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Document 62007TJ0009

Arrêt du Tribunal (cinquième chambre) du 18 mars 2010.
Grupo Promer Mon Graphic, SA contre Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI).
Dessin ou modèle communautaire - Procédure de nullité - Dessin ou modèle communautaire enregistré représentant un support promotionnel circulaire - Dessin ou modèle communautaire antérieur - Motif de nullité - Conflit - Absence d’impression globale différente - Notion de conflit - Produit en cause - Degré de liberté du créateur - Utilisateur averti - Article 10 et article 25, paragraphe 1, sous d), du règlement (CE) nº 6/2002.
Affaire T-9/07.

Recueil de jurisprudence 2010 II-00981

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2010:96

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

18 mars 2010 ( *1 )

«Dessin ou modèle communautaire — Procédure de nullité — Dessin ou modèle communautaire enregistré représentant un support promotionnel circulaire — Dessin ou modèle communautaire antérieur — Motif de nullité — Conflit — Absence d’impression globale différente — Notion de conflit — Produit en cause — Degré de liberté du créateur — Utilisateur averti — Article 10 et article 25, paragraphe 1, sous d), du règlement (CE) n o  6/2002 »

Dans l’affaire T-9/07,

Grupo Promer Mon Graphic, SA, établie à Sabadell (Espagne), représentée par M e  R. Almaraz Palmero, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

PepsiCo, Inc., établie à New York, New York (États-Unis), représentée par M es  E. Armijo Chávarri et A. Castán Pérez-Gómez, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la troisième chambre de recours de l’OHMI du 27 octobre 2006 (affaire R 1001/2005-3), relative à une procédure de nullité entre Grupo Promer Mon Graphic, SA et PepsiCo, Inc.,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. M. Vilaras, président, M. Prek et V. M. Ciucă (rapporteur), juges,

greffier: M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 9 janvier 2007 ,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 27 avril 2007 ,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 30 avril 2007 ,

à la suite de l’audience du 8 juillet 2009 ,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique

1.  Règlement (CE) n o  6/2002

1

Les règles relatives aux dessins ou modèles communautaires sont fixées dans le règlement (CE) n o  6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001 , sur les dessins ou modèles communautaires ( JO 2002, L 3, p. 1 ).

2

L’article 3, sous a), du règlement n o  6/2002 dispose:

« Aux fins du présent règlement, on entend par:

a)

‘ dessin ou modèle ’ : l’apparence d’un produit ou d’une partie de produit que lui confèrent, en particulier, les caractéristiques des lignes, des contours, des couleurs, de la forme, de la texture et/ou des matériaux du produit lui-même et/ou de son ornementation. »

3

Selon l’article 10 du règlement n o  6/2002:

« 1.    La protection conférée par le dessin ou modèle communautaire s’étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l’utilisateur averti une impression visuelle globale différente.

2.    Pour apprécier l’étendue de la protection, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle. »

4

L’article 25 du règlement n o  6/2002, dans sa version applicable aux faits de l’espèce, prévoit:

« 1.    Un dessin ou modèle communautaire ne peut être déclaré nul que:

a)

si le dessin ou modèle ne répond pas à la définition visée à l’article 3, [sous] a);

b)

s’il ne remplit pas les conditions fixées aux articles 4 à 9;

c)

si, en vertu d’une décision de justice, le titulaire ne possède pas le droit au dessin ou modèle communautaire au sens de l’article 14;

d)

si le dessin ou modèle communautaire est en conflit avec un dessin ou modèle antérieur qui a fait l’objet d’une divulgation au public après la date de dépôt de la demande d’enregistrement ou après la date de priorité du dessin ou modèle communautaire, si une priorité est revendiquée, et qui est protégé depuis une date antérieure par l’enregistrement d’un dessin ou modèle communautaire ou par une demande d’enregistrement d’un tel dessin ou modèle, ou par l’enregistrement d’un dessin ou modèle dans un État membre ou par une demande d’obtention du droit afférent;

e)

s’il est fait usage d’un signe distinctif dans un dessin ou modèle ultérieur et que le droit communautaire ou la législation de l’État membre concerné régissant ce signe confère au titulaire du signe le droit d’interdire cette utilisation;

f)

si le dessin ou modèle constitue une utilisation non autorisée d’une œuvre protégée par la législation sur le droit d’auteur d’un État membre;

g)

si le dessin ou modèle constitue un usage abusif de l’un des éléments qui sont énumérés à l’article 6 ter de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle (ci-après dénommée ‘ convention de Paris ’ ) ou un usage abusif de signes, emblèmes et armoiries autres que ceux visés audit article 6 ter, et qui présentent un intérêt public particulier pour un État membre.

[…]

3.   Les motifs prévus au paragraphe 1, [sous] d), e) et f), peuvent être invoqués uniquement par le demandeur ou le titulaire du droit antérieur.

[…] »

5

L’article 36 du règlement n o  6/2002 dispose:

« […]

2.   La demande doit également contenir l’indication des produits dans lesquels le dessin ou modèle est destiné à être incorporé ou auxquels il est destiné à être appliqué.

[…]

6.    Les informations visées au paragraphe 2 et au paragraphe 3, [sous] a) et d), ne portent pas atteinte à l’étendue de la protection du dessin ou du modèle en tant que tel. »

6

Aux termes de l’article 43 du règlement n o  6/2002, « la date de priorité est considérée comme date de dépôt de la demande d’enregistrement d’un dessin ou modèle communautaire, aux fins […] de l’article 25, paragraphe 1, [sous] d) » .

7

L’article 52, paragraphe 1, du règlement n o  6/2002 prévoit que, « [s]ous réserve de l’article 25, paragraphes 2, 3, 4 et 5, toute personne physique ou morale, ainsi qu’une autorité publique habilitée à cet effet, peut présenter à l’[OHMI] une demande en nullité d’un dessin ou modèle communautaire enregistré » .

