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Document 61996CJ0162

Arrêt de la Cour du 16 juin 1998.
A. Racke GmbH & Co. contre Hauptzollamt Mainz.
Demande de décision préjudicielle: Bundesfinanzhof - Allemagne.
Accord de coopération CEE/Yougoslavie - Suspension des concessions commerciales - Convention de Vienne sur le droit des traités - Clause rebus sic stantibus.
Affaire C-162/96.

Recueil de jurisprudence 1998 I-03655

ECLI identifier: ECLI:EU:C:1998:293

61996J0162

Arrêt de la Cour du 16 juin 1998. - A. Racke GmbH & Co. contre Hauptzollamt Mainz. - Demande de décision préjudicielle: Bundesfinanzhof - Allemagne. - Accord de coopération CEE/Yougoslavie - Suspension des concessions commerciales - Convention de Vienne sur le droit des traités - Clause rebus sic stantibus. - Affaire C-162/96.

Recueil de jurisprudence 1998 page I-03655


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés


1 Questions préjudicielles - Appréciation de validité - Compétence de la Cour - Étendue

(Traité CE, art. 177)

2 Accords internationaux - Accords de la Communauté - Effet direct - Conditions - Article 22 de l'accord de coopération CEE/Yougoslavie

(Accord de coopération CEE/Yougoslavie, art. 22, § 4, et protocole additionnel, art. 2, § 1 et 2, et 4)

3 Accords internationaux - Accords de la Communauté - Accord de coopération CEE/Yougoslavie - Possibilité pour les justiciables de mettre en cause la validité, au regard des règles du droit internationnal coutumier, d'un règlement suspendant les concessions commerciales octroyées par l'accord

(Accord de coopération CEE/Yougoslavie, art. 22, § 4, et protocole additionnel, art. 2, § 1 et 2, et 4)

4 Droit international public - Principes - Pacta sunt servanda - Règles du droit international coutumier portant sur la cessation et la suspension des relations conventionnelles - Possibilité pour les justiciables d'invoquer ces principes pour contester la validité d'un règlement suspendant les concessions commerciales octroyées par un accord de coopération - Admissibilité - Contrôle juridictionnel - Limites

(Accord de coopération CEE/Yougoslavie; règlement du Conseil n_ 3300/91)

Sommaire


1 La compétence de la Cour pour statuer, en vertu de l'article 177 du traité, sur la validité des actes pris par les institutions de la Communauté ne comporte aucune limite quant aux causes sur la base desquelles la validité de ces actes pourrait être contestée. Cette compétence s'étendant à l'ensemble des motifs d'invalidité susceptibles d'entacher ces actes, la Cour est tenue d'examiner si leur validité peut être affectée du fait de leur contrariété avec une règle de droit international.

2 Une disposition d'un accord conclu par la Communauté avec des pays tiers doit être considérée comme étant d'application directe lorsque, eu égard à ses termes ainsi qu'à l'objet et à la nature de l'accord, elle comporte une obligation claire et précise qui n'est subordonnée, dans son exécution ou dans ses effets, à l'intervention d'aucun acte ultérieur.

Tel est le cas de l'article 22, paragraphe 4, de l'accord de coopération entre la CEE et la république socialiste fédérative de Yougoslavie, qui, dans sa version résultant de l'article 4 du protocole additionnel à cet accord, établit, pour certains vins, un contingent tarifaire communautaire dans la limite duquel il est procédé à la suppression des droits de douane à l'importation dans la Communauté.

3 Lorsqu'il se prévaut en justice du traitement douanier préférentiel que lui accorde l'article 22, paragraphe 4, de l'accord de coopération entre la CEE et la république socialiste fédérative de Yougoslavie, un justiciable peut mettre en cause la validité, au regard des règles du droit international coutumier, d'un règlement suspendant les concessions commerciales octroyées par cet accord.

En effet, un accord avec un pays tiers, conclu par le Conseil, conformément aux dispositions du traité CE, constitue, en ce qui concerne la Communauté, un acte pris par une institution de la Communauté et les dispositions d'un pareil accord font partie intégrante du droit communautaire. Il s'ensuit que, dans l'hypothèse où un règlement communautaire suspendant l'application d'un accord de coopération serait déclaré invalide en raison de sa contrariété avec des règles de droit international coutumier, les concessions commerciales octroyées par les dispositions de cet accord resteraient d'application dans l'ordre juridique communautaire, jusqu'à la date à laquelle la Communauté aurait, en conformité avec les règles du droit international applicables, mis fin à cet accord.

De plus, les compétences de la Communauté doivent être exercées dans le respect du droit international. Par conséquent, celle-ci est tenue de respecter les règles du droit coutumier international lorsqu'elle adopte un règlement suspendant les concessions commerciales octroyées par un accord ou en vertu d'un accord qu'elle a conclu avec un pays tiers.

Il s'ensuit que les règles du droit coutumier international portant sur la cessation et la suspension des relations conventionnelles en raison d'un changement fondamental de circonstances lient les institutions de la Communauté et font partie de l'ordre juridique communautaire.

