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Document 62020CJ0202

Arrêt de la Cour (huitième chambre) du 12 mai 2021.
Claudio Necci contre Commission européenne.
Pourvoi – Fonction publique – Ancien agent contractuel – Sécurité sociale – Régime commun d’assurance maladie (RCAM) – Article 95 du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (RAA) – Maintien d’affiliation après retraite – Condition d’avoir été employé pendant plus de trois années – Demande d’affiliation au RCAM à la suite d’un transfert des droits à pension – Assimilation des annuités de pension bonifiées à des années de service − Rejet de la demande – Recours en annulation – Acte faisant grief – Ordonnance du Tribunal constatant l’irrecevabilité du recours – Annulation.
Affaire C-202/20 P.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2021:385

 ARRÊT DE LA COUR (huitième chambre)

12 mai 2021 ( *1 )

« Pourvoi – Fonction publique – Ancien agent contractuel – Sécurité sociale – Régime commun d’assurance maladie (RCAM) – Article 95 du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (RAA) – Maintien d’affiliation après retraite – Condition d’avoir été employé pendant plus de trois années – Demande d’affiliation au RCAM à la suite d’un transfert des droits à pension – Assimilation des annuités de pension bonifiées à des années de service – Rejet de la demande – Recours en annulation – Acte faisant grief – Ordonnance du Tribunal constatant l’irrecevabilité du recours – Annulation »

Dans l’affaire C‑202/20 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 12 mai 2020,

Claudio Necci, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté initialement par Mes S. Orlandi et T. Martin, avocats, puis par Me S. Orlandi, avocat,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Commission européenne, représentée par MM. B. Mongin et T. S. Bohr, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

Parlement européen, représenté par MM. J. Van Pottelberge et I. Terwinghe, en qualité d’agents,

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. M. Bauer et M. Alver, en qualité d’agents,

parties intervenantes en première instance,

LA COUR (huitième chambre),

composée de M. N. Wahl, président de chambre, M. F. Biltgen (rapporteur) et Mme L. S. Rossi, juges,

avocat général : M. M. Bobek,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

Par son pourvoi, le requérant demande l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 25 mars 2020, Necci/Commission (T‑129/19, non publiée, ci-après l’« ordonnance attaquée », EU:T:2020:131), par laquelle celui-ci a rejeté comme étant irrecevable son recours en annulation au titre de l’article 270 TFUE contre la décision de la Commission du 18 avril 2018, rejetant implicitement sa demande d’affiliation au régime d’assurance maladie commun aux institutions des Communautés européennes (RCAM) introduite le 18 décembre 2017 (ci-après la « décision litigieuse »).

Le cadre juridique

Le statut des fonctionnaires de l’Union européenne

2

L’article 72, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), tel que modifié par le règlement (UE, Euratom) no 1080/2010 du Parlement européen et du Conseil, du 24 novembre 2010 (JO 2010, L 311, p. 1), prévoit, en substance, que le fonctionnaire, son conjoint, lorsque celui-ci ne peut pas bénéficier de prestations de même nature et de même niveau en application de toutes autres dispositions légales ou réglementaires, ses enfants et les autres personnes à sa charge, sont couverts contre les risques de maladie par le RCAM. Aux termes de l’article 72, paragraphe 2, premier alinéa, du statut :

« Le fonctionnaire resté au service de l’Union jusqu’à l’âge de 63 ans ou titulaire d’une allocation d’invalidité bénéficie après la cessation de ses fonctions des dispositions prévues au paragraphe 1. La contribution est calculée sur la base de la pension ou de l’allocation. »

3

L’article 90 du statut, tel que modifié par le règlement no 1080/2010, figure sous le titre VII de celui-ci, intitulé « Des voies de recours », et est rédigé en ces termes :

« 1.   Toute personne visée au présent statut peut saisir l’autorité investie du pouvoir de nomination d’une demande l’invitant à prendre à son égard une décision. L’autorité notifie sa décision motivée à l’intéressé dans un délai de quatre mois à partir du jour de l’introduction de la demande. À l’expiration de ce délai, le défaut de réponse à la demande vaut décision implicite de rejet susceptible de faire l’objet d’une réclamation au sens du paragraphe suivant.

2.   Toute personne visée au présent statut peut saisir l’autorité investie du pouvoir de nomination d’une réclamation dirigée contre un acte lui faisant grief, soit que ladite autorité ait pris une décision, soit qu’elle se soit abstenue de prendre une mesure imposée par le statut. La réclamation doit être introduite dans un délai de trois mois. [...]

