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Document 62022CC0433

Conclusions de l'avocat général Mme J. Kokott, présentées le 7 septembre 2023.
Autoridade Tributária e Aduaneira contre HPA – Construções SA.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Supremo Tribunal Administrativo.
Renvoi préjudiciel – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Directive 2006/112/CE – Annexe IV – Point 2 – Dispositions temporaires pour certains services à forte intensité de main‑d’œuvre – Taux réduit de TVA applicable aux services de rénovation et de réparation de logements privés – Notion de “logements privés”.
Affaire C-433/22.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2023:655

 CONCLUSIONS DE L’AVOCATE GÉNÉRALE

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 7 septembre 2023 ( 1 )

Affaire C‑433/22

Autoridade Tributária e Aduaneira

contre

HPA – Construções SA

[demande de décision préjudicielle formée par le Supremo Tribunal Administrativo (Cour administrative suprême, Portugal)]

« Renvoi préjudiciel – Taxe sur la valeur ajoutée – Directive 2006/112/CE – Possibilité temporaire d’un taux réduit sur des services à forte intensité de main-d’œuvre – Taux réduit pour la rénovation de logements privés – Notion de “logement privé” – Limites d’un taux réduit sélectif – Principe de démocratie et pouvoir d’appréciation du législateur – Principe de neutralité fiscale »

I. Introduction

1.

Cette procédure montre encore une fois à quel point, en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), les taux réduits sont susceptibles de donner lieu à des litiges. Le Portugal taxe à un taux réduit les services à forte intensité de main‑d’œuvre fournis à des immeubles. Toutefois, il doit s’agir de la rénovation, restauration, réparation ou conservation d’immeubles à usage d’habitation. Pour l’année litigieuse 2007, en vertu du droit de l’Union, un tel taux réduit n’était que temporairement (jusqu’au 31 décembre 2010) possible et a déjà donné lieu à deux procédures préjudicielles devant la Cour.

2.

En ce qui concerne la même disposition portugaise, la Cour a déjà été amenée, le 5 mai 2022, dans l’affaire C‑218/21, à trancher le point de savoir si cette disposition couvre également la réparation d’un ascenseur dans un immeuble qui n’est pas exclusivement à usage d’habitation. Certes, elle a répondu par l’affirmative, néanmoins, dans les motifs de la décision, elle a souligné qu’il convient de procéder à une répartition au prorata dans le cas de services de rénovation et de réparation relatifs aux installations partagées de bâtiments à usage mixte ( 2 ).

3.

En revanche en l’espèce, la question qui est posée est celle de savoir si, s’agissant d’« un immeuble à usage d’habitation », il suffit qu’il soit mentionné dans le registre foncier que cet immeuble ne peut qu’être utilisé à des fins d’habitation ou bien s’il faut aussi qu’au moment de la rénovation, cet immeuble ait bien effectivement été utilisé à des fins d’habitation. Dans ce dernier cas, cela empêcherait que des investisseurs qui n’ont pas le droit de déduire en amont la TVA rénovent, en bénéficiant du taux réduit, des immeubles anciens en réserve pour plus tard (et notamment après l’expiration de la limitation dans le temps du taux réduit) les revendre en tant que logements ou encore en tant qu’objets spéculatifs. Ce dont il est question en substance est la faculté pour les États membres de prévoir un taux réduit sélectif sans pour autant porter atteinte au principe de neutralité.

II. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union

4.

L’article 96 de la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la « directive TVA ») ( 3 ) dispose :

« Les États membres appliquent un taux normal de TVA fixé par chaque État membre à un pourcentage de la base d’imposition qui est le même pour les livraisons de biens et pour les prestations de services. »

5.

L’article 98, paragraphes 1 et 2, de cette directive est ainsi libellé :

« 1.   Les États membres peuvent appliquer soit un, soit deux taux réduits.

2.   Les taux réduits s’appliquent uniquement aux livraisons de biens et aux prestations de services des catégories figurant à l’annexe III.

[...] »

6.

À la date des faits au principal, le titre VIII de la directive TVA contenait un chapitre 3, intitulé « Dispositions temporaires pour certains services à forte intensité de main-d’œuvre ». À ce chapitre figuraient, notamment, les articles 106 et 107 de cette directive. L’article 106 de ladite directive disposait :

« Les États membres peuvent être autorisés par le Conseil [de l’Union européenne], statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission [européenne], à appliquer, jusqu’au 31 décembre 2010 au plus tard, aux services figurant à l’annexe IV les taux réduits prévus à l’article 98.

Les taux réduits peuvent s’appliquer à des services appartenant à deux au maximum des catégories figurant à l’annexe IV.

Dans des cas exceptionnels, un État membre peut être autorisé à appliquer les taux réduits à des services appartenant à trois des catégories susmentionnées. »

7.

L’article 107 de la même directive prévoyait :

« Les services visés à l’article 106 doivent remplir les conditions suivantes :

a)

être à forte intensité de main-d’œuvre ;

b)

être en grande partie fournis directement aux consommateurs finaux ;

c)

être principalement locaux et non susceptibles de créer des distorsions de concurrence.

En outre, il doit y avoir un lien étroit entre la baisse de prix découlant de la réduction du taux et l’augmentation prévisible de la demande et de l’emploi. L’application d’un taux réduit ne doit pas mettre en péril le bon fonctionnement du marché intérieur. »

8.

L’annexe IV de la directive TVA contenait la liste des services visés à l’article 106 de cette directive. Le point 2 de cette annexe était libellé comme suit ( 4 ) :

« la rénovation et la réparation de logements privés, à l’exclusion des matériaux qui représentent une part importante de la valeur du service fourni. »

B.   Le droit portugais

9.

La République portugaise a transposé la directive TVA par le Código do Imposto sobre o Valor Acrescentado (code de la taxe sur la valeur ajoutée).

10.

L’article 18, paragraphe 1, du code de la taxe sur la valeur ajoutée, dans sa version applicable aux faits au principal, prévoyait :

« Les taux de la taxe sont les suivants :

a)

pour les importations, livraisons de biens et prestations de services mentionnées dans la liste I annexée au présent code, le taux est de 5 % [...] »

11.

