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Document 62024TJ0331

Rettens dom (Ottende Afdeling) af 3. september 2025 (Uddrag).
Juan Costa Pujadas mod Den Europæiske Unions Kontor for Intellektuel Ejendomsret.
EU-design – ugyldighedssag – registreret EU-design, som gengiver en hastighedsomskifter – ugyldighedsgrund – manglende individuel karakter – synlige elementer af en komponent af et sammensat produkt – begreberne »normal brug« og »synlighed« – artikel 4, stk. 2 og 3, og artikel 25, stk. 1, litra b), i forordning (EF) nr. 6/2002 – bevisbyrde.
Sag T-331/24.

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2025:824

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

3 septembre 2025 (*) (1)

« Dessin ou modèle de l’Union européenne – Procédure de nullité – Dessin ou modèle de l’Union européenne enregistré représentant un variateur de vitesse – Motif de nullité – Absence de caractère individuel – Caractéristiques visibles d’une pièce d’un produit complexe – Notions d’“utilisation normale” et de “visibilité” – Article 4, paragraphes 2 et 3, et article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 6/2002 – Charge de la preuve »

Dans l’affaire T‑331/24,

Juan Costa Pujadas, demeurant à L’Ametlla del Vallès (Espagne), représenté par Mes R. Guerras Mazón et M. C. Pérez Serres, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme E. Nicolás Gómez, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Yasunimotor, SL, établie à Canovelles (Espagne), représentée par Me E. Sugrañes Coca, avocate,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de MM. A. Kornezov (rapporteur), président, G. De Baere et D. Petrlík, juges,

greffier : Mme H. Eriksson, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 8 mai 2025,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, le requérant, Juan Costa Pujadas, demande l’annulation de la décision de la troisième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 19 avril 2024 (affaire R 1315/2023‑3) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 19 janvier 2022, l’intervenante, Yasunimotor, SL, a présenté devant l’EUIPO une demande en nullité du dessin ou modèle de l’Union européenne enregistré à la suite d’une demande déposée le 25 mai 2005 et représenté dans les vues suivantes :

Image not found1.1

Image not found1.2

Image not found1.3

Image not found1.4

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Image not found1.6

Image not found1.7

3        Le produit auquel le dessin ou modèle, dont la nullité était demandée, est destiné à être appliqué relève des classes 12-11 et 12-16 au sens de l’arrangement de Locarno du 8 octobre 1968 instituant une classification internationale pour les dessins et modèles industriels, tel que modifié, et correspondait à la description suivante : « Motocycles » (ci-après les « motos »).

4        Le motif invoqué à l’appui de la demande en nullité était celui visé à l’article 25, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement (CE) no 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles de l’Union européenne (JO 2002, L 3, p. 1), dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur du règlement (UE) 2024/2822 du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2024 (JO L, 2024/2822), lu conjointement avec l’article 4, paragraphe 2, et l’article 8, paragraphe 1, du même règlement.

5        La demande en nullité était fondée sur un défaut de nouveauté et de caractère individuel du dessin ou modèle contesté, notamment du fait que la pièce à laquelle est appliqué ledit dessin ou modèle, une fois appliquée, ne resterait pas visible lors d’une utilisation normale de ce produit.

6        Le 26 avril 2023, la division d’annulation a fait droit à la demande en nullité.

7        Le 23 juin 2023, le requérant a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation.

8        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours au motif que le requérant n’avait pas fourni d’éléments de preuve convaincants permettant d’infirmer les conclusions de la division d’annulation selon lesquelles la partie du variateur de vitesse faisant l’objet du dessin ou modèle contesté, une fois intégrée dans le produit complexe, n’est pas clairement visible lors de l’utilisation normale de celui-ci, comme l’exige pourtant l’article 25, paragraphe 1, sous b) du règlement no 6/2002, dans sa version antérieure, lu conjointement avec l’article 4, paragraphe 2, de ce même règlement.

 Conclusions des parties

9        Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

10      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens en cas de convocation à une audience.

11      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

12      À l’appui de son recours, le requérant invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement no 6/2002, dans sa version antérieure, lu conjointement avec l’article 4, paragraphe 2, du même règlement, lequel s’articule, en substance, en trois griefs, tirés, le premier, d’une appréciation erronée des éléments de preuve, le deuxième, du fait que la chambre de recours lui aurait imposé une charge de la preuve excessive et, le troisième, d’erreurs de droit et d’appréciation relatives à la condition de visibilité prévue à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 6/2002.

13      En vertu de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement no 6/2002, dans sa version antérieure, un dessin ou modèle de l’Union européenne ne peut être déclaré nul que s’il ne remplit pas les conditions fixées aux articles 4 à 9 dudit règlement.

14      Aux termes de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 6/2002, un dessin ou modèle de l’Union européenne appliqué à un produit qui constitue une pièce d’un produit complexe n’est considéré comme nouveau et présentant un caractère individuel que dans la mesure où, d’une part, la pièce, une fois appliquée au produit complexe, reste visible lors d’une utilisation normale de ce produit [article 4, paragraphe 2, sous a), dudit règlement] et, d’autre part, les caractéristiques visibles de la pièce remplissent en tant que telles les conditions de nouveauté et de caractère individuel [article 4, paragraphe 2, sous b), du même règlement]. En outre, selon l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 6/2002, par « utilisation normale », on entend l’utilisation par l’utilisateur final, à l’exception de l’entretien, du service ou de la réparation.

