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Document 62023CJ0051

Arrêt de la Cour (huitième chambre) du 29 juillet 2024.
Validity Foundation – Mental Disability Advocacy Centre contre Commission européenne.
Pourvoi – Accès aux documents – Règlement (CE) nº 1049/2001 – Article 4, paragraphe 3 – Accès à des documents établis par une institution pour son usage interne ou ayant trait à une question sur laquelle cette institution n’a pas encore pris de décision – Documents relatifs à un projet d’appel à propositions cofinancé par le Fonds européen de développement régional (FEDER) – Décision de refus d’accès aux documents émanant d’un État membre – Décision octroyant l’accès à ces documents, adoptée après l’introduction du recours en annulation contre la décision de refus – Absence d’intérêt à agir.
Affaire C-51/23 P.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2024:664

ARRÊT DE LA COUR (huitième chambre)

29 juillet 2024 (*)

« Pourvoi – Accès aux documents – Règlement (CE) nº 1049/2001 – Article 4, paragraphe 3 – Accès à des documents établis par une institution pour son usage interne ou ayant trait à une question sur laquelle cette institution n’a pas encore pris de décision – Documents relatifs à un projet d’appel à propositions cofinancé par le Fonds européen de développement régional (FEDER) – Décision de refus d’accès aux documents émanant d’un État membre – Décision octroyant l’accès à ces documents, adoptée après l’introduction du recours en annulation contre la décision de refus – Absence d’intérêt à agir »

Dans l’affaire C‑51/23 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 1er février 2023,

Validity Foundation – Mental Disability Advocacy Centre, établie à Budapest (Hongrie), représentée par Me M. R. Oyarzabal Arigita, abogada, et Me B. Van Vooren, advocaat,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Commission européenne, représentée par Mme K. Herrmann et M. A. Spina, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (huitième chambre),

composée de M. N. Piçarra (rapporteur), président de chambre, MM. N. Jääskinen et M. Gavalec, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocate générale entendue, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi, Validity Foundation – Mental Disability Advocacy Centre (ci-après « Validity ») demande l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 22 novembre 2022, Validity/Commission (T‑640/20, ci‑après l’« ordonnance attaquée », EU:T:2022:752), par laquelle celui-ci a, d’une part, jugé qu’il n’y avait plus lieu de statuer sur son recours en ce qu’il tendait à l’annulation de la décision C(2020) 5540 final de la Commission, du 6 août 2020, par laquelle cette institution a refusé à Validity l’accès à des documents relatifs à un projet d’appel à propositions lancé par les autorités hongroises (ci-après la « décision de refus »), et, d’autre part, rejeté comme étant manifestement irrecevable ce recours en ce qu’il tendait à l’annulation de la décision C(2021) 2834 final de la Commission, du 19 avril 2021, par laquelle cette institution a accordé à Validity l’accès auxdits documents (ci-après la « décision d’octroi »).

 Le cadre juridique

2        Les considérants 4 et 13 du règlement (CE) nº 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), énoncent :

« (4)      Le présent règlement vise à conférer le plus large effet possible au droit d’accès du public aux documents et à en définir les principes généraux et limites conformément à l’article [15, paragraphe 3, TFUE].

[...]

(13)      Afin d’assurer le plein respect du droit d’accès, il convient de prévoir l’application d’une procédure administrative en deux phases, assortie d’une possibilité de recours juridictionnel ou de plainte auprès du [M]édiateur [européen]. »

3        L’article 4 de ce règlement, intitulé « Exceptions », dispose :

« [...]

3.      L’accès à un document établi par une institution pour son usage interne ou reçu par une institution et qui a trait à une question sur laquelle celle‑ci n’a pas encore pris de décision est refusé dans le cas où sa divulgation porterait gravement atteinte au processus décisionnel de cette institution, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé.

[...]

4.      Dans le cas de documents de tiers, l’institution consulte le tiers afin de déterminer si une exception prévue au paragraphe 1 ou 2 est d’application, à moins qu’il ne soit clair que le document doit ou ne doit pas être divulgué.

5.      Un État membre peut demander à une institution de ne pas divulguer un document émanant de cet État sans l’accord préalable de celui‑ci.

[...] »

4        L’article 7 dudit règlement, intitulé « Traitement des demandes initiales », est libellé comme suit :

« 1.      [...] Dans un délai de quinze jours ouvrables à partir de l’enregistrement de la demande, l’institution soit octroie l’accès au document demandé et le fournit dans le même délai conformément à l’article 10, soit communique au demandeur, dans une réponse écrite, les motifs de son refus total ou partiel et l’informe de son droit de présenter une demande confirmative conformément au paragraphe 2 du présent article.

2.      En cas de refus total ou partiel, le demandeur peut adresser, dans un délai de quinze jours ouvrables suivant la réception de la réponse de l’institution, une demande confirmative tendant à ce que celle‑ci révise sa position.

3.      À titre exceptionnel, par exemple lorsque la demande porte sur un document très long ou sur un très grand nombre de documents, le délai prévu au paragraphe 1 peut, moyennant information préalable du demandeur et motivation circonstanciée, être prolongé de quinze jours ouvrables.

