électricité d’ESO et que, de ce fait, BMF pouvait accéder directement à ce réseau. Partant, la KEVR a ordonné à ER Yug, d’une part, de cesser de facturer à BMF le tarif pour l’accès au réseau de distribution ainsi que pour le transport d’électricité sur ce réseau et, d’autre part, de procéder à une révision du tarif facturé à l’expiration du délai de préavis pour la résiliation du contrat conclu avec BMF.

    24

    ER Yug a formé un recours contre cette décision devant l’Administrativen sad Sofia-grad (tribunal administratif de Sofia, Bulgarie).

    25

    Dans le cadre de la procédure pendante devant cette juridiction, ER Yug fait valoir que, tant que BMF est raccordée au réseau de distribution d’électricité, elle ne peut résilier le contrat d’accès et de transport d’électricité par ce réseau. Dans l’économie de la directive 2009/72, l’élément déterminant permettant de distinguer entre un réseau de transport et un réseau de distribution d’électricité serait le niveau de tension de l’électricité acheminée par celui-ci, à savoir, d’une part, une très haute et haute tension pour le réseau de transport et, d’autre part, une haute, moyenne et basse tension pour le réseau de distribution. La définition du transport d’électricité prévue à l’article 1er, points 20 et 44, des dispositions complémentaires de la ZE serait incompatible avec la définition figurant à l’article 2, point 3, de la directive 2009/72, laquelle, en vertu de son effet direct et du principe de primauté du droit de l’Union, devrait être appliquée directement. Il en résulterait que la prestation de services de réseau au niveau de la moyenne tension constituerait une activité de distribution d’électricité. Le gestionnaire de réseau de transport, ESO, n’aurait pas le droit de raccorder ses clients au dispositif à moyenne tension ni de fournir des services de réseau à moyenne tension, dès lors que ces activités relèveraient des services de distribution d’électricité pour lesquels ER Yug détient une licence exclusive sur le territoire sur lequel se trouvent les établissements de BMF en cause.

    26

    BMF soutient, pour sa part, que ses établissements sont directement reliés au réseau de transport d’électricité par la sous-station « Ribari », dont ESO est propriétaire. Partant, dès lors que ni cette sous-station ni la ligne électrique « Novo pristanishte », qui est raccordée à celle-ci, ne sont la propriété de ER Yug, elles ne constitueraient pas des éléments du réseau de distribution d’électricité. BMF estime donc que la licence de ER Yug ne satisfait pas aux conditions nécessaires pour que soient fournis des services d’accès et de transport par l’intermédiaire du réseau de distribution d’électricité ni, par voie de conséquence, pour que les services en question soient facturés. En outre, la ZE ne comporterait aucune disposition interdisant au client de se raccorder directement au réseau de transport d’électricité.

    27

    La juridiction de renvoi observe que, dans la présente affaire, il convient d’établir à quel réseau électrique, entre celui de distribution et celui de transport, sont reliés les établissements de BMF en cause et, de ce fait, à quel gestionnaire celle-ci doit payer le tarif des services de réseau. Il conviendrait de déterminer le critère de distinction pertinent entre les activités de « transport » et celles de « distribution » de l’électricité ainsi qu’entre les notions de « réseau de transport » et de « réseau de distribution ». En effet, si le niveau de tension devait être considéré comme le seul critère distinctif, dès lors que la ligne électrique « Novo pristanishte » est raccordée au dispositif à moyenne tension de la sous-station « Ribari », BMF devrait acquitter le tarif des services de réseau à ER Yug, laquelle aurait le droit exclusif de fournir des services de réseau à tous les clients raccordés au niveau de la moyenne tension sur le territoire couvert par sa licence, qu’elle soit ou non propriétaire des installations y afférentes.

    28

    Cette juridiction considère, à l’instar de la majorité des juridictions bulgares, qu’il ressort de l’article 88, paragraphe 1, de la ZE, des articles 124 et 125 du règlement no 6 sur la connexion des producteurs d’électricité et des clients aux réseaux de transport ou de distribution d’électricité, ainsi que de la propre licence octroyée à ER Yug que le législateur national a retenu comme critère de distinction entre le réseau de transport et le réseau de distribution celui de la propriété des installations électriques dans le chef du gestionnaire du réseau de transport ou de celui du réseau de distribution. Pour ce qui concerne le niveau de tension, la position du législateur national ne serait pas aussi claire. Toutefois, il ressortirait des définitions figurant à l’article 2, points 3 et 5, de la directive 2009/72 que, pour le législateur de l’Union, le seul critère pertinent serait celui du niveau de tension de l’électricité transportée, ce qui aurait été confirmé par la Cour au point 48 de l’arrêt du 22 mai 2008, citiworks (C‑439/06, EU:C:2008:298).

    29

    Dans ces circonstances, l’Administrativen sad Sofia-grad (tribunal administratif de Sofia) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

    «1)

    Les dispositions de l’article 2, points 3 et 5, de la directive [2009/72] doivent-elles être interprétées en ce sens que le seul critère de distinction entre un réseau de distribution et un réseau de transport d’électricité et donc entre les activités de “distribution” et de “transport” d’électricité est constitué par le niveau de tension, et que les États membres, malgré leur marge de manœuvre pour orienter les utilisateurs des réseaux vers tel ou tel type de réseau (de transport ou de distribution), ne peuvent pas introduire en tant que critère supplémentaire de distinction entre les activités de transport et de distribution la propriété des actifs qui sont utilisés à cet effet ?