15      En l’espèce, le dessin ou modèle contesté est destiné à être appliqué à un variateur de vitesse, lequel est une pièce d’un produit complexe, en l’occurrence une moto. Ce dessin ou modèle de l’Union européenne, reproduit au point 2 ci-dessus, est composé de deux éléments principaux, à savoir un corps en forme de cloche et un plateau mobile conique. Les vues 1.1 et 1.2 illustrent le corps en forme de cloche, qui constitue la partie supérieure du modèle, tandis que les vues 1.3 et 1.4 illustrent le plateau mobile conique. Les vues 1.5 à 1.7 montrent la manière dont la cloche vient s’assembler au plateau mobile. Les vues 1.6 et 1.7 permettent, en outre, de visualiser la structure interne du variateur de vitesse. Ces différentes vues montrent ainsi que le dessin ou modèle contesté comprend les parties allant du plateau mobile conique au corps en forme de cloche.

16      Il est constant entre les parties que le variateur de vitesse auquel le dessin ou modèle contesté est destiné à être appliqué peut faire l’objet de deux montages différents, à savoir une position de « montage extérieur » ou une position de « montage intérieur ».

17      Il ressort de la décision attaquée qu’un « montage extérieur » signifie que le variateur de vitesse est monté à l’extérieur de la moto, rendant ainsi certains composants de celui-ci, notamment la cloche, facilement accessibles et, dans une large mesure, visibles.

18      Un « montage intérieur » signifie, en revanche, que le variateur de vitesse est monté de manière à ce qu’il reste partiellement caché derrière d’autres parties de la moto, telles qu’un plateau conique fixe, lequel ne fait pas partie du dessin ou modèle contesté.

19      Les parties ne contestent pas ces constatations factuelles effectuées par la chambre de recours.

 Sur le premier grief, tiré d’une appréciation erronée des éléments de preuve

20      Le requérant conteste la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les éléments de preuve qu’il a présentés ne permettaient pas de démontrer que le montage extérieur du variateur de vitesse sur une moto constituait une utilisation normale de celle-ci. Il soutient, sur la base de divers éléments de preuve, que, dans le cadre d’une utilisation normale d’une moto possédant un variateur de vitesse en position de montage extérieur, le dessin ou modèle contesté est visible.

21      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments du requérant.

22      À titre liminaire, il convient de préciser qu’il est constant entre les parties que, sur les « motos de route », le variateur de vitesse est monté en position extérieure et que celui-ci est toujours recouvert d’un boîtier pour des raisons de sécurité, ce qui le rend ainsi invisible lors de l’utilisation normale de la moto.

23      S’agissant des « motos de compétition », il est également constant entre les parties que le variateur de vitesse n’est pas recouvert d’un boîtier, en raison de la nécessité d’intervenir rapidement sur les motos en cas de problème technique, mais également afin d’alléger le poids de celles-ci. Les parties s’accordent aussi sur le fait que, sur les motos de compétition, il est techniquement possible de monter le variateur de vitesse tant en position intérieure qu’en position extérieure.

24      Il convient de préciser à cet égard que l’analyse du premier grief du moyen unique suppose de déterminer si le requérant a démontré, à suffisance de droit, que le montage extérieur d’un variateur de vitesse auquel le dessin ou modèle contesté est destiné à être appliqué correspond à une utilisation normale d’une moto de compétition au sens de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement no 6/2002, dans sa version antérieure, lu conjointement avec l’article 4, paragraphes 2 et 3, de ce même règlement.

25      Au soutien de ses arguments, le requérant se fonde sur plusieurs illustrations et déclarations sous serment.

26      Premièrement, le requérant fait référence à deux vidéos, enregistrées par ses soins, sur lesquelles il fait fonctionner lui-même, sur un « banc d’essai », une moto de compétition avec le variateur de vitesse en position de montage intérieur, puis extérieur. Dans sa requête, sous les dénominations « illustration 2 » et « illustration 3 », le requérant présente deux captures d’écran de ces vidéos, le montage extérieur correspondant à l’illustration 2 et le montage intérieur correspondant à l’illustration 3. Ces illustrations sont reproduites ci-après :

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27      Le requérant fait également référence à des photographies issues du magazine Moto verde no 426, paru en janvier 2014, dont une partie est reproduite dans l’illustration 6 de la requête, sur lesquelles il a lui-même entouré en rouge les parties visibles du variateur de vitesse en position de montage intérieur, tout en soutenant que la moto de compétition concernée peut également être équipée d’un variateur de vitesse en position de montage extérieur. Ces photographies sont reproduites ci-après :

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28      Deuxièmement, le requérant s’appuie sur une déclaration sous serment rédigée, selon lui, par un spécialiste dans le domaine des motos, dans laquelle ce dernier indique que les variateurs de vitesse peuvent être montés en position de montage intérieur ou extérieur, sans que cela altère le fonctionnement ou la puissance de la moto. Le requérant s’appuie également sur sa propre déclaration sous serment, dans laquelle il affirme que le variateur de vitesse peut être monté en position de montage intérieur ou extérieur, sans perte de performance, ainsi que sur celle de sa fille, ancienne pilote de motos de compétition, laquelle atteste que le variateur de vitesse est toujours visible sur les motocross 50cc notamment, facilitant sa réparation en cas de casse.

