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Document 62021CJ0418

Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 27 octobre 2022.
Orthomol pharmazeutische Vertriebs GmbH contre Verband Sozialer Wettbewerb eV.
Demande de décision préjudicielle, introduite par l'Oberlandesgericht Düsseldorf.
Renvoi préjudiciel – Sécurité des aliments – Denrées alimentaires – Règlement (UE) no 609/2013 – Article 2, paragraphe 2, sous g) – Règlement délégué (UE) 2016/128 – Denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales – Autres exigences nutritionnelles particulières – Denrées alimentaires procurant un bénéfice général au patient – Délimitation par rapport aux médicaments.
Affaire C-418/21.

Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2022:831

 ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

27 octobre 2022 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Sécurité des aliments – Denrées alimentaires – Règlement (UE) no 609/2013 – Article 2, paragraphe 2, sous g) – Règlement délégué (UE) 2016/128 – Denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales – Autres exigences nutritionnelles particulières – Denrées alimentaires procurant un bénéfice général au patient – Délimitation par rapport aux médicaments »

Dans l’affaire C‑418/21,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite l’Oberlandesgericht Düsseldorf (tribunal régional supérieur de Düsseldorf, Allemagne), par décision du 28 juin 2021, parvenue à la Cour le 9 juillet 2021, dans la procédure

Orthomol pharmazeutische Vertriebs GmbH

contre

Verband Sozialer Wettbewerb eV,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de Mme A. Prechal, présidente de chambre, Mme M. L. Arastey Sahún, MM. F. Biltgen, N. Wahl (rapporteur) et J. Passer, juges,

avocat général : Mme T. Ćapeta,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour Orthomol pharmazeutische Vertriebs GmbH, par Me M. Hagenmeyer, Rechtsanwalt,

pour Verband Sozialer Wettbewerb eV, par Me H. Reinhardt, Rechtsanwalt,

pour le gouvernement hellénique, par Mme V. Karra et M. A. Zacheilas, en qualité d’agents,

pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de Mme L. Vignato, avvocato dello Stato,

pour la Commission européenne, par Mme I. Galindo Martín et M. B.‑R. Killmann, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocate générale entendue, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation du règlement (UE) no 609/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 12 juin 2013, concernant les denrées alimentaires destinées aux nourrissons et aux enfants en bas âge, les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales et les substituts de la ration journalière totale pour contrôle du poids et abrogeant la directive 92/52/CEE du Conseil, les directives 96/8/CE, 1999/21/CE, 2006/125/CE et 2006/141/CE de la Commission, la directive 2009/39/CE du Parlement européen et du Conseil, et les règlements (CE) no 41/2009 et (CE) no 953/2009 de la Commission (JO 2013, L 181, p. 35), ainsi que du règlement délégué (UE) 2016/128 de la Commission, du 25 septembre 2015, complétant le règlement (UE) no 609/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les exigences spécifiques en matière de composition et d’information applicables aux denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales (JO 2016, L 25, p. 30).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Orthomol pharmazeutische Vertriebs GmbH (ci-après « Orthomol ») à Verband Sozialer Wettbewerb eV (ci-après « VSW »), au sujet de la commercialisation par Orthomol de produits en tant que denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales.

Le cadre juridique

Le règlement no 609/2013

3

Les considérants 9, 10, 12, 13, 15 et 25 du règlement no 609/2013 sont libellés comme suit :

« (9)

Un rapport de la Commission du 27 juin 2008 au Parlement européen et au Conseil sur l’application de [la] procédure de notification [prévue par la directive 2009/39/CE du Parlement Européen et du Conseil, du 6 mai 2009, relative aux denrées alimentaires destinées à une alimentation particulière (JO 2009, L 124, p. 21)] a montré que la définition de “denrées alimentaires destinées à une alimentation particulière” peut donner lieu à des interprétations différentes de la part des autorités nationales et, de ce fait, être source de difficultés. Partant, il conclut à la nécessité de réviser la [directive 2009/39] pour assurer une application plus efficace et plus uniforme des actes juridiques de l’Union.

