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Document 62016TO0047

Ordonnance du président du Tribunal du 25 août 2017.
Sigma Orionis SA contre Agence exécutive pour la recherche.
Référé – Clause compromissoire – Programme-cadre Horizon 2020 pour la recherche et l’innovation – Décision de suspendre les paiements et de résilier des contrats de subvention à la suite d’un audit financier – Sommes prétendument dues par la REA dans le cadre de l’exécution des contrats de subvention – Demande de dommages-intérêts – Demande de sursis à exécution – Défaut d’urgence – Mise en balance des intérêts.
Affaire T-47/16 R.

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2017:584

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

25 août 2017 (*)

« Référé – Clause compromissoire – Programme-cadre Horizon 2020 pour la recherche et l’innovation – Décision de suspendre les paiements et de résilier des contrats de subvention à la suite d’un audit financier – Sommes prétendument dues par la REA dans le cadre de l’exécution des contrats de subvention – Demande de dommages-intérêts – Demande de sursis à exécution – Défaut d’urgence – Mise en balance des intérêts »

Dans l’affaire T‑47/16 R,

Sigma Orionis SA, établie à Valbonne (France), représentée par Mes S. Orlandi et T. Martin, avocats,

partie requérante,

contre

Agence exécutive pour la recherche (REA), représentée par Mmes S. Payan-Lagrou et V. Canetti, en qualité d’agents, assistées de Mes D. Waelbroeck et A. Duron, avocats,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur les articles 278 et 279 TFUE et tendant au paiement immédiat par la REA d’une somme au titre de la convention de subvention « FET-Event »,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        La requérante, Sigma Orionis SA, est une société française qui a pour mission de rapprocher la recherche-innovation des marchés et intervient à ce titre dans des projets européens. Son activité consiste en la dissémination, la communication et l’exploitation de ces projets afin d’assurer leur impact économique et sociétal.

2        Dans le cadre du septième programme-cadre pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration (2007-2013) (ci-après le « FP7 »), régi notamment par la décision n° 1982/2006/CE du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2006, relative au FP7 (JO 2006, L 412, p. 1), elle a conclu plus d’une trentaine de conventions de subvention. Dans le cadre du programme-cadre pour la recherche et l’innovation « Horizon 2020 » (2014-2020) (ci-après le « H2020 »), établi par le règlement (UE) n° 1291/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 11 décembre 2013, portant établissement du H2020 et abrogeant la décision n° 1982/2006 (JO 2013, L 347, p. 104), elle a conclu dix conventions de subvention.

3        Le 24 janvier 2014, l’Office de lutte anti-fraude (OLAF) a ouvert une enquête, sur la base de l’article 3 du règlement (UE, Euratom) n° 883/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 11 septembre 2013, relatif aux enquêtes effectuées par l’OLAF et abrogeant le règlement (CE) n° 1073/1999 du Parlement européen et du Conseil et le règlement (Euratom) n° 1074/1999 du Conseil (JO 2013, L 248, p. 1), à l’encontre de la requérante concernant des allégations de manipulations de fiches horaires et de salaire horaire excessif dans le cadre des projets du FP7. Le 14 avril 2014, l’ouverture de l’enquête a été notifiée à la requérante.

4        Du 2 au 5 décembre 2014, l’OLAF a procédé à des contrôles et des vérifications au siège de la requérante. Lors de ces contrôles, les enquêteurs ont collecté des documents et des informations et ont auditionné deux personnes concernées par l’enquête et cinq témoins.

5        A la fin du mois d’avril 2015, après avoir donné aux personnes concernées par l’enquête la possibilité de présenter leurs observations sur les faits les concernant, l’OLAF a préparé son rapport final et a, sur la base de l’article 11 du règlement n° 883/2013, recommandé à la Commission européenne d’envisager les mesures prévues à l’article 109 du règlement (UE, Euratom) n° 966/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union et abrogeant le règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil (JO 2012, L 298, p. 1), ainsi que de recouvrer un montant de 1 545 759 euros. L’OLAF a également recommandé l’ouverture d’une procédure judiciaire en France pour escroquerie, faux et usage de faux, au magistrat chargé de l’instruction auprès du tribunal de grande instance de Grasse, qui a accusé réception, le 28 août 2015, du rapport final.

6        Le 5 août 2015, la requérante a fait l’objet d’un avis de vérification dans le système d’alerte précoce sur la base de la décision 2014/792/UE de la Commission, du 13 novembre 2014, relative au système d’alerte précoce à l’usage des ordonnateurs de la Commission et des agences exécutives (JO 2014, L 329, p. 68).

