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Document 62019TJ0384(01)
Judgment of the General Court (Fourth Chamber) of 10 September 2025.#European Parliament v Axa Assurances Luxembourg SA and Others.#Case T-384/19 OP.
Rozsudek Tribunálu (čtvrtého senátu) ze dne 10. září 2025.
Evropský parlament v. Axa Assurances Luxembourg SA a další.
Věc T-384/19 OP.
Rozsudek Tribunálu (čtvrtého senátu) ze dne 10. září 2025.
Evropský parlament v. Axa Assurances Luxembourg SA a další.
Věc T-384/19 OP.
ECLI identifier: ECLI:EU:T:2025:857
ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)
10 septembre 2025 (*)
« Clause compromissoire – Contrat d’assurance “Tous risques chantier” – Extension et remise à niveau du bâtiment Konrad Adenauer à Luxembourg – Dégâts causés par des eaux pluviales – Demande de remboursement des frais et indemnisation – Champ d’application de l’assurance – Clause d’exclusion – Obligations procédurales accessoires – Procédure partiellement par défaut – Opposition »
Dans l’affaire T‑384/19 OP,
Parlement européen, représenté par Mmes E. Paladini et V. Kapsali, en qualité d’agentes,
partie requérante au litige principal,
contre
Axa Assurances Luxembourg SA, établie à Luxembourg (Luxembourg),
Bâloise Assurances Luxembourg SA, établie à Luxembourg,
La Luxembourgeoise SA, établie à Luxembourg,
et
Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij NV, établie à La Haye (Pays-Bas),
représentées par Mes C. Collarini et S. Denu, avocats,
parties défenderesses au litige principal,
LE TRIBUNAL (quatrième chambre),
composé de M. R. da Silva Passos, président, Mme T. Pynnä (rapporteure) et M. H. Cassagnabère, juges,
greffier : M. V. Di Bucci,
vu l’arrêt du 29 septembre 2021, Parlement/Axa Assurances Luxembourg e.a. (T‑384/19, non publié, EU:T:2021:630), rendu par défaut à l’égard de Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij, condamnant cette dernière à rembourser la somme de 79 653, 89 euros au Parlement et les intérêts légaux pour le retard de paiement qui y sont afférents ainsi qu’à supporter les dépens afférents à la procédure par défaut la concernant,
vu l’opposition formée par Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij le 16 novembre 2021, en vertu de l’article 166 du règlement de procédure du Tribunal, à l’encontre de l’arrêt du 29 septembre 2021, Parlement/Axa Assurances Luxembourg e.a. (T‑384/19, non publié, EU:T:2021:630), rendu par défaut à son égard,
vu la phase écrite de la procédure, notamment la décision du 7 janvier 2022 de suspendre la procédure, conformément à l’article 69, sous d), du règlement de procédure, jusqu’à la décision de la Cour statuant sur le pourvoi formé contre l’arrêt du 29 septembre 2021, Parlement/Axa Assurances Luxembourg e.a. (T‑384/19, non publié, EU:T:2021:630),
vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure, de statuer sans phase orale de la procédure,
vu l’arrêt du 23 janvier 2025, Parlement/Axa Assurances Luxembourg e.a. (C‑766/21 P, EU:C:2025:31),
rend le présent
Arrêt
1 Par sa demande fondée sur l’article 166 du règlement de procédure du Tribunal, Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij NV forme opposition aux points 1 et 3 du dispositif de l’arrêt du 29 septembre 2021, Parlement/Axa Assurances Luxembourg e.a. (T‑384/19, non publié, ci-après l’« arrêt par défaut », EU:T:2021:630), par lesquels le Tribunal a adjugé à la partie requérante au litige principal, le Parlement européen, ses conclusions à son égard, conformément à l’article 123, paragraphe 3, du règlement de procédure, et l’a ainsi condamnée par défaut à lui rembourser la somme de 79 653,89 euros et les intérêts légaux pour le retard de paiement qui y étaient afférents, à partir du 22 décembre 2017, dont le taux était égal à la somme du taux d’intérêt de la principale facilité de refinancement appliquée par la Banque centrale européenne (BCE) à ses opérations principales de refinancement et de huit points de pourcentage, ainsi qu’à supporter les dépens afférents à la procédure par défaut la concernant.
Antécédents du litige
2 Dans le cadre des travaux d’envergure entrepris dans le contexte du projet d’extension et de remise à niveau du bâtiment Konrad Adenauer (ci-après le « KAD ») à Luxembourg (Luxembourg), le Parlement a lancé, au cours de l’année 2011, un appel d’offres ayant pour objet la conclusion d’une police d’assurance « Tous risques chantier » ainsi que d’une assurance couvrant les responsabilités civiles.
3 L’offre présentée par Gras Savoye Luxembourg SA (ci-après l’« intermédiaire d’assurance »), établie sur la base de l’offre de prix proposée par AXA Assurances Luxembourg SA, Bâloise Assurances Luxembourg SA, La Luxembourgeoise SA et Delta Lloyd Schadeverzekering NV (cette dernière ayant depuis été absorbée par Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij), a été retenue.
4 Le 3 avril 2012, l’Union européenne, représentée par le Parlement, a conclu le contrat d’assurance « Tous risques chantier » (ci-après le « contrat TRC ») visé par l’appel d’offres, avec les sociétés mentionnées au point 3 ci-dessus. Le contrat a désigné AXA Assurances Luxembourg comme apéritrice.
5 À la suite des précipitations importantes survenues les 27 et 30 mai 2016, les eaux pluviales du chantier du KAD se sont écoulées, en partie, au sous-sol, zone M, niveau – 4, du bâtiment en construction, d’où elles n’ont pas pu être évacuées, conduisant ainsi à une accumulation d’eau et créant une ambiance humide dans des locaux où étaient déjà installés des équipements techniques, lesquels ont subi des dommages.
6 Le 30 mai 2016, l’entreprise chargée des gros œuvres sur le chantier du KAD a présenté une déclaration de sinistre auprès de l’intermédiaire d’assurance, relative aux faits décrits au point 5 ci-dessus. La déclaration ayant été transmise par l’intermédiaire d’assurance à l’apéritrice, cette dernière a nommé un expert pour mener les investigations d’usage.
7 Le 2 juin 2016, l’expert mandaté s’est rendu une première fois sur les lieux du sinistre, pour mener une réunion technique en présence des représentants du Parlement ainsi que de diverses entreprises et prestataires de service chargés des travaux sur le chantier du KAD.
8 Le rapport d’expertise préliminaire dressé par la suite a établi que le système d’évacuation des eaux pluviales mis en place se composait de plusieurs dispositifs, notamment d’un réseau de conduites sous dallage et d’un réseau de conduites apparentes provisoires, servant à l’évacuation des eaux pluviales collectées en phase de chantier. Les eaux collectées étaient ensuite drainées vers un puits collecteur, où deux pompes provisoires de chantier devaient en assurer l’évacuation vers le réseau de la Ville de Luxembourg.
9 L’expert a identifié comme cause du sinistre une combinaison de plusieurs facteurs, décrits comme suit :
« [L]e réseau sous dallage se trouve dans un état quasi obstrué de débris émanant du chantier [...] [L]es conduites hydrauliques sous dallage ne sont pas dimensionnées pour un tel débit d’eau pluviale exceptionnel [...] En sus, au vu des débits d’eau pluviale se drainant vers le puits collecteur, les deux pompes de relevage (fonctionnant en cascade) ne se sont pas déclenchées du fait d’un défaut de programmation [...] »
10 Le rapport d’expertise préliminaire a conclu en constatant que, « [s’]agissant de la couverture d’assurance du […] KAD, les eaux ayant causé l’inondation étant collectées sur chantier, l’[e]xpert [était] d’avis que ce sinistre s’inscri[vai]t dans le champ d’application de la garantie Dommages à l’Ouvrage faisant partie intégrante du contrat d’assurance en vigueur ».