(10)

Un rapport d’étude de Agra CEAS Consulting daté du 29 avril 2009 concernant la révision de la [directive 2009/39] a confirmé les conclusions du rapport de la Commission du 27 juin 2008 sur l’application de la procédure de notification et a indiqué qu’un nombre croissant de denrées alimentaires sont actuellement commercialisées et étiquetées en tant que denrées alimentaires destinées à une alimentation particulière du fait de la large définition établie par ladite directive. Le rapport d’étude a indiqué également que les denrées alimentaires réglementées par ladite directive diffèrent sensiblement entre les États membres ; des denrées alimentaires similaires peuvent être en même temps commercialisées dans différents États membres en tant que denrée alimentaire destinée à une alimentation particulière et/ou en tant que denrée alimentaire de consommation courante, y compris les compléments alimentaires, destinée à la population en général ou à certains sous-groupes comme les femmes enceintes, les femmes ménopausées, les personnes âgées, les enfants, les adolescents, les personnes plus ou moins actives et autres. Outre que cet état de fait est préjudiciable au fonctionnement du marché intérieur et qu’il est source d’insécurité juridique pour les autorités compétentes, les exploitants du secteur alimentaire, en particulier les petites et moyennes entreprises (PME), et les consommateurs, il ne permet pas d’exclure les risques d’abus lors de la commercialisation et de distorsion de la concurrence. Il est donc nécessaire d’éliminer les différences d’interprétation par la simplification du cadre réglementaire.

[...]

(12)

De plus, l’expérience montre que certaines règles prévues par la [directive 2009/39] ou adoptées au titre de celle-ci ne sont pas efficaces pour garantir le bon fonctionnement du marché intérieur.

(13)

Il y a donc lieu de supprimer le concept de “denrées alimentaires destinées à une alimentation particulière” et de remplacer la [directive 2009/39] par le présent acte. Il convient que le présent acte prenne la forme d’un règlement afin de simplifier son application et de garantir une application cohérente dans tous les États membres.

[...]

(15)

Un nombre limité de catégories de denrées alimentaires constituent une source d’alimentation partielle ou unique de certains groupes de population. Ces catégories de denrées alimentaires sont indispensables pour gérer certains problèmes et/ou essentielles pour répondre aux besoins nutritionnels de certains groupes de population vulnérables bien définis. Ces catégories de denrées alimentaires comprennent des préparations pour nourrissons, des préparations de suite, des préparations à base de céréales et des denrées alimentaires pour bébés, ainsi que des denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales. L’expérience a montré que les dispositions établies par les directives 1999/21/CE [de la Commission, du 25 mars 1999, relative aux aliments diététiques destinés à des fins médicales spéciales (JO 1999, L 91, p. 29)], 2006/125/CE [de la Commission, du 5 décembre 2006, concernant les préparations à base de céréales et les aliments pour bébés destinés aux nourrissons et aux enfants en bas âge (JO 2006, L 339, p. 16)] et 2006/141/CE [de la Commission, du 22 décembre 2006, concernant les préparations pour nourrissons et les préparations de suite et modifiant la directive 1999/21/CE (JO 2006, L 401, p. 1)] assurent de manière satisfaisante la libre circulation de ces catégories de denrées alimentaires, tout en garantissant un niveau élevé de protection de la santé publique. Il convient donc que le présent règlement se concentre sur les exigences générales en matière de composition et d’information pour ces catégories de denrées alimentaires, en tenant compte des [directives 1999/21, 2006/125 et 2006/141].

[...]

(25)

L’étiquetage, la présentation et la publicité des denrées alimentaires couvertes par le présent règlement ne devraient pas attribuer à ces denrées alimentaires des propriétés de prévention, de traitement ou de guérison d’une maladie humaine, ni évoquer de telles propriétés. Toutefois, les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales sont conçus pour répondre aux besoins nutritionnels des patients dont la capacité, par exemple, à absorber des denrées alimentaires ordinaires est diminuée, limitée ou perturbée, en raison d’une maladie, d’un trouble ou d’un état de santé particuliers. L’allusion au traitement nutritionnel de maladies, troubles ou problèmes de santé auquel les denrées alimentaires sont destinées ne devrait pas être considérée comme l’attribution d’une propriété de prévention, de traitement ou de guérison d’une maladie humaine. »

4

L’article 1, paragraphe 1, de ce règlement dispose :

« Le présent règlement établit les exigences en matière de composition et d’information applicables aux catégories de denrées alimentaires suivantes :

a)

les préparations pour nourrissons et les préparations de suite ;

b)

les préparations à base de céréales et les denrées alimentaires pour bébés ;

c)

les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales ;

d)

les substituts de la ration journalière totale pour contrôle du poids. »

5

L’article 2, paragraphe 2, sous g), dudit règlement, énonce la définition suivante :

« “denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales”, une denrée alimentaire spécialement traitée ou formulée et destinée à répondre aux besoins nutritionnels de patients, y compris les nourrissons, et qui ne peut être utilisée que sous contrôle médical, et destinée à constituer l’alimentation exclusive ou partielle des patients dont les capacités d’absorption, de digestion, d’assimilation, de métabolisation ou d’excrétion des denrées alimentaires ordinaires ou de certains de leurs ingrédients ou métabolites sont diminuées, limitées ou perturbées, ou dont l’état de santé détermine d’autres exigences nutritionnelles particulières qui ne peuvent être satisfaites par une modification du seul régime alimentaire normal ».