4 Lorsque le justiciable met en cause, de façon incidente, la validité d'un règlement communautaire au regard des règles du droit coutumier international portant sur la cessation et la suspension des relations conventionnelles en raison d'un changement fondamental de circonstances pour se prévaloir des droits qu'il tire directement d'un accord de la Communauté avec un pays tiers, l'affaire en cause ne concerne pas l'effet direct de ces règles.

De plus, ces règles forment une exception au principe pacta sunt servanda qui constitue un principe fondamental de tout ordre juridique et, en particulier, de l'ordre juridique international. Appliqué au droit international, ce principe exige que tout traité lie les parties et soit exécuté par elles de bonne foi.

Dans ces conditions, on ne saurait refuser à un justiciable, lorsqu'il se prévaut en justice des droits qu'il tire directement d'un accord avec un pays tiers, la faculté de mettre en cause la validité d'un règlement qui, en suspendant les concessions commerciales octroyées par cet accord, l'empêche de s'en prévaloir, et d'invoquer, pour en contester la validité, les obligations découlant des règles du droit coutumier international qui régissent la cessation et la suspension des relations conventionnelles.

Toutefois, en raison de la complexité de ces règles et de l'imprécision de certaines notions auxquelles elles se réfèrent, le contrôle judiciaire doit nécessairement, en particulier dans le cadre d'un renvoi préjudiciel en appréciation de validité, se limiter au point de savoir si le Conseil, en adoptant le règlement de suspension, a commis des erreurs d'appréciation manifestes quant aux conditions d'application de ces règles.

Parties


Dans l'affaire C-162/96,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE, par le Bundesfinanzhof et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

A. Racke GmbH & Co.

et

Hauptzollamt Mainz,

une décision à titre préjudiciel sur la validité du règlement (CEE) n_ 3300/91 du Conseil, du 11 novembre 1991, suspendant les concessions commerciales prévues par l'accord de coopération entre la Communauté économique européenne et la république socialiste fédérative de Yougoslavie (JO L 315, p. 1),

LA COUR,

composée de MM. G. C. Rodríguez Iglesias, président, C. Gulmann, H. Ragnemalm et M. Wathelet, présidents de chambre, J. C. Moitinho de Almeida, P. J. G. Kapteyn (rapporteur), J. L. Murray, D. A. O. Edward, G. Hirsch, P. Jann et L. Sevón, juges,

avocat général: M. F. G. Jacobs,

greffier: Mme D. Louterman-Hubeau, administrateur principal,

considérant les observations écrites présentées:

- pour A. Racke GmbH & Co., par Me Dietrich Ehle, avocat à Cologne,

- pour le Conseil de l'Union européenne, par MM. Jürgen Huber et Micail Vitsentzatos, conseillers juridiques, ainsi que par M. Antonio Tanca, membre du service juridique, en qualité d'agents,

- pour la Commission des Communautés européennes, par M. Jörn Sack, conseiller juridique, et Mme Barbara Brandtner, membre du service juridique, en qualité d'agents,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de A. Racke GmbH & Co., du Conseil et de la Commission à l'audience du 15 juillet 1997,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 4 décembre 1997,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt


1 Par ordonnance du 7 mars 1996, parvenue à la Cour le 13 mai suivant, le Bundesfinanzhof a posé, en vertu de l'article 177 du traité CE, deux questions préjudicielles relatives à la validité du règlement (CEE) n_ 3300/91 du Conseil, du 11 novembre 1991, suspendant les concessions commerciales prévues par l'accord de coopération entre la Communauté économique européenne et la république socialiste fédérative de Yougoslavie (JO L 315, p. 1, ci-après le «règlement litigieux»).

2 Ces questions ont été posées dans le cadre d'un litige opposant A. Racke GmbH & Co. (ci-après «Racke») au Hauptzollamt Mainz au sujet d'une dette douanière, née à l'occasion de l'importation en Allemagne de certaines quantités de vin originaires de la république socialiste fédérative de Yougoslavie.

Cadre juridique

3 L'accord de coopération entre la Communauté économique européenne et la république socialiste fédérative de Yougoslavie (ci-après l'«accord de coopération») a été signé le 2 avril 1980 à Belgrade, d'une part, par les États membres de la Communauté économique européenne et par la Communauté et, d'autre part, par la république socialiste fédérative de Yougoslavie (ci-après la «Yougoslavie»), et approuvé au nom de la Communauté par le règlement (CEE) n_ 314/83 du Conseil, du 24 janvier 1983 (JO L 41, p. 1).

