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Document 62021CC0064

Conclusions de l'avocat général Mme T. Ćapeta, présentées le 9 juin 2022.
Rigall Arteria Management sp. z o.o. sp.k. contre Bank Handlowy w Warszawie S.A.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Sąd Najwyższy.
Renvoi préjudiciel – Directive 86/653/CEE – Article 7, paragraphe 1, sous b) – Agents commerciaux indépendants – Opération conclue avec un tiers dont la clientèle a été obtenue antérieurement par l’agent commercial – Rémunération – Nature impérative ou supplétive du droit de l’agent à la commission.
Affaire C-64/21.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2022:453

 CONCLUSIONS DE L’AVOCATE GÉNÉRALE

MME TAMARA ĆAPETA

présentées le 9 juin 2022 ( 1 )

Affaire C‑64/21

Rigall Arteria Management Sp. z o.o. sp. k.

contre

Bank Handlowy w Warszawie S.A.

[demande de décision préjudicielle formée par le Sąd Najwyższy (Cour suprême, Pologne)]

« Renvoi préjudiciel – Directive 86/653/CEE – Article 7, paragraphe 1, sous b) – Agents commerciaux indépendants – Rémunération – Droit à commission en ce qui concerne les opérations conclues pendant la durée du contrat d’agence avec des clients antérieurement acquis par l’agent commercial pour des opérations du même genre – Règle impérative ou non impérative – Possibilité de déroger par contrat »

I. Introduction

1.

La présente affaire trouve son origine dans une demande de décision préjudicielle présentée par le Sąd Najwyższy (Cour suprême, Pologne) portant sur l’interprétation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653/CEE du Conseil, du 18 décembre 1986, relative à la coordination des droits des États membres concernant les agents commerciaux indépendants ( 2 ).

2.

L’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 prévoit que l’agent commercial a droit à une commission sur les opérations commerciales conclues pendant la période couverte par le contrat d’agence lorsque l’opération est conclue avec un tiers que l’agent commercial a préalablement acquis comme client pour des opérations de même nature. Je la désignerai ci-après par la « commission sur les opérations répétées » ( 3 ).

3.

La principale question que soulève la présente affaire est celle de savoir si l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 doit être interprété comme étant une règle impérative ou non impérative et donc de savoir si les parties au contrat d’agence sont ou non autorisées à exclure le droit à la commission sur les opérations répétées de l’agent commercial.

II. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union

4.

L’article 7, paragraphe 1, de la directive 86/653 dispose :

« Pour une opération commerciale conclue pendant la durée du contrat d’agence, l’agent commercial a droit à la commission :

a)

lorsque l’opération a été conclue grâce à son intervention

ou

b)

lorsque l’opération a été conclue avec un tiers dont il a obtenu antérieurement la clientèle pour des opérations du même genre. »

B.   Le droit polonais

5.

L’article 761, paragraphe 1, de l’ustawa z dnia 23 kwietnia 1964 r. Kodeks cywilny (loi du 23 avril 1964 portant code civil) (Dz. U. de 2019, position 1145 – texte unique, tel que modifié) ( 4 ), qui transpose l’article 7, paragraphe 1, de la directive 86/653 en droit polonais, dispose :

« L’agent peut exiger une commission sur les contrats conclus pendant la durée du contrat d’agence, si ceux-ci résultent de son activité ou s’ils ont été conclus avec des clients dont il avait obtenu antérieurement la clientèle pour des contrats du même genre. »

III. Les faits à l’origine du litige au principal, la question préjudicielle et la procédure devant la Cour

6.

Selon ce qui ressort de l’ordonnance de renvoi, Rigall Arteria Management Sp. z o.o. sp.k. (ci-après « Rigall Arteria Management ») a conclu une série de contrats d’agence avec Bank Handlowy w Warszawie S.A. (ci-après « Bank Handlowy ») au cours de la période allant du 1er juin 1999 au 30 juin 2015. En vertu de ces contrats, Rigall Arteria Management et Bank Handlowy avaient respectivement le statut d’agent et de commettant.

7.

Le contrat d’agence portait sur l’exécution de services d’intermédiation financière, ce qui englobait l’intermédiation dans le cadre de l’exercice d’activités accessoires et promotionnelles liées au service et à l’acquisition de cartes de crédit ainsi que d’autres services financiers proposés par Bank Handlowy.

8.

Le contrat d’agence précisait la manière dont l’agent devait être rémunéré, stipulant que la rémunération devait être calculée en fonction du nombre de contrats conclus. Dans la plupart des cas, il s’agissait d’un montant spécifique sur chaque carte de crédit émise ou sur chaque demande de crédit traitée avec succès. Le contrat ne stipulait aucune autre forme de rémunération par commission autre que la commission au titre de contrats conclus avec la participation directe de l’agent.

9.

Bank Handlowy a résilié le contrat d’agence le 17 décembre 2014. Rigall Arteria Management a par conséquent demandé à Bank Handlowy de lui fournir des informations sur la commission due au titre de la période allant du 1er juin 1999 au 31 janvier 2015.

10.

Bank Handlowy a refusé de le faire arguant de ce que les informations fournies jusqu’alors à l’agent avaient permis de calculer la totalité de la commission due à l’agent en vertu du contrat d’agence et qu’il n’y avait par conséquent pas de raisons de fournir de plus amples informations. Rigall Arteria Management a exercé une action devant le Sąd Okręgowy w Warszawie (tribunal régional de Varsovie, Pologne) par laquelle elle demandait la communication d’informations sur les contrats conclus par Bank Handlowy avec des clients antérieurement acquis grâce à l’intermédiation de l’agent.

11.

Par jugement du 20 juin 2016, le Sąd Okręgowy w Warszawie (tribunal régional de Varsovie) a rejeté cette action. Cette juridiction a jugé, entre autres, qu’il ne ressortait pas du libellé du contrat conclu entre les parties que l’agent était en droit de réclamer une commission sur les opérations répétées.

12.

Par arrêt du 28 février 2018, le Sąd Apelacyjny w Warszawie (cour d’appel de Varsovie, Pologne) a rejeté l’appel de Rigall Arteria Management. Cette juridiction a notamment estimé que la commission sur les opérations répétées, telle que visée à l’article 761, paragraphe 1, du code civil mettant en œuvre l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653, est de caractère supplétif, ce qui autorise les parties au contrat d’agence à régler de manière différente cette question. Selon cette juridiction, les circonstances de l’affaire indiquent que les parties ont tacitement exclu le droit de l’agent à la commission en cause ce qui ressort à la fois de ce qu’aucune référence à ce type de commission n’a été faite dans le texte du contrat et du comportement des parties pendant son exécution.

13.

Rigall Arteria Management s’est pourvue en cassation contre cet arrêt devant le Sąd Najwyższy (Cour suprême) qui est la juridiction de renvoi dans la présente affaire. Au soutien de ce pourvoi, Rigall Arteria Management excipe d’une violation de l’article 761, paragraphe 1, du code civil, interprété à la lumière de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653, en ce que cette disposition doit être considérée comme étant de caractère supplétif.

14.

La juridiction de renvoi expose que le point de savoir s’il est possible, en vertu du droit polonais, de modifier ou d’exclure contractuellement le droit de l’agent commercial de réclamer une commission sur les opérations répétées n’a jusqu’ici pas été tranché. Étant donné que la législation polonaise pertinente a transposé la directive 86/653, la juridiction de renvoi estime que son interprétation dépend du point de savoir si l’article 7, paragraphe 1, sous b), de cette directive est une règle impérative ou non impérative.

15.

Dans ces conditions, le Sąd Najwyższy (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« L’article 7, paragraphe 1, sous b), de la [directive 86/653] doit-il être interprété, eu égard à son libellé et à son objectif, en ce sens qu’il confère à l’agent commercial indépendant un droit absolu à une commission sur un contrat conclu pendant la durée du contrat d’agence avec un tiers dont il a obtenu antérieurement la clientèle pour des opérations du même genre, ou ce droit peut-il être exclu dans le contrat ? »

16.

Des observations écrites ont été présentées à la Cour par Rigall Arteria Management, Bank Handlowy, les gouvernements polonais, allemand et italien ainsi que par la Commission européenne. Une audience s’est tenue le 23 mars 2022 lors de laquelle Rigall Arteria Management, Bank Handlowy, les gouvernements polonais et allemand ainsi que la Commission ont présenté des observations orales.

IV. Analyse

17.

La directive 86/653 constitue une exception dans la législation de l’Union en ce qu’elle régit des contrats interentreprises. Elle s’applique aux contrats d’agence ( 5 ) conclus entre l’agent commercial et le commettant qui agissent tous deux en tant que commerçants indépendants ( 6 ). La directive 86/653 s’applique exclusivement aux contrats par lesquels les activités de l’agent sont fournies contre rémunération ( 7 ). Elle n’harmonise que certains aspects de la relation entre les agents commerciaux et les commettants, à savoir, plus précisément, les droits et obligations réciproques de base des parties (chapitre II), la rémunération des agents commerciaux (chapitre III) et la conclusion et la fin des contrats d’agence (chapitre IV). L’article 7, paragraphe 1, sous b) de la directive 86/653 fait partie de son chapitre III (articles 6 à 12).

18.

Il convient d’avoir présent à l’esprit que la directive 86/653 a été adoptée dans les années 80, en vertu de bases juridiques du marché intérieur qui exigeaient l’unanimité ( 8 ), après de longues et complexes négociations, certains États membres contestant totalement la nécessité d’une telle directive ( 9 ). Par conséquent, finalement, elle a été le résultat de compromis entre des États membres ayant des philosophies très différentes quant à la réglementation des contrats en général, et en particulier quant à celle des contrats d’agence.

