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Document 62018TJ0337

Arrêt du Tribunal (septième chambre) du 15 septembre 2021.
Laboratoire Pareva et Biotech3D Ltd & Co. KG contre Commission européenne.
Produits biocides – Substance active PHMB (1415 ; 4.7) – Refus d’approbation pour les types de produits 1, 5 et 6 – Approbation sous conditions pour les types de produits 2 et 4 – Risques pour la santé humaine et l’environnement – Règlement (UE) no 528/2012 – Article 6, paragraphe 7, sous a) et b), du règlement (UE) no 1062/2014 – Classification harmonisée de la substance active en vertu du règlement (CE) no 1272/2008 – Consultation préalable de l’ECHA – Erreur manifeste d’appréciation – Références croisées – Droit d’être entendu.
Affaires T-337/18 et T-347/18.

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2021:594

 ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

15 septembre 2021 ( *1 )

« Produits biocides – Substance active PHMB (1415 ; 4.7) – Refus d’approbation pour les types de produits 1, 5 et 6 – Approbation sous conditions pour les types de produits 2 et 4 – Risques pour la santé humaine et l’environnement – Règlement (UE) no 528/2012 – Article 6, paragraphe 7, sous a) et b), du règlement délégué (UE) no 1062/2014 – Classification harmonisée de la substance active en vertu du règlement (CE) no 1272/2008 – Consultation préalable de l’ECHA – Erreur manifeste d’appréciation – Références croisées – Droit d’être entendu »

Dans les affaires T‑337/18 et T‑347/18,

Laboratoire Pareva, établi à Saint-Martin-de-Crau (France), représenté par Mes K. Van Maldegem, S. Englebert, P. Sellar et M. Grunchard, avocats,

partie requérante dans les affaires T‑337/18 et T‑347/18,

Biotech3D Ltd & Co. KG, établie à Gampern (Autriche), représentée par Mes K. Van Maldegem, S. Englebert, P. Sellar et M. Grunchard, avocats,

partie requérante dans l’affaire T‑347/18,

contre

Commission européenne, représentée par MM. R. Lindenthal et K. Mifsud-Bonnici, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

République française, représentée par Mme A.-L. Desjonquères, MM. J. Traband, E. Leclerc et W. Zemamta, en qualité d’agents,

et par

Agence européenne des produits chimiques (ECHA), représentée par Mmes M. Heikkilä, C. Buchanan et M. T. Zbihlej, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

ayant pour objet des demandes fondées sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation, dans l’affaire T‑337/18, de la décision d’exécution (UE) 2018/619 de la Commission, du 20 avril 2018, refusant l’approbation du PHMB (1415 ; 4.7) en tant que substance active existante destinée à être utilisée dans des produits biocides des types 1, 5 et 6 (JO 2018, L 102, p. 21), et, dans l’affaire T‑347/18, du règlement d’exécution (UE) 2018/613 de la Commission, du 20 avril 2018, approuvant le PHMB (1415 ; 4.7) en tant que substance active existante destinée à être utilisée dans les produits biocides relevant des types de produits 2 et 4 (JO 2018, L 102, p. 1),

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. R. da Silva Passos, président, Mme I. Reine (rapporteure) et M. M. Sampol Pucurull, juges,

greffier : Mme A. Juhász-Tóth, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 24 septembre 2020,

rend le présent

Arrêt

I. Cadre juridique

A. Règlement no 528/2012 et règlement délégué no 1062/2014

1

Le règlement (UE) no 528/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2012, concernant la mise à disposition sur le marché et l’utilisation des produits biocides (JO 2012, L 167, p. 1), établit des règles régissant, notamment, l’établissement, au niveau de l’Union européenne, d’une liste de substances actives pouvant être utilisées dans les produits biocides.

2

L’article 4, paragraphe 1, du règlement no 528/2012 prévoit qu’une substance active est approuvée pour une durée initiale n’excédant pas dix ans si au moins un produit biocide contenant cette substance active est susceptible de satisfaire aux critères énoncés à l’article 19, paragraphe 1, sous b), de ce règlement, compte tenu des facteurs énoncés à l’article 19, paragraphes 2 et 5, de celui-ci.

3

L’article 6, paragraphe 1, du règlement no 528/2012 définit les données minimales devant être fournies dans le dossier déposé devant l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) à l’appui d’une demande d’approbation. L’article 6, paragraphe 3, de ce règlement permet néanmoins au demandeur de proposer d’adapter certaines données requises faisant partie des dossiers, conformément à l’annexe IV de ce règlement.

4

En outre, l’article 7 du règlement no 528/2012, concernant la soumission et la validation des demandes, prévoit notamment ce qui suit :

« 1.   Le demandeur soumet une demande d’approbation d’une substance active ou de modification ultérieure des conditions d’approbation d’une substance active à l’[ECHA], en lui communiquant le nom de l’autorité compétente de l’État membre qu’il propose pour évaluer la demande et en fournissant une confirmation écrite attestant que cette autorité compétente accepte cette tâche. Cette autorité compétente est l’autorité compétente d’évaluation.

[…]

3.   Dans les trente jours suivant l’acceptation d’une demande par l’[ECHA], l’autorité compétente d’évaluation valide la demande si les données requises en vertu de l’article 6, paragraphe 1, [sous] a) et b), et, le cas échéant, [sous] c), [du présent règlement,] ainsi que tout motif justifiant l’adaptation des exigences en matière de données, ont été transmis.

[…]

4.   Si l’autorité compétente d’évaluation estime que la demande est incomplète, elle en informe le demandeur en précisant les informations complémentaires à fournir pour que la demande puisse être validée et elle fixe un délai raisonnable pour la soumission de ces informations. En principe, ce délai ne dépasse pas 90 jours.

Dans les trente jours suivant la réception des informations complémentaires, l’autorité compétente d’évaluation valide la demande si elle détermine que ces informations sont suffisantes pour qu’il soit satisfait à l’exigence énoncée au paragraphe 3 [du présent article].

L’autorité compétente d’évaluation rejette la demande si le demandeur ne fournit pas les informations demandées dans le délai imparti […] »

5

L’article 8 du règlement no 528/2012 indique ce qui suit :

« 1.   Dans les 365 jours suivant la validation d’une demande, l’autorité compétente d’évaluation évalue cette demande conformément aux articles 4 et 5 [du présent règlement], y compris, le cas échéant, toute proposition d’adaptation des exigences en matière de données présentée conformément à l’article 6, paragraphe 3, [du présent règlement,] et transmet à l’[ECHA] un rapport d’évaluation et les conclusions de son évaluation.

Avant de soumettre ses conclusions à l’[ECHA], l’autorité compétente d’évaluation donne au demandeur la possibilité de présenter par écrit des observations sur le rapport d’évaluation et les conclusions de l’évaluation dans un délai de trente jours. Elle tient dûment compte de ces observations lors de la finalisation de son évaluation.