    2)

    En cas de réponse affirmative à la première question, les usagers de l’électricité qui sont reliés au réseau électrique au niveau de la moyenne tension doivent-ils être toujours considérés comme des clients du gestionnaire du réseau de distribution d’électricité titulaire d’une licence pour le territoire concerné, indépendamment de la propriété de l’installation à laquelle les systèmes électriques de ces clients sont directement reliés et indépendamment des relations contractuelles qu’ils ont instaurées avec le gestionnaire du réseau de transport ?

    3)

    En cas de réponse négative à la première question, des dispositions nationales telles que celles figurant à [l’article 1er], point 44, lu en combinaison avec le point 20, des dispositions complémentaires de la [ZE], en vertu desquelles le “transport d’énergie électrique” est le transport d’énergie électrique à travers un réseau de transport et un “réseau de transport d’électricité” est “l’ensemble des lignes électriques et des systèmes électriques destinés au transport, à la transformation de l’électricité de la haute à la moyenne tension, et à la redistribution des flux d’énergie”, sont-elles conformes au sens et à l’objectif de la directive [2009/72] ? Dans les mêmes conditions, une disposition nationale, telle que celle prévue à l’article 88, paragraphe 1, de la ZE, selon laquelle “[l]a distribution de l’électricité et l’exploitation des réseaux de distribution d’électricité sont effectuées par les gestionnaires des réseaux de distribution d’électricité – propriétaires de ces réseaux sur un territoire donné et titulaires d’une licence pour l’exercice de la distribution d’électricité sur le territoire correspondant”, est-elle conforme à la directive [2009/72] ? »

    Sur les questions préjudicielles

    Sur la recevabilité

    30

    BMF fait valoir que les questions posées ne sont pas pertinentes aux fins de la résolution du litige au principal et, partant, sont irrecevables. Ce litige porterait exclusivement sur le droit, pour un utilisateur, de mettre fin à un contrat de raccordement d’électricité conclu sans fondement avec une société, ER Yug, qui n’est pas propriétaire du réseau fournissant l’électricité ni n’est responsable de la gestion et du fonctionnement des installations de celui-ci. Dans ce contexte, la question principale serait celle de savoir si l’utilisateur a le droit d’être raccordé à une installation dont est propriétaire un gestionnaire de réseau de transport d’électricité indépendant. La juridiction de renvoi poserait cependant des questions dénuées de pertinence concernant les notions de « transport » et de « distribution » d’électricité. Par ailleurs, l’interprétation des dispositions du droit de l’Union applicables à la présente affaire ne soulèverait aucun doute et, de surcroît, ces dispositions auraient été transposées en droit bulgare.

    31

    À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, dans le cadre de la coopération entre celle-ci et les juridictions nationales instituée à l’article 267 TFUE, il appartient au seul juge national, qui est saisi du litige et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir, d’apprécier, au regard des particularités de l’affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu’il pose à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation du droit de l’Union, la Cour est, en principe, tenue de statuer (voir, notamment, arrêt du 26 octobre 2017, Balgarska energiyna borsa, C‑347/16, EU:C:2017:816, point 30).

    32

    La présomption de pertinence qui s’attache aux questions posées à titre préjudiciel par les juridictions nationales ne peut être écartée qu’à titre exceptionnel, s’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation sollicitée du droit de l’Union n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées. En effet, une demande de décision préjudicielle n’a pas pour objectif la formulation d’opinions consultatives sur des questions générales ou hypothétiques, mais vise à satisfaire le besoin inhérent à la solution effective d’un litige portant sur le droit de l’Union (voir, notamment, arrêt du 26 octobre 2017, Balgarska energiyna borsa, C‑347/16, EU:C:2017:816, point 31).

    33

    En l’occurrence, il convient de relever que les questions posées par la juridiction de renvoi, qui sont soulevées dans le cadre d’un litige entre le gestionnaire d’un réseau de distribution d’électricité et un utilisateur prétendant être directement raccordé au réseau de transport pour l’accès à l’électricité à moyenne tension, portent, notamment, sur l’interprétation des notions de « distribution » et de « transport » d’électricité, figurant à l’article 2, points 3 et 5, de la directive 2009/72, afin de déterminer, d’une part, si une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui définit les notions de réseaux de transport et de distribution d’électricité, est conforme à ces dispositions, et, d’autre part, auquel de ces réseaux cet utilisateur doit être considéré, dans les circonstances de l’affaire au principal, comme relié et, partant, auquel de ces gestionnaires il est tenu d’acquitter les droits d’accès et de transport de l’électricité fournie.

    34

    Dans ces conditions, il n’apparaît pas que les questions préjudicielles, qui concernent l’interprétation de dispositions du droit de l’Union dans le contexte d’un litige pendant devant la juridiction de renvoi, soient manifestement dépourvues de pertinence.