[...] »

4

L’article 11 de l’annexe VIII du statut, tel que modifié par le règlement (CE, Euratom) no 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004 (JO 2004, L 124, p. 1), disposait, à son paragraphe 2 :

« Le fonctionnaire qui entre au service des Communautés après avoir :

cessé ses activités auprès d’une administration, d’une organisation nationale ou internationale

ou

exercé une activité salariée ou non salariée,

a la faculté, entre le moment de sa titularisation et le moment où il obtient le droit à une pension d’ancienneté au sens de l’article 77 du statut, de faire verser aux Communautés le capital, actualisé jusqu’à la date du transfert effectif, représentant les droits à pension qu’il a acquis au titre des activités visées ci-dessus.

En pareil cas, l’institution où le fonctionnaire est en service détermine, par voie de dispositions générales d’exécution, compte tenu du traitement de base, de l’âge et du taux de change à la date de la demande de transfert, le nombre d’annuités qu’elle prend en compte d’après le régime de pension des Communautés au titre de la période de service antérieur sur la base du capital transféré, déduction faite du montant qui représente la revalorisation du capital entre la date de la demande de transfert et celle du transfert effectif.

[...] »

Le régime applicable aux autres agents de l’Union européenne

5

L’article 95 du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne, tel que modifié par le règlement no 1080/2010 (ci-après le « RAA »), dispose :

« [...] [L]’article 72, paragraphes 2 et 2 bis, du statut ne s’applique pas à l’agent contractuel resté au service de l’Union jusqu’à l’âge de 63 ans, à moins qu’il ait été employé pour une durée supérieure à trois ans en tant qu’agent contractuel. »

Les antécédents du litige

6

Le Tribunal a résumé les antécédents du litige aux points suivants de l’ordonnance attaquée :

« 1

Le requérant, M. Claudio Necci, a exercé ses fonctions à la Commission européenne [...] comme agent contractuel entre le 1er juillet 2009 et le 30 juin 2011.

2

Le 27 octobre 2010, le requérant a demandé le transfert des droits à pension [...] qu’il avait acquis pendant la durée de ses services auprès de l’administration italienne, vers le régime de pension des institutions de l’Union européenne (ci-après le “RPUE”), en application de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut[, tel que modifié par le règlement no 723/2004].

3

Le 1er juillet 2011, le requérant a quitté la Commission et est parti à la retraite à l’âge de 64 ans.

4

Par décision du 18 juillet 2011, la Commission a fixé les droits à pension du requérant. Elle a également mis fin à son affiliation au [RCAM] en se fondant sur l’article 95 du [RAA], lequel subordonne le maintien du bénéfice du RCAM, pour un agent contractuel resté au service de l’Union jusqu’à l’âge de la retraite, à une condition de durée d’emploi, en tant qu’agent contractuel, supérieure à trois ans. La décision du 18 juillet 2011 n’a pas été contestée.

5

Le 12 février 2014, la caisse de pension italienne a informé la Commission que le montant du capital représentant les droits à pension du requérant à la date de la demande [du transfert des droits à pension] était de 383570,92 euros.

6

Par courrier électronique du 18 mars 2014, les services de la Commission ont adressé au requérant une note d’information portant sur le calcul provisoire de ses annuités en lui demandant de prendre une décision sur le transfert de ses droits à pension. Ce document, qui faisait référence à l’article 95 du RAA, rappelait la condition selon laquelle trois années de service effectif au sein des institutions de l’Union étaient nécessaires pour bénéficier d’une couverture contre les risques de maladies auprès de ces institutions et attirait l’attention du requérant sur les conséquences que pouvait avoir le [transfert de ses droits à pension].

7

Le 11 avril 2014, le requérant a adressé un courrier électronique à l’Office de gestion et de liquidation des droits individuels (PMO), par lequel il sollicitait une prorogation du délai pour prendre sa décision sur le [transfert de ses droits à pension]. Il ajoutait : “Je sais que je perdrai l’assurance maladie de l’Italie et que je n’aurais pas de couverture du RCAM de la Commission. Je voudrais demander plus d’informations sur une couverture privée”. Une prorogation du délai lui a été accordée jusqu’au 5 mai 2014.

8

Le 6 mai 2014, le requérant a accepté l’offre provisoire de [transfert de ses droits à pension] qui aboutissait à lui reconnaître des annuités supplémentaires à prendre en compte dans le RPUE de 16 années, 9 mois et 17 jours.

[...]

11

Le 14 août 2017, la caisse de pension italienne a versé la somme de 387768,73 euros au RPUE au titre des droits à pension nationaux du requérant.