4 L'article 22 de l'accord de coopération, dans sa version résultant de l'article 4 du protocole additionnel à cet accord, établissant un nouveau régime commercial (ci-après le «protocole additionnel»), approuvé au nom de la Communauté dans la décision 87/605/CEE du Conseil, du 21 décembre 1987 (JO L 389, p. 72), est libellé comme suit:

«1. Pour les vins de raisins frais des sous-positions 22.05 ex C I et ex C II du tarif douanier commun et présentés dans des récipients de deux litres ou moins, originaires de Yougoslavie, les droits de douane à l'importation dans la Communauté sont réduits de 30 % dans la limite d'un contingent tarifaire communautaire annuel de 12 000 hectolitres. Pour les quantités importées au-delà du contingent, la Communauté applique les droits de douane résultant des dispositions du paragraphe 4.

...

3. Les dispositions des paragraphes 1 et 2 restent en vigueur jusqu'à ce que les niveaux des droits de douane prévus dans le cadre de la suppression progressive mentionnée au paragraphe 4, pour les vins repris au paragraphe 1, aient atteint le taux de réduction de 30 % prévu au paragraphe 1.

4. Pour les vins de raisins frais des sous-positions 22.05 C I et C II du tarif douanier commun, originaires de Yougoslavie, les droits de douane à l'importation dans la Communauté sont supprimés selon les modalités fixées à l'article 2, paragraphes 1 et 2, du protocole additionnel établissant un nouveau régime commercial. Cette disposition est appliquée dans la limite d'un contingent tarifaire communautaire annuel de 545 000 hectolitres. Pour les quantités importées au-delà du contingent, la Communauté applique le droit du tarif douanier commun.

...»

5 En vertu de l'article 2, paragraphe 1, du protocole additionnel, les droits de douane à l'importation dans la Communauté applicables en vertu de l'accord de coopération sont progressivement supprimés au cours des mêmes périodes et aux mêmes rythmes que ceux prévus dans l'acte relatif aux conditions d'adhésion du royaume d'Espagne et de la République portugaise et aux adaptations des traités (JO 1985, L 302, p. 23) pour les mêmes produits importés de ces États dans la Communauté dans sa composition au 31 décembre 1985. Lorsque les droits de douane appliqués à l'importation dans la Communauté, dans sa composition au 31 décembre 1985, des produits de l'Espagne et du Portugal sont différents pour les deux États, le droit de douane le plus élevé des deux est appliqué aux produits originaires de Yougoslavie. Selon l'article 2, paragraphe 2, lorsque la Yougoslavie bénéficie de droits de douane moins élevés que l'Espagne ou le Portugal ou ces deux pays, le démantèlement est entamé dès que les droits appliqués aux mêmes produits de l'Espagne et du Portugal atteignent un niveau inférieur à ceux appliqués aux produits originaires de Yougoslavie.

6 En vertu de l'article 1er du règlement (CEE) n_ 3413/90 du Conseil, du 19 novembre 1990, portant ouverture et mode de gestion de contingents tarifaires communautaires de certains produits originaires de Yougoslavie (1991) (JO L 335, p. 26), les droits de douane à l'importation dans la Communauté des vins de raisins frais relevant des codes NC ex 2204 21 et 2204 29 originaires de Yougoslavie sont suspendus du 1er janvier au 31 décembre 1991 aux niveaux de 3,6, 4,4, 4,8 ou 5,6 écus/hl et dans la limite d'un contingent de 545 000 hl. En outre, les articles 2 à 4 du règlement n_ 3413/90 déterminent les modalités d'accès des importateurs des produits en question au contingent.

7 Aux termes de son article 60, l'accord de coopération a une durée illimitée. Chaque partie peut toutefois dénoncer l'accord de coopération par notification à l'autre partie. Cet accord cessera alors d'être en vigueur six mois après la date de ladite notification.

8 Par décision 91/586/CECA,CEE, du 11 novembre 1991, portant suspension de l'application des accords entre la Communauté européenne, ses États membres et la république socialiste fédérative de Yougoslavie (JO L 315, p. 47), le Conseil et les représentants des gouvernements des États membres, réunis au sein du Conseil, ont suspendu l'application de l'accord de coopération avec effet immédiat, pour les raisons suivantes, précisées dans les deuxième, troisième, quatrième et cinquième considérants de la décision:

«... considérant que, dans leurs déclarations des 5 et 28 octobre 1991, la Communauté européenne et ses États membres, réunis dans le cadre de la coopération politique européenne, ont constaté la crise en Yougoslavie et que le Conseil de sécurité des Nations unies, dans sa résolution 713 (1991), a exprimé le souci que la prolongation de cette situation constitue une menace contre la paix et la sécurité internationales;

considérant que la poursuite des hostilités et leurs conséquences sur les relations économiques et commerciales, tant entre les républiques de Yougoslavie qu'avec la Communauté, constituent une modification radicale des conditions dans lesquelles l'accord de coopération entre la Communauté économique européenne et la république socialiste fédérative de Yougoslavie et ses protocoles, ainsi que l'accord concernant la Communauté européenne du charbon et de l'acier ont été conclus; qu'elles mettent en cause l'application de ceux-ci;

considérant que l'appel lancé par la Communauté européenne et ses États membres, réunis dans le cadre de la coopération politique européenne, le 6 octobre 1991 à Haarzuilens, en vue du respect de l'accord de cessez-le-feu intervenu le 4 octobre 1991 à La Haye n'a pas été entendu;

considérant que, dans la déclaration du 6 octobre 1991, la Communauté européenne et ses États membres, réunis dans le cadre de la coopération politique européenne, ont annoncé leur décision de mettre fin aux accords entre la Communauté et la Yougoslavie au cas où l'accord réalisé à La Haye le 4 octobre 1991 entre les parties au conflit, en présence du président du Conseil des Communautés européennes et du président de la conférence sur la Yougoslavie, ne serait pas respecté».

