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Document 62021CJ0673

Arrêt de la Cour (septième chambre) du 6 octobre 2022.
KN contre Comité économique et social européen.
Pourvoi – Droit institutionnel – Comité économique et social européen (CESE) – Code de conduite – Allégations de harcèlement moral contre un membre du CESE – Enquête de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) – Décision de décharger le membre de ses fonctions d’encadrement et de gestion du personnel – Recours en annulation et en indemnisation.
Affaire C-673/21 P.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2022:759

ARRÊT DE LA COUR (septième chambre)

6 octobre 2022 (*)

« Pourvoi – Droit institutionnel – Comité économique et social européen (CESE) – Code de conduite – Allégations de harcèlement moral contre un membre du CESE – Enquête de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) – Décision de décharger le membre de ses fonctions d’encadrement et de gestion du personnel – Recours en annulation et en indemnisation »

Dans l’affaire C‑673/21 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 9 novembre 2021,

KN, représenté par Mes M. Aboudi et M. Casado García-Hirschfeld, avocats,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Comité économique et social européen (CESE), représenté par Mmes X. Chamodraka, M. Pascua Mateo, MM. L. Camarena Januzec et A. Carvajal García-Valdecasas, en qualité d’agents, assistés de Me A. Duron, avocate,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (septième chambre),

composée de M. J. Passer, président de chambre, M. F. Biltgen et Mme M. L. Arastey Sahún (rapporteure), juges,

avocat général : M. P. Pikamäe,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi, KN demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 1er septembre 2021, KN/CESE (T‑377/20, ci‑après l’« arrêt attaqué », EU:T:2021:528,), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant, d’une part, à l’annulation de la décision du Comité économique et social européen (ci-après le « CESE ») du 9 juin 2020 (ci-après la « décision litigieuse ») et, d’autre part, à obtenir réparation des préjudices que KN aurait subis.

 Le cadre juridique

2        Aux termes de l’article 9, paragraphe 8, du règlement intérieur du CESE – Mars 2019 (JO 2019, L 184, p. 23, ci-après le « règlement intérieur du CESE ») :

« Le bureau est responsable de la bonne utilisation des ressources humaines, budgétaires et techniques dans l’exécution des tâches qui lui sont imparties par le traité. Il intervient notamment dans la procédure budgétaire et l’organisation du secrétariat. »

3        L’article 7 du code de conduite des membres du CESE, annexé au règlement intérieur du CESE (ci-après le « code de conduite de 2019 »), intitulé « Comité consultatif sur la conduite des membres », prévoit :

« 1.      Un comité consultatif sur la conduite des membres (le “comité consultatif”) est institué.

2.      Sur proposition du bureau, l’assemblée élit, pour chaque période de deux ans et demi, six membres, trois femmes et trois hommes, sans autres responsabilités permanentes dans la structure du Comité [à savoir celles de président et vice-président du CESE, président de groupe, de section/de la commission consultative des mutations industrielles et de questeur], qui constituent le comité consultatif.

3.      Le comité consultatif donne, à titre confidentiel et dans les trente jours calendaires, à tout membre qui en fait la demande des orientations sur l’interprétation et l’application des dispositions du présent code de conduite. Le membre est en droit de se fonder sur ces orientations.

4.      Sur demande du président, le comité consultatif évalue également les cas allégués de violation du présent code de conduite et conseille le président sur les éventuelles mesures à prendre. »

4        L’article 8 du code de conduite de 2019, intitulé « Procédure en cas d’éventuelles violations du code de conduite », dispose, à son paragraphe 3 :

« Tenant compte des recommandations du comité consultatif, et après avoir invité le membre concerné à présenter des observations écrites, le président du Comité consulte la présidence élargie et demande ensuite au bureau de prendre une décision sur les mesures susceptibles d’être prises conformément au statut des membres et au règlement intérieur du Comité.

En fonction du degré de gravité du comportement du membre, les sanctions suivantes peuvent être prises :

–        avertissement écrit,

–        transcription de l’avertissement écrit au procès-verbal du bureau et, le cas échéant, au procès-verbal de la session plénière,

–        suspension temporaire de toute fonction de rapporteur, président et membre de groupe d’étude, et suspension temporaire de toute participation aux missions et aux réunions extraordinaires. »

 Les antécédents du litige

5        Les antécédents du litige ont été exposés aux points 1 à 36 de l’arrêt attaqué. Pour les besoins de la présente procédure, ils peuvent être résumés de la manière suivante.

6        KN était membre du CESE depuis le 1er mai 2004. Entre le mois d’avril 2013 et le 27 octobre 2020, il a été président du groupe des employeurs constitué au sein du CESE (ci‑après le « groupe I »).

7        Le 6 décembre 2018, après avoir été informé d’allégations concernant le comportement de KN à l’égard d’autres membres du CESE et de membres du personnel du CESE, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) a ouvert une enquête.

8        Le 25 novembre 2019, KN a été entendu par l’OLAF au cours d’une audition. Par courriels des 26 et 29 novembre 2019, il a complété son audition par des déclarations écrites.

9        Par lettre du 4 décembre 2019, l’OLAF a invité KN à présenter, par écrit, ses observations sur les faits le concernant, tels qu’exposés dans un résumé joint à cette lettre. Ces faits portaient sur des comportements de KN à l’égard de A, de B ainsi que de C et, plus généralement, à l’égard des membres du personnel du secrétariat du groupe I.

