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Document 52023AE2548
Opinion of the European Economic and Social Committee on ‘Proposal for a Council Decision on guidelines for the employment policies of the Member States’ (COM(2023) 599 final — 2023/0173 (NLE))
Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l’emploi des États membres [COM(2023) 599 final — 2023/0173 (NLE)]
Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l’emploi des États membres [COM(2023) 599 final — 2023/0173 (NLE)]
EESC 2023/02548
JO C, C/2023/870, 8.12.2023, ELI: http://data.europa.eu/eli/C/2023/870/oj (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, GA, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)
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Journal officiel |
FR Séries C |
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C/2023/870 |
8.12.2023 |
Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l’emploi des États membres
[COM(2023) 599 final — 2023/0173 (NLE)]
(C/2023/870)
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Rapporteur: |
Carlos Manuel TRINDADE |
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Consultation |
Conseil de l’Union européenne, 9.6.2023 |
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Base juridique |
Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne |
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Compétence |
Section «Emploi, affaires sociales et citoyenneté» |
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Adoption en section |
5.9.2023 |
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Adoption en session plénière |
20.9.2023 |
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Session plénière no |
581 |
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Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
197/2/5 |
1. Conclusions et recommandations
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1.1. |
Le Comité économique et social européen (CESE) accueille favorablement la proposition de décision du Conseil sur les lignes directrices pour les politiques de l’emploi des États membres. Ces lignes directrices constituent une référence précieuse pour la création d’emplois de qualité dans une économie durable et compétitive sur les plans environnemental et social. La coordination des politiques de l’emploi et le suivi des indicateurs sociaux des États membres sont essentiels pour promouvoir la convergence vers le haut entre ceux-ci et réduire les disparités sociales et économiques. |
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1.2. |
Le CESE invite les États membres à mettre en œuvre le principe de convergence vers le haut dans le fonctionnement du marché du travail et demande à la Commission d’élaborer un processus pour le concrétiser. |
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1.3. |
Le CESE attire l’attention sur le fait que l’instabilité politique et les niveaux élevés de l’inflation et des taux d’intérêt persistent, réduisant ainsi le pouvoir d’achat des citoyens et la compétitivité des entreprises et perturbant les décisions d’investissement dans les secteurs privé et public. Ces difficultés pourraient compromettre la mise en œuvre des lignes directrices pour l’emploi dans les États membres, la réalisation du socle européen des droits sociaux et celle des objectifs à l’horizon 2030. |
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1.4. |
Dans ces circonstances, le CESE estime qu’il est d’autant plus nécessaire de prendre des initiatives pour accroître tout à la fois le rôle des partenaires sociaux et leur participation à l’élaboration et l’exécution des réformes et politiques sociales, économiques et de l’emploi, notamment en renforçant leurs capacités. |
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1.5. |
Le CESE demande aux États membres de créer un environnement favorable, y compris pour les organisations de la société civile actives dans le domaine de l’emploi et des questions sociales. |
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1.6. |
Le CESE exprime clairement ses préoccupations quant aux éventuelles conséquences d’un rétablissement des règles budgétaires en 2024, qui mettrait un terme à la suspension en vigueur ces dernières années. À cet égard, le CESE réaffirme les positions qu’il a récemment adoptées en ce qui concerne les modifications apportées au cadre budgétaire de l’Union et qui devraient a) renforcer l’investissement public, b) ménager une plus grande marge de manœuvre cyclique et c) permettre davantage de flexibilité et de différenciation entre les pays dans les trajectoires d’ajustement de la dette, tout en garantissant la viabilité budgétaire (1). |
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1.7. |
Le CESE est convaincu que, comme l’a montré le passé, l’austérité n’est pas une solution. Ce sont, au contraire, les politiques publiques solidaires et durables, sur le modèle de celles mises en œuvre pendant la pandémie et au début de la guerre, qui offrent la réponse indispensable. |
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1.8. |