2.   S’il apparaît que des informations complémentaires sont nécessaires pour réaliser l’évaluation, l’autorité compétente d’évaluation invite le demandeur à fournir ces informations dans un délai déterminé et en informe l’[ECHA]. Comme indiqué à l’article 6, paragraphe 2, deuxième alinéa, [du présent règlement,] l’autorité compétente d’évaluation peut, si nécessaire, requérir du demandeur qu’il fournisse des données suffisantes pour pouvoir déterminer si une substance active répond aux critères visés à l’article 5, paragraphe 1, ou à l’article 10, paragraphe 1[, du présent règlement]. Le délai de 365 jours visé au paragraphe 1 du présent article est suspendu à compter de la date de formulation de la requête, jusqu’à la date de réception des informations. Cette suspension ne dépasse pas 180 jours au total sauf si elle est justifiée par la nature des données requises ou par des circonstances exceptionnelles.

[…]

4.   Dans les 270 jours suivant la réception des conclusions de l’évaluation, l’[ECHA] élabore, en tenant compte des conclusions de l’autorité compétente d’évaluation, un avis relatif à l’approbation de la substance active et le soumet à la Commission. »

6

L’article 10 du règlement no 528/2012, relatif aux substances dont la substitution est envisagée, prévoit ce qui suit :

« 1.   Une substance active est considérée comme une substance dont la substitution est envisagée si l’une des conditions suivantes est remplie :

[…]

d)

la substance répond à deux des critères requis pour être considérée comme une substance [persistante, bioaccumulable et toxique] tels que visés à l’annexe XIII du règlement (CE) no 1907/2006 ;

[…]

4.   Par dérogation à l’article 4, paragraphe 1, et à l’article 12, paragraphe 3, [du présent règlement,] l’approbation d’une substance active dont la substitution est envisagée et chaque renouvellement sont valables pour une durée n’excédant pas sept ans […] »

7

L’article 19, paragraphe 1, du règlement no 528/2012, relatif aux conditions d’octroi d’une autorisation d’un produit biocide, prévoit ce qui suit :

« Un produit biocide […] est autorisé si les conditions suivantes sont réunies :

a)

les substances actives sont énumérées à l’annexe I [du présent règlement] ou approuvées pour le type de produits concerné et toutes les conditions spécifiées pour ces substances actives sont remplies ;

b)

il est établi, conformément aux principes communs d’évaluation des dossiers de produits biocides définis à l’annexe VI [du règlement], que le produit biocide, lorsqu’il est utilisé comme le prévoit l’autorisation et en tenant compte des facteurs visés au paragraphe 2 du présent article, répond aux critères suivants :

i)

le produit biocide est suffisamment efficace ;

ii)

le produit biocide n’a aucun effet inacceptable sur les organismes cibles, en particulier une résistance ou une résistance croisée inacceptable, ou des souffrances et des douleurs inutiles chez les vertébrés ;

iii)

le produit biocide n’a pas, lui-même ou à cause de ses résidus, d’effet inacceptable immédiat ou différé sur la santé humaine, y compris celle des groupes vulnérables, ou sur la santé animale, directement ou par l’intermédiaire de l’eau potable, des denrées alimentaires, des aliments pour animaux, de l’air ou d’autres effets indirects ;

iv)

le produit biocide n’a pas lui-même, ou à cause de ses résidus, d’effet inacceptable sur l’environnement […] »

8

Le règlement délégué (UE) no 1062/2014 de la Commission, du 4 août 2014, relatif au programme de travail pour l’examen systématique de toutes les substances actives existantes contenues dans des produits biocides visé dans le règlement no 528/2012 (JO 2014, L 294, p. 1), définit les règles applicables à la mise en œuvre dudit programme de travail.

9

En particulier, l’article 6, paragraphe 7, du règlement délégué no 1062/2014, dans sa version applicable aux faits de l’espèce, prévoit ce qui suit :

« À l’issue de son évaluation des risques et suivant le cas, l’autorité compétente d’évaluation, sans tarder et au plus tard au moment de la présentation du rapport d’évaluation conformément au paragraphe 3 :

a)

présente une proposition à [l’ECHA] conformément à l’article 37, paragraphe 1, du règlement (CE) no 1272/2008, si elle estime que l’un des critères visés à l’article 36, paragraphe 1, dudit règlement est rempli et ne fait pas l’objet d’un traitement adéquat dans l’annexe VI, partie 3, dudit règlement ;

b)

consulte [l’ECHA] si elle estime que l’un des critères visés à l’article 5, paragraphe 1, [sous] d) ou e), du règlement (UE) no 528/2012, ou la condition énoncée à l’article 10, paragraphe 1, [sous] d), dudit règlement, est rempli et ne fait pas l’objet d’un traitement adéquat dans l’annexe XIV du règlement (CE) no 1907/2006 ou dans la liste des substances visée à l’article 59, paragraphe 1, dudit règlement. »

B. Règles relatives à la classification et à l’étiquetage des substances chimiques

10

Le règlement (CE) no 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relatif à la classification, à l’étiquetage et à l’emballage des substances et des mélanges, modifiant et abrogeant les directives 67/548/CEE et 1999/45/CE et modifiant le règlement (CE) no 1907/2006 (JO 2008, L 353, p. 1), vise à harmoniser les critères de classification des substances et des mélanges ainsi que les règles relatives à l’étiquetage et à l’emballage des substances et des mélanges dangereux.

11

L’article 36, paragraphes 1 et 2, du règlement no 1272/2008 énonce notamment ce qui suit :

« 1.   Une substance qui satisfait aux critères visés à l’annexe I [du règlement] pour les dangers suivants fait généralement l’objet d’une classification et d’un étiquetage harmonisés conformément à l’article 37 [de ce règlement] :

[…]

c)

cancérogénicité, catégorie 1A, 1B ou 2 (annexe I, section 3.6) ;

[…]

2.   Une substance active au sens de […] la directive 98/8/CE fait généralement l’objet d’une classification et d’un étiquetage harmonisés. Pour ces substances, les procédures visées à l’article 37, paragraphes 1, 4, 5 et 6 [du règlement] sont applicables. »

12

L’article 37 du règlement no 1272/2008, relatif à la procédure d’harmonisation, dispose ce qui suit :

« 1.   Une autorité compétente peut soumettre à [l’ECHA] une proposition de classification et d’étiquetage harmonisés de substances […], ou une proposition en vue de leur révision […]

2.   Les fabricants, importateurs ou utilisateurs en aval d’une substance peuvent soumettre à [l’ECHA] une proposition de classification et d’étiquetage harmonisés de cette substance […]

[…]

4.   Le comité d’évaluation des risques de [l’ECHA], institué conformément à l’article 76, paragraphe 1, [sous] c), du règlement (CE) no 1907/2006, adopte un avis sur toute proposition soumise conformément aux paragraphes 1 et 2 dans un délai de dix-huit mois à compter de la réception de la proposition, en donnant aux parties concernées l’occasion de formuler des observations. L’[ECHA] transmet cet avis et toutes les observations à la Commission.

5.   Lorsque la Commission estime que l’harmonisation de la classification et de l’étiquetage de la substance concernée est appropriée, elle soumet à bref délai un projet de décision concernant l’inclusion de cette substance et des éléments de classification et d’étiquetage pertinents dans l’annexe VI, partie 3, tableau 3.1[, du règlement] […]

Une entrée correspondante est incluse à l’annexe VI, partie 3, tableau 3.2, dans les mêmes conditions, jusqu’au 31 mai 2015.

[…] »

II. Antécédents du litige

13

Laboratoire Pareva est un producteur de la substance active chlorhydrate de polyhexaméthylène biguanide (ci-après le « PHMB »). Cette substance est produite à des fins biocides en tant qu’agent désinfectant et produit de protection.