    35

    Il est sans incidence, à cet égard, que l’interprétation de ces dispositions ne soulèverait aucun doute ou que celles-ci auraient été mises en œuvre en droit national, ces considérations se rapportant au fond des réponses à apporter aux questions posées et non à leur recevabilité.

    36

    En conséquence, il convient de considérer que ces questions sont recevables.

    Sur les première et troisième questions

    37

    Par ses première et troisième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 2, points 3 et 5, de la directive 2009/72 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui, d’une part, définit les notions de réseau de transport d’électricité et de réseau de distribution d’électricité en se fondant, non seulement sur le critère du niveau de tension électrique, mais également sur celui de la propriété des actifs utilisés pour l’exercice des activités, respectivement, de transport et de distribution, et, d’autre part, prévoit que la transformation de l’électricité pour permettre le passage de la haute à la moyenne tension relève de l’activité d’un réseau de transport d’électricité.

    38

    Il y a lieu de rappeler que la directive 2009/72 a pour objet, ainsi qu’il ressort de son article 1er, d’établir les règles communes concernant, notamment, le transport et la distribution d’électricité en vue de l’amélioration et de l’intégration de marchés de l’électricité compétitifs dans l’Union.

    39

    Ainsi qu’il résulte de son considérant 3, la directive 2009/72 vise, en particulier, à réaliser un marché entièrement ouvert qui permette à tous les consommateurs de choisir librement leurs fournisseurs et à tous les fournisseurs de fournir librement leurs produits à leurs clients, afin de parvenir à l’achèvement du marché intérieur de l’électricité (arrêt du 28 novembre 2018, Solvay Chimica Italia e.a., C‑262/17, C‑263/17 et C‑273/17, EU:C:2018:961, points 36 et 55).

    40

    Dans ce contexte, l’accès aux réseaux de distribution et de transport de l’électricité d’une manière non discriminatoire, transparente et disponible au juste prix est nécessaire au bon fonctionnement de la concurrence et revêt une importance primordiale (voir, par analogie, arrêts du 22 mai 2008, citiworks, C‑439/06, EU:C:2008:298, point 40, ainsi que du 9 octobre 2008, Sabatauskas e.a., C‑239/07, EU:C:2008:551, point 31).

    41

    En particulier, le libre accès des tiers aux réseaux de distribution et de transport, institué à l’article 32, paragraphe 1, première et deuxième phrases, de la directive 2009/72, constitue, ainsi que la Cour l’a déjà reconnu à maintes reprises, l’une des mesures essentielles que les États membres sont tenus de mettre en œuvre pour parvenir à l’achèvement du marché intérieur de l’électricité (arrêt du 28 novembre 2018, Solvay Chimica Italia e.a., C‑262/17, C‑263/17 et C‑273/17, EU:C:2018:961, point 54 ainsi que jurisprudence citée).

    42

    Pour atteindre ces objectifs, la directive 2009/72 impose, ainsi qu’il ressort de son considérant 9, une séparation juridique et fonctionnelle effective des réseaux par rapport aux activités de production et de fourniture, afin d’éviter une discrimination non seulement dans l’exploitation du réseau, mais aussi dans les éléments qui incitent les entreprises verticalement intégrées à investir suffisamment dans leurs réseaux.

    43

    Les notions de réseau de distribution et de réseau de transport ne sont pas définies en tant que telles par la directive 2009/72. En revanche, l’article 2, point 3, de cette directive définit la notion de « transport » comme désignant le transport d’électricité sur le réseau à très haute tension et à haute tension interconnecté aux fins de fourniture à des clients finals ou à des distributeurs, à l’exclusion de la « fourniture » elle-même. L’article 2, point 5, de ladite directive, quant à lui, définit la notion de « distribution » comme désignant le transport d’électricité sur des réseaux de distribution à haute, à moyenne et à basse tension aux fins de fourniture à des clients, à l’exclusion de la « fourniture » elle-même. Cette notion de « fourniture » doit être comprise, selon l’article 2, point 19, de ladite directive, comme désignant la vente d’électricité à des clients (voir, par analogie, arrêts du 22 mai 2008, citiworks, C‑439/06, EU:C:2008:298, point 45, ainsi que, en ce sens, arrêt du 28 novembre 2018, Solvay Chimica Italia e.a., C‑262/17, C‑263/17 et C‑273/17, EU:C:2018:961, point 28).

    44

    Ces définitions ne comportant aucun renvoi exprès au droit des États membres, il découle des exigences tant de l’application uniforme du droit de l’Union que du principe d’égalité que les termes de celles-ci doivent trouver dans toute l’Union une interprétation autonome et uniforme (voir, notamment, arrêt du 11 avril 2019, Tarola, C‑483/17, EU:C:2019:309, point 36).

    45

    Or, il résulte clairement desdites définitions, d’une part, qu’un réseau de transport est un réseau interconnecté servant à acheminer de l’électricité à très haute et à haute tension, laquelle est destinée à être vendue à des clients finals ou à des distributeurs, et, d’autre part, qu’un réseau de distribution est un réseau servant à acheminer de l’électricité à haute, à moyenne ou à basse tension, laquelle est destinée à être vendue à des clients grossistes ou à des clients finals (voir, par analogie, arrêt du 22 mai 2008, citiworks, C‑439/06, EU:C:2008:298, point 46, ainsi que arrêt du 28 novembre 2018, Solvay Chimica Italia e.a., C‑262/17, C‑263/17 et C‑273/17, EU:C:2018:961, point 29).