9 Le règlement litigieux, dispose, en son article 1er, que les concessions commerciales octroyées par l'accord de coopération ou en vertu de cet accord sont suspendues. Aux termes de son article 3, ce règlement entre en vigueur le jour de sa publication au Journal officiel des Communautés européennes, à savoir le 15 novembre 1991.

10 Les premier, deuxième, troisième et quatrième considérants de ce règlement reprennent les raisons énumérées dans le préambule de la décision 91/586, reproduit ci-dessus.

11 Conformément à l'article 60 de l'accord de coopération, le Conseil a adopté la décision 91/602/CEE, du 25 novembre 1991, portant dénonciation de l'accord de coopération entre la Communauté économique européenne et la république socialiste fédérative de Yougoslavie (JO L 325, p. 23). Selon son article 2, cette décision dénonçant l'accord ainsi que tous protocoles et actes y afférents prend effet le jour de sa publication, à savoir le 27 novembre 1991.

12 Pour certains produits, parmi lesquels ne figuraient toutefois pas les vins, le Conseil a, par le règlement (CEE) n_ 3567/91, du 2 décembre 1991, relatif au régime applicable aux importations de produits originaires des républiques de Bosnie-Herzégovine, de Croatie, de Macédoine et de Slovénie (JO L 342, p. 1), octroyé à ces républiques le bénéfice de dispositions commerciales équivalant à l'essentiel de celles de l'accord de coopération suspendu par la Communauté.

13 Le règlement (CEE) n_ 545/92 du Conseil, du 3 février 1992, relatif au régime applicable aux importations dans la Communauté de produits originaires des républiques de Croatie et de Slovénie et des républiques yougoslaves de Bosnie-Herzégovine, de Macédoine et de Monténégro (JO L 63, p. 1), a maintenu ces mesures pour l'année 1992 et les a étendues à certains produits agricoles, dont les vins de raisins frais relevant des codes NC ex 2204 21 et 2204 29 originaires des républiques visées. Ainsi, l'article 6 du règlement n_ 545/92 dispose que, pour ces vins, les droits de douane à l'importation sont réduits au taux de 3,2 écus/hl ou de 3,7 écus/hl dans la limite d'un contingent annuel de 545 000 hl.

14 En vertu de l'article 1er du règlement (CEE) n_ 547/92 du Conseil, du 3 février 1992, portant ouverture et mode de gestion de contingents tarifaires communautaires de certains produits originaires des républiques de Croatie et de Slovénie et des républiques yougoslaves de Bosnie-Herzégovine, de Macédoine et de Monténégro (JO L 63, p. 41), les droits de douane à l'importation dans la Communauté des vins de raisins frais relevant des codes NC ex 2204 21 et 2204 29 originaires de ces républiques sont suspendus du 1er janvier au 31 décembre 1992 aux niveaux de 2,4, 2,9, 3,2 ou 3,7 écus/hl et dans la limite d'un contingent de 545 000 hl. Les articles 2 à 4 de ce règlement déterminent les modalités d'accès aux importateurs des produits en question au contingent.

Le litige au principal

15 Entre les 6 novembre 1990 et 27 avril 1992, Racke a fait dédouaner en Allemagne des vins importés de la zone de production du Kosovo en les plaçant sous le régime de l'entrepôt en douane dans un entrepôt privé. Le 7 mai 1992, elle a notifié les lots mis en libre pratique sous le régime des droits de douane à taux préférentiel, prévu dans l'accord de coopération.

16 Par décision du 27 mai 1992, le Hauptzollamt Mainz a cependant exigé la différence entre le taux des droits de douane applicable aux pays tiers et le taux préférentiel au motif que les vins avaient été importés de Serbie.

17 Racke a alors introduit un recours à l'encontre de cette décision auprès du Finanzgericht, qui l'a accueilli pour les vins importés avant le 15 novembre 1991, mais l'a rejeté pour le surplus au motif que la suspension, par le règlement litigieux, des concessions commerciales octroyées par l'accord de coopération était justifiée par la survenance d'un changement fondamental de la situation, à savoir la guerre en Yougoslavie.

18 Racke a formé un pourvoi en «Revision» contre cette décision devant le Bundesfinanzhof qui se demande d'abord si la suspension unilatérale de l'accord de coopération répond aux conditions énoncées à l'article 62, paragraphe 1, de la convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités (ci-après la «convention de Vienne»).