10      Le 17 décembre 2019, KN a présenté ses observations sur le résumé des faits le concernant.

11      Par lettre du 16 janvier 2020, l’OLAF a informé KN de la clôture de l’enquête et de la transmission du rapport final (ci-après le « rapport de l’OLAF ») au parquet fédéral belge ainsi qu’au président du CESE. Ce dernier était, notamment, invité à traiter les retranscriptions des auditions des témoins et des lanceurs d’alerte « dans la plus grande confidentialité », dans la mesure où ces dernières contenaient des informations « très sensibles, susceptibles d’exposer davantage les personnes concernées ». En outre, le président du CESE était explicitement invité à consulter l’OLAF en cas de demande d’accès auxdites retranscriptions.

12      Conformément à l’article 11 du règlement (UE, Euratom) no 883/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 11 septembre 2013, relatif aux enquêtes effectuées par l’OLAF et abrogeant le règlement (CE) no 1073/1999 du Parlement européen et du Conseil et le règlement (Euratom) no 1074/1999 du Conseil (JO 2013, L 248, p. 1), le rapport de l’OLAF était accompagné de recommandations sur les suites qu’il convenait de donner à l’enquête.

13      Ainsi, d’une part, l’OLAF recommandait au parquet fédéral belge d’engager des poursuites judiciaires contre KN concernant des faits prétendument constitutifs de harcèlement moral à l’égard de A et de B, ces faits étant susceptibles de constituer une « infraction pénale », au sens de l’article 442 bis du code pénal belge. D’autre part, s’agissant encore desdits faits et d’un comportement prétendument abusif à l’égard de C et de D ainsi que d’autres membres du personnel ayant exercé ou continuant d’exercer des fonctions au sein du secrétariat du groupe I, l’OLAF recommandait au CESE d’envisager l’ouverture de la procédure visée à l’article 8 du code de conduite de 2019 et dans la quatrième partie du règlement intérieur du CESE et de prendre « toutes les mesures nécessaires pour prévenir tout nouveau cas de harcèlement de la part [de KN] sur le lieu de travail ».

14      Par note du 22 janvier 2020, le président du CESE a transmis le rapport de l’OLAF au comité consultatif sur la conduite des membres, institué à l’article 7 du code de conduite de 2019 (ci-après le « comité consultatif »), et a demandé, conformément à l’article 7, paragraphe 4, de ce code, à ce comité consultatif de rendre un avis sur les violations alléguées dudit code par KN. Le président du CESE a, toutefois, indiqué que, dans le souci d’assurer la protection des témoins et des lanceurs d’alerte, les retranscriptions de leurs auditions par l’OLAF n’étaient pas transmises au comité consultatif.

15      Le même jour, les membres du groupe I ont décidé de proposer la candidature de KN à l’élection du président du CESE devant se dérouler au cours du mois d’octobre 2020.

16      Par note du 10 février 2020, le président du comité consultatif a invité KN à une audition prévue le 6 mars suivant.

17      Par lettre du 17 février 2020 adressée au président du comité consultatif, KN a, notamment, demandé à recevoir une « copie de tous les documents ayant un rapport direct avec les allégations [soulevées contre lui], dans le respect, bien entendu, du principe de confidentialité ».

18      En réponse à une demande formulée par le CESE, l’OLAF a, par courriel du 20 février 2020, indiqué que, en règle générale, certaines informations ne devaient pas être communiquées à la personne concernée, notamment les données personnelles des tiers, en particulier celles des témoins et des lanceurs d’alerte, ainsi que l’évaluation juridique des faits réalisée par l’OLAF. Le CESE était également invité à transmettre à l’OLAF la version non confidentielle du rapport que cet organe envisageait de transmettre à KN avant de l’envoyer à ce dernier. À titre informatif, l’OLAF avait également joint à son courriel les lignes directrices sur l’utilisation de ses rapports finaux par les services de la Commission européenne dans le cadre des procédures de recouvrement et d’autres mesures dans le secteur des dépenses directes et de l’aide extérieure.

19      Le 4 mars 2020, une version du rapport de l’OLAF omettant certaines données afin, notamment, de préserver l’anonymat des témoins et des lanceurs d’alerte, et dépourvue d’annexe, a été transmise à KN (ci-après la « version non confidentielle du rapport de l’OLAF »).

20      Par courriel du même jour transmis au président du comité consultatif, KN a, notamment, demandé que son audition, prévue le 6 mars suivant, soit reportée à une date ultérieure, afin qu’il dispose de plus de temps pour prendre connaissance de la version non confidentielle du rapport de l’OLAF.

21      Le 6 mars 2020, le comité consultatif, composé de deux membres issus de chacun des trois groupes du CESE, a procédé à l’audition de KN, après avoir entendu séparément des enquêteurs de l’OLAF ainsi qu’une ancienne membre du CESE, D, en sa qualité de lanceur d’alerte.

22      Lors de son audition, D s’est opposée à la présence de l’un des membres du groupe I au sein du comité consultatif, à savoir E, au motif que celui‑ci se trouvait en situation de conflit d’intérêts. Ce conflit d’intérêts trouverait son origine dans le fait que, à la demande de KN, E aurait mené une enquête au sein du secrétariat du groupe I et, à l’issue de celle-ci, il aurait élaboré un rapport contenant des allégations concernant le comportement de A, rapport qui aurait ensuite été utilisé par KN pour obtenir un vote de confiance lors d’une réunion du bureau du groupe I, le 25 octobre 2018.

23      La seconde audition de KN par le comité consultatif, prévue le 17 mars suivant, n’a pas pu avoir lieu en raison des restrictions mises en place pour répondre à la crise sanitaire liée à la pandémie de COVID-19. Par la suite, ni le comité consultatif ni KN n’ont demandé qu’une telle seconde audition soit organisée.