    46

    Il en ressort, en premier lieu, que, en ce qui concerne la nature des réseaux de transport et de distribution, au sens de la directive 2009/72, et la quantité d’électricité transportée sur ces réseaux, seule la tension de l’électricité acheminée constitue le critère de distinction pertinent permettant de déterminer si un réseau constitue un réseau de distribution ou un réseau de transport, au sens de cette directive (voir, par analogie, arrêt du 22 mai 2008, citiworks, C‑439/06, EU:C:2008:298, point 48, et arrêt du 28 novembre 2018, Solvay Chimica Italia e.a., C‑262/17, C‑263/17 et C‑273/17, EU:C:2018:961, point 30).

    47

    Ainsi, la Cour a déjà précisé que ni la date à laquelle un tel réseau a été mis en place ni le fait que celui-ci est destiné à des fins d’autoconsommation et est géré par une entité privée, auquel est relié un nombre limité d’unités de production et de consommation, ni sa taille ou son niveau de consommation d’électricité ne constituent des critères pertinents à cet égard, le législateur de l’Union n’ayant pas entendu exclure certains réseaux de distribution ou de transport du champ d’application de cette directive en raison de tels critères (voir, par analogie, arrêt du 22 mai 2008, citiworks, C‑439/06, EU:C:2008:298, point 49, ainsi que, en ce sens, arrêt du 28 novembre 2018, Solvay Chimica Italia e.a., C‑262/17, C‑263/17 et C‑273/17, EU:C:2018:961, points 31 et 35).

    48

    En second lieu, il ressort des définitions figurant à l’article 2, points 3 et 5, de la directive 2009/72 que, en ce qui concerne la finalité des réseaux de transport et de distribution d’électricité, au sens de cette directive, le critère de distinction pertinent réside, ainsi que M. l’avocat général l’a observé aux points 51 et 53 de ses conclusions, dans la catégorie de clients auxquels l’électricité acheminée est destinée, un réseau de transport servant à vendre de l’électricité à des clients finals ou à des distributeurs, tandis qu’un réseau de distribution est destiné à vendre de l’électricité à des clients grossistes ou à des clients finals.

    49

    Il s’ensuit que des réseaux qui ont pour fonction d’acheminer de l’électricité, d’une part, à très haute et à haute tension, aux fins de la vendre à des clients finals ou à des distributeurs et, d’autre part, à haute, à moyenne ou à basse tension, aux fins de la vendre à des clients grossistes ou à des clients finals, doivent être considérés comme, respectivement, des réseaux de transport et des réseaux de distribution relevant du champ d’application de la directive 2009/72 (voir, en ce sens, arrêt du 28 novembre 2018, Solvay Chimica Italia e.a., C‑262/17, C‑263/17 et C‑273/17, EU:C:2018:961, point 37).

    50

    Certes, la directive 2009/72, dès lors qu’elle vise à mettre en place de manière progressive un marché intérieur de l’électricité pleinement opérationnel, ne procède pas à une harmonisation exhaustive des règles relatives, notamment, au transport et à la distribution d’électricité (voir, en ce sens, arrêts du 1er juillet 2014, Ålands Vindkraft, C‑573/12, EU:C:2014:2037, point 86, et du 6 décembre 2018, FENS, C‑305/17, EU:C:2018:986, points 23 à 25).

    51

    En outre, l’article 2, points 3 et 5, de la directive 2009/72, s’il énonce les critères permettant de distinguer les notions de réseau de transport et de réseau de distribution d’électricité, laisse néanmoins aux États membres, ainsi que cela ressort, notamment, du chevauchement des définitions y figurant concernant la haute tension et les clients visés, une certaine marge de manœuvre pour mettre en œuvre ces critères.

    52

    Ainsi, en l’absence de disposition sur ce point dans cette directive, les États membres, pour autant qu’ils respectent la distinction opérée audit article 2, points 3 et 5, entre la très haute, la haute, la moyenne et la basse tension demeurent compétents, comme l’a observé M. l’avocat général au point 64 de ses conclusions, pour déterminer les seuils précis permettant de distinguer ces différents niveaux de tension.

    53

    De même, dans la mesure où, ainsi qu’il résulte de l’article 2, points 4 et 6, de la directive 2009/72, tant le gestionnaire du réseau de transport que celui du réseau de distribution peuvent être responsables des interconnexions correspondantes entre les réseaux, les États membres sont libres de déterminer, dans le respect des définitions figurant aux points 3 et 5 cet article, si les points d’interconnexion appartiennent au réseau de transport ou au réseau de distribution.

    54

    Dès lors, une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui prévoit que la transformation, dans une sous-station électrique, de la tension électrique pour permettre le passage de la haute à la moyenne tension relève de l’activité du réseau de transport n’excède pas la marge de manœuvre dont disposent les États membres pour mettre en œuvre l’article 2, points 3 et 5, de la directive 2009/72, un tel choix, ouvert par le législateur de l’Union, étant opéré en fonction du niveau de tension.