Le CESE préconise de dynamiser l’accès au marché du travail, notamment en augmentant le taux de participation des femmes, des jeunes, des personnes handicapées, des personnes inactives, des citoyens peu qualifiés, des ressortissants de pays tiers et d’autres groupes vulnérables, en promouvant la viabilité économique et sociale des entreprises, le renforcement des compétences des travailleurs et l’amélioration des conditions de travail. Cet objectif peut être atteint en tirant pleinement parti de l’adoption des technologies numériques et des outils favorisant la durabilité environnementale, ainsi qu’en promouvant l’apprentissage tout au long de la vie. L’Union européenne (UE) et les États membres doivent renforcer l’emploi durable dans les régions rurales, notamment en augmentant la compétitivité des PME et des microentreprises et des productions régionales, par exemple en soutenant les entreprises de l’économie sociale et en favorisant l’entrepreneuriat, y compris au moyen d’une politique fiscale et de fonds de soutien appropriés. |
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1.9. |
Le CESE note qu’il est essentiel de renforcer l’offre de main-d’œuvre et d’améliorer l’accès à l’emploi, aux qualifications et aux compétences tout au long de la vie. Cet objectif exige que chaque État membre soit en mesure de coordonner efficacement les mesures d’investissement en faveur de la formation et du marché du travail prévues dans les plans nationaux pour la reprise et la résilience et les Fonds structurels. Dans le contexte des évolutions technologiques rapides et de la transition environnementale, il est d’autant plus important de reconnaître et de garantir le droit à l’apprentissage tout au long de la vie, et d’assurer un accès effectif à une éducation et une formation de qualité, ainsi qu’à l’adaptation des compétences. Le recours à des ressortissants de pays tiers et la reconnaissance des qualifications peuvent constituer des outils importants pour remédier aux pénuries de main-d’œuvre et améliorer l’insertion sur le marché du travail. |
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1.10. |
En ce qui concerne l’amélioration du fonctionnement des marchés du travail et de l’efficacité du dialogue social, le CESE réitère les opinions qu’il a déjà exprimées, à savoir que (2):
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1.11. |
S’agissant de promouvoir l’égalité des chances pour tous, de favoriser l’inclusion sociale et de combattre la pauvreté, le CESE rappelle qu’il importe d’élaborer des politiques d’inclusion efficaces, y compris des mesures appropriées pour les personnes peu qualifiées ou inactives afin de soutenir leur participation au marché du travail et d’améliorer leur employabilité. Il souligne en outre qu’il est essentiel, en combinaison avec d’autres stratégies de lutte contre la pauvreté, de prendre des mesures pour ne pas risquer de créer de nouvelles formes de pauvreté chez les travailleurs à faibles revenus.
Le CESE réaffirme également qu’il soutient que (3): |
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1.11.1. |
la réduction de la pauvreté des travailleurs doit passer par une action combinée menée au moyen de différents instruments et mesures d’intervention négociés par les partenaires sociaux. Outre des rémunérations décentes, y compris des salaires minimaux adéquats, ces actions peuvent inclure des incitations financières bien conçues et limitées dans le temps, accompagnées de mesures ciblées et efficaces pour l’acquisition de compétences ou leur perfectionnement. Il est important d’aider les États membres dans ces processus; |
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1.11.2. |
un mécanisme de soutien ciblé est particulièrement important dans le cas des chômeurs de longue durée ou des personnes inactives, car il accroît leurs chances de parvenir à s’insérer sur le marché du travail ou à y faire leur retour et constitue un facteur important de préservation de l’emploi. La pandémie ayant touché les jeunes avec une intensité particulière, il est primordial de procéder à des interventions les ciblant; |
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1.11.3. |
pour faire baisser le taux d’inactivité, il s’impose de déployer des efforts qui ramènent à l’emploi les populations qui sont plus éloignées du marché du travail. Ce point est particulièrement important dans le contexte actuel de graves pénuries de main-d’œuvre qui touchent l’ensemble de l’UE. Les États membres, en particulier ceux que le tableau de bord social range dans la catégorie des moins performants en la matière, devraient être incités, notamment grâce à une utilisation cohérente de ressources de l’Union, à arrêter des mesures qui encouragent les employeurs à recruter des personnes handicapées ou, si possible, promeuvent l’emploi indépendant. Les entités de l’économie sociale sont essentielles à cet égard. |
2. Observations générales et contexte
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2.1. |
Le paquet de printemps du semestre européen comprend une communication portant sur ses principaux éléments, ainsi que des rapports et des recommandations spécifiques pour chacun des 27 États membres (4). |