24      Par lettre du 2 avril 2020, le comité consultatif a informé le président du CESE que E ne prendrait pas part aux délibérations du comité consultatif portant sur le cas de KN dès lors qu’il se trouvait en situation de conflit d’intérêts. Cette lettre précisait également que, dans ces circonstances, le second membre du groupe I au sein du comité consultatif, à savoir F, avait refusé de s’associer à la décision d’exclure E des délibérations et qu’il ne prendrait dès lors pas non plus part aux délibérations du comité consultatif portant sur le cas de KN.

25      Par lettre du 7 avril 2020, adressée au président du CESE, KN a indiqué qu’il souffrait de problèmes de santé et qu’il était, de ce fait, dans l’impossibilité d’exercer ses fonctions de président du groupe I pour une durée indéterminée. Le vice-président du groupe I a été désigné pour assurer temporairement ces fonctions pendant la durée du congé de maladie de KN.

26      Par lettre du 28 avril 2020, adressée au président du CESE, le comité consultatif a, conformément à l’article 8, paragraphe 2, du code de conduite de 2019, transmis ses recommandations concernant les violations alléguées du code de conduite par KN. Le comité consultatif a invité le président du CESE à prendre les mesures suivantes :

« 1)      À la lumière des auditions de l’OLAF et [de KN] organisées par le comité consultatif le 6 mars 2020, et après un examen approfondi du compte rendu de l’audition par l’OLAF [de KN] ainsi que du rapport de l’OLAF, le comité consultatif souscrit aux constatations factuelles établies par l’OLAF ainsi qu’aux conclusions juridiques qui en découlent. Dès lors, le comité consultatif constate que, par son comportement à l’égard des membres du personnel et d’anciens membres du CESE, [KN] a violé l’article 1er, paragraphe 4, du règlement intérieur du CESE, l’article 4, paragraphe 1, du code de conduite des membres du CESE du 17 janvier 2013, l’article 4, paragraphe 1, du code de [conduite de 2019], ainsi que l’article 31, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Le comité consultatif constate par ailleurs que les droits procéduraux de la personne incriminée ont été pleinement respectés dans le cadre des investigations de l’OLAF ;

2)      En raison de la violation répétée et grave de dispositions centrales dans l’ordre juridique européen, [KN] se voit retirer son droit de direction et, par conséquent, son autorité vis-à-vis des membres du personnel du secrétariat du groupe I ;

3)      En conséquence du retrait de son droit de diriger les membres du personnel, et puisque le poste de président est étroitement lié à ce droit, [KN] est suspendu de sa fonction de président du groupe I ; la suspension s’applique sans préjudice du fait que, pour des raisons de santé et jusqu’à son rétablissement, [KN] a cédé la présidence du groupe I [au] vice-président du groupe I ;

4)      Le président du CESE [...] est prié d’exiger [de KN] qu’il retire sa candidature à la présidence du CESE, qui a été confirmée par les membres du groupe I lors de la procédure électorale du 23 janvier 2020, afin d’éviter de porter préjudice au CESE et à ses membres ;

5)      Dans l’éventualité où le parquet belge ouvrirait une enquête, le CESE engage une procédure judiciaire, afin de se constituer partie civile dans des poursuites contre [KN] ».

27      Par lettre du 2 juin 2020 adressée au président du CESE, KN a fait part de ses observations sur les recommandations du comité consultatif. KN reprochait notamment au comité consultatif d’avoir méconnu ses droits de la défense, dans la mesure où, n’ayant pas pu disposer des annexes du rapport de l’OLAF, il n’avait pas pu faire valoir ses commentaires sur celles-ci.

28      Lors de sa réunion à huis clos du 9 juin 2020, le bureau du CESE a adopté la décision litigieuse, par 21 voix pour, 4 voix contre et une abstention, un vote ayant, pour le reste, été invalidé. L’unique point de cette décision est ainsi libellé :

« Le Bureau

1.      prend note des conclusions de l’OLAF et du comité consultatif concernant la responsabilité [de KN] [...] à l’égard des actes de harcèlement et du comportement inapproprié dont il est accusé,

2.      note que les sanctions énoncées dans le [code de conduite de 2019] ne sont pas applicables en l’espèce, compte tenu du principe de la légalité des peines (nulla poena sine lege),

3.      demande [à KN] :

–        de démissionner de ses fonctions de président du groupe I,

–        de retirer sa candidature à la présidence du CESE.

4.      décharge [KN] de toute activité d’encadrement et de gestion du personnel,

5.      charge le secrétaire général de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que le CESE se constitue partie civile dans le cas où une procédure serait ouverte par le procureur du Roi contre [KN],

6.      charge le secrétaire général de transmettre cette décision à l’OLAF et au Parlement européen ; la décision peut aussi, le cas échéant, être communiquée à d’autres institutions et/ou aux autorités des États membres.

Cette décision forme partie intégrante du procès-verbal de la réunion du bureau du 9 juin 2020 et sa diffusion est limitée. »

29      La décision litigieuse a été notifiée à KN le 17 juin 2020.

30      Par décision du 15 juillet 2020, l’assemblée plénière du CESE a, à la demande de l’auditorat du travail de Bruxelles (Belgique) et après avoir recueilli les observations de KN, levé l’immunité dont bénéficiait ce dernier.

31      L’absence de KN pour cause de maladie a pris fin le 28 août 2020.

32      Par lettre du 1er septembre 2020, le directeur de la direction « Ressources humaines et finances » du CESE a informé KN du fait que, en exécution de la décision litigieuse, il le déchargeait de ses fonctions d’encadrement et de gestion du personnel du secrétariat du groupe I (ci-après la « mesure litigieuse »). KN était, par ailleurs, invité à désigner un autre membre du groupe I pour assurer la gestion quotidienne du secrétariat de ce groupe.

33      Le 8 septembre 2020, le groupe I a présenté la candidature d’un autre de ses membres à la présidence du CESE et KN a retiré sa candidature à cette élection.

