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Document 62004CJ0235

    Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 28 juin 2007.
    Commission des Communautés européennes contre Royaume d'Espagne.
    Manquement d'État - Directive 79/409/CEE - Conservation des oiseaux sauvages - Zones de protection spéciale - IBA 98 - Valeur - Qualité des données - Critères - Marge d'appréciation - Insuffisance manifeste du classement en nombre et en superficie.
    Affaire C-235/04.

    Recueil de jurisprudence 2007 I-05415

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2007:386

    Parties
    Motifs de l'arrêt
    Dispositif

    Parties

    Dans l’affaire C‑235/04,

    ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 226 CE, introduit le 4 juin 2004,

    Commission des Communautés européennes, représentée par MM. M. van Beek et G. Valero Jordana, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

    partie requérante,

    contre

    Royaume d’Espagne, représenté par M me N. Díaz Abad, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

    partie défenderesse,

    LA COUR (deuxième chambre),

    composée de M. C. W. A. Timmermans, président de chambre, MM. P. Kūris (rapporteur), J. Klučka, M me R. Silva de Lapuerta et M. L. Bay Larsen, juges,

    avocat général: M me J. Kokott,

    greffier: M me M. Ferreira, administrateur principal,

    vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 22 juin 2006,

    ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 14 septembre 2006,

    rend le présent

    Arrêt

    Motifs de l'arrêt

    1. Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que, en n’ayant pas classé comme zones de protection spéciale pour les oiseaux (ci‑après les «ZPS») des territoires suffisants en nombre et en superficie pour offrir une protection à toutes les espèces d’oiseaux énumérées à l’annexe I de la directive 79/409/CEE du Conseil, du 2 avril 1979, concernant la conservation des oiseaux sauvages (JO L 103, p. 1), telle que modifiée, notamment, par la directive 97/49/CE de la Commission, du 29 juillet 1997 (JO L 223, p. 9, ci-après la «directive 79/409»), ainsi qu’aux espèces migratrices non visées à ladite annexe, le Royaume d’Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive 79/409.

    Le cadre juridique

    2. L’article 1 er , paragraphe 1, de la directive 79/409 dispose:

    «La présente directive concerne la conservation de toutes les espèces d’oiseaux vivant naturellement à l’état sauvage sur le territoire européen des États membres auquel le traité est d’application. Elle a pour objet la protection, la gestion et la régulation de ces espèces et en réglemente l’exploitation.»

    3. L’article 2 de ladite directive prévoit:

    «Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour maintenir ou adapter la population de toutes les espèces d’oiseaux visées à l’article 1 er à un niveau qui corresponde notamment aux exigences écologiques, scientifiques et culturelles, compte tenu des exigences économiques et récréationnelles.»

    4. L’article 4, paragraphes 1 et 2, de cette même directive est libellé comme suit:

    «1. Les espèces mentionnées à l’annexe I font l’objet de mesures de conservation spéciale concernant leur habitat, afin d’assurer leur survie et leur reproduction dans leur aire de distribution.

    À cet égard, il est tenu compte:

    a) des espèces menacées de disparition;

    b) des espèces vulnérables à certaines modifications de leurs habitats;

    c) des espèces considérées comme rares parce que leurs populations sont faibles ou que leur répartition locale est restreinte;

    d) d’autres espèces nécessitant une attention particulière en raison de la spécificité de leur habitat.

    Il sera tenu compte, pour procéder aux évaluations, des tendances et des variations des niveaux de population.

    Les États membres classent notamment en zones de protection spéciale les territoires les plus appropriés en nombre et en superficie à la conservation de ces dernières dans la zone géographique maritime et terrestre d’application de la présente directive.

    2. Les États membres prennent des mesures similaires à l’égard des espèces migratrices non visées à l’annexe I dont la venue est régulière, compte tenu des besoins de protection dans la zone géographique maritime et terrestre d’application de la présente directive en ce qui concerne leurs aires de reproduction, de mue et d’hivernage et les zones de relais dans leur aire de migration. À cette fin, les États membres attachent une importance particulière à la protection des zones humides et tout particulièrement de celles d’importance internationale.»

    La procédure précontentieuse

    5. À la suite de plusieurs plaintes, la Commission a adressé au Royaume d’Espagne, le 26 janvier 2000, une lettre de mise en demeure faisant état de l’application incorrecte de la directive 79/409 pour ne pas avoir désigné des ZPS de manière suffisante en nombre et en superficie.

    6. Les réponses des autorités espagnoles ainsi que les informations et les propositions de désignation de nouvelles ZPS, transmises entre le 18 mai 2000 et le 10 janvier 2001, n’ayant pas été jugées convaincantes par la Commission, cette dernière a, le 31 janvier 2001, émis un avis motivé invitant le Royaume d’Espagne à prendre les mesures nécessaires pour s’y conformer dans un délai de deux mois à compter de la notification dudit avis, dont l’échéance fut reportée au 3 mai 2001.

    7. Par lettres des 17 avril et 15 mai 2001, les autorités espagnoles ont répondu à l’avis motivé et ont transmis, entre le 28 mai 2001 et le 25 octobre 2002, des compléments d’informations ainsi que des désignations et des extensions de ZPS.