12

Le 19 septembre 2017, la Commission a adopté une première décision portant bonification d’annuités aboutissant à reconnaître au requérant une durée de cotisation supplémentaire dans le RPUE de 14 ans et 9 jours. À la suite d’une réclamation introduite par le requérant le 18 décembre 2017 et acceptée le 14 mars 2018, cette bonification a été portée à 16 ans, 9 mois et 17 jours.

13

Le 18 décembre 2017, à la suite du transfert de ses droits à pension, le requérant a introduit une demande d’affiliation au RCAM auprès du PMO.

14

Cette demande a fait l’objet d’un rejet implicite le 18 avril 2018, [ce rejet implicite constituant la décision litigieuse], conformément à l’article 90, paragraphe 1, du statut[, tel que modifié par le règlement no 1080/2010].

15

Le 18 juillet 2018, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut[, tel que modifié par le règlement no 1080/2010], contre [la décision litigieuse].

16

Sa réclamation a été rejetée par décision du 19 novembre 2018. Cette décision est fondée sur le fait que la réclamation était irrecevable au motif que celle-ci aurait dû être introduite contre la décision du 18 juillet 2011 fixant les droits à pension du requérant, dans laquelle il était indiqué qu’il n’était pas affilié au RCAM. »

La procédure devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

7

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 25 février 2019, le requérant a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse. Ce recours s’appuyait sur deux moyens tirés, le premier, d’une violation de l’article 95 du RAA et, le second, invoqué à titre subsidiaire, de l’illégalité de cette disposition au regard de l’article 45 TFUE.

8

En défense, la Commission a fait valoir que le recours était irrecevable pour avoir été précédé d’une réclamation qui l’était tout autant. Selon elle, la réclamation était irrecevable parce qu’elle aurait dû être introduite contre la décision du 18 juillet 2011 fixant les droits à pension du requérant et dans laquelle il était indiqué qu’il ne serait pas affilié au RCAM (ci-après la « décision du 18 juillet 2011 »). Cette institution a, à titre subsidiaire, conclu au rejet des moyens avancés par le requérant.

9

Par l’ordonnance attaquée, le Tribunal a déclaré le recours irrecevable. Il a considéré tout d’abord que la décision du 18 juillet 2011 était un acte faisant grief devenu définitif en l’absence de réclamation de la part du requérant. Tout en rappelant qu’un agent ayant omis d’intenter un recours contre un acte lui faisant grief ne saurait, au moyen d’une demande subséquente, réparer cette omission à moins qu’un fait nouveau et substantiel ne soit de nature à motiver le réexamen de sa situation, le Tribunal a estimé que le transfert des droits à pension du requérant ne constituait pas un tel fait, notamment parce que ce transfert ne modifiait pas la situation du requérant au regard de son affiliation au RCAM. Le Tribunal en a conclu que le requérant ne pouvait pas, par sa demande d’affiliation au RCAM du 17 décembre 2017, faire renaître à son profit un droit de recours contre la décision du 18 juillet 2011.

Les conclusions des parties devant la Cour

10

Par son pourvoi, le requérant demande à la Cour :

d’annuler l’ordonnance attaquée ;

de renvoyer l’affaire devant le Tribunal, et

de réserver les dépens.

11

La Commission demande à la Cour :

de rejeter le pourvoi et

de condamner le requérant aux dépens.

Sur le pourvoi

12

À l’appui de son pourvoi, le requérant invoque trois moyens tirés, le premier, d’une dénaturation de l’objet du litige, le deuxième, d’une violation du droit à un recours effectif et, le troisième, d’une violation du principe d’unicité de législation applicable.

Sur le premier moyen

Argumentation des parties

13

Par son premier moyen, le requérant invoque une dénaturation de l’objet du litige, en ce que le Tribunal a considéré, au point 45 de l’ordonnance attaquée, que l’acte lui faisant grief était la décision du 18 juillet 2011. Le requérant soutient qu’il ne conteste pas cette décision et qu’il n’aurait pas eu intérêt à agir contre celle-ci, dans la mesure où c’est à bon droit que la Commission y a constaté que, conformément à l’article 95 du RAA, il ne pouvait plus être affilié au RCAM à compter de son départ à la retraite, dès lors qu’il avait exercé ses fonctions d’agent contractuel pendant moins de trois années. En revanche, son recours en annulation aurait visé la décision litigieuse, par laquelle la Commission a refusé de l’affilier au RCAM à compter du 19 septembre 2017 au motif que les droits à pension italiens transférés au RPUE ne pouvaient être assimilés à des années de service, au sens de ladite disposition.