14

Biotech3D Ltd & Co. KG est une cliente de Laboratoire Pareva qui utilise le PHMB (1415 ; 4.7) dans la fabrication de produits biocides qu’elle commercialise dans l’Union.

15

Dans le cadre du programme d’évaluation des substances actives existantes mis en place par la directive 98/8/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 1998, concernant la mise sur le marché des produits biocides (JO 1998, L 123, p. 1), Laboratoire Pareva a notifié à la Commission européenne le PHMB (1415 ; 4.7) en association avec différents types de produits, sous le numéro CAS 91403-50-8 [ci-après le « PHMB de Pareva » ou « PHMB (1415 ; 4.7) »].

16

Dans le cadre du même programme d’évaluation, Lonza (anciennement dénommée Arch Chemicals), non liée à Laboratoire Pareva, a notifié à la Commission le PHMB (1600 ; 1.8) en association avec différents types de produits, sous les deux numéros CAS 27083-27-8 et 32289-58-0 (ci-après le « PHMB de Lonza »).

17

Laboratoire Pareva et Lonza ont envisagé de présenter un dossier commun pour le PHMB. Toutefois, à la suite de diverses réunions et d’échanges de courriers, Lonza a indiqué à Laboratoire Pareva, par lettre du 12 février 2007, qu’une pleine collaboration entre elles à cet effet n’était pas possible, compte tenu de la difficulté de confirmer que les deux notifications se rapportaient exactement à la même spécification de substance.

18

Le 31 juillet 2007, Laboratoire Pareva a déposé un dossier, au sens de l’article 6 du règlement no 528/2012, relatif à la demande d’approbation du PHMB (1415 ; 4.7) pour les types de produits 1 (hygiène humaine), 2 (désinfectants et produits algicides non destinés à l’application directe sur des êtres humains ou des animaux), 4 (désinfectants pour les surfaces en contact avec les denrées alimentaires et les aliments pour animaux), 5 (eau potable) et 6 (protection des produits pendant le stockage) auprès du ministère de l’Écologie et du Développement durable français, en qualité d’autorité compétente d’évaluation (ci-après l’« autorité compétente d’évaluation »). Laboratoire Pareva y a joint une note expliquant les raisons pour lesquelles la présentation d’un dossier commun pour le PHMB avec Lonza n’avait pas été possible.

19

Par courrier du 18 février 2008, l’autorité compétente d’évaluation a informé Laboratoire Pareva que le dossier soumis par celui-ci n’avait pas été jugé suffisant pour permettre l’évaluation des dangers, des risques et de l’efficacité du PHMB (1415 ; 4.7).

20

À la suite de plusieurs réunions et discussions entre l’autorité compétente d’évaluation et Laboratoire Pareva, celui-ci a présenté des informations supplémentaires, y compris de nouveaux rapports et études pour les types de produits 1, 2, 4, 5 et 6.

21

Au mois de septembre 2015, Laboratoire Pareva a obtenu un nouveau numéro CAS pour le PHMB (1415 ; 4.7), à savoir 1802181-67-4.

22

Le 3 juin 2016, l’autorité compétente d’évaluation a communiqué à Laboratoire Pareva un projet de rapport d’évaluation de la substance PHMB (1415 ; 4.7), au sens de l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 528/2012, pour les types de produits 1, 2, 4, 5 et 6 (ci-après le « projet de rapport d’évaluation de juin 2016 »).

23

Dans un document de synthèse du 4 juillet 2016, intitulé « Non-pertinence de la classification du PHMB en tant que substance “persistante” », Laboratoire Pareva a formulé des observations sur l’évaluation du caractère persistant et de la toxicité du PHMB (1415 ; 4.7) dans le projet de rapport d’évaluation de juin 2016 (ci-après le « document de synthèse du 4 juillet 2016 »).

24

Le 13 décembre 2016, l’autorité compétente d’évaluation a communiqué à l’ECHA son rapport d’évaluation sur le PHMB de Pareva ainsi que les conclusions de son évaluation, conformément à l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 528/2012 (ci-après le « rapport d’évaluation de décembre 2016 »).

25

Le 3 mars 2017, Laboratoire Pareva a fourni un document supplémentaire venant compléter le document de synthèse du 4 juillet 2016 (ci-après le « document de synthèse supplémentaire du 3 mars 2017 »).

26

Entre les mois de mai et de septembre 2017, les groupes de travail « Efficacité », « Environnement » et « Santé humaine » du comité des produits biocides de l’ECHA se sont réunis afin d’examiner le rapport d’évaluation de décembre 2016. Laboratoire Pareva a participé à ces réunions.

27

Les 3 et 4 octobre 2017, le comité des produits biocides de l’ECHA s’est réuni en présence de Laboratoire Pareva. À l’issue de cette réunion, ce comité a adopté, par voie de consensus, un avis relatif au PHMB de Pareva, au sens de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 528/2012. Il a considéré, en substance, que ce PHMB ne pouvait pas être approuvé pour ce qui concerne les types de produits 1, 5 et 6 en raison de l’identification de risques inacceptables pour la santé humaine et l’environnement. En revanche, il a estimé que cette même substance pouvait être approuvée pour les types de produits 2 et 4, moyennant certaines spécifications et conditions.

28

En outre, le comité des produits biocides de l’ECHA a conclu que le PHMB (1415 ; 4.7) était une substance préoccupante au sens de l’article 28, paragraphe 2, du règlement no 528/2012, dès lors qu’elle était classée comme sensibilisant cutané de catégorie 1B, cancérogène de catégorie 2, toxique spécifique pour un organe cible à la suite d’une exposition répétée par inhalation et toxique pour les organismes aquatiques (catégorie 1). Il a également considéré qu’il s’agissait d’une substance dont la substitution était envisagée, au sens de l’article 10 de ce règlement, dès lors qu’elle s’avérait très persistante (vP) et toxique (T).

29

Au mois de novembre 2017, l’autorité compétente d’évaluation a finalisé son rapport d’évaluation sur le PHMB (1415 ; 4.7) en ce qui concerne les types de produits 1, 2, 4, 5 et 6 en tenant compte du résultat des discussions relatives à cette substance au sein du comité des produits biocides de l’ECHA (ci-après le « rapport d’évaluation de novembre 2017 »).

30

Le 20 avril 2018, la Commission a adopté la décision d’exécution (UE) 2018/619, refusant l’approbation du PHMB (1415 ; 4.7) en tant que substance active existante destinée à être utilisée dans des produits biocides des types 1, 5 et 6 (JO 2018, L 102, p. 21, ci-après la « décision attaquée »). Ainsi qu’il ressort de cette décision, la Commission a considéré, conformément à l’avis du comité des produits biocides de l’ECHA, qu’il convenait de ne pas approuver cette substance pour ces types de produits en raison des risques inacceptables qu’elle présentait pour la santé humaine et pour l’environnement.