29      À cet égard, s’agissant, tout d’abord, de l’illustration 2, la chambre de recours a indiqué que celle-ci est issue d’une vidéo réalisée par le requérant dans un atelier, ce que ce dernier ne conteste pas. Or, l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 6/2002 prévoit expressément que l’entretien, le service ou la réparation ne sont pas considérés comme une « utilisation normale » du produit en cause. Une telle vidéo, réalisée dans un atelier, ne permet donc pas de prouver la présence effective sur le marché ou l’utilisation sur la route ou en compétition d’une moto disposant d’un montage extérieur visible, ainsi que l’a indiqué à juste titre la chambre de recours.

30      S’agissant, ensuite, des illustrations 3 et 6, la chambre de recours a constaté, à juste titre, que ces images illustrent un montage intérieur du variateur de vitesse sur une moto de compétition. Partant, ainsi que le requérant l’a reconnu lors de l’audience, elles ne sont pas pertinentes pour l’examen du présent grief, lequel ne porte, comme cela est précisé au point 24 ci-dessus, que sur les éléments de preuve relatifs au montage extérieur dudit variateur.

31      S’agissant, enfin, de la déclaration sous serment du requérant, il convient de relever, à l’instar de la chambre de recours, que celle-ci se borne à affirmer qu’il est techniquement possible de monter un variateur de vitesse en position de montage extérieur sur une moto de compétition, ce qui est par ailleurs constant entre les parties. En revanche, elle n’apporte pas d’indications quant à la question de savoir si un tel montage relève d’une utilisation normale d’une telle moto. Il en va de même pour la déclaration sous serment rédigée, selon le requérant, par un spécialiste dans le domaine des motos.

32      S’agissant de la déclaration sous serment de la fille du requérant, qui est, selon ce dernier, une ancienne pilote de motos de compétition, il suffit de faire observer que le requérant se contente d’y renvoyer de manière globale, sans en tirer un quelconque argument spécifique. En tout état de cause, interrogé lors de l’audience, le requérant a concédé que la photographie reproduite dans cette déclaration sous serment, afin d’illustrer les propos contenus dans celle-ci, n’était pas suffisamment nette, de sorte qu’il est pratiquement impossible de distinguer, sur la base de cette photographie, le variateur de vitesse auquel le dessin ou modèle contesté aurait éventuellement été appliqué.

33      Troisièmement, le requérant fait référence à deux captures d’écran, dénommées « illustration 4 » dans la requête, issues d’une vidéo, présentée par l’intervenante au cours de la procédure administrative, intitulée « Démonter et monter le variateur J. Costa ». Ces captures d’écran sont reproduites ci-après :

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34      La vidéo mentionnée au point 33 ci-dessus est, selon le requérant, un tutoriel montrant comment retirer le boîtier d’un variateur de vitesse. Le requérant reconnaît, tant dans la requête que lors de l’audience, que cette vidéo et les captures d’écran qui en ont été faites montrent une « moto de route », disposant d’un variateur de vitesse en position de montage extérieur, recouvert par un boîtier de protection, lequel est retiré pour laisser apparaître ledit variateur et que, pour ce type de motos, ledit variateur est entièrement caché en dessous dudit boîtier de protection, de sorte que ces éléments de preuve ne permettent pas, en soi, de prouver la visibilité du dessin ou modèle contesté lors de l’utilisation normale de la moto. Cependant, le requérant fait valoir que lesdits éléments ont pour objectif de prouver que le montage extérieur d’un variateur de vitesse est « parfaitement normal » et techniquement réalisable. Or, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 31 ci-dessus, le fait qu’il soit techniquement possible de monter un variateur de vitesse en position extérieure sur une moto de compétition, sans boîtier de protection, ne signifie pas qu’un tel montage correspond à l’utilisation normale d’une telle moto.