14

Selon le requérant, la décision du 18 juillet 2011 et la décision litigieuse reposent sur des motifs différents et n’ont donc pas le même objet, la première se fondant sur le constat selon lequel le requérant n’a pas été employé pendant plus de trois années par l’Union et la seconde matérialisant le refus de l’administration d’assimiler les annuités de pension bonifiées à des années de service, au sens de l’article 95 du RAA.

15

Le requérant indique qu’il a, certes, été averti le 18 juillet 2011 du fait que la Commission interpréterait l’article 95 du RAA comme excluant les annuités de pension bonifiées au titre d’un éventuel transfert des droits à pension. Toutefois, cet avertissement manifesterait uniquement l’intention future de l’administration de ne pas revoir l’affiliation du requérant au RCAM en cas de transfert de ses droits à pension. Ledit avertissement ne saurait être considéré comme faisant grief au requérant étant donné qu’il n’affecterait pas directement et immédiatement ses intérêts au moment de sa retraite en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique.

16

Le requérant ajoute que les considérations exprimées par le Tribunal aux points 46 et 52 de l’ordonnance attaquée en ce qui concerne le fait qu’il aurait consenti en pleine connaissance de cause au transfert de ses droits à pension sont sans incidence sur la recevabilité du recours en annulation contre la décision litigieuse. Il considère en effet qu’il ne pouvait pas contester le refus de la Commission de tenir compte des annuités de pension bonifiées tant qu’il n’avait pas été procédé à ce transfert.

17

La Commission conteste l’existence de la dénaturation alléguée et conclut au rejet de ce moyen. En se référant au point 51 de l’ordonnance attaquée, cette institution soutient que le transfert effectif des droits à pension italiens n’a pu affecter les conditions d’application de l’article 95 du RAA, dès lors que ce transfert n’a pas modifié le nombre d’années pendant lesquelles le requérant a été employé par l’Union en tant qu’agent contractuel, au sens de cette disposition. En effet, il n’y aurait aucun lien entre celle-ci et l’article 11 de l’annexe VIII du statut, tel que modifié par le règlement no 723/2004, qui permet d’augmenter le nombre d’annuités de pension par le transfert de cotisations versées au titre du régime national. Le requérant opérerait, partant, un amalgame erroné entre les années d’emploi effectif au service de l’Union et le nombre d’annuités de pension attribuées en raison dudit transfert.

18

Selon la Commission, la décision du 18 juillet 2011 et la décision litigieuse avaient un objet différent, comme le requérant le reconnaîtrait lui-même. Cette dernière décision portant sur le nombre d’annuités de pension transférées, elle ne pourrait constituer un fait nouveau aux fins de l’appréciation du nombre d’années d’emploi, au sens de l’article 95 du RAA, déterminé définitivement par la décision du 18 juillet 2011. Les annuités de pension transférées ne pouvant modifier le nombre d’années de service au sein de l’Union, elles ne seraient pas susceptibles de modifier de façon substantielle la situation du requérant par rapport à celle ayant donné lieu à cette décision.

19

La décision du 18 juillet 2011 ne constituerait pas un « avertissement », comme le soutient le requérant, ni n’indiquerait que la décision sur le retrait de la couverture d’assurance maladie du RCAM n’était que provisoire. Au contraire, elle aurait constaté que le requérant ne bénéficierait pas de cette couverture durant sa retraite et aurait été immédiatement appliquée.

Appréciation de la Cour

20

Par son premier moyen, le requérant fait valoir, en substance, que le Tribunal a dénaturé l’objet du litige en considérant, dans l’ordonnance attaquée, que la décision litigieuse était purement confirmative de l’acte lui faisant grief, à savoir la décision du 18 juillet 2011, sans qu’aucun fait nouveau et substantiel de nature à justifier un réexamen de celle-ci ne soit survenu, alors que ces décisions reposaient sur des motifs différents et n’avaient donc pas le même objet.

21

À cet égard, il convient de rappeler qu’un acte est purement confirmatif d’un acte précédent lorsqu’il ne contient aucun élément nouveau par rapport à ce dernier. En ce qui concerne une demande tendant au réexamen d’une décision antérieure devenue définitive, il résulte d’une jurisprudence constante que seule l’existence de faits nouveaux substantiels peut justifier la présentation d’une telle demande (arrêt du 15 novembre 2018, Estonie/Commission, C‑334/17 P, non publié, EU:C:2018:914, point 46 et jurisprudence citée).