11 L’expert mandaté par AXA Assurances Luxembourg a également adressé à la direction du chantier un courriel précisant les mesures à adopter dans le but de limiter les dommages et de fixer leur étendue.
12 Le 1er juillet 2016, une seconde visite d’expertise a eu lieu, dont l’objectif déclaré était de vérifier la mise en œuvre des mesures conservatoires prescrites par l’expert. Le rapport dressé à l’issue de cette seconde visite (ci-après le « rapport d’expertise complémentaire I ») a confirmé que les mesures visant à limiter les dommages matériels avaient été mises en œuvre.
13 Le rapport d’expertise complémentaire I a relevé que certaines informations reçues par l’expert semblaient suggérer que l’état quasi obstrué du réseau sous dallage était connu des lots d’entreprises concernés. L’expert a sollicité à ce propos la transmission des rapports de chantier dressés par le lot d’entreprises D et s’est interrogé sur les éventuelles mesures correctives mises en place.
14 Par ailleurs, comme l’avait proposé le rapport d’expertise complémentaire I, le bureau de contrôle Luxcontrol a été mandaté pour effectuer la vérification du matériel technique installé et stocké dans les locaux concernés par le sinistre. Cette nouvelle étape de l’expertise, visant à établir l’étendue du sinistre et le montant des dommages, a eu lieu à partir de novembre 2016. L’expert mandaté par l’apéritrice était présent lors de l’intervention de l’inspecteur chargé de l’expertise technique. Le Parlement a fourni par la suite de la documentation et des renseignements en réponse aux questions de l’expert.
15 Le rapport d’expertise technique a recommandé le remplacement d’une grande partie de l’appareillage ainsi que la réalisation de tests diagnostiques et de contrôles supplémentaires pour identifier d’éventuelles défaillances ou anomalies.
16 Par lettre du 15 juillet 2016, l’apéritrice a indiqué au Parlement qu’elle considérait que, au vu des informations et des éléments techniques résultant du rapport d’expertise préliminaire ainsi que du rapport d’expertise complémentaire I, le sinistre en question n’était pas couvert par le contrat TRC.
17 En premier lieu, le refus de prise en charge était motivé par l’article I.15.1.1 du contrat TRC, qui prévoyait que ledit contrat ne garantissait ni les dommages se rattachant directement ou indirectement à l’un des cas d’inondation ni ceux qui se rattachaient directement ou indirectement à une insuffisance d’évacuation des eaux par les égouts. En second lieu, l’apéritrice a également relevé que le sinistre qui s’était produit, d’une part, était prévisible et, d’autre part, résultait d’une violation flagrante des règles de l’art, de telle sorte que les pertes et les dommages en résultant étaient également exclus de la couverture d’assurance au regard de l’article I.12.3.1.1 du contrat TRC.
18 Par lettre du 20 février 2017, le Parlement a confirmé sa demande d’indemnisation du sinistre, tout en réfutant les arguments avancés par l’apéritrice.
19 Lors d’une réunion ayant eu lieu le 11 avril 2017, l’apéritrice a indiqué qu’elle maintenait la position qu’elle avait exprimée auparavant, nonobstant le courrier du Parlement du 20 février 2017. Un compte rendu de cette réunion a été dressé par l’intermédiaire d’assurance. Par la suite, l’apéritrice a, par lettre du 21 avril 2017, confirmé le refus d’indemnisation.
20 Par courriel du 22 septembre 2017, l’apéritrice a indiqué au Parlement que la détermination des responsabilités dans les sinistres prétendument non couverts n’était pas une obligation contractuelle. De ce fait, les opérations d’expertise relatives aux origines et aux responsabilités du sinistre ont été interrompues et aucun rapport final n’a été déposé par l’expert mandaté.
21 Par lettre recommandée du 21 novembre 2017, le Parlement a procédé à la mise en demeure des assureurs sur la base d’une estimation provisoire des dommages, à laquelle l’apéritrice a répondu le 20 décembre 2017 en réitérant une fin de non-recevoir.
22 Par courrier du 9 octobre 2018, l’expert technique du bureau de contrôle Luxcontrol a rendu un rapport finalisé précisant la liste des équipements devant être remplacés.
23 Par courriel du 18 octobre 2018, le Parlement a transmis à l’intermédiaire d’assurance le rapport finalisé de Luxcontrol.
24 Par lettre recommandée du 28 novembre 2018, le Parlement a renouvelé la mise en demeure du 21 novembre 2017, en précisant le montant des dommages subis et constatables, qui a été estimé à hauteur de 800 624,33 euros hors taxe sur la valeur ajoutée.
Législation applicable et stipulations pertinentes du contrat TRC
Droit luxembourgeois
25 L’article 1147 du code civil luxembourgeois prévoit, au livre III, titre III, chapitre III, section IV, intitulée « Des dommages et intérêts résultant de l’inexécution de l’obligation », ce qui suit :
« Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.
[…] »
26 L’article 1149 du code civil luxembourgeois prévoit, au livre III, titre III, chapitre III, section IV, intitulée « Des dommages et intérêts résultant de l’inexécution de l’obligation », ce qui suit :
« Les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé, sauf les exceptions et modifications ci-après.
[…] »
27 L’article 1151 du code civil luxembourgeois prévoit, au livre III, titre III, chapitre III, section IV, intitulée « Des dommages et intérêts résultant de l’inexécution de l’obligation », ce qui suit :
« Dans le cas même où l’inexécution de la convention résulte du dol du débiteur, les dommages et intérêts ne doivent comprendre, à l’égard de la perte éprouvée par le créancier et du gain dont il a été privé, que ce qui est une suite immédiate et directe de l’inexécution de la convention. »
28 L’article 1315 du code civil luxembourgeois dispose, au livre III, titre III, chapitre VI, intitulé « De la preuve des obligations, et de celle du paiement », ce qui suit :
« Celui qui réclame l’exécution d’une obligation, doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation. »
29 La loi du 27 juillet 1997 sur le contrat d’assurance (Mémorial A 1997, p. 2048) prévoit en ses dispositions pertinentes pour les besoins du présent litige, à savoir à son article 36, intitulé « Apérition », ce qui suit :
« En cas de coassurance, un apériteur doit être désigné dans le contrat. Celui-ci est réputé mandataire des autres assureurs pour recevoir les déclarations prévues par le contrat et faire les diligences requises en vue du règlement des sinistres, en ce compris la détermination du montant de l’indemnité.
En conséquence, l’assuré doit lui adresser toutes les significations et les notifications, sauf celles relatives à une action en justice intentée contre les autres coassureurs. Si aucun apériteur n’a été désigné dans le contrat, l’assuré peut considérer n’importe lequel des coassureurs comme apériteur pour l’application du présent article. L’assuré doit cependant toujours s’adresser au même coassureur comme apériteur. »
Stipulations pertinentes du contrat TRC
30 L’article I.13.2 du contrat TRC, intitulé « Estimation des dommages, expertises », stipule ce qui suit :
« L’analyse des origines, responsabilités et étendue du sinistre et l’évaluation du montant des dommages [sont effectuées] selon les différentes modalités suivantes.
[…]
2.1 Expertise à un expert (sinistres simples), avec éventuellement contre-expertise consécutive
L’estimation est effectuée par un expert nommé et payé par l’assureur.
[…] »
31 L’article I.15 du contrat TRC, intitulé « Dispositions diverses », prévoit ce qui suit :
« 1. Exclusions communes à toutes les garanties
Ces dispositions sont d’application, sauf mention contraire de l’article I.12.
Dans tous les cas où la Compagnie invoque la non-couverture d’un risque, il lui appartient d’établir la preuve du fait qui a conduit à l’extinction de son obligation.