    8. Après avoir analysé l’ensemble de ces réponses et estimant que les Communautés autonomes d’Andalousie, des Baléares, des Canaries, de Castilla y León, de Castilla-La Mancha ainsi que de Madrid n’avaient pas encore rempli la totalité des obligations découlant de l’article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive 79/409 et que les Communautés autonomes des Asturies, de Catalogne, d’Estrémadure, de Galice ainsi que de Valence avaient désigné des ZPS de manière totalement inappropriée et insuffisante, la Commission a décidé, au cours du mois de janvier 2003, de saisir la Cour de justice.

    9. Les autorités espagnoles ont continué à transmettre à la Commission, entre le 13 janvier 2003 et le 5 avril 2004, des propositions de désignation de ZPS, des dossiers relatifs à la redéfinition et à l’extension du réseau de ZPS comprenant diverses données actualisées et complétées par des documents cartographiques ainsi que des informations sur la situation des espèces d’oiseaux.

    10. Après avoir analysé l’ensemble de ces réponses, la Commission, considérant que le manquement aux obligations qui résultent de la directive 79/409 se poursuivait, a décidé d’introduire, le 4 juin 2004, le présent recours.

    Sur le recours

    11. Par son recours, la Commission allègue que le Royaume d’Espagne n’a pas désigné de ZPS suffisantes, en nombre et en superficie, compte tenu des objectifs de protection des espèces d’oiseaux énumérées à l’annexe I de la directive 79/409 ainsi que des espèces migratrices non visées à cette annexe.

    12. La Commission s’étant désistée, lors de la procédure orale, pour ce qui concerne la Communauté autonome d’Estrémadure, le présent recours en manquement ne concerne que les Communautés autonomes d’Andalousie, des Baléares, des Canaries, de Castilla‑La Mancha, de Catalogne, de Galice et de Valence.

    Sur la désignation des ZPS

    Argumentation des parties

    13. La Commission considère que le Royaume d’Espagne n’a pas classé suffisamment en superficie et en nombre des ZPS au regard des zones importantes pour la conservation des oiseaux identifiées dans l’inventaire ornithologique qui a été publié en 1998 (ci-après l’«IBA 98»).

    14. Le gouvernement espagnol s’oppose au recours à l’IBA 98. Cet inventaire n’aurait pas la même valeur que l’Inventory of Important Bird Areas in the European Community (Inventaire des aires importantes pour l’avifaune dans la Communauté européenne) publié en 1989 (ci‑après l’«IBA 89») dans la mesure où, n’ayant été ni commandé ni supervisé par la Commission, l’exactitude de ses résultats ne serait pas garantie.

    15. En effet, l’IBA 98 aurait été exclusivement élaboré à l’initiative de la Sociedad Española de Ornitología (société espagnole d’ornithologie, ci-après la «SEO/Birdlife»), qui aurait décidé de modifier unilatéralement l’IBA 89 afin d’augmenter le nombre et la superficie des zones à protéger en Espagne. Or, aucune administration publique compétente en matière d’environnement n’aurait supervisé l’élaboration dudit inventaire pour garantir la précision et l’exactitude de ses données. L’augmentation en nombre, et surtout en superficie, de nouvelles zones à protéger dans l’IBA 98 par rapport à l’IBA 89 serait donc impossible à justifier ou à vérifier.

    16. Ensuite, toujours selon le gouvernement espagnol, l’utilisation d’informations incomplètes dans l’IBA 98 ne permettrait pas de délimiter correctement les zones d’intérêt pour la conservation des oiseaux. De même, les critères utilisés pour délimiter les ZPS seraient incorrects, de faible valeur ornithologique et non conformes à la directive 79/409.

    17. Le gouvernement espagnol estime également que les recensements et les abondantes estimations de populations réalisés pour toutes les zones importantes pour la conservation des oiseaux ne seraient étayés par aucune référence bibliographique, ce qui empêcherait toute vérification ou comparaison de données. D’ailleurs, la SEO/Birdlife aurait reconnu explicitement que les sources des données ornithologiques ne seraient pas citées pour chacune de ces zones.

    18. Aussi, la délimitation des zones à protéger réalisée par la SEO/Birdlife présenterait de graves lacunes, en raison du manque de références bibliographiques ainsi que de la mauvaise qualité des informations utilisées. L’IBA 98 ne présenterait donc pas la qualité minimale requise pour un travail scientifique en ce qui concerne l’exactitude des données et la précision des critères utilisés.

    19. Enfin, le gouvernement espagnol fait valoir que la SEO/Birdlife aurait interdit, sauf autorisation expresse de sa part, de céder aux communautés autonomes, qui sont administrativement compétentes en matière d’environnement, les informations qu’elle a utilisées pour identifier et délimiter les zones importantes pour la conservation des oiseaux.