    55

    En revanche, au risque de porter atteinte à l’interprétation autonome et uniforme de l’article 2, points 3 et 5, de la directive 2009/72, les États membres ne sauraient ajouter des critères de distinction supplémentaires autres que ceux relatifs au niveau de tension et à la catégorie de clients vers lesquels l’électricité est acheminée, pour définir les notions de réseaux de distribution et de transport.

    56

    En effet, ainsi que M. l’avocat général l’a souligné aux points 60 et 61 de ses conclusions, même si la directive 2009/72 ne procède pas à une harmonisation exhaustive des domaines qu’elle régit, les notions de réseau de transport et de réseau de distribution, au sens de cette directive, revêtent un caractère fondamental dans l’économie de celle-ci, dès lors que, afin de parvenir à l’achèvement du marché intérieur de l’électricité, ladite directive, ainsi qu’il ressort des dispositions figurant à ses chapitres IV à VI, et comme il a été déjà relevé au point 42 du présent arrêt, d’une part, impose la séparation juridique et fonctionnelle effective de ces réseaux et, d’autre part, soumet ces derniers ainsi que leurs gestionnaires à des règles distinctes.

    57

    Dans ces conditions, les États membres sont tenus, afin d’assurer une application uniforme de la directive 2009/72 de nature à réaliser la mise en place du marché concurrentiel visé par celle-ci, de définir les notions de réseaux de distribution et de transport d’électricité, au sens de cette directive, en se référant uniquement aux deux seuls critères prévus aux points 3 et 5 de l’article 2 de celle-ci, relatifs, respectivement, au niveau de tension et à la catégorie de clients vers lesquels l’électricité est acheminée.

    58

    Il en découle que les États membres ne peuvent pas distinguer les notions de réseaux de distribution et de transport d’électricité, au sens de la directive 2009/72, en se fondant sur un critère supplémentaire par rapport à ceux prévus à l’article 2, points 3 et 5, de celle-ci.

    59

    Par conséquent, il y a lieu de relever que ces dispositions s’opposent à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui retient comme critère de distinction entre le réseau de transport et le réseau de distribution, outre celui du niveau de la tension électrique, celui de la propriété des installations électriques concernées.

    60

    Par ailleurs, s’agissant de l’hypothèse, relevée par la juridiction de renvoi, selon laquelle un tel critère de distinction découlerait, notamment, de l’interprétation donnée à cette réglementation par une majorité de juridictions nationales, il importe de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, l’obligation des États membres, découlant d’une directive, d’atteindre le résultat prévu par celle-ci ainsi que leur devoir, en vertu de l’article 4, paragraphe 3, TUE, de prendre toutes mesures générales ou particulières propres à assurer l’exécution de cette obligation s’impose à toutes les autorités des États membres, y compris, dans le cadre de leurs compétences, aux autorités juridictionnelles (arrêt du 14 mai 2019, CCOO, C‑55/18, EU:C:2019:402, point 68 et jurisprudence citée).

    61

    Il s’ensuit que, en appliquant le droit national, les juridictions nationales appelées à l’interpréter sont tenues de prendre en considération l’ensemble des règles de ce droit et de faire application des méthodes d’interprétation reconnues par celui-ci afin de l’interpréter, dans toute la mesure possible, à la lumière du texte ainsi que de la finalité de la directive en cause pour atteindre le résultat fixé par celle-ci et de se conformer ainsi à l’article 288, troisième alinéa, TFUE (arrêt du 14 mai 2019, CCOO, C‑55/18, EU:C:2019:402, point 69 et jurisprudence citée).

    62

    L’exigence d’une interprétation conforme inclut l’obligation, pour les juridictions nationales, de modifier, le cas échéant, une jurisprudence établie si celle-ci repose sur une interprétation du droit national incompatible avec les objectifs d’une directive (arrêt du 14 mai 2019, CCOO, C‑55/18, EU:C:2019:402, point 70 et jurisprudence citée).

    63

    Il convient également de relever que, lorsqu’un État membre, à l’instar de la République de Bulgarie, a décidé, aux fins de la dissociation entre la gestion du réseau de transport d’électricité et les activités de production et de fourniture d’électricité, d’exercer l’option prévue à l’article 9, paragraphe 8, sous b), de la directive 2009/72, lui permettant de ne pas appliquer les dispositions figurant au paragraphe 1 de cet article, relatives à la dissociation des structures de propriété, pour désigner un gestionnaire de réseau de transport indépendant, un tel choix implique pour cet État membre l’obligation de se conformer aux exigences prévues au chapitre V de ladite directive, dont fait partie l’article 17, paragraphe 1, sous a), de celle-ci (voir, en ce sens, arrêt du 26 octobre 2017, Balgarska energiyna borsa, C‑347/16, EU:C:2017:816, point 32, 33 et 41).

    64

    Or, cette dernière disposition exige explicitement que les gestionnaires de réseau de transport indépendant doivent être propriétaires des actifs nécessaires à l’exercice de l’activité de transport d’électricité, en particulier du réseau de transport, et cela, notamment, afin d’assurer, ainsi qu’il ressort des considérants 16, 17 et 19 de la directive 2009/72, l’indépendance totale et effective de ces gestionnaires par rapport aux activités de fourniture et de production (voir, en ce sens, arrêt du 26 octobre 2017, Balgarska energiyna borsa, C‑347/16, EU:C:2017:816, point 34).