Le point 2.24 de la liste I annexée au code de la taxe sur la valeur ajoutée disposait :

« Les louages d’ouvrage à des fins d’amélioration, de réfection, de rénovation, de restauration, de réparation et de conservation d’immeubles et de parties autonomes d’immeubles à usage d’habitation, à l’exception des services de nettoyage, d’entretien des espaces verts et des louages d’ouvrage concernant des biens immobiliers qui couvrent la totalité ou une partie des éléments consistant en piscines, saunas, courts de tennis, golfs ou minigolfs et installations similaires.

Le taux réduit ne s’applique pas aux matériaux incorporés, à moins que leur valeur n’excède pas 20 % de la valeur totale du service fourni. »

12.

S’agissant de l’expression « immeubles ou parties autonomes d’immeubles à usage d’habitation », figurant au point 2.24 (actuel point 2.27) de la liste I annexée au code de la taxe sur la valeur ajoutée, l’administration fiscale et douanière a publié des instructions administratives, parmi lesquelles la lettre circulaire no 30025, du 7 août 2000, dont l’extrait suivant, pour ce qui importe aux fins de la présente affaire, est tiré :

« 2) Immeubles

Le point couvre uniquement les services effectués sur un immeuble ou une partie d’immeuble qui, ne faisant pas l’objet d’un agrément à d’autres fins, est à usage d’habitation.

Est considéré comme immeuble ou partie d’immeuble à usage d’habitation l’immeuble ou la partie d’immeuble qui est utilisé comme tel au moment où débutent les travaux et qui, après la réalisation de ces derniers, continue à être effectivement utilisé comme logement privé. »

III. Les faits et la procédure préjudicielle

13.

La société HPA – Construções SA (ci-après « HPA ») est une société commerciale sous forme de société anonyme dont l’objet est la « prestation de services de construction civile, commerce, louages d’ouvrage, achat et vente de propriétés et commerce de matériaux de construction civile ».

14.

Au cours de l’année 2007, HPA a exécuté plusieurs louages d’ouvrage relatifs à la rénovation de bâtiments à Lisbonne (Portugal). Il ressort des certificats fonciers que, auparavant (2004, 2005) ou par la suite (2008), les biens immobiliers ont été acquis par plusieurs sociétés commerciales (parmi lesquelles Paço – Investimentos Imobiliários SA, Brown House – Empreendimentos Imobiliários SA et Sociedade Imobiliária do Palácio Alagoas Lda) et que les immeubles sont en grande partie destinés à un usage d’habitation.

15.

Conformément au point 2.24 de la liste I annexée au code de la taxe sur la valeur ajoutée, HPA a appliqué un taux de TVA de 5 % sur les prestations de services de rénovation, a facturé ce taux aux sociétés commerciales évoquées ci‑dessus et s’est acquittée de la TVA. Le 19 janvier 2011, les services de contrôle fiscal de la Direção de Finanças de Lisboa (direction des finances de Lisbonne, Portugal) ont engagé une procédure externe de contrôle auprès de la demanderesse, relative à l’exercice 2007. Le 10 mai 2011, le Serviço de Finanças de Sintra-1 (bureau des impôts de Sintra-1, Portugal) a pris des décisions de recouvrement a posteriori de la TVA pour l’année 2007.

16.

Le recouvrement a posteriori se base sur l’application du taux normal de 21 % au lieu du taux réduit de 5 %. HPA n’aurait pas été en mesure de prouver que les louages d’ouvrage en cause se rapportaient à des biens immobiliers effectivement utilisés à des fins d’habitation, la charge de la preuve à cet égard lui incombant conformément à l’article 74 de la loi fiscale générale.

17.

HPA a exercé devant le Tribunal Administrativo e Fiscal de Sintra (tribunal administratif et fiscal de Sintra, Portugal) un recours contre les décisions de recouvrement a posteriori. Par jugement du 26 juin 2020, cette juridiction a fait droit au recours et a annulé les décisions de recouvrement a posteriori au motif que les immeubles, ou biens immobiliers urbains bâtis, destinés à l’habitation ou à usage d’habitation, visés au point 2.24 de la liste I annexée au code de la taxe sur la valeur ajoutée, sont tous ceux qui font l’objet d’un agrément pour une utilisation en tant qu’habitation et non uniquement ceux qui sont effectivement habités. L’administration fiscale et douanière a interjeté appel de cette décision devant la juridiction de renvoi.

18.

Le Supremo Tribunal Administrativo (Cour administrative suprême, Portugal) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante, conformément à l’article 267 TFUE :

« Le point 2 de l’annexe IV de la directive TVA s’oppose-t-il à une disposition de droit national en vertu de laquelle le taux réduit de TVA ne peut être appliqué qu’à des louages d’ouvrage à des fins de réparation et de rénovation de l’immeuble portant sur des logements privés qui sont habités au moment où ces opérations ont lieu ? »

19.

Dans le cadre de la procédure devant la Cour, seuls le gouvernement portugais et la Commission européenne ont présenté des observations écrites. La Cour a décidé de ne pas tenir d’audience de plaidoiries, conformément à l’article 76, paragraphe 2, du règlement de procédure.

IV. Analyse juridique

A.   Sur la question préjudicielle et les différentes étapes de l’examen

20.

La juridiction de renvoi demande si l’article 106 de la directive TVA en vigueur à l’époque, lu en combinaison avec le point 2 de son annexe IV, permettait qu’au Portugal, le taux réduit de TVA ne s’applique qu’aux prestations de services aux fins de rénovation et de réparation de logements privés qui sont habités au moment où les opérations ont lieu. Pour le formuler autrement, la question qui se pose est celle de savoir si un État membre peut exclure ce taux réduit lorsque, au moment de l’exécution des prestations, le bâtiment n’est pas, ou plus, utilisé à des fins d’habitation, mais qu’il a, par exemple, été réhabilité en vue d’une revente ultérieure et qu’un usage à titre d’habitation n’interviendra éventuellement qu’ultérieurement, par exemple du chef de l’acheteur.

21.