6

L’article 9, paragraphes 1 et 5, de ce même règlement prévoit :

« 1.   La composition des denrées alimentaires visées à l’article 1er, paragraphe 1, est telle qu’elle est adaptée pour répondre aux besoins nutritionnels des personnes auxquelles elles sont destinées et qu’elle convient à ces personnes, conformément à des données scientifiques généralement admises.

[...]

5.   L’étiquetage, la présentation et la publicité des denrées alimentaires visées à l’article 1er, paragraphe 1, fournissent des informations sur l’utilisation appropriée de ces denrées alimentaires, n’induisent pas en erreur, n’attribuent pas à celles-ci des propriétés de prévention, de traitement ou de guérison d’une maladie humaine, ni n’évoquent de telles propriétés. »

Le règlement délégué 2016/128

7

Les considérants 3 à 5 du règlement délégué 2016/128 sont ainsi libellés :

« (3)

Les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales sont élaborées en étroite collaboration avec des professionnels de la santé pour nourrir les patients souffrant d’une maladie diagnostiquée, d’un trouble ou d’un état de santé particuliers, ou d’une dénutrition due à de tels maux, qui les empêchent ou ne leur permettent que très difficilement de satisfaire leurs besoins nutritionnels avec d’autres denrées alimentaires. Pour cette raison, elles doivent être utilisées sous un contrôle médical pouvant être assuré avec le concours de professionnels de la santé compétents.

(4)

La composition des denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales peut différer sensiblement selon, entre autres, la maladie, le trouble ou l’état de santé particuliers à l’origine des besoins nutritionnels auxquels ces denrées répondent, l’âge des patients et le lieu où ils reçoivent les soins de santé, ainsi que la destination des denrées. Plus particulièrement, celles-ci peuvent être classées en plusieurs catégories selon que leur composition est normale ou adaptée pour répondre aux besoins nutritionnels propres à une maladie, à un trouble ou à un état de santé, et selon qu’elles constituent ou non la seule source d’alimentation des personnes auxquelles elles sont destinées.

(5)

En raison de la grande diversité des denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales, de l’évolution rapide des connaissances scientifiques sur lesquelles ces denrées sont basées et de la nécessité de laisser assez de jeu pour permettre le développement de produits innovants, il n’est pas opportun de fixer des règles détaillées portant sur la composition desdites denrées. Il est néanmoins important de définir à leur égard des principes et des exigences spécifiques afin de garantir qu’elles sont sûres, salutaires et efficaces pour les personnes auxquelles elles sont destinées, selon des données scientifiques généralement admises. »

8

L’article 2 de ce règlement délégué énonce :

« 1.   Les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales sont classées dans les trois catégories suivantes :

a)

les aliments complets du point de vue nutritionnel qui, avec une composition normale en nutriments, s’ils sont utilisés conformément aux instructions des fabricants, peuvent constituer la seule source d’alimentation des personnes auxquelles ils sont destinés ;

b)

les aliments complets du point de vue nutritionnel qui, avec une composition adaptée pour répondre aux besoins nutritionnels propres à une maladie, à un trouble ou à un état de santé, s’ils sont utilisés conformément aux instructions des fabricants, peuvent constituer la seule source d’alimentation des personnes auxquelles ils sont destinés ;

c)

les aliments incomplets du point de vue nutritionnel qui, avec une composition normale ou adaptée pour répondre aux besoins nutritionnels propres à une maladie, à un trouble ou à un état de santé, ne peuvent pas constituer la seule source d’alimentation.

Les aliments visés aux points a) et b) du premier alinéa peuvent aussi être utilisés pour remplacer une partie de l’alimentation du patient ou servir de complément.

2.   Les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales présentent une composition basée sur de solides principes médicaux et nutritionnels. Leur utilisation, conformément aux instructions des fabricants, est sûre, adaptée et efficace pour répondre aux besoins nutritionnels particuliers des personnes auxquelles les denrées sont destinées, tels qu’établis par des données scientifiques généralement admises.

3.   La composition des denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales élaborées pour répondre aux besoins nutritionnels des nourrissons répond aux exigences établies à l’annexe I, partie A.

La composition des denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales autres que celles élaborées pour répondre aux besoins nutritionnels des nourrissons répond aux exigences établies à l’annexe I, partie B.