31

Le 20 avril 2018 également, la Commission a adopté le règlement d’exécution (UE) 2018/613, approuvant le PHMB (1415 ; 4.7) en tant que substance active existante destinée à être utilisée dans les produits biocides relevant des types de produits 2 et 4 (JO 2018, L 102, p. 1, ci-après le « règlement attaqué »). Ainsi qu’il ressort du considérant 5 de ce règlement, la Commission a estimé qu’il était permis d’escompter que les produits biocides des types 2 et 4 satisferaient aux exigences de l’article 19, paragraphe 1, sous b), du règlement no 528/2012, pour autant que certaines spécifications et conditions énoncées en annexe de ce règlement soient respectées. En outre, il ressort des considérants 7 et 8 de ce règlement que le PHMB de Pareva s’avérait très persistant (vP) et toxique (T), de sorte qu’il satisfaisait aux critères pour être considéré comme une substance dont la substitution était envisagée, au sens de l’article 10 de ce règlement, et que son approbation ne pouvait excéder sept ans.

III. Procédure et conclusions des parties

32

Par requêtes déposées au greffe du Tribunal le 1er juin 2018, Laboratoire Pareva a introduit le recours dans l’affaire T‑337/18 et, avec Biotech3D, le recours dans l’affaire T‑347/18.

33

Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le même jour, Laboratoire Pareva a introduit, dans l’affaire T‑337/18, une demande en référé tendant au sursis à l’exécution de la décision attaquée.

34

Le 5 juin 2018, par acte séparé déposé au greffe du Tribunal, Laboratoire Pareva et Biotech3D ont introduit, dans l’affaire T‑347/18, une demande en référé tendant au sursis à l’exécution du règlement attaqué.

35

Par ordonnance du 24 août 2018, Laboratoire Pareva et Biotech3D/Commission (T‑337/18 R et T‑347/18 R, non publiée, EU:T:2018:587), le président du Tribunal a rejeté les demandes en référé mentionnées aux points 33 et 34 ci-dessus et réservé les dépens.

36

Par actes déposés au greffe du Tribunal, respectivement, le 6 septembre et le 26 septembre 2018, l’ECHA et la République française ont demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission dans les affaires T‑337/18 et T‑347/18.

37

Le 28 septembre 2018, Laboratoire Pareva a déposé au greffe du Tribunal, par actes séparés, deux nouvelles demandes en référé dans le cadre, respectivement, de l’affaire T‑337/18 et de l’affaire T‑347/18, fondées sur l’existence de faits nouveaux au sens de l’article 160 du règlement de procédure du Tribunal.

38

Par ordonnances du 25 octobre 2018, Laboratoire Pareva/Commission (T‑337/18 R II, non publiée, EU:T:2018:729), et du 25 octobre 2018, Laboratoire Pareva/Commission (T‑347/18 R II, non publiée, EU:T:2018:730), le président du Tribunal a rejeté les nouvelles demandes en référé et réservé les dépens.

39

Par ordonnances du président de la quatrième chambre du Tribunal du 3 décembre 2018, l’ECHA a été admise à intervenir au soutien des conclusions de la Commission dans les affaires T‑337/18 et T‑347/18.

40

Par décisions du président de la quatrième chambre du Tribunal du 6 décembre 2018, la République française a été admise à intervenir au soutien des conclusions de la Commission dans les affaires T‑337/18 et T‑347/18.

41

La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, en application de l’article 27, paragraphe 5, du règlement de procédure, la juge rapporteure a été affectée à la septième chambre, à laquelle les présentes affaires ont, par conséquent, été attribuées.

42

Par décision du 4 février 2020, le président de la septième chambre du Tribunal, les parties entendues, a joint les affaires T‑337/18 et T‑347/18 aux fins de la phase orale de la procédure, conformément à l’article 68, paragraphe 2, du règlement de procédure.

43

Le 18 février 2020, le Tribunal a adressé des questions aux parties dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure. Les parties ont répondu à ces questions dans le délai imparti.

44

L’audience de plaidoiries initialement prévue le 30 avril 2020 ayant été reportée, les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 24 septembre 2020.

45

Dans l’affaire T‑337/18, Laboratoire Pareva conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

déclarer le recours fondé et annuler la décision attaquée ;

condamner la Commission aux dépens.

46

Dans l’affaire T-337/18, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le premier moyen comme inopérant ou non fondé ;

rejeter le recours comme non fondé pour le surplus ;

condamner Laboratoire Pareva aux dépens.

47

Dans l’affaire T-337/18, l’ECHA conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours comme non fondé ;

condamner Laboratoire Pareva aux dépens.

48

Dans l’affaire T‑347/18, Laboratoire Pareva et Biotech3D concluent, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

déclarer le recours fondé et annuler le règlement attaqué dans la mesure où celui-ci qualifie le PHMB (1415 ; 4.7) de substance dont la substitution est envisagée et soumet son utilisation au respect de certaines spécifications et conditions ;

condamner la Commission aux dépens.

49

Dans l’affaire T‑347/18, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le premier moyen comme inopérant ou non fondé ;

rejeter le recours comme non fondé pour le surplus ;

condamner Laboratoire Pareva et Biotech3D aux dépens.

50

Dans l’affaire T‑347/18, l’ECHA conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours comme non fondé ;

condamner Laboratoire Pareva et Biotech3D aux dépens.

51

Dans les affaires T‑337/18 et T‑347/18, la République française conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter les recours.

IV. En droit

A. Sur la jonction des affaires T‑337/18 et T‑347/18 aux fins de la décision mettant fin à l’instance

52

En vertu de l’article 19, paragraphe 2, du règlement de procédure, le président de la septième chambre du Tribunal a déféré la décision sur la jonction des affaires T‑337/18 et T‑347/18 aux fins de la décision mettant fin à l’instance, qui relevait de sa compétence, à la septième chambre du Tribunal.

53

Les parties ayant été entendues dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure à l’égard d’une jonction éventuelle, il y a lieu de joindre les affaires T‑337/18 et T‑347/18 aux fins de la décision mettant fin à l’instance, pour cause de connexité.

B. Sur la recevabilité du recours dans l’affaire T‑347/18

54

Dans le cadre de l’affaire T‑347/18, la Commission soutient que le recours est manifestement irrecevable dans la mesure où il a été introduit par Biotech3D, au motif que celle-ci n’est ni directement ni individuellement concernée par le règlement attaqué.

55

À cet égard, la qualité pour agir de Laboratoire Pareva, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, n’est pas contestée. En effet, Laboratoire Pareva est directement concerné par le règlement attaqué, en ce sens que celui-ci, d’une part, produit directement des effets sur sa situation juridique et, d’autre part, ne laisse aucun pouvoir d’appréciation aux destinataires chargés de sa mise en œuvre, celle-ci ayant un caractère purement automatique et découlant de la seule réglementation de l’Union, sans application d’autres règles intermédiaires. En outre, en tant qu’auteur de la demande d’approbation d’une substance active, ayant soumis le dossier et ayant participé à la procédure d’évaluation, Laboratoire Pareva est individuellement concerné par ce règlement (voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2019, Probelte/Commission, T‑67/18, EU:T:2019:873, point 64).

56

Or, dès lors que la qualité pour agir d’une partie requérante est établie, s’agissant d’un seul et même recours, il n’y a pas lieu d’examiner la qualité pour agir des autres parties requérantes (voir, en ce sens, arrêts du 24 mars 1993, CIRFS e.a./Commission, C‑313/90, EU:C:1993:111, point 31, et du 9 juin 2011, Comitato  Venezia vuole vivere  e.a./Commission, C‑71/09 P, C‑73/09 P et C‑76/09 P, EU:C:2011:368, points 36 et 37).

