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Document 52023AB0004

Avis de la Banque Centrale Europeenne du 1er février 2023 sur une proposition de règlement modifiant les règlements (UE) n° 260/2012 et (UE) 2021/1230 en ce qui concerne les virements instantanés en euros (CON/2023/4) 2023/C 106/02

CON/2023/4

JO C 106 du 22.3.2023, p. 2–5 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, GA, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

22.3.2023   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 106/2


AVIS DE LA BANQUE CENTRALE EUROPEENNE

du 1er février 2023

sur une proposition de règlement modifiant les règlements (UE) n° 260/2012 et (UE) 2021/1230 en ce qui concerne les virements instantanés en euros

(CON/2023/4)

(2023/C 106/02)

Introduction et fondement juridique

Les 16 et 24 novembre 2022, la Banque centrale européenne (BCE) a reçu une demande de consultation de la part du Conseil de l’Union européenne et du Parlement européen, respectivement, portant sur une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant les règlements (UE) n° 260/2012 et (UE) 2021/1230 concernant les virements instantanés en euros (1) (ci-après le « règlement proposé »).

La BCE a compétence pour émettre un avis en vertu de l’article 127, paragraphe 4, et de l’article 282, paragraphe 5, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, étant donné que le règlement proposé contient des dispositions relevant des domaines de compétence de la BCE en vertu de l’article 127, paragraphe 2, du TFUE et de l’article 3.1 des statuts du Système européen de banques centrales et de la Banque centrale européenne, notamment en ce qui concerne la mission fondamentale du Système européen de banques centrales de promouvoir le bon fonctionnement des systèmes de paiement. Conformément à l’article 17.5, première phrase, du règlement intérieur de la Banque centrale européenne, le présent avis a été adopté par le conseil des gouverneurs.

1.   Observations générales

1.1

La BCE se félicite vivement de l’initiative de la Commission européenne visant à promouvoir la mise à disposition et l’utilisation des paiements instantanés, définis comme étant des virements qui transfèrent des fonds en euros dans l’UE sur le compte d’un bénéficiaire dans les dix secondes suivant la réception de l’ordre de paiement du payeur. Cette initiative s’inscrit dans le droit fil de la stratégie de l’Eurosystème en matière de paiements de détail (2), dont les principaux éléments sont les suivants : a) la mise au point d’une solution de paiement de détail au point d’interaction, de portée pan-européenne ; le déploiement complet des paiements instantanés ; c) l’amélioration des paiements transfrontaliers hors de l’UE ; et d) le soutien de l’innovation, de la numérisation et d’un écosystème européen de paiements.

1.2

Afin de promouvoir le bon fonctionnement des systèmes de paiement, il est essentiel de remédier aux problèmes de fragmentation au sein de l’espace unique de paiements en euros (Single Euro Payments Area - SEPA). À l’heure actuelle, l’accès aux paiements instantanés n’est pas disponible sur un même pied dans toutes les juridictions SEPA. Dans ce contexte, des mesures visant à harmoniser davantage la mise à disposition des paiements instantanés dans l’ensemble des juridictions du SEPA élargiraient le choix des consommateurs et favoriseraient l’innovation, la sécurité et l’autonomie stratégique ouverte en matière de paiements européens. Dans le même ordre d’idées, il convient également de soutenir les mesures susceptibles de promouvoir l’efficacité dans l’ensemble du SEPA dans la mesure où le respect de la législation applicable en matière de protection des données est garanti. La possibilité de mettre en place des solutions paneuropéennes normalisées ou éventuellement centralisées pour les contrôles de divergence, qui seraient mises à disposition par les prestataires de services de paiement avant l’agrément des paiements instantanés ou avant que les fonds ne soient crédités sur le compte du bénéficiaire, devrait être utilement explorée, par exemple en tirant parti de la position centrale de l’Eurosystème dans le paysage des paiements instantanés, qui lui permet d’atteindre toutes les contreparties concernées.