    20. Selon la Commission, l’IBA 98 repose sur les références disponibles les mieux documentées et les plus précises propres à définir les territoires les plus appropriés à la survie et à la reproduction des espèces d’oiseaux, conformément à l’article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive 79/409. L’IBA 98 serait fondé sur des critères ornithologiques équilibrés, tels que l’importance des populations, la diversité des oiseaux et les risques auxquels sont exposées les espèces à l’échelon international, permettant d’identifier les lieux les plus propices pour assurer la conservation des espèces mentionnées à l’annexe I de la directive 79/409 ainsi que des espèces migratrices non visées à cette annexe.

    21. La Commission précise que l’évaluation du réseau de ZPS désigné par le Royaume d’Espagne a été réalisée non sur la seule base de l’IBA 98, mais également en fonction de deux autres critères reposant, d’une part, sur une analyse de la présence sur chaque territoire des espèces d’oiseaux mentionnées à l’annexe I de la directive 79/409 et, d’autre part, sur la prise en considération des zones humides.

    22. Enfin, toujours selon la Commission, l’impossibilité d’accéder à la base de données utilisée par la SEO/Birdlife n’invalide pas le caractère scientifique de l’étude et n’interdit pas aux différentes administrations espagnoles d’élaborer ou de commander leurs propres études pour respecter les obligations résultant de la directive 79/409.

    Appréciation de la Cour

    23. À titre liminaire, il convient de rappeler que l’article 4 de la directive 79/409 prévoit un régime spécifiquement ciblé et renforcé tant pour les espèces mentionnées à l’annexe I que pour les espèces migratrices qui trouve sa justification dans le fait qu’il s’agit respectivement des espèces les plus menacées et des espèces constituant un patrimoine commun de la Communauté européenne (arrêt du 13 juillet 2006, Commission/Portugal, C‑191/05, Rec. p. I‑6853, point 9 et jurisprudence citée). Il résulte d’ailleurs du neuvième considérant de cette directive que la préservation, le maintien ou le rétablissement d’une diversité et d’une superficie suffisantes d’habitats sont indispensables à la conservation de toutes les espèces d’oiseaux. Les États membres ont donc l’obligation d’adopter les mesures nécessaires à la conservation desdites espèces.

    24. À cet effet, l’actualisation des données scientifiques est nécessaire pour déterminer la situation des espèces les plus menacées ainsi que celle des espèces constituant un patrimoine commun de la Communauté afin de classer en ZPS les territoires les plus appropriés. Il importe donc d’utiliser les données scientifiques les plus actualisées disponibles au terme du délai fixé dans l’avis motivé.

    25. À cet égard, il convient de rappeler que les inventaires nationaux, dont l’IBA 98 élaboré par la SEO/Birdlife, ont révisé la première étude paneuropéenne réalisée dans l’IBA 89, en présentant des données scientifiques plus précises et actualisées.

    26. Compte tenu du caractère scientifique de l’IBA 89 et de l’absence de tout élément de preuve scientifique produit par un État membre tendant notamment à démontrer qu’il pouvait être satisfait aux obligations découlant de l’article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive 79/409 en classant en ZPS des sites autres que ceux résultant dudit inventaire et couvrant une superficie totale inférieure à celle de ces derniers, la Cour a jugé que cet inventaire, bien que n’étant pas juridiquement contraignant, pouvait être utilisé par elle comme élément de référence permettant d’apprécier si un État membre avait classé un nombre et une superficie suffisants de territoires en ZPS au sens des dispositions susmentionnées de la directive 79/409 (voir, en ce sens, arrêts du 19 mai 1998, Commission/Pays-Bas, C‑3/96, Rec. p. I‑3031, points 68 à 70, et du 20 mars 2003, Commission/Italie, C‑378/01, Rec. p. I‑2857, point 18).

    27. Il y a lieu de constater que l’IBA 98 dresse un inventaire actualisé des zones importantes pour la conservation des oiseaux en Espagne qui, en l’absence de preuves scientifiques contraires, constitue un élément de référence permettant d’apprécier si cet État membre a classé en ZPS des territoires suffisants en nombre et en superficie pour offrir une protection à toutes les espèces d’oiseaux énumérées à l’annexe I de la directive 79/409 ainsi qu’aux espèces migratrices non visées à cette annexe.

    28. À ce titre, il convient de relever que l’IBA 98 a été utilisé par les Communautés autonomes de Castilla-La Mancha, de Catalogne, de Galice et de Valence pour délimiter des ZPS et que, en ce qui concerne les Communautés autonomes d’Aragon, de Cantabrie, d’Estrémadure, de Madrid, de Murcie, du Pays basque ainsi que la Ville autonome de Ceuta, la Commission a accepté des informations scientifiques actualisées qui lui ont été présentées en lieu et place de celles relatives aux zones importantes pour l’avifaune recensées dans l’IBA 98.

    29. Il convient ensuite d’examiner les arguments du gouvernement espagnol en ce qui concerne les critères C.1 et C.6 utilisés dans cet inventaire.

    30. Aux termes de l’IBA 98, le critère C.1 désigne une zone accueillant régulièrement un nombre significatif d’oiseaux d’une espèce menacée mondialement ou d’une espèce dont la préservation présente un intérêt au niveau mondial. Le critère C.6 désigne une zone constituant l’une des cinq zones les plus importantes dans chaque région européenne pour une espèce ou une sous-espèce mentionnée à l’annexe I de la directive 79/409.