34      Le 27 octobre 2020, à l’expiration du mandat de KN, le groupe I a élu un nouveau président. Le même jour, la candidate proposée par le groupe I a été élue présidente du CESE.

35      Par la décision (UE) 2020/1636 du Conseil, du 30 octobre 2020, portant nomination d’un membre du Comité économique et social européen pour la période allant du 21 septembre 2020 au 20 septembre 2025 (JO 2020, L 369, p. 1), KN a, sur proposition de la République de Pologne, été nommé membre du CESE pour la période allant du 21 septembre 2020 au 20 septembre 2025.

 La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

36      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 juin 2020, KN a introduit un recours tendant, d’une part, à l’annulation de la décision litigieuse et, d’autre part, à obtenir réparation des préjudices qu’il prétend avoir subis.

37      À l’appui de son recours, KN a soulevé quatre moyens, tirés, pour le premier, d’une violation des droits de la défense, du droit à une bonne administration, du droit à être entendu et du principe de proportionnalité ; pour le deuxième, d’une violation des principes de la présomption d’innocence et d’impartialité ; pour le troisième, d’une violation des principes de non-rétroactivité, de sécurité juridique ainsi que de légalité des peines et, pour le quatrième, d’une violation du « principe de la confidentialité des procédures disciplinaires et des informations judiciaires », de l’article 10, paragraphe 2, du règlement no 883/2013 ainsi que de l’article 4, paragraphe 1, du règlement (UE) 2018/1725 du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2018, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions, organes et organismes de l’Union et à la libre circulation de ces données, et abrogeant le règlement (CE) no 45/2001 et la décision no 1247/2002/CE (JO 2018, L 295, p. 39).

38      Par l’arrêt attaqué, le Tribunal, après avoir déclaré le recours en annulation comme étant recevable seulement en ce qu’il était dirigé contre la mesure litigieuse et irrecevable pour le surplus, a rejeté l’ensemble des griefs soulevés par KN.

39      En outre, le Tribunal a constaté que, dès lors qu’aucune illégalité n’affectait la décision litigieuse et que la procédure d’élaboration de celle-ci avait été conduite dans le respect des droits de la défense de KN, l’une des conditions nécessaires d’engagement de la responsabilité de l’Union n’était pas remplie en l’espèce, si bien que la demande de KN, au titre de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, de réparation des préjudices matériel et moral devait être rejetée.

40      En conséquence, le Tribunal a rejeté, dans son intégralité, le recours introduit par KN.

 Les conclusions des parties

41      Par son pourvoi, KN demande à la Cour :

–        d’annuler l’arrêt attaqué ;

–        de faire droit aux conclusions présentées par KN dans le recours devant le Tribunal, et

–        de condamner le CESE aux dépens, y compris à ceux exposés devant le Tribunal.

42      Le CESE demande à la Cour :

–        de rejeter le pourvoi comme étant irrecevable et, en tout état de cause, comme étant infondé, et

–        de condamner KN aux dépens devant la Cour.

 Sur le pourvoi

 Sur la recevabilité

43      Le CESE soutient que le pourvoi est irrecevable dans la mesure où, d’une part, KN se borne essentiellement à répéter les arguments présentés en première instance sans préciser les erreurs de droit et d’appréciation prétendument commises par le Tribunal et où, d’autre part, il n’existe pas de dénaturation des faits opérée par le Tribunal dans la présente affaire. KN viserait manifestement à obtenir de la Cour une nouvelle appréciation des faits constatés par le Tribunal et ne fournirait pas une argumentation claire et intelligible au soutien de son moyen unique du pourvoi.

44      À cet égard, il convient d’observer que, dans le cadre de son pourvoi, KN reproche notamment au Tribunal d’avoir commis des erreurs de droit ainsi qu’une dénaturation des faits dans l’arrêt attaqué. À cet égard, KN indique à plusieurs reprises les éléments critiqués de l’arrêt attaqué ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique la demande d’annulation de cet arrêt.

45      En particulier, il soutient que les constats opérés aux points 73 et 102 de l’arrêt attaqué sont contradictoires, fait valoir que la jurisprudence visée par le Tribunal, au point 104 de cet arrêt, n’est pas applicable en l’espèce, allègue que le Tribunal a commis une erreur de droit en constatant, au point 105 de l’arrêt attaqué, que le bureau du CESE était compétent pour adopter la mesure litigieuse, et reproche au Tribunal d’avoir constaté de manière erronée, aux points 167 à 169 et 171 à 177 dudit arrêt, que KN disposait d’un délai suffisant pour prendre utilement connaissance de la version non confidentielle du rapport de l’OLAF et pour préparer sa défense.

46      Dans ces conditions, il ne saurait être considéré que le présent pourvoi est irrecevable dans son intégralité.

 Sur le fond

47      À l’appui de son pourvoi, KN soulève formellement un moyen unique tiré d’une dénaturation des faits commise par le Tribunal dans l’arrêt attaqué, ainsi que d’erreurs manifestes d’appréciation emportant une motivation inexacte en droit.

 Argumentation des parties

48      KN soutient que, au moment où les faits qui lui sont reprochés auraient été commis, seul le code de conduite des membres du CESE de 2013 était en vigueur et que celui-ci ne prévoyait aucune sanction ni de procédure disciplinaire.

49      Certes, au point 102 de l’arrêt attaqué, le Tribunal aurait qualifié de « préventive » la mesure litigieuse visant à décharger KN de ses fonctions d’encadrement et de gestion du personnel.

50      Cependant, ce point serait en contradiction avec le point 73 dudit arrêt, qui reconnaîtrait le caractère définitif de cette mesure à la date à laquelle la requête a été déposée devant le Tribunal.