19.

Il n’est donc nullement surprenant que la Cour ait déjà été appelée à de nombreuses reprises à interpréter les différentes dispositions de la directive 86/653 ( 10 ). Il s’agit toutefois de la première fois que la Cour est appelée à préciser la nature de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ladite directive.

20.

Par sa question, la juridiction de renvoi souhaite en substance savoir si le droit de l’agent commercial à la commission sur les opérations répétées prévue à l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 peut être modifié ou exclu par les parties au contrat d’agence.

21.

Afin de répondre à cette question, j’examinerai tout d’abord la compétence de la Cour pour statuer à titre préjudiciel dans les circonstances de la présente affaire (A). Ensuite, je procéderai à mon examen sur le fond (B), en commençant par des observations d’ordre plus général sur la distinction entre règles impératives et règles non impératives régissant les contrats (B.1), avant de me pencher sur l’interprétation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 (B.2).

22.

Sur la base de cette analyse, je suis parvenue à la conclusion que la Cour est compétente pour statuer à titre préjudiciel dans la présente affaire et que l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 doit être interprété comme étant une règle non impérative qui permet donc aux parties de la modifier ou d’en exclure l’application.

A.   Sur la compétence de la Cour

23.

Aux termes de son article 1er, paragraphe 2, la directive 86/653 s’applique aux agents commerciaux dont les activités consistent notamment à négocier ou conclure « la vente ou l’achat de marchandises ». Or, ainsi qu’il résulte du point 7 des présentes conclusions, il s’avère que la situation dans l’affaire au principal ne porte pas sur la vente de marchandises, mais plutôt sur la vente de services (financiers). Par conséquent, l’on peut s’interroger sur le point de savoir si la Cour est compétente pour statuer à titre préjudiciel dans cette affaire ( 11 ), étant donné que la directive 86/653 ne s’applique pas aux circonstances à l’origine du litige au principal ( 12 ).

24.

Toutefois, comme l’ont indiqué Rigall Arteria Management, le gouvernement allemand et la Commission, il semble que la compétence de la Cour pour répondre à la question posée dans la présente affaire puisse être fondée sur la jurisprudence Dzodzi ( 13 ).

25.

Appliquant cette jurisprudence, la Cour a déjà jugé que, lorsqu’une législation nationale transposant la directive 86/653 adopte une solution unique pour tous les types de contrats d’agence, elle est compétente pour interpréter cette directive quand bien même l’affaire trouve son origine dans une situation qui concerne des services et non des marchandises. Établir une compétence dans de telles affaires est considéré être dans l’intérêt de l’ordre juridique de l’Union aux fins de prévenir de futures divergences d’interprétation ( 14 ).

26.

En outre, ainsi que la Cour l’a souligné dans sa jurisprudence récente rendue hors du contexte de la directive 86/653, une interprétation par la Cour de dispositions de l’Union dans des situations ne relevant pas du champ d’application de la législation de l’Union se justifie lorsque de telles dispositions ont été rendues applicables par le droit national de manière directe et inconditionnelle afin d’assurer un traitement identique de ces situations et de celles équivalentes relevant du champ d’application du droit de l’Union ( 15 ).

27.

Dans la présente affaire, il ressort des éléments transmis par la juridiction de renvoi en réponse à une demande d’éclaircissements de la Cour que, lors de la transposition en droit national (dans son code civil) de la directive 86/653, le législateur polonais a exprimé son intention de traiter de manière uniforme les contrats d’agence portant sur des marchandises et ceux portant sur des services, s’agissant des dispositions découlant du droit de l’Union.

28.

Dans ces conditions, il convient de considérer que la législation polonaise a rendu l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 applicable de manière directe et inconditionnelle à la situation en cause dans l’affaire au principal et qu’il est dans l’intérêt de l’ordre juridique de l’Union que la Cour statue sur la demande de décision préjudicielle présentée par la juridiction de renvoi.

29.

Par conséquent, j’estime que la Cour est compétente pour statuer à titre préjudiciel dans la présente affaire.

B.   Sur le fond

1. Observations préliminaires sur la distinction entre les règles impératives et les règles non impératives

30.

Les droits des contrats des États membres opèrent une distinction entre les règles impératives et les règles non impératives relatives aux droits et obligations essentiels des parties au contrat ( 16 ). En résumé, il ne peut pas être dérogé à des règles impératives et elles ne souffrent donc aucune exception de la part des parties, tandis que les règles non impératives n’ont pas à faire partie du contrat si les parties souhaitent aménager leurs relations de manière différente.

31.

En outre, de nombreux ordres juridiques admettent différents types de règles impératives et non impératives ( 17 ).

32.

Les règles impératives peuvent l’être totalement, ce qui signifie que les parties ne peuvent pas s’en écarter. Elles peuvent également être semi‑impératives, auquel cas de telles règles peuvent souffrir d’une exception de la part des parties, mais seulement à certaines conditions. Les règles semi‑impératives peuvent, par exemple, autoriser des dérogations qui sont dans l’intérêt de la partie la plus faible ou qui préservent l’essence de la règle ou certains minima imposés par le législateur.

33.

De même, il n’existe pas qu’un seul type de règles non impératives. Le plus souvent, par ce terme, nous faisons référence aux règles par défaut dites « complémentaires » ou « classiques ». De telles règles par défaut servent à combler des vides laissés, intentionnellement ou non, par les parties dans le contrat qui laissent non régis certains aspects de leur relation contractuelle. Toutefois, il existe également d’autres types de règles non impératives parmi lesquelles les règles-types. Celles-ci servent de modèle et d’aide à la rédaction en indiquant de possibles solutions quant à la manière de résoudre certaines questions. Les règles-types semblent relever d’au moins deux catégories : premièrement, elles peuvent proposer aux parties une liste d’options tout en n’en excluant pas d’autres (ce que je désignerai comme une « règle-type non impérative ouverte ») et, deuxièmement, elles peuvent restreindre les parties uniquement aux options qui y sont spécifiquement prévues.

34.

Enfin, il convient de noter que les droits nationaux des contrats utilisent différentes techniques pour indiquer si certaines règles sont ou non impératives et quelle est leur nature. Souvent, ces droits sont muets quant à la nature juridique d’une règle particulière et laissent aux juridictions le soin de trancher de telles questions.

35.

La directive 86/653 ne fait pas exception à la description qui précède. Elle contient différents types de règles impératives et non impératives et elle utilise plusieurs techniques pour décrire leur nature ( 18 ).

36.

S’agissant des règles impératives, certaines dispositions de la directive 86/653 énoncent expressément qu’aucune dérogation n’est autorisée aux parties ( 19 ). Toutefois, certaines dispositions sont de nature semi-impératives. Soit elles imposent des règles minimales auxquelles les parties ne peuvent pas déroger ( 20 ), soit elles autorisent une dérogation, mais uniquement si ce n’est pas au détriment de l’agent commercial ( 21 ). Certaines dérogations ne sont autorisées qu’après la fin du contrat et ne peuvent pas être convenues d’avance ( 22 ).

37.

Pour ce qui est des règles non impératives, certaines dispositions de la directive 86/653 indiquent clairement que les règles prévues par la disposition pertinente sont des règles par défaut qui s’appliquent en l’absence d’accord à ce sujet entre les parties ( 23 ).

38.

Enfin, certaines dispositions de la directive 86/653 sont muettes quant à leur nature impérative ou non impérative ( 24 ). Tel est le cas de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de cette directive dont l’interprétation est en cause dans la présente affaire. De fait, la directive 86/653 est muette quant à la nature de son article 7 dans son ensemble.

2. Sur l’interprétation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653

a) Le libellé

39.

Pour rappel, la question dans la présente affaire est de savoir si les parties à un contrat d’agence sont autorisées ou non à écarter par contrat la disposition prévue à l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 qui confère à l’agent commercial un droit à commission sur les opérations répétées.

40.

Selon moi, et nonobstant l’absence d’indication expresse quant à la nature impérative ou non de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653, cette affaire est un des rares exemples dans lesquels la réponse à la question de la juridiction de renvoi peut être déduite du libellé de la disposition dont l’interprétation est demandée.

41.

Comme indiqué au point 4 des présentes conclusions, l’article 7, paragraphe 1, de la directive 86/653 prévoit que, pour une opération commerciale conclue pendant la durée du contrat d’agence, l’agent commercial a droit à la commission :

« a)

lorsque l’opération a été conclue grâce à son intervention

ou

b)

lorsque l’opération a été conclue avec un tiers dont il a obtenu antérieurement la clientèle pour des opérations du même genre » ( 25 ).

42.

Il peut être déduit de l’emploi du terme « ou » dans cette disposition qu’un agent commercial peut avoir droit à l’un ou l’autre des types de commission visés aux points a) et b) de l’article 7, paragraphe 1, de la directive 86/653 ( 26 ).

43.

Les mots n’ont, à mon avis, aucun sens en dehors du contexte dans lequel ils sont utilisés. Le libellé de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653, qui, par conséquent, ne peut être lu séparément de l’article 7, paragraphe 1, sous a), de cette directive, suggère que cette disposition contient une règle-type non impérative ouverte (voir point 33 des présentes conclusions).

44.

Par conséquent, selon moi, l’article 7, paragraphe 1, de la directive 86/653 propose aux parties des suggestions parmi lesquelles elles peuvent choisir lors de la conclusion du contrat. Les deux solutions énumérées peuvent avoir été choisies par le législateur de l’Union comme les manières les plus communes de convenir par contrat une commission en ce qui concerne les contrats d’agence ( 27 ). Choisir entre ces options épargne aux parties les coûts de transaction qui sont générés lorsque les contrats sont négociés ( 28 ). Toutefois, les parties ne sont pas liées par ces règles-types, mais peuvent librement choisir une autre option.