    31. En ce qui concerne le critère C.1, le gouvernement espagnol considère que le seuil d’identification des ZPS ne saurait être inférieur à 1 % de la population reproductrice nationale d’une espèce mentionnée à ladite annexe.

    32. Cet argument méconnaît la définition de ce critère et ne saurait donc être retenu. En effet, le critère C.1 ayant trait aux espèces globalement menacées, il suffit que le site concerné héberge un nombre significatif d’individus d’une telle espèce. Un seuil de 1% n’est pas prévu par le critère C.1 et ne s’impose pas en vertu de la directive 79/409.

    33. En ce qui concerne le critère C.6, le gouvernement espagnol soutient que les régions biogéographiques définies par la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO L 206, p. 7), devraient être considérées comme étant équivalentes aux zones définies pour l’application de la directive 79/409. L’utilisation d’une méthodologie différente pour la délimitation des habitats et pour celle des zones importantes pour la conservation des oiseaux créerait des inégalités considérables et injustifiables compte tenu de l’existence de nombreuses divisions territoriales administratives différentes au sein des États membres.

    34. Or, comme l’a relevé M me l’avocat général au point 90 de ses conclusions, le Royaume d’Espagne n’a pas entrepris l’effort de réaliser la répartition du territoire espagnol sur une base ornithologique qui permettrait l’identification des ZPS, mais s’est limité à invoquer l’existence des régions biogéographiques, lesquelles ne constituent pas une base comparable aux communautés autonomes pour la réalisation d’un réseau couvrant la Communauté de façon plus ou moins uniforme, uniformité qui s’impose afin d’obtenir une grandeur de référence comparable dans tous les États membres aux fins de l’application du critère C.6.

    35. Au regard de l’ensemble de ce qui précède, il y a lieu de constater que, en l’absence de présentation d’études scientifiques susceptibles de contredire les résultats de l’IBA 98, cet inventaire constitue la référence la plus actualisée et la plus précise pour l’identification des sites les mieux appropriés en nombre et en superficie à la conservation des oiseaux.

    36. Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument tiré de l’impossibilité d’avoir pu consulter la base de données établie par la SEO/Birdlife.

    37. À cet égard, force est de relever que, ainsi que l’a confirmé le gouvernement espagnol, un tel accès a été non pas refusé à ce dernier, mais soumis à l’interdiction de céder les informations aux communautés autonomes.

    38. En outre, il est constant que la Commission a conclu un contrat en 1991 avec la SEO/Birdlife afin de réaliser une étude scientifique précise permettant l’élaboration de la cartographie des zones importantes pour la conservation des oiseaux, chaque site devant être décrit sous l’angle de sa valeur ornithologique en utilisant les informations les plus complètes disponibles.

    39. À cela s’ajoute le fait que l’IBA 98 a été réalisé avec la participation de plusieurs organisations non gouvernementales, de groupes locaux de la SEO/Birdlife, des trois parcs nationaux, des six universités, des départements de l’environnement de douze communautés autonomes, de la direction générale de protection de la nature du ministère de l’Environnement et de l’organisme autonome Parques Nacionales du même ministère, ce qui constitue autant d’indices permettant de fonder, en l’absence de preuves scientifiques contraires, le caractère référentiel de l’IBA 98.

    40. Dans ces conditions, les arguments du gouvernement espagnol tirés, d’une part, de l’absence de contrôle de l’élaboration de l’IBA 98 par une administration publique compétente et, d’autre part, de l’impossibilité d’accéder à la base de données utilisée par la SEO/Birdlife doivent être rejetés.

    Sur l’absence de classement et sur le classement partiel ou inapproprié de territoires en ZPS

    Argumentation des parties

    41. Selon la Commission, l’IBA 98 identifie 391 zones importantes pour la conservation des oiseaux en Espagne, occupant une superficie de 15 862 567 ha, ce qui représente environ 31,5 % de la superficie du pays. Or, l’examen des 427 ZPS désignées par le Royaume d’Espagne, correspondant à une superficie totale de 7 977 789 ha environ, soit 15,8 % du territoire national, ferait ressortir que 148 zones importantes pour la conservation des oiseaux seraient classées en ZPS pour plus de 75 % de leur superficie (2 730 612 ha sur un total de 2 967 119 ha), 194 zones importantes pour la conservation des oiseaux seraient classées en ZPS pour moins de 75 % de leur superficie (4 388 748 ha sur un total de 10 739 054 ha) et 99 zones importantes pour la conservation des oiseaux n’auraient pas été désignées comme ZPS (2 684 713 ha). Le réseau de ZPS serait donc insuffisant.