4.   Les exigences portant sur la composition établies à l’annexe I s’appliquent aux denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales prêtes à l’emploi, commercialisées telles quelles ou confectionnées suivant les instructions du fabricant. »

9

L’article 5, paragraphe 2, sous e) et g), dudit règlement délégué dispose :

« 2.   [...] les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales portent les mentions obligatoires supplémentaires suivantes :

e)

la mention “pour les besoins nutritionnels en cas de…” où les points de suspension sont remplacés par la maladie, le trouble ou l’état de santé pour lesquels le produit est prévu ;

[...]

g)

une description des propriétés et des caractéristiques qui permettent au produit de répondre aux besoins nutritionnels dans le cas de la maladie, du trouble ou de l’état de santé pour lequel il est prévu, notamment, selon le cas, les particularités de sa fabrication et de sa formule, les nutriments qui ont été augmentés, diminués, éliminés ou ont subi d’autres modifications et les raisons justifiant son utilisation ».

10

L’article 9 du règlement délégué 2016/128 prévoit :

« L’exploitant du secteur alimentaire qui met sur le marché une denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales notifie les informations figurant sur l’étiquette à l’autorité compétente de chaque État membre dans lequel le produit concerné est commercialisé en lui envoyant un modèle de l’étiquette utilisée pour le produit et toute autre information que ladite autorité peut raisonnablement demander pour s’assurer du respect du présent règlement, sauf quand un État membre l’exempte de cette obligation dans le cadre d’un système national garantissant un contrôle officiel efficace du produit. »

La directive 2001/83/CE

11

L’article 1er, point 2, de la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 novembre 2001, instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain (JO 2001, L 311, p. 67), telle que modifiée par la directive 2004/27/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004 (JO 2004, L 136, p. 34), énonce :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

2)

médicament :

a)

toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines ; ou

b)

toute substance ou composition pouvant être utilisée chez l’homme ou pouvant lui être administrée en vue soit de restaurer, de corriger ou de modifier des fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique, soit d’établir un diagnostic médical ».

Le règlement no 178/2002

12

L’article 2 du règlement no 178/2002 du Parlement européen et du Conseil, du 28 janvier 2002, établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l’Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires (JO 2002, L 31, p. 1), intitulé « Définition de “denrée alimentaire” », est ainsi libellé :

« Aux fins du présent règlement, on entend par “denrée alimentaire” (ou “aliment”), toute substance ou produit, transformé, partiellement transformé ou non transformé, destiné à être ingéré ou raisonnablement susceptible d’être ingéré par l’être humain.

[...]

Le terme “denrée alimentaire” ne couvre pas :

[...]

d)

les médicaments au sens des directives 65/65/CEE [du Conseil, du 26 janvier 1965, concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives, relatives aux médicaments (JO 1965, 22, p. 369)] et 92/73/CEE [du Conseil, du 22 septembre 1992, élargissant le champ d’application des directives 65/65/CEE et 75/319/CEE concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives aux médicaments et fixant des dispositions complémentaires pour les médicaments homéopathiques (JO 1992, L 297, p. 8)] ».

13

Les directives 65/65 et 92/73, mentionnées au point précédent, ont été codifiées par la directive 2001/83.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

14

Orthomol est une entreprise pharmaceutique qui commercialise les produits « Orthomol Immun » et « Orthomol AMD extra » en tant que denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales. Elle promeut ces produits en indiquant que le premier sert au « renforcement médico-nutritionnel du système immunitaire » pour « répondre aux besoins nutritionnels spécifiques en cas de déficit immunitaire d’origine nutritionnelle (par exemple, les infections récidivantes des voies respiratoires ») » et que le second sert à « répondre à des besoins nutritionnels en cas de dégénérescence maculaire liée à l’âge » (ci-après la « DMLA »).

15

VSW, association dont l’objet statutaire est, notamment, le respect des règles de concurrence loyale, a introduit un recours contre Orthomol afin de faire interdire la commercialisation des produits en cause en tant que denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales.

