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Document 62023TO0115

Определение на председателя на Общия съд от 1 юни 2023 г.
Debreceni Egyetem срещу Съвет на Европейския съюз.
Обезпечително производство — Мерки за защита на бюджета на Съюза срещу нарушения на принципите на правовата държава в Унгария — Забрана за Комисията да поема правни задължения към тръстове в обществен интерес или към субекти, поддържани от такива тръстове — Член 2, параграф 2 от Регламент за изпълнение (ЕС) 2022/2506 — Молба за спиране на изпълнението — Липса на неотложност.
Дело T-115/23 R.

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2023:297

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

1er juin 2023 (*) 

« Référé – Mesures de protection du budget de l’Union contre les violations des principes de l’État de droit en Hongrie – Interdiction pour la Commission de contracter des engagements juridiques avec une fiducie (un trust) d’intérêt public ou avec une entité détenue par une telle fiducie – Article 2, paragraphe 2, de la décision d’exécution (UE) 2022/2506 – Demande de sursis à exécution – Défaut d’urgence »

Dans l’affaire T‑115/23 R,

Debreceni Egyetem, établie à Debrecen (Hongrie), représentée par Mes J. Rausch et Á. Papp, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. E. Rebasti, M. Bencze, Mmes L. Vétillard et B. Tószegi, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

1        Par sa demande fondée sur les articles 278 et 279 TFUE, la requérante, Debreceni Egyetem, sollicite le sursis à l’exécution de l’article 2, paragraphe 2, de la décision d’exécution (UE) 2022/2506 du Conseil, du 15 décembre 2022, relative à des mesures de protection du budget de l’Union contre les violations des principes de l’État de droit en Hongrie (JO 2022, L 325, p. 94, ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige et conclusions des parties

2        La requérante est une université hongroise, établie à Debrecen (Hongrie), qui est détenue par une fiducie (un trust) d’intérêt public, dont l’activité est notamment régie par la közfeladatot ellátó közérdekű vagyonkezelő alapítványokról szóló 2021. évi IX. törvény (loi hongroise no IX de 2021 relative aux fiducies d’intérêt public investies d’une mission de service public).

3        Le 16 décembre 2020, le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne ont adopté le règlement (UE, Euratom) 2020/2092 relatif à un régime général de conditionnalité pour la protection du budget de l’Union (JO 2020, L 433 I, p. 1).

4        Selon l’article 4, paragraphe 1, du règlement 2020/2092, des mesures appropriées sont prises lorsqu’il est établi, conformément à l’article 6 de ce même règlement, que des violations des principes de l’État de droit dans un État membre portent atteinte ou présentent un risque sérieux de porter atteinte à la bonne gestion financière du budget de l’Union européenne ou à la protection des intérêts financiers de l’Union, d’une manière suffisamment directe.

5        Le 15 décembre 2022, le Conseil a adopté la décision attaquée.

6        Le considérant 62 de la décision attaquée dispose que, « [e]n ce qui concerne les violations constatées en rapport avec les fiducies (trusts) d’intérêt public, le cadre réglementaire en Hongrie présente des faiblesses [...] qui font subsister le risque de conflit d’intérêts auquel la mesure corrective [proposée par la Hongrie sur la base du règlement 2020/2092] était censée remédier. Compte tenu de l’inadéquation de la mesure corrective, un risque grave pour le budget de l’Union subsiste, et la meilleure manière d’y remédier consiste en une interdiction de contracter de nouveaux engagements juridiques avec toute fiducie (tout trust) d’intérêt public et toute entité qu’elle détient dans le cadre d’un programme en gestion directe ou indirecte. Une telle mesure n’affecte pas l’allocation globale des fonds des programmes de l’Union en gestion directe et indirecte qui peuvent encore être utilisés pour d’autres entités et est donc suffisante pour assurer la protection du budget de l’Union tout en étant proportionnée à ce qui est strictement nécessaire pour atteindre cet objectif. »

7        Il ressort de l’article 1er de la décision attaquée que les conditions énoncées à l’article 4, paragraphe 1, du règlement 2020/2092 étaient remplies en vue de l’adoption de mesures appropriées visant à protéger le budget de l’Union contre les violations des principes de l’État de droit en Hongrie.