45.

L’article 7, paragraphe 1, de la directive 86/653 ne faisant que proposer des suggestions aux parties, non seulement cette disposition ne saurait être qualifiée de « règle impérative », mais elle ne peut pas non plus être comprise comme étant une règle par défaut non impérative. En effet, elle ne fixe pas une règle unique régissant le droit de l’agent commercial à une commission qui pourrait servir à combler une lacune dans le contrat si les parties en avaient laissé une ouverte ( 29 ). Elle propose plutôt un choix. La séparation par « ou » entre le point a) et le point b) de l’article 7, paragraphe 1, de la directive 86/653 rend impossible pour les parties au contrat d’agence, ou pour une juridiction statuant sur un litige entre elles, d’avoir recours à cette disposition sans avoir au préalable fait un choix par rapport aux solutions qu’elle propose.

46.

Il est vrai que, parfois, « ou » peut être lu comme « et » ( 30 ). Cela n’aurait toutefois aucun sens en ce qui concerne l’article 7, paragraphe 1, de la directive 86/653. Le libellé de son point b) implique que ce qui est décrit à son point a) se soit déjà produit : une opération a été conclue grâce à l’intervention directe de l’agent commercial. S’il se peut qu’un agent commercial ne puisse percevoir que la commission visée au point a), il serait difficile (bien que non impossible) d’imaginer qu’un agent commercial ne perçoive que la commission visée au point b) au titre d’opérations conclues avec la clientèle que l’agent a « préalablement obtenues » pour le commettant sans présumer l’existence de la commission sur des opérations conclues avec cette clientèle grâce à l’intervention directe de l’agent visée au point a). Si le législateur entendait créer un droit à la commission au titre du point b) qui englobe également la commission au titre du point a), deux phrases séparées par un « ou » serait une étrange manière de l’exprimer.

47.

Une interprétation qui permettrait de lire l’article 7, paragraphe 1, de la directive 86/653 comme une unique phrase ouvrant à l’agent commercial un droit à commission tant au titre d’une intervention directe qu’au titre d’interventions répétées exigerait de transformer le « ou » en« et » et de faire abstraction de ce que le point b) de cette disposition implique le point a) de ladite disposition. Néanmoins, même dans ce cas, une telle interprétation ne reviendrait toujours qu’à transformer l’article 7, paragraphe 1, de la directive 86/653 en une unique règle sans pour autant résoudre la question de savoir si cette règle est une règle impérative ou non impérative.

48.

Une lecture aussi extensive de la disposition en cause ne se justifie pas, ainsi que je vais le démontrer, par des raisons systémiques tenant à la liberté contractuelle ou par les objectifs de la directive 86/653, sa genèse et le contexte dans lequel s’inscrit l’article 7, paragraphe 1, sous b), de cette directive ( 31 ). En d’autres termes, les autres raisons liées aux critères d’interprétation sur lesquels je vais maintenant me pencher étayent également la position selon laquelle l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 doit être interprété comme étant une règle non impérative.

b) Les raisons systémiques tenant à la liberté contractuelle

49.

Selon une jurisprudence constante de la Cour, les dispositions du droit de l’Union doivent être interprétées à la lumière des droits fondamentaux qui font partie intégrante des principes généraux du droit dont la Cour assure le respect et qui sont désormais inscrits dans la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») ( 32 ). Au vu de cette exigence d’interprétation systémique, j’observerai tout d’abord que considérer l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 comme étant une règle non impérative est conforme au principe de liberté contractuelle.

50.

La liberté contractuelle, telle qu’invoquée par Bank Handlowy et le gouvernement allemand, constitue un principe fondamental des ordres juridiques nationaux et de celui de l’Union. Elle est reconnue à l’article 16 de la Charte comme faisant partie de la liberté d’entreprise ( 33 ).

51.

Les contrats d’agence sont des contrats commerciaux (entre entreprises) en ce sens que tant les agents commerciaux que les commettants sont des commerçants ( 34 ). Par conséquent, les relations d’agence commerciale sont en principe régies par la liberté contractuelle qui protège le droit des deux parties d’exercer une activité entrepreneuriale. Cette liberté, qui englobe l’autonomie des parties dans la détermination du contenu du contrat, n’est pas absolue, mais peut faire l’objet de limitations justifiées qui doivent notamment être prévues par la loi et être proportionnées, ainsi que l’exige l’article 52, paragraphe 1, de la Charte ( 35 ).

52.

En l’espèce toutefois, il n’existe dans la directive 86/653 aucune disposition indiquant clairement que l’article 7, paragraphe 1, sous b), de cette directive vise à limiter la liberté contractuelle.

53.

Bien que la Commission ait affirmé lors de l’audience que des objectifs d’intérêt général, à savoir la protection des agents commerciaux en tant que partie la plus faible au contrat d’agence, justifient une restriction de la liberté contractuelle des parties en ce qui concerne la commission prévue à l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653, il n’en demeure pas moins que le droit de l’Union pertinent ne prévoit pas une telle justification conforme à l’article 52, paragraphe 1, de la Charte.En outre, une telle limitation ne paraît ni nécessaire ni appropriée pour protéger les agents commerciaux dans toutes les situations possibles comme cela sera exposé ci-dessous (voir points 63 et 65 des présentes conclusions).

54.

Dans ces conditions, il n’existe dans la directive 86/653 aucune base légale permettant d’interpréter son article 7, paragraphe 1, sous b), comme une règle impérative ou semi-impérative en l’absence de toute limitation dûment justifiée, en conformité avec l’article 16 et l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, apportée à la liberté contractuelle des parties en lien avec la possibilité de choisir librement le type de commission.

c) Les objectifs

55.

Interpréter l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 comme étant une règle non impérative n’est pas en contradiction avec les objectifs poursuivis par cette directive.

56.

Il se peut que l’appréciation selon laquelle les agents commerciaux sont les parties faibles des contrats d’agence ait exercé une influence sur le choix du législateur de l’Union d’inclure des dispositions impératives dans la directive 86/653. Néanmoins, la protection de l’agent commercial n’est pas le seul, ni même le principal, objectif de cette directive ( 36 ). En tout état de cause, le fait que les préoccupations relatives à la position de faiblesse de l’agent commercial aient exercé une influence sur le choix de certaines solutions au cours du processus décisionnel ne saurait conduire, comme le suggère la Commission, à la conclusion que la directive 86/653 contient uniquement des règles impératives dont l’objectif est de protéger les agents commerciaux.

57.

Il ressort clairement des deuxième et troisième considérants de la directive 86/653 que le principal objectif de celle-ci est de créer un marché intérieur de l’agence commerciale et d’éliminer les obstacles aux activités transfrontalières des agents commerciaux et des commettants ( 37 ). À cet égard, ainsi que je l’ai déjà évoqué dans de précédentes conclusions ( 38 ), le choix de la base juridique de l’acte en cause est une indication de la volonté du législateur objectivement vérifiable en droit de l’Union. La directive 86/653 a été adoptée sur une double base juridique liée au marché intérieur (voir point 18 des présentes conclusions). Cela indique que l’idée principale sous-tendant cette directive est de lever les obstacles aux contrats d’agence transfrontaliers ( 39 ).

58.

L’objectif est atteint en supprimant « les différences entre les législations nationales » reconnues comme principal obstacle au deuxième considérant de la directive 86/653. Proposer aux parties aux contrats d’agence un ensemble de règles harmonisées (qu’elles soient impératives, semi-impératives, par défaut ou types) à travers l’Union est donc la méthode choisie par le législateur de l’Union pour faciliter aux agents commerciaux et aux commettants établis dans des États membres différents la conclusion de contrats d’agence ( 40 ).

59.

En décidant du contenu des règles harmonisées, assurer la protection des agents commerciaux en tant que partie la plus faible est une considération qui peut, et doit, être prise en compte par le législateur de l’Union ( 41 ). Cela ne signifie toutefois pas qu’une telle protection soit un objectif autonome de la directive 86/653 et ne peut d’ailleurs pas l’être eu égard à la répartition actuelle des compétences entre l’Union et les États membres ( 42 ).

60.

Cela dit, protéger de manière adéquate les agents commerciaux a été reconnu comme un intérêt légitime par la Cour ( 43 ). La protection des agents commerciaux est par conséquent un des objectifs s’intégrant dans le système de la directive 86/653.

61.

Se pencher sur la position plus faible des agents vise à restaurer l’équilibre économique dans la relation juridique entre les agents commerciaux et les commettants ( 44 ). Une intervention législative est donc nécessaire dans les situations dans lesquelles le législateur estime qu’il existe une défaillance importante sur le marché ( 45 ).

62.

Le gouvernement polonais et la juridiction de renvoi ont laissé entendre qu’une telle défaillance existe sur le marché des agences commerciales en Pologne. Ils ont expliqué que ce marché se caractérise par une asymétrie dans laquelle les commettants sont en position de proposer aux agents des contrats types sans leur laisser la possibilité de négocier les termes du contrat.

63.