8

En vertu de l’article 61, paragraphe 1, du règlement n o  6/2002, « [l]es décisions des chambres de recours statuant sur un recours sont susceptibles d’un recours devant la Cour de justice » .

9

L’article 62, première phrase, du règlement n o  6/2002, dispose que « [l]es décisions de l’[OHMI] sont motivées » .

2. Directive 98/71/CE

10

L’article 1 er , sous a), de la directive 98/71/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 octobre 1998 , sur la protection juridique des dessins ou modèles ( JO L 289, p. 28 ), dispose:

« Aux fins de la présente directive, on entend par:

a)

‘ dessin ou modèle ’ : l’apparence d’un produit ou d’une partie de produit que lui confèrent, en particulier, les caractéristiques des lignes, des contours, des couleurs, de la forme, de la texture et/ou des matériaux du produit lui-même et/ou de son ornementation. »

11

Aux termes de l’article 9 de la directive 98/71:

« 1.    La protection conférée par l’enregistrement d’un dessin ou modèle s’étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l’utilisateur averti une impression visuelle globale différente.

2.    Pour apprécier l’étendue de la protection, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle. »

Antécédents du litige

12

Le 9 septembre 2003 , l’intervenante, PepsiCo, Inc., a présenté une demande d’enregistrement de dessin ou modèle communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement n o  6/2002. Lors de la demande d’enregistrement, la priorité du dessin ou modèle espagnol n o  157156, déposé le 23 juillet 2003 et dont la demande d’enregistrement a été publiée le 16 novembre 2003 , a été revendiquée.

13

Le dessin ou modèle communautaire a été enregistré sous le numéro 74463-0001 pour les produits suivants: « Articles promotionnels pour jeux » . Il est représenté comme suit:

Image

14

Le 4 février 2004 , la requérante, Grupo Promer Mon Graphic, SA, a présenté une demande de nullité du dessin ou modèle n o  74463-0001 (ci-après le « dessin ou modèle contesté » ) au titre de l’article 52 du règlement n o  6/2002.

15

La demande de nullité était fondée sur le dessin ou modèle communautaire enregistré sous le numéro 53186-0001 (ci-après le « dessin ou modèle antérieur » ), qui a pour date de dépôt le 17 juillet 2003 et pour lequel la priorité du dessin ou modèle espagnol n o  157098, déposé le 8 juillet 2003 et dont la demande d’enregistrement a été publiée le 1 er  novembre 2003 , avait été revendiquée. Le dessin ou modèle antérieur est enregistré pour le produit suivant: « Feuille métallique pour jeux » . Il est représenté comme suit:

Image

16

Les motifs invoqués à l’appui de la demande de nullité étaient tirés de l’absence de nouveauté et de caractère individuel du dessin ou modèle contesté, au sens de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n o  6/2002, ainsi que de l’existence d’un droit antérieur, au sens de l’article 25, paragraphe 1, sous d), dudit règlement.

17

Le 20 juin 2005 , la division d’annulation de l’OHMI a déclaré la nullité du dessin ou modèle contesté sur le fondement de l’article 25, paragraphe 1, sous d), du règlement n o  6/2002.

18

Le 18 août 2005 , l’intervenante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 55 à 60 du règlement n o  6/2002, contre la décision de la division d’annulation.

19

Par décision du 27 octobre 2006 (ci-après la « décision attaquée » ), la troisième chambre de recours de l’OHMI a annulé la décision de la division d’annulation et a rejeté la demande de nullité. Après avoir écarté l’argument de la requérante relatif à la mauvaise foi de l’intervenante, la chambre de recours a considéré, en substance, que le dessin ou modèle contesté n’était pas en conflit avec le droit antérieur de la requérante et que les conditions de l’article 25, paragraphe 1, sous d), du règlement n o  6/2002 n’étaient donc pas réunies. À cet égard, la chambre de recours a estimé que les produits liés aux dessins ou modèles en cause relevaient d’une catégorie particulière d’articles promotionnels, à savoir les « tazos » ou les « rappers » , et que, dès lors, la liberté du créateur chargé de concevoir de tels articles promotionnels était « sérieusement restreinte » . La chambre de recours en a déduit que la différence dans le profil des dessins ou modèles en cause était suffisante pour conclure qu’ils produisaient une impression globale différente sur l’utilisateur averti.

Procédure et conclusions des parties

20

La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

annuler la décision attaquée;

condamner l’OHMI et l’intervenante aux dépens exposés devant lui ainsi que devant la troisième chambre de recours.

21

L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal:

rejeter le recours;

condamner la requérante aux dépens.

En droit

1. Sur les pièces présentées pour la première fois devant le Tribunal

22

L’OHMI et l’intervenante contestent la recevabilité des documents figurant aux annexes n o s  6 à 9 de la requête, qui n’auraient pas été présentés à un stade antérieur de la procédure. La pièce n o  6 est constituée d’extraits du site Internet de l’OHMI, concernant deux enregistrements de dessins ou modèles communautaires, publiés le 9 mars 2004 et représentant des pièces de jeu hexagonales. La pièce n o  7 est une copie partielle d’un accord privé conclu entre la requérante et une autre société. La pièce n o  8 est un extrait d’un site Internet contenant des informations sur les « pogs » et les « tazos » . La pièce n o  9 est un document exposant une gamme de produits de la requérante, la gamme BEYBLADE TM SPINNERS.

23

En réponse à une question posée par le Tribunal, la requérante a confirmé que les pièces n o s  6 à 9 avaient été présentées pour la première fois devant lui, tout en précisant qu’elle avait produit ces documents au vu des motifs de la décision attaquée et du dispositif de celle-ci.