16

À cet égard, elle a soutenu que ces produits ne remplissent pas les conditions nécessaires à une telle classification. VSW a fait observer que l’article 2, paragraphe 2, sous g), du règlement no 609/2013 définit les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales en envisageant deux cas de figure, inapplicables aux produits en cause. Ainsi, les maladies que ces produits sont supposés combattre, à savoir le déficit immunitaire d’origine nutritionnel et la DMLA, ne seraient pas des maladies entraînant une diminution, une limitation ou une perturbation des capacités d’absorption, de digestion, d’assimilation, de métabolisation ou d’excrétion des denrées alimentaires ordinaires ou de certains de leurs ingrédients ou métabolites au sens du premier cas de figure visé à cette disposition. En outre, le deuxième cas de figure prévu à l’article 2, paragraphe 2, sous g), du règlement no 609/2013 concernerait exclusivement les maladies générant un besoin énergétique et nutritionnel particulier, telles que la mucoviscidose, la cachexie cancéreuse, les blessures/brûlures graves/ulcères de pression, et non les substances qui servent à traiter la maladie elle-même.

17

La juridiction de première instance, le Landgericht Düsseldorf (tribunal régional de Düsseldorf, Allemagne), a rendu un jugement faisant droit au recours au motif qu’il ne suffit pas, pour qualifier un produit de denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales, que les nutriments aient des effets positifs sur la survenance ou l’évolution d’une maladie en ce sens qu’ils contribuent à la prévenir, à l’atténuer ou à la guérir.

18

Orthomol a interjeté appel de ce jugement devant l’Oberlandesgericht Düsseldorf (tribunal régional supérieur de Düsseldorf, Allemagne), la juridiction de renvoi.

19

Celle-ci doit déterminer si les produits « Orthomol Immun » et « Orthomol AMD extra » peuvent être qualifiés de denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales et s’interroge, dans ce cadre, sur l’interprétation de cette notion. À cet égard, elle indique que le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne) a interprété la législation antérieure au règlement no 609/2013, à savoir la directive 1999/21 et la directive 2009/39, en ce sens qu’un objectif nutritionnel particulier existe non seulement lorsqu’il y a une carence en nutriments d’origine pathologique, mais également lorsque l’apport nutritionnel est destiné à lutter d’une autre manière contre une maladie et que le consommateur peut tirer un bénéfice particulier de l’absorption contrôlée de certains nutriments. Cette jurisprudence serait décrite comme ayant conféré à de telles denrées alimentaires le statut de « petit médicament ».

20

Toutefois, la juridiction de renvoi se demande si cette interprétation peut être maintenue dans le cadre du règlement no 609/2013. Il résulterait, en effet, de la genèse et des termes de ce règlement que les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales doivent être élaborées, destinées et adaptées aux patients dont les exigences nutritionnelles ne peuvent être satisfaites par la consommation d’aliments ordinaires en raison de certaines maladies, de troubles ou d’un état de santé particulier.

21

En l’occurrence, le déficit immunitaire d’origine nutritionnelle et la DMLA étant des maladies, elle cherche à savoir si la qualification de denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales, au titre de l’article 2, paragraphe 2, sous g), du règlement no 609/2013, suppose que le produit soit conçu pour répondre à un besoin nutritionnel particulier ou s’il suffit que ce produit procure un bénéfice général au patient dans la mesure où les substances qui le composent contribuent à prévenir, à atténuer ou à guérir une maladie.

22

Dans ces conditions, l’Oberlandesgericht Düsseldorf (tribunal régional supérieur de Düsseldorf), a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

Dans quelles circonstances l’état de santé détermine-t-il d’autres exigences nutritionnelles particulières au sens de l’article 2, paragraphe 2, sous g), deuxième hypothèse, du règlement no 609/2013 ?

Plus exactement : au-delà de la diminution, limitation ou perturbation des capacités d’absorption, de digestion, d’assimilation, de métabolisation ou d’excrétion des denrées alimentaires ordinaires, visée à la première hypothèse, faut-il que la maladie entraîne des exigences nutritionnelles accrues, que la denrée alimentaire est censée couvrir, ou suffit-il que le patient [...] tire un bénéfice général de l’absorption de cette denrée alimentaire parce que les substances qu’elle contient combattent le trouble ou en atténuent les symptômes ?

2)

Dans l’hypothèse où il y aurait lieu de répondre à la première question dans le sens de cette dernière option : les “données scientifiques généralement admises” visées à l’article 2, paragraphe 2, du règlement délégué [2016/128] requièrent-elles toujours une étude en double aveugle, randomisée et contrôlée contre placebo, qui, même si elle ne porte pas sur le produit en question lui-même, ouvre à tout le moins des pistes sur les effets revendiqués ? »

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

23

Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 2, paragraphe 2, sous g), du règlement no 609/2013 et, en particulier, la notion d’« autres exigences nutritionnelles particulières », doivent être interprétés en ce sens qu’il faut, aux fins de qualifier un produit de denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales, que la maladie entraîne des exigences nutritionnelles accrues, que la denrée alimentaire est censée couvrir, ou s’il suffit que le patient tire un bénéfice général de l’absorption de cette denrée alimentaire parce que les substances qu’elle contient combattent le trouble ou en atténuent les symptômes.