4.      L’absence de réponse de l’institution dans le délai requis habilite le demandeur à présenter une demande confirmative. »

5        L’article 8 du même règlement, intitulé « Traitement des demandes confirmatives », prévoit :

« 1.      Les demandes confirmatives sont traitées avec promptitude. Dans un délai de quinze jours ouvrables à partir de l’enregistrement de la demande, l’institution soit octroie l’accès au document demandé et le fournit dans le même délai conformément à l’article 10, soit communique, dans une réponse écrite, les motifs de son refus total ou partiel. Si elle refuse totalement ou partiellement l’accès, l’institution informe le demandeur des voies de recours dont il dispose, à savoir former un recours juridictionnel contre l’institution et/ou présenter une plainte au [M]édiateur, selon les conditions prévues respectivement aux articles [263 et 228 TFUE].

2.      À titre exceptionnel, par exemple lorsque la demande porte sur un document très long ou sur un très grand nombre de documents, le délai prévu au paragraphe 1 peut, moyennant information préalable du demandeur et motivation circonstanciée, être prolongé de quinze jours ouvrables.

3.      L’absence de réponse de l’institution dans le délai requis est considérée comme une réponse négative, et habilite le demandeur à former un recours juridictionnel contre l’institution et/ou à présenter une plainte au [M]édiateur, selon les dispositions pertinentes du traité [FUE]. »

 Les antécédents du litige

6        Les antécédents du litige, tels qu’ils ressortent des points 2 à 9 de l’ordonnance attaquée, peuvent être résumés comme suit.

7        Au mois de mars 2017, les autorités hongroises ont lancé un appel à propositions, pour un montant de 160 millions d’euros, en vue d’encourager la prise en charge, par des services de proximité, de personnes souffrant notamment de problèmes de santé mentale (ci‑après l’« appel à propositions »), dont la mise en œuvre devait être cofinancée par l’Union européenne, conformément au règlement (UE) nº 1303/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, portant dispositions générales applicables au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, et abrogeant le règlement (CE) nº 1083/2006 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 320).

8        Au mois de mai 2018, les autorités hongroises ont suspendu l’appel à propositions afin de réexaminer avec les services de la Commission européenne le cahier des charges et le champ d’application de cet appel.

9        Par une demande du 10 mars 2020, reçue par la Commission le 16 mars 2020, Validity, une organisation non gouvernementale ayant pour objet la défense de personnes souffrant de déficiences mentales et/ou de troubles du développement, a sollicité, sur le fondement du règlement nº 1049/2001, l’accès à l’intégralité de la correspondance entre la Commission et les autorités hongroises concernant l’appel à propositions (ci‑après la « demande d’accès »).

10      Le 14 mai 2020, la Commission a informé Validity qu’elle lui octroyait l’accès à six des neuf documents identifiés comme relevant de sa demande d’accès, à l’exception des données à caractère personnel qui y étaient contenues et d’un paragraphe qu’elle estimait ne pas relever de cette demande. En revanche, dès lors que les trois autres documents demandés émanaient des autorités hongroises, la Commission a, après avoir consulté ces autorités, refusé l’accès à ces documents, sur le fondement notamment de l’article 4, paragraphe 3, du règlement nº 1049/2001 (ci‑après les « trois documents en cause »).

11      Le 5 juin 2020, Validity a présenté, conformément à l’article 7, paragraphe 2, de ce règlement, une demande confirmative tendant à obtenir l’accès à l’intégralité des trois documents en cause.

12      Par la décision de refus, la Commission a confirmé le refus d’accès à ces documents, en application de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement nº 1049/2001.

 Le recours devant le Tribunal, les faits postérieurs à l’introduction de ce recours et l’ordonnance attaquée

13      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 16 octobre 2020, Validity a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision de refus.

14      Alors que la procédure dans l’affaire T‑640/20 était en cours, la Commission a adopté la décision d’octroi, par laquelle elle a remplacé la décision de refus et a accordé à Validity l’accès aux trois documents en cause, à l’exception des données à caractère personnel qui y étaient contenues.

15      Le 30 avril 2021, la Commission a demandé au Tribunal de constater qu’il n’y avait plus lieu de statuer sur le recours en annulation formé contre la décision de refus.

16      Le 20 mai 2021, par actes séparés déposés au greffe du Tribunal, Validity a présenté ses observations sur cette demande et a adapté sa requête pour tenir compte de la décision d’octroi. Afin de démontrer la persistance d’un intérêt à agir contre la décision de refus, elle a notamment fait valoir la nécessité d’éviter le risque que, à l’avenir, la Commission refuse, en violation de l’article 4, paragraphe 3, du règlement nº 1049/2001, l’accès à des documents tels que les trois documents en cause, en se fondant de nouveau sur une présomption générale de confidentialité concernant ce type de documents ou, à tout le moins, sur un motif vague, tiré de ce qu’un tel accès affecterait gravement le climat de confiance mutuelle entre les autorités hongroises et la Commission, ainsi que les marges de négociation de cette institution. Validity a aussi invoqué le risque que la Commission persiste, en méconnaissance des délais fixés par ce règlement, dans un modèle récurrent de tactiques dilatoires et de divulgations partielles, contraire aux principes de transparence et de bonne administration.

17      Par l’ordonnance attaquée, le Tribunal a rejeté ces arguments et a constaté, en application de l’article 130, paragraphe 2, de son règlement de procédure, qu’il n’y avait plus lieu de statuer sur la demande d’annulation de la décision de refus.

18      Il a jugé, aux points 34 à 37 de cette ordonnance, que la décision de refus, qui se fondait sur l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement nº 1049/2001, ne faisait pas état d’une présomption générale de confidentialité applicable aux documents relatifs aux projets d’appel à propositions cofinancés par l’Union, conformément au règlement nº 1303/2013. Selon le Tribunal, une telle constatation était confirmée par la circonstance que la Commission, dans sa prise de position initiale du 14 mai 2020, avait examiné concrètement et individuellement chacun des documents demandés et refusé uniquement l’accès aux trois documents en cause, compte tenu des réserves émises par les autorités hongroises.