24

Ces pièces, produites pour la première fois devant le Tribunal, ne peuvent être prises en considération. En effet, le recours devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 61 du règlement n o  6/2002, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des documents présentés pour la première fois devant lui. Il convient donc d’écarter les documents susvisés sans qu’il soit nécessaire d’examiner leur force probatoire [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du Tribunal du 24 novembre 2005 , Sadas/OHMI — LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T-346/04, Rec. p. II-4891 , point 19, et la jurisprudence citée].

25

En outre, cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante, lors de l’audience, selon lequel elle aurait présenté lesdits documents au vu de la teneur de la décision attaquée.

2. Sur le fond

26

La requérante invoque trois moyens, tirés, premièrement, de la mauvaise foi de l’intervenante et d’une interprétation restrictive du règlement n o  6/2002 dans la décision attaquée, deuxièmement, d’un défaut de nouveauté du dessin ou modèle contesté et, troisièmement, d’une violation de l’article 25, paragraphe 1, sous d), du règlement n o  6/2002.

Sur le moyen tiré de la mauvaise foi de l’intervenante et d’une interprétation restrictive du règlement n o  6/2002

27

La requérante conteste la décision attaquée, en ce que la chambre de recours aurait interprété de manière restrictive le règlement n o  6/2002 en ne prenant pas en compte la mauvaise foi de l’intervenante. La requérante invoque, à cet égard, la « divulgation » de son dessin ou modèle antérieur à l’intervenante, « à titre privé et confidentiel » , par une lettre du 21 février 2003 , dans le cadre de discussions commerciales, et la copie des lignes de base dudit dessin ou modèle dans le dessin ou modèle contesté, déposé ultérieurement. Dès lors, la date de la divulgation au public du dessin ou modèle antérieur aurait peu d’importance et, en raison du caractère aléatoire des dates de publication, seule importerait, en l’espèce, la question de savoir si le dessin ou modèle antérieur a été déposé avant le dessin ou modèle contesté et si la date de priorité revendiquée est antérieure.

28

L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

29

La chambre de recours a, au point 25 de la décision attaquée, considéré que l’argument tiré de la mauvaise foi du titulaire du dessin ou modèle contesté n’était pas pertinent, la question n’étant pas de savoir si l’un des dessins ou modèles en cause a été copié sur l’autre, mais s’ils produisent la même impression globale.

30

Le Tribunal relève que l’article 25, paragraphe 1, du règlement n o  6/2002 établit la liste des motifs de nullité d’un dessin ou modèle communautaire. Cette liste doit être considérée comme étant exhaustive, ledit article disposant qu’un dessin ou modèle ne peut être déclaré nul que pour l’un des motifs qu’il prévoit. Or, force est de constater que la mauvaise foi du titulaire du dessin ou modèle contesté n’y est pas mentionnée.

31

Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que la requérante a invoqué, dans sa demande en nullité, l’absence de nouveauté et de caractère individuel du dessin ou modèle contesté, au sens de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n o  6/2002, ainsi que l’existence d’un droit antérieur, au sens de l’article 25, paragraphe 1, sous d), dudit règlement. Dès lors, dans le cadre de l’examen de ces motifs de nullité, il convient de considérer que la question de la prétendue mauvaise foi de l’intervenante est dépourvue de pertinence, car il ne s’agit pas de se prononcer sur le comportement du titulaire du dessin ou modèle contesté.

32

Enfin, contrairement aux affirmations de la requérante, c’est la date de la divulgation au public du dessin ou modèle invoqué au soutien de la demande de nullité qui constitue l’un des critères d’application de l’article 25, paragraphe 1, sous b) et d), du règlement n o  6/2002. Or, la requérante indique que le dessin ou modèle antérieur a été « divulgué » à l’intervenante, « à titre privé et confidentiel » , par une lettre du 21 février 2003 et divulgué au public le 1 er  novembre 2003 . Dès lors, force est de constater que ledit dessin ou modèle n’a pas été divulgué au public le 21 février 2003 et que cette « divulgation » ne peut être invoquée en vue de l’application de l’article 25, paragraphe 1, sous b) et d), du règlement n o  6/2002.

33

Par conséquent, le moyen tiré de la mauvaise foi de l’intervenante et d’une interprétation restrictive du règlement n o  6/2002 doit être rejeté.

34

Il convient d’examiner, ensuite, le moyen tiré d’une violation de l’article 25, paragraphe 1, sous d), du règlement n o  6/2002.

Sur le moyen tiré d’une violation de l’article 25, paragraphe 1, sous d), du règlement n o  6/2002

Arguments des parties

35

En premier lieu, la requérante soutient que les « tazos » ou les « rappers » ne représentent pas une catégorie de produits en soi, mais qu’ils appartiennent à la catégorie des articles promotionnels pour jeux. La requérante reproche à la chambre de recours de faire référence, aux points 16 à 18 de la décision attaquée, à des produits connus sous les noms de « tazos » , de « pogs » ou de « rappers » , comme s’il s’agissait de produits identiques, et de considérer que le mot « tazos » est la traduction espagnole du terme anglais « rappers » . Or, les « pogs » , datant des années 1920, seraient des pièces bidimensionnelles très plates, en carton et très difficiles à bouger ou à retourner. En revanche, les « rappers » seraient conçus avec une surface métallique, permettant de les bouger et de les retourner très facilement. Leur partie centrale et leur composition métallique les rendraient très différents des « pogs » ou des « tazos » , créés dans les années 1994-1998, et permettraient d’y jouer différemment.

36

En deuxième lieu, se référant à la catégorie des articles promotionnels pour jeux, la requérante conteste, dès lors, l’appréciation retenue au point 20 de la décision attaquée, selon laquelle la liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle contesté était « sérieusement restreinte » .

37

En troisième lieu, l’utilisateur averti serait un enfant âgé de 5 à 10 ans environ, et non un directeur du marketing, comme il serait indiqué au point 16 de la décision attaquée. Un tel directeur dans l’industrie alimentaire ne serait pas un utilisateur final et il aurait un degré d’expertise supérieur à celui d’un simple utilisateur.