8        L’article 2, paragraphe 2, de la décision attaquée prévoit ce qui suit :

« Lorsque la Commission exécute le budget de l’Union en gestion directe ou indirecte, conformément à l’article 62, paragraphe 1, [sous] a) et c), du règlement (UE, Euratom) 2018/1046, aucun engagement juridique n’est contracté avec une fiducie (un trust) d’intérêt public établi(e) sur la base de la loi hongroise IX de 2021 ou avec une entité détenue par une telle fiducie (un tel trust) d’intérêt public. »

9        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 mars 2023, la requérante a introduit un recours tendant à l’annulation de l’article 2, paragraphe 2, de la décision attaquée.

10      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le même jour, la requérante a introduit la présente demande en référé, dans laquelle elle conclut à ce qu’il plaise au président du Tribunal d’ordonner le sursis à exécution de l’article 2, paragraphe 2, de la décision attaquée.

11      Dans ses observations sur la demande en référé, déposées au greffe du Tribunal le 17 mars 2023, le Conseil conclut à ce qu’il plaise au président du Tribunal :

–        rejeter la demande en référé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Considérations générales

12      Il ressort d’une lecture combinée des articles 278 et 279 TFUE, d’une part, et de l’article 256, paragraphe 1, TFUE, d’autre part, que le juge des référés peut, s’il estime que les circonstances l’exigent, ordonner le sursis à l’exécution d’un acte attaqué devant le Tribunal ou prescrire les mesures provisoires nécessaires, et ce en application de l’article 156 du règlement de procédure du Tribunal. Néanmoins, l’article 278 TFUE pose le principe du caractère non suspensif des recours, les actes adoptés par les institutions de l’Union bénéficiant d’une présomption de légalité. Ce n’est donc qu’à titre exceptionnel que le juge des référés peut ordonner le sursis à l’exécution d’un acte attaqué devant le Tribunal ou prescrire des mesures provisoires (ordonnance du 19 juillet 2016, Belgique/Commission, T‑131/16 R, EU:T:2016:427, point 12).

13      L’article 156, paragraphe 4, première phrase, du règlement de procédure dispose que les demandes en référé doivent spécifier « l’objet du litige, les circonstances établissant l’urgence ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue l’octroi de la mesure provisoire à laquelle elles concluent ».

14      Ainsi, le sursis à exécution et les autres mesures provisoires peuvent être accordés par le juge des référés s’il est établi que leur octroi est justifié à première vue en fait et en droit (fumus boni juris) et qu’ils sont urgents, en ce sens qu’il est nécessaire, pour éviter un préjudice grave et irréparable aux intérêts de la partie qui les sollicite, qu’ils soient édictés et produisent leurs effets avant la décision dans l’affaire principale. Ces conditions sont cumulatives, de telle sorte que les demandes de mesures provisoires doivent être rejetées dès lors que l’une d’elles fait défaut. Le juge des référés procède également, le cas échéant, à la mise en balance des intérêts en présence (voir ordonnance du 2 mars 2016, Evonik Degussa/Commission, C‑162/15 P‑R, EU:C:2016:142, point 21 et jurisprudence citée).

15      Dans le cadre de cet examen d’ensemble, le juge des référés dispose d’un large pouvoir d’appréciation et reste libre de déterminer, au regard des particularités de l’espèce, la manière dont ces différentes conditions doivent être vérifiées ainsi que l’ordre de cet examen, dès lors qu’aucune règle de droit ne lui impose un schéma d’analyse préétabli pour apprécier la nécessité de statuer provisoirement [voir ordonnance du 19 juillet 2012, Akhras/Conseil, C‑110/12 P(R), non publiée, EU:C:2012:507, point 23 et jurisprudence citée].

16      Compte tenu des éléments du dossier, le président du Tribunal estime qu’il dispose de tous les éléments nécessaires pour statuer sur la présente demande en référé, sans qu’il soit utile d’entendre, au préalable, les parties en leurs explications orales.