35      Quatrièmement, le requérant se fonde également sur une photographie d’une moto de compétition, issue d’un hyperlien, dénommée « illustration 5 » dans la requête, sur laquelle figure une moto de compétition disposant d’un variateur de vitesse en position de montage extérieur, laquelle démontrerait que ce variateur est visible lors de l’utilisation normale de la moto. Cette photographie est reproduite ci-après :

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36      Or, dans la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que l’hyperlien mentionné au point 35 ci-dessus était inactif lorsqu’elle a tenté de l’activer. Ainsi, bien que la photographie ait également été présentée dans les écritures du requérant devant la chambre de recours, cette dernière ne pouvait pas vérifier à quelle date cette photographie avait été prise ni dans quel contexte. Comme l’a souligné à juste titre la chambre de recours, le Tribunal a déjà jugé qu’une chambre de recours ne pouvait prendre en considération un lien Internet dont le contenu était devenu inaccessible ou avait changé, car cela rendait sa vérification impossible, ne permettant ainsi pas audit lien de constituer une preuve fiable et valide [voir, par analogie, arrêts du 7 février 2007, Kustom Musical Amplification/OHMI (Forme d’une guitare), T‑317/05, EU:T:2007:39, point 59, et du 6 avril 2022, Mandelay/EUIPO – Qx World (QUEST 9), T‑516/20, non publié, EU:T:2022:227, point 131]. Partant, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que ledit hyperlien, sans possibilité de vérification de son contenu, ne constituait pas une preuve valable et qu’il ne saurait donc être pris en considération.

37      Par ailleurs, comme le souligne l’intervenante, l’illustration reproduite au point 35 ci-dessus fait apparaître une courroie de moto pendant sur le guidon. Selon l’intervenante, cela tend à indiquer que la moto n’était pas en fonctionnement, mais qu’elle était plutôt en réparation.

38      En tout état de cause, comme l’a souligné à juste titre l’EUIPO lors de l’audience, une seule photographie, sans précision quant au contexte dans lequel celle-ci a été prise, ne suffit pas à démontrer une utilisation normale de ce type de motos, en l’absence d’autres éléments vérifiables et concordants.

39      Cinquièmement, en se fondant sur l’illustration 7 de la requête, laquelle représente une capture d’écran issue des vidéos mentionnées au point 26 ci-dessus et sur laquelle est visible le réservoir de carburant de la moto présentée dans lesdites vidéos, portant l’inscription « Granja L’Ametlla », le requérant soutient qu’il s’agit de la même moto que celle figurant sur l’illustration 6. Il en déduit que, prises ensemble, les illustrations 2, 3 et 7 démontrent que la moto figurant sur l’illustration 6 peut également fonctionner avec un variateur de vitesse en position de montage extérieur, nonobstant le fait qu’elle est présentée avec un montage intérieur sur ladite illustration. Cette dernière est reproduite ci-après :

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40      Cet argument n’infirme aucunement les considérations énoncées aux points 26 à 38 ci-dessus. En effet, le fait que les illustrations 2, 3 et 7 montrent la même moto que celle figurant sur l’illustration 6 est sans incidence sur la conclusion selon laquelle aucune de ces illustrations, prise isolément ou avec les autres, ne permet de démontrer que le montage extérieur du variateur de vitesse correspond à une utilisation normale des motos de compétition.

41      Eu égard à ce qui précède, force est de constater, à l’instar de l’EUIPO, que les éléments de preuve présentés par le requérant se bornent, en substance, à démontrer qu’une moto de compétition peut, théoriquement, fonctionner lorsqu’elle dispose d’un variateur de vitesse en position de montage extérieur, lequel n’est alors pas recouvert d’un boîtier de protection. Toutefois, ces éléments ne prouvent pas qu’un tel montage correspond à l’utilisation normale d’une telle moto.

42      À cet égard, le Tribunal a jugé que, bien que les utilisations potentielles d’un dessin ou modèle ne soient pas à exclure, il y a toutefois lieu de relever qu’un usage purement hypothétique du dessin ou modèle en cause ne saurait être pris en compte [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 3 octobre 2014, Cezar/OHMI – Poli-Eco (Insert), T‑39/13, EU:T:2014:852, point 28].

43      Dès lors, la chambre de recours a conclu à bon droit que le requérant n’avait pas démontré que le dessin ou modèle contesté appliqué à un variateur de vitesse en position de montage extérieur sur une moto de compétition, non recouvert d’un boîtier de protection, correspondait à une utilisation normale d’une moto, au sens de l’article 4, paragraphes 2 et 3, du règlement no 6/2002.

44      Partant il y a lieu de rejeter le premier grief du requérant comme non fondé.

 Sur le deuxième grief, tiré de ce que la chambre de recours aurait imposé au requérant une charge de la preuve excessive

45      Le requérant soutient, à titre subsidiaire, que la charge de la preuve que la chambre de recours lui a imposée aux fins de la démonstration de la visibilité, lors de l’utilisation normale d’une moto de compétition, du variateur de vitesse en position de montage extérieur, est excessive. Il fait valoir que, si, lors de l’introduction d’une demande en nullité, le titulaire d’un dessin ou modèle de l’Union européenne n’a pas commencé l’exploitation commerciale du produit et si ce type de produits n’existait pas auparavant, ce titulaire se verrait dans l’impossibilité matérielle de démontrer que ledit dessin ou modèle est visible durant l’utilisation normale du produit complexe. Dans une telle hypothèse, il serait raisonnable de n’exiger que la démonstration du fait que, lors d’une « éventuelle » utilisation normale du produit complexe, le dessin ou modèle de l’Union européenne serait visible.

46      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments du requérant.