38

En quatrième lieu, les dessins ou modèles en cause produiraient la même impression globale, car, contrairement à l’analyse retenue aux points 22 et 24 de la décision attaquée, les différences de profil des dessins ou modèles en cause ne seraient pas évidentes, leur détection nécessitant une attention particulière et une observation attentive du disque. Or, la requérante doute qu’un jeune enfant les examine très attentivement de profil afin de détecter leurs différences.

39

En premier lieu, l’OHMI soutient qu’il incombe aux parties de fournir des informations concernant la nature concrète du produit en cause, les spécificités du marché concerné et la perception des dessins ou modèles sur ce marché par l’utilisateur averti. Or, devant la chambre de recours, l’intervenante aurait présenté des informations sur le produit en cause et « il serait soudain devenu clair » que les « pogs » formeraient une catégorie particulière de produits, ayant leur propre marché et dont le mode d’utilisation particulier influencerait la forme et les caractéristiques. Se référant au point 17 de la décision attaquée, l’OHMI soutient que l’intervenante a ainsi apporté la preuve que l’utilisateur averti connaissait les pièces de jeu de forme circulaire et plate, éventuellement distribuées en tant qu’articles promotionnels, en particulier dans le secteur de l’alimentation.

40

En deuxième lieu, l’OHMI rappelle que, selon le point 20 de la décision attaquée, les « pogs » , fournis par les parties devant la chambre de recours, consistent tous en des disques plats, en plastique ou en carton, sur lesquels des images sont imprimées, et dont la partie centrale surélevée sert à produire un bruit en appuyant sur le centre du « pog » . L’OHMI ajoute que cette partie centrale surélevée du disque doit être en métal pour produire un bruit, qu’elle permet d’accroître sa capacité à se retourner afin d’introduire un élément de hasard dans le jeu et que sa forme doit être élémentaire pour ne pas déformer l’image recouvrant les « pogs » . Pour des raisons de sécurité, les bords devraient être arrondis et la surface centrale surélevée ne devrait pas être plus haute que les rebords, afin de pouvoir empiler les « pogs » . Dès lors, la conclusion de la chambre de recours selon laquelle la liberté du créateur était limitée par ces contraintes serait justifiée. Enfin, l’OHMI ajoute que la conclusion tirée au point 24 de la décision attaquée est fondée si le Tribunal accepte que, à la date de priorité du dessin ou modèle antérieur, l’utilisateur averti attendait d’un produit tel qu’un « pog » , ou de tout autre produit de cette catégorie particulière de produits, qu’il ait la forme d’un disque, car telle était la norme du secteur industriel en question.

41

En troisième lieu, l’utilisateur averti serait informé, donc attentif, et il disposerait d’une certaine connaissance du patrimoine des dessins ou modèles, ainsi que des tendances concernant le produit sur le marché concerné. Cependant, il ne serait ni un créateur ni un fabricant du produit en question. Il aurait notamment la possibilité de procéder à une comparaison directe des dessins ou modèles en cause. L’OHMI indique, en réponse à l’argument de la requérante, que, en l’espèce, un enfant âgé de 5 à 10 ans serait tout aussi, sinon plus, attentif que n’importe quelle catégorie d’adultes.

42

En quatrième lieu, selon l’OHMI, la requérante rejoint l’analyse retenue aux points 22 et 23 de la décision attaquée, selon laquelle la comparaison des dessins ou modèles doit se limiter aux représentations graphiques. Le fait que les dessins ou modèles en cause soient destinés à être appliqués à des disques métalliques serait sans pertinence, en l’absence d’une telle spécification dans les enregistrements. La décision attaquée mentionnerait les différences de profil, la vue de dessus ne permettant pas de voir les perspectives des dessins ou modèles en cause. Compte tenu du degré de liberté limité du créateur, même des différences relativement mineures suffiraient à créer une impression globale différente. Or, les dessins ou modèles en cause présenteraient des différences s’agissant des deux principaux aspects pour lesquels s’exprime la liberté du créateur, à savoir le choix du motif ornementant le centre des « pogs » et la configuration de celui-ci sur cette surface surélevée.

43

En premier lieu, selon l’intervenante, les « tazos » ou les « rappers » forment une catégorie particulière d’articles promotionnels, auxquels appartiennent les « tazos » ou les « rappers » métalliques. Elle commercialiserait ce type de produits depuis plus de dix ans. En outre, le caractère métallique serait sans importance, car il serait de nature fonctionnelle.

44

En deuxième lieu, tous les échantillons de « tazos » ou de « rappers » présentés par les parties devant l’OHMI montreraient que les produits que la requérante et l’intervenante commercialisent sont plats, de forme ronde, avec un bord arrondi et revêtus d’images en couleur. Le degré de liberté du créateur serait très faible pour les produits en cause et de petits détails suffiraient à créer une impression globale différente.

45

En troisième lieu, concernant l’utilisateur averti, qu’il soit un enfant ou un directeur du marketing, l’essentiel serait qu’il soit informé du phénomène des « tazos » ou des « rappers » , ainsi que la chambre de recours le souligne aux points 17 et 19 de la décision attaquée. Comme ledit utilisateur serait en mesure de déceler toutes les petites différences entre les différents types de « tazos » ou de « rappers » s’écartant de la norme, les sociétés de marketing en offriraient de plus perfectionnés sur le marché.

46

En quatrième lieu, les dessins ou modèles en cause produiraient une impression globale différente, comme la chambre de recours le démontrerait aux points 21 à 26 de la décision attaquée. Les faces supérieures des dessins ou modèles en cause, à savoir les faces les plus visibles pour les utilisateurs, présenteraient des différences substantielles, ce qui impliquerait que ces différences ne sauraient être considérées comme insignifiantes, de surcroît pour un utilisateur averti.