19 L'article 62 de la convention de Vienne stipule:

«1. Un changement fondamental de circonstances qui s'est produit par rapport à celles qui existaient au moment de la conclusion d'un traité et qui n'avait pas été prévu par les parties ne peut pas être invoqué comme motif pour mettre fin au traité ou pour s'en retirer, à moins que:

a) l'existence de ces circonstances n'ait constitué une base essentielle du consentement des parties à être liées par le traité; et que

b) ce changement n'ait pour effet de transformer radicalement la portée des obligations qui restent à exécuter en vertu du traité.

...

3. Si une partie peut, conformément aux paragraphes qui précèdent, invoquer un changement fondamental de circonstances comme motif pour mettre fin à un traité ou pour s'en retirer, elle peut également ne l'invoquer que pour suspendre l'application du traité.»

20 Selon la juridiction de renvoi, le démembrement de la Yougoslavie en plusieurs nouveaux États et les hostilités à l'intérieur de la Yougoslavie qui s'apparenteraient à un tournant politique impliqueraient une modification fondamentale des circonstances essentielles à la base du consentement des parties contractantes liées par l'accord de coopération. En revanche, le changement survenu ne semblerait pas transformer radicalement la portée des obligations découlant de l'accord de coopération qui serait surtout un traité de commerce.

21 Le Bundesfinanzhof se demande ensuite si, eu égard à l'article 65 de la convention de Vienne, il était licite de procéder à la suspension de l'accord de coopération sans notification préalable et sans préavis, s'il y avait urgence particulière et si le temps écoulé avant le moment du paiement des droits de douane en cause permettait de remédier à d'éventuelles fautes de procédure.

22 L'article 65, paragraphe 1, de la convention de Vienne prévoit que la partie qui, sur la base des dispositions de cette convention, invoque un motif de mettre fin à un traité, de s'en retirer ou d'en suspendre l'application doit notifier sa prétention aux autres parties à ladite convention. Cette notification doit indiquer la mesure envisagée à l'égard du traité et les raisons de celle-ci. L'article 65, paragraphe 2, de la convention de Vienne énonce en outre que, si, après un délai qui, sauf en cas d'urgence particulière, ne saurait être inférieur à une période de trois mois à compter de la réception de la notification, aucune partie n'a fait d'objection, la partie qui a fait la notification peut prendre, dans les formes prévues à l'article 67, la mesure qu'elle a envisagée. L'article 65, paragraphe 3, de la convention de Vienne prévoit que, si une objection a été soulevée par une autre partie, les parties doivent rechercher une solution par les moyens indiqués à l'article 33 de la charte des Nations unies.

23 Compte tenu de ces interrogations, le Bundesfinanzhof a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1) Le règlement (CEE) n_ 3300/91 du Conseil, du 11 novembre 1991, suspendant les concessions commerciales prévues par l'accord de coopération passé entre la CEE et la république socialiste fédérative de Yougoslavie (JO L 315, p. 1), est-il valide?

2) En cas de réponse négative à la question 1:

Quelles sont les conséquences de l'invalidité pour l'application de droits de douane, début mai 1992, à des vins d'origine serbe importés de la mi-novembre 1991 à avril 1992 et soumis au régime de l'entrepôt en douane?

Le traitement douanier préférentiel, dans la limite de contingents, accordé en 1992 pour les vins en provenance de l'ex-Yougoslavie, à l'exception de la Serbie, trouve-t-il application?»

Sur la première question

24 Il y a lieu de constater, à titre liminaire, que, bien qu'elle ne lie ni la Communauté ni tous les États membres, une série de dispositions de la convention de Vienne, dont son article 62, reflète les règles du droit international qui consacrent, sous certaines conditions, le principe selon lequel un changement de circonstances peut entraîner la caducité ou la suspension d'un traité. Ainsi la Cour internationale de justice a-t-elle jugé que «Ce principe et les conditions exceptionnelles auxquelles il est soumis ont été énoncés à l'article 62 de la convention de Vienne sur le droit des traités qui peut, à bien des égards, être considéré comme une codification du droit coutumier existant en ce qui concerne la cessation des relations conventionnelles en raison d'un changement de circonstances» (arrêt du 2 février 1973, affaire de la compétence en matière de pêcheries, Royaume-Uni/Islande, Recueil des arrêts, avis consultatifs et ordonnances, 1973, p. 3, paragraphe 36).

Sur la compétence de la Cour

25 La Commission a exprimé des doutes quant à la compétence de la Cour pour statuer sur la première question, dès lors que celle-ci porte sur la validité du règlement litigieux au regard des règles du droit coutumier international. Si ce règlement constitue bien un acte pris par la Communauté au sens de l'article 177, premier alinéa, sous b), du traité, la procédure préjudicielle ne se prêterait cependant pas au développement d'une argumentation fondée sur le seul droit international, et notamment sur les principes régissant l'extinction des traités et la suspension de leur application.