7        Le 7 octobre 2015, la Commission, l’Agence exécutive pour la recherche (REA) et l’Agence exécutive pour les petites et moyennes entreprises (EASME) ont informé la requérante de leur intention d’adopter une sanction administrative, de mettre fin à sa participation dans certains projets, de suspendre les paiements et de mettre un terme à sa participation à la préparation de certaines conventions de subvention. Ces mesures étaient envisagées pour 31 conventions de subvention déjà signées ou à signer. La requérante a été invitée à soumettre ses observations sur les mesures envisagées dans un délai de 30 jours à compter de la réception de la lettre.

8        Le 20 octobre 2015, l’OLAF a notifié la clôture de l’enquête aux personnes concernées par l’enquête.

9        Le 28 octobre 2015, la requérante a répondu à la lettre du 7 octobre 2015. Le 1er décembre 2015, la Commission a informé la requérante de sa décision de suspendre les paiements et de mettre un terme à sa participation dans deux conventions de subvention du FP7, à savoir les conventions « 612451 CRe-AM » et « 610947 RAPP ». La requérante a été informée de la possibilité de faire une réclamation contre la décision devant un comité de recours, le Comité Redress II, dans un délai de 15 jours à compter de la réception de la lettre. Une telle réclamation a été introduite par la requérante dans le courant du mois de décembre 2015. La Commission en a accusé réception le 7 janvier 2016.

10      Le 17 décembre 2015, la cour d’appel d’Aix-en-Provence (France) a rendu un arrêt annulant « l’ensemble de l’enquête préliminaire, y compris l’enquête OLAF et ses actes subséquents », considérant que les devoirs d’enquête accomplis au siège de la société par l’OLAF du 2 au 5 décembre 2014 l’avaient été en violation des droits fondamentaux, notamment le droit à une protection juridictionnelle effective garanti par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

11      Par lettre du 27 janvier 2016, la Commission a informé la requérante de sa décision de mettre un terme à sa participation au projet « 645775 DRAGON-STAR Plus » du H2020.

12      Le 2 février 2016, le Comité Redress II a confirmé la décision de mettre fin à la participation de la requérante dans les conventions de subvention « 612451 CRe-AM » et « 610947 RAPP » du FP7.

13      Par lettres des 26 et 28 janvier 2016, la Commission a informé la requérante de sa décision de suspendre les paiements et de mettre un terme à sa participation, respectivement, dans les conventions de subvention « 609154 PERFORMER » et « 314671 RESILIENT » du FP7. Le 8 février 2016, la requérante a introduit une réclamation devant le Comité Redress II à l’encontre de ces décisions.

 Procédure et conclusions des parties

14      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 février 2016, la requérante a introduit un recours fondé sur une clause compromissoire visant à obtenir, d’une part, la condamnation de la REA au paiement des sommes prétendument dues, majorées des intérêts de retard, au titre du contrat de subvention du H2020, et, d’autre part, la réparation du préjudice prétendument subi.

15      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le même jour, la requérante a introduit la présente demande en référé, dans laquelle elle conclut, en substance, à ce qu’il plaise au président du Tribunal :

–        ordonner à la REA le paiement immédiat de 425 406,25 euros au titre de la convention de subvention « FET-Event » du H2020 ;

–        réserver les dépens.

16      Le 11 février 2016, la requérante a déposé au greffe du Tribunal une lettre contenant une nouvelle offre de preuve, à savoir le jugement du tribunal de commerce de Grasse du 10 février 2016 constatant son état de cessation de paiements.

17      Dans ses observations sur la demande en référé ainsi que sur ladite lettre, déposées au greffe du Tribunal le 15 février 2016, la REA conclut, en substance, à ce qu’il plaise au président du Tribunal :

–        rejeter la demande de mesures provisoires ;

–        réserver les dépens jusqu’au prononcé de l’arrêt mettant fin à l’instance principale.

18      Le 11 mars 2016, la requérante a déposé une nouvelle offre de preuve consistant en un courrier en date du 10 mars 2016 adressé par l’administrateur judiciaire au directeur général de la direction générale (DG) « Réseaux de communication, contenu et technologies » de la Commission. Le 21 mars 2016, la REA a déposé ses observations sur ce document.

19      Le 15 avril 2016, la requérante a demandé le versement au dossier de courriers adressés par l’administrateur judiciaire à la Commission. Le 29 avril 2016, la REA a déposé ses observations sur ces documents.