47      L’article 63, paragraphe 1, du règlement no 6/2002, dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur du règlement 2024/2822, relatif à l’examen d’office des faits, dispose que, dans une action en nullité, l’examen de l’EUIPO est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties. Cette disposition vise, notamment, la base factuelle des décisions de l’EUIPO, à savoir les faits et les preuves sur lesquels celles‑ci peuvent être valablement fondées. Ainsi, la chambre de recours, en statuant sur un recours mettant fin à une procédure de nullité, ne saurait fonder sa décision que sur les faits et les preuves présentés par les parties [voir arrêt du 5 juillet 2017, Gamet/EUIPO – « Metal-Bud II » Robert Gubała (Poignée de porte), T‑306/16, non publié, EU:T:2017:466, point 31 et jurisprudence citée]. L’article 52, paragraphe 2, du règlement no 6/2002 dispose que la demande en nullité doit être présentée par écrit et motivée. L’article 28, paragraphe 1, sous b), i) et vi), du règlement (CE) no 2245/2002 de la Commission, du 21 octobre 2002, portant modalités d’application du règlement no 6/2002 (JO 2002, L 341, p. 28), précise qu’une demande en nullité doit contenir une déclaration précisant les motifs de nullité ainsi que les faits, preuves et observations présentés à l’appui de cette demande.

48      Il découle ainsi des dispositions mentionnées au point 47 ci-dessus que, d’une part, il appartient à la partie ayant introduit la demande en nullité de fournir à l’EUIPO les indications nécessaires pour démontrer que le dessin ou modèle en cause ne peut être valablement enregistré (voir, en ce sens, arrêt du 21 septembre 2017, Easy Sanitary Solutions et EUIPO/Group Nivelles, C‑361/15 P et C‑405/15 P, EU:C:2017:720, point 65). D’autre part, il appartient au demandeur en nullité de fournir les éléments de nature à démontrer la réalité de ce motif (voir, en ce sens, arrêt du 21 septembre 2017, Easy Sanitary Solutions et EUIPO/Group Nivelles, C‑361/15 P et C‑405/15 P, EU:C:2017:720, point 59 et jurisprudence citée).

49      Il ressort donc de l’article 63, paragraphe 1, et de l’article 52, paragraphe 2, du règlement no 6/2002 ainsi que de l’article 28, paragraphe 1, sous b), i) et vi), du règlement d’application no 2245/2002 que la charge de la preuve repose, dans un premier temps, sur le demandeur en nullité.

50      En l’espèce, l’intervenante, en sa qualité de demanderesse en nullité, a produit un ensemble d’éléments de preuve visant à démontrer que le dessin ou modèle contesté ne remplissait pas, notamment, la condition de visibilité prévue à l’article 25, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement no 6/2002, dans sa version antérieure, lu conjointement avec l’article 4, paragraphes 2 et 3, de ce même règlement.

51      Dans ces circonstances, il appartenait au requérant, en tant que titulaire du dessin ou modèle contesté, de réfuter les allégations mentionnées au point 50 ci-dessus en apportant des éléments de preuve contraires, de nature à démontrer que, lors d’une utilisation normale, le variateur de vitesse, auquel ce dessin ou modèle est appliqué, reste visible lorsqu’il est appliqué au produit complexe, tel qu’une moto.

52      Partant, en concluant que le requérant n’était pas parvenu à démontrer que, lors d’une utilisation normale d’une moto de compétition, le variateur de vitesse en position de montage extérieur était visible pour l’utilisateur ou l’observateur externe, la chambre de recours ne lui a pas imposé une charge de la preuve excessive.

53      Par ailleurs, lors de l’audience, le requérant a précisé que son argument, énoncé au point 45 ci-dessus, visait une situation purement hypothétique, à savoir celle dans laquelle le dessin ou modèle de l’Union européenne ne serait pas encore appliqué à des produits mis sur le marché. Or, il n’appartient pas au Tribunal, dans le cadre du contrôle de la légalité, d’examiner des arguments de nature purement hypothétique.

54      En effet, conformément à la jurisprudence citée au point 42 ci-dessus, un usage purement hypothétique du dessin ou modèle contesté ne saurait être pris en compte, d’autant plus que, en l’espèce, ce dessin ou modèle a été enregistré en 2005, de sorte que le requérant a disposé de suffisamment de temps pour l’appliquer à des produits réels sur le marché.

55      Partant, le deuxième grief du moyen unique du requérant doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le troisième grief, tiré d’erreurs de droit et d’appréciation relatives à la condition de visibilité prévue à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 6/2002

56      Dans la décision attaquée, s’agissant du montage intérieur du variateur de vitesse, la chambre de recours a indiqué que, bien que le dessin ou modèle contesté, appliqué au variateur de vitesse monté en position de montage intérieur soit partiellement visible sur certaines images, notamment l’illustration 6, ledit variateur n’était cependant pas clairement visible lors de l’utilisation normale de la moto, celui-ci étant couvert par le plateau conique fixe, lequel ne fait pas partie du dessin ou modèle contesté.