    42. Le gouvernement espagnol fait valoir que la superficie du réseau des ZPS en Espagne représente une proportion du territoire national deux fois et demi supérieure à la moyenne communautaire (15,51 % contre 6,89 %) et jusqu’à dix fois supérieure à la proportion du territoire de certains États membres voisins. Par ailleurs, ledit gouvernement souligne que, pour la période comprise entre le mois d’avril 2000 et celui de mai 2004, le réseau espagnol serait passé de 179 à 416 ZPS, soit 237 nouvelles zones, ce qui représenterait une augmentation de 132,4 % et 35 % du nombre de nouvelles ZPS déclarées par l’ensemble des États membres. Pour ce qui est de l’accroissement de la superficie des territoires classés en ZPS, la part des nouvelles déclarations espagnoles correspondrait à 43 % du total de la superficie déclarée dans l’ensemble de la Communauté. La contribution espagnole correspondrait à elle seule à 35 % de la superficie terrestre totale des ZPS de la Communauté, alors que le territoire du Royaume d’Espagne ne représenterait que 16 % de celui de ladite Communauté. Ces données montreraient que le Royaume d’Espagne a fourni un effort supérieur, d’une part, à celui de la moyenne communautaire et, d’autre part, à l’effort individuel de chaque État membre pour se conformer aux obligations résultant de la directive 79/409.

    43. En ce qui concerne les territoires classés partiellement ou de manière inappropriée en ZPS, la Commission considère que, au regard de l’IBA 98, le degré de couverture actuel des zones importantes pour la conservation des oiseaux par les ZPS espagnoles est très faible, ce qui représenterait un danger supplémentaire pour la survie des espèces qu’elles abritent, car les mesures nécessaires à la protection de leurs habitats n’auraient pas été adoptées.

    Appréciation de la Cour

    44. Par son recours en manquement, la Commission entend faire constater que n’ont pas été classés en ZPS des territoires suffisants en superficie et en nombre pour offrir une protection à toutes les espèces d’oiseaux énumérées à l’annexe I de la directive 79/409 ainsi qu’aux espèces migratrices non visées à cette annexe dans les communautés autonomes d’Andalousie, des Baléares, des Canaries, de Castilla‑La Mancha, de Catalogne, de Galice et de Valence.

    45. À titre liminaire, il convient de souligner qu’un État membre ne saurait se prévaloir de la situation d’autres États membres pour s’exonérer de son obligation de désignation de ZPS. En effet, seuls les critères ornithologiques tels que prévus à l’article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive 79/409 permettent la délimitation des sites les plus appropriés en vue de leur désignation comme ZPS.

    46. Ensuite, il convient de relever que, d’une part, la Commission soutient que toutes ces communautés autonomes ont délimité des ZPS pour des territoires insuffisants en superficie par rapport à ceux retenus dans l’IBA 98 alors que, d’autre part, elle accepte les arguments scientifiques actualisés qui ont démontré que les limites actuelles des ZPS désignées dans les Communautés autonomes de Castilla‑La Mancha, de Catalogne, de Galice et de Valence permettent d’assurer le respect de la directive 79/409.

    47. Une telle contradiction dans l’exposé du moyen soulevé par la Commission à l’appui de son recours en manquement ne satisfait pas aux exigences des articles 21 du statut de la Cour de justice et 38, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure.

    48. En effet, la Cour a jugé qu’il incombe à la Commission d’indiquer, dans les conclusions de la requête déposée au titre de l’article 226 CE, les griefs précis sur lesquels la Cour est appelée à se prononcer. Ces conclusions doivent être formulées de manière non équivoque afin d’éviter que la Cour ne statue ultra petita ou bien omette de statuer sur un grief (voir arrêt du 15 juin 2006, Commission/France, C‑255/04, Rec. p. I‑5251, point 24 et jurisprudence citée).

    49. Il s’ensuit que le grief tiré d’une désignation de territoires insuffisants en superficie de zones importantes pour la conservation des oiseaux comme ZPS par les Communautés autonomes de Castilla‑La Mancha, de Catalogne, de Galice et de Valence est irrecevable.

    50. Il convient dès lors d’examiner successivement ledit grief pour les seules Communautés autonomes d’Andalousie, des Baléares et des Canaries.

    51. Tout d’abord, s’agissant de la Communauté autonome d’Andalousie, le gouvernement espagnol a notifié, postérieurement au terme du délai fixé dans l’avis motivé, la désignation de 39 nouvelles ZPS et l’élargissement d’autres zones, ce qui représente une augmentation de la superficie protégée de 560 000 ha. En outre, il a indiqué qu’une procédure de déclaration est en cours pour de nouvelles ZPS dont la principale valeur réside dans la protection d’oiseaux de steppe.

    52. Selon une jurisprudence constante, dans le cadre d’un recours au titre de l’article 226 CE, l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé et les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour (voir, notamment, arrêt du 14 septembre 2004, Commission/Espagne, C‑168/03, Rec. p. I‑8227, point 24). Il convient donc de faire droit au recours de la Commission en ce qui concerne la Communauté autonome d’Andalousie.