1.1 Le présent contrat ne garantit pas :
– […]
– les dommages se rattachant directement ou indirectement à un cas d’éruption de volcan, de tremblement de terre, d’avalanche, de chute de pierres ou de rochers, d’inondation, de crue de cours d’eau de surface ou d’eaux souterraines, d’insuffisance d’évacuation d’eau par les égouts, de raz-de-marée et de tout cataclysme de la nature, sauf convention contraire ;
– […] »
32 L’article I.18 du contrat TRC, intitulé « Loi applicable, conditions générales et publicité du contrat », prévoit ce qui suit :
« 1. Le droit de l’Union européenne complété par la loi luxembourgeoise s’applique au présent contrat.
2. Le contractant renonce à ses propres conditions contractuelles. Il déclare connaître et accepter les conditions générales faisant partie du présent contrat.
[…] »
33 L’article I.19 du contrat TRC, intitulé « Clause attributive de compétence », stipule ce qui suit :
« Tout litige entre le Parlement européen et le contractant se rapportant au présent contrat, qui n’a pu faire l’objet d’un règlement amiable, est soumis au Tribunal, organe juridictionnel de la Cour de justice de l’Union européenne, en vertu de l’article 256, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. »
34 L’article II.1 du contrat TRC, intitulé « Définitions », définit la notion de « cataclysmes naturels » comme suit : « [L]es crues, inondations, raz-de-marée, mouvements de terrain et, sauf convention contraire, les tremblements de terre ».
35 L’article II.8 du contrat TRC, intitulé « Sous-traitance et cession », prévoit ce qui suit :
« 1. Sauf autorisation écrite préalable du Parlement européen, le contractant ne peut ni céder tout ou partie des droits et obligations dérivant du contrat, ni sous-traiter, même partiellement, l’exécution des tâches qui lui ont été confiées, ni se substituer, en fait, des tiers aux mêmes fins.
[…]
4. En l’absence de l’autorisation visée au paragraphe 1 ou en cas de non-respect des conditions dont elle est assortie, la cession ou la sous-traitance effectuée par le contractant n’est pas opposable au Parlement européen et n’a aucun effet à son égard. »
Conclusions des parties
36 Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler les points 1 et 3 du dispositif de l’arrêt par défaut ;
– condamner le Parlement aux dépens.
37 Le Parlement conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter l’opposition à l’arrêt par défaut formée par Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij ;
– condamner Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij aux dépens.
En droit
Sur les règles applicables à la procédure d’opposition
38 Aux termes de l’article 41 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 166 du règlement de procédure, il convient de relever que la procédure d’opposition a pour objet, à la suite de l’adoption par le juge de l’Union d’un arrêt par défaut à l’égard de la partie défenderesse défaillante, de permettre audit juge de procéder à un nouvel examen de la cause sur une base contradictoire, sans être lié par la solution de l’arrêt par défaut (voir arrêt du 28 septembre 2022, Malacalza Investimenti/BCE, T‑552/19 OP, non publié, EU:T:2022:587, point 28 et jurisprudence citée).
39 Il incombe au Tribunal, saisi de la présente opposition, de réexaminer le recours qu’avait introduit le Parlement devant lui et, à cet effet, d’analyser les moyens que celui-ci avait soulevés à l’appui des conclusions de ce recours.
40 En l’absence de toute disposition du règlement de procédure prévoyant le contraire, l’opposant n’est pas limité, dans son argumentation, à la réfutation des motifs de l’arrêt par défaut, mais reste libre de développer en défense tout argument lui paraissant utile en réponse au moyen formulé dans le recours initial (voir arrêt du 28 septembre 2022, Malacalza Investimenti/BCE, T‑552/19 OP, non publié, EU:T:2022:587, point 30 et jurisprudence citée).
Sur la compétence du Tribunal
41 Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 272 TFUE, lu conjointement avec l’article 256 TFUE, le Tribunal est compétent pour statuer en vertu d’une clause compromissoire contenue dans un contrat de droit public ou de droit privé passé par l’Union ou pour son compte. L’article 272 TFUE constitue ainsi une disposition spécifique permettant de saisir le juge de l’Union en vertu d’une clause compromissoire, et ce sans limitation tenant à la nature de l’action introduite devant le juge de l’Union (arrêt du 26 février 2015, Planet/Commission, C‑564/13 P, EU:C:2015:124, points 22 et 23).
42 En l’espèce, le Tribunal est donc compétent pour statuer sur le présent recours conformément à l’article 272 TFUE, lu conjointement avec l’article 256 TFUE, en vertu de la clause compromissoire contenue à l’article I.19 du contrat TRC.
Sur le bien-fondé du recours en ce qu’il est dirigé contre Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij
43 Par les premier, deuxième et troisième chefs de conclusions de son recours, le Parlement demande au Tribunal, à titre principal, de constater que les dégâts des eaux causés au chantier du KAD lors des fortes précipitations, les 27 et 30 mai 2016, tombent dans le champ d’application du contrat TRC et, en conséquence, de condamner Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij à lui rembourser 10 % des frais demandés, soit 77 990,29 euros, et à lui verser les intérêts légaux pour le retard de paiement qui y sont afférents à partir du 22 décembre 2017, dont le taux est égal à la somme du taux d’intérêt de la principale facilité de refinancement appliquée par la BCE à ses opérations principales de refinancement et de huit points de pourcentage.
44 Par le quatrième chef de conclusions de son recours, le Parlement demande au Tribunal, à titre subsidiaire, dans le cas où les demandes précédentes ne seraient pas accueillies, de condamner Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij au paiement des dommages causés par le manquement aux obligations découlant de l’article I.13.2 du contrat TRC, soit 779 902,87 euros. Dans ses observations sur l’opposition, le Parlement demande au Tribunal, à titre subsidiaire, de condamner Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij à ce titre pour un montant déterminé ex æquo et bono.
45 Par les cinquième et sixième chefs de conclusions de son recours, le Parlement demande au Tribunal de condamner Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij à lui rembourser 10 % des frais d’expertise, soit 1 663,60 euros, et à lui verser les intérêts légaux pour le retard de paiement qui y sont afférents, à partir du 22 décembre 2017, dont le taux est égal à la somme du taux d’intérêt de la principale facilité de refinancement appliquée par la BCE à ses opérations principales de refinancement et de huit points de pourcentage. Dans ses observations sur l’opposition, le Parlement demande au Tribunal de condamner Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij à lui rembourser l’intégralité des frais d’expertise ou, à titre subsidiaire, une partie prépondérante desdits frais.
Sur les premier, deuxième et troisième chefs de conclusions, tendant, à titre principal, à ce que le Tribunal condamne Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij au remboursement des frais découlant des dégâts des eaux des 27 et 30 mai 2016
46 Afin d’établir le bien-fondé de son recours, le Parlement invoque quatre séries d’arguments, visant, premièrement, à établir son droit à la couverture d’assurance du sinistre, dès lors que celui-ci relèverait du champ d’application du contrat TRC, deuxièmement, à quantifier le préjudice donnant droit à indemnisation, troisièmement, à faire valoir l’inapplicabilité ou l’invalidité des clauses d’exclusion de garantie invoquées par Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij et, quatrièmement, à démontrer la violation de certaines obligations procédurales accessoires engendrées par ledit contrat.
47 Pour sa part et afin de refuser la couverture du sinistre en cause, Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij se prévaut de l’application de plusieurs clauses d’exclusion de garantie et conteste également la quantification du dommage opérée par le Parlement ainsi que la violation de certaines obligations procédurales accessoires.
48 Le Tribunal estime opportun d’examiner d’emblée, à cet égard, l’applicabilité de la clause d’exclusion relative à un cas d’inondation prévue à l’article I.15.1.1 du contrat TRC.