17      Dans les circonstances du cas d’espèce, il convient d’examiner d’abord si la condition relative à l’urgence est remplie.

 Sur la condition relative à l’urgence

18      Afin de vérifier si les mesures provisoires demandées sont urgentes, il convient de rappeler que la finalité de la procédure de référé est de garantir la pleine efficacité de la future décision définitive, afin d’éviter une lacune dans la protection juridique assurée par le juge de l’Union. Pour atteindre cet objectif, l’urgence doit, de manière générale, s’apprécier au regard de la nécessité qu’il y a de statuer provisoirement afin d’éviter qu’un préjudice grave et irréparable ne soit occasionné à la partie qui sollicite la protection provisoire. Il appartient à cette partie d’apporter la preuve qu’elle ne saurait attendre l’issue de la procédure relative au recours au fond sans subir un préjudice grave et irréparable (voir ordonnance du 14 janvier 2016, AGC Glass Europe e.a./Commission, C‑517/15 P‑R, EU:C:2016:21, point 27 et jurisprudence citée).

19      C’est à la lumière de ces critères qu’il convient d’examiner si la requérante parvient à démontrer l’urgence.

20      En l’espèce, la requérante soutient que l’article 2, paragraphe 2, de la décision attaquée lui cause un préjudice grave et irréparable du fait qu’elle perd des financements pour des projets qui sont normalement financés par l’Union et que, en conséquence, elle serait empêchée de participer à ces projets. En outre, le fait de perdre ces financements et la possibilité de participer aux projets aurait également des effets sur sa réputation. La requérante perdrait également des possibilités de publications scientifiques et perdrait par la suite du prestige scientifique et subirait un préjudice financier supplémentaire, considérant que la perte de possibilités de publications scientifiques provoquerait aussi une perte de financements octroyés par l’État hongrois. Enfin, la requérante avance que, en raison de la décision attaquée, de nombreux chercheurs et institutions de recherche ne tiennent plus compte d’elle dans leurs pré-propositions sur les projets.

21      Le Conseil conteste l’argumentation de la requérante.

22      En premier lieu, s’agissant du préjudice invoqué par la requérante consistant dans la perte de financements pour des projets qui sont normalement financés par l’Union, il convient de souligner que ce préjudice est de nature financière.

23      Or, selon une jurisprudence bien établie, si un préjudice de caractère financier ne peut, sauf circonstances exceptionnelles, être regardé comme irréparable ou même difficilement réparable, dès lors qu’il peut faire l’objet d’une compensation financière ultérieure, une mesure provisoire se justifie néanmoins s’il apparaît que, en l’absence de cette mesure, la partie sollicitant les mesures provisoires se trouverait dans une situation susceptible de mettre en péril son existence avant l’intervention de l’arrêt mettant fin à la procédure au principal (voir ordonnance du 16 novembre 2007, Dimos Peramatos/Commission, T‑312/07 R, non publiée, EU:T:2007:345, point 35 et jurisprudence citée).

24      Toutefois, pour pouvoir apprécier si le préjudice allégué présente un caractère grave et irréparable et justifie donc de suspendre, à titre exceptionnel, l’exécution de la décision attaquée, le juge des référés doit disposer d’indications concrètes et précises, étayées par des preuves documentaires détaillées et certifiées, qui démontrent la situation dans laquelle se trouve la partie sollicitant les mesures provisoires et permettent d’apprécier les conséquences qui résulteraient vraisemblablement de l’absence des mesures demandées. Il s’ensuit que ladite partie, notamment lorsqu’elle invoque la survenance d’un préjudice de nature financière, doit produire, pièces à l’appui, une image fidèle et globale de sa situation financière (voir ordonnance du 22 juin 2018, Arysta LifeScience Netherlands/Commission, T‑476/17 R, EU:T:2018:407, point 27 et jurisprudence citée). Par ailleurs, l’article 156, paragraphe 4, seconde phrase, du règlement de procédure prévoit expressément qu’une demande en référé doit contenir toutes les preuves et offres de preuve disponibles, destinées à justifier l’octroi des mesures provisoires sollicitées.