Quand bien même cela serait caractéristique du marché polonais des agences commerciales, ou tout au moins de ce marché dans le domaine des services financiers, la directive 86/653 ne saurait être uniquement interprétée de manière à convenir au marché d’un État membre. Il peut donc être considéré que, si le législateur de l’Union avait constaté dans l’ensemble de l’Union une telle asymétrie du pouvoir de négociation entre les agents commerciaux et les commettants, il y aurait répondu de manière appropriée. Ce qui vient à l’esprit est, par exemple, la nullité des clauses contractuelles non négociées créant un déséquilibre important. Une telle solution, et il peut en exister d’autres, aurait un caractère moins limitatif de la liberté contractuelle qu’une règle impérative privant les parties de la possibilité de négocier le type de commission.

64.

De plus, comme l’a indiqué le gouvernement allemand, les systèmes juridiques des États membres comprennent des principes de protection générale des parties au contrat lorsque l’équilibre entre elles est particulièrement inégal. De telles règles s’appliqueraient à des agents commerciaux, par exemple, dans une situation dans laquelle ils ont été privés de manière excessive de commissions.

65.

En outre, il ne faut pas oublier que la directive 86/653 régit un large éventail de réalités commerciales possibles dans lesquelles les intérêts tant des agents commerciaux que des commettants peuvent varier ( 46 ). Interpréter l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 comme étant une règle impérative pourrait, dans certains types de relations d’agence commerciale, ne pas être protecteur des agents commerciaux. Or, si cette disposition devait être interprétée comme étant impérative, cela empêcherait l’agent commercial et le commettant de trouver la solution qui convient le mieux à leur contrat.

66.

Par conséquent, interpréter l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 comme étant impératif ne conduit pas nécessairement à protéger les agents commerciaux et peut, comme l’a indiqué Bank Handlowy, être de nature à perturber le fonctionnement du marché intérieur des agences commerciales. Les commettants qui n’ont pas pris en compte dans leurs calculs la nécessité de payer la commission en cause pourraient recourir à d’autres solutions telles que, par exemple, réduire le taux de commission de base, limiter ou exclure les frais exposés par l’agent commercial qui sont remboursés par le commettant ou d’autres éléments de la rémunération ou encore tout simplement ne plus continuer à faire appel à un agent commercial.

67.

Enfin et surtout, il convient de souligner que les agents commerciaux ne sont pas seulement protégés par des règles impératives, mais le sont aussi par la sécurité juridique ( 47 ) qu’apportent des règles harmonisées ( 48 ). Préciser la nature de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 contribuera donc aux objectifs poursuivis par cette directive, que cette disposition soit interprétée comme étant impérative ou non impérative.

d) La genèse

68.

La genèse de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 plaide également dans le sens d’interpréter cette disposition comme étant non impérative.

69.

Ainsi que l’illustre la jurisprudence sur la directive 86/653 ( 49 ), la Cour a considéré que la genèse d’une mesure de l’Union aide à discerner l’intention du législateur de l’Union sous-tendant cette mesure ou une disposition particulière de celle-ci. Il en va ainsi en particulier lorsqu’une modification de laquelle peut être déduite l’intention du législateur a été apportée à la disposition en question au cours du processus décisionnel tel que c’est le cas en l’espèce.

70.

Dans la proposition initiale de la Commission ( 50 ), l’article 7, paragraphe 1, de la directive 86/653 apparaissait en tant que projet d’article 12, paragraphe 1 ( 51 ). Celui-ci était intégré dans une liste spécifique de dispositions impératives de la proposition de directive figurant dans le projet d’article 35 qui énonçait : « Est nulle toute stipulation par laquelle les parties dérogent au détriment de l’agent aux dispositions énumérées ci-après » ( 52 ).

71.

Dans son avis sur la proposition ( 53 ), le Conseil économique et social européen a notamment souligné que le projet d’article 35 revêtait une importance fondamentale pour l’ensemble de la directive en ce qu’il déterminait le contenu et les limites de la volonté des parties contractantes dans les relations contractuelles d’agence commerciale et qu’il devait par conséquent être maintenu dans la proposition de directive.

72.

En revanche, le Parlement européen, lors de sa première lecture de la proposition ( 54 ), a estimé que la longue liste de dispositions impératives figurant à l’article 35 rendait la directive trop rigide et, par conséquent, a invité la Commission à présenter une nouvelle formulation de cet article.

73.

Par conséquent, dans la proposition modifiée de la Commission ( 55 ), dans le projet d’article 35 « [p]our répondre à ce souci de souplesse, l’énumération a été réduite » et plusieurs dispositions ont été rayées. Ainsi, la liste des dispositions impératives dans la version modifiée de cette disposition faisait référence en particulier à la commission mentionnée au point a) du projet d’article 12, paragraphe 1, mais ne renvoyait plus aux autres points, notamment au point b) de ladite disposition visant la commission sur les opérations répétées ( 56 ).

74.

Au cours du processus décisionnel, il y a eu un consensus pour effacer de la liste des dispositions impératives du projet d’article 35 la référence qui y était faite à l’article 12, paragraphe 1, sous a) ( 57 ). En définitive, la décision a été prise de simplement supprimer l’article 35 et qu’à la place, chaque disposition devrait séparément préciser sa portée impérative ( 58 ). Cette approche a été maintenue dans la version finale de la directive 86/653 ( 59 ).

75.

Par conséquent, il peut être déduit du retrait de la disposition correspondant à l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 de la liste des dispositions impératives figurant dans le projet d’article 35 ainsi que de l’accord pour préciser article par article la portée impérative ou non des dispositions de la directive que, en l’absence d’une indication explicite en ce sens, l’intention du législateur de l’Union n’était pas que l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 soit une règle impérative ( 60 ).

76.

À cet égard, je ne suis pas convaincue par l’argument, avancé par Rigall Arteria Management, le gouvernement polonais et la Commission, qui, en substance, conteste la pertinence de la genèse de la directive 86/653 en raison des modifications importantes ayant abouti à un texte final de cette directive qui diffère des propositions de la Commission et du fait que le législateur de l’Union a adopté une approche différente à l’article 6 de la directive 86/653, article qu’ils considèrent comme étayant une interprétation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de cette directive comme étant impératif.

77.

Il est exact que de nombreuses dispositions qui figuraient dans la proposition initiale et dans la proposition modifiée ne se trouvent pas dans la directive 86/653. Néanmoins, des dispositions correspondant à l’article 6 de la directive 86/653 apparaissaient dans ces deux propositions ( 61 ). En outre, le fait que le libellé de l’article 6, paragraphe 3, de la directive 86/653 ne figurait pas dans ces propositions, mais a été ajouté plus tard au cours du processus décisionnel ( 62 ), n’évince ou n’invalide pas le choix opéré par le législateur de l’Union de fixer séparément pour chaque article le caractère impératif des dispositions de cette directive, ce qui n’est pas le cas de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ladite directive.

e) Le contexte

78.

L’interprétation proposée de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 comme étant non impératif est cohérente avec d’autres dispositions de cette directive.

79.

Comme cela découle de la genèse de la directive 86/653 et ainsi que l’ont souligné Bank Handlowy et les gouvernements allemand et italien, l’économie générale de cette directive montre que les dispositions auxquelles il n’est pas permis aux parties de déroger sont fixées de manière précise et détaillée et que leur caractère impératif est expressément énoncé dans l’article particulier concerné. C’est notamment le cas en ce qui concerne les dispositions de la directive qui figurent à son chapitre III relatif à la rémunération, comme le montrent l’article 10, paragraphe 4, l’article 11, paragraphe 3, et l’article 12, paragraphe 3, de cette directive. Il existe aussi des dispositions similaires figurant dans d’autres chapitres de la directive 86/653 ( 63 ).

80.

Cela incite fortement à penser que les règles fixées par la directive 86/653 qui ne sont pas explicitement prévues comme étant impératives sont en principe des règles non impératives ( 64 ). Il s’ensuit que, en l’absence de telles indications explicites dans la directive 86/653, l’article 7, paragraphe 1, sous b), de cette directive doit être considéré comme étant une règle non impérative. Comme l’a souligné Bank Handlowy, il semble illogique que le législateur de l’Union ait prévu dans ladite directive une série de dispositions explicitement décrites comme impératives si toutes les dispositions de cette dernière ont un caractère impératif.

81.

Rigall Arteria Management, le gouvernement polonais et la Commission ont présenté un argument dans le sens d’interpréter l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 comme étant impératif qui découle de l’article 6, paragraphe 3, de ladite directive. Cette disposition énonce que « [l]es articles 7 à 12 ne s’appliquent pas dans la mesure [où] l’agent commercial n’est pas rémunéré en tout ou en partie à la commission ». Ils en concluent que, a contrario, les articles 7 et 12 de la directive 86/653 s’appliquent impérativement si les parties optent pour une rémunération de l’agent commercial sous la forme d’une commission (même si la commission est choisie comme une partie de la rémunération). Cela signifie que l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 est une disposition impérative lorsque les agents commerciaux sont rémunérés à la commission.

82.

À mon avis, cet argument ne saurait convaincre. Je peux admettre que l’article 6, paragraphe 3, de la directive 86/653 rende l’article 7 de ladite directive applicable lorsque les parties ont convenu d’une rémunération à la commission. Néanmoins, le fait que cette dernière disposition soit applicable ne fait pas d’elle une règle impérative.

83.

En outre, comme l’a indiqué Bank Handlowy, dès lors que l’article 6, paragraphe 3, de la directive 86/653 autorise expressément les parties à totalement exclure la commission comme forme de rémunération de l’agent commercial, l’exclusion d’une commission du type de celle prévue à l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ladite directive semble être également permise.

84.

L’article 6, paragraphe 3, de la directive 86/653 suggère donc que les parties au contrat d’agence peuvent librement décider de la manière d’aménager la rémunération de l’agent commercial et que, si elles optent pour la commission, elles peuvent recourir aux règles prévues aux articles 7 à 12 de cette directive. Cela englobe les règles-types relatives aux différents types possibles de commission qui sont fixés à l’article 7, paragraphe 1, de ladite directive.