Pour répondre à cette question, il est nécessaire d’interpréter la notion de rénovation et réparation de « logements privés » utilisée en droit de l’Union au point 2 de l’annexe IV de la directive TVA (B). Dans l’hypothèse où tous les bâtiments qui, à un quelconque moment, peuvent être utilisés comme logements relèveraient de cette notion, il se pourrait que l’octroi sélectif du taux d’imposition réduit à la rénovation des logements qui sont bien utilisés en tant que logements au moment de la rénovation soit interdit (C). Pour apprécier ce point, il conviendrait d’examiner plus précisément les exigences du droit de l’Union à l’égard des États membres lors de l’introduction d’un taux d’imposition sélectif (D).

B.   Interprétation de la notion de « logement privé »

22.

L’annexe IV, point 2, de la directive TVA, lue conjointement avec l’article 106 de cette directive, autorisait les États membres à appliquer un taux réduit de TVA aux services en lien avec « la rénovation et la réparation de logements privés, à l’exclusion des matériaux qui représentent une part importante de la valeur du service fourni ».

23.

En l’absence de renvoi au droit des États membres et de définition pertinente dans la directive TVA, les termes figurant à l’annexe IV, point 2, de cette directive doivent être interprétés de manière uniforme et indépendamment des qualifications retenues dans les États membres conformément au sens habituel en langage courant de ceux-ci, tout en tenant compte du contexte dans lequel ils sont utilisés et des objectifs poursuivis par la réglementation dont ils font partie ( 5 ).

24.

Selon la Cour, à cet égard, il ressort du libellé de ce point 2, d’une part, que deux activités distinctes sont couvertes par cette disposition, à savoir la rénovation et la réparation, et, d’autre part, que ces activités doivent se rapporter aux logements privés ( 6 ). En l’espèce, ainsi que l’indique la question préjudicielle, seul ce dernier point doit être clarifié.

25.

La Cour a déjà précisé que le terme « logement » désigne généralement un bien immeuble, voire meuble, ou une partie de celui-ci, destiné à l’habitation et qui sert donc de résidence à une ou à plusieurs personnes. Par ailleurs, l’adjectif « privé » permet de faire une distinction avec les logements non privés, tels que les logements de fonction ( 7 ) ou encore les hôtels ( 8 ). Par conséquent, les hébergements de vacances mis pour une courte durée à la disposition de différents vacanciers ne sont, eux non plus, pas des « logements privés ».

26.

Par conséquent, ainsi que l’a expressément jugé la Cour, les services de rénovation et de réparation visés à l’annexe IV, point 2, de la directive TVA doivent porter sur des biens utilisés à des fins d’habitation privée, tandis que les services se rapportant aux biens utilisés à d’autres fins, telles que des fins commerciales, ne sont pas couverts par cette disposition ( 9 ). Ce qui importe donc est l’usage qui est effectivement fait du logement au moment de la rénovation. Des biens immobiliers vides qui sont rénovés par une société commerciale afin d’être vendus ne sont à ce moment pas utilisés à des fins d’habitation privée, mais à des fins commerciales (en l’occurrence le commerce de biens immobiliers) ainsi que l’a également observé à juste titre le gouvernement portugais.

27.

Par conséquent, le libellé et la jurisprudence de la Cour plaident en ce sens que seuls relèvent de la notion de logements privés les logements qui sont effectivement utilisés comme logements au moment de la rénovation. Toutefois, cela ne suppose pas que, pendant les travaux de rénovation aussi, le logement soit effectivement habité, il faut uniquement que, à ce moment, il soit à usage d’habitation, c’est‑à‑dire qu’il serve de résidence ( 10 ).

28.

Or, un logement privé reste utilisé en tant que logement privé – ce que la Commission semble oublier en prenant l’exemple d’une résidence secondaire utilisée seulement l’été – lorsque le titulaire du logement séjourne ailleurs pendant le temps de la rénovation. Le domicile d’une personne n’est pas nécessairement déplacé du fait qu’elle séjourne à un autre endroit. Pas plus que le fait qu’un logement privé soit inoccupé pendant un certain temps (par exemple, un logement locatif est rénové entre le déménagement de l’ancien locataire et l’emménagement du nouveau locataire) ne modifie son caractère de logement privé.

29.

Rien d’autre ne ressort de la position de l’administration fiscale portugaise énoncée dans la lettre circulaire. Selon celle-ci, un immeuble doit être considéré comme étant à usage d’habitation lorsqu’il est utilisé comme tel au moment où débutent les travaux et qu’après la réalisation de ces derniers, il continue à être effectivement utilisé comme logement privé. Cela signifie en définitive uniquement que l’immeuble était utilisé comme logement privé au début de l’exécution des prestations et que tel est encore le cas à la fin des travaux. Si je comprends bien la situation juridique portugaise, il s’agit donc ainsi d’une délimitation par rapport à la rénovation non privilégiée d’immeubles qui, au moment de celle-ci, ne sont pas utilisés à des fins d’habitation privée, mais qui, par exemple, sont destinés à être loués à titre professionnel en tant qu’hébergements de vacances, sont conçus comme un placement (tout en restant inoccupés) ou qui, comme manifestement en l’espèce, sont destinés à être vendus après leur rénovation dans le cadre d’une activité commerciale de vente d’immeubles.

30.

La nécessité d’une utilisation en tant que logement privé pendant la prestation des services se confirme en incluant dans l’interprétation l’article 107 de la directive TVA. En effet, l’article 107 de cette directive prévoit que les services visés à l’article 106 de ladite directive sont, dans une large mesure, fournis directement au consommateur final. Une société commerciale qui fait rénover des biens immobiliers vides pour ensuite revendre des appartements rénovés n’est très certainement pas le consommateur final envisagé par le législateur. À cet égard, il est déjà difficile de qualifier une société commerciale de consommateur final. C’est en l’occurrence plutôt le propriétaire ou le locataire qui utilise l’appartement à ses propres fins (privées), plus précisément en tant que domicile, qui devrait être considéré comme le consommateur final. En effet, ces services ne devant être fournis, dans une large mesure, que directement aux consommateurs finaux, cela peut également inclure les services de rénovation fournis aux bailleurs qui louent des locaux d’habitation, puisque, dans ce cas, les locataires utilisent directement ces logements à des fins d’habitation privée.

31.