51      S’agissant des conséquences de la mesure litigieuse, celle-ci aurait rendu impossible la poursuite de l’activité de KN comme président du groupe I, jusqu’au terme de son mandat, ce qui l’aurait contraint à démissionner en tant que président de ce groupe.

52      Compte tenu de ces conséquences, la mesure litigieuse devrait être considérée comme étant une sanction administrative à caractère répressif.

53      S’agissant du point 104 de l’arrêt attaqué, le constat du Tribunal selon lequel « il était dans l’intérêt du service de décharger le requérant de certaines tâches administratives relevant de l’exercice d’un pouvoir hiérarchique » serait également entaché d’une dénaturation des faits et d’une erreur d’appréciation, dans la mesure où la jurisprudence citée à ce point 104, à l’appui de ce constat, se référerait exclusivement aux fonctionnaires ou aux autres agents qui ont été mutés ou déchargés de leurs fonctions dans l’intérêt du service en application des dispositions statutaires.

54      Or, dans la présente affaire, la décision litigieuse porterait sur un membre du CESE, auquel le statut des fonctionnaires de l’Union européenne n’est pas applicable par analogie.

55      KN soutient que, en adoptant la décision litigieuse, le bureau du CESE a commis une intrusion dans les prérogatives accordées, conformément à l’article 30, paragraphe 2, et à l’article 80 du règlement intérieur du CESE, à l’un des trois groupes de travail du CESE pour l’organisation de leurs propres secrétariats.

56      Dès lors, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en constatant, au point 105 de l’arrêt attaqué, que le bureau du CESE était compétent pour adopter la mesure litigieuse, tandis que, selon KN, la compétence à cet égard appartient aux membres du groupe I.

57      L’intervention du bureau du CESE, opérée à titre exceptionnel et dérogatoire, ne serait pas prévue dans le règlement intérieur du CESE, l’urgence de l’adoption de la mesure en cause n’étant, en outre, pas motivée.

58      KN est d’avis que la direction des ressources humaines s’était reconnue une délégation de pouvoirs sans aucune base légale et sous le prétexte qu’il s’agissait d’une mesure exceptionnelle et dérogatoire.

59      À supposer même que le bureau du CESE puisse intervenir dans la réorganisation des services du secrétariat d’un groupe, quod non, aucune disposition du règlement intérieur du CESE ne prévoirait que ces pouvoirs puissent être délégués à la direction des ressources humaines du CESE.

60      Ainsi, contrairement à ce que le Tribunal a constaté audit point 105 de l’arrêt attaqué, la mesure litigieuse ne saurait être adoptée conformément à l’article 9, paragraphe 8, du règlement intérieur du CESE et à l’article 8, paragraphe 3, premier alinéa, du code de conduite de 2019.

61      Ce dernier ne serait pas applicable en l’espèce, compte tenu du principe de non-rétroactivité des peines.

62      KN, se fondant sur un arrêt du Tribunal, du 19 juin 2015, Italie/Commission (T‑358/11, EU:T:2015:394, point 123), rappelle, à cet égard, que tout acte visant à créer des effets juridiques emprunte sa force obligatoire à une disposition du droit de l’Union qui doit expressément être indiquée comme base juridique et qui prescrit la forme juridique dont l’acte doit être revêtu. Le principe de prévisibilité ferait partie intégrante du principe de sécurité juridique (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2014, National Iranian Oil Company/Conseil, T‑578/12, non publié, EU:T:2014:678, points 111 et 112).

63      Or, dans la présente affaire, le CESE n’aurait adopté aucune décision concernant les mesures d’exécution de l’institution en matière de « bon usage des ressources humaines, budgétaires et techniques dont il dispose » ayant motivé la décision litigieuse. Il n’existerait donc aucun texte réglementaire ou contraignant ni aucun autre document précisant les modalités d’intervention pour décharger un président de groupe de ses fonctions d’encadrement et de gestion du personnel du secrétariat du groupe qu’il préside.

64      À supposer même que le bureau soit compétent pour adopter une mesure concernant le fonctionnement du secrétariat d’un groupe sans consulter ses membres ou son président, cette procédure ne serait pas prévue dans le cadre juridique visé par le CESE au cours de la procédure disciplinaire en cause.

65      Dans ces conditions, l’arrêt attaqué serait entaché d’une erreur de droit et d’appréciation, les motifs de cet arrêt étant contraires au principe de sécurité juridique qui vise à garantir la prévisibilité des situations et des relations juridiques relevant du droit de l’Union, en particulier dans le cas où l’acte du droit de l’Union en cause peut avoir des conséquences défavorables pour les intéressés (voir, en ce sens, arrêts du 27 janvier 2016, DF/Commission, T‑782/14 P, EU:T:2016:29, point 45 ; du 11 mai 2017, Deza/ECHA, T‑115/15, EU:T:2017:329, point 135, et du 3 juillet 2019, PT/BEI, T‑573/16, EU:T:2019:481, point 233).

66      S’agissant des points 167 à 169 et 171 à 177 de l’arrêt attaqué, les constatations opérées dans ces points se caractériseraient par une inexactitude matérielle.

67      À cet égard, le respect des droits de la défense exigerait que la personne concernée soit en mesure de faire connaître utilement son point de vue au sujet des éléments qui pourraient être retenus à sa charge dans l’acte en cause (arrêt du 9 novembre 2006, Commission/De Bry, C‑344/05 P, EU:C:2006:710, point 38).

68      Or, KN n’aurait jamais été entendu en ce qui concerne l’adoption de la mesure litigieuse. Ce n’est que par la décision litigieuse que KN aurait pris connaissance de cette mesure, sans que le CESE soit parvenu à démontrer le contraire au cours de la procédure devant le Tribunal.