1.3

La mise à disposition et l’utilisation des paiements instantanés se sont développées dans l’Union depuis le lancement du dispositif du virement SEPA instantané (SEPA Instant Credit Transfer – SCT Inst) en 2017, mais sans devenir encore la nouvelle norme, comme on aurait pu s’y attendre. La BCE continue d’encourager les acteurs du marché à mettre en œuvre les paiements instantanés sur une base paneuropéenne et à soutenir leur utilisation par les utilisateurs finals le plus tôt possible. En novembre 2018, la BCE a lancé le service de règlement des paiements instantanés de TARGET (Target Instant Payment Settlement - TIPS) qui permet aux prestataires de services de paiement de proposer plus facilement des paiements instantanés et de les régler immédiatement, en toute sécurité et à tout moment. À partir de 2022, tous les prestataires de services de paiement qui adhèrent au dispositif du SCT Inst et sont accessibles dans TARGET2 doivent également être accessibles via TIPS, contribuant ainsi à l’accessibilité (ou l’interopérabilité) paneuropéenne des prestataires de services de paiement proposant des paiements instantanés au niveau technique et de l’infrastructure de marché.

1.4

La BCE note l’exclusion des établissements de monnaie électronique et des établissements de paiement, qui, sinon, seraient tenus de proposer à tous leurs utilisateurs de services de paiement un service pour l’envoi et la réception de paiements instantanés, étant donné qu’ils ne peuvent pas participer aux systèmes de règlement désignés en vertu de la directive n° 98/26/CE du Parlement européen et du Conseil (3) (ci-après la « directive concernant le caractère définitif du règlement “ (4)). La BCE comprend que si le champ d’application de la directive concernant le caractère définitif du règlement est étendu de manière à inclure les établissements de monnaie électronique et les établissements de paiement, ces prestataires de services de paiement devraient alors également se conformer à l’obligation de proposer à tous leurs utilisateurs de services de paiement un service pour l’envoi et la réception de paiements instantanés, étant donné qu’ils participeraient directement aux systèmes de règlement désignés en vertu de ladite directive.

La BCE soutient l’obligation faite aux prestataires de services de paiement concernés de proposer des paiements instantanés au même coût que les paiements non instantanés. La BCE se félicite également de l’introduction d’un processus simplifié de contrôle des sanctions afin de maîtriser le modèle actuel fondé sur le contrôle de chaque opération, sans pour autant réduire l’efficacité des contrôles de sanctions. En outre, la BCE soutient la proposition de créer un service permettant de détecter les divergences entre le nom du bénéficiaire et son numéro de compte bancaire international (IBAN). Un tel service est susceptible de réduire les erreurs et les fraudes dans les paiements instantanés. Toutefois, il peut être dissuasif d’associer des frais à ce service et, conjointement avec le droit de renoncer à ce service, cela peut entraîner une faible utilisation de cette protection supplémentaire pour les payeurs, tout en imposant aux prestataires de services de paiement un coût d’investissement pour le développement du service. Les spécifications relatives aux modalités de mise en œuvre du service de contrôle des divergences ne sont pas trop contraignantes, ce qui laisse au marché la souplesse nécessaire pour élaborer des solutions. Toutefois, une approche harmonisée permettrait d’éviter d’éventuels problèmes de fragmentation. Il importe également de laisser suffisamment de temps au marché pour élaborer et mettre en œuvre des mesures appropriées qui ne nuisent pas à la rapidité des paiements instantanés, car cela pourrait compromettre leur déploiement au point de vente.