85.

Il n’est donc pas en contradiction avec l’article 6, paragraphe 3, de la directive 86/653 d’interpréter l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ladite directive comme étant non impératif.

86.

Par ailleurs, au soutien du caractère impératif de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653, Rigall Arteria Management a avancé un argument qui se fonde sur les articles 17 à 19 de ladite directive selon lequel, dès lors que le droit à une commission sur les opérations répétées ne serait pas impératif, cela pourrait avoir une incidence sur le montant de l’indemnité ou de la réparation à laquelle l’agent commercial peut prétendre à la fin du contrat d’agence sur le fondement de l’article 17 de ladite directive. Étant donné que l’article 19 de la directive 86/653 interdit de déroger, au détriment de l’agent commercial, aux articles 17 et 18 de ladite directive, cet argument revient en substance à affirmer qu’interpréter l’article 7, paragraphe 1, sous b), de cette directive comme étant non impératif reviendrait à porter atteinte à la nature semi-impérative des articles 17 et 18 de ladite directive ( 65 ).

87.

Cet argument ne saurait convaincre. Premièrement, ainsi que cela est reconnu par la jurisprudence de la Cour ( 66 ), la détermination de l’indemnité et de la réparation prévues aux articles 17 et 18 de la directive 86/653 est examinée sur la base de l’ensemble des circonstances pertinentes relatives à chaque relation contractuelle d’agence individuelle, et ne dépend pas exclusivement de la perte de commissions par l’agent. Deuxièmement, quand bien même le montant de la commission que gagnait en moyenne un agent commercial pourrait avoir une incidence sur le montant de l’indemnité à laquelle a droit l’agent après la fin du contrat, cela n’affecte pas la nature semi-impérative des articles 17 et 18 de la directive 86/653, pas plus que cela ne constitue un argument en faveur de la nature impérative de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ladite directive.

88.

Il n’est donc pas en contradiction avec les articles 17 à 19 de la directive 86/653 d’interpréter l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ladite directive comme étant non impératif.

89.

Enfin, Rigall Arteria Management, le gouvernement polonais et la Commission affirment qu’il serait illogique de la part du législateur de l’Union de subordonner à l’accord des parties certaines conditions relatives au droit à commission, mais pas d’autres, telles que les règles relatives à l’extinction du droit à commission de l’agent commercial fixées à l’article 11 de la directive 86/653.

90.

Premièrement, il est nécessaire d’expliquer que la question du moment auquel naît le droit à commission, ou celui de son extinction, ne revêt une importance qu’à la condition que ce droit à commission ait même existé. Il n’y a aucune raison de rendre impératif un type de commission uniquement parce qu’il existe des règles impératives relatives à l’extinction de ce droit à commission une fois que celui-ci a été convenu entre les parties.

91.

Deuxièmement, dans la jurisprudence ( 67 ), la Cour a estimé que l’article 7 de la directive 86/653 devait être lu à la lumière des articles 10 et 11 de ladite directive qui fixent des règles qui concernent de manière générale le moment où le droit à commission de l’agent commercial est dû à l’agent commercial et celui où il s’éteint. Il convient néanmoins de souligner que, dans la jurisprudence, il n’a pas été question du caractère impératif de l’article 7 de la directive 86/653. En outre, les articles 10 et 11 contiennent expressément, à l’article 10, paragraphe 4, et à l’article 11, paragraphe 3, l’indication qu’il est interdit aux parties d’y déroger au détriment de l’agent commercial. Tel n’est pas le cas de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653.

92.

Par conséquent, il n’est pas en contradiction avec les articles 10 et 11 de la directive 86/653 d’interpréter l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ladite directive comme étant non impératif.

93.

Avant de conclure, il convient d’ajouter que, selon les informations dont dispose la Cour, interpréter l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 comme étant non impératif correspond à l’approche adoptée dans le droit et la jurisprudence de plusieurs États membres parmi lesquels l’Allemagne ( 68 ) , l’Italie, l’Autriche et la Pologne ( 69 ), entre autres ( 70 ). Une telle interprétation est soutenue par une partie importante de la doctrine ( 71 ), ce qui inclut certains groupes de recherche sur le droit privé européen ( 72 ).

94.

Par conséquent, sur la base de l’ensemble des raisons exposées dans les présentes conclusions, je suis d’avis que l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 devrait être interprété comme étant une règle non impérative et qu’il peut donc être modifié ou exclu par les parties à un contrat d’agence.

V. Conclusion

95.

Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre à la question posée par le Sąd Najwyższy (Cour suprême, Pologne) de la manière suivante :

L’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653/CEE du Conseil, du 18 décembre 1986, relative à la coordination des droits des États membres concernant les agents commerciaux indépendants doit être interprété en ce sens que le droit de l’agent commercial à la commission visé dans cette disposition peut être contractuellement modifié ou exclu.


( 1 ) Langue originale : l’anglais.

( 2 ) JO 1986, L 382, p. 17.

( 3 ) Voir, par exemple, Saintier, S., et Scholes, J., Commercial Agents and the Law, Routledge, Londres, 2005, p. 116 à 118 ; Singleton, S., Commercial Agency Agreements : Law and Practice, 5e éd., Bloomsbury Professional, Londres, 2020, p. 99.

( 4 ) Ci-après le « code civil ».

( 5 ) Par un contrat d’agence, l’agent commercial indépendant et le commettant établissent une relation durable. La tâche de l’agent commercial est de trouver des clients pour le commettant, de négocier avec eux et, si possible, permettre la conclusion d’opérations commerciales entre le commettant et ces clients. Voir directive 86/653, notamment article 1er, paragraphe 2, et article 3. Une telle description des tâches de l’agent commercial repose sur des relations commerciales concrètes telles qu’elles se présentent dans le contexte économique réel. Voir, à cet égard, arrêt du 12 décembre 1996, Kontogeorgas (C‑104/95, EU:C:1996:492, point 26).

( 6 ) Pour une analyse de la directive 86/653, voir Saintier, S., « Commercial agency in European Union private law », dans Twigg-Flesner, C. (éd.), The Cambridge Companion to European Union Private Law, Cambridge University Press, Cambridge, 2010, p. 273 à 285 ; voir aussi références citées aux notes en bas de page 3 et 71 des présentes conclusions. Pour une discussion plus approfondie, voir, par exemple, Jansen, N., et Zimmermann, R., Commentaries on European Contract Laws, Oxford University Press, Oxford, 2018, p. 587 à 594.

( 7 ) En vertu de l’article 2, paragraphe 1, premier tiret, de la directive 86/653, celle-ci ne s’applique pas aux agents commerciaux dont l’activité n’est pas rémunérée.

( 8 ) La directive 86/653 a été adoptée avant l’introduction de l’actuel article 114 TFUE dans les traités par l’Acte unique européen qui est entré en vigueur le 1er juillet 1987. Elle était fondée sur l’article 57, paragraphe 2, et l’article 100 du traité CEE (actuels article 53, paragraphe 1, et article 115 TFUE).

( 9 ) Voir, par exemple, document du Conseil 7251/1/83 REV 1, du 14 juin 1983 ; document du Conseil 9274/84, du 19 septembre 1984 ; document du Conseil 7242/85, du 6 juin 1985. Voir, également, à cet égard, Lando, O., « The EEC Draft Directive Relating to Self-Employed Commercial Agents : The English Law Commission versus the EC Commission », Rabels Zeitschrift für ausländisches und internationales Privatrecht, vol. 44, 1980, p. 1.

( 10 ) Il existe déjà près de vingt arrêts de la Cour en réponse à des demandes de décisions préjudicielles de juridictions nationales portant sur la directive 86/653. Néanmoins, en dépit du manque de clarté du texte de cette directive, la Commission a estimé que la directive 86/653 a été un succès puisque le nombre d’opérations d’agence transfrontalières a augmenté. Voir, à cet égard, document de travail de la Commission du 16 juillet 2015 intitulé « Evaluation of Directive 86/653 (REFIT Evaluation) » [Évaluation de la directive 86/653 dans le cadre du programme pour une réglementation affûtée et performante (REFIT) disponible uniquement dans la version en langue anglaise], SWD(2015) 146 final, ci-après le « rapport REFIT ».

( 11 ) Il convient de noter qu’alors même qu’une partie des contrats d’agence en cause ont été conclus avant la date de l’adhésion de la Pologne à l’Union, le 1er mai 2004 (voir point 6 des présentes conclusions), aucune question quant à l’application dans le temps de la directive 86/653 à la présente affaire n’a été soulevée devant la Cour. En tout état de cause, cela ne semble pas problématique au vu de la jurisprudence de la Cour, étant donné que les effets juridiques de ces contrats se sont poursuivis après cette date. Voir, à cet égard, arrêt du 3 juillet 2019, UniCredit Leasing (C‑242/18, EU:C:2019:558, point 32). En effet, dans le contexte de la directive 86/653, la Cour n’a pas soulevé ce problème dans sa jurisprudence portant sur des faits s’étendant avant et après l’adhésion d’un État membre à l’Union. Voir arrêt du 17 octobre 2013, Unamar (C‑184/12, EU:C:2013:663, point 20) ; voir, également, à cet égard, conclusions de l’avocat général Jacobs dans l’affaire Centrosteel (C‑456/98, EU:C:2000:137, points 21 à 25).