69      KN soutient que le CESE ne lui a pas assuré l’accès au rapport complet de l’OLAF, circonstance sur laquelle le Tribunal ne prendrait pas position aux points 129 à 133 de l’arrêt attaqué.

70      Or, le Tribunal n’aurait pas établi que KN a eu la possibilité de se défendre au cours de la procédure devant le bureau du CESE et de se prononcer sur les conclusions présentées par l’OLAF sur la base desquelles la décision litigieuse, comportant la mesure litigieuse, a été adoptée.

71      S’agissant du point 167 de l’arrêt attaqué, auquel le Tribunal constate que, à la date de l’audition par le comité consultatif, le 6 mars 2020, KN avait déjà une connaissance relativement précise des faits qui lui étaient reprochés, ce constat serait fondé sur une présomption erronée selon laquelle KN, qui avait été préalablement interrogé par l’OLAF, avait déjà connaissance des faits qui lui étaient reprochés.

72      En ce qui concerne la situation de D, ancien membre du CESE, visé au point 169 de l’arrêt attaqué, en l’absence de toute référence à cette personne dans la version du rapport de l’OLAF à laquelle KN a eu accès, ce dernier aurait ignoré le fait que les allégations de D à son égard avaient été considérées comme étant crédibles et vraisemblables.

73      Cependant, c’est le comité consultatif qui aurait fait droit à la demande de KN de lui accorder un délai jusqu’à l’audition prévue le 17 mars 2020 pour lui permettre d’examiner le rapport de l’OLAF. Cette audition aurait, en outre, été annulée en raison de la crise sanitaire et des recommandations qui auraient été adoptées par ce comité consultatif sans procéder à une audition, dans un délai court et sans tenir compte du caractère exceptionnel des circonstances, de la pandémie et de l’incapacité de KN pour cause de maladie.

74      Dans ces circonstances, le constat fait par le Tribunal au point 171 de l’arrêt attaqué, selon lequel rien n’empêchait KN de transmettre par écrit au comité consultatif tout élément qu’il aurait jugé pertinent pour les besoins de sa défense, constituerait une erreur d’appréciation.

75      À cet égard, KN n’aurait jamais été prévenu du fait que les recommandations du comité consultatif seraient adoptées en l’absence de toute audition préalable de celui-ci.

76      S’agissant du point 197 de l’arrêt attaqué, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en constatant que l’absence de deux membres du comité consultatif n’avait pas d’importance pour l’adoption de ses recommandations, le code de conduite de 2019 ne prévoyant pas, à cet égard, un quorum requis des membres.

77      KN soutient que l’article 7 de ce code de conduite prévoit, de manière claire et précise, que six membres du comité consultatif doivent être présents pour adopter une recommandation.

78      Le CESE conteste l’argumentation soulevée par KN à l’appui de son moyen unique.

 Appréciation de la Cour

79      S’agissant, en premier lieu, de l’argument relatif aux points 73 et 102 de l’arrêt attaqué, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, la motivation d’un arrêt du Tribunal doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement du Tribunal, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la décision prise et à la Cour d’exercer son contrôle juridictionnel. La question de savoir si la motivation d’un arrêt du Tribunal est contradictoire ou insuffisante constitue une question de droit pouvant être invoquée dans le cadre d’un pourvoi. L’obligation de motivation n’impose toutefois pas au Tribunal de fournir un exposé qui suivrait, de manière exhaustive et un par un, tous les raisonnements articulés par les parties au litige. La motivation peut donc être implicite, à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles le Tribunal n’a pas fait droit à leurs arguments et à la Cour de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle (arrêt du 22 octobre 2020, EKETA/Commission, C‑273/19 P, non publié, EU:C:2020:852, point 88 et jurisprudence citée).

80      En l’espèce, il y a lieu de constater que, aux points 69 à 79 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné la recevabilité des conclusions de KN en annulation de la décision litigieuse en ce qui concerne la décision de le décharger de ses fonctions d’encadrement et de gestion du personnel.

81      À cette fin, d’une part, après avoir constaté, au point 73 de l’arrêt attaqué, que la mesure litigieuse avait un caractère définitif, le Tribunal a considéré, au point 74 de cet arrêt, que, compte tenu de la nature des tâches de KN et de leur ampleur, ladite décision produisait des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts de KN en modifiant, de manière caractérisée, sa situation juridique.

82      Eu égard à ces considérations, le Tribunal a jugé, au point 77 de l’arrêt attaqué, que la mesure litigieuse constituait un acte dont KN était le destinataire, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, qui lui faisait grief. Partant, le Tribunal a conclu, au point 79 de l’arrêt attaqué, que les conclusions de KN en annulation de la décision litigieuse en ce qui concerne la décision de le décharger de ses fonctions d’encadrement et de gestion du personnel étaient recevables.

83      D’autre part, s’agissant, en particulier, du point 102 de l’arrêt attaqué, il importe de rappeler que, à ce point, le Tribunal a constaté que la mesure litigieuse n’était pas de nature punitive et ne constituait pas une sanction, mais visait un objectif préventif, à savoir celui de garantir une meilleure protection des fonctionnaires et des agents du CESE.

84      Ce constat a été effectué dans le cadre de l’examen, par le Tribunal, du troisième moyen de la requête, tiré d’une violation des principes de non-rétroactivité, de sécurité juridique et de légalité des peines. Par ailleurs, ce constat a été précédé d’une considération, effectuée au point 99 de l’arrêt attaqué, selon laquelle le seul fait que la mesure litigieuse fasse grief à KN, ce qui justifie la recevabilité du recours en annulation sur ce point, ne saurait pour autant signifier qu’il convienne de qualifier ladite mesure de « sanction disciplinaire », au sens de l’article 8, paragraphe 3, deuxième alinéa, du code de conduite de 2019.