20      Par courrier du 8 juillet 2016, le président du Tribunal a, d’une part, décidé d’entendre les parties en leur observations orales lors d’une audition, fixée au 18 juillet 2016 et, d’autre part, invité les parties à répondre par écrit à une série de questions. Le 13 juillet 2016, les parties ont répondu aux questions posées par le président du Tribunal. Au regard des réponses de la requérante dans lesquelles elle informait le président du Tribunal qu’elle était en liquidation judiciaire, la requérante a été invitée à se prononcer sur l’utilité du maintien de l’audition. Dans sa réponse en date du 15 juillet 2016, la requérante a confirmé le caractère définitif et irrémédiable de sa mise en liquidation ainsi que de la cessation de ses activités. Le président du Tribunal a alors estimé qu’il n’y avait plus lieu de maintenir l’audience de référé et a invité la REA à déposer ses observations éventuelles sur la réponse de la requérante du 15 juillet 2016, ce qu’elle a fait le 18 juillet 2016.

 En droit

 Considérations générales

21      Il ressort d’une lecture combinée des articles 278 et 279 TFUE, d’une part, et de l’article 256, paragraphe 1, TFUE, d’autre part, que le juge des référés peut, s’il estime que les circonstances l’exigent, ordonner le sursis à l’exécution d’un acte attaqué devant le Tribunal ou prescrire les mesures provisoires nécessaires, et ce en application de l’article 156 du règlement de procédure du Tribunal. Néanmoins, l’article 278 TFUE pose le principe du caractère non suspensif des recours, les actes adoptés par les institutions de l’Union européenne bénéficiant d’une présomption de légalité. Ce n’est donc qu’à titre exceptionnel que le juge des référés peut ordonner le sursis à l’exécution d’un acte attaqué devant le Tribunal ou prescrire des mesures provisoires (ordonnance du 19 juillet 2016, Belgique/Commission, T‑131/16 R, EU:T:2016:427, point 12).

22      En outre, l’article 156, paragraphe 4, première phrase, du règlement de procédure dispose que les demandes en référé doivent spécifier « l’objet du litige, les circonstances établissant l’urgence ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue l’octroi de la mesure provisoire à laquelle elles concluent ».

23      Ainsi, le sursis à exécution et les autres mesures provisoires peuvent être accordés par le juge des référés s’il est établi que leur octroi est justifié à première vue en fait et en droit (fumus boni juris) et qu’ils sont urgents, en ce sens qu’il est nécessaire, pour éviter de causer un préjudice grave et irréparable aux intérêts de la partie qui les sollicite, qu’ils soient édictés et produisent leurs effets avant la décision au principal. Ces conditions sont cumulatives, de telle sorte que les demandes de mesures provisoires doivent être rejetées dès lors que l’une d’elles fait défaut. Le juge des référés procède également, le cas échéant, à la mise en balance des intérêts en présence (voir ordonnance du 2 mars 2016, Evonik Degussa/Commission, C‑162/15 P‑R, EU:C:2016:142, point 21 et jurisprudence citée).

24      Dans le cadre de cet examen d’ensemble, le juge des référés dispose d’un large pouvoir d’appréciation et reste libre de déterminer, au regard des particularités de l’espèce, la manière dont ces différentes conditions doivent être vérifiées ainsi que l’ordre de cet examen, dès lors qu’aucune règle de droit ne lui impose un schéma d’analyse préétabli pour apprécier la nécessité de statuer provisoirement [voir ordonnance du 19 juillet 2012, Akhras/Conseil, C‑110/12 P(R), non publiée, EU:C:2012:507, point 23 et jurisprudence citée].

25      Dans les circonstances de l’espèce, il convient d’abord d’examiner ensemble si la condition relative à l’urgence est remplie et si la balance des intérêts penche en faveur de la requérante.

 Sur l’urgence et la mise en balance des intérêts

26      Afin de vérifier si les mesures provisoires demandées sont urgentes, il convient de rappeler que la finalité de la procédure de référé est de garantir la pleine efficacité de la future décision définitive, afin d’éviter une lacune dans la protection juridique assurée par le juge de l’Union. Pour atteindre cet objectif, l’urgence doit s’apprécier au regard de la nécessité qu’il y a de statuer provisoirement afin d’éviter qu’un préjudice grave et irréparable ne soit occasionné à la partie qui sollicite la protection provisoire. Il appartient à cette partie d’apporter la preuve qu’elle ne saurait attendre l’issue de la procédure relative au recours au fond sans subir un préjudice grave et irréparable (voir ordonnance du 14 janvier 2016, AGC Glass Europe e.a./Commission, C‑517/15 P‑R, EU:C:2016:21, point 27 et jurisprudence citée).