19      Aux points 38 à 43 de ladite ordonnance, le Tribunal a relevé que, par décision du 15 décembre 2021, la Commission avait fait droit à une demande ultérieure de Validity, du 30 avril 2021, tendant à obtenir l’accès à des documents relatifs à l’appel à propositions, postérieurs au 10 mars 2020, sans invoquer, sur le fondement de l’article 4, paragraphe 3, du règlement nº 1049/2001, aucun motif tiré de la nécessité de protéger le climat de confiance entre les autorités hongroises et la Commission ainsi que les marges de négociation de cette dernière, alors même que ces autorités avaient de nouveau émis des réserves au sujet de la divulgation des documents dont elles étaient l’auteur. Il a ainsi jugé que cette décision était de nature à écarter le risque de réitération de ce motif et que, partant, la seule circonstance que, pour refuser l’accès aux trois documents en cause, la Commission avait, dans un premier temps, opposé ledit motif ne permettait pas de présumer que cette institution invoquerait le même motif à l’occasion d’une nouvelle demande tendant à obtenir l’accès à des documents analogues.

20      Le Tribunal a ainsi jugé, aux points 44 et 45 de l’ordonnance attaquée, que Validity n’avait pas démontré la persistance d’un intérêt à agir en annulation contre la décision de refus, au motif que la Commission se serait fondée sur une présomption générale de confidentialité ou sur un motif général, susceptible d’être réitéré dans le futur, indépendamment des circonstances propres à l’adoption de cette décision.

21      Par ailleurs, pour rejeter, aux points 48 à 50 de cette ordonnance, l’argument de Validity tiré du risque que la Commission persiste, en méconnaissance des délais fixés par le règlement nº 1049/2001, dans des tactiques dilatoires et des divulgations partielles de documents, contraires aux principes de transparence et de bonne administration, le Tribunal a considéré que, dès lors que la Commission avait, dans les cinq procédures d’accès aux documents identifiées par Validity dans sa requête, octroyé l’accès aux documents demandés, aucune de ces procédures ne permettait d’établir le risque de réitération d’une méconnaissance de ces principes, indépendamment des circonstances propres à l’adoption de la décision de refus.

22      Le Tribunal a enfin jugé, au point 51 de ladite ordonnance, que, en adoptant la décision d’octroi, la Commission avait donné entière satisfaction à Validity et que celle‑ci n’avait pas établi la persistance de son intérêt à agir en annulation contre la décision de refus.

23      S’agissant de la demande de Validity tendant à l’annulation de la décision d’octroi, le Tribunal a, aux points 55 à 57 de l’ordonnance attaquée, rejeté cette demande comme étant irrecevable, au motif qu’une telle décision n’avait pas le même objet que la décision de refus et que, dans ces conditions, l’adaptation des conclusions et des moyens n’était pas permise en l’espèce.

 Les conclusions des parties

24      Validity demande à la Cour :

–        de déclarer le pourvoi recevable et fondé ;

–        d’annuler l’ordonnance attaquée ;

–        d’annuler tant la décision de refus que la décision d’octroi et de condamner la Commission aux dépens, ou

–        de renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour que celui‑ci statue sur le fond et de réserver les dépens.

25      La Commission conclut au rejet du pourvoi et à la condamnation de Validity aux dépens.

 Sur le pourvoi

26      À l’appui de son pourvoi, Validity invoque deux moyens, visant à contester le bien‑fondé de l’ordonnance attaquée en ce que, par celle-ci, le Tribunal a rejeté sa demande d’annulation de la décision de refus. Le premier moyen est tiré de ce que le Tribunal aurait commis une erreur de droit en jugeant qu’il n’existait aucun risque que la Commission porte atteinte, à l’avenir, à l’article 4, paragraphe 3, du règlement nº 1049/2001. Le second moyen est tiré de ce que le Tribunal aurait commis une erreur de droit en concluant à l’absence de risque de réitération de la violation des principes de transparence et de bonne administration ainsi que de « violations procédurales » du règlement nº 1049/2001. En revanche, Validity ne présente aucun moyen ou argument à l’appui de sa demande d’annulation de l’ordonnance attaquée en ce qu’elle a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision d’octroi.

 Sur le premier moyen

 Sur la première branche du premier moyen

–       Argumentation des parties

27      Par la première branche du premier moyen, qui vise les points 33 à 37 ainsi que les points 43 et 44 de l’ordonnance attaquée, Validity reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en jugeant que la décision de refus n’entraîne pas un risque que, à l’avenir, la Commission refuse de nouveau, en violation de l’article 4, paragraphe 3, du règlement nº 1049/2001, l’accès à des documents de la même nature que les trois documents en cause. Selon Validity, le motif sur lequel se fonde cette décision, tiré de ce que ces documents ne pouvaient pas être divulgués afin de ne pas affecter le « climat de confiance mutuelle » entre les autorités hongroises et la Commission, est illégal, qu’il soit considéré comme une présomption générale de confidentialité ou comme un simple motif de refus d’accès aux documents. Dans ces conditions, Validity conserverait un intérêt à agir en annulation contre ladite décision.

28      Premièrement, le Tribunal aurait omis de constater que la Commission a invoqué le motif vague tiré du « climat de confiance mutuelle » comme s’il s’agissait d’une présomption générale de confidentialité, afin de s’exonérer de son obligation d’examiner si et en quoi l’accès aux trois documents en cause porterait atteinte au processus décisionnel se déroulant en Hongrie.