2.   Observations particulières

2.1   Définitions

Certains termes définis dans le règlement proposé peuvent a) nécessiter d’être harmonisés avec ceux utilisés dans la directive (UE) 2015/2336 du Parlement européen et du Conseil (5) (ci-après la ‘ directive concernant les services de paiement ’ (DSP2) et b) appeler à modifier la directive 2014/92/UE du Parlement européen et du Conseil (6) (ci-après la ‘ directive sur les comptes de paiement ’ (DCP)) et la directive (UE) 2019/882 du Parlement européen et du Conseil (7) (ci-après l’” acte législatif européen sur l’accessibilité » ). Plus précisément, la définition d’« identifiant de compte de paiement », telle qu’énoncée dans le règlement proposé, serait la même que l’«identifiant unique» défini dans la DSP2 (8). La BCE suggère qu’à la lumière de ce qui précède, le législateur de l’Union envisage d’utiliser la même terminologie dans le règlement proposé. En outre, le terme de « virement » est déjà défini dans la DCP (9). Pour des raisons de cohérence, la BCE propose que cette définition soit conforme à la définition du « virement instantané » adoptée par le règlement proposé. À cet égard, la directive DCP (10) met l’accent sur la nécessité d’assurer l’harmonisation des définitions qu’elle contient avec celles de la DSP2 et du règlement (UE) n° 260/2012 du Parlement européen et du Conseil (11). En outre, l’acte législatif européen sur l’accessibilité contient une définition du « terminal de paiement » ayant une signification similaire à celle de l’« interface USP » telle qu’énoncée dans la proposition de règlement. La BCE suggère que le législateur de l’Union envisage de modifier l’acte législatif européen sur l’accessibilité afin d’harmoniser la définition du « terminal de paiement » avec celle de l’« interface USP ». Enfin, dans un souci de cohérence systématique, il importe de tenir compte des termes définis adoptés par le règlement proposé dans le contexte des modifications à venir de la DSP2.

2.2   Divergences entre le nom du bénéficiaire et son identifiant de compte de paiement

Selon l’exposé des motifs accompagnant le règlement proposé, les prestataires de services de paiement peuvent facturer des frais supplémentaires pour le service de détection des divergences entre le nom du bénéficiaire et son identifiant de compte de paiement (12). Ces frais supplémentaires pourraient, d’une part, avoir un effet dissuasif sur les utilisateurs de services de paiement, ce qui pourrait ne pas favoriser le développement des paiements instantanés et de leur utilisation. En revanche, dans le cadre des paiements instantanés, ce service de contrôle des divergences est crucial. C’est la raison pour laquelle il convient de modifier le règlement proposé afin d’éviter que les frais associés aux paiements instantanés ne découragent les utilisateurs d’utiliser les services des paiements instantanés ou ne les fassent renoncer au service de contrôle des divergences. Indépendamment de l’usage du service par les utilisateurs de services de paiement, le règlement proposé oblige les prestataires de services de paiement à offrir le service, ce qui nécessite des coûts d’investissement. Dans certains États membres (par exemple aux Pays-Bas), un contrôle IBAN obligatoire par rapport au nom du bénéficiaire est déjà en place et est assuré sans frais supplémentaires par tous les prestataires de services de paiement en ce qui concerne les IBAN des comptes nationaux. Une approche harmonisée de ces contrôles IBAN dans l’ensemble du SEPA peut être bénéfique et plus rentable, ce qui pourrait conduire, par exemple, à l’introduction d’un système commun ou à la fourniture du service de manière centralisée.

2.3   Contrôle des paiements instantanés en vue de l’application de sanctions de l’Union

Les prestataires de services de paiement concernés doivent effectuer des contrôles en ce qui concerne les sanctions de l’Union immédiatement après l’entrée en vigueur de toute mesure restrictive adoptée conformément à l’article 215 du TFUE (13). À cet égard, la BCE tient à formuler trois observations.

Premièrement, le règlement proposé ne dispense pas le prestataire de services de paiement concerné de se conformer aux sanctions nationales appliquées à l’encontre d’une personne, d’un organisme ou d’une entité concernée.

Deuxièmement, les mesures restrictives adoptées conformément à l’article 215 du TFUE peuvent entrer en vigueur le jour de leur publication au Journal officiel de l’Union européenne ou le jour suivant celui de leur publication. Afin de veiller à ce que ces mesures restrictives soient appliquées rapidement par les prestataires de services de paiement concernés, la BCE suggère que les prestataires de services de paiement concernés soient tenus de procéder à ces vérifications immédiatement après la publication des mesures restrictives au Journal officiel (et non pas immédiatement après leur entrée en vigueur), ce qui facilite le respect de ces mesures lorsque la date d’entrée en vigueur est postérieure à celle de la publication.