85      Ainsi, contrairement à ce que soutient KN, il n’existe aucune contradiction entre le point 73 et le point 102 de l’arrêt attaqué, les constats figurant à chacun de ces deux points découlant, dans le premier cas, de l’examen de la recevabilité des conclusions de la requête de KN devant le Tribunal et, dans le second cas, de l’examen du bien-fondé d’un moyen de cette requête.

86      En ce qui concerne l’argument selon lequel la mesure litigieuse devrait être considérée comme constituant une sanction administrative à caractère répressif, il convient de constater que cet argument, qui porte sur le bien-fondé de la motivation de l’arrêt attaqué, n’est étayé par aucune argumentation susceptible de démontrer une erreur de droit ou une dénaturation des faits prétendument commise par le Tribunal et doit donc être rejeté comme étant irrecevable.

87      Partant, l’argument relatif aux points 73 et 102 de l’arrêt attaqué doit être rejeté comme étant, en partie, non fondé et, en partie, irrecevable.

88      S’agissant, en deuxième lieu, de l’argument relatif au point 104 de l’arrêt attaqué, il convient d’examiner ce point 104 dans le contexte du raisonnement développé par le Tribunal aux points 100 à 102 de cet arrêt.

89      À cet égard, il y a lieu de relever que, dans le cadre de l’examen du troisième moyen de la requête, tiré d’une violation des principes de non-rétroactivité, de sécurité juridique et de légalité des peines, le Tribunal a, tout d’abord, constaté, au point 100 de l’arrêt attaqué, que, ainsi qu’il a été précisé par le CESE, la mesure litigieuse avait pour objectif de permettre à cet organe de se conformer à son obligation de protéger son personnel contre les risques de harcèlement.

90      Au point 101 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a, ensuite, précisé que, du point de vue de ses effets, la mesure litigieuse n’est équivalente à aucune des sanctions prévues à l’article 8, paragraphe 3, deuxième alinéa, du code de conduite de 2019, à savoir l’avertissement par écrit, la transcription de cet avertissement au procès-verbal du bureau et, le cas échéant, au procès-verbal de la session plénière ou encore la suspension temporaire de toute fonction de rapporteur, de président et de membre de groupe d’étude et la suspension temporaire de toute participation aux missions et aux réunions extraordinaires.

91      Enfin, le Tribunal a conclu, au point 102 de l’arrêt attaqué, que, au regard de son contenu et de ses effets, il ne saurait être considéré que la mesure litigieuse est de nature punitive et qu’elle constitue une sanction. En effet, sa finalité n’est pas de sanctionner, de pénaliser ou de blâmer le requérant pour un manquement éventuel aux obligations découlant du code de conduite, mais elle vise un objectif préventif, à savoir de garantir une meilleure protection des fonctionnaires et des agents du CESE, dans l’intérêt d’un bon fonctionnement du secrétariat du groupe I.

92      Au point 104 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a ajouté que, dans un contexte marqué par des tensions préjudiciables au bon fonctionnement du service, le bureau du CESE pouvait, dans les circonstances de l’espèce, estimer qu’il était dans l’intérêt du service de décharger le requérant de certaines tâches administratives relevant de l’exercice d’un pouvoir hiérarchique (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 7 mars 1990, Hecq/Commission, C‑116/88 et C‑149/88, EU:C:1990:98, point 22 ; du 28 octobre 2004, Meister/OHMI, T‑76/03, EU:T:2004:319, points 79 à 81, ainsi que du 19 octobre 2017, Bernaldo de Quirós/Commission, T‑649/16, non publié, EU:T:2017:736, point 40), sans que cela constitue, en même temps, eu égard au contenu et aux effets d’une telle mesure, une décision de nature disciplinaire.

93      Compte tenu du raisonnement mené par le Tribunal aux points 100 à 102 de l’arrêt attaqué, force est de constater qu’il n’apparaît pas que l’application par analogie de la jurisprudence de la Cour et du Tribunal, citée au point 104 de cet arrêt, ait été déterminante pour la reconnaissance, par le Tribunal, de la mesure litigieuse comme n’ayant pas un caractère punitif ou disciplinaire à l’égard de KN.

94      KN n’ayant démontré aucune dénaturation des faits qu’aurait commise le Tribunal au point 104 de l’arrêt attaqué, il convient de rejeter l’argument relatif à ce point comme étant non fondé.

95      S’agissant, en troisième lieu, de l’argument relatif au point 105 de l’arrêt attaqué, il convient, à titre liminaire, de relever que, ainsi qu’il a été rappelé aux points 89 à 92 du présent arrêt, dans le cadre de l’appréciation du troisième moyen de la requête, le Tribunal est arrivé à la conclusion que la mesure litigieuse n’avait pas un caractère punitif ou disciplinaire à l’égard de KN et que, dès lors, l’argument de ce dernier selon lequel le bureau du CESE lui aurait infligé une sanction en violation des principes de non-rétroactivité, de sécurité juridique et de légalité des peines devait être écarté.

96      Cela étant constaté, dans le développement de son raisonnement, le Tribunal a jugé, au point 105 de l’arrêt attaqué, sans commettre d’erreur de droit, que, conformément à l’article 9, paragraphe 8, du règlement intérieur du CESE, le bureau est notamment responsable de la bonne utilisation des ressources humaines et budgétaires dans l’exécution des tâches qui lui sont imparties par le traité. Le Tribunal a ajouté que, étant donné que la mesure litigieuse concernait la bonne utilisation des ressources humaines du CESE, en l’espèce celles du secrétariat du groupe I, le bureau du CESE était bien l’organe compétent pour adopter une telle mesure, au terme de la procédure prévue à l’article 8, paragraphe 3, premier alinéa, du code de conduite de 2019.