29      Deuxièmement, dès lors que seuls les trois documents en cause étaient liés à un processus décisionnel en cours au moment de l’adoption de la décision de refus et pouvaient, donc, relever de l’article 4, paragraphe 3, du règlement nº 1049/2001, le fait que la Commission a uniquement refusé l’accès à ces documents ne démontrerait pas l’absence d’application d’une présomption générale de confidentialité fondée sur cette disposition, puisque les autres documents, dont l’accès a été octroyé, n’étaient pas liés à un processus décisionnel en cours et, partant, ne relevaient pas de ladite disposition.

30      Troisièmement, le Tribunal aurait ainsi omis d’examiner, en violation de l’article 4, paragraphe 3, du règlement nº 1049/2001, si l’accès aux trois documents en cause portait réellement atteinte, de manière concrète, effective et grave, au processus décisionnel en cours en Hongrie. Selon Validity, indépendamment du point de savoir si le motif sur lequel se fonde la décision de refus, tiré du « climat de confiance mutuelle » avec les autorités hongroises, constitue de facto une présomption générale de confidentialité, la Commission a violé cette disposition en faisant état d’une justification vague, sans examiner s’il était justifié d’appliquer l’exception prévue à ladite disposition. Cette violation justifierait que soient apportées, à l’avenir, les modifications appropriées afin d’éviter le risque de répétition de l’illégalité entachant cette décision et, partant, démontrerait, conformément à l’arrêt du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission (C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 48), la persistance d’un intérêt à demander l’annulation ladite décision.

31      La Commission estime que la première branche du premier moyen est irrecevable, dès lors que les arguments invoqués ne portent pas sur des questions de droit, et, en tout état de cause, est non fondée.

–       Appréciation de la Cour

32      Un recours en annulation intenté par une personne physique ou morale n’est recevable que dans la mesure où cette personne a un intérêt à voir annuler l’acte attaqué, ce qui suppose que l’annulation de cet acte soit susceptible, par elle‑même, d’avoir des conséquences juridiques et que le recours puisse ainsi, par son résultat, procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (arrêt du 20 décembre 2017, Binca Seafoods/Commission, C‑268/16 P, EU:C:2017:1001, point 44 et jurisprudence citée). Cet intérêt doit exister au stade de l’introduction du recours, sous peine d’irrecevabilité, et perdurer jusqu’au prononcé de la décision juridictionnelle, sous peine de non‑lieu à statuer (voir, en ce sens, arrêts du 28 mai 2013, Abdulrahim/Conseil et Commission, C‑239/12 P, EU:C:2013:331, point 61, et du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission, C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 43 ainsi que jurisprudence citée).

33      Dans certains cas, un requérant peut toutefois conserver un intérêt à demander l’annulation d’un acte attaqué qui a cessé de produire des effets en cours d’instance et, le cas échéant, de l’arrêt ou de l’ordonnance du Tribunal rejetant le recours introduit contre cet acte, pour amener l’auteur de celui‑ci à apporter, à l’avenir, en conséquence de cette annulation, les modifications appropriées et ainsi éviter le risque de répétition de l’illégalité dont ledit acte est prétendument entaché. La persistance d’un tel intérêt à agir suppose que cette illégalité soit susceptible de se reproduire dans le futur, indépendamment des circonstances particulières de l’affaire en cause (voir, en ce sens, arrêts du 28 mai 2013, Abdulrahim/Conseil et Commission, C‑239/12 P, EU:C:2013:331, points 62 et 63 ; du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission, C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 48, et du 30 avril 2020, Izba Gospodarcza Producentów i Operatorów Urządzeń Rozrywkowych/Commission, C‑560/18 P, EU:C:2020:330, points 39 et 40 ainsi que jurisprudence citée).

34      Dans les procédures d’accès aux documents, comme celle qui fait l’objet de la présente affaire, l’intérêt à agir de la partie requérante ne saurait toutefois persister automatiquement en raison du seul fait que, à l’avenir, l’institution concernée pourrait interpréter une disposition applicable dans le domaine concerné de la manière contestée par cette partie (voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2020, Izba Gospodarcza Producentów i Operatorów Urządzeń Rozrywkowych/Commission, C‑560/18 P, EU:C:2020:330, point 47).

35      En l’espèce, ainsi que le Tribunal l’a jugé au point 34 de l’ordonnance attaquée, la décision de refus, en ce qu’elle a opposé à la demande d’accès de Validity l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement nº 1049/2001, ne fait état d’aucune présomption générale de confidentialité applicable aux documents émanant d’un État membre relatifs aux projets d’appels à propositions cofinancés par l’Union conformément aux dispositions du règlement nº 1303/2013, ce que Validity admet elle‑même dans sa requête en pourvoi.

36      L’article 4, paragraphe 5, du règlement nº 1049/2001 place les États membres dans une situation différente de celle des autres tiers, en prévoyant que tout État membre dispose, à la différence de ceux-ci, de la faculté de demander à l’institution de l’Union concernée de ne pas divulguer un document qui émane de cet État membre sans son accord préalable (voir, en ce sens, arrêt du 18 décembre 2007, Suède/Commission, C‑64/05 P, EU:C:2007:802, point 43). Cette disposition ouvre, ainsi, à l’État membre concerné la possibilité de participer à la décision qu’il incombe à l’institution d’adopter et établit un processus décisionnel afin de déterminer si les exceptions qui sont énumérées à l’article 4, paragraphes 1 à 3, de ce règlement s’opposent à l’accès au document en cause (voir, en ce sens, arrêt du 18 juillet 2017, Commission/Breyer, C‑213/15 P, EU:C:2017:563, point 43).