49 L’article I.15.1.1 du contrat TRC prévoit que « [ce] contrat ne garantit pas […] les dommages se rattachant directement ou indirectement à un cas d’éruption de volcan, de tremblement de terre, d’avalanche, de chute de pierres ou de rochers, d’inondation, de crue de cours d’eau de surface ou d’eaux souterraines, d’insuffisance d’évacuation d’eau par les égouts, de raz-de-marée et de tout cataclysme de la nature, sauf convention contraire ».
50 Le Parlement est d’avis que l’absence de garantie des dommages résultant directement ou indirectement d’un cas d’inondation ne saurait valablement lui être opposée en l’espèce, dès lors que, selon lui, les événements qui sont à l’origine de la déclaration de sinistre du 30 mai 2016 ne sauraient revêtir le qualificatif d’« inondation ».
51 Premièrement, le Parlement fait valoir que le terme « inondation » a plusieurs acceptions dans le langage commun et qu’il convient dès lors de rechercher celle que les parties au contrat ont entendu lui conférer, en faisant référence au contexte et aux stipulations du contrat TRC.
52 Or, il ressortirait du contexte dans lequel a été conclu le contrat TRC qu’un soumissionnaire avait, lors de la procédure de passation de marché public, posé la question de savoir si le chantier du KAD se trouvait en zone inondable et obtenu la confirmation du pouvoir adjudicateur que la zone où était situé ledit chantier était non inondable. Le Parlement en tire la conclusion que les parties au contrat ont indubitablement entendu limiter la définition de la notion d’« inondation » à un cas de cataclysme naturel.
53 En outre, le Parlement fait observer que le terme « inondation » apparaît à l’article II.1 du contrat TRC en tant que faisant partie de la définition de l’expression « cataclysme naturel ». Il conviendrait donc de déduire du contexte et des stipulations dudit contrat que le terme « inondation » a été employé pour désigner un événement correspondant à une catastrophe naturelle, et non pour désigner le simple déversement d’une forte quantité de liquide dans un local normalement sec.
54 Deuxièmement, le Parlement estime que le droit de l’Union, complété par le droit luxembourgeois, qui est la loi applicable en vertu de l’article I.18.1 du contrat TRC, vient au soutien de l’interprétation du terme « inondation » qu’il propose, à savoir celle selon laquelle ce terme est exclusivement lié aux cas de cataclysmes naturels. Une telle interprétation ressortirait notamment de l’article 2 de la directive 2007/60/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2007, relative à l’évaluation et à la gestion des risques d’inondation (JO 2007, L 288, p. 27), ainsi que du considérant 10 du règlement (UE) no 267/2010 de la Commission, du 24 mars 2010, concernant l’application de l’article 101, paragraphe 3, [TFUE] à certaines catégories d’accords, de décisions et de pratiques concertées dans le secteur des assurances (JO 2010, L 83, p. 1).
55 En outre, le Parlement estime que le terme « inondation » utilisé par l’expert dans son rapport d’expertise préliminaire ne peut être compris comme désignant un cataclysme naturel, mais doit être compris dans son sens commun, comme décrivant le fait qu’une surface se trouvant normalement à sec est complètement ou partiellement sous eau.
56 Troisièmement, l’interprétation mentionnée au point 55 ci-dessus serait confortée par l’ouvrage de référence en matière de droit luxembourgeois des assurances, qui distinguerait les dégâts causés par les fuites d’eau et les débordements provenant de conduites se trouvant à l’intérieur d’un bâtiment, couverts normalement par l’assurance « dégâts des eaux », des dommages causés par une inondation, pour lesquels, comme pour les catastrophes naturelles en général, aucune couverture n’est légalement prévue. Ainsi, l’interprétation excessivement large du terme « inondation » retenue par Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij ne permettrait pas de faire une distinction entre une vraie inondation et de simples dégâts des eaux.
57 Or, le terrain où se situe le chantier du KAD n’aurait pas subi d’inondation, mais des eaux pluviales se seraient déversées et accumulées dans les locaux du bâtiment, d’où elles n’auraient pas pu être évacuées, en raison de défaillances techniques.
58 En conclusion, le Parlement estime que la clause d’exclusion prévue à l’article I.15.1.1 du contrat TRC ne peut pas être invoquée, puisque l’afflux d’eau à l’intérieur d’un bâtiment en construction n’est pas la conséquence d’une « inondation » au sens de cet article.
59 Dans ses observations sur l’opposition, le Parlement fait encore valoir que le terme « inondation » apparaît dans une clause d’exclusion du contrat TRC. Or, en tant que dérogation à la finalité générale du contrat TRC, cette clause d’exclusion devrait faire l’objet d’une interprétation stricte, ce que conforteraient les autres stipulations dudit contrat. En outre, une telle interprétation stricte du terme « inondation » ne serait pas contredite par le contexte de la conclusion du contrat TRC.
60 Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij, s’appuyant sur les points 77 à 112 de l’arrêt par défaut, confirmé sur pourvoi par l’arrêt du 23 janvier 2025, Parlement/Axa Assurances Luxembourg e.a. (C‑766/21 P, EU:C:2025:31, point 73), conteste l’analyse du Parlement relative à la portée du terme « inondation » et estime que la clause d’exclusion prévue à l’article I.15.1.1 du contrat TRC est pleinement applicable en l’espèce.
61 À titre liminaire, il convient de rappeler que, au point 111 de l’arrêt par défaut, le Tribunal a conclu qu’AXA Assurances Luxembourg, Bâloise Assurances Luxembourg et La Luxembourgeoise avaient pu opposer à bon droit au Parlement l’article 1.15.1.1 du contrat TRC prévoyant l’absence de garantie pour tous les dommages liés directement ou indirectement à un cas d’inondation. Sur ce fondement, le Tribunal a rejeté la demande du Parlement tendant à ce qu’elles soient condamnées à lui rembourser les frais demandés.
62 Postérieurement au dépôt de la requête en opposition et des observations sur l’opposition, la Cour a conclu, sur pourvoi, que c’était sans méconnaître les méthodes d’interprétation du droit de l’Union que le Tribunal avait jugé, au point 92 de l’arrêt par défaut, qu’un phénomène de précipitations abondantes, qui avait entraîné une accumulation d’eaux pluviales comme celle ayant submergé les niveaux – 4 et – 5 du bâtiment KAD, était couvert par le terme « inondation » employé à l’article I.15.1.1 du contrat TRC (arrêt du 23 janvier 2025, Parlement/Axa Assurances Luxembourg e.a., C‑766/21 P, EU:C:2025:31, point 73).
63 Dans ce contexte, il convient, comme le propose le Parlement, de rechercher le sens que les parties au contrat ont voulu donner au terme « inondation » en faisant référence au contexte et aux stipulations du contrat TRC (voir, en ce sens, arrêt du 1er mars 2017, Universiteit Antwerpen/REA, T‑208/15, non publié, EU:T:2017:136, point 80).
64 Premièrement, s’agissant des stipulations du contrat TRC, il convient de relever que ce contrat ne contient aucune définition précise du terme « inondation ». Il y a lieu, dès lors, de se référer au sens commun de ce terme, tout en examinant le contexte dans lequel la clause d’exclusion s’insère, afin de déterminer la volonté commune des parties au contrat.
65 Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij considère que le terme « inondation » doit être défini, ainsi que l’aurait fait valoir le Tribunal dans l’arrêt par défaut, conformément à son acception commune, à savoir comme le « débordement des eaux recouvrant une étendue de pays » (selon le dictionnaire Le Petit Larousse illustré) ou la « présence anormale d’une grosse quantité d’eau dans un local, due à une fuite, un incident » (selon le dictionnaire Le Robert).
66 Le Parlement considère, quant à lui, que le terme « inondation » peut avoir plusieurs significations dans le langage commun et se fonde essentiellement sur le contexte dans lequel le contrat TRC a été conclu pour faire valoir que ce terme aurait une portée plus restreinte et couvrirait uniquement les cas de cataclysmes naturels. Il fait également valoir que, en tant que dérogation à la finalité générale du contrat TRC, la clause d’exclusion devrait faire l’objet d’une interprétation stricte.