57

Par conséquent, il y a lieu de déclarer le recours dans l’affaire T‑347/18 recevable, sans qu’il soit nécessaire d’examiner la qualité pour agir de Biotech3D.

C. Sur le fond

58

À l’appui de leurs recours, les requérants, Laboratoire Pareva et Biotech3D, invoquent quatre moyens, tirés, le premier, du non-respect des étapes de la procédure requises pour adopter la décision et le règlement attaqués, le deuxième, d’une erreur manifeste d’appréciation liée à la prise en compte d’éléments non pertinents, le troisième, d’une erreur manifeste d’appréciation liée à la non-prise en compte d’éléments pertinents et, le quatrième, de la violation du droit d’être entendu.

1.   Sur le premier moyen, relatif au non-respect des étapes de la procédure requises pour adopter la décision et le règlement attaqués

59

Premièrement, les requérants font valoir que l’autorité compétente d’évaluation n’a présenté aucune proposition de classification harmonisée pour le PHMB de Pareva à l’ECHA, en violation de l’article 6, paragraphe 7, sous a), du règlement délégué no 1062/2014. Deuxièmement, ils soutiennent que cette autorité a omis de consulter préalablement l’ECHA sur la persistance et la toxicité de cette substance, en méconnaissance de l’article 6, paragraphe 7, sous b), de ce règlement délégué.

a)   Sur la première branche du premier moyen, tirée de la violation de l’article 6, paragraphe 7, sous a), du règlement délégué no 1062/2014

60

Les requérants soulignent que, dans le rapport d’évaluation de décembre 2016, l’autorité compétente d’évaluation a qualifié le PHMB de Pareva de substance cancérogène de catégorie 2. Par conséquent, en vertu de l’article 6, paragraphe 7, sous a), du règlement délégué no 1062/2014, cette autorité aurait dû soumettre à l’ECHA une proposition de classification harmonisée de cette substance au sens de l’article 36 et de l’article 37, paragraphe 1, du règlement no 1272/2008 avant de lui présenter son rapport d’évaluation. Cela aurait d’ailleurs été reconnu par le président du comité des produits biocides de l’ECHA.

61

Selon les requérants, il ne saurait être dérogé à l’obligation de formuler la proposition visée au point 60 ci-dessus que lorsqu’il existe déjà une classification harmonisée de la substance en cause au sens de l’annexe VI, partie 3, du règlement no 1272/2008. Or, une telle classification harmonisée n’aurait existé que pour le PHMB de Lonza, qui serait une substance distincte du PHMB de Pareva.

62

Plus précisément, le PHMB de Pareva et le PHMB de Lonza différeraient en ce qui concerne quatre critères essentiels, à savoir, premièrement, le poids moléculaire moyen, deuxièmement, la polydispersité moyenne, troisièmement, le ratio biguanide-guanidine et, quatrièmement, la répartition et le ratio des groupes terminaux de la chaîne polymère. Ces critères montreraient que le PHMB de Pareva est un polymère plus long, dont la chaîne de distribution est plus large et qui présente une différence dans sa composition chimique. Cela aurait une incidence sur les propriétés intrinsèques de la source de PHMB concernée, comme le démontrerait, par exemple, l’indicateur relatif à la cancérogénicité. Le rapport d’évaluation de décembre 2016 n’expliquerait d’ailleurs nullement pour quels motifs la classification du PHMB figurant à l’annexe IV du règlement no 1272/2008 pouvait s’appliquer au PHMB de Pareva.

63

Les requérants estiment que la violation de l’obligation imposée par l’article 6, paragraphe 7, sous a), du règlement délégué no 1062/2014 a eu des conséquences importantes, car Laboratoire Pareva aurait soumis des études dont les conclusions auraient pu conduire les autorités à adopter une classification harmonisée différente pour le PHMB (1415 ; 4.7) en ce qui concerne la cancérogénicité, distincte de celle du PHMB de Lonza, ce qui aurait pu influer sur l’appréciation des risques présentés par le PHMB de Pareva. En particulier, si le PHMB de Pareva n’avait pas été classé comme cancérogène de catégorie 2, ce qui aurait constitué une différence importante avec le PHMB de Lonza, toute référence croisée avec cette dernière substance aurait été exclue. Les requérants ajoutent que Laboratoire Pareva a été privé de son droit de soumettre des observations sur la proposition de classification harmonisée et d’être entendu devant le comité d’évaluation des risques de l’ECHA, contrairement à ce qui est prévu par l’article 37, paragraphe 4, du règlement no 1272/2008.

64

La Commission, soutenue par l’ECHA et la République française, conteste les arguments des requérants.

65

Il importe de relever que le règlement no 528/2012 et le règlement délégué no 1062/2014 établissent les règles applicables à l’évaluation et à l’approbation des substances actives existantes au sens de ces règlements, en vue de leur utilisation dans des produits biocides. Une telle approbation repose sur l’évaluation des risques que présentent ces substances, compte tenu des types de produits biocides dans lesquelles elles seront utilisées et de l’utilisation proposée de ceux-ci. En revanche, le règlement no 1272/2008 tend, notamment, à l’harmonisation des critères de classification des substances et des mélanges ainsi que des règles relatives à l’étiquetage et à l’emballage des substances et des mélanges dangereux. Ce règlement est donc applicable à toute substance ou mélange qui répond aux critères relatifs aux dangers physiques, aux dangers pour la santé ou aux dangers pour l’environnement, tels qu’ils sont énoncés dans ledit règlement, y compris les substances actives utilisées dans des produits biocides. Ainsi, ces règlements ont pour objet deux matières différentes et régissent deux procédures distinctes, chacune étant organisée selon ses propres règles.

66

L’article 6, paragraphe 7, sous a), du règlement délégué no 1062/2014 prévoit que l’autorité compétente d’évaluation est tenue, à l’issue de son évaluation des risques et suivant le cas, au plus tard au moment de la présentation de son rapport d’évaluation, de soumettre une proposition de classification et d’étiquetage harmonisés à l’ECHA, conformément à l’article 37, paragraphe 1, du règlement no 1272/2008, lorsque, premièrement, elle estime que l’un des critères visés à l’article 36, paragraphe 1, de ce règlement est respecté et, deuxièmement, elle considère que ce critère ne fait pas l’objet d’un traitement adéquat dans l’annexe VI, partie 3, dudit règlement.

67

Il découle de l’article 6, paragraphe 7, sous a), du règlement délégué no 1062/2014 que l’autorité compétente d’évaluation n’est tenue de soumettre une proposition de classification harmonisée qu’après avoir procédé à l’examen de la substance active existante en cause et déterminé, sur la base du dossier complet soumis par le demandeur, quels étaient, d’une part, les effets de cette substance et, d’autre part, les risques qu’elle représentait, notamment, pour la santé humaine et l’environnement compte tenu des types de produits dans lesquels son utilisation était envisagée et des scénarios d’utilisation proposés.

68

En outre, le règlement no 528/2012 et le règlement délégué no 1062/2014 ne prévoient pas que la procédure d’évaluation d’une substance active soit suspendue lorsqu’une proposition de classification et d’étiquetage harmonisés est soumise en vertu de l’article 6, paragraphe 7, sous a), du règlement délégué no 1062/2014. De manière plus générale, il ne ressort aucunement de ces règlements que le législateur ait entendu subordonner la procédure d’approbation d’une substance active existante à la procédure d’harmonisation de la classification et de l’étiquetage d’une telle substance, au sens du règlement no 1272/2008.