27      En outre, en vertu d’une jurisprudence constante, les risques liés à chacune des solutions possibles doivent être mis en balance dans le cadre de la procédure de référé. Concrètement, cela implique notamment d’examiner si l’intérêt de la partie qui sollicite les mesures provisoires à obtenir le sursis à l’exécution de l’acte attaqué prévaut ou non sur l’intérêt que présente l’application immédiate de celui-ci. Lors de cet examen, il convient de déterminer si l’annulation éventuelle de cet acte par le juge du fond permettrait le renversement de la situation qui serait provoquée par son exécution immédiate et, inversement, dans quelle mesure le sursis serait de nature à faire obstacle aux objectifs poursuivis par l’acte attaqué au cas où le recours au principal serait rejeté [ordonnances du 2 mars 2016, Evonik Degussa/Commission, C‑162/15 P‑R, EU:C:2016:142, point 103, et du 1er mars 2017, EMA/MSD Animal Health Innovation et Intervet international, C‑512/16 P(R), non publiée, EU:C:2017:149, point 127]. 

28      En l’espèce, la requérante souligne que la quasi-totalité de son chiffre d’affaire (93,81 %) provient de contrats de subvention conclus avec la Commission, soit 933 444 euros sur un total 995 041 euros de chiffre d’affaire au 31 décembre 2015. La suspension par la REA des paiements dus en application de ces conventions mettrait ainsi nécessairement la requérante dans une situation financière manifestement proche de la faillite. Afin d’éviter ce préjudice, elle évalue le montant total des sommes dont le paiement est illégalement suspendu à 425 406,25 euros pour le projet « FET-Event » au jour du dépôt de sa demande en référé.

29      À cet égard, il y a lieu de relever que le montant dont il est demandé au juge des référés d’ordonner le paiement immédiat par la REA est identique au montant réclamé à la REA, hors dommages et intérêts, dans le cadre du recours principal.

30      Or, il ressort de la jurisprudence que l’octroi d’une mesure provisoire portant sur une partie de l’indemnité réclamée dans un recours au principal, fondé sur les articles 268 et 340 TFUE, reste exceptionnel dans le cadre d’une demande en référé. En effet, le recours à ce type de mesure, qui est plus que d’autres susceptible de produire, de fait, des effets irréversibles, en particulier en cas d’insolvabilité ultérieure de la partie qui sollicite les mesures provisoires, doit être exercé avec restriction et se limiter aux cas dans lesquels le fumus boni juris apparaît particulièrement solide et l’urgence des mesures demandées incontestable [ordonnances du 29 janvier 1997, Antonissen/Conseil et Commission, C‑393/96 P(R), EU:C:1997:42, point 41, et du 14 juillet 2011, Trabelsi e.a./Conseil, T‑187/11 R, non publiée, EU:T:2011:384, points 50 et 51]. Dès lors si l’octroi d’une partie du montant doit être une mesure à caractère exceptionnel, l’octroi de l’entièreté de la somme doit, a fortiori, requérir la présence de circonstances ne permettant aucun doute pour le juge des référés quant au caractère approprié d’une telle mesure.

31      En outre, il ressort de la jurisprudence que, dans le cas d’une demande de mesures provisoires consistant au paiement d’une somme par la Commission à la partie requérante, qui se trouve dans une situation financière proche de la faillite et affirme risquer de subir un préjudice irréparable en l’absence du prononcé des mesures sollicitées dès lors qu’elle serait privée de liquidités précieuses au cours d’une période cruciale pour sa viabilité, il ne saurait être déduit de cette situation que l’intérêt de la demanderesse devrait prévaloir sur l’intérêt lié à la protection des finances de l’Union défendu par la Commission. En effet, précisément en raison de la situation financière de ladite demanderesse, l’intérêt de l’Union à ce que de l’argent public ne soit pas versé à une société qui présente un risque important d’être dans l’incapacité de le rembourser avec intérêts moratoires, dans l’hypothèse où l’arrêt mettant fin à la procédure principale l’y contraindrait, doit l’emporter (voir, en ce sens, ordonnance du 8 avril 2014, Commission/ANKO, C‑78/14 P‑R, EU:C:2014:239, point 40). Cette jurisprudence est applicable mutatis mutandis aux agences exécutives établies par la Commission pour gérer ses programmes dans le domaine de la science et de l’innovation, telle que la REA.