67 Il y a lieu de relever toutefois que, si l’intention des parties au contrat TRC avait été de restreindre la portée et le sens du terme « inondation » par rapport à son sens commun, une définition claire de ce terme aurait dû être insérée au contrat. Tel n’étant pas le cas, il faut en déduire que les parties n’ont pas entendu conférer à ce terme une définition plus restrictive que celle résultant de son acception commune.
68 À cet égard, le dictionnaire Le Petit Larousse définit le terme « inondation » comme désignant à la fois le « [d]ébordement des eaux recouvrant une étendue de pays » et la « [p]résence anormale d’une grosse quantité d’eau dans un local, due à une fuite, un incident ». Le dictionnaire en ligne Le Robert définit également le terme « inondation » comme désignant, premièrement, un « [d]ébordement d’eaux qui inondent le pays environnant » et, deuxièmement, une « [g]rande quantité d’eau qui se répand ».
69 Deuxièmement, s’agissant du contexte entourant l’insertion du terme « inondation » à l’article I.15.1.1 du contrat TRC, il convient de rappeler que ce contrat a été signé à la suite d’un appel d’offres lancé par le Parlement en vue de conclure une police d’assurance « Tous risques chantier » dans le contexte du projet d’extension et de remise à niveau du KAD. C’est donc le Parlement lui-même qui a proposé l’insertion d’une telle clause au contrat, même si, ce faisant, il s’est fondé sur les pratiques commerciales applicables en matière de contrats d’assurance.
70 Le Parlement fait valoir néanmoins que, au cours de la procédure de passation du marché public en cause, les soumissionnaires avaient posé des questions portant sur le risque d’inondation et obtenu du pouvoir adjudicateur la confirmation que la zone où était situé le chantier du KAD était non inondable.
71 L’élément mentionné au point 70 ci-dessus ne saurait cependant être décisif, dans la mesure où une inondation peut avoir de multiples causes. Le fait que le KAD ne soit pas situé en zone inondable peut ainsi servir d’indication quant à l’absence de risque de crues ou de débordements en raison d’un cours d’eau avoisinant, mais n’indique pas nécessairement qu’aucune inondation de quelque type que ce soit, résultant, par exemple, de fortes pluies, ne sera jamais susceptible de se produire.
72 En effet, des pluies intenses peuvent en elles-mêmes et indépendamment de tout débordement d’un cours d’eau être à l’origine d’une inondation. Une inondation peut ainsi trouver son origine dans des causes différentes, telles que le débordement d’un cours d’eau, de fortes précipitations, le débordement d’une réserve d’eau de surface ou souterraine consécutive à une remontée de nappes phréatiques, ou encore la rupture d’un ouvrage de génie civil tel qu’un barrage ou une digue.
73 Il n’y a aucune raison valable de considérer que la clause I.15.1.1 du contrat TRC ne vise que certaines des différentes causes pouvant être à l’origine d’une inondation, sans préciser lesquelles. En l’absence de définition fournie dans ce contrat, il convient donc de considérer que la notion d’« inondation » n’a fait l’objet d’aucune restriction.
74 À cet égard, si le contrat TRC prend le soin de préciser à son article I.15.1.1 que ne sont pas garantis les dommages se rattachant directement ou indirectement à la crue de cours d’eau de surface ou d’eaux souterraines ni les dommages se rattachant directement ou indirectement à un cas d’inondation, c’est bien parce que les parties ont souhaité opérer une distinction entre ces deux notions.
75 En effet, s’il fallait suivre le raisonnement du Parlement selon lequel le terme « inondation » ne vise que les cas de débordement d’un cours d’eau, cas pourtant déjà expressément visés par la notion de « crue de cours d’eau de surface ou d’eaux souterraines » à l’article I.15.1.1 du contrat TRC, il ne serait pas possible d’identifier les situations visées par le terme « inondation » et, partant, de donner un effet utile à ce terme, qui est pourtant expressément prévu également par cette stipulation.
76 Troisièmement, la position du Parlement selon laquelle l’article I.15.1.1 n’énumère que des cas de cataclysmes naturels tels que les crues, les raz-de-marée, les mouvements de terrain et les tremblements de terre ne saurait davantage être suivie. En effet, ladite stipulation prévoit également l’absence de garantie des dommages se rattachant à une insuffisance d’évacuation par les égouts, ce qui ne saurait être assimilé à un cas de cataclysme naturel. À cet égard, le fait que le terme « inondation » figure à l’article II.1 des conditions générales du contrat TRC, qui définit les cas de cataclysmes naturels, ne signifie pas pour autant que les deux termes sont synonymes ni que la notion d’« inondation » ne couvre elle-même que de tels cas.
77 Quatrièmement, le Parlement ne saurait valablement faire valoir qu’une telle interprétation ne permettrait pas de distinguer une « vraie inondation » d’un simple cas de dégât des eaux. En effet, cette interprétation permet de faire une distinction entre une inondation et un dégât des eaux, en ce sens qu’une inondation trouve son origine dans un événement naturel extérieur au bien assuré, que cet événement soit qualifié de cataclysme naturel ou non, tandis que, pour un simple dégât des eaux, tel qu’une rupture de canalisations, par exemple, cet élément extérieur fait défaut.
78 Or, il y a lieu de constater qu’un phénomène de précipitations abondantes comme celui qui s’est produit en l’espèce, qu’il puisse être qualifié de cataclysme naturel ou non, constitue un événement naturel, en dehors de tout contrôle de l’assuré, qui est dès lors couvert par la notion d’« inondation » au sens de l’article I.15.1.1 du contrat TRC.
79 À cet égard, les arguments du Parlement visant à minimiser la gravité du phénomène climatique qui s’est produit les 27 et 30 mai 2016 au Luxembourg et, en particulier, sur le plateau de Kirchberg, s’ils peuvent être pertinents afin de contester la survenance d’un « cataclysme de la nature » au sens de l’article I.15.1.1 du contrat TRC, sont en revanche inopérants aux fins de déterminer si les dommages constatés au niveau – 4 du KAD se rattachent, directement ou indirectement, à un cas d’inondation au sens de l’article I.15.1.1 du contrat TRC. En effet, il convient de rappeler que l’article I.15.1.1 du contrat TRC mentionne les cas d’inondation comme étant une cause d’exclusion distincte et autonome, en sus des cas de cataclysme de la nature. Dès lors, à supposer que les parties au contrat aient entendu conférer un effet utile à chacun de ces termes, la notion d’« inondation » ne saurait recouper entièrement celle de « cataclysme de la nature ».
80 Au vu de ce qui précède, il y a lieu de constater que ni le texte de l’article I.15.1.1 du contrat TRC, lu à la lumière des autres stipulations de ce contrat, ni le contexte entourant la conclusion dudit contrat ne permettent de conclure qu’il y a lieu de donner une portée restrictive au terme « inondation » comme le propose le Parlement.
81 Partant, dans la mesure où une inondation peut également résulter de la seule accumulation de précipitations abondantes et se produire indépendamment de la proximité d’un cours d’eau, un tel phénomène correspond à la description du sinistre qui s’est produit en l’espèce, telle qu’effectuée par l’expert, à savoir une accumulation des eaux de pluie aux niveaux – 4 et – 5 du sous-sol du KAD, associée à une impossibilité pour le système souterrain de canalisation d’évacuer cet important débit d’eau.
82 Un tel phénomène constitue donc bien un cas d’inondation au sens de l’article I.15.1.1 du contrat TRC, de sorte que la garantie des dommages se rattachant directement ou indirectement à un tel cas est exclue.