69

Au contraire, il découle de ces éléments que l’obligation faite à l’autorité compétente d’évaluation de soumettre une proposition de classification harmonisée pour une substance active à usage biocide constitue une étape préalable à une procédure de classification régie par le règlement no 1272/2008. Or, ainsi qu’il a été exposé au point 65 ci-dessus, une telle procédure de classification est distincte de la procédure d’évaluation prévue par le règlement no 528/2012, telle que mise en œuvre par le règlement délégué no 1062/2014, aux fins de l’approbation d’une substance active en vue de son utilisation dans des produits biocides.

70

Ainsi, quand bien même l’argumentation des requérants selon laquelle l’autorité compétente d’évaluation a enfreint l’article 6, paragraphe 7, sous a), du règlement délégué no 1062/2014 serait fondée, une telle irrégularité ne pourrait pas conduire à l’annulation du règlement et de la décision attaqués. Cette argumentation des requérants est donc inopérante.

71

Par ailleurs, il y a lieu de relever que, lors de l’audience, la Commission, la République française et l’ECHA ont indiqué qu’une nouvelle proposition de classification et d’étiquetage harmonisés de la substance PHMB (1415 ; 4.7) était attendue. Ainsi, la Commission n’avait encore adopté aucun acte relatif à cette procédure, de sorte que les requérants ne peuvent pas utilement invoquer une violation du droit d’être entendu dans le cadre de la procédure de classification et d’étiquetage dans le cadre du présent litige, qui a pour objet la décision et le règlement attaqués concernant l’évaluation et l’approbation du PHMB (1415 ; 4.7).

72

En tout état de cause, même si l’autorité compétente d’évaluation avait dû considérer que le critère lié à la cancérogénicité ne faisait pas l’objet d’un traitement adéquat dans l’annexe VI, partie 3, du règlement no 1272/2008 pour le PHMB de Pareva, de sorte qu’elle aurait dû soumettre une proposition de classification et d’étiquetage harmonisés conformément à l’article 6, paragraphe 7, sous a), du règlement délégué no 1062/2014, il conviendrait encore de vérifier si, en l’absence du non-respect de cette disposition, la décision et le règlement attaqués auraient pu avoir un contenu différent (voir, en ce sens, arrêts du 9 septembre 2008, Bayer CropScience e.a./Commission, T‑75/06, EU:T:2008:317, point 203 et jurisprudence citée, et du 9 septembre 2011, Dow AgroSciences e.a./Commission, T‑475/07, EU:T:2011:445, point 234), ce qu’il appartient aux requérants de démontrer.

73

À cet égard, les requérants font valoir, en substance, que Laboratoire Pareva aurait pu faire valoir son point de vue devant le comité d’évaluation des risques de l’ECHA et présenter de nouvelles études à cet effet. Cela aurait pu permettre d’écarter toute classification du PHMB (1415 ; 4.7) comme cancérogène de catégorie 2 et, par voie de conséquence, de considérer le PHMB de Pareva comme une substance différente du PHMB de Lonza. Une telle différence aurait ainsi fait obstacle à toute référence croisée avec cette dernière substance.

74

Premièrement, il convient de constater que les requérants font référence à de nouvelles études dont les conclusions auraient pu conduire le comité d’évaluation des risques de l’ECHA à ne pas classer le PHMB (1415 ; 4.7) comme substance cancérogène de catégorie 2, sans toutefois identifier les études en cause, ni les données concrètes contenues dans celles-ci susceptibles de démontrer leurs propos.

75

Certes, au cours de l’audience, les requérants ont fait valoir que Laboratoire Pareva aurait pu soumettre au comité d’évaluation des risques de l’ECHA l’étude réalisée suivant les lignes directrices 453 de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pour les essais de produits chimiques afin de démontrer que le PHMB (1415 ; 4.7) n’était pas une substance cancérogène. Toutefois, les requérants ne soulèvent aucun argument circonstancié tiré de cette étude permettant de conclure que, contrairement à l’autorité compétente d’évaluation et au comité des produits biocides de l’ECHA, qui avaient déjà examiné celle-ci, le comité d’évaluation des risques aurait pu aboutir à une conclusion différente sur la cancérogénicité du PHMB de Pareva. De manière plus générale, les requérants n’expliquent pas de manière circonstanciée en quoi le respect de l’obligation figurant à l’article 6, paragraphe 7, sous a), du règlement délégué no 1062/2014 aurait pu mener la Commission à approuver cette substance pour les types de produits 1, 5 et 6 ou à l’approuver à des conditions moins strictes que celles prévues dans le règlement attaqué pour ce qui concerne les types de produits 2 et 4.

76

Quant aux nouvelles études sur la cancérogénicité, invoquées par les requérants dans leurs observations sur les mémoires en intervention de l’ECHA et de la République française, il y a lieu de constater que celles-ci ne font pas partie du dossier soumis au Tribunal et que les affirmations des requérants quant aux constatations qui en découleraient ne sont ni chiffrées ni étayées.

77

À cet égard, un renvoi généralisé au projet de rapport de l’autorité compétente d’évaluation relatif à la classification et à l’étiquetage harmonisés du PHMB de Pareva et du PHMB de Lonza, annexé aux mémoires en défense, ne saurait pallier cette insuffisance de précisions et de preuves. En effet, il n’appartient pas au Tribunal de rechercher et d’identifier, dans les annexes, les moyens et les arguments qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours, les annexes ayant une fonction purement probatoire et instrumentale (voir, en ce sens, arrêt du 17 septembre 2007, Microsoft/Commission, T‑201/04, EU:T:2007:289, point 94 et jurisprudence citée).

78

Deuxièmement, il ressort du point 4.7 du rapport d’évaluation de décembre 2016, dans sa partie commune aux types de produits 1, 2, 4, 5 et 6, que l’autorité compétente d’évaluation a examiné de manière détaillée les résultats de l’étude mentionnée au point 75 ci-dessus ainsi que de diverses études in vitro. C’est à l’issue de l’examen de ces résultats, et non de manière purement automatique, que l’autorité compétente d’évaluation a conclu que la classification existante du PHMB comme substance cancérogène de catégorie 2 pouvait s’appliquer au PHMB de Pareva. Ainsi, les requérants ne sauraient utilement faire valoir que l’autorité compétente d’évaluation n’a pas expliqué comment la classification du PHMB figurant à l’annexe VI, partie 3, du règlement no 1272/2008 pouvait s’appliquer au PHMB de Pareva.

79

En outre, la décision et le règlement attaqués ne se fondent pas exclusivement sur la classification du PHMB de Pareva comme substance cancérogène de catégorie 2, mais bien sur une appréciation des risques présentés par cette substance, compte tenu de l’ensemble des effets que celle-ci peut engendrer et des types de produits pour lesquels son utilisation est envisagée.

80

D’une part, il ressort du considérant 5 de la décision attaquée que les produits biocides de type 1, 5 et 6 contenant le PHMB de Pareva ne peuvent pas être considérés comme respectant le critère énoncé à l’article 19, paragraphe 1, sous b), iv), du règlement no 528/2012, dans la mesure où ils présentent, notamment, des risques inacceptables pour la santé humaine.