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2.2. |
La proposition présentée en 2023 par la Commission européenne en ce qui concerne les lignes directrices pour les politiques de l’emploi des États membres est identique à celle de 2022, étant donné que le contexte reste inchangé, notamment pour ce qui est des éléments liés à l’invasion de l’Ukraine par la Russie. |
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2.3. |
Les performances de l’UE ont été meilleures qu’il n’avait été prévu dans le contexte de la pandémie et de la guerre en Ukraine et, malgré le ralentissement attendu en 2023, avec un taux qui devrait être de 1,0 % contre 3,5 % en 2022, on estime que la croissance augmentera de 1,7 % en 2024. Toutefois, la poursuite de la guerre et la persistance de l’inflation ont entraîné d’importantes pertes de pouvoir d’achat (5) et demeurent un défi pour les entreprises, en particulier les PME et les microentreprises. |
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2.4. |
Les augmentations des taux d’intérêt ont eu une incidence sur les niveaux d’investissement, en particulier pour les PME et les microentreprises, et sur le coût du logement, de sorte qu’elles ont obéré ainsi la compétitivité des entreprises et le pouvoir d’achat des ménages et réduit la capacité de l’économie européenne à créer des emplois et à garantir un niveau de vie décent, tout en étant par ailleurs susceptibles de compromettre les objectifs de l’Europe à l’horizon 2030. |
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2.5. |
Le CESE réaffirme que «tout en s’employant à assurer l’inclusion et l’équité, les politiques des États membres en matière d’emploi devraient également épouser les évolutions économiques et sociales. Il y a lieu d’évaluer soigneusement les effets produits par les politiques du marché du travail, afin de s’assurer qu’elles encouragent bien une reprise pérenne et qu’elles n’aboutissent pas au contraire à faire baisser le taux d’emploi, produire des emplois de moindre qualité et affaiblir le pouvoir d’achat des particuliers. La question des pénuries de main-d’œuvre et de compétences devrait bénéficier d’une plus grande attention et mener à l’élaboration, par la suite, de recommandations d’action et d’initiatives spécifiques, s’inscrivant dans la logique du plan d’action du socle européen des droits sociaux (SEDS)» (6). |
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2.6. |
Le CESE constate (7) que la convergence vers le haut entre les États membres en ce qui concerne le fonctionnement du marché du travail n’a pas été appliquée et il invite les États membres à mettre en œuvre les lignes directrices pour l’emploi et à garantir cette convergence. |
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2.7. |
Le CESE note que les lignes directrices pour l’emploi ont un lien direct avec les critères du pacte de stabilité et de croissance (PSC), qui impose aux États membres un plafond de 3 % pour le déficit et de 60 % pour la dette publique. Ces règles ont été suspendues de 2020 à 2022 ainsi qu’en 2023 à la suite de la pandémie et de la guerre en Ukraine, qui ont déclenché une hausse des prix de l’énergie et des denrées alimentaires, entraînant une flambée de l’inflation et une augmentation des taux d’intérêt, lesquelles ont produit une incidence négative sur le service de la dette, les déficits et les investissements publics dans les États membres. |
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2.8. |
Face à la persistance de l’incertitude, de l’inflation et des taux d’intérêt élevés, il est justifié de maintenir des politiques publiques de soutien aux ménages et aux entreprises, ce qui peut exiger d’accroître les financements publics ou, du moins, de ne pas les revoir à la baisse. Le CESE demande une évaluation de l’efficacité des politiques publiques, y compris les idées d’éventuelles économies ou réaffectations, en vue de garantir qu’elles sont bien conçues et produisent les résultats escomptés. |
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2.9. |
Toutefois, si les règles du pacte de stabilité et de croissance sont rétablies en 2024, comme l’envisage la Commission (8), le CESE, s’appuyant sur les expériences passées, exprime de vives inquiétudes quant aux éventuelles mesures d’austérité et à leur incidence éventuelle sur la mise en œuvre des lignes directrices pour l’emploi. |
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2.10. |