37      Il importe de préciser, dans ce contexte, que les documents visés au point 35 du présent arrêt ne figurent pas parmi ceux à l’égard desquels la Cour a reconnu l’existence de présomptions générales de confidentialité, à savoir, premièrement, les documents d’un dossier administratif afférent à une procédure de contrôle des aides d’État, deuxièmement, les mémoires déposés devant les juridictions de l’Union au cours d’une procédure juridictionnelle tant que celle-ci est pendante, troisièmement, les documents échangés entre la Commission et les parties ayant procédé à une notification ou des tiers dans le cadre d’une procédure de contrôle des opérations de concentration entre entreprises, quatrièmement, les documents se rapportant à une procédure précontentieuse en manquement, y compris les documents échangés entre la Commission et l’État membre concerné dans le cadre d’une procédure EU Pilot, et, cinquièmement, les documents afférents à une procédure d’application de l’article 101 TFUE (arrêt du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission, C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 81 et jurisprudence citée).

38      En outre, aux points 35 à 37 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a procédé à une appréciation factuelle afin de vérifier si la Commission avait examiné concrètement et individuellement chacun des documents relevant de la demande d’accès, avant de rejeter cette demande au motif qu’un tel accès serait susceptible de nuire au « climat de confiance mutuelle » avec les autorités hongroises et de limiter les marges de négociation avec la Commission. Cette appréciation ne saurait être soumise au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi, en l’absence d’allégation, par Validity, d’une inexactitude matérielle des constatations de fait opérées par le Tribunal ou de la dénaturation des éléments de preuve produits devant lui (voir, en ce sens, arrêt du 8 juin 2023, Severstal et NLMK/Commission, C‑747/21 P et C‑748/21 P, EU:C:2023:459, point 46 et jurisprudence citée).

39      Ainsi qu’il a été rappelé au point 33 du présent arrêt, la persistance d’un intérêt à agir suppose que le requérant soit en mesure de démontrer que l’illégalité alléguée entache l’acte attaqué et que cette illégalité soit susceptible de se reproduire dans le futur, indépendamment des circonstances particulières de l’affaire en cause.

40      Or, aux points 38 à 41 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a, au terme d’une appréciation de nature factuelle, prenant en compte la décision du 15 décembre 2021, par laquelle la Commission a divulgué les documents demandés ultérieurement par Validity, écarté tout risque de réitération du motif tiré de la nécessité de protéger le climat de confiance entre les autorités hongroises et la Commission ainsi que les marges de négociation de celle-ci.

41      Par ailleurs, contrairement à ce qu’allègue Validity, les circonstances de l’espèce se distinguent de celles ayant donné lieu à l’arrêt du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission (C‑57/16 P, EU:C:2018:660), dans lequel la Cour a reconnu que la partie requérante conservait un intérêt à l’annulation des décisions de refus d’accès aux documents qu’elle avait demandés ainsi que de l’arrêt du Tribunal ayant jugé qu’il n’y avait plus lieu de statuer sur la demande d’annulation de ces décisions. En effet, dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, la demande d’accès portait sur des documents liés à un processus législatif sur lequel ClientEarth entendait peser, de telle sorte que la Cour a reconnu la persistance d’un intérêt à agir, en dépit de la divulgation ultérieure des documents demandés, au motif que le pourvoi visait à obtenir l’annulation d’un arrêt du Tribunal qui avait, de manière inédite, interprété l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement nº 1049/2001 en ce sens qu’il prévoit une présomption générale de confidentialité applicable à une certaine catégorie de documents, interprétation qui était contestée dans le cadre de ce pourvoi.

42      Or, ainsi que le Tribunal l’a jugé aux points 34 et 37 de l’ordonnance attaquée, la motivation de la décision d’octroi ne fait pas état d’une présomption générale de confidentialité, sur le fondement de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement nº 1049/2001, applicable aux documents relatifs aux projets d’appels à propositions cofinancés par l’Union conformément aux dispositions du règlement nº 1303/2013.

43      Il résulte de ce qui précède que, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 33 et 34 du présent arrêt, c’est à bon droit que le Tribunal a considéré que l’argumentation de Validity n’était pas à même de démontrer la persistance, en dépit de l’adoption de la décision d’octroi, d’un intérêt à agir contre la décision de refus, indépendamment des circonstances particulières du présent litige.

44      Partant, la première branche du premier moyen doit être écartée comme étant, en partie, non fondée et, en partie, irrecevable.

 Sur la seconde branche du premier moyen

–       Argumentation des parties

45      Par la seconde branche du premier moyen, qui vise les points 38 à 43 de l’ordonnance attaquée, Validity reproche au Tribunal d’avoir, sur la base de la décision de la Commission du 15 décembre 2021, visée au point 19 du présent arrêt, écarté le risque que, à l’avenir, cette institution se fonde, en violation de l’article 4, paragraphe 3, du règlement nº 1049/2001, sur une présomption générale de confidentialité ou sur un motif de refus vague, tel que l’objectif de n’affecter ni le « climat de confiance mutuelle » entre les autorités hongroises et la Commission ni les marges de négociation de la Commission.