Par ailleurs, la finalité d’un taux réduit plaide également en faveur de cette interprétation restrictive. Dès lors que l’on s’attache sérieusement au caractère de taxe générale sur la consommation de la TVA ( 11 ), le taux de la taxe ne peut toujours que concerner la charge pesant sur le consommateur final qui n’a pas droit de déduire en amont la TVA – ou, en cas de réduction du taux, l’avantage dont il bénéficie ( 12 ). Cela s’applique en tout état de cause lorsque la réduction du taux de taxe ne se rattache pas à des caractéristiques subjectives du prestataire, mais – comme en l’espèce – à certaines opérations dont le législateur estime qu’elles méritent d’être avantagées dans l’intérêt du bénéficiaire de la prestation.

32.

Pour un entrepreneur ayant le droit de déduire la TVA en amont, il est à cet égard indifférent que son opération en amont soit taxée au taux normal ou au taux réduit, étant donné que la déduction de la taxe en amont le décharge des deux. C’est pour cette raison que, par principe, les taux réduits visent à favoriser le consommateur final (propriétaire privé) qui n’a pas droit à déduction de la TVA en amont, afin de réduire pour lui le coût de la prestation en cause. La même chose s’applique à un locataire, qui est destinataire d’une prestation exonérée [location d’un local d’habitation, article 135, paragraphe 1, sous l), de la directive TVA] à laquelle s’intègre la prestation taxée à taux réduit (prestation de rénovation). En l’absence de déduction de la taxe payée en amont, le prestataire (bailleur) peut alors répercuter sur le locataire des coûts moins élevés (à savoir le taux réduit au lieu du taux normal).

33.

En effet, la réduction du taux d’imposition pour les « rénovations et réparations de logements privés » vise à décharger l’utilisateur du logement, lequel soit rénove son logement privé, soit finance, au travers du loyer, la rénovation ou la réparation de son logement privé. Ainsi, par le biais d’un taux réduit, les États membres peuvent réduire les coûts du logement nécessaire à la vie, pour autant que ces coûts portent sur des travaux de rénovation et de réparation. À cet égard, l’élément déterminant n’est pas de savoir si, d’après le registre foncier, ce bien immobilier ne peut être utilisé qu’à des fins d’habitation, mais celui de savoir si, au moment où est généré le coût, ce bien est utilisé, ou doit l’être, à cette fin par le bénéficiaire de la prestation. Cette finalité du taux réduit vise donc également les rénovations aux fins d’une utilisation ultérieure en tant que logements par les bénéficiaires (directement ou indirectement par voie de location). En revanche, ne relève pas de cette finalité la rénovation d’un bien immobilier en vue d’une vente ultérieure – étant donné que la vente ne constitue pas une utilisation à des fins d’habitation.

34.

S’y ajoute la particularité que, en vertu de l’article 106, premier alinéa, de la directive TVA, les prestations de services figurant à l’annexe IV, point 2, de cette directive ne relevaient que de manière limitée dans le temps (à savoir jusqu’au 31 décembre 2010) du taux réduit. Cela aussi conditionne une interprétation se basant sur l’utilisation effective faite du bien immobilier au moment de la prestation de services. Sinon, il serait assez simple de contourner la limitation dans le temps par des effets d’anticipation (rénovation pour constituer des réserves de bâtiments qui ne seront éventuellement utilisés à des fins d’habitation qu’à l’avenir).

35.

L’ensemble de ces éléments plaide dans le sens d’une interprétation de l’annexe IV, point 2, de la directive TVA selon laquelle le taux réduit de TVA ne peut s’appliquer qu’à des services à des fins de réparation et de rénovation de logements privés qui sont habités au moment où ces opérations ont lieu. Partant, l’annexe IV, point 2, de la directive TVA ne s’oppose pas à une disposition nationale, telle que le point 2.24 de la liste I annexée au code de la TVA, qui exige que les services y figurant portent sur des biens immeubles utilisés à des fins d’habitation. Elle ne s’oppose pas non plus à la position de l’administration fiscale selon laquelle doit être considéré comme étant utilisé à des fins d’habitation un bien immobilier qui est utilisé comme tel au moment où débutent les travaux et qui, après la réalisation de ces derniers, continue à être effectivement utilisé comme logement privé. Il n’est toutefois pas nécessaire à cet effet que le logement soit également habité pendant les travaux.

C.   Subsidiairement : taux réduit sélectif

36.

Dans l’hypothèse où la Cour considérerait en revanche que l’annexe IV, point 2, de la directive TVA doit être interprétée largement et qu’il suffirait que le bien immobilier rénové soit à un moment quelconque utilisé à des fins d’habitation et qu’il suffit pour satisfaire à cette condition qu’une telle affectation figure dans le registre foncier, il se pose alors la question de savoir si, en l’espèce, le Portugal était autorisé à prévoir un taux réduit sélectif. En effet, dans ce cas, le Portugal aurait alors limité le taux d’imposition réduit, qui, en vertu de droit de l’Union serait possible pour tous les biens immobiliers susceptibles d’être utilisés en tant que logements privés, aux biens immobiliers qui, au moment de la prestation de services, sont effectivement utilisés en tant que logements privés.

37.

S’agissant de l’application du taux réduit de TVA en vertu de l’article 98, paragraphes 1 et 2, de la directive TVA, la Cour a jugé que le libellé de cette disposition n’implique pas nécessairement une interprétation selon laquelle l’application de ce taux réduit porte sur tous les aspects d’une catégorie de prestations visée à l’annexe III de ladite directive. Ainsi, sous réserve du respect du principe de neutralité fiscale inhérent au système commun de TVA, les États membres ont la possibilité d’appliquer un taux réduit de TVA à des aspects concrets et spécifiques d’une catégorie de prestations visée à l’annexe III de la directive TVA ( 13 ). La même chose s’applique a fortiori aux prestations de services auparavant énumérées à l’annexe IV de la directive TVA, qui ne pouvaient être taxées à taux réduit qu’après autorisation du Conseil et de manière limitée dans le temps.

38.

La possibilité d’une telle application sélective du taux réduit de TVA serait justifiée, entre autres, en ce que la limitation de son application à des aspects concrets et spécifiques de la catégorie de prestation en cause est cohérente avec le principe selon lequel les exemptions et les dérogations doivent être interprétées restrictivement ( 14 ).

39.