24

S’agissant de l’interprétation de cette disposition et, en particulier, de la notion d’« autres exigences nutritionnelles particulières », il convient, pour en déterminer le sens et la portée, de tenir compte, conformément à une jurisprudence constante, non seulement du libellé de celle-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie [arrêt du 17 décembre 2020, A.M. (Étiquetage des produits cosmétiques), C‑667/19, EU:C:2020:1039, point 22 et jurisprudence citée)].

25

En premier lieu, il découle du libellé de l’article 2, paragraphe 2, sous g), du règlement no 609/2013 que les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales présentent deux caractéristiques permettant de les distinguer d’autres catégories de produits. D’une part, elles sont des denrées alimentaires destinées à constituer l’alimentation exclusive ou partielle des patients présentant une maladie, un trouble ou un état de santé déterminés. D’autre part, elles sont spécialement traitées ou formulées pour répondre aux besoins nutritionnels particuliers résultant d’une telle maladie, d’un tel trouble ou d’un tel état de santé.

26

Ainsi, il importe de relever d’emblée que, selon leur appellation même, les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales sont des denrées alimentaires, par nature, destinées à être ingérées et à servir à l’alimentation humaine.

27

Cette fonction nutritionnelle des denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales est confirmée par la circonstance que, conformément à l’article 2, paragraphe 2, sous g), du règlement no 609/2013, elles sont destinées à constituer « l’alimentation exclusive ou partielle » de certains patients et notamment de ceux présentant, du fait de leur état de santé, des « exigences nutritionnelles particulières ».

28

Toutefois, les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales ne sont pas des denrées alimentaires ordinaires. En effet, comme leur appellation l’indique, elles sont « destinées à des fins médicales spéciales ».

29

Il résulte ainsi, en particulier, de l’article 2, paragraphe 2, sous g), du règlement no 609/2013 qu’une denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales est une denrée alimentaire « spécialement traitée ou formulée » pour répondre aux besoins nutritionnels particuliers des patients et qui ne peut être utilisée que sous contrôle médical.

30

En outre, le législateur de l’Union européenne a défini la notion de « denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales » en envisageant deux types de fins médicales spéciales auxquelles ces denrées alimentaires peuvent être destinées.

31

Soit elles sont destinées aux patients dont les capacités d’absorption, de digestion, d’assimilation, de métabolisation ou d’excrétion des denrées alimentaires ordinaires ou de certains de leurs ingrédients ou métabolites sont diminuées, limitées ou perturbées.

32

Soit elles sont destinées aux patients dont l’état de santé détermine d’autres exigences nutritionnelles particulières qui ne peuvent être satisfaites par une modification du seul régime alimentaire normal.

33

Ainsi, le premier cas de figure envisagé à l’article 2, paragraphe 2, sous g), du règlement no 609/2013 concerne les catégories de patients dont le processus d’absorption ou d’assimilation ou le métabolisme est perturbé. Le second cas de figure visé à cette disposition a trait aux patients présentant des conditions physiologiques particulières et qui, par conséquent, ont des besoins spécifiques en termes de composition, de consistance ou de forme des denrées alimentaires.

34

Or, l’adéquation requise entre la denrée alimentaire, dans sa composition, sa consistance ou sa forme, et les besoins nutritionnels, causés par une maladie, un trouble ou un état de santé, auxquels elle vise à répondre, exclut qu’un produit soit qualifié de denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales au seul motif que les nutriments qui le composent ont des effets positifs en ce sens qu’ils procurent un bénéfice général au patient et qu’ils contribuent à prévenir, à atténuer ou à guérir la maladie, le trouble ou l’état de santé de celui-ci.

35

En effet, d’une part, si les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales doivent être conçues pour répondre aux besoins nutritionnels spécifiques engendrés par une maladie, un trouble ou un état de santé déterminés, il ne résulte nullement de l’article 2, paragraphe 2, sous g), du règlement no 609/2013 qu’il suffit, pour être qualifié de denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales, qu’un produit ait de tels effets et procure un bénéfice général au patient.

36

D’autre part, une telle exigence d’adéquation illustre le caractère spécifique de la fonction nutritionnelle des denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales. Ainsi, un produit qui, bien que procurant un bénéfice général au patient ou, comme revendiqué par Orthomol s’agissant des produits en cause, luttant d’une autre manière, grâce à l’apport nutritionnel, contre une maladie, un trouble ou un état de santé, mais qui est dépourvu d’une telle fonction nutritionnelle, ne peut pas être qualifié de denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales.