    65

    En revanche, les dispositions de la directive 2009/72 applicables aux gestionnaires de réseau de distribution, lesquelles figurent au chapitre VI de celle-ci comportant les articles 24 à 29, n’imposent pas une telle exigence en ce qui concerne les gestionnaires de réseau de distribution.

    66

    En effet, l’article 26 de la directive 2009/72, portant sur la dissociation des gestionnaires de réseau de distribution, se borne à prévoir, d’une part, à son paragraphe 1, que le gestionnaire de réseau de distribution, lorsqu’il fait partie d’une entreprise verticalement intégrée, doit être indépendant, au moins sur le plan de la forme juridique, de l’organisation et de la prise de décision, des autres activités non liées à la distribution, sans cependant être tenu de séparer la propriété de ses actifs de cette entreprise.

    67

    D’autre part, aux termes du paragraphe 2, sous c), de cet article, le gestionnaire de réseau de distribution doit, tout au plus, « disposer de pouvoirs de décision effectifs », indépendamment de l’entreprise intégrée d’électricité, en ce qui concerne les éléments d’actifs nécessaires pour exploiter, entretenir ou développer le réseau.

    68

    Toutefois, ainsi que M. l’avocat général l’a indiqué au point 74 de ses conclusions, la condition, fixée par le droit national, selon laquelle le gestionnaire de réseau de distribution doit être propriétaire de celui-ci, bien qu’elle ne soit pas imposée par la directive 2009/72, peut être de nature, comme celle prévue pour les gestionnaires de réseau de transport à l’article 9, paragraphe 1, sous a), et à l’article 17, paragraphe 1, sous a), de ladite directive, à renforcer la séparation effective des différentes activités sur le marché de l’électricité.

    69

    Une telle condition apparaît également à même d’inciter le gestionnaire de réseau de distribution à investir dans son réseau et ainsi à contribuer à réaliser l’un des objectifs poursuivis par la directive 2009/72 consistant, ainsi que cela ressort, notamment, des considérants 9, 11, 19 et 44 de celle-ci, à promouvoir les investissements dans les infrastructures afin d’assurer un approvisionnement stable en électricité.

    70

    Cependant, cette condition ne saurait porter atteinte à la réalisation de l’objectif poursuivi par cette directive, consistant, ainsi qu’il ressort des points 38 à 40 du présent arrêt, à mettre en place un marché intérieur de l’électricité ouvert sur lequel est assuré le bon fonctionnement de la concurrence.

    71

    En particulier, ainsi que M. l’avocat général l’a observé aux points 78 à 81 de ses conclusions, lorsque, eu égard à son niveau de tension et à la catégorie de clients vers lesquels il achemine de l’électricité, un réseau doit être qualifié, en application de l’article 2, points 3 et 5, de la directive 2009/72, de réseau de distribution, la condition de propriété de ce réseau de distribution par son gestionnaire ne peut avoir pour effet de faire échapper ce réseau à l’obligation de se conformer aux dispositions de cette directive qui lui sont applicables.

    72

    À cet égard, il convient de rappeler que la Cour a déjà reconnu que les États membres ne peuvent faire relever des réseaux qui tombent dans le champ d’application de cette directive d’une catégorie de réseaux distincte de celles établies explicitement par cette directive, notamment, en vue de leur accorder des exemptions non prévues par celle-ci (voir, en ce sens, arrêt du 28 novembre 2018, Solvay Chimica Italia e.a., C‑262/17, C‑263/17 et C‑273/17, EU:C:2018:961, point 48).

    73

    En conséquence, un État membre ne saurait exclure de la notion de réseau de distribution un réseau qui sert à acheminer de l’électricité à haute, moyenne et basse tension pour la vente à des clients grossistes ou à des clients finals, au seul motif que le gestionnaire de ce réseau ne serait pas propriétaire de celui-ci.

    74

    Par ailleurs, ainsi que M. l’avocat général l’a indiqué aux points 82 et 83 de ses conclusions, la condition de propriété du réseau de distribution par son gestionnaire ne peut conduire à attribuer à ce gestionnaire un monopole d’une durée illimitée pour la distribution d’électricité sur un territoire déterminé, en raison de la barrière à l’entrée que cette condition pourrait constituer pour les tiers. Il incombe, toutefois, à la juridiction de renvoi d’apprécier si la condition en cause est susceptible de produire de telles conséquences.

    75

    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre aux première et troisième questions que l’article 2, points 3 et 5, de la directive 2009/72 doit être interprété en ce sens :

    qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui prévoit que la transformation de la tension de l’électricité pour permettre le passage de la haute à la moyenne tension relève de l’activité d’un réseau de transport d’électricité,

    qu’il s’oppose, en revanche, à une telle réglementation qui définit les notions de réseau de transport d’électricité et de réseau de distribution d’électricité en se fondant, non seulement sur le critère du niveau de tension, mais également sur celui de la propriété des actifs utilisés pour l’exercice des activités, respectivement, de transport et de distribution.