57      Pour parvenir à la conclusion mentionnée au point 56 ci-dessus, d’une part, la chambre de recours a souligné que, bien que la pièce d’un produit complexe ne doive pas être visible en permanence lors de l’utilisation normale dudit produit, elle devait cependant être visible « dans son ensemble » à un moment donné. Elle a ainsi considéré que la division d’annulation avait conclu à juste titre que, sous l’angle de vue latéral habituel de la moto, le variateur de vitesse correspondant au dessin ou modèle contesté, en position de montage intérieur, était pratiquement invisible pour un observateur externe. S’agissant des vues supplémentaires disponibles, la chambre de recours a relevé que le variateur de vitesse n’était que partiellement visible et que le requérant n’avait pas démontré qu’à un moment quelconque de l’utilisation normale de la moto, il était possible d’apercevoir ledit variateur « dans son intégralité ».

58      D’autre part, en souscrivant aux conclusions de la division d’annulation, la chambre de recours a également relevé que le requérant n’avait pas démontré qu’il était possible de percevoir avec suffisamment de clarté et de détail les contours et autres caractéristiques esthétiques dudit variateur pour en apprécier, par exemple, le caractère individuel. Elle a ajouté que les éléments de preuve confirmaient simplement que d’autres éléments mécaniques ne faisant pas partie du dessin ou modèle contesté, tels que le plateau conique fixe, empêchaient de voir suffisamment clairement la partie du variateur de vitesse à laquelle le dessin ou modèle contesté était appliqué.

59      La chambre de recours en a donc conclu que le requérant n’avait pas fourni de preuves suffisantes pour infirmer la conclusion de la division d’annulation selon laquelle le dessin ou modèle contesté, appliqué à un variateur de vitesse en position de montage intérieur, ne répondait pas à la condition de visibilité découlant de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 6/2002 lors de l’utilisation normale de la moto.

60      Premièrement, le requérant fait valoir que la chambre de recours a commis une erreur de droit dans l’interprétation de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 6/2002 en considérant que le variateur de vitesse devait être visible dans sa totalité à un moment donné. Il soutient que même une visibilité partielle du dessin ou modèle contesté à un moment donné de son utilisation est susceptible de satisfaire à la condition de visibilité énoncée à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 6/2002.

61      Deuxièmement, le requérant conteste l’appréciation de la chambre de recours de la visibilité du dessin ou modèle contesté lorsqu’une moto de compétition dispose d’un variateur de vitesse en position de montage intérieur, dans la mesure où la chambre de recours aurait pris en compte uniquement l’angle de vue latéral, alors que, lors de l’utilisation normale de ladite moto, l’utilisateur ou l’observateur externe n’est pas limité à cet angle de vue. L’angle de vue « oblique », utilisé lors de l’inspection de la moto, serait également habituel et laisserait apercevoir le variateur de vitesse de manière plus précise.

62      L’EUIPO souscrit à l’interprétation de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 6/2002 avancée par le requérant. La condition de visibilité peut être, selon lui, remplie même si le dessin ou modèle de l’Union européenne n’est pas visible dans son intégralité, mais seulement partiellement, et ce durant toute l’utilisation du produit complexe ou bien seulement à un moment donné. L’EUIPO considère toutefois que cette erreur est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, dans la mesure où la chambre de recours a également considéré, à juste titre, qu’il n’était pas possible de distinguer avec suffisamment de clarté et de détail les parties visibles du dessin ou modèle contesté, lorsqu’il est appliqué à un variateur de vitesse en position de montage intérieur, aux fins de l’appréciation, par exemple, de son caractère individuel. Dès lors, l’EUIPO considère que, pour ce motif, la chambre de recours a correctement conclu que l’exigence de visibilité de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 6/2002 n’était, en tout état de cause, pas satisfaite.

63      L’intervenante soutient que, lorsqu’une moto est équipée d’un variateur de vitesse en position de montage intérieur, le corps dudit variateur est tourné vers l’intérieur, de sorte qu’il n’est pas suffisamment visible, bien qu’il ne soit pas entièrement caché. Elle conteste l’argument du requérant selon lequel la visibilité peut être améliorée avec un angle de vue oblique. Même dans ce cas, la visibilité resterait minime, empêchant d’obtenir une impression globale du variateur de vitesse. S’agissant de la question de savoir si l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 6/2002 exige une visibilité complète du dessin ou modèle de l’Union européenne, l’intervenante fait valoir que cette disposition requiert une visibilité durant un certain moment de l’utilisation normale, de sorte que toutes les caractéristiques essentielles dudit dessin ou modèle puissent être appréciées et qu’une impression globale de celui-ci puisse être obtenue.

64      En premier lieu, il convient d’examiner si, comme le font valoir le requérant et l’EUIPO, en considérant, au point 65 de la décision attaquée, que la pièce à laquelle le dessin ou modèle contesté est destiné à être appliqué doit être visible « dans son ensemble » à un moment donné, lors de l’utilisation normale du produit complexe, la chambre de recours a commis une erreur de droit.