Troisièmement, et afin de garantir la sécurité juridique, la BCE est consciente du rôle potentiellement bénéfique que les identifiants d’entités juridiques (Legal Entity Identifier - LEI) pourraient jouer dans le cadre des contrôles en ce qui concerne les sanctions de l’Union ou en tant que norme d’identification globale pour les contreparties en ce qui concerne le service de contrôle de divergence. Les dernières orientations du Conseil européen des paiements (CEP) relatives à la migration prévue des règlements relatifs au système de paiement du CEP vers la version 2019 du format de messages ISO 20022 d’ici novembre 2023 prévoient que les LEI constituent des identifiants alternatifs pour une partie « non privée » (14). Cela permettrait de lever les obstacles techniques au niveau du système de paiement du CEP. Si le recours aux LEI dépend de leur mise en œuvre plus large, l’inclusion d’une référence à l’utilisation potentielle des LEI dans la proposition de contrôle des sanctions montrerait que l’Union européenne soutient l’utilisation et la promotion de cette norme mondiale.

2.4   Procédure d’infraction

Afin d’éviter un scénario dans lequel les temps d’arrêt prévus du dispositif SCT Inst conduiraient par inadvertance des prestataires de services de paiement à enfreindre le droit de l’Union, la BCE suggère qu’une réserve soit incluse dans le règlement proposé. En conséquence, la BCE propose d’exempter les prestataires de services de paiement des procédures d’infraction dans le cas très exceptionnel où le dispositif SCT Inst est indisponible pendant une courte durée, comme approuvé par son organe de gouvernance respectif, empêchant ainsi le traitement des paiements instantanés.

Lorsque la BCE recommande d’apporter une modification au règlement proposé, des suggestions de rédaction particulières, accompagnées d’un texte explicatif, sont présentées dans un document de travail technique distinct. Le document de travail technique peut être consulté en anglais sur le site internet EUR-Lex.

Fait à Francfort-sur-le-Main, le 1er février 2023.

La présidente de la BCE

Christine LAGARDE


(1)  COM(2022) 546 final.

(2)  Voir la stratégie de l’Eurosystème en matière de paiements de détail, disponible sur le site internet de la BCE à l’adresse www.ecb.europa.eu.

(3)  Directive 98/26/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 1998 concernant le caractère définitif du règlement dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres (JO L 166 du 11.6.1998, p. 45).

(4)  Voir l’article 1, point 2, du règlement proposé.

(5)  Directive (UE) 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur, modifiant les directives 2002/65/CE, 2009/110/CE et 2013/36/UE et le règlement (UE) n° 1093/2010, et abrogeant la directive 2007/64/CE (JO L 337 du 23.12.2015, p. 35).

(6)  Directive 2014/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 sur la comparabilité des frais liés aux comptes de paiement, le changement de compte de paiement et l’accès à un compte de paiement assorti de prestations de base (JO L 257 du 28.8.2014, p. 214).

(7)  Directive (UE) 2019/882 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 relative aux exigences en matière d’accessibilité applicables aux produits et services (JO L 151 du 7.6.2019, p. 70).

(8)  Voir article 4, point 33, de la PSD2.

(9)  Voir article 2, point 20, de la directive DCP.

(10)  Voir le considérant 14 de la directive DCP.

(11)  Règlement (UE) n° 260/2012 du Parlement européen et du Conseil du 14 mars 2012 établissant des exigences techniques et commerciales pour les virements et les prélèvements en euros et modifiant le règlement (CE) n° 924/2009 (JO L 94 du 30.3.2012, p. 22).

(12)  Voir page 10 de l’exposé des motifs du règlement proposé.

(13)  Voir l’article 1, point 2, du règlement proposé.

(14)  Voir les orientations disponibles sur le site web du CEP à l’adresse www.europeanpaymentscouncil.eu


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