    76

    Cette interprétation est cependant sans préjudice, d’une part, de l’application de l’article 17, paragraphe 1, sous a), de ladite directive, selon lequel le gestionnaire de réseau de transport indépendant doit être propriétaire de ce réseau, et, d’autre part, du droit pour les États membres d’imposer au gestionnaire de réseau de distribution l’obligation qu’il soit propriétaire de ce réseau, pour autant, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier, que cette condition ne porte pas atteinte à la réalisation des objectifs poursuivis par cette même directive, notamment, en faisant échapper un tel réseau à l’obligation de se conformer aux règles qui lui sont applicables conformément à celle-ci.

    Sur la deuxième question

    77

    Par sa deuxième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la directive 2009/72 doit être interprétée en ce sens qu’un utilisateur qui est relié au réseau électrique au niveau d’un dispositif à moyenne tension doit nécessairement être considéré comme un client du gestionnaire du réseau de distribution d’électricité titulaire d’une licence exclusive pour la distribution d’électricité sur le territoire concerné, même si ce dernier n’est pas propriétaire de cette installation et quelles que soient les relations contractuelles entre cet utilisateur et le gestionnaire du réseau de transport d’électricité.

    78

    À cet égard, il convient de rappeler que le libre accès des tiers aux réseaux de distribution et de transport d’électricité, institué à l’article 32, paragraphe 1, première et deuxième phrases, de la directive 2009/72, constitue, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 41 du présent arrêt, l’une des mesures essentielles que les États membres sont tenus de mettre en œuvre pour parvenir à l’achèvement du marché intérieur de l’électricité.

    79

    Ce droit d’accès est étroitement lié au droit des consommateurs de choisir librement leurs fournisseurs et à celui des fournisseurs de fournir librement leurs produits à leurs clients, en ce sens que, pour que les clients puissent choisir librement leurs fournisseurs, ces derniers doivent pouvoir avoir accès aux différents réseaux de transport et de distribution qui acheminent l’électricité jusqu’aux clients (voir, par analogie, arrêts du 22 mai 2008, citiworks, C‑439/06, EU:C:2008:298, point 43, ainsi que du 9 octobre 2008, Sabatauskas e.a., C‑239/07, EU:C:2008:551, points 33 et 43).

    80

    Conformément à l’article 32, paragraphe 1, de la directive 2009/72, l’accès aux réseaux doit être fondé sur des critères objectifs, non discriminatoires et transparents ainsi que sur des tarifs publiés avant leur entrée en vigueur, et ne pas être discrétionnaire (voir, par analogie, arrêt du 9 octobre 2008, Sabatauskas e.a., C‑239/07, EU:C:2008:551, point 46).

    81

    Il en ressort que cette disposition laisse aux États membres le soin de prendre les mesures nécessaires à cet effet, ceux-ci étant compétents, conformément à l’article 288 TFUE, quant à la forme et aux moyens à mettre en œuvre pour parvenir à la mise en place d’un système d’accès des tiers aux réseaux de transport ou de distribution, sous réserve qu’ils se conforment au principe du libre accès à ces réseaux, sauf exceptions ou dérogations prévues par cette directive (voir, en ce sens, arrêt du 28 novembre 2018, Solvay Chimica Italia e.a., C‑262/17, C‑263/17 et C‑273/17, EU:C:2018:961, point 56 ainsi que jurisprudence citée).

    82

    Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que les obligations des États membres énoncées à l’article 32, paragraphe 1, de la directive 2009/72 concernent le seul accès aux réseaux et non le raccordement à ceux-ci, s’entendant comme la connexion physique aux réseaux (voir, en ce sens, arrêt du 9 octobre 2008, Sabatauskas e.a., C‑239/07, EU:C:2008:551, point 42).

    83

    Or, le droit des clients de choisir librement leurs fournisseurs, consacré à cette disposition, est garanti aussi bien lorsque le fournisseur raccorde les clients à un réseau de transport que lorsque ce raccordement les relie à un réseau de distribution (arrêt du 9 octobre 2008, Sabatauskas e.a., C‑239/07, EU:C:2008:551, point 43).

    84

    Il en résulte que les États membres disposent d’une marge d’appréciation pour orienter les utilisateurs des réseaux vers un type de réseau ou un autre et, partant, pour déterminer le type de réseau auquel un raccordement sera réalisé, à la condition, toutefois, de procéder audit raccordement dans des conditions non discriminatoires et objectives. Les utilisateurs n’ont donc pas le droit de choisir de manière discrétionnaire le type de réseau auquel ils souhaitent être raccordés (voir, en ce sens, arrêt du 9 octobre 2008, Sabatauskas e.a., C‑239/07, EU:C:2008:551, points 46 à 49).

    85

    En l’occurrence, il ressort de la décision de renvoi que l’utilisateur en cause au principal sollicite le raccordement au réseau de transport d’électricité au motif qu’il est relié à un dispositif à moyenne tension intégré dans une installation qui transforme la tension électrique pour permettre le passage de la haute à la moyenne tension, dans la mesure où, selon le droit national, une telle transformation relève de l’activité de ce réseau de transport.