Les nouvelles règles proposées (9) prévoient que la Commission présente une trajectoire d’ajustement budgétaire de référence, couvrant quatre ans, sur la base de sa méthode d’analyse de la soutenabilité de la dette. Chaque État membre devrait présenter un plan à moyen terme exposant sa trajectoire budgétaire ainsi que ses engagements prioritaires en matière d’investissements publics et de réformes qui, tout en évitant une politique budgétaire procyclique, garantissent ensemble une réduction durable et progressive de la dette et une croissance durable et inclusive, ainsi que des engagements plus larges en matière de réformes et d’investissements, concernant notamment les transitions écologique et numérique, la résilience sociale et économique et la mise en œuvre du socle européen des droits sociaux. Afin d’assister les États membres dans l’élaboration de leur plan budgétaire et structurel à moyen terme, la Commission devrait proposer une trajectoire technique permettant de ramener et de maintenir le déficit public sous la valeur de référence de 3 % du PIB. Le CESE craint que la nouvelle règle envisagée par la Commission n’oblige les États membres dont le déficit dépasse 3 % du PIB à le réduire d’au moins 0,5 % du PIB par an. Cette prescription imposerait aux 14 États membres concernés de baisser leurs dépenses, de les réaffecter et/ou d’augmenter leurs impôts. |
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2.11. |
Dans ce contexte, le CESE attire l’attention sur le fait qu’il convient d’éviter un éventuel retour à la situation économique et sociale qu’a connue l’Union lors de la crise de 2008, où la solution retenue dans certains États membres avait été celle de l’austérité. Ce choix avait provoqué la faillite de nombreuses PME, fait chuter le nombre d’emplois et entraîné une baisse des salaires, une augmentation de la pauvreté et un sous-financement des services publics, dommageable pour l’accès des citoyens aux soins de santé et à l’éducation. Aujourd’hui, alors que quinze années se sont écoulées et que l’Union est confrontée à une autre crise exogène, la guerre en l’occurrence, l’austérité pourrait sérieusement entraver la mise en œuvre des lignes directrices pour l’emploi, ainsi que la transition écologique et numérique et la mise en œuvre du socle européen des droits sociaux. |
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2.12. |
Dans le contexte actuel, le CESE demande que la Commission prenne dûment en considération les propositions suivantes: i) étudier la faisabilité de l’introduction d’une «règle d’or pour les investissements publics» afin de permettre aux États membres d’allouer des fonds suffisants pour soutenir les transitions écologique et numérique et atteindre les objectifs de l’Union, ii) maintenir des mécanismes européens de solidarité qui, comme la facilité pour la reprise et la résilience, ont prouvé leur efficacité, iii) veiller à ce que les conditions d’accès aux financements publics soient remplies dans les États membres et à ce que les entreprises qui ne respectent ni leurs obligations fiscales ni la législation du travail se voient refuser cet accès. |
3. Observations particulières
3.1. Ligne directrice no 5: stimuler la demande de main-d’œuvre
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3.1.1. |
Les États membres devraient tout particulièrement veiller à favoriser une économie sociale de marché durable ainsi qu’à faciliter et soutenir les investissements dans la création d’emplois de qualité, en exploitant les potentialités associées aux transitions numérique et écologique, dans la perspective des objectifs à l’horizon 2030. L’augmentation du taux de participation des femmes, des jeunes, des personnes handicapées, des personnes inactives, des citoyens peu qualifiés, des personnes provenant de pays tiers et d’autres groupes vulnérables constitue également un sujet sur lequel les États membres devraient se concentrer (10), tout en mettant à disposition des services et des mesures d’aide à l’emploi adéquats. |
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3.1.2. |
En 2021, cinq États membres affichaient un taux d’inactivité de plus de 30 % (11), ce qui est inacceptable. Le CESE appelle les États membres à réagir rapidement et à proposer des mesures efficaces pour faire baisser ce taux et ramener davantage de personnes sur le marché du travail. |
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3.1.3. |
Le CESE estime que les États membres doivent accélérer la mise en œuvre des plans pour la reprise et la résilience et utiliser les mécanismes de financement disponibles afin d’accroître les investissements publics et privés. La participation des partenaires sociaux nationaux à la mise en œuvre de ces plans est cruciale pour assurer l’efficacité et la valeur ajoutée des solutions proposées. Le CESE considère que l’objectif des fonds publics est de promouvoir la création d’emplois de qualité, en accordant une attention particulière aux jeunes, aux femmes et aux personnes handicapées, et que l’accès auxdits fonds devrait être directement lié à cet objectif. |
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3.1.4. |
L’inflation et les taux d’intérêt élevés sont en train de provoquer une baisse de la croissance économique et une diminution des salaires réels dans la plupart des États membres (12), ce qui maintient un pourcentage élevé de travailleurs pauvres en Europe. Le CESE soutient l’appel lancé aux États membres pour qu’ils surveillent et atténuent les effets des pressions inflationnistes, concernant en particulier l’énergie, l’alimentation et le pouvoir d’achat des ménages, y compris en s’employant à lutter contre la précarité énergétique et à dispenser un soutien en matière de consommation d’énergie et d’efficacité énergétique. Il convient que les États membres encouragent la négociation collective et l’évolution des rémunérations, dont les salaires minimums légaux, tout en préservant le pouvoir d’achat, en particulier celui des travailleurs faiblement rémunérés, dans le respect de l’autonomie des partenaires sociaux et des pratiques nationales. |