81

Ainsi que la Commission et l’ECHA l’ont précisé au cours de l’audience, sans être contredites par les requérants, l’effet tératogène a été identifié comme l’un des effets préoccupants pour la santé humaine en ce qui concerne le PHMB de Pareva. Un niveau de concentration de 12 mg/kg/jour de cette substance a été retenu à cet égard, qui constitue le niveau de concentration le plus faible parmi les niveaux de concentration auxquels les autres effets du PHMB de Pareva pourraient se manifester. Ainsi, ce niveau a été retenu comme étant la dose sans effet néfaste observé (ci-après la « NOAEL ») de référence permettant de calculer les niveaux d’exposition acceptables (ci-après les « AEL ») à cette substance pour les types de produits 1, 5 et 6, ce que les requérants n’ont pas davantage contesté, ni dans leurs écritures ni au cours de l’audience.

82

Partant, même si, à la lumière des études soumises par Laboratoire Pareva, le comité d’évaluation des risques de l’ECHA avait pu écarter toute classification du PHMB (1415 ; 4.7) comme cancérogène de catégorie 2, cela n’aurait pas pu permettre d’écarter tout risque inacceptable pour la santé humaine, ni conduire à une approbation du PHMB de Pareva. La même conclusion s’impose en ce qui concerne l’examen, par ce comité, des données que Laboratoire Pareva aurait soumises en ce qui concerne la sensibilisation cutanée ou la toxicité spécifique pour certains organes cibles, dès lors que ces dangers ne sont pas ceux qui ont été utilisés pour déterminer la NOAEL de référence.

83

D’autre part, s’agissant de l’évaluation des risques pour les produits biocides de type 2 et 4 contenant le PHMB de Pareva, les requérants n’ont pas expliqué pour quels motifs et dans quelle mesure une proposition de classification et d’étiquetage harmonisés du PHMB de Pareva aurait pu modifier, voire écarter, les spécifications et les conditions prévues à l’annexe du règlement attaqué.

84

Il est vrai que, en vertu de l’article 19, paragraphe 4, sous a), du règlement no 528/2012, la classification d’une substance comme étant cancérogène de catégorie 2 peut empêcher l’autorisation de mise à disposition sur le marché d’un produit biocide contenant celle-ci pour utilisation par le grand public. Toutefois, il ne ressort ni des explications des requérants ni du dossier soumis au Tribunal que les spécifications et les conditions imposées par le règlement attaqué aient reposé sur cette disposition, qui n’est au demeurant pas mentionnée dans ledit règlement. En outre, à l’instar de ce qui a été dit au point 81 ci-dessus en ce qui concerne les types de produits 1, 5 et 6, l’effet tératogène constituait la limite critique utilisée pour déterminer les valeurs de référence permettant de calculer les AEL au PHMB de Pareva.

85

En outre, les requérants ne démontrent pas non plus en quoi l’absence de classification du PHMB de Pareva comme substance cancérogène de catégorie 2 aurait pu empêcher que celle-ci fût qualifiée de substance active dont la substitution est envisagée au sens de l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 528/2012, en raison de ses caractéristiques de substance très persistante (vP) et toxique (T).

86

Troisièmement, s’agissant de l’argument des requérants selon lequel une classification différente du PHMB de Pareva s’agissant de la cancérogénicité aurait permis d’écarter toute référence croisée avec le PHMB de Lonza, il convient de constater que, dans le cadre du présent moyen, les requérants n’identifient pas les références croisées litigieuses. Ils n’expliquent pas non plus en quoi de telles références croisées éventuelles auraient eu une incidence déterminante sur l’appréciation des risques présentés par le PHMB de Pareva pour la santé humaine et l’environnement, de sorte que l’évaluation de cette substance aurait pu aboutir à un résultat différent de celui retenu, respectivement, dans la décision attaquée et dans le règlement attaqué.

87

Par conséquent, les requérants n’ont pas démontré que, si l’autorité compétente d’évaluation avait soumis une proposition de classification et d’étiquetage harmonisés à l’ECHA en application de l’article 6, paragraphe 7, sous a), du règlement délégué no 1062/2014, avant ou au moment de lui communiquer le rapport d’évaluation de décembre 2016, le résultat de la procédure d’évaluation du PHMB de Pareva aurait pu être différent de ceux retenus, respectivement, dans la décision attaquée et dans le règlement attaqué.

88

Par conséquent, la première branche du premier moyen doit être rejetée comme étant inopérante et, en tout état de cause, non fondée.

b)   Sur la seconde branche du premier moyen, tirée de la violation de l’article 6, paragraphe 7, sous b), du règlement délégué no 1062/2014

89

Les requérants soutiennent que, en vertu de l’article 6, paragraphe 7, sous b), du règlement délégué no 1062/2014, l’autorité compétente d’évaluation est tenue de consulter l’ECHA si elle estime que la condition énoncée à l’article 10, paragraphe 1, sous d), du règlement no 528/2012 est remplie et ne fait pas l’objet d’un traitement adéquat dans l’annexe XIV du règlement (CE) no 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2006, concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), instituant une agence européenne des produits chimiques, modifiant la directive 1999/45/CE et abrogeant le règlement (CEE) no 793/93 du Conseil et le règlement (CE) no 1488/94 de la Commission ainsi que la directive 76/769/CEE du Conseil et les directives 91/155/CEE, 93/67/CEE, 93/105/CE et 2000/21/CE de la Commission (JO 2006, L 396, p. 1), ou dans la liste des substances visée à l’article 59, paragraphe 1, dudit règlement. En l’espèce, puisque les deux conditions posées par cette disposition étaient remplies, l’autorité compétente d’évaluation aurait dû soumettre le PHMB de Pareva à l’appréciation du groupe d’experts de l’ECHA sur les substances persistantes, bioaccumulables et toxiques (ci-après les « substances PBT »), et ce avant de soumettre son rapport d’évaluation de décembre 2016 à l’ECHA. Or, cette consultation n’aurait pas eu lieu.

90

Les requérants ajoutent que, si le groupe d’experts « PBT » de l’ECHA avait été saisi de la question, le résultat de la procédure aurait pu être différent, car Laboratoire Pareva aurait pu défendre sa position auprès de ces experts pour démontrer que le PHMB (1415 ; 4.7) ne satisfaisait pas aux critères requis pour être considéré comme faisant partie des substances PBT. Notamment, il aurait pu leur soumettre les résultats de plusieurs études permettant de conclure que la toxicité de cette substance était significativement différente selon que le test était réalisé dans des conditions standard ou dans des conditions naturelles, ainsi que cela ressortirait de ses prises de position soumises à l’autorité compétente d’évaluation aux mois de juillet 2016 et de mars 2017. En outre, selon les requérants, l’importance de l’avis du groupe d’experts « PBT » de l’ECHA ressortirait expressément du document de la Commission portant la référence CA-Sept13-Doc.8.3 – Final, intitulé « Review Programme of active substances: establishment of a work programme to meet the 2024 deadline » (Programme de réexamen des substances : établissement d’un programme de travail afin de respecter l’échéance de 2024).

91

La Commission et l’ECHA contestent les arguments des requérants.