37

Dans ce contexte, il importe de souligner que les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales se distinguent tant des denrées alimentaires ordinaires, relevant du règlement no 178/2002, que des médicaments et que ces trois catégories de produits font, compte tenu de leurs caractéristiques propres, l’objet de définitions ainsi que de régimes juridiques distincts et exclusifs.

38

À cet égard, les caractéristiques et les fonctions des denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales se différencient de celles des médicaments lesquels s’entendent, en vertu de l’article 1er, point 2, de la directive 2001/83, de toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines ou de toute substance ou composition pouvant être utilisée chez l’homme ou pouvant lui être administrée en vue soit de restaurer, de corriger ou de modifier des fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique, soit d’établir un diagnostic médical.

39

En effet, il ne saurait être déduit de l’article 2, paragraphe 2, sous g), du règlement no 609/2013 que les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales visent à prévenir ou à guérir des maladies humaines, à restaurer, à corriger ou à modifier des fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique, ou à établir un diagnostic médical, dès lors qu’elles sont destinées à répondre aux besoins nutritionnels des patients.

40

Ainsi, les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales ne permettent pas en tant que telles de lutter contre une maladie, un trouble ou un état de santé, mais c’est leur fonction nutritionnelle spécifique qui permet de les caractériser de telle sorte qu’un produit qui n’est pas destiné à remplir une telle fonction ne peut pas être qualifié comme tel.

41

Or, si un patient tire un bénéfice général de l’absorption d’un produit dans la mesure où les substances qui le composent contribuent à prévenir, à atténuer ou à guérir une maladie, alors ce produit vise non pas à nourrir ce patient, mais à le soigner, à prévenir une pathologie ou encore à restaurer, à corriger ou à modifier des fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique militant pour une qualification de ce produit autre que celle de denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales.

42

En deuxième lieu, le contexte dans lequel s’inscrit l’article 2, paragraphe 2, sous g), du règlement no 609/2013 confirme une telle interprétation de cette disposition.

43

Ainsi, le considérant 15 de ce règlement précise que les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales « constituent une source d’alimentation partielle ou unique » pour certains groupes de population et sont « indispensables pour gérer certains problèmes et/ou essentielles pour répondre aux besoins nutritionnels » de ces groupes de population.

44

En outre, la nécessaire adéquation entre une denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales et les besoins nutritionnels causés par la maladie, le trouble ou l’état de santé auxquels elle vise à répondre, est confirmée par les dispositions du règlement no 609/2013 et du règlement délégué 2016/128 relatives à la composition et à l’étiquetage des denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales.

45

À cet égard, il convient de souligner que, conformément à l’article 9, paragraphe 1, du règlement no 609/2013, la composition des denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales doit être adaptée pour répondre aux besoins nutritionnels et convenir aux patients auxquels elles sont destinées.

46

L’article 9, paragraphe 5, de ce règlement précise ainsi que l’étiquetage, la présentation et la publicité des denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales ne doivent pas attribuer à ces denrées alimentaires des propriétés de prévention, de traitement ou de guérison d’une maladie humaine.

47

Or, il serait incohérent de qualifier un produit de denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales au motif que le patient tire un bénéfice général de l’absorption de ce produit parce que les substances qu’il contient combattent le trouble ou en atténuent les symptômes tout en interdisant d’en faire mention sur l’étiquetage d’un tel produit.

48

L’exigence d’adéquation entre un produit qualifié de denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales et les besoins nutritionnels causés par la maladie, le trouble ou l’état de santé auxquels il vise à répondre découle également des dispositions du règlement délégué 2016/128.

49

Ainsi, en définissant, à l’article 2, paragraphe 1, de ce règlement délégué, les trois catégories de denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales, cette disposition exige que leurs compositions respectives soient adaptées pour répondre aux besoins nutritionnels propres à une maladie, à un trouble ou à un état de santé. De la même manière, le paragraphe 2 de cette disposition indique que l’utilisation de ces denrées alimentaires doit être notamment adaptée pour répondre aux besoins nutritionnels particuliers des personnes auxquelles elles sont destinées.

50

En outre, il découle de l’article 5, paragraphe 2, sous e) et g), dudit règlement délégué que chaque denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales doit comporter, d’une part, la mention des besoins nutritionnels et de la maladie, du trouble ou de l’état de santé pour lesquels elle est prévue et, d’autre part, une description des propriétés et des caractéristiques qui permettent au produit de répondre aux besoins nutritionnels dans le cas de la maladie, du trouble ou de l’état de santé pour lequel il est prévu.