    53. Ensuite, s’agissant de la Communauté autonome des Baléares, s’il est constant que 40 ZPS, d’une superficie totale de 121 015 ha et recouvrant totalement ou partiellement 20 zones importantes pour la conservation des oiseaux et près de 54 % de la superficie totale du réseau des zones à protéger, avaient été désignées avant l’échéance du terme fixé dans l’avis motivé, il n’en demeure pas moins que lesdites zones ne couvraient pas les zones d’habitat du milan royal (Milvus milvus), espèce visée à l’annexe I de la directive 79/409, qui a fait l’objet d’une protection postérieurement au terme dudit délai. Il convient donc de faire droit au recours de la Commission en ce qui concerne la Communauté autonome des Baléares.

    54. Enfin, s’agissant de la Communauté autonome des Canaries, l’IBA 98 identifie 65 sites couvrant une superficie de 133 443 ha en tant que zones importantes pour la conservation des oiseaux. Avant l’échéance du délai fixé dans l’avis motivé, 28 ZPS dont la superficie totale est de 211 598 ha couvraient partiellement 41 zones importantes pour la conservation des oiseaux et environ 59,5 % de la superficie du réseau des zones à protéger. La Commission considère donc que la couverture demeure insuffisante, notamment, pour l’outarde houbara (Chlamydotis undulata), le vautour percnoptère (Neophron percnopterus), le tarier des Canaries (Saxicola dacotiae), le courvite isabelle (Cursorius cursor), ainsi que pour d’autres espèces comme le pétrel de Bulwer (Bulweria bulwerii).

    55. Si le gouvernement espagnol fait valoir des difficultés internes pour procéder à la désignation de certaines ZPS, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence constante de la Cour, un État membre ne saurait exciper de dispositions, pratiques ou situations de son ordre juridique interne pour justifier l’inobservation des obligations et délais prescrits par une directive (voir, notamment, arrêt du 7 décembre 2000, Commission/France, C‑374/98, Rec. p. I‑10799, point 13).

    56. Néanmoins, le gouvernement espagnol reconnaît que certaines ZPS doivent être étendues. Par suite, il convient de faire droit au recours de la Commission en ce qui concerne la Communauté autonome des Canaries.

    57. Dans ces conditions, il y a lieu de constater que le grief tiré d’une désignation de territoires insuffisants en superficie de zones importantes pour la conservation des oiseaux en ZPS par les Communautés autonomes d’Andalousie, des Baléares et des Canaries doit être accueilli.

    58. Finalement, la Commission fait grief au Royaume d’Espagne d’avoir désigné un nombre insuffisant de zones importantes pour la conservation des oiseaux comme ZPS pour les Communautés autonomes d’Andalousie, des Baléares, des Canaries, de Castilla-La Mancha, de Catalogne, de Galice et de Valence.

    59. S’agissant des Communautés autonomes d’Andalousie et de Galice, les autorités desdites communautés ont désigné, après le terme du délai fixé dans l’avis motivé, des nouvelles ZPS et ont élargi une partie de celles existantes. Cependant, il ressort de la jurisprudence citée au point 52 du présent arrêt que l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation d’un État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé et que les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour. Il convient donc de faire droit au recours de la Commission sur ce point.

    60. S’agissant de la Communauté autonome des Baléares, s’il est vrai que les autorités de cette communauté ont déclaré, après le terme du délai fixé dans l’avis motivé, des nouvelles ZPS spécialement afin de protéger le milan royal et que de nouvelles ZPS ont été proposées à Majorque et Minorque pour protéger des aires de nidification de cette espèce, l’existence d’un manquement devant être appréciée seulement en fonction de la situation d’un État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé, le manquement sur ce point doit être admis.

    61. Par ailleurs, s’agissant de la Communauté autonome des Canaries, 23 zones importantes pour la conservation des oiseaux n’étaient pas du tout couvertes par une ZPS après le terme du délai fixé dans l’avis motivé. Le gouvernement espagnol, tout en reconnaissant qu’il convient de procéder à la désignation de nouvelles ZPS, a produit à l’appui de son mémoire en défense une étude détaillée portant sur les zones importantes pour la conservation des oiseaux non encore couvertes. Comme l’a constaté M me l’avocat général au point 106 de ses conclusions, la Commission n’ayant pas contesté cette étude, son contenu doit être considéré comme admis et constitue, pour les défauts de classement qui subsistent, un moyen de preuve plus actuel et plus précis que l’IBA 98.

    62. Ce grief subsiste pour les seules ZPS qui auraient dû faire l’objet d’une désignation avant le terme du délai fixé dans l’avis motivé.

    63. S’agissant de la Communauté autonome de Valence, même si, avant le terme du délai fixé dans l’avis motivé, de nouvelles ZPS ont été classées, il reste cependant encore des zones non classées qui, comme les autorités espagnoles l’ont reconnu, font l’objet d’un processus d’extension du réseau actuel de ZPS.

    64. Dans ces conditions, il y a lieu de constater que le grief tiré d’une désignation insuffisante de zones importantes pour la conservation des oiseaux comme ZPS par les Communautés autonomes d’Andalousie, des Baléares, des Canaries, de Galice et de Valence doit être accueilli.