65      À cet égard, il convient de rappeler que, conformément à l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 6/2002, dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur du règlement 2024/2822, la protection d’un dessin ou modèle de l’Union européenne n’est assurée que dans la mesure où celui-ci est nouveau et présente un caractère individuel. En outre, et ainsi qu’il a été rappelé au point 14 ci-dessus, il ressort de l’article 4, paragraphe 2, de ce même règlement qu’un dessin ou modèle de l’Union européenne appliqué à un produit qui constitue une pièce d’un produit complexe n’est considéré comme étant nouveau et présentant un caractère individuel que dans la mesure où, d’une part, la pièce, une fois appliqué au produit complexe, reste visible lors d’une utilisation normale de ce produit [article 4, paragraphe 2, sous a), dudit règlement] et, d’autre part, les caractéristiques visibles de la pièce remplissent en tant que telles les conditions de nouveauté et de caractère individuel [article 4, paragraphe 2, sous b), du même règlement]. Il s’agit là de deux conditions cumulatives, comme le démontre l’emploi de la conjonction « et ». Ainsi, il ressort d’une lecture conjointe de ces deux conditions que, pour qu’un tel dessin ou modèle de l’Union européenne soit protégé, il faut que la pièce à laquelle il est appliqué soit visible lors de l’utilisation normale du produit complexe en cause, sans pour autant qu’il soit exigé que ladite pièce soit intégralement visible.

66      En effet, ce ne sont que les « caractéristiques visibles » de la pièce à laquelle ledit dessin ou modèle de l’Union européenne est appliqué qui doivent remplir « en tant que telles » les conditions de nouveauté et de caractère individuel. Il s’ensuit que les caractéristiques invisibles de ladite pièce ne sont pas prises en compte lors de l’appréciation du caractère nouveau et individuel du dessin ou modèle de l’Union européenne en cause et ne peuvent, par conséquent, pas faire l’objet de protection au titre du règlement no 6/2002.

67      Une visibilité partielle de la pièce en cause, une fois appliquée au produit complexe, lors d’une utilisation normale de ce produit, n’exclut donc pas la protection des caractéristiques visibles dudit dessin ou modèle, pourvu qu’elles remplissent en tant que telles les conditions de nouveauté et de caractère individuel.

68      L’interprétation selon laquelle la pièce doit être visible « dans son intégralité » à un moment donné de l’utilisation normale du produit en cause risque de vider de son sens l’article 4, paragraphe 2, sous b), du règlement no 6/2002, lequel ne vise pas toutes les caractéristiques de la pièce, mais uniquement ses caractéristiques visibles, ce qui sous-entend que les autres caractéristiques de celle-ci peuvent demeurer invisibles.

69      Cette conclusion est corroborée par le considérant 12 du règlement no 6/2002, lequel indique que « [l]a protection ne devrait pas être étendue aux pièces qui ne sont pas visibles lors d’une utilisation normale d’un produit ni aux caractéristiques d’une pièce qui ne sont pas visibles lorsque celle-ci est montée, ni aux caractéristiques des pièces qui ne rempliraient pas, en tant que telles, les exigences de nouveauté et de caractère individuel. Les caractéristiques d’un dessin ou modèle qui sont exclues de la protection pour ces motifs ne devraient, par conséquent, pas être prises en considération pour apprécier si d’autres caractéristiques de ce dessin ou modèle remplissent les conditions d’obtention de la protection ».

70      Le considérant 12 du règlement no 6/2002 envisage ainsi clairement l’hypothèse où seules certaines caractéristiques d’une pièce sont visibles lors d’une utilisation normale d’un produit et où celles-ci peuvent faire l’objet d’une protection, à condition qu’elles remplissent, en tant que telles, les exigences de nouveauté et de caractère individuel.

71      De même, la Cour a déjà jugé que la limitation de la protection juridique des dessins ou modèles aux caractéristiques visibles de la pièce concernée s’explique par le fait que l’apparence de cette pièce découle exclusivement de celles-ci. Une telle interprétation se trouve confortée par l’économie du règlement no 6/2002 ainsi que par l’objectif poursuivi par l’article 4, paragraphe 2, de ce règlement. En effet, la protection d’un dessin ou modèle en vertu de ce règlement ne vaut que pour les caractéristiques qui déterminent l’apparence d’un produit ou d’une partie de produit (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 16 février 2023, Monz Handelsgesellschaft International, C‑472/21, EU:C:2023:105, points 42 et 43).

72      La chambre de recours a donc commis une erreur de droit en considérant, au point 65 de la décision attaquée, que le variateur de vitesse auquel était appliqué le dessin ou modèle contesté devait être visible « dans son ensemble » à un moment donné lors de l’utilisation normale du produit complexe auquel ce variateur est appliqué et, au point 67 de cette décision, que le requérant n’avait pas démontré qu’à un moment quelconque de l’utilisation normale de la moto, il était possible de distinguer « dans son intégralité » le variateur de vitesse, en position de montage intérieur, auquel le dessin ou modèle contesté était appliqué.

73      En second lieu, il convient d’examiner si cette erreur de droit entache d’illégalité la décision attaquée.

74      Une telle erreur de droit ne saurait entraîner l’annulation de la décision attaquée que si elle a eu une influence sur la conclusion retenue par la chambre de recours [voir, en ce sens, arrêt du 3 juin 2015, Giovanni Cosmetics/OHMI – Vasconcelos & Gonçalves (GIOVANNI GALLI), T‑559/13, EU:T:2015:353, point 135 (non publié) et jurisprudence citée].