83 Aucun des autres arguments soulevés par le Parlement n’est susceptible de remettre en cause cette conclusion.
84 En premier lieu, le Parlement renvoie à l’article 2, point 1, de la directive 2007/60, qui définit le terme « inondation » comme suit :
« “[I]nondation” : submersion temporaire par l’eau de terres qui ne sont pas submergées en temps normal. Cette notion recouvre les inondations dues aux crues des rivières, des torrents de montagne et des cours d’eau intermittents méditerranéens ainsi que les inondations dues à la mer dans les zones côtières et elle peut exclure les inondations dues aux réseaux d’égouts[.] »
85 À cet égard, il convient d’observer que, même si les inondations trouvant leur origine dans de fortes précipitations ne sont pas mentionnées explicitement dans la définition figurant au point 84 ci-dessus, il n’apparaît pas évident pour autant qu’elles en sont d’office exclues, au vu du libellé de l’article 2, point 1, de la directive 2007/60.
86 En outre, il convient de tenir compte du contexte et du but poursuivi par la directive 2007/60, défini à l’article 1er de celle-ci comme étant d’« établir un cadre pour l’évaluation et la gestion des risques d’inondation, qui vise à réduire les conséquences négatives pour la santé humaine, l’environnement, le patrimoine culturel et l’activité économique associées aux inondations dans [l’Union] ».
87 Dès lors, à défaut d’une définition précise du terme « inondation » dans le contrat TRC, il ne saurait être fait référence exclusivement à celle contenue dans la directive 2007/60 plutôt qu’à son acception commune dans le langage courant, en tenant compte de la logique d’ensemble de ce contrat et de son contexte.
88 En effet, s’il fallait considérer que le terme « inondation », au sens de l’article I.15.1.1 du contrat TRC, se rapporte exclusivement aux causes d’inondation définies à l’article 2 de la directive 2007/60, à savoir « les inondations dues aux crues des rivières, des torrents de montagne et des cours d’eau intermittents méditerranéens ainsi que les inondations dues à la mer dans les zones côtières », il apparaîtrait difficile de concevoir les raisons pour lesquelles les parties au contrat ont pris le soin de prévoir également les cas de crue de cours d’eau de surface en sus des cas d’inondation parmi les différentes hypothèses prévues à l’article I.15.1.1 dudit contrat.
89 Partant, aucun argument décisif ne saurait être tiré du libellé de la directive 2007/60.
90 De plus, dès lors qu’une clause d’exclusion de garantie des dommages liés à une inondation a expressément été prévue dans le contrat TRC, il ne saurait être présumé que, par l’inclusion de ces termes, les parties signataires ont uniquement voulu viser les cas d’inondation liés à une crue ou à un raz-de-marée.
91 S’agissant, par ailleurs, de la référence faite par le Parlement au considérant 10 du règlement no 267/2010, il n’est pas possible de comprendre en quoi celle-ci soutiendrait l’interprétation du terme « inondation » que le Parlement préconise. Ledit considérant précise en effet que « plus les catégories dans lesquelles sont groupées les statistiques sur le coût de la couverture d’un risque donné dans le passé sont étroites, plus les entreprises d’assurance ont de possibilités de différencier leurs primes commerciales lorsqu’elles les calculent » et qu’« [i]l convient par conséquent de n’exempter la compilation en commun du coût des risques dans le passé qu’à condition que le niveau de détail et de différenciation des statistiques fournies soit suffisant d’un point de vue actuariel ». À supposer que le Parlement ait entendu se référer au considérant 11 du règlement no 267/2010, celui-ci se borne à préciser qu’« [u]ne exception à l’exigence relative à l’accès des organisations de consommateurs et de clients [aux résultats de compilations, de tables et d’études réalisées conjointement] devrait être possible pour des motifs de sécurité publique, par exemple lorsque les informations ont trait aux systèmes de sécurité des centrales nucléaires ou aux lacunes des systèmes de prévention des inondations », de sorte que sa pertinence pour les besoins de l’interprétation du terme « inondation » dans le contrat TRC n’apparaît pas davantage.
92 En second lieu, dans la mesure où le Parlement fait valoir que le KAD a subi des dégâts en raison d’un risque inhérent au chantier, étant donné qu’il s’agissait d’un bâtiment en construction, qui n’était pas complètement fermé ni protégé contre la pluie, il suffit de constater que, contrairement à ces allégations, il ressort du rapport d’expertise préliminaire que, lors des fortes pluies qui se sont abattues les 27 et 30 mai 2016, « une inondation importante s’est produite en sous-sol du bâtiment KAD alors que le [gros œuvre] se trouvait dans un état pouvant être qualifié de quasiment achevé (structure portante [et] toiture) ».
93 Enfin, il convient de relever que, même si le Parlement conteste la qualification d’inondation, dès lors que, selon lui, elle ne désigne pas un cataclysme naturel, l’expert a constaté dans son rapport d’expertise préliminaire que, « [d]e manière plus spécifique, des eaux de plui[e] (eaux claires) émanant du chantier (principalement des toitures et autres parvis) [s’étaie]nt déversées de manière intense dans les sous-sols du bâtiment KAD, y générant une inondation des niveaux – 4 [et] – 5 ».
94 Au regard de ce qui précède, il y a lieu de conclure que Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij a pu opposer à bon droit au Parlement, en l’espèce, l’article I.15.1.1 du contrat TRC, prévoyant l’absence de garantie pour tous les dommages liés directement ou indirectement à un cas d’inondation.
95 Partant, la demande présentée par le Parlement à titre principal, tendant à ce que Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij soit condamnée à lui rembourser les frais demandés, doit être rejetée, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres clauses d’exclusion découlant du contrat TRC invoquées par celle-ci ni de quantifier le montant du préjudice indemnisable à cet égard.
96 Il convient néanmoins d’examiner le bien-fondé de la demande présentée par le Parlement à titre subsidiaire, tendant à ce que Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij soit condamnée au paiement des dommages causés par le manquement aux obligations découlant de l’article I.13.2 du contrat TRC, ainsi que la demande tendant à ce qu’elle soit condamnée à rembourser les frais d’expertise.
Sur le quatrième chef de conclusions, tendant, à titre subsidiaire, à ce que le Tribunal condamne Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij au remboursement des dommages causés par son manquement aux obligations découlant des articles I.13.2 et I.13.2.1 du contrat TRC
97 Par son quatrième chef de conclusions, le Parlement fait valoir, à titre subsidiaire, que le comportement de Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij a donné lieu à d’autres manquements contractuels en vertu des articles I.13.2 et I.13.2.1 du contrat TRC.
98 En effet, contrairement aux articles I.13.2 et I.13.2.1 du contrat TRC, les opérations d’expertise auraient, à la demande de Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij, subi un arrêt après la compilation du rapport d’expertise complémentaire, alors que l’analyse des origines, des responsabilités et de l’étendue du sinistre était inachevée. Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij aurait ainsi constaté à tort que le sinistre ne relevait pas du champ d’application du contrat TRC et la situation d’incertitude quant à la responsabilité concernant le sinistre, engendrée par l’arrêt des opérations d’expertise, serait la conséquence directe d’un manquement contractuel imputable à Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij. Cette dernière devrait dès lors, à tout le moins, être tenue au paiement des dommages et intérêts en vertu de l’article 1147 du code civil luxembourgeois. Le Parlement considère que sa perte, au sens de l’article 1149 du code civil luxembourgeois, coïncide, en l’espèce, avec les coûts engendrés par la gestion du sinistre.
99 Dans ses observations sur l’opposition, le Parlement demande que Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij soit condamnée à l’indemniser pour la totalité du préjudice subi ou, à titre subsidiaire, pour un montant déterminé ex æquo et bono.
100 Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij conteste l’argumentation du Parlement. Elle considère avoir pleinement respecté ses obligations découlant du contrat TRC. En effet, il n’appartiendrait pas à l’expert de se prononcer sur les responsabilités encourues, dès lors que cela relèverait d’une analyse juridique échappant à la mission d’un consultant technique. Une telle obligation ne découlerait d’ailleurs nullement de l’article I.13.2 du contrat TRC.