    65. S’agissant de la Communauté autonome de Castilla‑La Mancha, la Commission considère que dix zones importantes pour la conservation des oiseaux n’ont pas été classées en ZPS. Le gouvernement espagnol a reconnu la nécessité de classer en ZPS le site n° 183 (Hoces del Río Mundo y del Río Segura). En ce qui concerne le site n° 189 (Parameras de Embid-Molina), le gouvernement espagnol admet la nécessité d’un classement partiel de ce site, en reconnaissant la présence d’une colonie de sirli de Dupont (Chersophilus duponti) évaluée à 1 250 individus sur une superficie de 1 800 ha.

    66. Cependant, le gouvernement espagnol conteste la nécessité de classer les sites n° s 70 (El Escorial – San Martín de Valdeiglesias), 72 (Carrizales y Sotos de Aranjuez), 157 (Hoces del Turia y Los Serranos), 210 (Sierras de Cazorla y Segura) et 305 (Bajo Tietar y Rampa de la Vera), puisqu’ils seraient communs à d’autres communautés autonomes et que leur superficie sur le territoire de la communauté autonome concernée serait très réduite.

    67. Cet argument doit être écarté. En effet, en raison de l’importance et de la cohérence d’un site considéré comme étant le mieux approprié pour la conservation de certaines espèces telles que l’aigle impérial ibérique (Aquila adalberti), menacé à l’échelle mondiale, la cigogne noire (Ciconia nigra), l’aigle de Bonelli (Hieraaetus fasciatus), l’aigle royal (Aquila chrysaetos), le vautour fauve (Gyps fulvus), le vautour percnoptère et le faucon pèlerin (Falco peregrinus), la circonstance que celui-ci s’étende sur plusieurs régions ne saurait constituer un motif pour les États membres de se soustraire aux obligations qui leur incombent en vertu de l’article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive 79/409.

    68. Le gouvernement espagnol conteste également le classement en ZPS du site n° 185 (San Clemente-Villarrobledo), dans lequel les populations de faucon crécerellette (Falco naumanni), d’outarde canepetière (Tetrax tetrax) et de ganga cata (Pterocles alchata) signalées dans l’IBA 98 n’auraient qu’un faible intérêt et ne représenteraient respectivement que 6 %, 4 % et 4 % de leur population dans toute la Communauté autonome de Castilla-La Mancha. De plus, ce site ne présenterait aucun intérêt pour l’avifaune, puisqu’il comprendrait des centres urbains, des zones industrielles, des étendues de monoculture de vignoble ou encore de larges étendues de terres irrigables cultivées de manière intensive.

    69. Un tel argument doit également être écarté. En effet, ce site héberge des populations significatives d ’espèces menacées à l’échelle mondiale et européenne et constitue l’une des principales zones d’alimentation desdites espèces.

    70. S’agissant du site n° 78 (Puebla de Beleña), les autorités espagnoles contestent la nécessité de son classement en raison du caractère saisonnier de ces lagunes et de la présence très irrégulière des grues (Grus grus), sans apporter des données scientifiques susceptibles de contredire les résultats de l’IBA 98. Partant, il convient de faire droit au recours sur ce point.

    71. Doivent également être écartés les arguments du gouvernement espagnol selon lesquels la population de certaines espèces ne serait pas significative et ne nécessiterait pas une protection par la désignation de nouvelles ZPS dans le site n° 199 (Torrijos). En effet, force est de souligner que, d’une part, la population de 150 à 200 outardes barbues (Otis tarda) représente un ratio plus important que le seuil existant à l’échelle mondiale qui est de 50 individus. D’autre part, il convient de constater que la présence de l’outarde canepetière est de 1 200 individus pour une valeur seuil de 200 individus. L’ensemble de ces éléments rend donc nécessaire de procéder à de nouvelles désignations de ZPS pour les besoins de protection de ces espèces.

    72. Selon la Commission, d’autres espèces, telles que le faucon crécerellette, seraient encore insuffisamment protégées et elle souligne que depuis l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé la Communauté autonome de Castilla-La Mancha n’a désigné aucune nouvelle ZPS. Le gouvernement espagnol objecte que cette espèce étant localisée à l’intérieur des zones d’urbanisation, celles-ci ne pourraient pas être classées en ZPS.

    73. Un tel argument doit être écarté. En effet, pour les besoins de la protection des espèces, une désignation comme ZPS s’impose dès lors qu’une zone constitue un lieu de nidification spécifique, comme cela est le cas pour le faucon crécerellette. À cela s’ajoute que, comme l’a relevé M me l’avocat général au point 118 de ses conclusions, si des mesures d’aménagement urbain devaient prévaloir sur l’intérêt de la protection de cette espèce, elles devraient être mises en œuvre dans le cadre de l’article 6, paragraphe 4, de la directive 92/43, c’est-à-dire en l’absence de solutions alternatives et moyennant l’adoption de mesures compensatoires. Or, tel n’est pas le cas en l’espèce.

    74. Il convient donc de faire droit au recours de la Commission en ce qui concerne la désignation insuffisante de zones importantes pour la conservation des oiseaux comme ZPS par la Communauté autonome de Castilla‑La Mancha.