25      Or, il y a lieu de constater que, en l’espèce, la requérante a omis de fournir les indications concrètes et précises, étayées par des preuves documentaires détaillées et certifiées, qui démontreraient l’incidence de la décision attaquée sur sa situation financière globale. Par ailleurs, la requérante ne prétend pas que cette décision risquerait de mettre en péril son existence même.

26      À cet égard, premièrement, il ressort de la demande en référé que la requérante reçoit des subventions de l’État hongrois, dont le montant semble notamment être lié au nombre de publications réalisées. À supposer même que la décision attaquée impacterait de façon critique la situation financière de la requérante, il ne saurait être exclu que l’État hongrois intervienne pour assurer la continuité de l’activité en cause, dans la mesure où le budget de la requérante est partiellement financé par le budget de l’État hongrois.

27      Deuxièmement, la requérante ne fournit aucun élément d’information sur les financements qu’elle reçoit ou pourrait recevoir de sources privées.

28      Troisièmement, il ressort d’une lecture conjointe du considérant 62 et de l’article 2, paragraphe 2, de la décision attaquée, que la mesure contestée ne concerne que la conclusion de nouveaux engagements avec les fiducies (trusts) d’intérêt public de droit hongrois et les entités détenues par de telles fiducies (tels trusts) d’intérêt public. Elle n’affecte donc pas l’exécution d’engagements financiers préexistants, ainsi que le fait valoir le Conseil dans ses observations.

29      Dans ces circonstances, il y a lieu de constater que la requérante n’est pas parvenue à démontrer que la condition relative à l’urgence était remplie en raison du préjudice financier invoqué.

30      En deuxième lieu, la requérante se prévaut d’un préjudice qui découlerait du fait que la décision attaquée et ses conséquences financières influeraient sur ses possibilités de publication, ce qui affecterait partant son prestige scientifique et la possibilité de bénéficier d’un soutien financier de la part des autorités hongroises, ainsi que sur sa réputation. À cet égard, d’une part, il convient de relever que cette argumentation manque de clarté, notamment en ce qui concerne le soutien financier hongrois. Pour autant qu’elle se rapporte à la situation financière de la requérante, il convient de se référer aux points 26 à 28 ci-dessus. D’autre part, comme l’a fait valoir le Conseil dans ses observations, la décision attaquée est de nature financière dans la mesure où elle vise à protéger le budget de l’Union en interdisant à la Commission de contracter des engagements juridiques avec certaines entités de droit hongrois. La décision attaquée ne contient aucune interdiction ou prescription relative aux activités académiques ou scientifiques de la requérante.

31      En troisième lieu, s’agissant du préjudice invoqué par la requérante consistant en ce que de nombreux chercheurs et institutions de recherche, en raison de la décision attaquée, ne tiennent plus compte d’elle dans leurs pré-propositions sur les projets, la requérante ne fournit aucun élément concret à l’appui de cet argument.

32      D’une part, elle n’avance aucun indice susceptible d’établir un changement de comportement des chercheurs et des institutions de recherche à son égard. En outre, la décision d’inclure ou non un établissement d’enseignement dans un projet ne dépend pas nécessairement du fait que cet établissement bénéficie d’un financement de l’Union, mais peut également résulter d’autres considérations.

33      D’autre part, la requérante reste en défaut de démontrer que le fait de bénéficier de subventions de l’Union constitue un critère de sélection pour la participation dans des programmes de recherche ou académiques.

34      Il résulte de tout ce qui précède que la demande en référé doit être rejetée à défaut pour la requérante d’établir que la condition relative à l’urgence est remplie, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la recevabilité de la présente demande en référé, d’examiner le fumus boni juris ou de procéder à la mise en balance des intérêts.

35      En vertu de l’article 158, paragraphe 5, du règlement de procédure, il convient de réserver les dépens.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      La demande en référé est rejetée.

2)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 1er juin 2023.

Le greffier faisant fonction

 

Le président

T. Henze

 

M. van der Woude


*      Langue de procédure : le hongrois.

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