Appréciation du Tribunal

47

Aux termes de l’article 25, paragraphe 1, sous d), du règlement n o  6/2002, un dessin ou modèle communautaire peut être déclaré nul s’il est en conflit avec un dessin ou modèle antérieur, qui a fait l’objet d’une divulgation au public après la date de dépôt de la demande d’enregistrement ou après la date de priorité du dessin ou modèle communautaire, si une priorité est revendiquée, et qui est protégé depuis une date antérieure par l’enregistrement ou par une demande d’enregistrement d’un dessin ou modèle communautaire, ou par l’enregistrement d’un dessin ou modèle dans un État membre ou par une demande d’obtention du droit afférent.

48

La notion de conflit n’étant pas en tant que telle définie dans le règlement n o  6/2002, il y a lieu de la préciser. Aux points 14 et 15 de la décision attaquée, la chambre de recours a estimé, à l’instar de la division d’annulation, qu’un conflit survenait entre deux dessins ou modèles lorsqu’ils produisaient la même impression globale sur l’utilisateur averti et qu’il y avait lieu à cet égard de tenir compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle contesté.

49

Aux fins de l’interprétation de l’article 25, paragraphe 1, sous d), du règlement n o  6/2002, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 10 du règlement n o  6/2002, s’agissant d’un dessin ou modèle communautaire, et en vertu de l’article 9 de la directive 98/71, s’agissant d’un dessin ou modèle enregistré dans un État membre, la protection conférée par un dessin ou modèle s’étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l’utilisateur averti une impression globale différente et que, pour apprécier l’étendue de cette protection, il y a lieu de tenir compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle.

50

À cet égard, il y a lieu de relever, tout d’abord, que le libellé de l’article 10, paragraphe 1, du règlement n o  6/2002, comme celui de l’article 9, paragraphe 1, de la directive 98/71, dans la grande majorité des versions linguistiques, indique qu’il s’agit d’une « impression globale différente » . Deux versions linguistiques (à savoir les versions française et roumaine), s’agissant de l’article 10 du règlement n o  6/2002, et une seule (à savoir la version française), s’agissant de l’article 9 de la directive 98/71, disposent qu’il s’agit d’une « impression visuelle globale différente » . Toutefois, un dessin ou modèle n’étant, aux termes de l’article 3, sous a), du règlement n o  6/2002 et de l’article 1 er , sous a), de la directive 98/71, que l’apparence d’un produit ou d’une partie d’un produit, il convient de considérer que l’impression globale, à laquelle il est fait référence à l’article 10, paragraphe 1, du règlement n o  6/2002, ainsi qu’à l’article 9, paragraphe 1, de la directive 98/71, ne peut être que visuelle. Partant, la différence de libellé entre les versions linguistiques ne confère pas, à cet égard, un sens différent à cette disposition.

51

Il résulte, ensuite, de l’article 10, paragraphe 2, du règlement n o  6/2002 et de l’article 9, paragraphe 2, de la directive 98/71 que, pour apprécier si un dessin ou modèle entre en conflit avec un dessin ou modèle antérieur, il y a lieu de tenir compte de la liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle.

52

Par conséquent, il convient d’interpréter l’article 25, paragraphe 1, sous d), du règlement n o  6/2002 en ce sens qu’un dessin ou modèle communautaire est en conflit avec un dessin ou modèle antérieur lorsque, compte tenu de la liberté du créateur dans l’élaboration dudit dessin ou modèle communautaire, ce dessin ou modèle ne produit pas sur l’utilisateur averti une impression globale différente de celle produite par le dessin ou modèle antérieur invoqué. C’est donc à juste titre que la chambre de recours a pu retenir une telle interprétation.

53

Il convient de relever que cette interprétation de l’article 25, paragraphe 1, sous d), du règlement n o  6/2002 est la seule susceptible d’assurer une protection des droits du titulaire d’un dessin ou modèle bénéficiant d’une antériorité telle que celle décrite dans cette disposition contre toute atteinte audit dessin ou modèle par la coexistence d’un dessin ou modèle communautaire ultérieur qui produirait la même impression globale sur l’utilisateur averti. En effet, à défaut d’une telle interprétation de l’article 25, paragraphe 1, sous d), du règlement n o  6/2002, le titulaire d’un droit antérieur serait dépourvu de la possibilité de demander la nullité d’un tel dessin ou modèle communautaire ultérieur et privé de la protection effective conférée par son dessin ou modèle, conformément à l’article 10 du règlement n o  6/2002 ou à l’article 9 de la directive 98/71.

— Sur le produit dans lequel le dessin ou modèle contesté est destiné à être incorporé ou auquel il est destiné à être appliqué

54

La requérante conteste la décision attaquée en ce que la chambre de recours a défini la catégorie de produits concernés par les dessins ou modèles en cause comme étant celle des « pogs » , des « rappers » ou des « tazos » , alors que ces produits ne représenteraient pas une catégorie homogène de produits. Selon la requérante, la chambre de recours aurait dû prendre en considération la catégorie des articles promotionnels pour jeux.

55

À cet égard, il y a lieu de relever que, selon l’article 3, sous a), du règlement n o  6/2002, un dessin ou modèle constituant l’apparence d’un produit, la demande d’enregistrement d’un dessin ou modèle communautaire doit contenir, aux termes de l’article 36, paragraphe 2, dudit règlement, l’indication des produits dans lesquels le dessin ou modèle est destiné à être incorporé ou auxquels il est destiné à être appliqué. Toutefois, il convient de préciser que, si l’indication de ces produits dans la demande d’enregistrement du dessin ou modèle est obligatoire, cette information ne porte pas atteinte, en vertu de l’article 36, paragraphe 6, du règlement n o  6/2002, à l’étendue de la protection du dessin ou modèle en tant que tel.