75      Il convient de relever, comme le fait valoir l’EUIPO, que la chambre de recours a également considéré, en faisant sienne l’analyse de la division d’annulation, que, même en tenant compte de la visibilité partielle du variateur de vitesse en position de montage intérieur, il n’était pas possible de distinguer avec suffisamment de clarté et de détail les contours et autres caractéristiques esthétiques du dessin ou modèle contesté aux fins de l’examen de leur caractère nouveau et individuel.

76      À cet égard, il ressort de la jurisprudence qu’il est nécessaire que la partie de produit ou la pièce de produit complexe faisant l’objet de la protection soit visible et délimitée par des caractéristiques qui constituent son apparence particulière, à savoir par des lignes, des contours, des couleurs, des formes ou encore une texture particulière. Cela suppose que l’apparence de cette partie de produit ou de cette pièce de produit complexe soit capable, par elle-même, de produire une impression globale et ne puisse pas se fondre complètement dans le produit d’ensemble (arrêt du 28 octobre 2021, Ferrari, C‑123/20, EU:C:2021:889, point 50).

77      Ainsi que le requérant l’a concédé lors de l’audience, sous un angle de vue latéral, le variateur de vitesse en position de montage intérieur est pratiquement invisible, en ce qu’il est couvert par le plateau conique fixe, qui ne fait pas partie du dessin ou modèle contesté, comme l’a relevé la chambre de recours au point 66 de la décision attaquée. Le requérant a également confirmé que, sous un angle de vue « oblique », par exemple lorsque l’utilisateur inspecte la moto avant de la mettre en route, la visibilité du variateur de vitesse en position de montage intérieur n’est que partielle.

78      À cet égard, il convient, tout d’abord, de rejeter l’argument du requérant selon lequel la chambre de recours s’est bornée à prendre en considération l’angle de vue latéral de la moto afin d’apprécier la visibilité du variateur de vitesse, alors qu’il existe d’autres angles de vue, notamment l’angle de vue oblique, permettant d’apercevoir avec plus de précision ledit variateur de vitesse.

79      Certes, la Cour a jugé que la visibilité d’une pièce appliquée au produit complexe devait être appréciée du point de vue de l’utilisateur final de ce produit ainsi que de celui d’un observateur extérieur (arrêt du 16 février 2023, Monz Handelsgesellschaft International, C‑472/21, EU:C:2023:105, points 46 et 56), de sorte que, comme le fait valoir à bon droit le requérant, différents angles de vue peuvent, selon le cas, être pertinents pour déterminer le degré de visibilité d’une telle pièce lors de l’utilisation normale du produit complexe auquel celle-ci est appliquée.

80      Toutefois, d’une part, force est de constater que la chambre de recours a tenu compte des angles de vue supplémentaires mentionnés par le requérant, ainsi que cela ressort expressément du point 67 de la décision attaquée.

81      D’autre part, il n’en reste pas moins que les éléments de preuve fournis par le requérant ne démontrent pas, que ce soit sous un angle de vue latéral ou sous un angle de vue oblique, que les contours et autres caractéristiques visibles du variateur de vitesse en position de montage intérieur se distinguent, lors d’une utilisation normale d’une moto de compétition, avec suffisamment de clarté et de détail pour permettre l’appréciation de leur caractère nouveau et individuel.

82      En effet, les éléments de preuve produits, notamment les illustrations 3 et 6, lesquelles montrent un montage intérieur de la pièce en cause, ne permettent pas de distinguer les caractéristiques du dessin ou modèle contesté qui constituent son apparence particulière, comme l’exige la jurisprudence citée au point 76 ci-dessus. En réalité, les parties visibles du variateur de vitesse en position de montage intérieur se fondent complètement dans le produit d’ensemble et ne sont pas capables, par elles-mêmes, de produire une impression globale.

83      Dès lors, la chambre de recours a conclu, sans commettre d’erreur d’appréciation, que les parties visibles du variateur de vitesse en position de montage intérieur ne permettaient pas de distinguer avec suffisamment de clarté et de détail les contours et autres caractéristiques du dessin ou modèle contesté, de sorte que la condition de visibilité visée à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 6/2002 n’était pas remplie.

84      L’erreur dans l’interprétation de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 6/2002 commise par la chambre de recours, relevée au point 72 ci-dessus, est donc sans influence sur la conclusion à laquelle cette dernière est parvenue dans la décision attaquée.

85      Partant, il y a lieu de rejeter le troisième grief du requérant comme étant non fondé et, par voie de conséquence, le moyen unique et le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

86      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

87      Une audience ayant été organisée et le requérant ayant succombé, il convient de condamner celui-ci aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Juan Costa Pujadas est condamné aux dépens.

Kornezov

De Baere

Petrlík

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 3 septembre 2025.

Signatures


*      Langue de procédure : l’espagnol.


1      Le présent arrêt fait l’objet d’une publication par extraits.

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