    86

    À cet égard, il a déjà été constaté aux points 53 et 54 du présent arrêt qu’il ressort de l’article 2, points 4 et 6, de la directive 2009/72 que les États membres sont libres de déterminer, dans l’exercice de la marge de manœuvre que leur reconnaît cette directive, si les points d’interconnexion entre un réseau de transport d’électricité et un réseau de distribution d’électricité font partie du premier ou du second type de réseau, de sorte que les États membres peuvent prévoir que la transformation de la tension électrique pour permettre le passage de la haute à la moyenne tension relève de l’activité d’un réseau de transport d’électricité.

    87

    Dans ces conditions, il apparaît que le raccordement d’un utilisateur, tel que celui en cause au principal, au réseau de transport d’électricité peut être considéré comme se fondant sur des motifs objectifs et non discriminatoires, dès lors que cet utilisateur est relié à un dispositif à moyenne tension qui relève, conformément à la directive 2009/72 et au droit national, de l’activité de ce réseau de transport.

    88

    Il s’ensuit que cette directive ne s’oppose pas à ce que, dans une affaire telle que celle en cause au principal, un tel utilisateur soit considéré comme étant raccordé au réseau de transport d’électricité.

    89

    Il incombe, toutefois, à la juridiction de renvoi de vérifier si le dispositif en question fait effectivement partie, ainsi qu’il semble ressortir des éléments soumis à la Cour et des débats tenus lors de l’audience, de la sous-station électrique relevant du réseau de transport d’électricité et ne constitue donc pas un élément extérieur à celle-ci qui ferait partie du réseau de distribution d’électricité.

    90

    Il est, en tout état de cause, sans pertinence à cet égard, ainsi qu’il découle de la réponse aux première et troisième questions, en particulier du point 71 du présent arrêt, que les gestionnaires respectifs du réseau de distribution et du réseau de transport soient ou non propriétaires du réseau concerné, une telle circonstance n’étant pas de nature à priver ledit réseau de sa nature de réseau de distribution ou de réseau de transport, au sens de la directive 2009/72.

    91

    En conséquence, il convient de répondre à la deuxième question que la directive 2009/72, en particulier son article 2, points 3 à 6, et son article 32, paragraphe 1, doit être interprétée en ce sens qu’un utilisateur qui est relié au réseau électrique au niveau d’un dispositif à moyenne tension ne doit pas nécessairement être considéré comme un client du gestionnaire du réseau de distribution d’électricité titulaire d’une licence exclusive pour la distribution d’électricité sur le territoire concerné, quelles que soient les relations contractuelles entre cet utilisateur et le gestionnaire du réseau de transport d’électricité, un tel utilisateur pouvant être considéré comme un client du réseau de transport d’électricité lorsqu’il est relié à un dispositif à moyenne tension faisant partie, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier, d’une sous-station électrique dont l’activité de transformation de la tension électrique pour permettre le passage de la haute à la moyenne tension relève de l’activité de ce réseau.

    Sur les dépens

    92

    La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

     

    Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit :

     

    1)

    L’article 2, points 3 et 5, de la directive 2009/72/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et abrogeant la directive 2003/54/CE, doit être interprété en ce sens :

    qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui prévoit que la transformation de la tension de l’électricité pour permettre le passage de la haute à la moyenne tension relève de l’activité d’un réseau de transport d’électricité,

    qu’il s’oppose, en revanche, à une telle réglementation qui définit les notions de réseau de transport d’électricité et de réseau de distribution d’électricité en se fondant, non seulement sur le critère du niveau de tension, mais également sur celui de la propriété des actifs utilisés pour l’exercice des activités, respectivement, de transport et de distribution.

    Cette interprétation est cependant sans préjudice, d’une part, de l’application de l’article 17, paragraphe 1, sous a), de ladite directive, selon lequel le gestionnaire de réseau de transport indépendant doit être propriétaire de ce réseau, et, d’autre part, du droit pour les États membres d’imposer au gestionnaire de réseau de distribution l’obligation qu’il soit propriétaire de ce réseau, pour autant, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier, que cette condition ne porte pas atteinte à la réalisation des objectifs poursuivis par cette même directive, notamment, en faisant échapper un tel réseau à l’obligation de se conformer aux règles qui lui sont applicables conformément à celle-ci.

     

    2)

    La directive 2009/72, en particulier son article 2, points 3 à 6, et son article 32, paragraphe 1, doit être interprétée en ce sens qu’un utilisateur qui est relié au réseau électrique au niveau d’un dispositif à moyenne tension ne doit pas nécessairement être considéré comme un client du gestionnaire du réseau de distribution d’électricité titulaire d’une licence exclusive pour la distribution d’électricité sur le territoire concerné, quelles que soient les relations contractuelles entre cet utilisateur et le gestionnaire du réseau de transport d’électricité, un tel utilisateur pouvant être considéré comme un client du réseau de transport d’électricité lorsqu’il est relié à un dispositif à moyenne tension faisant partie, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier, d’une sous-station électrique dont l’activité de transformation de la tension électrique pour permettre le passage de la haute à la moyenne tension relève de l’activité de ce réseau.

     

    Signatures


    ( *1 ) Langue de procédure : le bulgare.

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