Seul ce résultat est en définitive exact. D’une part, la Cour a, à plusieurs reprises, souligné que la règle d’interprétation stricte ne signifie pas que les termes utilisés pour définir les cas d’application dudit taux réduit doivent être interprétés d’une manière qui priverait celui-ci de ses effets ( 15 ). En effet, ces notions doivent être interprétées en conformité avec les objectifs poursuivis par ce taux réduit et avec les exigences de la neutralité fiscale, ce qui explique que « règle d’interprétation stricte » équivaut désormais à une formule vide de sens qui est superflue ( 16 ).

40.

D’autre part, une interprétation (stricte ou large) d’une disposition porte toujours sur une condition qui, en vertu du droit de l’Union, doit faire l’objet d’une interprétation (stricte ou large) uniforme. Or, l’application sélective du taux réduit ne porte pas sur l’interprétation d’une condition prévue par le droit de l’Union. Au contraire, la faculté de limiter de manière sélective le taux réduit résulte au premier chef de la possibilité pour l’État membre de choisir d’introduire un taux réduit.

41.

Ainsi, le législateur de l’Union a prévu la faculté pour les États membres d’appliquer un taux réduit de TVA aux prestations de services et aux livraisons de biens relevant des catégories figurant à l’annexe III de la directive TVA. Il appartient donc aux États membres de déterminer plus précisément, parmi ces livraisons de biens et ces prestations de services, celles auxquelles le taux réduit s’applique ( 17 ). Dès lors qu’un État membre n’a pas l’obligation d’introduire un taux réduit ( 18 ), et peut, par conséquent, aussi renoncer entièrement à ce taux réduit, a fortiori il peut aussi renoncer à une partie de celui-ci, c’est‑à‑dire qu’il ne l’introduit que partiellement (sélectivement) (argumentum a maiore ad minus).

42.

Ainsi, selon les termes employés par la Cour, l’État membre peut limiter l’application d’un tel taux réduit à des aspects concrets et spécifiques de la catégorie qui y est visée ( 19 ). L’utilisation effective en tant que logement privé au moment des services de rénovation constitue un tel aspect concret et spécifique, étant donné qu’il est suffisamment identifiable et délimitable ( 20 ).

43.

Par conséquent, si la notion de logement privé devait être comprise exclusivement dans le sens d’une approche formelle (tous les biens immobiliers qui, selon le registre foncier, servent à des fins d’habitation), il ne poserait en principe aucun problème au regard du droit de l’Union que le Portugal interprète cette notion de manière (matériellement) restrictive et soumette, de manière sélective, uniquement les travaux de rénovation de logements effectivement utilisés comme logements privés à un taux réduit de TVA.

44.

Contrairement à ce que soutient la Commission, il importe peu que cette interprétation matérielle n’émerge qu’en lien avec les instructions administratives adoptées à cet égard. En effet, l’article 288, troisième alinéa, TFUE laisse aux autorités nationales, lorsqu’elles mettent en œuvre une directive, le choix de la forme et des moyens. Dès lors qu’il existe dans certains États membres des instructions administratives dites « de concrétisation » qui ont un effet juridique contraignant en dehors de l’administration et qui, à l’instar de la loi, sont publiées officiellement, il ne poserait pas problème qu’un taux réduit optionnel soit mis en œuvre de manière sélective en combinant la loi et de telles instructions administratives ( 21 ).

45.

Dès lors que, ainsi que l’expose le gouvernement portugais dans ses observations écrites, l’instruction administrative ne fait que traduire la volonté du législateur portugais, cela soulève d’autant moins de doutes. Contrairement à ce que semble suggérer la Commission dans ses observations, il ne s’agit pas non plus de l’application d’une disposition administrative par une juridiction, mais de l’interprétation de la loi. En tout état de cause, dans sa question préjudicielle, la juridiction de renvoi part du postulat que la limitation en cause résulte de la législation nationale.

D.   Exigences pesant sur un taux réduit sélectif

46.

L’introduction d’un taux réduit sélectif est néanmoins soumise à certaines limites. Lorsqu’il choisit d’appliquer le taux réduit de TVA de manière sélective à certaines prestations de services ou livraisons de biens énumérées à l’annexe III (et également à l’annexe IV) de la directive TVA, un État membre doit respecter le principe de neutralité fiscale ( 22 ). Ce principe s’oppose à ce que, du point de vue de la TVA, des biens ou des prestations de services semblables, qui se trouvent en concurrence les uns avec les autres, soient traités de manière différente ( 23 ).

47.

Afin de déterminer si des biens ou des prestations de services sont semblables, il convient de tenir principalement compte du point de vue du consommateur moyen. Des biens ou des prestations de services sont semblables lorsqu’ils présentent des propriétés analogues et répondent aux mêmes besoins auprès du consommateur, en fonction d’un critère de comparabilité dans l’utilisation, et lorsque les différences existantes n’influent pas de manière considérable sur la décision du consommateur moyen de recourir à l’un ou à l’autre desdits biens ou prestations de services ( 24 ), c’est-à-dire que, de son point de vue, les opérations se trouvent dans un rapport de substitution ( 25 ).

48.

Il existe par définition une certaine marge d’appréciation pour décider de la similitude de biens ou de services du point de vue d’un consommateur final. La Cour évoque, dans le contexte de l’adoption de mesures fiscales par le législateur de l’Union, que celui-ci est appelé à opérer des choix de nature politique, économique ainsi que sociale, et à hiérarchiser des intérêts divergents ou à effectuer des appréciations complexes. Par conséquent, il y a lieu de lui reconnaître, dans ce cadre, un large pouvoir d’appréciation, de telle sorte que le contrôle juridictionnel du respect des conditions doit se limiter à celui de l’erreur manifeste ( 26 ). Ainsi, dans le cadre de son contrôle juridictionnel de l’exercice d’une telle compétence, la Cour ne saurait substituer son appréciation à celle du législateur de l’Union ( 27 ).

49.

En l’espèce, la question se pose de savoir si la Cour ne peut également exercer que d’une manière limitée comparable un contrôle sur l’exercice de cette marge d’appréciation par un législateur d’un État membre.

50.

Compte tenu notamment de la jurisprudence récente de la Cour, il convient de répondre par l’affirmative à cette question. Ainsi, la Cour souligne de plus en plus que l’Union regroupe des États qui respectent et partagent les valeurs visées à l’article 2 TUE ( 28 ). Parmi les valeurs visées à l’article 2 TUE sur lesquelles l’Union est fondée figure, notamment, le principe de démocratie.