46      Selon Validity, le Tribunal aurait commis une erreur de droit dans son appréciation du risque de réitération d’une violation de l’article 4, paragraphe 3, du règlement nº 1049/2001 en jugeant que, à cette fin, seule une décision confirmative, au titre de l’article 8 de ce règlement, serait pertinente. En effet, le Tribunal n’aurait pas tenu compte des différentes étapes de la procédure d’accès aux documents et de la pratique de prise de décisions au sein de la Commission, laquelle s’inscrirait dans un « modèle récurrent fait de retards, de délais non respectés et de renversements de décisions ». Le risque d’invocation de « motifs vagues » pour justifier le refus d’accès aux documents persisterait au stade du traitement, par les différentes directions de la Commission, des demandes initiales, en application de l’article 7 dudit règlement. L’éventualité, même accrue, que le secrétariat général de la Commission adopte, au titre de l’article 8, paragraphe 1, du même règlement, une décision confirmative légale n’écarterait pas le risque de réitération de tels « motifs vagues », de telle sorte que les « modifications appropriées », au sens de l’arrêt du 30 avril 2020, Izba Gospodarcza Producentów i Operatorów Urządzeń Rozrywkowych/Commission (C‑560/18 P, EU:C:2020:330), apportées par cette institution demeureraient insuffisantes.

47      Validity allègue que, tant que les différentes directions de la Commission ne fonctionnent pas « à l’unisson », elle se voit contrainte de présenter des demandes confirmatives afin de garantir le respect de son droit d’accès aux documents, ce qui constitue un « processus lourd, qui exige des investissements en temps et en ressources importants », susceptible de porter atteinte à sa fonction en tant qu’organisation non gouvernementale. Le Tribunal aurait donc, au point 42 de l’ordonnance attaquée, apprécié erronément la vulnérabilité de Validity face à une violation future de l’article 4, paragraphe 3, du règlement nº 1049/2001, compte tenu des demandes d’accès qu’elle serait amenée à soumettre à la Commission dans des circonstances comparables à celles de l’espèce, et que cette institution pourrait rejeter, dans un premier temps, sur le fondement de « motifs vagues », tel que celui invoqué dans la décision de refus.

48      La Commission estime que la seconde branche du premier moyen est irrecevable et, en tout état de cause, non fondée.

–       Appréciation de la Cour

49      Les articles 7 et 8 du règlement nº 1049/2001 prévoient, ainsi que l’énonce le considérant 13 de celui‑ci, une procédure d’accès aux documents en deux phases. La réponse à une demande initiale d’accès aux documents, au titre de l’article 7, paragraphe 1, de ce règlement, ne constitue qu’une première prise de position, en principe non susceptible de recours (voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2016, Sea Handling/Commission, C‑271/15 P, EU:C:2016:557, point 76 et jurisprudence citée). Une telle réponse confère au demandeur le droit, prévu à cet article 7, paragraphe 2, dudit règlement, de réitérer une demande d’accès nonobstant un premier refus motivé et permet à l’institution de l’Union concernée de réexaminer sa position initiale avant de prendre une décision définitive de refus, susceptible de faire l’objet d’un recours devant les juridictions de l’Union et de remédier, le cas échéant, aux éventuelles illégalités dont serait entaché un premier refus (voir, en ce sens, arrêt du 26 janvier 2010, Internationaler Hilfsfonds/Commission, C‑362/08 P, EU:C:2010:40, point 54).

50      Il s’ensuit que, en l’espèce, contrairement à ce qu’allègue Validity, l’appréciation de l’existence d’un risque que l’illégalité dont serait prétendument entachée la décision de refus se reproduise à l’avenir ne saurait être effectuée au seul regard de décisions initiales, adoptées au titre de l’article 7 de ce règlement, sans méconnaître que la procédure d’accès aux documents comporte deux phases, ainsi qu’il ressort des articles 7 et 8 dudit règlement, lus à la lumière du considérant 13 du même règlement.

51      Dans ce contexte, le Tribunal a relevé, aux points 39 à 41 de l’ordonnance attaquée, que la Commission a, par sa décision du 15 décembre 2021, visée au point 19 du présent arrêt, octroyé à Validity l’accès à l’ensemble des documents faisant l’objet de sa demande ultérieure du 30 avril 2021, nonobstant les objections des autorités hongroises. Le Tribunal a ainsi pu juger, sans commettre une erreur de droit, que cette décision était de nature à écarter le risque que la Commission invoque, à l’avenir, un motif tiré de la nécessité de protéger le climat de confiance entre les autorités hongroises et la Commission ainsi que les marges d’appréciation de celle-ci, indépendamment des circonstances particulières ayant conduit à l’adoption de la décision de refus.

52      S’agissant de l’argument visant le point 42 de l’ordonnance attaquée, selon lequel le Tribunal aurait apprécié erronément la vulnérabilité de Validity face à une violation future de l’article 4, paragraphe 3, du règlement nº 1049/2001, il y a lieu de constater que le nombre de demandes d’accès aux documents que, à l’avenir, Validity pourrait être amenée à soumettre à la Commission dans des circonstances comparables à celle de l’espèce ne saurait suffire à démontrer ni que la Commission pourrait rejeter ces demandes sur le même fondement, prétendument vague, que celui invoqué dans la décision de refus, ni que ces refus seraient susceptibles de compromettre l’activité de Validity en tant qu’organisation non gouvernementale.

53      Eu égard aux motifs qui précèdent, il y a lieu d’écarter la seconde branche du premier moyen comme étant non fondée et, partant, de rejeter le premier moyen dans son intégralité.