( 12 ) Voir, sur ce point, ordonnance du 6 mars 2003, Abbey Life Assurance (C‑449/01, non publiée, EU:C:2003:133, points 13 à 20) (concernant des contrats d’assurance vie, de rente et d’épargne) ; arrêts du 3 décembre 2015, Quenon K. (C‑338/14, EU:C:2015:795, point 16) (concernant des services bancaires et d’assurance), et du 17 mai 2017, ERGO Poist’ovňa (C‑48/16, EU:C:2017:377, point 28) (concernant des services d’assurance).

( 13 ) Du nom de la première affaire ayant donné naissance à cette jurisprudence constante : voir arrêt du 18 octobre 1990, Dzodzi (C‑297/88 et C‑197/89, EU:C:1990:360, points 36 à 43).

( 14 ) Voir, à cet égard, arrêts du 16 mars 2006, Poseidon Chartering (C‑3/04, EU:C:2006:176, points 11 à 19) ; du 28 octobre 2010, Volvo Car Germany (C‑203/09, EU:C:2010:647, points 23 à 28) ; du 17 octobre 2013, Unamar (C‑184/12, EU:C:2013:663, points 30 et 31) ; du 3 décembre 2015, Quenon K. (C‑338/14, EU:C:2015:795, points 17 à 19), et du 17 mai 2017, ERGO Poist’ovňa (C‑48/16, EU:C:2017:377, points 29 à 32). Voir, également, conclusions de l’avocat général Tanchev dans l’affaire The Software Incubator (C‑410/19, EU:C:2020:1061, point 45 et note en bas de page 39).

( 15 ) Voir, par exemple, arrêts du 12 décembre 2019, G.S. et V.G. (Menace pour l’ordre public) (C‑381/18 et C‑382/18, EU:C:2019:1072, point 43), et du 30 janvier 2020, I.G.I. (C‑394/18, EU:C:2020:56, point 48). Voir, également, conclusions de l’avocat général Pikamäe dans l’affaire Deutsche Post e.a. (C‑203/18 et C‑374/18, EU:C:2019:502, points 43 à 62) ; conclusions de l’avocat général Bobek dans l’affaire J & S Service (C‑620/19, EU:C:2020:649, points 27 à 96), ainsi que mes conclusions dans les affaires jointes Baltijas Starptautiskā Akadēmija et Stockholm School of Economics in Riga (C‑164/21 et C‑318/21, EU:C:2022:333, points 57 à 64).

( 16 ) Voir, par exemple, Hesselink, M. W., « Non-Mandatory Rules in European Contract Law », European Review of Contract Law, vol. 1, 2005, p. 44 ; Grigoleit, H. C., « Mandatory Law (Fundamental Regulatory Principles) », dans Basedow, J., et al., Max Planck Encyclopedia of European Private Law, Oxford University Press, Oxford, 2012.

( 17 ) Voir, à cet égard, Hesselink, M. W., précité à la note en bas de page 16 des présentes conclusions, p. 56 à 61.

( 18 ) Voir, à cet égard, conclusions de l’avocat général Léger dans l’affaire Ingmar (C‑381/98, EU:C:2000:230, points 81 à 91) et conclusions de l’avocat général Szpunar dans l’affaire Agro Foreign Trade & Agency (C‑507/15, EU:C:2016:809, points 36 et 37).

( 19 ) Voir article 5 de la directive 86/653 (« Les parties ne peuvent pas déroger aux dispositions des articles 3 et 4. »), et article 13, paragraphe 1, de cette directive (« [...] Il ne peut être renoncé à ce droit. »).

( 20 ) Voir article 15, paragraphe 2, de la directive 86/653 (« [...] Les parties ne peuvent convenir de délais de préavis plus courts. »).

( 21 ) Voir article 10, paragraphe 4, de la directive 86/653 (« Il ne peut être dérogé par accord aux dispositions des paragraphes 2 et 3 au détriment de l’agent commercial. ») ; article 11, paragraphe 3, de cette directive (« Il ne peut être dérogé par accord à la disposition du paragraphe 1 au détriment de l’agent commercial. »), et article 12, paragraphe 3, de ladite directive (« Il ne peut être dérogé par accord aux dispositions des paragraphes 1 et 2 au détriment de l’agent commercial. »).

( 22 ) Voir article 19 de la directive 86/653 (« Les parties ne peuvent pas, avant l’échéance du contrat, déroger aux dispositions des articles 17 et 18 au détriment de l’agent commercial. »).

( 23 ) Voir article 6, paragraphe 1, de la directive 86/653 (« En l’absence d’accord à ce sujet entre les parties [...] »), et article 15, paragraphe 5, de cette directive (« Pour autant que les parties n’en aient pas disposé autrement [...] »).

( 24 ) Outre l’article 7 de la directive 86/653, tel est également le cas en ce qui concerne, par exemple, ses articles 8, 9 et 10, paragraphe 1.

( 25 ) Mise en italique par mes soins. Le terme « ou » est utilisé dans d’autres versions linguistiques de la directive 86/653, telles que les versions en langues espagnole, allemande, anglaise, croate, italienne et slovène.

( 26 ) Il convient de noter que l’emploi du terme « ou » apparaît dans d’autres dispositions de la directive 86/653, aucune d’entre elles n’étant désignée comme étant impérative ou semi‑impérative. Voir article 7, paragraphe 2, de la directive 86/653 ; voir aussi article 8 et article 10, paragraphe 1, de cette directive qui peuvent être lus comme fixant une règle-type non impérative ouverte. À l’opposé, certaines dispositions expressément désignées dans la directive 86/653 comme étant impératives utilisent le terme « et » : voir article 11, paragraphe 1, et article 17, paragraphe 2, sous a), de la directive 86/653 ; voir, également, article 17, paragraphe 3, de cette directive qui se réfère à « et/ou ».

( 27 ) Pour ce qui est des difficultés auxquelles le législateur est confronté lorsqu’il recherche le meilleur contenu pour des règles non impératives, voir Hesselink, M. W., précité à la note en bas de page 16 des présentes conclusions, p. 77 à 83. À cet égard, une méthode pour trouver la règle adéquate est la méthode sociologique qui prend en considération les pratiques existantes en lien avec certains types de contrat. Le choix du législateur peut aussi refléter sa perception de ce qu’est le type de règle économiquement la plus efficace ou de ce qu’est la règle qui reflète l’équilibre approprié entre les intérêts des parties dans des situations types.

( 28 ) Pour ce qui est de l’importance des règles non impératives pour épargner des coûts de transaction, voir, par exemple, Hesselink, M. W., précité à la note en bas de page 16 des présentes conclusions, p. 46 ; Storme, M. E., « Freedom of Contract : Mandatory and Non‑Mandatory Rules in European Contract Law », European Review of Private Law, vol. 15, 2007, p. 233, aux p. 237 et 238.

( 29 ) Pour la même raison, l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 ne peut être interprété, comme l’ont soutenu Rigall Arteria Management et le gouvernement polonais, comme une règle semi-impérative qui autorise les parties à y déroger uniquement si cela était en faveur de l’agent commercial. Comme je l’ai suggéré, la possibilité au titre de cette disposition n’est qu’une des options quant à la manière de régir la commission de l’agent.

( 30 ) Voir, le plus célèbre, arrêt du 12 juillet 2005, Commission/France (C‑304/02, EU:C:2005:444, point 83), dans lequel la Cour a jugé que le terme « ou » figurant à l’article 228, paragraphe 2, CE (devenu article 260, paragraphe 2, TFUE) n’exclut pas d’imposer à la fois une somme forfaitaire et une astreinte pour le même manquement au droit de l’Union par un État membre.

( 31 ) Selon la jurisprudence constante de la Cour, il y a lieu, pour l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union, de tenir compte non seulement des termes de celle-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie. Voir, par exemple, arrêt du 16 février 2017, Agro Foreign Trade & Agency (C‑507/15, EU:C:2017:129, point 27).

( 32 ) Voir, par exemple, arrêts du 25 mai 2016, Meroni (C‑559/14, EU:C:2016:349, point 45), et du 21 décembre 2021, Bank Melli Iran (C‑124/20, EU:C:2021:1035, point 70).

( 33 ) Voir, par exemple, arrêt du 21 décembre 2021, Bank Melli Iran (C‑124/20, EU:C:2021:1035, point 79). Comme indiqué dans les explications relatives à la Charte, l’article 16 de la Charte codifie la jurisprudence de la Cour ayant déjà reconnu la liberté contractuelle comme partie intégrante du droit de l’Union. Voir, par exemple, arrêts du 5 octobre 1999, Espagne/Commission (C‑240/97, EU:C:1999:479, point 99), et du 18 juillet 2007, Société thermale d’Eugénie‑Les‑Bains (C‑277/05, EU:C:2007:440, point 28) ; voir, également, conclusions de l’avocat général Szpunar dans l’affaire Thelen Technopark Berlin (C‑261/20, EU:C:2021:620, points 75 à 84).

( 34 ) Voir point 17 des présentes conclusions. Selon l’évaluation faite en 2015 par la Commission de la directive 86/653, la plupart des agents commerciaux sont des petites ou moyennes entreprises (« PME ») ou des entrepreneurs individuels tandis que la majorité des commettants sont également des PME. Voir rapport REFIT, précité à la note en bas de page 10 des présentes conclusions, points 3.2.3. et 6.

( 35 ) Conformément à l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, des limitations peuvent être apportées à l’exercice des droits consacrés par la Charte pour autant que ces limitations soient prévues par la loi, qu’elles respectent le contenu essentiel de ces droits et que, conformément au principe de proportionnalité, elles soient nécessaires et répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par le droit de l’Union ou au besoin de protéger les droits et libertés d’autrui. Voir, par exemple, arrêt du 21 décembre 2021, Bank Melli Iran (C‑124/20, EU:C:2021:1035, point 83).