    75. S’agissant de la Communauté autonome de Catalogne, la Commission considère que dix zones importantes pour la conservation des oiseaux n’ont pas été désignées comme ZPS. Aussi, sur 62 espèces reproductrices visées à l’annexe I de la directive 79/409, la pie-grièche à poitrine rose (Lanius minor), le grand tétras (Tetrao urogallus), le cormoran huppé (Phalacrocorax aristotelis), l’outarde canepetière, l’alouette calandre (Melanocorypha calandra), le sirli de Dupont, le rollier d’Europe (Coracias garrulus), l’alouette calandrelle (Calandrella brachydactyla) et la glaréole à collier (Glareola pratincola) seraient insuffisamment protégées.

    76. Cependant, ainsi que l’a relevé M me l’avocat général au point 121 de ses conclusions, l’IBA 98 ne mentionne ni la pie-grièche à poitrine rose, ni le grand tétras, ni le sirli de Dupont, ni la glaréole à collier. Il ne saurait donc être reproché au Royaume d’Espagne de ne pas avoir désigné de ZPS en raison de la présence de ces quatre espèces.

    77. L’argument du gouvernement espagnol selon lequel le recours serait irrecevable en raison de l’imprécision des espèces, parmi les 62 visées à l’annexe I de la directive 79/409, pour lesquelles de nouvelles ZPS auraient dû être désignées, doit être écarté. En effet, ainsi qu’il résulte de ce qui précède, la Commission a précisé les espèces qui sont insuffisamment protégées et pour lesquelles des ZPS supplémentaires doivent être désignées.

    78. Enfin, le gouvernement espagnol soutient que la plupart des habitats qui ne sont pas encore classés en ZPS sont protégés en vertu de la directive 92/43 dans le cadre du réseau Natura 2000.

    79. Un tel argument doit être écarté. En effet, il convient de rappeler que la Cour a admis que les régimes juridiques des directives 79/409 et 92/43 sont distincts (voir, en ce sens, arrêt du 7 décembre 2000, Commission/France, précité, points 50 à 57). Il s’ensuit qu’un État membre ne saurait se soustraire aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive 79/409, en se prévalant de mesures autres que celles prévues par cette directive.

    80. Il convient donc de faire droit au recours de la Commission en ce qui concerne la désignation insuffisante de zones importantes pour la conservation des oiseaux comme ZPS par la Communauté autonome de Catalogne.

    81. En ce qui concerne les zones humides, il ressort de l’article 4, paragraphe 2, de la directive 79/409 que les États membres attachent une importance particulière à la protection des zones humides et tout particulièrement de celles d’importance internationale.

    82. Selon la Commission, les zones humides d’importance internationale, identifiées comme zones importantes pour la conservation des oiseaux, d’Albufera de Adra et d’Embalses de Cordobilla y Malpasillo en Andalousie ainsi que de Complejo húmedo de Corrubedo en Galice, n’étaient pas désignées comme ZPS au terme du délai fixé dans l’avis motivé.

    83. À cet égard, il ressort de la procédure qu’il est constant que le classement en ZPS de zones humides d’importance internationale en Andalousie et en Galice a été effectué postérieurement au terme du délai fixé dans l’avis motivé. Partant, il convient donc de faire droit au recours de la Commission sur ce point.

    84. Il s’ensuit que le Royaume d’Espagne n’a pas classé en ZPS tous les sites qui, en application des critères ornithologiques, apparaissent comme étant les plus appropriés au regard de la conservation des espèces en cause.

    85. Au regard de l’ensemble de ce qui précède, il y a lieu de constater que, en n’ayant pas classé e ZPS des territoires suffisants en superficie dans les Communautés autonomes d’Andalousie, des Baléares, des Canaries, et des territoires suffisants en nombre dans les Communautés autonomes d’Andalousie, des Baléares, des Canaries, de Castilla‑La Mancha, de Catalogne, de Galice et de Valence, pour offrir une protection à toutes les espèces d’oiseaux énumérées à l’annexe I de la directive 79/409 ainsi qu’aux espèces migratrices non visées à cette annexe, le Royaume d’Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive 79/409.

    Sur les dépens

    86. Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation du Royaume d’Espagne et celui-ci ayant succombé en l’essentiel de ses moyens, il y a lieu de le condamner aux dépens.

    Dispositif

    Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) déclare et arrête:

    1) En n’ayant pas classé comme zones de protection spéciale pour les oiseaux des territoires suffisants en superficie dans les Communautés autonomes d’Andalousie, des Baléares, des Canaries, et des territoires suffisants en nombre dans les Communautés autonomes d’Andalousie, des Baléares, des Canaries, de Castilla‑La Mancha, de Catalogne, de Galice et de Valence, pour offrir une protection à toutes les espèces d’oiseaux énumérées à l’annexe I de la directive 79/409/CEE du Conseil, du 2 avril 1979, concernant la conservation des oiseaux sauvages, telle que modifiée, notamment, par la directive 97/49/CE de la Commission, du 29 juillet 1997, ainsi qu’aux espèces migratrices non visées à cette annexe, le Royaume d’Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive 79/409, telle que modifiée.

    2) Le recours est rejeté pour le surplus.

    3) Le Royaume d’Espagne est condamné aux dépens.

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