101 En outre, ce serait à tort que le Parlement se prévaudrait du fait que l’expert avait déclaré que le sinistre relevait du champ d’application du contrat TRC pour établir que la couverture du dommage serait garantie. En effet, selon Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij, ce n’est pas parce qu’un dommage relève de l’objet de la garantie prévue dans le contrat d’assurance qu’il est nécessairement couvert, alors même que ce dommage peut faire l’objet de diverses exclusions de garantie prévues audit contrat.
102 Dans la réplique ainsi qu’en réponse à une question du Tribunal et dans ses observations sur l’opposition, le Parlement ajoute que la position exposée au point 100 ci-dessus est contraire à la lettre du contrat TRC. En outre, la détermination des responsabilités permettrait à l’assureur de démontrer que le sinistre n’est pas la réalisation directe d’un risque inhérent au chantier, mais la conséquence directe des comportements spécifiques de l’un ou l’autre intervenant. En l’absence d’une telle démonstration, il conviendrait de présumer que le sinistre est la conséquence d’un événement ou d’un ensemble de circonstances qui ont mené à la réalisation d’un risque inhérent au chantier. Si, en l’occurrence, les responsabilités pouvaient déjà être « entrevues », leur détermination dans un rapport d’expertise définitif n’aurait pas demandé un effort considérable de la part de l’expert mandaté et, par conséquent, des assureurs. En revanche, en l’absence d’un rapport d’expertise finalisé, le Parlement n’aurait pas été en mesure de faire procéder à une contre-expertise, conformément à l’article I.13.2.1 du contrat TRC.
103 Dans ses observations sur l’opposition, le Parlement ajoute que, s’il avait voulu obtenir de manière indépendante un rapport d’expertise complet, il se serait heurté, d’une part, à l’impossibilité, pour des raisons déontologiques, de confier la poursuite de l’expertise au même expert et, d’autre part, à l’impossibilité pour un autre expert de réaliser une nouvelle analyse, en raison de l’altération de l’état des lieux survenue entre-temps.
104 Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij conteste cette interprétation et fait valoir que le but d’une assurance « Tous risques chantier » n’est pas de déterminer les responsabilités supportées par les différents intervenants en ce qui concerne les désordres constatés. Ainsi, la question de la détermination des responsabilités serait une question juridique qu’il n’appartiendrait pas à l’expert de résoudre. En tout état de cause, elle estime, s’appuyant à cet égard sur les points 129 et 130 de l’arrêt par défaut, que, en l’occurrence, les informations et les observations consignées dans le rapport d’expertise préliminaire et le rapport d’expertise complémentaire I permettent de déterminer l’identité des différents intervenants concernés par les manquements relevés. Dès lors, à supposer qu’un manquement contractuel soit établi, le dommage dont le Parlement demande l’indemnisation serait inexistant, puisqu’il pourrait toujours procéder à une analyse des responsabilités engagées au regard des manquements relevés par l’expert.
105 À titre liminaire, il convient de rappeler que, aux points 121 et 124 de l’arrêt par défaut, le Tribunal a conclu que, en décidant d’interrompre, avant leur terme, les opérations d’expertise, AXA Assurances Luxembourg, Bâloise Assurances Luxembourg et La Luxembourgeoise avaient violé leurs obligations découlant des articles I.13.2 et I.13.2.1 du contrat TRC. Aux points 132 et 133 de l’arrêt par défaut, le Tribunal a néanmoins rejeté la demande subsidiaire du Parlement tendant à ce que l’intégralité des frais engendrés par la gestion du sinistre du KAD soit indemnisée à ce titre.
106 Dans ce contexte, il convient de relever que, selon l’article I.13.2 du contrat TRC, « [l’]analyse des origines, responsabilités et étendue du sinistre et l’évaluation du montant des dommages [sont] effectué[es] selon les différentes modalités [énoncées à ce même article] », tandis que l’article I.13.2.1 dudit contrat précise que « [l’]estimation est effectuée par un expert nommé et payé par l’assureur ».
107 Au vu du libellé des articles I.13.2 et I.13.2.1 du contrat TRC, le Parlement est fondé à faire valoir que, en décidant d’interrompre, avant leur terme, les opérations d’expertise, Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij a violé ses obligations découlant desdits articles. En effet, une telle interruption a eu pour effet de créer une situation d’incertitude en ce qui concerne l’analyse des origines et des responsabilités du sinistre, alors même que l’article I.13.2.1 prévoit explicitement qu’une telle analyse doit être effectuée.
108 Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij ne saurait faire valoir, à cet égard, que le but d’une assurance « Tous risques chantier » n’est pas de déterminer les responsabilités supportées par les différents intervenants en ce qui concerne les désordres constatés, puisque l’indemnisation du sinistre a été refusée en l’espèce. En l’occurrence, le Parlement a donc un intérêt légitime à pouvoir déterminer si certaines parties intervenantes peuvent être tenues pour responsables de ce sinistre.
109 Certes, s’il est vrai qu’il n’appartient pas à l’expert de se prononcer sur l’analyse juridique des responsabilités encourues, il n’en reste pas moins que celui-ci est à même d’effectuer certaines constatations de fait, à partir desquelles les parties au contrat peuvent ensuite tirer les conclusions juridiques qui s’imposent.
110 Partant, il convient de constater que, en interrompant prématurément les travaux d’expertise, Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij a manqué à ses obligations découlant des articles I.13.2 et I.13.2.1 du contrat TRC.
111 Cela étant, le Parlement n’est pas fondé à demander le remboursement de la totalité des frais exposés pour la gestion du sinistre, pour un montant total de 779 902,87 euros, sur cette seule base. En effet, comme l’indique le Parlement, ces frais correspondent, premièrement, aux mesures conservatoires mises en place par le lot 2, pour un montant de 375 144,23 euros, deuxièmement, à la remise en état des équipements, effectuée par le lot 71, pour un montant de 16 270,87 euros, troisièmement, à la remise en état des équipements et au remplacement du transformateur, effectués par le lot 73, pour un montant de 372 353,05 euros et, quatrièmement, aux honoraires du lot D, pour un montant de 16 134,72 euros.
112 Or, selon l’article 1149 du code civil luxembourgeois, applicable à titre complémentaire au contrat TRC conformément à son article I.18, « [l]es dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé, sauf les exceptions et modifications [énoncées à ce même article] ». L’article 1151 dudit code prévoit ainsi que, « [d]ans le cas même où l’inexécution de la convention résulte du dol du débiteur, les dommages et intérêts ne doivent comprendre, à l’égard de la perte éprouvée par le créancier et du gain dont il a été privé, que ce qui est une suite immédiate et directe de l’inexécution de la convention ».
113 De même, selon les principes généraux du droit de l’Union en matière de responsabilité contractuelle, trois conditions doivent être remplies pour qu’une action en responsabilité contractuelle puisse aboutir, à savoir, tout d’abord, que l’institution en cause n’ait pas rempli ses obligations contractuelles, ensuite, que la partie requérante ait subi un dommage et, enfin, qu’il existe un lien de causalité entre le comportement de ladite institution et ce dommage (arrêt du 12 avril 2018, PY/EUCAP Sahel Niger, T‑763/16, EU:T:2018:181, point 66).
114 En l’espèce, toutefois, le Parlement, auquel incombe la charge de la preuve à cet égard, n’a pas démontré que l’interruption des travaux d’expertise complémentaire avait pu causer l’intégralité du dommage qu’il revendique. Si, comme le fait valoir le Parlement à cet égard, en vertu du principe de réparation intégrale, la réparation du préjudice doit replacer la victime, pour autant que possible, dans la situation où elle se serait trouvée si le dommage n’avait pas été causé, il n’y a lieu de réparer que le dommage qui constitue une suite immédiate et directe de l’inexécution de la convention.