( 36 ) Voir, par exemple, arrêts du 3 décembre 2015, Quenon K. (C‑338/14, EU:C:2015:795, point 23) ; du 16 février 2017, Agro Foreign Trade & Agency (C‑507/15, EU:C:2017:129, point 29), et du 16 septembre 2021, The Software Incubator (C‑410/19, EU:C:2021:742, point 48).

( 37 ) Les deuxième et troisième considérants de la directive 86/653 sont libellés comme suit :

« considérant que les différences entre les législations nationales en matière de représentation commerciale affectent sensiblement, à l’intérieur de la Communauté, les conditions de concurrence et l’exercice de la profession et portent atteinte au niveau de protection des agents commerciaux dans leurs relations avec leurs commettants, ainsi qu’à la sécurité des opérations commerciales ; que, par ailleurs, ces différences sont de nature à gêner sensiblement l’établissement et le fonctionnement des contrats de représentation commerciale entre un commettant et un agent commercial établis dans des États membres différents ;

considérant que les échanges de marchandises entre États membres doivent s’effectuer dans des conditions analogues à celles d’un marché unique, ce qui impose le rapprochement des systèmes juridiques des États membres dans la mesure nécessaire au bon fonctionnement de ce marché commun ; que, à cet égard, les règles de conflit de lois, même unifiées, n’éliminent pas, dans le domaine de la représentation commerciale, les inconvénients relevés ci-dessus et ne dispensent dès lors pas de l’harmonisation proposée ».

( 38 ) Voir mes conclusions dans l’affaire Commission/Danemark (AOP Feta) (C‑159/20, EU:C:2022:198, point 64).

( 39 ) Voir, à cet égard, rapport REFIT précité à la note en bas de page 10 des présentes conclusions, point 3.1.

( 40 ) L’importance de l’objectif lié au marché intérieur poursuivi par la directive 86/653 a été confirmée par la Cour. Voir, par exemple, arrêt du 30 avril 1998, Bellone (C‑215/97, EU:C:1998:189, point 17), dans lequel, dans le contexte du constat de l’incompatibilité avec cette directive de règles nationales relatives à l’enregistrement des contrats d’agence, la Cour a jugé que ces règles étaient « de nature à gêner sensiblement l’établissement et le fonctionnement de contrats d’agence entre parties dans des États membres différents ».

( 41 ) Voir, à cet égard, cinquième considérant de la directive 86/653 qui fait référence aux « principes » de ce qui est devenu l’article 151 TFUE relatif à la politique sociale « en procédant à une harmonisation dans le progrès de la législation des États membres concernant les agents commerciaux ».

( 42 ) La possibilité, voire l’obligation, pour le législateur de l’Union de prendre en considération différentes préoccupations (y compris celles à l’égard de l’harmonisation desquelles l’Union n’a pas de compétence autonome) lorsqu’il adopte des règles d’harmonisation des droits nationaux aux fins de garantir l’établissement et le fonctionnement du marché intérieur a été confirmée par la jurisprudence de la Cour relative à ce qui est devenu l’article 114 TFUE. Voir, entre autres, arrêts du 5 octobre 2000, Allemagne/Parlement et Conseil (C‑376/98, EU:C:2000:544) ; plus récemment, du 4 mai 2016, Pologne/Parlement et Conseil (C‑358/14, EU:C:2016:323), ainsi que du 4 mai 2016, Philip Morris Brands e.a. (C‑547/14, EU:C:2016:325).

( 43 ) Voir, à cet égard, arrêts du 17 janvier 2008, Chevassus-Marche (C‑19/07, EU:C:2008:23, point 22) ; du 17 mai 2017, ERGO Poist’ovňa (C‑48/16, EU:C:2017:377, point 41), et du 19 avril 2018, CMR (C‑645/16, EU:C:2018:262, point 33). Voir, également, conclusions de l’avocat général Poiares Maduro dans l’affaire Honyvem Informazioni Commerciali (C‑465/04, EU:C:2005:641, point 31).

( 44 ) Voir, à cet égard, conclusions de l’avocat général Szpunar dans l’affaire ERGO Poist’ovňa (C‑48/16, EU:C:2017:15, points 36 et 37).

( 45 ) Voir, à cet égard, Weatherill, S., « Why Object to the Harmonization of Private Law by the EC ? », European Review of Private Law, vol. 12, 2004, p. 633, à la p. 635. Voir, également, Zamir, E., et Ayres, I., « A Theory of Mandatory Rules : Typology, Policy, and Design », Texas Law Review, vol. 99, 2020, p. 283, à la p. 292.

( 46 ) Voir, à cet égard, arrêt du 4 juin 2020, Trendsetteuse (C‑828/18, EU:C:2020:438, point 30).

( 47 ) Voir, à cet égard, arrêt du 26 mars 2009, Semen (C‑348/07, EU:C:2009:195, point 31).

( 48 ) Pour des opinions confirmant que l’harmonisation peut aussi être opérée au travers de règles non impératives, voir, par exemple, Hesselink, M. W., précité à la note en bas de page 16 des présentes conclusions ; Storme, précité à la note en bas de page 28 des présentes conclusions ; Gutman, K., The Constitutional Foundations of European Contract Law : A Comparative Analysis, Oxford University Press, Oxford, 2014.

( 49 ) Voir, à cet égard, arrêts du 30 avril 1998, Bellone (C‑215/97, EU:C:1998:189, points 11 et 16), ainsi que du 28 octobre 2010, Volvo Car Germany (C‑203/09, EU:C:2010:647, point 40). Voir, également, ordonnance du 6 mars 2003, Abbey Life Assurance (C‑449/01, non publiée, EU:C:2003:133, point 15). Voir aussi, entre autres, conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire Quenon K. (C‑338/14, EU:C:2015:503, point 39) et conclusions de l’avocat général Szpunar dans l’affaire Agro Foreign Trade & Agency (C‑507/15, EU:C:2016:809, points 48 à 54).

( 50 ) Voir Commission, Égalité de droits pour les agents commerciaux. Proposition de directive du Conseil relative à la coordination des droits des États membres concernant les agents commerciaux (indépendants), COM(76) 670 final, du 13 décembre 1976 (ci-après la « proposition »).

( 51 ) Le projet d’article 12, paragraphe 1, disposait :

« 1. Pour une opération commerciale conclue pendant la durée du contrat, l’agent commercial a droit à une commission,

a) lorsque l’opération est due à l’intervention de l’agent commercial, ou

b) lorsque l’opération a été conclue avec un tiers avec lequel l’agent avait précédemment négocié ou conclu une opération relevant du contrat d’agence, ou

c) lorsque l’agent commercial a la représentation pour un secteur géographique déterminé ou auprès d’un groupe de personnes déterminé et que l’opération a été conclue dans ce secteur géographique ou avec une personne appartenant à ce groupe, même si l’opération n’a pas été négociée ou conclue par l’agent. »

Voir proposition, précitée à la note en bas de page 50 des présentes conclusions, p. 10.

( 52 ) Voir proposition, précitée à la note en bas de page 50 des présentes conclusions, projet d’article 35, paragraphe 1, p. 16, et commentaires, p. 25 et 26.

( 53 ) Voir Comité économique et social européen, avis sur une proposition de directive du Conseil relative à la coordination des droits des États membres concernant les agents commerciaux (indépendants), du 24 novembre 1977 (JO 1978, C 59, p. 31), points 2.9.6 à 2.9.8.

( 54 ) Voir Parlement européen, rapport sur la proposition de la Commission européenne au Conseil (doc. 514/76) concernant une directive relative à la coordination des droits des États membres concernant les agents commerciaux (indépendants), document 222/78, du 27 juillet 1978, exposé des motifs, points 110 et 111, et résolution portant avis du Parlement européen sur la proposition de la Commission des Communautés européennes au Conseil concernant une directive relative à la coordination des droits des États membres concernant les agents commerciaux (indépendants), du 12 septembre 1978 (JO 1978, C 239, p. 18), point 17.

( 55 ) Voir Commission, Modification à la proposition de directive du Conseil relative à la coordination des droits des États membres concernant les agents commerciaux (indépendants), COM(78) 773 final, du 22 janvier 1979 (ci-après la « proposition modifiée »), exposé des motifs, p. 8 et 9, et projet d’article 35, paragraphe 1, p. 21.

( 56 ) Dans la proposition modifiée de la Commission, le projet d’article 12, paragraphe 1, est resté inchangé, à l’exception du point b) qui a été modifié comme suit : « lorsque l’opération a été conclue avec un tiers dont l’agent a obtenu antérieurement la clientèle pour des opérations du même genre ». Voir proposition modifiée, précitée à la note en bas de page 55 des présentes conclusions, exposé des motifs, p. 4, et projet d’article 12, paragraphe 1, p. 10 et 11.

( 57 ) Voir, à cet égard, document du Conseil 6877/80, du 6 mai 1980, p. 16. Il convient de noter que, comme indiqué dans certains documents institutionnels adoptés précédemment, la majorité des délégations des États membres était favorable au caractère non impératif du projet d’article 12, alors que la Commission le considérait comme de caractère impératif, sous réserve, le cas échéant, de dérogations. Voir document du Conseil 7527/81, du 23 juin 1981, p. 4. Par la suite, avec la suppression du projet d’article 35, il s’est avéré que la majorité des délégations des États membres étaient en faveur de préciser le caractère impératif du projet d’article 12, paragraphe 1, sous a). Voir, par exemple, document du Conseil 7381/83, du 9 juin 1983, p. 8, note en bas de page 4, et document du Conseil 7379/86, du 4 juin 1986, p. 8, note en bas de page 6. Toutefois, cela n’a pas été repris dans la version finale de la directive 86/653.