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3.1.5. |
Le CESE rappelle les positions développées dans son avis SOC/737 (13) pour ce qui est de la nécessité de continuer à investir dans une culture de prévention des accidents, maladies professionnelles et risques sur le lieu de travail (paragraphe 3.1.6) et en ce qui concerne les salaires minimums (paragraphe 3.1.7), ainsi que l’autonomie des partenaires sociaux et la négociation collective (paragraphe 3.1.8). |
3.2. Ligne directrice no 6: renforcer l’offre de main-d’œuvre et améliorer l’accès à l’emploi ainsi que l’acquisition de qualifications et de compétences tout au long de la vie
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3.2.1. |
Le CESE réitère son soutien à l’appel lancé par la Commission aux États membres pour qu’ils promeuvent la durabilité, la productivité, l’employabilité et l’investissement dans le capital humain en favorisant l’acquisition d’aptitudes et de compétences tout au long de la vie et en répondant aux besoins actuels et futurs du marché du travail, conformément au grand objectif de l’Union en matière de compétences à l’horizon 2030. Il la soutient de même lorsqu’elle invite les États membres à moderniser les systèmes d’éducation et de formation et à y réaliser des investissements afin de fournir une éducation inclusive et de qualité, dont un enseignement et une formation professionnels et l’accès à l’acquisition de compétences numériques, linguistiques et entrepreneuriales. Des compétences telles que la résolution de problèmes, la créativité et l’innovation demeurent importantes face à l’évolution du monde du travail. |
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3.2.2. |
Sur la base de l’édition 2023 du rapport conjoint sur l’emploi, certains aspects de la situation existante peuvent être mis en évidence, à savoir: |
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3.2.2.1. |
le taux de décrochage scolaire et d’abandon de formation était de 9,7 % en 2021, avec des disparités entre États membres, entre régions et en ce qui concerne les catégories les plus défavorisées de la population, pour lesquelles il est le plus élevé; |
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3.2.2.2. |
les différences socio-économiques continuent de se traduire par une inégalité dans les acquis d’apprentissage: 22 % des jeunes de 15 ans n’atteignent pas les normes minimales d’apprentissage de la lecture, des mathématiques et des sciences, soit une performance en-deçà des objectifs européens à l’horizon 2030, qui visent moins de 15 %. Cet écart est plus large en ce qui concerne les groupes de population les plus défavorisés. L’apprentissage et la revitalisation des professions et des compétences traditionnelles peuvent contribuer à trouver des solutions; |
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3.2.2.3. |
chez les élèves de 8e année, qui ont des difficultés en ce qui concerne la maîtrise de l’informatique et de la culture de l’information, le taux de numérisation reste insuffisant, se situant à un niveau inférieur à 15 %, les filles se démarquant pour leur part dans un sens favorable, de l’ordre de dix points de pourcentage; |
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3.2.2.4. |
bien que la fréquentation de l’enseignement supérieur soit en hausse dans l’Union européenne, atteignant 41,2 % en 2021, des disparités persistent entre les États membres et entre les femmes et les hommes; |
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3.2.2.5. |
dans tous les États membres, la participation à la formation des adultes est plus élevée pour les plus instruits et diminue jusqu’aux niveaux d’éducation les plus faibles, avec des disparités persistantes entre les États membres, les zones urbaines et rurales et au détriment des catégories de population les plus défavorisées, pour lesquelles la différence est plus forte. Le CESE considère qu’il importe de renforcer l’utilisation des technologies dans les zones rurales au moyen de bonnes infrastructures, qui soutiendraient à la fois l’éducation, la formation en ligne et d’éventuelles activités commerciales à distance; |
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3.2.2.6. |
en 2021, seuls 54 % de la population adulte de l’Union européenne possédaient des compétences numériques de base, bien en deçà de l’objectif fixé pour 2030, qui est de 80 %; |
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3.2.2.7. |
la situation des jeunes s’est améliorée, fût-ce souvent au prix d’accepter des emplois précaires et de qualité médiocre, dans la mesure où le taux de chômage des 15 à 24 ans a reculé, passant de 19,1 % au premier trimestre de 2020 à 15,3 % au troisième trimestre de 2022. Ce taux est près de trois fois plus élevé que celui de la classe d’âge des 25 à 74 ans (5,2 %) et sur ce point, les inégalités persistent entre les États membres. Le CESE estime qu’il importe que le cadre de qualité pour les stages soit mis à jour de façon à soutenir l’entrée des jeunes sur le marché du travail; |