26 Il convient de rappeler que, comme la Cour l'a déjà jugé dans l'arrêt du 12 décembre 1972, International Fruit Company e.a. (21/72 à 24/72, Rec. p. 1219, point 5), la compétence de la Cour pour statuer, en vertu de l'article 177 du traité, sur la validité des actes pris par les institutions de la Communauté ne comporte aucune limite quant aux causes sur la base desquelles la validité de ces actes pourrait être contestée.

27 Cette compétence s'étendant à l'ensemble des motifs d'invalidité susceptibles d'entacher ces actes, la Cour est tenue d'examiner si leur validité peut être affectée du fait de leur contrariété avec une règle de droit international (arrêt International Fruit Company e.a., précité, point 6).

28 En conséquence, il y a lieu de constater que la Cour est compétente pour statuer sur la première question préjudicielle.

Sur la validité du règlement litigieux

29 Il y a lieu de relever que la question de la validité du règlement litigieux au regard du droit coutumier international se pose, de façon incidente, à l'occasion d'un litige dans lequel Racke demande l'application du régime de droits de douane à taux préférentiel prévu à l'article 22 de l'accord de coopération.

30 Par conséquent, il convient d'examiner tout d'abord si l'article 22, paragraphe 4, qui est d'application en l'espèce au principal, ainsi que l'indique l'objet des règlements sur les contingents mentionnés dans l'ordonnance de renvoi, est de nature à faire naître directement dans le chef des justiciables des droits à un traitement douanier préférentiel.

31 Selon la jurisprudence constante de la Cour, une disposition d'un accord conclu par la Communauté avec des pays tiers doit être considérée comme étant d'application directe lorsque, eu égard à ses termes ainsi qu'à l'objet et à la nature de l'accord, elle comporte une obligation claire et précise qui n'est subordonnée, dans son exécution ou dans ses effets, à l'intervention d'aucun acte ultérieur (voir, notamment, arrêt du 30 septembre 1987, Demirel, 12/86, Rec. p. 3719, point 14).

32 Pour déterminer si la disposition de l'article 22, paragraphe 4, de l'accord de coopération répond à ces critères, il convient de s'attacher d'abord à l'examen de ses termes.

33 Cette disposition doit, en raison de ses termes mêmes, être mise en oeuvre par des actes communautaires pour que soit ouvert, selon les modalités fixées à l'article 2, paragraphes 1 et 2, du protocole additionnel, ledit contingent annuel tarifaire communautaire, la Communauté ne disposant d'aucune marge d'appréciation dans l'adoption de ces mesures. La Communauté est en effet tenue de procéder en temps utile au calcul exact des droits de douane conformément à ces dispositions.

34 Il en résulte que l'article 22, paragraphe 4, de l'accord de coopération est susceptible de faire naître, eu égard au traitement douanier préférentiel qu'il prévoit, des droits dont les justiciables peuvent se prévaloir devant les juridictions nationales.

35 Cette constatation n'est, par ailleurs, pas contredite par l'examen de l'objet et de la nature de l'accord dont l'article 22, paragraphe 4, fait partie.

36 L'accord de coopération a, en effet, pour objectif de promouvoir le développement des échanges commerciaux entre les parties contractantes et d'éliminer progressivement les obstacles pour l'essentiel de leurs échanges. Après la fin de la première étape de cette libéralisation, le 30 juin 1985, le protocole additionnel a établi le régime ultérieur des échanges commerciaux. C'est dans ce contexte que l'article 22, paragraphe 4, dans sa version résultant de l'article 4 du protocole additionnel, établit, pour certains vins, un contingent tarifaire communautaire dans la limite duquel il est procédé à la suppression des droits de douane à l'importation dans la Communauté.

37 Il convient d'examiner ensuite si, lorsqu'il se prévaut en justice du traitement douanier préférentiel que lui accorde l'article 22, paragraphe 4, de l'accord de coopération, modifié, un justiciable peut mettre en cause la validité, au regard des règles du droit international coutumier, du règlement litigieux, suspendant, à partir du 15 novembre 1991, les concessions commerciales octroyées par cet accord.

38 A cet égard, le Conseil fait valoir que l'adoption du règlement litigieux a été précédée, du point de vue logique et juridique, par l'adoption de la décision 91/586 portant, sur le plan international, suspension de l'application de l'accord de coopération. L'adoption du règlement litigieux, quant à elle, s'imposait dès lors que les concessions commerciales prévues par ledit accord avaient été mises en oeuvre dans le passé par une réglementation communautaire interne.

39 Or, selon le Conseil, le droit international n'établissant pas de façon obligatoire les voies de réparation à envisager en cas de violation des règles de droit international, la violation éventuelle de ces règles par la décision 91/586 n'aboutirait pas nécessairement à la remise en application de l'accord de coopération et, par conséquent, au niveau communautaire, à l'invalidité du règlement litigieux en raison de sa contrariété avec l'accord remis en application. Ainsi, la violation du droit international pourrait également être sanctionnée par la voie de l'indemnisation en sorte que l'accord de coopération demeurerait suspendu. Dès lors, afin d'apprécier la validité du règlement litigieux, la Cour n'aurait pas besoin d'examiner si la suspension de l'accord de coopération par la décision 91/586 violait les règles de droit international.