( 58 ) Voir, à cet égard, document du Conseil 5442/82, du 10 mars 1982, p. 2 ; document du Conseil 7013/83, du 18 mai 1983, p. 5 ; document du Conseil 7778/83, du 17 juin 1983, p. 9, et document du Conseil 7379/86, du 4 juin 1986, p. 22.

( 59 ) En outre, à l’époque, certains États membres (à savoir le Royaume de Danemark avec le soutien de la République fédérale d’Allemagne, du Royaume des Pays-Bas et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord) avaient proposé d’inclure une disposition affirmant la liberté contractuelle et, donc, de préciser que, lorsqu’une disposition particulière de la proposition n’est pas indiquée comme étant impérative, les parties sont libres d’y déroger. Cette proposition n’a pas été reprise dans le texte final. Voir, à cet égard, document du Conseil 7013/83, du 18 mai 1983, p. 5, et document du Conseil 7251/1/83 REV 1, du 14 juin 1983, p. 7.

( 60 ) Il convient de noter, s’agissant du contexte historique dans lequel s’est inscrite la directive 86/653, que la convention Benelux relative au contrat d’agence, qui a été signée à La Haye le 26 novembre 1973, mais n’est pas entrée en vigueur faute de ratification par le Royaume de Belgique et le Grand-Duché de Luxembourg, a formé la base des discussions dans le cadre du processus décisionnel de cette directive. L’article 5, paragraphe 1, de cette convention, qui était analogue au projet d’article 12, paragraphe 1, de la proposition initiale et de la proposition modifiée de directive de la Commission, n’était pas mentionné dans la liste des dispositions impératives figurant à l’article 19 de cette convention.

( 61 ) Voir proposition, précitée à la note en bas de page 50 des présentes conclusions, projet d’article 11, p. 10, et commentaires, p. 20. Le premier paragraphe du projet d’article 11 correspond dans une large mesure à l’article 6, paragraphe 2, de la directive 86/653, et le deuxième paragraphe à l’article 6, paragraphe 3, de la directive 86/653. Le troisième paragraphe de ce projet d’article 11, qui ne figure pas dans la directive 86/653, disposait : « Les contrats d’agence qui excluent la rémunération de l’agent sont nuls ». Voir, également, proposition modifiée, précitée à la note en bas de page 55 des présentes conclusions, exposé des motifs, p. 3, et projet d’article 11, p. 10 (ajoutant une référence à la rémunération en nature et remaniant l’ordre de certains paragraphes).

( 62 ) Voir, à cet égard, document du Conseil 9253/80, du 13 août 1980, p. 11 (première lecture) ; document du Conseil 7527/81, du 23 juin 1981, p. 3 (deuxième lecture), et document du Conseil 7348/82, du 2 juin 1982, p. 11 et 12 (troisième lecture). En réalité, ainsi que cela est indiqué dans certains documents institutionnels, le libellé de l’article 6, paragraphe 3, de la directive 86/653 semble résulter de certains amendements proposés par le Royaume de Belgique et par la République fédérale d’Allemagne en ce qui concerne les projets d’articles 12 et 13 (correspondant aux articles 7 et 8 de la directive 86/653). Voir document du Conseil 6877/80, du 6 mai 1980, p. 15 et 19.

( 63 ) Voir article 5, article 13, paragraphe 1, article 15, paragraphe 2, et article 19 de la directive 86/653.

( 64 ) Voir, à cet égard, conclusions de l’avocat général Cosmas dans l’affaire Kontogeorgas (C‑104/95, EU:C:1996:274, point 23 et note en bas de page 13).

( 65 ) Il convient d’observer que la Cour a fondé sa décision quant au caractère impératif des articles 17 et 18 de la directive 86/653 expressément sur l’article 19 de ladite directive qui interdit de déroger à ces articles au détriment de l’agent commercial. Voir arrêt du 9 novembre 2000, Ingmar (C‑381/98, EU:C:2000:605, notamment points 21 à 24). Voir, à cet égard, également, arrêts du 17 octobre 2013, Unamar (C‑184/12, EU:C:2013:663, point 40), et du 19 avril 2018, CMR (C‑645/16, EU:C:2018:262, points 32 et 34 à 36).

( 66 ) Voir, en ce qui concerne l’article 17 de la directive 86/653, arrêts du 26 mars 2009, Semen (C‑348/07, EU:C:2009:195, points 19 et 20) ; du 28 octobre 2010, Volvo Car Germany (C‑203/09, EU:C:2010:647, point 44) ; du 3 décembre 2015, Quenon K. (C‑338/14, EU:C:2015:795, point 28), et du 7 avril 2016, Marchon Germany (C‑315/14, EU:C:2016:211, point 27). Voir, également, Commission, Rapport sur l’application de l’article 17 de la directive du Conseil du 18 décembre 1986 relative à la coordination des droits des États membres concernant les agents commerciaux indépendants (86/653/CEE), COM(96) 364 final, du 23 juillet 1996, notamment p. 2 à 4.

( 67 ) Voir, à cet égard, arrêts du 17 janvier 2008, Chevassus-Marche (C‑19/07, EU:C:2008:23, points 17 à 21), et du 17 mai 2017, ERGO Poist’ovňa (C‑48/16, EU:C:2017:377, point 40).

( 68 ) Comme l’a indiqué le gouvernement allemand, la jurisprudence allemande a confirmé que les dispositions du droit allemand transposant l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 sont considérées comme ayant un caractère non impératif.

( 69 ) À cet égard, Rigall Arteria Management et Bank Handlowy affirment que la position dominante dans la jurisprudence polonaise est que l’article 761, paragraphe 1, du code civil est non impératif, alors que Rigall Arteria Management souligne que la doctrine est divisée et que le gouvernement polonais met en exergue que, comme indiqué dans l’ordonnance de renvoi, le Sąd Najwyższy (Cour suprême) statuera dans la présente affaire pour la première fois sur cette question.

( 70 ) Il convient d’observer que, dans ses observations écrites, Rigall Arteria Management mentionne trois États membres (l’Allemagne, l’Autriche et la Pologne) dans lesquels les dispositions nationales pertinentes transposant l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 sont apparemment considérées comme non impératives et un État membre (la Belgique) dans lequel elles sont apparemment impératives, alors que Bank Handlowy fait référence à sept États membres (la République tchèque, l’Allemagne, l’Italie, l’Autriche, la Pologne, la Finlande et la Suède) qui considèrent apparemment ces dispositions comme étant non impératives. Voir, en outre, à cet égard, Bogaert, G., et Lohmann, U. (éd.), Commercial Agency and Distribution Agreements : Law and Practice in the Member States of the European Union, 3e éd., Kluwer Law International, La Haye, 2000, p. 67 à 676.

( 71 ) Dans une grande partie de la doctrine, les règles fixées à l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 86/653 sont considérées comme étant non impératives. Voir, par exemple, Crahay, P., « La directive européenne relative aux agents commerciaux indépendants », Tijdschrift voor Belgish Handelsrecht/Revue de droit commercial belge, vol. 10, 1987, p. 564, aux p. 576 à 580 ; Saintier et Scholes, précité à la note en bas de page 3 des présentes conclusions, p. 109 et p. 115 à 118 ; Randolph, F., et Davey, J., The European Law of Commercial Agency, 3e éd., Hart Publishing, Oxford, 2010, p. 79 et 80 ; Singleton, précité à la note en bas de page 3 des présentes conclusions, p. 98. Il existe toutefois aussi des points de vue différents. Voir, par exemple, de Theux, A., Le statut européen de l’agent commercial : Approche critique de droit comparé, Publications des Facultés universitaires Saint-Louis, Bruxelles, 1992, p. 116 et 117 et p. 357 à 365, soutenant que de telles règles devraient être considérées comme semi-impératives ; voir, également, Rott-Pietrzyk, E., et Grochowski, M., « Prowizja agenta w czasie trwania umowy (imperatywny czy dyspozytywny charakter regulacji i wynikające z tego konsekwencje) », Transformacje Prawa Prywatnego, 2018, p. 73, soutenant, comme l’a mentionné Rigall Arteria Management, que l’article 761, paragraphe 1, du code civil devrait être compris comme étant une règle impérative.

( 72 ) Il convient de noter que, comme l’a indiqué Rigall Arteria Management, dans le contexte d’un programme universitaire sur le droit privé européen, les travaux d’un groupe universitaire semblent considérer les règles relatives à la commission en cause en l’espèce comme étant impératives [voir Research Group on the Existing EC Private Law (Acquis Group), Principles of the Existing EC Contract Law (Acquis Principles), Contract II : General Provisions, Delivery of Goods, Package Travel and Payment Services, Sellier, Munich, 2009, Article 7 :H-02 : Mandatory Nature, p. 36]. Toutefois, les travaux dans ce contexte d’autres groupes universitaires semblent être d’un autre avis et ne précisent pas que de telles règles sont impératives [voir, à cet égard, Hesselink, M. W., et al. (éd.), Principles of European Law, Commercial Agency, Franchise and Distribution Contracts, Sellier, Munich, 2006, p. 93 à 95 et p. 173 à 177 ; von Bar, C., et Clive, E. (éd.), Principles, Definitions and Model Rules of European Private Law. Draft Common Frame of Reference (DCFR), édition complète, vol. 3, Sellier, Munich, 2009, p. 2282 et 2283 et p. 2349 à 2353].

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