 Sur le second moyen

 Sur la première branche du second moyen

–       Argumentation des parties

54      Par la première branche du second moyen, qui vise les points 46 à 49 de l’ordonnance attaquée, Validity fait valoir que le Tribunal a omis d’apprécier l’existence d’un risque de réitération des « violations procédurales commises par la Commission dans le cadre de procédures passées » et commis ainsi une erreur de droit, dans la mesure où la décision de refus s’inscrirait dans un modèle récurrent de tactiques dilatoires et de divulgations partielles de la part de la Commission, contraire aux principes de transparence et de bonne administration. La circonstance que la Commission a ultérieurement octroyé l’accès aux trois documents en cause serait dénuée de pertinence, puisque « [l]es droits de [Validity] à la transparence et à une bonne administration [auraient] déjà été violés par la procédure et une divulgation ultérieure ne saurait y remédier ».

55      La Commission estime que la première branche du second moyen n’est pas fondée.

–       Appréciation de la Cour

56      S’agissant du traitement des demandes initiales, au sens de l’article 7 du règlement nº 1049/2001, il résulte du paragraphe 4 de cet article que l’absence de réponse de l’institution de l’Union concernée dans le délai de quinze jours ouvrables à partir de l’enregistrement de la demande, prévu au paragraphe 1 dudit article, éventuellement prolongé de quinze jours ouvrables, à titre exceptionnel, conformément au paragraphe 3 du même article, habilite le demandeur à présenter une demande confirmative. Ce règlement ne comporte pas d’autres conséquences juridiques en cas de dépassement des délais fixés à son article 7 (voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2016, Sea Handling/Commission, C‑271/15 P, EU:C:2016:557, points 77 et 78).

57      S’agissant du traitement des demandes confirmatives, au sens de l’article 8 du règlement nº 1049/2001, l’absence de réponse dans le délai de quinze jours ouvrables à partir de l’enregistrement de la demande, prévu au paragraphe 1 de cet article, éventuellement prolongé de quinze jours ouvrables, à titre exceptionnel, conformément au paragraphe 2 dudit article, doit être considérée, en vertu du paragraphe 3 du même article, comme une décision implicite de rejet de la demande d’accès aux documents concernés. Ce mécanisme vise à pallier le risque d’une éventuelle inaction de l’institution de l’Union concernée à la suite d’une demande d’accès aux documents qui lui a été adressée (voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2016, Sea Handling/Commission, C‑271/15 P, EU:C:2016:557, points 83 et 84).

58      Ainsi, afin de contester le dépassement des délais prévus à l’article 8 du règlement nº 1049/2001, le demandeur peut, en vertu du paragraphe 3 de cet article, former non seulement un recours juridictionnel contre une décision implicite de rejet, sur le fondement de l’article 263 TFUE, mais aussi saisir le Médiateur d’une plainte, au titre de l’article 228 TFUE. En tout état de cause, l’institution de l’Union concernée reste dans l’obligation de fournir, même tardivement, une réponse motivée à la demande d’accès (voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2016, Sea Handling/Commission, C‑271/15 P, EU:C:2016:557, points 85 à 87).

59      En l’espèce, le recours en annulation introduit par Validity devant le Tribunal a pour objet l’annulation de la décision de refus, par laquelle la Commission a expressément confirmé le refus d’accès aux trois documents en cause. Validity n’a pas allégué, à l’appui de ce recours, de motifs tirés de la violation des délais prévus aux articles 7 et 8 du règlement nº 1049/2001.

60      Afin d’apprécier le risque de réitération, par la Commission, de la violation des délais fixés par le règlement nº 1049/2001 et, partant, des principes de transparence et de bonne administration, dont serait prétendument entachée la décision de refus, c’est la procédure d’accès aux documents à l’origine de la présente affaire qui est pertinente, et non pas, contrairement à ce qu’allègue Validity, les éventuelles « violations procédurales commises par la Commission dans le cadre de procédures passées ».

61      En outre, contrairement à ce qu’allègue Validity, même à supposer que la violation de ces délais serait avérée, la décision de refus ne permet pas d’établir l’existence de violations récurrentes et systématiques, par la Commission, desdits délais. Partant, Validity ne saurait alléguer, en se prévalant de la jurisprudence mentionnée au point 33 du présent arrêt, que la décision de refus constitue un précédent impliquant le risque que, à l’avenir, la Commission refuse l’accès à des documents en violation des délais prévus aux articles 7 et 8 du règlement nº 1049/2001, indépendamment des circonstances particulières de la présente affaire, et ainsi justifier la persistance d’un intérêt à agir en annulation contre la décision de refus.

62      En tout état de cause, l’argument de Validity, selon lequel la circonstance que la Commission a ultérieurement octroyé l’accès aux trois documents en cause est dénuée de pertinence, méconnaît manifestement la procédure d’accès aux documents, en deux phases, telle que prévue aux articles 7 et 8 du règlement nº 1049/2001, lus à la lumière du considérant 13 de ce règlement, et rappelée au point 49 du présent arrêt. En effet, l’adoption d’une décision confirmative, au titre de l’article 8, paragraphe 1, dudit règlement, vise à permettre à l’institution de l’Union concernée, sur demande présentée en vertu de l’article 7, paragraphe 2, du même règlement, de réexaminer sa position initiale et d’octroyer, le cas échéant, l’accès aux documents demandés, pour ainsi remédier aux éventuelles illégalités dont serait entaché un premier refus (voir, en ce sens, arrêt du 26 janvier 2010, Internationaler Hilfsfonds/Commission, C‑362/08 P, EU:C:2010:40, point 54).

