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Document 61996TJ0142

Sommaire de l'arrêt

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

19 février 1998

Affaire T-142/96

Anne-Marie Toller

contre

Commission des Communautés européennes

«Fonctionnaires — Avis de la commission d'invalidité — Insuffisance professionnelle — Décision de révocation — Demande de réexamen — Élément nouveau et substantiel — Délai forclos — Recevabilité»

Texte complet en langue française   II-179

Objet:

Recours ayant pour objet une demande d'annulation de la décision de la Commission refusant de réexaminer la décision du 1er juillet 1993 par laquelle la requérante a été révoquée pour insuffisance professionnelle.

Résultat:

Irrecevabilité.

Résumé de l'arrêt

La requérante est jusqu'au 30 septembre 1993 fonctionnaire de grade C 5 à la direction générale Personnel et administration (DG IX) de la Commission.

Dans le cadre d'une procédure disciplinaire ouverte à son encontre le 4 septembre 1990, la commission d'invalidité, composée des Drs Sternon, désigné par la Commission, Antoine, désigné par la requérante, et de Marneffe, désigné d'un commun accord par les deux premiers, est invitée à rendre un avis sur l'invalidité permanente totale alléguée par la requérante et l'origine médicale des absences qui lui sont reprochées pour 1990 et 1991. Cette commission entend l'intéressée au cours d'une réunion le 6 janvier 1992, et rend son avis à l'unanimité le 25 mai 1992, aux termes duquel «aucune raison médicale justifiant une invalidité permanente totale n'a été décelée», «aucune pathologie gravement invalidante n'a pu être mise en évidence» et, «par conséquent, les invalidités prolongées (1990 et 1991 notamment) ne sont pas médicalement justifiées».

Par décision du 1er juillet 1993, l'autorité investie du pouvoir de nomination (AIPN) révoque la requérante sans réduction ni suppression de son droit à pension d'ancienneté, avec effet au 1er octobre suivant (décision du 1er juillet 1993).

L'AIPN prononce sa révocation en tenant compte, d'une'part, de l'existence de deux sanctions disciplinaires antérieures, l'une ayant conduit à l'abaissement de deux échelons et l'autre à la rétrogradation du grade C 4 vers le grade C 5 et, d'autre part, de l'insuffisance professionnelle de la requérante constituée par des absences litigieuses en 1990 et en 1991.

Par décision du 23 septembre 1994, une invalidité permanente partielle de 2 % est reconnue à la requérante à la suite d'un accident survenu le 19 avril 1993. Par décision du 24 novembre 1994, une invalidité permanente partielle de 3 % est reconnue à la requérante à la suite d'un accident survenu le 19 mars 1990. Par décision du 19 décembre 1994, une invalidité permanente partielle de 1 % est reconnue à la requérante à la suite d'un accident survenu le 5 avril 1991.

Le 15 septembre 1995, la requérante introduit auprès de la Commission une demande aux fins d'obtenir la révision de la décision du 1er juillet 1993 la révoquant. La demande de la requérante est rejetée explicitement par la Commission le 16 novembre 1995. Le 13 février 1996, la requérante introduit une réclamation contre cette décision, qui fait l'objet d'une décision implicite de rejet.

Sur la recevabilité

Les délais de réclamation et de recours fixés par les articles 90 et 91 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (statut) sont d'ordre public et ne sont pas à la disposition des parties et du juge, ayant été institués en vue d'assurer la clarté et la sécurité des situations juridiques. Les éventuelles exceptions ou dérogations à ces délais doivent être interprétées de manière restrictive (point 45).

Référence à: Tribunal 15 décembre 1995, Prougoulis/Commission.T-131/95, RecFP p. II-907, point 36; Tribunal 23 avril 1996, Mancini/Commission, T-113/95, RecFP p. II-543, point 20; Cour 23 janvier 1997, Coen, C-246/95, Rec. p. I-403, point 21; Tribunal 11 juillet 1997, Chauvin/Commission, T-16/97, RecFP p. II-681, point 32

Or, il est constant que la requérante n'a pas, dans le délai de trois mois prévu par l'article 90, paragraphe 2, du statut, introduit une réclamation dirigée contre la décision du 1er juillet 1993. Par conséquent, cette décision est devenue définitive à compter de l'expiration du délai de réclamation, soit le 2 octobre 1993, la requérante ayant reconnu dans sa demande du 15 septembre 1995 que la décision du 1er juillet 1993 lui avait été notifiée le 2 juillet 1993 (point 46).

Il ressort des mémoires de la requérante et de ses déclarations lors de l'audience que l'objet réel de son recours consiste à obtenir le réexamen de la décision du 1er juillet 1993 (point 47).

Si, aux termes de l'article 90, paragraphe 1, du statut, tout fonctionnaire peut demander à l'AIPN de prendre à son égard une décision, cette faculté ne permet cependant pas au fonctionnaire d'écarter les délais prévus par les articles 90 et 91 pour l'introduction d'une réclamation et d'un recours, en mettant indirectement en cause, par le biais d'une demande, une décision antérieure qui n'avait pas été contestée dans les délais. Seule l'existence de faits nouveaux substantiels peut justifier la présentation d'une demande tendant au réexamen d'une telle décision (point 48).