32      Or, en l’espèce, il est constant, tout d’abord, que, lors de l’introduction de la présente demande, la requérante a spécifiquement indiqué qu’elle était dans une situation financière manifestement proche de la faillite et qu’une procédure judiciaire dite de « sauvegarde », visant à établir un règlement collectif de dettes, avait été initiée par elle. Ensuite, comme il ressort de sa lettre du 11 février 2016 par laquelle elle a déposé une nouvelle offre de preuve, par jugement du 10 février 2016, le tribunal de commerce de Grasse a constaté que la requérante était en état de cessation de paiements. Enfin, comme indiqué dans le courrier adressé le 10 mars 2016 par l’administrateur judiciaire au directeur général de la DG « Réseaux de communication, contenu et technologies » de la Commission, le même tribunal a, par jugement du 19 février 2016, ouvert une procédure de redressement judiciaire et l’administrateur a indiqué envisager la liquidation judiciaire de la requérante.

33      Par conséquent, au regard de la situation financière de la requérante et de la jurisprudence exposée aux points 30 et 31 ci‑dessus, l’intérêt de l’Union doit prévaloir sur celui de la requérante. En effet, il ressort des éléments du dossier que le juge des référés ne peut ordonner le versement de la somme réclamée sans risquer de voir ce montant être irrécupérable si l’arrêt dans l’affaire principale venait à en demander le remboursement. La mesure provisoire demandée ne revêt donc pas un caractère appropriée.

34      Au demeurant, il ne peut être ignoré que l’activité de la requérante est exclusivement dédiée aux projets de la Commission. Dès lors, la création d’une dépendance envers un unique client comporte des risques commerciaux qu’il appartient à la requérante de supporter. À cet égard, une analogie peut être dégagée de la jurisprudence relative aux conséquences financières négatives pour les sociétés, qui découlent du rejet de leurs offres dans le cadre des marchés publics, qui font, en principe, partie du risque commercial habituel, auquel chaque entreprise active sur le marché doit faire face (ordonnance du 24 novembre 2016, Enrico Colombo et Giacomo Corinti/Commission, T‑690/16, non publiée, EU:T:2016:696, point 50).

35      Il s’ensuit que, sans qu’il soit besoin d’examiner la condition tenant à l’existence d’un fumus boni juris, d’une part, la condition relative à l’urgence n’est pas remplie et, d’autre part, la mise en balance des intérêts penche en faveur de l’intérêt général de l’Union. Dès lors, la présente demande en référé doit être rejetée.

36      À titre surabondant, il ressort des réponses de la requérante datée du 13 juillet 2016 que cette dernière est effectivement en état de liquidation judiciaire. En outre, dans ses réponses en date du 15 juillet 2016, elle a confirmé que, d’une part, cette mise en liquidation présentait un caractère définitif et irrémédiable et, d’autre part, le versement des sommes réclamées ne pouvait plus permettre la poursuite de son activité qui avait cessée de façon définitive.

37      Or, il est de jurisprudence constante que la finalité d’une procédure de référé ne consiste pas à assurer la réparation d’un préjudice qui s’est déjà réalisé. En effet, il est évident que ce préjudice déjà survenu ne pourrait plus être évité par l’octroi des mesures provisoires sollicitées (ordonnances du 29 octobre 2009, Novácke chemické závody/Commission, T‑352/09 R, non publiée, EU:T:2009:422, point 43 ; du 16 juin 2015, Alcogroup et Alcodis/Commission, T‑274/15 R, non publiée, EU:T:2015:389, point 16, et du 6 avril 2016, GABO:mi/Commission, T‑10/16 R, non publiée, EU:T:2016:197, points 22 et 48).

38      En l’espèce, il convient de constater que le préjudice dont la requérante cherchait à éviter la survenance par la présente demande de mesures provisoires s’est réalisé. À cet égard, il y a lieu de noter qu’il ressort du jugement du tribunal de commerce de Grasse du 27 avril 2016, annexé par la requérante dans ses réponses datées du 13 juillet 2016, que cette liquidation a été demandée à l’initiative de la requérante même si la requérante allègue avoir été dans l’obligation légale d’engager cette procédure.

39      Au regard de ce qui précède il y aurait lieu de constater que la présente demande est aussi devenue sans objet.

40      Il découle de ces développements que la demande en référé doit être rejetée.

41      En vertu de l’article 158, paragraphe 5, du règlement de procédure, il convient de réserver les dépens.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      La demande en référé est rejetée.

2)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 25 août 2017.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

M. Jaeger


*      Langue de procédure : le français.

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