97      À cet égard, l’argument de KN selon lequel le code de conduite de 2019 ne serait pas applicable en l’espèce, compte tenu du principe de non-rétroactivité des peines, ne saurait prospérer dans la mesure où le Tribunal a jugé à bon droit que la mesure litigieuse n’avait pas un caractère disciplinaire.

98      Partant, l’argument relatif au point 105 de l’arrêt attaqué doit être rejeté comme étant non fondé.

99      S’agissant, en quatrième lieu, de l’argument relatif au respect des droits de la défense de KN et aux constatations opérées à cet égard par le Tribunal aux points 167 à 169 et 171 à 177 de l’arrêt attaqué, il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour, le Tribunal est seul compétent pour constater les faits, excepté dans le cas où l’inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, ainsi que pour apprécier les éléments de preuve retenus. La constatation de ces faits et l’appréciation de ces éléments ne constituent donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour (arrêt du 14 janvier 2021, ERCEA/Aristoteleio Panepistimio Thessalonikis, C‑280/19 P, non publié, EU:C:2021:23, point 45 et jurisprudence citée).

100    Une dénaturation doit apparaître de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (arrêt du 14 janvier 2021, ERCEA/Aristoteleio Panepistimio Thessalonikis, C‑280/19 P, non publié, EU:C:2021:23, point 46 et jurisprudence citée).

101    En outre, l’appréciation par le Tribunal des éléments de preuve qui lui sont soumis ne peut pas être remise en cause, sauf s’il est établi que cette juridiction a commis une erreur de droit (arrêt du 9 janvier 1997, Commission/Socurte e.a., C‑143/95 P, EU:C:1997:3, point 36 ainsi que jurisprudence citée).

102    En l’occurrence, force est de constater que KN ne conteste pas, en réalité, les constatations factuelles opérées par le Tribunal aux points 167 à 169 et 171 à 177 de l’arrêt attaqué, mais remet en cause sa conclusion, faite, notamment, au point 174 de cet arrêt, selon laquelle entre le 4 mars 2020, date à laquelle KN a reçu la version non confidentielle du rapport de l’OLAF, et le 9 juin 2020, date à laquelle la décision litigieuse a été adoptée, KN avait disposé d’un délai suffisant pour prendre utilement connaissance dudit rapport, faire valoir ses observations sur celui-ci et préparer sa défense.

103    Or, d’une part, l’argument soulevé par KN, relatif au droit de la défense, n’est pas étayé par une argumentation démontrant que le Tribunal a commis une erreur de droit et, d’autre part, il n’apparaît pas que la conclusion faite par le Tribunal, au point 174 de l’arrêt attaqué, sur la base des constatations factuelles opérées aux points 167 à 173 de cet arrêt constitue une dénaturation de ces éléments factuels.

104    Par conséquent, il convient de rejeter cet argument comme étant non fondé.

105    S’agissant, en cinquième et dernier lieu, de l’argument relatif au point 197 de l’arrêt attaqué et à l’article 7 du code de conduite de 2019, il convient de relever que, aux points 190 à 201 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné le second grief du deuxième moyen de la requête, tiré d’une violation du principe d’impartialité.

106    Plus particulièrement, au point 196 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé que KN n’avait pas expliqué, dans sa requête, dans quelle mesure l’absence des deux membres du groupe I, à savoir E et F, révélerait un parti pris ou un préjugé personnel.

107    Au point 197 de cet arrêt, le Tribunal a ajouté que, en toute hypothèse, la récusation de E répondait au souci d’éviter de porter atteinte à l’impartialité du comité consultatif, cette récusation ayant été décidée en raison de l’existence, en ce qui le concernait, d’un conflit d’intérêts. Par ailleurs, en ce qui concerne F, son absence n’était pas imputable au comité consultatif, étant donné qu’elle a, de sa propre initiative, décidé de ne pas prendre part aux délibérations du comité consultatif portant sur le cas du requérant. En tout état de cause, KN n’aurait pas expliqué la raison pour laquelle l’absence de ces deux membres était susceptible de soulever un doute légitime sur l’impartialité du comité consultatif, d’autant plus que les dispositions du code de conduite de 2019 ne prévoient pas que la faculté pour le comité consultatif d’émettre des recommandations soit subordonnée à l’existence d’un quelconque quorum de présence.

108    À cet égard, il convient de constater que KN n’explique pas dans son pourvoi, d’une manière suffisamment concrète, en quoi la prétendue erreur de droit commise par le Tribunal, en ce qui concerne le constat de celui-ci selon lequel le comité consultatif n’est pas soumis à une exigence de quorum lorsqu’il adopte les recommandations, affecterait le bien-fondé de l’examen par le Tribunal du respect du principe d’impartialité du comité consultatif, qui faisait l’objet du second grief du deuxième moyen de la requête de KN.

109    Il y a donc lieu de rejeter cet argument comme étant non fondé.

110    Aucun argument soulevé dans le cadre du moyen unique avancé par KN à l’appui de son pourvoi n’ayant été accueilli, il y a lieu de rejeter le pourvoi dans son intégralité.

 Sur les dépens

111    Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

112    Le CESE ayant conclu à la condamnation de KN aux dépens et ce dernier ayant succombé en son moyen unique, il y a lieu de le condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par le CESE.

Par ces motifs, la Cour (septième chambre) déclare et arrête :

1)      Le pourvoi est rejeté.


2)      KN est condamné à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par le Comité économique et social européen (CESE).

Passer

Biltgen

Arastey Sahún

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 6 octobre 2022.

Le greffier

Le président de la VIIème chambre

A. Calot Escobar

 

J. Passer


*      Langue de procédure : le français.

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