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3.2.2.8. |
le taux de jeunes qui ne travaillent pas et ne suivent pas d’études ou de formation est resté à 13,1 % et présente des disparités d’un État membre à l’autre. Il existe des différences entre les femmes et les hommes, à raison de 14,5 % contre 11,8 %, et entre les jeunes issus de pays tiers et ceux qui sont autochtones, à hauteur de 24,7 % pour les premiers contre 12,3 % pour les seconds. Le CESE est d’avis qu’il convient de combler l’écart qui existe en matière d’emploi entre les zones rurales et urbaines par des politiques publiques appropriées. Afin d’encourager et d’accroître l’entrée des jeunes sur le marché du travail, le CESE reconnaît le grand potentiel que revêt la formation en alternance et il invite les États membres à renforcer et à mettre en œuvre cet instrument; |
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3.2.2.9. |
en ce qui concerne le taux d’emploi, les différences entre celui des femmes, de 67,7 %, et celui des hommes, de 78,5 %, demeurent à des niveaux élevés au sein de l’Union européenne; l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes reste de 13 % en 2020; |
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3.2.2.10. |
le taux d’emploi des personnes âgées de 55 à 64 ans a atteint 60,5 % en 2021, soit 1,3 point de pourcentage de plus qu’en 2020 et 15,4 points de pourcentage de plus qu’il y a dix ans. Il convient de noter que chez les personnes âgées, l’emploi des femmes a enregistré une augmentation plus importante que celui des hommes. Il existe de grandes disparités entre les États membres, certains pays du nord de l’Union affichant des taux supérieurs à 70 % et d’autres des taux inférieurs à 50 %; |
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3.2.2.11. |
au sein de l’Union européenne, le taux d’emploi présente une différence de 10,8 points de pourcentage entre les autochtones et personnes provenant de pays tiers, soit 74,2 % contre 63,4 %, étant entendu que des différences existent entre les États membres (14). Il convient de noter que si pour les personnes très instruites, le taux d’emploi de ces deux catégories ne présente pratiquement aucun contraste, celui des personnes autochtones ayant un faible niveau d’éducation est de 54,7 %. Le CESE invite les États membres à faciliter le recours à des travailleurs qualifiés provenant de pays tiers pour remédier aux pénuries de main-d’œuvre, en garantissant des conditions de travail, de logement et d’autres conditions sociales qui soient dignes, ainsi que l’accès à la citoyenneté lorsque les conditions requises sont remplies; |
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3.2.2.12. |
la participation des personnes handicapées au marché du travail pourrait augmenter de manière considérable, étant donné que leur taux d’emploi accuse un retard de 23 points de pourcentage, avec de fortes variations entre les divers États membres. Le CESE souligne que la condition essentielle pour accroître l’emploi de ces personnes relève des compétences requises par les employeurs, souvent dans le contexte des marchés du travail locaux. Le télétravail offre également de nouvelles possibilités de faciliter leur accès au marché du travail. Le CESE invite les États membres à remédier à cette situation. |
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3.2.3. |
Le CESE rappelle les positions exprimées dans l’avis SOC/737 relatives à la nécessité de disposer de compétences et de formations tout au long de la vie (paragraphe 3.2.1), aux graves pénuries de main-d’œuvre et dans l’éducation et la formation des adultes et aux investissements à y consentir (paragraphe 3.2.4), au besoin d’augmenter le niveau en matière de qualifications dans tous les États membres (paragraphe 3.2.7) et à l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes (paragraphe 3.2.9). |
3.3. Ligne directrice no 7: améliorer le fonctionnement des marchés du travail et l’efficacité du dialogue social
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3.3.1. |
Le CESE soutient l’appel lancé aux États membres pour qu’ils collaborent avec les partenaires sociaux afin de définir des conditions de travail équitables, qui tiennent la balance égale entre les droits et les obligations des employeurs et des travailleurs. Ils se doivent de proposer des politiques et des mesures appropriées pour réduire et prévenir la segmentation et l’insécurité au sein des marchés du travail, de lutter contre le travail non déclaré et le faux travail indépendant, et de favoriser la transition vers des formes d’emploi à durée indéterminée. Ils doivent, conjointement avec les partenaires sociaux, améliorer le fonctionnement des marchés du travail et l’efficacité du dialogue social (15). |
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3.3.2. |