51.

En vertu de ce principe, c’est au premier chef le législateur démocratiquement élu qui est compétent pour exercer les marges d’appréciation législatives. Dès lors que le droit de l’Union confère une telle marge de manœuvre à un État membre, c’est au premier chef le parlement élu de cet État membre qui est compétent. Il s’ensuit que, par nature, le contrôle par d’autres organes de l’exercice de cette marge d’appréciation parlementaire est limité. Ces organes ne sauraient substituer leur propre conception de la similitude des biens ou des services à celle de l’institution démocratiquement légitimée à cet effet. Cela s’applique tant aux juridictions nationales qu’aux juridictions de l’Union.

52.

Dans cette mesure, la Cour ne peut constater une violation du principe de neutralité par le législateur (qu’il s’agisse de celui de l’Union ou de celui d’un État membre) que si celui-ci a manifestement outrepassé sa marge d’appréciation. Or, tel ne peut être le cas que si, du point de vue du consommateur moyen, les différentes prestations ou livraisons taxées sont quasiment identiques, de sorte qu’elles pourraient être facilement substituées les unes aux autres. Ce n’est qu’à ce moment qu’il peut aussi exister une distorsion de concurrence entre les prestataires de ces services ou livraisons qui n’est plus compatible avec le principe de neutralité.

53.

C’est la raison pour laquelle la Cour s’est, jusqu’à présent, par principe, gardée de constater une violation du principe de neutralité lorsque le législateur de l’Union autorise par des directives à taxer à taux réduit uniquement les livres (mais pas les livres numériques ( 29 )), la livraison de chevaux destinés à l’abattage (mais pas les chevaux de selle ( 30 )) et la location d’emplacements de camping (mais pas la location d’emplacements d’amarrage pour bateaux ( 31 )). La même chose s’applique lorsque les États membres ne taxent à taux réduit, ou n’exonèrent, que les pâtisseries et viennoiseries fraîches (mais pas celles dépassant une certaine date de durabilité minimale ( 32 )), que les forains sur les fêtes foraines mobiles (mais pas les parcs d’attractions fixes ( 33 )), pas tous les médicaments (mais seulement certains, y compris en fonction de leur utilisation ( 34 )), que les taxis (mais pas tous les transports de voyageurs au moyen de véhicules de tourisme de personnes par voitures particulières ( 35 )), que les livres imprimés (mais pas ceux sur d’autres supports physiques ( 36 )).

54.

Or, en l’espèce, il n’y a pas de dépassement manifeste de la marge d’appréciation du législateur. Les services qui sont taxés de manière différente ne sont pas presque identiques, de sorte qu’il n’y a pas de distorsion de concurrence.

55.

En effet, le vendeur d’un logement rénové (inutilisé) n’est pas en concurrence avec le propriétaire d’un logement qui fait rénover son logement (utilisé) et qui n’est alors soumis qu’à un taux réduit. Même si le propriétaire du logement était une entreprise (par exemple un bailleur), il ne se trouve pas en concurrence sur un marché avec un vendeur. De même que l’entreprise de rénovation qui rénove un logement (inutilisé) n’est pas en concurrence avec l’entreprise de rénovation qui rénove un logement utilisé, étant donné que le bénéficiaire de la prestation ne peut pas choisir librement le taux d’imposition. Pour ce dernier, la rénovation sera toujours taxée soit à taux réduit (en tant que logement déjà utilisé), soit à taux plein (en tant que logement non encore utilisé). Ainsi, le taux d’imposition n’exercera aucune influence sur le choix par le bénéficiaire de la prestation de l’une ou l’autre entreprise de rénovation. Par conséquent, le principe de neutralité n’est pas affecté.

56.

Par ailleurs, il ne risque pas non plus d’exister une inégalité de traitement (non justifiée) de l’éventuel consommateur final au sens de l’article 20 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ( 37 ). D’une part, l’acheteur d’un logement rénové n’est pas comparable au propriétaire d’un logement qui fait rénover son logement, puisque l’un est destinataire d’une livraison de bien et l’autre d’une prestation de services. S’ajoute à cela que, dans la mesure où l’achat d’un logement rénové est imposable au Portugal, en tout état de cause, par le biais de la déduction en amont de la taxe, le vendeur n’aura pas à en supporter le coût (indépendamment du taux d’imposition applicable aux services de rénovation). Certes, dans la mesure où l’achat n’est pas taxé, le vendeur n’a pas de droit à déduction et intégrera le taux normal dans ses calculs. En revanche, l’achat n’est pas imposable, c’est-à-dire que l’acheteur n’aura au moins pas à supporter la charge de la TVA sur la valeur ajoutée créée par le vendeur lui-même (c’est-à-dire au moins sur son bénéfice). La même chose s’applique aux biens immobiliers utilisés à d’autres fins commerciales (tels que des hôtels ou des hébergements de vacances).

57.

À cet égard également, il est compréhensible que le législateur portugais ait limité le taux d’imposition réduit aux biens immobiliers qui sont effectivement utilisés comme logements au moment de la rénovation. Cela devient d’autant plus clair si la limitation du taux réduit vise, pour des motifs de politique sociale, notamment à alléger de manière ciblée les coûts pesant sur le propriétaire privé d’un logement utilisé en tant que tel. On ne saurait y voir une violation du principe de neutralité fiscale.

V. Conclusion

58.

Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre comme suit à la question préjudicielle posée par le Supremo Tribunal Administrativo (Cour administrative suprême, Portugal) :

L’annexe IV, point 2, de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée doit être interprété en ce sens que le taux réduit de TVA ne peut être appliqué qu’aux services de rénovation et de réparation de logements privés qui sont utilisés comme logements privés au moment de l’exécution de ces mesures. Il y a également utilisation en tant que logement privé lorsque le bénéficiaire de la prestation a mis le bien immeuble à la disposition d’un tiers en tant que logement. Toutefois, pour l’application du taux réduit, il n’est pas nécessaire que le logement soit habité lors de l’exécution de la prestation de services.


( 1 ) Langue originale : l’allemand.