51

Une telle mention suppose que soient identifiés les besoins nutritionnels causés par la maladie, le trouble ou l’état de santé auxquels la denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales est censée répondre.

52

L’exigence de cette mention atteste sans équivoque qu’une denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales doit répondre à des besoins nutritionnels définis par une maladie, un trouble ou un état de santé particuliers et qu’un produit procurant un bénéfice général au patient n’a pas, en principe, de telles propriétés et caractéristiques dans la mesure où il n’a pas pour fonction de répondre à de tels besoins nutritionnels particuliers. Il s’ensuit qu’un tel produit ne peut, pour cette raison, pas être qualifié de denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales.

53

En troisième lieu, cette interprétation de l’article 2, paragraphe 2, sous g), du règlement no 609/2013 est confortée par les objectifs de ce règlement.

54

En effet, ainsi qu’il ressort des considérants 9 et 10 dudit règlement, celui-ci a, notamment, pour objet de clarifier la notion de « denrée alimentaire destinée à une alimentation particulière » visée par la directive 2009/39 ainsi que d’assurer une interprétation et une application uniformes et appropriées au sein de l’Union des différentes catégories de denrées alimentaires relevant du champ d’application du même règlement.

55

Un tel objectif suppose notamment que la notion de « denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales » ne soit pas interprétée, pour certains produits, de façon tellement large qu’elle empiète sur d’autres catégories de produits faisant l’objet de réglementations spécifiques en droit de l’Union.

56

Or, l’interprétation selon laquelle il suffit, pour emporter qualification de denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales, que le patient tire un bénéfice général de l’absorption d’un produit parce que les substances qu’il contient combattent un trouble ou en atténuent les symptômes méconnaîtrait les spécificités des denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales et remettrait notamment en cause la distinction entre de telles denrées et les médicaments.

57

La qualification de denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales pourrait de la sorte être acquise si le produit combat une maladie ou un trouble dont le patient est atteint alors même qu’il ne répond pas aux besoins nutritionnels résultant de cette maladie ou de ce trouble, mais relève de la réglementation relative aux médicaments laquelle soumet la mise sur le marché de tels produits à l’octroi d’une autorisation.

58

Il s’ensuit que la circonstance qu’un produit permet de lutter d’une autre manière, grâce à l’apport nutritionnel, contre une maladie, un trouble ou un état de santé n’est pas suffisante pour qualifier un tel produit de denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales si ledit produit ne vise pas à répondre aux besoins nutritionnels particuliers causés par une maladie, un trouble ou un état de santé.

59

Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, l’article 2, paragraphe 2, sous g), du règlement no 609/2013, et, en particulier, la notion d’« autres exigences nutritionnelles particulières » doivent être interprétés en ce sens qu’un produit constitue une denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales si la maladie entraîne des exigences nutritionnelles accrues ou spécifiques, que la denrée alimentaire est censée couvrir de telle sorte qu’il ne suffit pas, aux fins d’une telle qualification, que le patient tire un bénéfice général de l’absorption de cette denrée alimentaire parce que les substances qu’elle contient combattent le trouble ou en atténuent les symptômes.

Sur la seconde question

60

Compte tenu de la réponse apportée à la première question préjudicielle, il n’est pas nécessaire de répondre à la seconde question préjudicielle.

Sur les dépens

61

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit :

 

L’article 2, paragraphe 2, sous g), du règlement (UE) no 609/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 12 juin 2013, concernant les denrées alimentaires destinées aux nourrissons et aux enfants en bas âge, les denrées alimentaires destinées à des fins médicales spéciales et les substituts de la ration journalière totale pour contrôle du poids et abrogeant la directive 92/52/CEE du Conseil, les directives 96/8/CE, 1999/21/CE, 2006/125/CE et 2006/141/CE de la Commission, la directive 2009/39/CE du Parlement européen et du Conseil, et les règlements (CE) no 41/2009 et (CE) no 953/2009 de la Commission, et, en particulier, la notion d’« autres exigences nutritionnelles particulières »,

 

doivent être interprétés en ce sens que :

 

un produit constitue une denrée alimentaire destinée à des fins médicales spéciales si la maladie entraîne des exigences nutritionnelles accrues ou spécifiques, que la denrée alimentaire est censée couvrir de telle sorte qu’il ne suffit pas, aux fins d’une telle qualification, que le patient tire un bénéfice général de l’absorption de cette denrée alimentaire parce que les substances qu’elle contient combattent le trouble ou en atténuent les symptômes.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : l’allemand.

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