40 Il importe d'abord de constater que la question posée par la juridiction de renvoi ne porte que sur la validité du règlement litigieux au regard des règles du droit coutumier international.

41 Il y a lieu également de souligner qu'un accord avec un pays tiers, conclu par le Conseil, conformément aux dispositions du traité CE, constitue, en ce qui concerne la Communauté, un acte pris par une institution de la Communauté et que les dispositions d'un pareil accord font partie intégrante du droit communautaire (arrêt Demirel, précité, point 7).

42 Or, si le règlement litigieux devait être déclaré invalide, les concessions commerciales octroyées par les dispositions de l'accord de coopération resteraient d'application dans l'ordre juridique communautaire, jusqu'à la date à laquelle la Communauté aurait, en conformité avec les règles du droit international applicables, mis fin à cet accord.

43 Il en résulte qu'une déclaration d'invalidité du règlement litigieux en raison de sa contrariété avec des règles de droit international coutumier permettrait aux justiciables d'invoquer directement les droits au traitement préférentiel que leur accorde l'accord de coopération.

44 La Commission, quant à elle, doute que les règles du droit international auxquelles se réfère l'ordonnance de renvoi puissent être considérées, à défaut d'une clause expresse dans le traité CE, comme faisant partie de l'ordre juridique communautaire. Or, pour contester la validité d'un règlement, un justiciable pourrait s'appuyer sur des motifs fondés sur le rapport existant entre lui et la Communauté, mais n'aurait pas, en revanche, le droit d'invoquer des moyens tirés du rapport juridique entre la Communauté et un État tiers, lequel relève du domaine du droit international.

45 A cet égard, il y a lieu de relever que, comme il résulte de l'arrêt du 24 novembre 1992, Poulsen et Diva Navigation (C-286/90, Rec. p. I-6019, point 9), les compétences de la Communauté doivent être exercées dans le respect du droit international. Par conséquent, celle-ci est tenue de respecter les règles du droit coutumier international lorsqu'elle adopte un règlement suspendant les concessions commerciales octroyées par un accord ou en vertu d'un accord qu'elle a conclu avec un pays tiers.

46 Il s'ensuit que les règles du droit coutumier international portant sur la cessation et la suspension des relations conventionnelles en raison d'un changement fondamental de circonstances lient les institutions de la Communauté et font partie de l'ordre juridique communautaire.

47 Il convient ensuite de constater que, en l'espèce, le justiciable met en cause, de façon incidente, la validité d'un règlement communautaire au regard de ces règles pour se prévaloir des droits qu'il tire directement d'un accord de la Communauté avec un pays tiers. La présente affaire ne concerne donc pas l'effet direct desdites règles.

48 En effet, le justiciable invoque des règles du droit coutumier international de nature fondamentale à l'encontre du règlement litigieux, lequel a été pris en application de ces règles et le prive des droits au traitement préférentiel que lui accorde l'accord de coopération (voir, pour une situation comparable par rapport aux règles de base de nature conventionnelle, arrêt du 7 mai 1991, Nakajima/Conseil, C-69/89, Rec. p. I-2069, point 31).

49 Les règles invoquées par le justiciable forment une exception au principe pacta sunt servanda qui constitue un principe fondamental de tout ordre juridique et, en particulier, de l'ordre juridique international. Appliqué au droit international, ce principe exige que tout traité lie les parties et soit exécuté par elles de bonne foi (voir article 26 de la convention de Vienne).

50 L'importance de ce principe a encore été rappelée par la Cour internationale de justice, selon laquelle «la stabilité des relations conventionnelles exige que le moyen tiré d'un changement fondamental de circonstances ne trouve à s'appliquer que dans des cas exceptionnels» (arrêt du 25 septembre 1997, affaire relative au projet Gabcíkovo - Nagymaros, Hongrie/Slovaquie, paragraphe 104, non encore publié au Recueil des arrêts, avis consultatifs et ordonnances).

51 Dans ces conditions, on ne saurait refuser à un justiciable, lorsqu'il se prévaut en justice des droits qu'il tire directement d'un accord avec un pays tiers, la faculté de mettre en cause la validité d'un règlement qui, en suspendant les concessions commerciales octroyées par cet accord, l'empêche de s'en prévaloir, et d'invoquer, pour en contester la validité, les obligations découlant des règles du droit coutumier international qui régissent la cessation et la suspension des relations conventionnelles.

52 Toutefois, en raison de la complexité des règles en cause et de l'imprécision de certaines notions auxquelles elles se réfèrent, le contrôle judiciaire doit nécessairement, en particulier dans le cadre d'un renvoi préjudiciel en appréciation de validité, se limiter au point de savoir si le Conseil, en adoptant le règlement de suspension, a commis des erreurs d'appréciation manifestes quant aux conditions d'application de ces règles.