Référence à: Cour 15 mai 1985, Esly/Commission, 127/84, Rec. p. 1437, point 10; Chauvin/Commission, précité, point 37

La commission d'invalidité avait pour mission de se prononcer sur l'invalidité permanente totale alléguée par la requérante et, dans ce cadre, sur les éventuelles justifications médicales des absences litigieuses de la requérante en 1990 et en 1991. Or, la décision du 1er juillet 1993 se fonde sur cet avis de la commission d'invalidité du 25 mai 1992. Il s'ensuit que les critiques formulées par la requérante contre l'avis de la commission d'invalidité et, dans la mesure où elles concernent l'appréciation médicale de son état, contre la décision du 1er juillet 1993, sur le fondement des éléments qu'elle qualifie de faits nouveaux et substantiels, n'ont de pertinence qu'en ce qu'elles se rapportent aux années 1990 et 1991 (point 49).

Les appréciations médicales proprement dites formulées par la commission d'invalidité doivent être considérées comme définitives lorsqu'elles ont été émises dans des conditions régulières, le contrôle juridictionnel ne pouvant s'exercer que sur la régularité de la constitution et du fonctionnement d'une telle commission, ainsi que sur la régularité des avis qu'elle émet. Or, en l'espèce, la requérante n'a à aucun moment mis en doute la régularité des conditions dans lesquelles la commission d'invalidité a rendu son avis du 25 mai 1992 (point 50).

Référence à: Cour 29 novembre 1984, Suss/Commission, 265/83, Rec. p. 4029, points 9 à 15; Tribunal 12 juillet 1990, Vidrányi/Conimission, T-154/89, Rec. p. II-445, point 48; Tribunal 14 janvier 1993, F./Commission, T-88/91, Rec. p. II-13, point 39; Tribunal 30 mai 1995, Saby/Commission, T-556/93, RecFP p. II-375, point 35

Il ressort de l'analyse des différents éléments invoqués par la requérante à compter de l'introduction de sa demande le 15 septembre 1995 que lesdits éléments ne sont pas de nature à établir l'existence d'un fait nouveau et substantiel susceptible de justifier le réexamen de la décision du 1er juillet 1993. La requérante est donc forclose à attaquer cette décision (points 52 à 67).

En outre, et à titre surabondant, dès lors que la requérante cherche à obtenir le réexamen de la décision du 1er juillet 1993 à la lumière de prétendus faits nouveaux et substantiels, l'acte par lequel la requérante a demandé le 15 septembre 1995 à la Commission de revoir sa décision du 1er juillet 1993 constitue en fait une réclamation au sens de l'article 90, paragraphe 2, du statut, quelle qu'ait pu être la qualification donnée par les parties à un tel acte (point 68).

Or, si la jurisprudence n'a pas encore eu l'occasion de se prononcer de façon spécifique sur le délai dans lequel une demande de réexamen d'une décision devenue définitive doit être introduite, plusieurs indications permettent néanmoins de conclure que le délai en question correspond au délai. prévu à l'article 90, paragraphe 2, du statut pour l'introduction d'une réclamation (point 69).

S'il est possible, sur la base d'un fait nouveau et substantiel, d'obtenir la réouverture des délais prévus aux articles 90 et 91 du statut pour contester une décision devenue définitive, la réouverture de ces délais ne saurait conduire à octroyer des délais d'une durée plus longue que ces derniers. Une telle solution a pour effet d'éviter d'opérer une discrimination objectivement injustifiée entre les requérants qui introduisent une réclamation à l'encontre d'une décision qui n'est pas encore devenue définitive, dans le respect du délai imparti à l'article 90, paragraphe 2, du statut, et ceux qui introduisent une réclamation à l'encontre d'une décision devenue définitive, sous la forme d'une demande de réexamen pour faits nouveaux (point 73).

Référence à: Tribunal 11 mars 1993, Boessen/CES, T-87/91, Rec. p. II-235, point 28; Progoulis/Commission, précité, points 39 et 50; Chauvin/Commission, précité, points 44 et 53

Pour des raisons de sécurité juridique, le point de départ du délai en cause doit correspondre à la date du fait nouveau et substantiel invoqué par l'intéressé pour justifier le réexamen de la décision qui lui fait grief ou à la date à laquelle il a effectivement pris connaissance de ce fait (point 74).

Référence à: Boessen/CES, précité, point 28

Une demande de réexamen d'une décision devant être qualifiée de réclamation, ladite demande doit être introduite dans un délai de trois mois à compter du fait nouveau et substantiel dont le fonctionnaire compte se prévaloir ou de la prise de connaissance effective de ce fait, le délai prévu à l'article 90, paragraphe 2, du statut, pour introduire une réclamation à l'encontre d'une décision faisant grief étant de trois mois (point 75).

Or, en l'espèce, force est de constater que, dans l'hypothèse la plus favorable à la requérante, le dernier élément sur lequel elle s'est fondée pour introduire sa demande de réexamen du 15 septembre 1995 est le rapport médical établi par le D' Marichal le 17 mai 1995. En tout état de cause, il s'est donc écoulé plus de trois mois entre la prise de connaissance des prétendus faits nouveaux et substantiels dont la requérante se prévaut et l'introduction de la réclamation litigieuse (point 76).

Dispositif:

Le recours est rejeté comme irrecevable.

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