Sur la base de l’édition 2023 du rapport conjoint sur l’emploi, certains aspects de la situation existante peuvent être mis en évidence, à savoir: |
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3.3.2.1. |
le travail temporaire chez les travailleurs de 20 à 60 ans a atteint un niveau de 11,2 %, avec des différences entre les États membres. Certains États membres affichent un pourcentage élevé de travail temporaire, supérieur à 15 %, et, dans le même temps, de faibles taux de transition vers des contrats à durée indéterminée, de moins de 30 %; |
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3.3.2.2. |
le travail intérimaire est le plus répandu chez les jeunes de 15 à 24 ans, pour lesquels il atteint 48,9 %, soit 37 et 42,7 points de pourcentage de plus que chez les 25-54 ans et les 55-64 ans, respectivement. S’échelonnant de 3 à 55 %, les taux varient fortement d’un État membre à l’autre. L’écart entre les hommes et les femmes en matière de travail temporaire s’est légèrement creusé, avec des différences entre les États membres; |
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3.3.2.3. |
l’emploi temporaire involontaire a atteint 7,8 %, avec des disparités qui subsistent entre les États membres; |
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3.3.2.4. |
le travail à temps partiel se situe à 17,2 % et présente des différences importantes entre les États membres, sachant qu’il est, en général, largement involontaire. Le CESE estime qu’il faut supprimer les obstacles qui empêchent les citoyens de faire d’autres choix, prévoir les mesures nécessaires pour concilier vie professionnelle et vie familiale et fournir des services de soutien aux familles. La disponibilité de soins pour les enfants et les personnes âgées revêt une importance particulière; |
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3.3.2.5. |
en 2020, au sein de l’Union européenne, les travailleurs indépendants qui n’emploient pas de salariés représentaient 9 % de l’emploi total dans la classe d’âge des 20 à 64 ans. Il existe toutefois des différences entre les États membres; |
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3.3.2.6. |
les plateformes numériques ont étendu leurs activités dans l’Union européenne, leur chiffre d’affaires étant passé, selon les estimations, de 3 milliards en 2016 à 14 milliards en 2020, soit une multiplication par 4,7. Leurs bénéfices consolidés au cours de la même période ont été multipliés par 2,4, grimpant de 2,6 à 6,3 milliards. Il convient de noter qu’au sein de l’Union, les neuf dixièmes des plateformes rangent leurs travailleurs dans la catégorie des indépendants. Comme l’a relevé la Commission européenne (16), on estime que, sur un total de 28 millions, «jusqu’à 5,5 millions de personnes travaillant via des plateformes de travail numériques se retrouvent à tort considérées comme des travailleurs indépendants et ne bénéficient pas des droits et protections des salariés qui s’appliquent aux autres. Dans ces situations, elles sont souvent confrontées à de mauvaises conditions de travail et/ou à un accès insuffisant à la protection sociale». Certains États membres ont adopté des mesures législatives pour améliorer les conditions de travail sur les plateformes et, dans d’autres, les partenaires sociaux ont négocié des conventions collectives sectorielles; |
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3.3.2.7. |
les inspections du travail et les syndicats ont joué un rôle essentiel dans la détection et la prévention des mauvaises conditions de travail et dans la lutte contre le travail non déclaré. Le CESE considère qu’il reste beaucoup à faire dans ce domaine, en particulier dans les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre caractérisés par l’emploi massif de migrants. À cet égard, le CESE se félicite du bon travail réalisé par l’Autorité européenne du travail; |
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3.3.2.8. |
avec la pandémie, le télétravail s’est répandu dans l’Union et les États membres ont utilisé des manières diverses de réglementer cette forme de travail, notamment au moyen de la législation, de négociations collectives sectorielles ou d’accords, conclus collectivement au niveau de l’entreprise ou passés avec chaque travailleur. Il convient de noter que le télétravail s’accompagne de certains risques, tels que des longs horaires de travail, un certain isolement, un déséquilibre entre vie professionnelle et vie privée, ainsi que des risques psychosociaux. Toutefois, le télétravail offre également de nombreuses possibilités, notamment en ce qu’il facilite l’accès au marché du travail pour les personnes qui en sont éloignées, par exemple, les personnes handicapées ou les habitants des zones rurales. S’il est correctement géré et rémunéré, le télétravail pourrait améliorer l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée; |
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3.3.2.9. |
dans l’Union européenne, le chômage de longue durée s’élevait à 2,8 % en 2021, il existe toutefois des différences entre les États membres; |
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3.3.2.10. |