115 Dès lors, le Parlement ne saurait valablement soutenir que l’intégralité du dommage qu’il a subi constitue une suite immédiate et directe de l’inexécution des obligations procédurales stipulées aux articles I.13.2 et I.13.2.1 du contrat TRC. Il y a lieu de considérer, en effet, que, à supposer que le Parlement ait pu subir un dommage résultant directement de la violation des obligations procédurales stipulées aux articles I.13.2 et I.13.2.1 du contrat TRC, celui-ci correspondrait, en substance, aux frais d’expertise supplémentaires qui auraient été encourus pour mener les opérations d’expertise à leur terme.
116 Or, il convient de relever à cet égard, à l’instar de Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij, que le Parlement paraît être en mesure de procéder à une analyse des responsabilités engagées au regard des manquements relevés par l’expert ou, à tout le moins, qu’il n’a pas démontré en quoi le rapport d’expertise préliminaire ainsi que le rapport d’expertise complémentaire ne lui permettaient pas de procéder à une telle analyse. En effet, ces rapports contiennent suffisamment d’indications pour permettre au Parlement de définir les origines du sinistre ainsi que les responsabilités éventuelles des différents intervenants sur le chantier. Au point 4.2.4 du rapport d’expertise complémentaire I, l’expert a ainsi relevé, s’agissant des « [c]auses techniques de survenance de l’inondation », que l’accumulation des eaux aux niveaux – 4 et – 5 du KAD était due à une combinaison de plusieurs facteurs, à savoir que « le réseau sous dallage se trouv[ait] dans un état quasi obstrué de débris émanant du chantier », que « les conduites hydrauliques sous dallage [n’étaient] pas dimensionnées pour un tel débit d’eau pluviale exceptionnel » et que, « [e]n sus, au vu des débits d’eau pluviale se drainant vers le puits collecteur, les deux pompes de relevage (fonctionnant en cascade) ne [s’étaient] pas déclenchées du fait d’un défaut de programmation ». Au point 8.3 du rapport d’expertise complémentaire I, l’expert a également constaté, s’agissant du caniveau encastré de reprise et d’évacuation des eaux pluviales, que « certains lots d’entreprises étaient informés de son état obstrué ». De plus, au point 4.2.4 du même rapport, l’expert « s’[est] interrog[é] sur les raisons qui avaient conduit le lot 73 à poursuivre l’installation de ces équipements techniques [au niveau – 4] eu égard au courrier transmis le [21 juin 2016] ».
117 Enfin, il convient de relever que, ayant été interrogé par le biais d’une mesure d’organisation de la procédure, notamment, sur le montant estimé du dommage indemnisable, dans l’hypothèse d’une violation des articles I.13.2 et I.13.2.1 du contrat TRC, le Parlement s’est, pour l’essentiel, limité à réitérer l’argumentation figurant dans ses écritures, à savoir celle selon laquelle l’intégralité du dommage encouru devrait être indemnisée à ce titre. Dans ses observations sur l’opposition, le Parlement a demandé que Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij soit condamnée à l’indemniser pour la totalité du préjudice subi ou, à titre subsidiaire, pour un montant déterminé ex æquo et bono.
118 Partant, dès lors que la demande du Parlement tendant à ce que l’intégralité des frais engendrés par la gestion du sinistre du KAD soit indemnisée au titre de la violation des articles I.13.2 et I.13.2.1 du contrat TRC doit être rejetée, pour les raisons exposées aux points 111 à 115 ci-dessus, il n’appartient pas au Tribunal, en l’absence de demande explicite en ce sens, d’examiner si d’autres mesures éventuelles auraient permis de replacer le Parlement dans la situation où il se serait trouvé si la violation des articles I.13.2 et I.13.2.1 du contrat TRC n’avait pas eu lieu.
119 Au vu de ce qui précède, tout en constatant une violation des articles I.13.2 et I.13.2.1 du contrat TRC par Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij en l’espèce, il y a lieu de rejeter la demande subsidiaire du Parlement, tendant à ce qu’il soit indemnisé de l’intégralité des frais engendrés par la gestion du sinistre du KAD ou qu’une indemnisation d’un montant déterminé ex æquo et bono lui soit versée.
Sur les cinquième et sixième chefs de conclusions, tendant à ce que le Tribunal condamne Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij au remboursement de certains frais d’expertise
120 S’agissant, enfin, de la demande du Parlement tendant à ce que Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij soit condamnée à supporter les frais d’expertise encourus par le bureau Luxcontrol, pour un montant de 16 636,00 euros, il y a lieu de constater, à l’instar du Parlement, que la mission de ce dernier avait été fixée par l’expert mandaté, au point 7.3 de son rapport d’expertise complémentaire I, comme suit :
« [vérifier le] matériel technique installé [et] stocké [au] niveau – 4 [en] se basant sur le listing produit par le [l]ot 73 [;]
[r]endre un avis technique circonstancié sur les mesures préventives prises après la survenance du sinistre ou qui auraient dû être prises par le [lot] 73 [;]
[r]endre un avis technique circonstancié sur les équipements techniques devant impérativement être remplacés [;]
[d]onner un avis circonstancié quant à l’évolution du matériel technique qui resterait éventuellement sur les lieux. »
121 Dès lors, dans la mesure où la demande principale du Parlement a été rejetée, en raison de l’applicabilité d’une clause d’exclusion, et où les frais d’expertise encourus par le bureau Luxcontrol trouvent leur source dans le rapport d’expertise complémentaire I, il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, la demande du Parlement tendant à ce que le Tribunal condamne Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij à supporter ces frais également.
122 En outre, comme le fait valoir Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij, l’article 21.1.11.3 du cahier des charges annexé au contrat TRC prévoit que « [n]e sont pas pris en considération comme frais normaux et restent donc à [la] charge du preneur d’assurance […] les frais exposés pour la recherche ou l’évaluation des dommages ».
123 Or, bien que le Parlement considère qu’il serait « très réducteur » de définir la mission du bureau Luxcontrol comme consistant en la recherche des dommages, il n’a pas été en mesure d’expliquer en quoi les différents éléments de la mission de l’expert, tels que rappelés au point 120 ci-dessus, ne correspondraient pas à cette définition.
124 Partant, il y a lieu de rejeter le chef de conclusions du Parlement tendant à ce que le Tribunal condamne Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij à supporter les frais d’expertise encourus par le bureau Luxcontrol.
Conclusion sur la demande d’opposition
125 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’opposition doit être accueillie et que les points 1 et 3 du dispositif de l’arrêt par défaut doivent être annulés.
Sur les dépens
126 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Aux termes de l’article 134, paragraphe 2, du règlement de procédure, si plusieurs parties succombent, le Tribunal décide du partage des dépens. Par ailleurs, aux termes de l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure, si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens.
127 En l’espèce, le Parlement ayant succombé à l’égard de Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij tant en ce qui concerne ses demandes principales qu’en ce qui concerne sa demande subsidiaire, sauf en ce qui concerne le constat formel de la violation des articles I.13.2 et I.13.2.1 du contrat TRC, il y a lieu de décider qu’il supportera ses propres dépens ainsi que les deux tiers des dépens encourus par Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (quatrième chambre)
déclare et arrête :
1) Les points 1 et 3 du dispositif de l’arrêt du 29 septembre 2021, Parlement/Axa Assurances Luxembourg e.a. (T‑384/19, EU:T:2021:630), sont annulés.
2) Le Parlement européen supportera ses propres dépens ainsi que les deux tiers des dépens encourus par Nationale-Nederlanden Schadeverzekering Maatschappij NV.
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da Silva Passos |
Pynnä |
Cassagnabère |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 10 septembre 2025.
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Le greffier |
Le président |
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V. Di Bucci |
R. Mastroianni |
* Langue de procédure : le français.