( 2 ) Arrêt du 5 mai 2022, DSR – Montagem e Manutenção de Ascensores e Escadas Rolantes (C‑218/21, EU:C:2022:355, point 42). C’est sur ce passage de l’arrêt que le gouvernement portugais s’appuie dans ses observations écrites. Or, étant donné que la directive TVA ne prévoit pas de taux de taxation au prorata en ce qui concerne une prestation unique et qu’une prestation unique ne peut pas être divisée (sinon ce ne serait pas une prestation unique), cette affirmation ne peut logiquement qu’avoir visé le cas dans lequel il existe deux prestations dissociables (une pour la partie d’un immeuble utilisée à des fins commerciales et l’autre pour la partie à usage d’habitation).

( 3 ) Directive du Conseil du 28 novembre 2006 (JO 2006, L 347, p. 1), dans sa version en vigueur l’année litigieuse (2007) et, dans cette mesure, telle que modifiée en dernier lieu par la directive 2007/75/CE du Conseil, du 20 décembre 2007 (JO 2007, L 346, p. 13).

( 4 ) Le titre VIII, chapitre 3, de la directive TVA ainsi que son annexe IV ont été abrogés par la directive 2009/47/CE du Conseil, du 5 mai 2009, modifiant la directive 2006/112 (JO 2009, L 116, p. 18). En revanche, a été inséré, par la directive 2009/47, un point 10 bis à l’annexe III de la directive TVA, cette annexe contenant la liste des livraisons de biens et des prestations de services pouvant faire l’objet des taux réduits de TVA visés à l’article 98 de cette directive. Le contenu de ce point 10 bis est identique à celui du point 2 de l’ancienne annexe IV de la directive TVA, mais il n’est désormais plus limité dans le temps.

( 5 ) Arrêts du 5 mai 2022, DSR – Montagem e Manutenção de Ascensores e Escadas Rolantes (C‑218/21, EU:C:2022:355, point 29), et du 1er octobre 2020, Staatssecretaris van Financiën (Taux réduit de TVA pour aphrodisiaques) (C‑331/19, EU:C:2020:786, point 24). Voir, également en ce sens, arrêt du 29 juillet 2019, Spiegel Online (C‑516/17, EU:C:2019:625, point 65).

( 6 ) Arrêt du 5 mai 2022, DSR – Montagem e Manutenção de Ascensores e Escadas Rolantes (C‑218/21, EU:C:2022:355, point 31).

( 7 ) [Note précisant que, dans l’original français dudit arrêt DSR – Montagem e Manutenção de Ascensores e Escadas Rolantes, au point 34, la Cour parle de « logements de fonction », traduit en allemand par « Dienstwohnungen »].

( 8 ) Arrêt du 5 mai 2022, DSR – Montagem e Manutenção de Ascensores e Escadas Rolantes (C‑218/21, EU:C:2022:355, point 34).

( 9 ) Arrêt du 5 mai 2022, DSR – Montagem e Manutenção de Ascensores e Escadas Rolantes (C‑218/21, EU:C:2022:355, point 35).

( 10 ) Voir, parmi d’autres, arrêt du 5 mai 2022, DSR – Montagem e Manutenção de Ascensores e Escadas Rolantes (C‑218/21, EU:C:2022:355, points 34 et 35).

( 11 ) Voir, clairement en ce sens, arrêt du 24 octobre 1996, Elida Gibbs (C‑317/94, EU:C:1996:400, point 19). Voir également arrêts du 10 avril 2019, PSM  K  (C‑214/18, EU:C:2019:301, point 40), du 18 mai 2017, Latvijas Dzelzceļš (C‑154/16, EU:C:2017:392, point 69), et du 7 novembre 2013, Tulică et Plavoșin (C‑249/12 et C‑250/12, EU:C:2013:722, point 34).

( 12 ) Voir, en ce sens, arrêts du 1er octobre 2020, Staatssecretaris van Financiën (Taux réduit de TVA pour aphrodisiaques) (C‑331/19, EU:C:2020:786, point 34), et du 9 mars 2017, Oxycure Belgium (C‑573/15, EU:C:2017:189, point 22). Voir, dans un sens similaire, arrêts du 22 avril 2021, Dyrektor Izby Administracji Skarbowej w Katowicach (C‑703/19, EU:C:2021:314, point 37), et du 17 janvier 2013, Commission/Espagne (C‑360/11, EU:C:2013:17, point 86).

( 13 ) Arrêts du 22 septembre 2022, The Escape Center (C‑330/21, EU:C:2022:719, point 34), et du 5 septembre 2019, Regards Photographiques (C‑145/18, EU:C:2019:668, point 42). Voir, en ce sens, arrêts du 9 mars 2017, Oxycure Belgium (C‑573/15, EU:C:2017:189, points 25 et 28), et du 6 mai 2010, Commission/France (C‑94/09, EU:C:2010:253, points 25 et suiv.).

( 14 ) Arrêts du 5 septembre 2019, Regards Photographiques (C‑145/18, EU:C:2019:668, point 43), du 9 novembre 2017, AZ (C‑499/16, EU:C:2017:846, point 24), et du 6 mai 2010, Commission/France (C‑94/09, EU:C:2010:253, point 29).

( 15 ) Arrêt du 5 septembre 2019, Regards Photographiques (C‑145/18, EU:C:2019:668, point 32). En sens similaire, arrêts du 29 novembre 2018, Mensing (C‑264/17, EU:C:2018:968, points 22 et 23 concernant des régimes particuliers), et du 21 mars 2013, PFC Clinic (C‑91/12, EU:C:2013:198, point 23 concernant des cas d’exonération).

( 16 ) Cela ressort particulièrement nettement des points 22 et suivants des observations de la Commission, selon lesquelles la règle d’interprétation stricte serait en l’espèce applicable, mais n’exigerait pas l’interprétation la plus restrictive. Il est permis de nourrir des doutes quant à la plus-value juridique qu’apporte une telle affirmation.

( 17 ) Jurisprudence constante de la Cour : arrêts du 27 juin 2019, Belgisch Syndicaat van Chiropraxie e.a. (C‑597/17, EU:C:2019:544, point 44), du 9 novembre 2017, AZ (C‑499/16, EU:C:2017:846, point 23), et du 11 septembre 2014, K (C‑219/13, EU:C:2014:2207, point 23). Voir, en sens similaire concernant l’article 122 de la directive TVA, arrêt du 3 février 2022, Finanzamt A (C‑515/20, EU:C:2022:73, point 37).