56

Dès lors, il résulte de l’article 36, paragraphe 6, du règlement n o  6/2002 que, pour déterminer le produit auquel le dessin ou modèle contesté est destiné à être incorporé ou auquel il est destiné à être appliqué, il convient de tenir compte de l’indication qui y est relative dans la demande d’enregistrement dudit dessin ou modèle, mais également, le cas échéant, du dessin ou modèle lui-même, dans la mesure où il précise la nature du produit, sa destination ou sa fonction. En effet, la prise en compte du dessin ou modèle lui-même peut permettre d’identifier le produit au sein d’une catégorie de produits plus large indiquée lors de l’enregistrement et, par conséquent, de déterminer effectivement l’utilisateur averti et le degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle.

57

Il convient de rappeler que, aux points 16 et 20 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les produits dans lesquels les dessins ou modèles en cause sont destinés à être incorporés ou auxquels ils sont destinés à être appliqués étaient dénommés « pogs » ou « rappers » , en anglais, ou « tazos » , en espagnol, tandis que la division d’annulation avait pris en considération la catégorie des articles promotionnels pour jeux.

58

En l’espèce, le dessin ou modèle contesté a été enregistré pour les produits suivants: « Articles promotionnels pour jeux » .

59

S’il est constant entre les parties que le dessin ou modèle contesté a vocation à s’appliquer, comme le dessin ou modèle antérieur, à des articles promotionnels pour jeux, l’examen dudit dessin ou modèle fait apparaître lui-même qu’il s’agit d’une catégorie particulière d’articles promotionnels pour jeux. En outre, comme la chambre de recours l’a relevé au point 17 de la décision attaquée, l’intervenante a, devant la chambre de recours, apporté des éléments relatifs aux produits en cause, en particulier des éléments relatifs aux « tazos » , qu’elle commercialise depuis 1995. Ainsi, la chambre de recours a pu valablement considérer que l’intervenante avait permis de déterminer concrètement la nature et la fonction des produits, qui sont des pièces de jeux connues sous les noms de « pogs » , de « rappers » ou de « tazos » . De surcroît, au point 16 de la décision attaquée, la chambre de recours a précisé que ces articles promotionnels pour jeux particuliers étaient destinés à de jeunes enfants et qu’ils servaient généralement à assurer la promotion de biscuits ou de produits de grignotage à base de pommes de terre, ce qui est constant entre les parties.

60

Dès lors, il convient de conclure que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que le produit en cause relevait, au sein de la large catégorie des articles promotionnels pour jeux, d’une catégorie particulière, qui est celle de pièces de jeux connues sous les noms de « pogs » , de « rappers » ou de « tazos » .

— Sur l’utilisateur averti

61

La requérante conteste la décision attaquée en ce que la chambre de recours a considéré que l’utilisateur averti pouvait également être un directeur du marketing, alors qu’il s’agirait, en l’espèce, d’un enfant âgé de 5 à 10 ans environ.

62

S’agissant de l’utilisateur averti, il y a lieu de considérer qu’il n’est ni un fabricant ni un vendeur des produits dans lesquels les dessins ou modèles en cause sont destinés à être incorporés ou auxquels ils sont destinés à être appliqués. L’utilisateur averti est doté d’une vigilance particulière et il dispose d’une certaine connaissance de l’état de l’art antérieur, c’est-à-dire du patrimoine des dessins ou modèles relatifs au produit en cause qui ont été divulgués à la date du dépôt du dessin ou modèle contesté, ou, le cas échéant, à la date de la priorité revendiquée.

63

À cet égard, il convient de constater que, si la chambre de recours n’a pas défini précisément l’utilisateur averti en l’espèce, elle n’a pas, contrairement aux affirmations de la requérante, écarté l’hypothèse qu’il puisse s’agir d’un enfant âgé de 5 à 10 ans environ.

64

C’est à juste titre que la chambre de recours a estimé aux points 16 et 17 de la décision attaquée que l’utilisateur averti pourrait être un enfant âgé de 5 à 10 ans environ ou un directeur du marketing d’une société fabriquant des produits dont la promotion est assurée en offrant des « pogs » , des « rappers » ou des « tazos » . En effet, il découle de la définition de l’utilisateur averti, telle qu’elle a été précisée au point 62 ci-dessus, que, en l’espèce, étant donné que les produits auxquels le dessin ou modèle contesté est destiné à s’appliquer sont des « pogs » , des « rappers » ou des « tazos » , il convient de considérer que l’utilisateur averti dispose d’une certaine connaissance de l’état de l’art antérieur s’agissant de ces produits. En outre, s’agissant de pièces de jeux destinées plus précisément aux enfants, cet utilisateur peut être, ainsi que la chambre de recours l’a indiqué dans la décision attaquée, un enfant âgé de 5 à 10 ans environ, ce que ni l’OHMI ni l’intervenante ne contestent. Toutefois, s’agissant aussi d’un article promotionnel, l’utilisateur averti pourrait également être, en l’espèce, un directeur du marketing d’une société utilisant ce type de produits pour promouvoir ses propres produits.

65

Ainsi que la chambre de recours l’a souligné aux points 16 et 17 de la décision attaquée, peu importe que l’utilisateur averti soit un enfant âgé de 5 à 10 ans environ ou le directeur du marketing d’une société fabriquant des produits dont la promotion est assurée en offrant des « pogs » , des « rappers » ou des « tazos » , l’important est que ces deux catégories de personnes connaissent le phénomène des « rappers » .

— Sur le degré de liberté du créateur

66

Se fondant sur le fait que le dessin ou modèle contesté se rapporte à la catégorie générale des articles promotionnels, la requérante conteste la décision attaquée en ce que la chambre de recours a conclu, au point 20 de celle-ci, que la liberté du créateur était, en l’espèce, « sérieusement restreinte » .

67

À cet égard, il y a lieu de relever que le degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle est défini à partir, notamment, des contraintes liées aux caractéristiques imposées par la fonction technique du produit ou d’un élément du produit, ou encore des prescriptions légales applicables au produit. Ces contraintes conduisent à une normalisation de certaines caractéristiques, devenant alors communes aux dessins ou modèles appliqués au produit concerné.