22

Or, en l’occurrence, force est de constater que, ainsi que la Commission l’admet elle-même, la décision du 18 juillet 2011 et la décision litigieuse ont des objets différents. Par conséquent, la seconde ne saurait être considérée comme étant purement confirmative de la première.

23

En effet, d’une part, par la décision du 18 juillet 2011, il a été mis fin à l’affiliation du requérant au RCAM à compter du 1er juillet 2011, date de son admission à la retraite, en application de l’article 95 du RAA, en vertu duquel pareille affiliation d’un agent contractuel après la cessation de ses fonctions est subordonnée à l’accomplissement d’une durée d’emploi de ce dernier au service de l’Union supérieure à trois ans. D’autre part, par la décision litigieuse, la demande du requérant d’être affilié au RCAM à compter du 19 septembre 2017, à la suite du transfert de ses droits à pension italiens, a été rejetée, les annuités de pension bonifiées ne pouvant être assimilées à des années de service, au sens de ladite disposition.

24

Il s’ensuit que la demande d’affiliation au RCAM fondée sur le transfert desdits droits à pension constitue un élément nouveau, au sens de la jurisprudence citée au point 21 du présent arrêt, par rapport à la décision du 18 juillet 2011.

25

À cet égard, il ne saurait être considéré que cette décision avait pour objet le refus d’assimiler des annuités de pension bonifiées du requérant à des années de service aux fins de l’application de l’article 95 du RAA. En effet, non seulement le requérant n’avait pas soumis une demande en ce sens avant l’adoption de ladite décision, mais il n’aurait pas été à même de le faire, dans la mesure où, bien qu’il eût demandé le transfert des droits à pension italiens durant l’année 2010, ce n’est qu’au cours de l’année 2017 que ce transfert a été effectué.

26

Dès lors, un tel refus aurait concerné une situation future et hypothétique, si bien que le requérant n’aurait pas été recevable à former un recours contre ce refus, faute d’intérêt à agir, pareil intérêt devant être né et actuel au stade de l’introduction du recours (voir, en ce sens, arrêt du 23 novembre 2017, Bionorica et Diapharm/Commission, C‑596/15 P et C‑597/15 P, EU:C:2017:886, points 83 et 84 ainsi que jurisprudence citée).

27

Par ailleurs, la constatation du Tribunal figurant au point 51 de l’ordonnance attaquée, selon laquelle le transfert des droits de pension italiens du requérant auprès du RPUE ne modifiait pas la situation juridique de celui-ci au regard de son affiliation au RCAM, tout comme l’affirmation de la Commission selon laquelle le requérant fait, à tort, un amalgame entre les années d’emploi effectif au service de l’Union et le nombre d’annuités de pension attribuées en raison de ce transfert ne sont pas de nature à remettre en cause l’objet de la décision litigieuse, mais ont trait au bien-fondé de celle-ci.

28

Il résulte de ce qui précède que, en jugeant que l’acte faisant grief au requérant était la décision du 18 juillet 2011 et que son recours en annulation contre la décision litigieuse était irrecevable à ce titre, le Tribunal a, dans l’ordonnance attaquée, dénaturé l’objet de ce recours.

29

Dans ces conditions, il y a lieu d’accueillir le premier moyen et, partant, d’annuler l’ordonnance attaquée, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les deuxième et troisième moyens.

Sur les conséquences de l’annulation de l’ordonnance attaquée

30

Conformément à l’article 61, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, celle-ci peut, en cas d’annulation de la décision du Tribunal, soit renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue, soit statuer elle-même définitivement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d’être jugé.

31

En l’occurrence, le Tribunal ayant rejeté le recours du requérant comme étant irrecevable et, par conséquent, n’ayant pas examiné les moyens invoqués par ce dernier à l’appui de son recours, la Cour considère que le litige n’est pas en état d’être jugé. Il convient, dès lors, de renvoyer l’affaire devant le Tribunal.

Sur les dépens

32

L’affaire étant renvoyée devant le Tribunal, il convient de réserver les dépens.

 

Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) déclare et arrête :

 

1)

L’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 25 mars 2020, Necci/Commission (T‑129/19, non publiée, EU:T:2020:131), est annulée.

 

2)

L’affaire est renvoyée devant le Tribunal de l’Union européenne.

 

3)

Les dépens sont réservés.

 

Wahl

Biltgen

Rossi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 mai 2021

Le greffier

A. Calot Escobar

Le président de la VIIIème chambre

N. Wahl


( *1 ) Langue de procédure : le français.

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