en 2021, 42,2 % des chômeurs de courte durée bénéficiaient, dans l’Union européenne, de prestations de chômage, cependant que des disparités importantes subsistaient entre les États membres, avec des taux de couverture supérieurs à 50 % dans certains cas et inférieurs à 25 % dans d’autres; |
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3.3.2.11. |
les services publics de l’emploi jouent un rôle essentiel, mais il importe qu’ils renforcent leurs capacités et accroissent leur activité. Il est également nécessaire d’encourager leur coopération avec les services privés de l’emploi et les services sociaux. Le CESE estime qu’il convient de développer davantage les relations avec les partenaires sociaux. |
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3.3.3. |
Le CESE rappelle les positions exprimées dans l’avis SOC/737 en ce qui concerne le rôle des partenaires sociaux dans la transition du marché du travail et le dialogue social (paragraphes 3.3.2 et 3.3.4). |
3.4. Ligne directrice no 8: promouvoir l’égalité des chances pour tous, favoriser l’inclusion sociale et combattre la pauvreté
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3.4.1. |
Le CESE soutient l’appel lancé par la Commission aux États membres pour qu’ils promeuvent des marchés du travail inclusifs et ouverts à tous, en mettant en place des mesures efficaces pour lutter contre toutes les formes de discrimination et favoriser l’égalité des chances pour tous, en particulier pour les groupes sous-représentés sur le marché du travail. Ils devraient assurer l’égalité de traitement en ce qui concerne l’emploi, la protection sociale, les soins de santé, la garde d’enfants, les soins de longue durée, l’éducation et l’accès aux biens et aux services, y compris au logement, sans distinction de sexe, de race ou d’origine ethnique, de religion ou de convictions, de handicap, d’âge ou d’orientation sexuelle (17). Le CESE invite les États membres à améliorer l’accès aux services de soutien à l’emploi, notamment en recourant davantage aux emplois assistés et en continuant à appuyer l’entrepreneuriat social. |
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3.4.2. |
Le CESE est d’avis que des marchés du travail inclusifs nécessitent la coopération des partenaires sociaux, des services de l’emploi et de la société civile au sens large afin de toucher les personnes inactives et les (ré)intégrer sur le marché du travail. Le meilleur moyen de sortir de la pauvreté est de disposer d’un travail de qualité et de compétences qui soient à jour et en évolution constante, afin de contribuer à l’épanouissement personnel et de garantir la pleine participation à la vie sociale et l’exercice des droits de chacun en tant que citoyen. |
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3.4.3. |
Le CESE réitère les positions exprimées dans l’avis SOC/737 à propos de la promotion de l’égalité des chances pour tous et de l’inclusivité des marchés du travail (paragraphe 3.4.1), de l’approche personnalisée pour les groupes vulnérables (paragraphe 3.4.2), de la lutte contre la pauvreté des enfants (paragraphe 3.4.5), ainsi que du vieillissement de la population et de la sécurité sociale (paragraphe 3.4.7). |
Bruxelles, le 20 septembre 2023.
Le président du Comité économique et social européen
Oliver RÖPKE
(1) Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Repenser le cadre budgétaire de l’Union européenne pour une reprise durable et une transition juste» (avis d’initiative) (JO C 105 du 4.3.2022, p. 11).
(2) Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l’emploi des États membres [COM(2021) 282 final — 2021/0137 (NLE)] (JO C 517 du 22.12.2021, p. 97).
(3) Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de décision du Conseil relative aux lignes directrices pour les politiques de l’emploi des États membres [COM(2022) 241 final] (JO C 486 du 21.12.2022, p. 161).
(4) COM(2023) 600 final du 24.5.2023; COM(2023) 599 final du 24.5.2023.
(5) Édition 2023 du rapport conjoint sur l’emploi [COM(2022) 783 final], p. 21.
(6) JO C 486 du 21.12.2022, p. 161.
(7) Édition 2023 du rapport conjoint sur l’emploi [COM(2022) 783 final].
(8) COM(2023) 600 final, p. 10.
(9) Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la coordination efficace des politiques économiques et à la surveillance budgétaire multilatérale et abrogeant le règlement (CE) no 1466/97 du Conseil [COM(2023) 240 final, 2023/0138 (COD)].
(10) Ligne directrice no 5.
(11) «Share of population economically inactive in European countries in 2022» («Part de la population économiquement inactive dans les pays européens en 2022»), département de recherche de Statista, et rapport conjoint sur l’emploi [COM(2022) 783 final], p. 24.
(12) Seules la Pologne, la Hongrie et la Bulgarie ont enregistré des gains réels entre 2021 et le troisième trimestre de 2022. Voir le rapport conjoint sur l’emploi, p. 41.
(13) JO C 486 du 21.12.2022, p. 161.
(14) Rapport conjoint sur l’emploi [COM(2022) 783 final].
(15) Ligne directrice no 7.
(16) Rapport conjoint sur l’emploi 2023.
(17) Ligne directrice no 8.
ELI: http://data.europa.eu/eli/C/2023/870/oj
ISSN 1977-0936 (electronic edition)