68

Au point 18 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que tous les « rappers » ou « tazos » examinés en l’espèce consistaient en de petits disques plats ou légèrement convexes, qui peuvent être en plastique ou en métal. Elle en a déduit, au point 20 de cette décision, que la liberté dont jouissait le créateur chargé de concevoir un tel produit était « sérieusement restreinte » , car, pour ce type de produit, « le paradigme se résume[rait] à un petit disque plat ou presque plat sur lequel des images en couleur peuvent être imprimées [et, s]ouvent, le disque sera[it] convexe vers le centre, de telle sorte qu’un son sera[it] émis si le doigt d’un enfant appuyait sur le centre du disque » , étant précisé qu’ « [u]n ‘ rapper ’ qui ne possède pas ces caractéristiques a[urait] peu des chances d’être accepté sur le marché » .

69

À cet égard, il convient de constater que les « pogs » , les « rappers » ou les « tazos » ont une forme circulaire et que, à la date de dépôt de la demande d’enregistrement du dessin ou modèle contesté, en l’occurrence à la date de la priorité revendiquée pour ledit dessin ou modèle, les « pogs » , les « rappers » ou « tazos » présentaient ces caractéristiques communes, dont le créateur devait tenir compte, telles qu’elles ont été décrites aux points 18 et 20 de la décision attaquée et rappelées au point 68 ci-dessus. Cette constatation n’est d’ailleurs pas remise en cause par les parties.

70

Dès lors, il convient de considérer que c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé dans la décision attaquée que, à la date de la priorité revendiquée pour le dessin ou modèle contesté, la liberté du créateur était « sérieusement restreinte » dans la mesure où celui-ci devait intégrer ces caractéristiques communes dans son dessin ou modèle pour le produit en cause. De surcroît, ainsi que la chambre de recours l’a souligné au point 20 de la décision attaquée, la liberté du créateur était également limitée par la nécessité qu’il s’agisse d’articles peu onéreux, répondant à des normes de sécurité pour les enfants et pouvant être joints aux produits dont ils assurent la promotion.

— Sur l’impression globale produite par les dessins ou modèles en cause sur l’utilisateur averti

71

La requérante conteste la conclusion tirée par la chambre de recours dans la décision attaquée selon laquelle les dessins ou modèles en cause produisent une impression globale différente sur l’utilisateur averti.

72

Dans le cadre de l’appréciation concrète de l’impression globale des dessins ou modèles en cause sur l’utilisateur averti, lequel a une certaine connaissance de l’état de l’art antérieur, il y a lieu de tenir compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle contesté. Dès lors, ainsi que la chambre de recours l’a relevé au point 19 de la décision attaquée, dans la mesure où des similitudes entre les dessins ou modèles en cause concernent des caractéristiques communes, telles que décrites au point 67 ci-dessus, ces similitudes n’auront que peu d’importance dans l’impression globale produite par lesdits dessins ou modèles sur l’utilisateur averti. En outre, plus la liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle contesté est restreinte, plus des différences mineures entre les dessins ou modèles en cause pourront suffire à produire une impression globale différente sur l’utilisateur averti.

73

Ainsi qu’il a été rappelé au point 68 ci-dessus, après avoir déterminé, aux points 18 et 20 de la décision attaquée, les contraintes pesant sur le créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle contesté, la chambre de recours a considéré que la liberté du créateur était, en l’espèce, « sérieusement restreinte » .

74

Au point 19 de la décision attaquée, la chambre de recours a également précisé, s’agissant de l’appréciation de l’impression globale produite par les dessins ou modèles en cause sur l’utilisateur averti, que ce dernier écarterait automatiquement les éléments « qui sont totalement banals et communs à tous les exemples du type de produit en cause » et se concentrerait sur les caractéristiques « qui sont arbitraires ou qui diffèrent de la norme » .

75

Aux points 21 à 24 de la décision attaquée, la chambre de recours a, ensuite, comparé les dessins ou modèles en cause, en décrivant le dessin ou modèle antérieur puis le dessin ou modèle contesté, avant de conclure à une « différence entre les contours de la partie surélevée au centre des disques » . Elle en a déduit, au point 24 de cette décision, que, étant donné le degré limité de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle contesté, cette différence de profil était suffisante pour conclure qu’ils produisaient une impression globale différente sur l’utilisateur averti.

76

C’est à la lumière des critères précisés au point 72 ci-dessus qu’il convient de comparer les dessins ou modèles en cause, en examinant leurs similitudes et leurs différences, afin de déterminer, en tenant compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle contesté, si la chambre de recours a pu, sans commettre d’erreur, conclure qu’ils créaient une impression globale différente sur l’utilisateur averti.

77

Concernant les similitudes entre les dessins ou modèles en cause, premièrement, la chambre de recours a relevé, au point 22 de la décision attaquée, qu’ils consistaient tous les deux en un disque presque plat. Cependant, il y a lieu de considérer que, s’agissant, à la date de priorité revendiquée pour le dessin ou modèle contesté, d’une caractéristique commune aux dessins ou modèles relatifs aux produits du type du produit en cause, ainsi que la chambre de recours l’a relevé aux points 18 et 20 de la décision attaquée, cette similitude ne sera pas retenue par l’utilisateur averti dans l’impression globale des dessins ou modèles en cause.

78

Deuxièmement, la chambre de recours a également relevé au point 22 de la décision attaquée que les dessins ou modèles en cause comportaient tous les deux un cercle concentrique très près du bord destiné à évoquer l’idée que le disque est recourbé tout au long du bord. Or, il y a lieu de relever que les dessins ou modèles en cause peuvent s’appliquer à un produit réalisé en métal, ce que la requérante et l’intervenante ne contestent pas. Le produit étant destiné notamment à des enfants, ce bord recourbé peut donc représenter, pour le créateur, une contrainte liée à des exigences de sécurité, afin qu’il ne présente pas un bord tranchant, si le produit est réalisé en métal, voire en plastique ou même en carton. Dès lors, il y a lieu de considérer que, cette similitude entre les dessins ou modèles en cause en ce qui concerne l’une de leurs caractéristiques pouvant relever d’une contrainte pesant sur le créateur, elle ne retiendra pas l’attention de l’utilisateur averti.