53 Pour que la cessation ou la suspension d'un accord puisse être envisagée en raison d'un changement fondamental de circonstances, le droit coutumier international, tel que codifié à l'article 62, paragraphe 1, de la convention de Vienne, impose deux conditions. En premier lieu, l'existence de ces circonstances doit avoir constitué une base essentielle du consentement des parties à être liées par l'accord; en second lieu, ce changement doit avoir pour effet de transformer radicalement la portée des obligations qui restent à exécuter en vertu de l'accord.

54 S'agissant de la première condition, il convient de constater que, selon le préambule de l'accord de coopération, les parties contractantes sont déterminées «à promouvoir le développement et la diversification de la coopération économique, financière et commerciale en vue de favoriser un meilleur équilibre ainsi que l'amélioration de la structure et le développement du volume de leurs échanges commerciaux et l'accroissement du bien-être de leurs populations» et qu'elles sont conscientes «de la nécessité de tenir compte de la situation nouvelle créée par l'élargissement de la Communauté et de renforcer les liens existants de voisinage pour l'organisation de rapports économiques et commerciaux plus harmonieux entre la Communauté et la république socialiste fédérative de Yougoslavie.» En application de ces considérations, l'article 1er de cet accord stipule que celui-ci a «pour objectif de promouvoir une coopération globale entre les parties contractantes en vue de contribuer au développement économique et social de la république socialiste fédérative de Yougoslavie et de favoriser le renforcement de leurs relations».

55 Au vu d'un objectif d'une telle envergure, le maintien d'une situation de paix en Yougoslavie, indispensable aux relations de bon voisinage, et l'existence d'institutions capables d'assurer la mise en oeuvre de la coopération visée par l'accord dans tout le territoire de Yougoslavie constituaient une condition essentielle pour entamer et poursuivre la coopération prévue par l'accord.

56 S'agissant de la seconde condition, il n'apparaît pas que le Conseil, en constatant, au deuxième considérant du règlement litigieux, que «la poursuite des hostilités et leurs conséquences sur les relations économiques et commerciales, tant entre les républiques de Yougoslavie qu'avec la Communauté, constituent une modification radicale des conditions dans lesquelles l'accord de coopération entre la Communauté économique européenne et la république socialiste fédérative de Yougoslavie et ses protocoles ont été conclus» et «qu'elles mettent en cause l'application de ceux-ci», ait commis une erreur manifeste d'appréciation.

57 S'il est vrai, ainsi que l'affirme Racke, qu'un certain volume de commerce devait se poursuivre avec la Yougoslavie et que la Communauté aurait pu continuer à accorder des concessions tarifaires, il n'en reste pas moins que, comme le fait observer M. l'avocat général au point 93 de ses conclusions, l'application des règles du droit coutumier international en cause n'est pas soumise à l'impossibilité d'exécuter une obligation et que la continuation des préférences, dans l'intention de stimuler les échanges, n'avait plus de sens dès lors que la Yougoslavie était en état de décomposition.

58 Quant à la question, soulevée dans l'ordonnance de renvoi, de savoir si, eu égard à l'article 65 de la convention de Vienne, il était licite de procéder à la suspension de l'accord de coopération sans notification et sans préavis, il convient de constater que, dans les déclarations communes des 5, 6 et 28 octobre 1991, la Communauté et les États membres avaient annoncé qu'ils adopteraient des mesures restrictives à l'encontre de celles des parties qui ne respecteraient pas l'accord de cessez-le-feu du 4 octobre 1991 qu'elles avaient signé en présence du président du Conseil et du président de la conférence sur la Yougoslavie; en outre, au cours de la conclusion de cet accord, la Communauté avait fait savoir qu'elle mettrait fin à l'accord de coopération en cas de non-respect du cessez-le-feu (Bull. CE 10-1991, points 1.4.6, 1.4.7 et 1.4.16).

59 Si de telles déclarations ne satisfont pas aux exigences formelles posées par cette disposition, il y a lieu de rappeler que les prescriptions spécifiques de nature procédurale qui y sont prévues ne font pas partie du droit international coutumier.

60 Dès lors, il convient de constater que l'examen de la première question n'a révélé aucun élément de nature à affecter la validité du règlement de suspension.

61 Vu la réponse donnée à la première question préjudicielle, il n'y a pas lieu de statuer sur la seconde question.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

62 Les frais exposés par le Conseil et par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR,

statuant sur les questions à elle soumises par le Bundesfinanzhof, par ordonnance du 7 mars 1996, dit pour droit:

L'examen des questions posées n'a révélé aucun élément de nature à affecter la validité du règlement (CEE) n_ 3300/91 du Conseil, du 11 novembre 1991, suspendant les concessions commerciales prévues par l'accord de coopération entre la Communauté économique européenne et la république socialiste fédérative de Yougoslavie.

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