( 18 ) Voir, en ce sens également, arrêt du 9 mars 2017, Oxycure Belgium (C‑573/15, EU:C:2017:189, point 25).

( 19 ) Arrêts du 22 septembre 2022, The Escape Center (C‑330/21, EU:C:2022:719, point 34), du 9 septembre 2021, Phantasialand (C‑406/20, EU:C:2021:720, point 25), et du 6 mai 2010, Commission/France (C‑94/09, EU:C:2010:253, point 28).

( 20 ) Voir arrêts du 5 septembre 2019, Regards Photographiques (C‑145/18, EU:C:2019:668, point 49), du 27 février 2014, Pro Med Logistik et Pongratz (C‑454/12 et C‑455/12, EU:C:2014:111, point 47), et 6 mai 2010, Commission/France (C‑94/09, EU:C:2010:253, point 35).

( 21 ) Éventuellement dans un autre sens, arrêt du 22 septembre 2022, The Escape Center (C‑330/21, EU:C:2022:719, point 39), étant précisé que cet arrêt n’examine pas plus avant si le commentaire administratif de l’administration fiscale en cause dans cette affaire était une instruction administrative concrétisant la législation et que, dans cette affaire, l’État membre ne s’était pas non plus référé à ce commentaire administratif.

Ambigu en revanche, voir arrêt du 5 mai 2022, DSR – Montagem e Manutenção de Ascensores e Escadas Rolantes (C‑218/21, EU:C:2022:355, points 45 et 46), qui portait lui aussi sur l’instruction administrative portugaise en l’espèce pertinente, mais qui évoque toujours une simple pratique administrative susceptible d’être modifiée à tout moment. Toutefois, des instructions administratives concrétisant des dispositions ne sont pas la même chose qu’une « simple pratique administrative » et elles ne sont pas non plus modifiables au gré de l’administration et « dépourvues d’une publicité adéquate ».

( 22 ) Arrêts du 9 septembre 2021, Phantasialand (C‑406/20, EU:C:2021:720, point 36), du 27 juin 2019, Belgisch Syndicaat van Chiropraxie e.a. (C‑597/17, EU:C:2019:544, point 46), et du 9 mars 2017, Oxycure Belgium (C‑573/15, EU:C:2017:189, point 28).

( 23 ) Arrêts du 19 décembre 2019, Segler-Vereinigung Cuxhaven (C‑715/18, EU:C:2019:1138, point 36), du 27 juin 2019, Belgisch Syndicaat van Chiropraxie e.a. (C‑597/17, EU:C:2019:544, point 47), du 9 mars 2017, Oxycure Belgium (C‑573/15, EU:C:2017:189, point 30), du 23 avril 2009, TNT Post UK (C‑357/07, EU:C:2009:248, point 37), et du 6 mai 2010, Commission/France (C‑94/09, EU:C:2010:253, point 40).

( 24 ) Arrêts du 3 février 2022, Finanzamt A (C‑515/20, EU:C:2022:73, point 44), du 9 septembre 2021, Phantasialand (C‑406/20, EU:C:2021:720, point 38), du 27 juin 2019, Belgisch Syndicaat van Chiropraxie e.a. (C‑597/17, EU:C:2019:544, point 48), du 9 novembre 2017, AZ (C‑499/16, EU:C:2017:846, point 31), et du 27 février 2014, Pro Med Logistik et Pongratz (C‑454/12 et C‑455/12, EU:C:2014:111, point 54).

( 25 ) Voir, expressément en ce sens, arrêts du 9 septembre 2021, Phantasialand (C‑406/20, EU:C:2021:720, point 39), et du 9 novembre 2017, AZ (C‑499/16, EU:C:2017:846, point 33).

( 26 ) Arrêt du 7 mars 2017, RPO (C‑390/15, EU:C:2017:174, point 54). Voir, en ce sens également, arrêts du 10 décembre 2002, British American Tobacco (Investments) et Imperial Tobacco (C‑491/01, EU:C:2002:741, point 123), et du 17 octobre 2013, Billerud Karlsborg et Billerud Skärblacka (C‑203/12, EU:C:2013:664, point 35).

( 27 ) Voir, encore expressément en ce sens, arrêt du 17 octobre 2013, Billerud Karlsborg et Billerud Skärblacka (C‑203/12, EU:C:2013:664, point 35).

( 28 ) Arrêt du 24 juin 2019, Commission/Pologne (Indépendance de la Cour suprême) (C‑619/18, EU:C:2019:531, points 42 et 43). Sur la prise en compte du principe de démocratie lors de l’interprétation de directives, voir, également, arrêt du 9 mars 2010, Commission/Allemagne (C‑518/07, EU:C:2010:125, point 41).

( 29 ) Arrêt du 7 mars 2017, RPO (C‑390/15, EU:C:2017:174, points 70 et suiv.).

( 30 ) Arrêt du 3 mars 2011, Commission/Pays-Bas (C‑41/09, EU:C:2011:108, point 66).

( 31 ) Arrêt du 19 décembre 2019, Segler-Vereinigung Cuxhaven (C‑715/18, EU:C:2019:1138, point 38).

( 32 ) Arrêt du 9 novembre 2017, AZ (C‑499/16, EU:C:2017:846, point 36).

( 33 ) Arrêt du 9 septembre 2021, Phantasialand (C‑406/20, EU:C:2021:720, point 48).

( 34 ) Arrêt du 27 juin 2019, Belgisch Syndicaat van Chiropraxie e.a. (C‑597/17, EU:C:2019:544, point 49).

( 35 ) Arrêt du 27 février 2014, Pro Med Logistik et Pongratz (C‑454/12 et C‑455/12, EU:C:2014:111, point 60).

( 36 ) Arrêt du 11 septembre 2014, K (C‑219/13, EU:C:2014:2207, point 34).

( 37 ) Sur la pertinence en matière de TVA d’une telle inégalité de traitement, voir, parmi d’autres, arrêt du 7 mars 2017, RPO (C‑390/15, EU:C:2017:174, points 41 et suiv.).

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