79

Troisièmement, les dessins ou modèles en cause comportent tous les deux un cercle concentrique situé à un tiers environ de distance entre le bord et le centre du disque. Au point 22 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé cette similitude, en indiquant que ce cercle était destiné à évoquer l’idée que la partie centrale est légèrement surélevée. Toutefois, il convient de considérer que cette partie centrale pouvait être délimitée par une autre forme qu’un cercle. La preuve en est qu’il ressort de la demande d’enregistrement du dessin ou modèle contesté, figurant dans le dossier de l’OHMI transmis au Tribunal, que le dessin ou modèle contesté revendique la priorité d’un dessin ou modèle espagnol n o  157156 qui comporte trois variantes et que cette partie centrale surélevée est, selon les variantes, délimitée par un cercle, par un triangle, ou par un hexagone. En outre, cette considération ne peut être remise en cause par l’argument avancé par l’OHMI lors de l’audience, selon lequel il fallait que la forme soit élémentaire afin de ne pas déformer l’image qui peut recouvrir le disque, car une forme triangulaire, hexagonale, voire carrée ou ovale, au lieu d’une forme circulaire, n’aurait pas davantage provoqué une distorsion de l’image. En outre, cette considération ne peut pas plus être remise en cause par l’argument de l’OHMI selon lequel il devait s’agir d’un cercle pour que cette partie centrale surélevée puisse être convexe, car il aurait pu s’agir, notamment, d’une forme ovale.

80

Quatrièmement, les dessins ou modèles en cause présentent une similitude en ce que le bord recourbé du disque est surélevé par rapport à la partie intermédiaire du disque, située entre le bord et la partie centrale surélevée.

81

Cinquièmement, les dessins ou modèles en cause présentent une similitude dans les proportions respectives de la partie centrale surélevée et de la partie intermédiaire du disque, située entre le bord et la partie centrale surélevée.

82

À défaut d’une quelconque contrainte particulière imposée au créateur, les similitudes relevées aux points 79 à 81 ci-dessus concernent des éléments pour lesquels il existait une liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle contesté. Il en découle qu’elles retiendront l’attention de l’utilisateur averti, et ce d’autant plus que, comme l’a indiqué l’intervenante elle-même, les faces supérieures sont, en l’espèce, les plus visibles pour cet utilisateur.

83

Concernant les différences entre les dessins ou modèles en cause, ainsi que la chambre de recours l’a indiqué au point 23 de la décision attaquée, le dessin ou modèle contesté comporte, vu du dessus, deux cercles concentriques de plus que le dessin ou modèle antérieur. De profil, les deux dessins ou modèles diffèrent en ce que le dessin ou modèle contesté présente une convexité plus importante. Toutefois, il convient de constater que le degré de convexité étant très faible, vu l’épaisseur elle-même faible des disques, cette convexité ne sera pas perçue aisément par l’utilisateur averti, notamment vu du dessus, ce que confirme les produits réellement commercialisés, tels qu’ils figurent dans le dossier de l’OHMI transmis au Tribunal.

84

Au vu des similitudes relevées aux points 79 à 81 ci-dessus, il y a lieu de considérer que les différences constatées par la chambre de recours au point 23 de la décision attaquée (voir point 83 ci-dessus) sont insuffisantes pour que le dessin ou modèle contesté produise, sur l’utilisateur averti, une impression globale différente de celle produite par le dessin ou modèle antérieur.

85

Il découle de l’ensemble des considérations qui précèdent que c’est à tort que la chambre de recours a conclu dans la décision attaquée que les dessins ou modèles en cause produisaient une impression globale différente sur l’utilisateur averti et qu’ils n’étaient pas en conflit au sens de l’article 25, paragraphe 1, sous d), du règlement n o  6/2002. Il s’ensuit que la décision attaquée a été adoptée en violation de cette disposition et doit donc être annulée, sans qu’il y ait lieu d’examiner le dernier moyen d’annulation soulevé par la requérante.

Sur les dépens

86

Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Par ailleurs, aux termes de cette même disposition, si plusieurs parties succombent, le Tribunal décide du partage des dépens.

87

En l’espèce, l’OHMI et l’intervenante ayant succombé, il y a lieu de les condamner à supporter les dépens exposés par la requérante dans la procédure devant le Tribunal, conformément aux conclusions de cette dernière.

88

En outre, la requérante a conclu à la condamnation de l’OHMI et de l’intervenante aux dépens qu’elle a exposés aux fins de la procédure devant la chambre de recours. À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 136, paragraphe 2, du règlement de procédure, les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours sont considérés comme dépens récupérables. Partant, l’OHMI et l’intervenante ayant succombé en leurs conclusions, il y a également lieu de les condamner aux dépens exposés par la requérante aux fins de la procédure devant la chambre de recours, conformément aux conclusions de cette dernière.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête:

 

1)

La décision de la troisième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 27 octobre 2006 (affaire R 1001/2005-3) est annulée.

 

2)

L’OHMI et PepsiCo, Inc. supporteront leurs propres dépens ainsi que ceux exposés par Grupo Promer Mon Graphic, SA dans la procédure devant le Tribunal.

 

3)

L’OHMI et PepsiCo supporteront leurs propres dépens ainsi que ceux exposés par Grupo Promer Mon Graphic dans la procédure devant la chambre de recours.

 

Vilaras

Prek

Ciucă

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 18 mars 2010 .

Signatures


( *1 ) Langue de procédure: l’anglais.

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