63      La première branche du second moyen est donc non fondée.

 Sur la seconde branche du second moyen

–       Argumentation des parties

64      Par la seconde branche du second moyen, Validity reproche au Tribunal d’avoir, au point 48 de l’ordonnance attaquée, commis une « erreur manifeste d’appréciation des éléments de fait », en jugeant qu’il n’y avait pas de risque de réitération de la violation des délais fixés par le règlement nº 1049/2001 et, partant, des principes de transparence et de bonne administration, au motif que la Commission avait fait droit aux demandes de Validity dans les procédures d’accès aux documents identifiées dans sa requête en première instance, y compris celle à l’origine de la présente affaire.

65      Selon elle, « l’élément essentiel aux fins de cette appréciation n’est pas la divulgation finale, mais les violations procédurales », récurrentes et systématiques des délais prévus aux articles 7 et 8 du règlement nº 1049/2001, dont l’existence serait révélée par un simple examen des éléments de preuve concernant ces procédures. Ces éléments démontreraient, en particulier, que la Commission, en méconnaissance de cet article 7, paragraphe 3, n’a pas justifié la prolongation du délai prévu au paragraphe 1 dudit article 7, ou a omis d’en informer la requérante et, lorsque les délais de réponse ont été prolongés, cette institution n’a pas respecté les délais prolongés, comme dans la procédure à l’origine de la décision du 15 décembre 2021. Dans ces conditions, le Tribunal aurait dû constater l’existence d’un risque évident de réitération, dans les procédures à venir, de la violation des délais fixés par ledit règlement ainsi que des principes de transparence et de bonne administration.

66      La Commission estime que la seconde branche du second moyen doit être rejetée comme étant non fondée.

–       Appréciation de la Cour

67      Par son argumentation, Validity conteste, en substance, la constatation du Tribunal, opérée au point 48 de l’ordonnance attaquée, selon laquelle, sur la base des écritures de Validity elle-même, dans les procédures d’accès aux documents identifiées dans sa requête en première instance, y compris celle à l’origine de la présente affaire, la Commission a systématiquement fait droit aux demandes d’accès aux documents qu’elle a présentées.

68      En vertu de l’article 256, paragraphe 1, TFUE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le pourvoi est limité aux questions de droit et le Tribunal est, dès lors, seul compétent pour constater et apprécier les faits ainsi que les éléments de preuve. Cette appréciation ne constitue donc pas, sous réserve d’une dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (voir, en ce sens, arrêt du 25 janvier 2022, Commission/European Food e.a., C‑638/19 P, EU:C:2022:50, point 71 ainsi que jurisprudence citée).

69      Lorsqu’une partie requérante allègue une telle dénaturation, elle doit, en vertu de ces dispositions ainsi que de l’article 168, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure de la Cour, indiquer de manière précise les éléments qui auraient été dénaturés par le Tribunal et démontrer les erreurs d’analyse qui, dans son appréciation, auraient conduit celui‑ci à cette dénaturation. Par ailleurs, la dénaturation alléguée doit ressortir de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (voir, en ce sens, arrêt du 8 juin 2023, Severstal et NLMK/Commission, C‑747/21 P et C‑748/21 P, EU:C:2023:459, point 47 ainsi que jurisprudence citée).

70      En l’espèce, Validity n’allègue ni ne démontre qu’il ressort de façon manifeste des pièces versées au dossier que le Tribunal a procédé à des constatations de fait matériellement inexactes en ce qui concerne la procédure d’accès aux documents à l’origine de la présente affaire, qui, comme cela a été rappelé au point 60 du présent arrêt, est la seule à devoir être prise en compte dans ce contexte. Son argumentation est ainsi irrecevable.

71      Il y a donc lieu de rejeter le second moyen dans son ensemble comme étant, en partie, non fondé et, en partie, irrecevable.

 Sur les conclusions concernant la décision d’octroi

72      Dans sa requête en pourvoi, Validity n’énonce qu’un chef de conclusions tendant à l’annulation de la décision d’octroi. Elle ne soulève aucun moyen ou argument spécifique visant les points 52 à 57 de l’ordonnance attaquée, dans lesquels le Tribunal a apprécié la demande d’adaptation de la requête en première instance introduite par Validity, afin de tenir compte de la décision d’octroi, et a rejeté comme étant irrecevables les conclusions tendant à l’annulation de cette décision, au motif que celle‑ci n’avait pas le même objet que la décision de refus.

73      Il résulte de l’article 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne ainsi que de l’article 168, paragraphe 1, sous d), et de l’article 169, paragraphe 2, du règlement de procédure qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les points critiqués de l’arrêt ou de l’ordonnance dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande, sous peine d’irrecevabilité du pourvoi ou du moyen concerné (voir, en ce sens, arrêt du 23 novembre 2021, Conseil/Hamas, C‑833/19 P, EU:C:2021:950, point 50 et jurisprudence citée).

74      Or, dans son pourvoi, la requérante se borne à demander l’annulation de la décision d’octroi, sans toutefois soulever le moindre argument juridique qui justifierait de faire droit à cette demande. Partant, le pourvoi est manifestement irrecevable en ce que, par celui-ci, la requérante sollicite l’annulation de cette décision.

75      Eu égard à l’ensemble des motifs qui précèdent, il y a lieu de rejeter le pourvoi dans son intégralité.

 Sur les dépens

76      En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens. Conformément à l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

77      La Commission ayant conclu à la condamnation de la requérante et celle‑ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens afférents au présent pourvoi.

Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) déclare et arrête :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      Validity Foundation – Mental Disability Advocacy Centreest condamnée aux dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.

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