92

Il convient de rappeler qu’une substance est considérée comme une substance dont la substitution est envisagée lorsqu’elle répond à l’une des conditions énumérées à l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 528/2012. Conformément au point d) de cette disposition, tel est le cas des substances qui répondent à deux des critères requis pour être considérées comme des substances PBT, au sens de l’annexe XIII du règlement no 1907/2006.

93

S’agissant du PHMB de Pareva, il ressort du rapport d’évaluation de décembre 2016 que l’autorité compétente d’évaluation considérait cette substance comme étant, d’une part, très persistante (vP) et, d’autre part, toxique (T). Le PHMB de Pareva respectait donc, selon cette autorité, les critères d’une substance dont la substitution est envisagée au sens de l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 528/2012.

94

En outre, la Commission et l’ECHA ne contestent pas que, au moment de la communication du rapport d’évaluation de décembre 2016 à l’ECHA, le PHMB de Pareva ne figurait ni sur la liste des substances soumises à autorisation de l’annexe XIV du règlement no 1907/2006, ni sur la liste des substances visée à l’article 59, paragraphe 1, de ce règlement, établie par l’ECHA.

95

Par conséquent, l’article 6, paragraphe 7, sous b), du règlement délégué no 1062/2014 trouvait à s’appliquer en l’espèce.

96

Toutefois, contrairement à ce que prétendent les requérants, cette disposition n’exige pas que l’autorité compétente d’évaluation consulte l’ECHA préalablement à la présentation de son rapport d’évaluation. Une telle consultation doit, en effet, avoir lieu au plus tard au moment de la présentation de ce rapport.

97

En outre, il convient de constater que l’article 6, paragraphe 7, sous b), du règlement délégué no 1062/2014 se limite à exiger que l’autorité compétente d’évaluation consulte l’ECHA, mais ne précise pas s’il incombe à cette dernière de s’adresser à son groupe d’experts « PBT » afin de se prononcer sur le caractère persistant, bioaccumulable et toxique d’une substance active au sens du règlement no 1907/2006. En l’absence de toute indication spécifique dans ce règlement, une telle précision relève donc de l’organisation interne de cette agence. Il y a lieu, à cet égard, de se référer au document de la Commission portant la référence CA-Sept13-Doc.8.3 – Final, mentionné au point 90 ci-dessus. Le point 4.3, sous b), de ce document indique qu’une telle consultation est hautement préférable et vivement recommandée. Toutefois, ce document ne va pas jusqu’à imposer une obligation générale en ce sens. Dans ces conditions, il convient de reconnaître que, par ces termes, l’ECHA dispose d’une certaine marge d’appréciation quant à la question de savoir si le groupe d’experts « PBT » doit être saisi lorsqu’une autorité compétente d’évaluation demande un avis conformément à l’article 6, paragraphe 7, sous b), du règlement délégué no 1062/2014.

98

Comme la Commission et l’ECHA l’ont indiqué, afin de ne pas retarder inutilement les travaux relatifs à l’évaluation d’une substance active, la saisine du groupe d’experts « PBT » de l’ECHA, qui est au demeurant un groupe informel, n’intervient que dans des cas pour lesquels il n’existe aucun consensus sur les propriétés PBT de celle-ci. Cette approche est, au demeurant, conforme à l’objectif énoncé au point 3 du document de la Commission portant la référence CA-Sept13-Doc.8.3 – Final, à savoir garantir la mise en œuvre la plus efficace possible du cadre en matière de produits biocides.

99

Or, en l’espèce, il ressort du dossier qu’il existait un consensus au sein du comité des produits biocides de l’ECHA sur le caractère très persistant (vP) et toxique (T) du PHMB (1415 ; 4.7), nonobstant le fait que Laboratoire Pareva avait soumis le document de synthèse du 4 juillet 2016 et le document de synthèse supplémentaire du 3 mars 2017 afin de contester de telles propriétés.

100

En particulier, il ressort du procès-verbal des réunions du groupe de travail « Environnement » du comité des produits biocides de l’ECHA, auxquelles Laboratoire Pareva a participé, que le document de synthèse du 4 juillet 2016 et le document de synthèse supplémentaire du 3 mars 2017 ont fait l’objet de discussions lors de ces réunions, quant à la nécessité de les prendre en compte malgré leur dépôt tardif. L’ECHA a ainsi accepté de prendre en compte une des nouvelles études soumises par Laboratoire Pareva en ce qui concerne la toxicité. De plus, les arguments de Laboratoire Pareva, relatifs au caractère dégradable du PHMB (1415 ; 4.7), selon lesquels cette substance se liait très rapidement avec des supports, ont été examinés.

101

En outre, il ressort du procès-verbal de la réunion du comité des produits biocides de l’ECHA des 3 et 4 octobre 2017 que les arguments de Laboratoire Pareva, qui a participé à cette réunion, sur la nécessité de consulter le groupe d’experts « PBT » ont été écartés aux motifs, premièrement, qu’il existait un consensus clair au sein du groupe de travail « Environnement » de ce comité sur le caractère très persistant (vP) et toxique (T) du PHMB de Pareva, deuxièmement, que, en pratique, il n’était pas nécessaire de consulter le groupe d’experts « PBT » lorsque cela s’avérait inutile et, troisièmement, que le groupe de travail « Environnement » possédait une expérience considérable sur cette problématique.

102

Ainsi qu’il ressort du point 29 ci-dessus, l’autorité compétente d’évaluation a modifié le rapport d’évaluation de décembre 2016 afin de prendre en compte les résultats des discussions au sein du comité des produits biocides de l’ECHA. L’avis de l’ECHA sur le caractère très persistant (vP) et toxique (T) du PHMB (1415 ; 4.7) se reflète donc dans le rapport d’évaluation de novembre 2017, tel que soumis à la Commission avant l’adoption de la décision et du règlement attaqués.

103

Par ailleurs, s’agissant de l’allégation de Laboratoire Pareva selon laquelle il n’aurait pas été entendu sur le classement du PHMB (1415 ; 4.7) comme substance très persistante (vP) et toxique (T), il découle des éléments portés à la connaissance du Tribunal dans le cadre de la présente procédure qu’il a été en mesure de présenter ses observations sur le projet de rapport d’évaluation de juin 2016, y compris sur le caractère persistant, bioaccumulable et toxique du PHMB (1415 ; 4.7), avant que ce rapport soit communiqué à l’ECHA.

104

De même, après la communication du rapport d’évaluation de décembre 2016 à l’ECHA, Laboratoire Pareva a eu l’occasion de formuler des commentaires concernant la persistance et la toxicité du PHMB (1415 ; 4.7) dans le cadre des réunions des groupes de travail du comité des produits biocides de l’ECHA. En vertu de l’article 75, paragraphe 1, sous d), du règlement no 528/2012, c’est à ce comité, et non au groupe d’expert « PBT », qu’il appartient d’élaborer les avis de l’ECHA relatifs à la désignation des substances actives dont la substitution est envisagée.

105

Dans ces conditions, l’article 6, paragraphe 7, sous b), du règlement délégué no 1062/2014 n’a pas été enfreint.

106

Par conséquent, la seconde branche du premier moyen doit être rejetée, ainsi que le premier moyen dans son ensemble.

2.   Sur le deuxième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation liée à la prise en compte d’éléments non pertinents et d’un défaut de motivation

107

Les requérants font valoir que la décision et le règlement attaqués sont entachés d’une erreur manifeste d’appréciation en ce que l’autorité compétente d’évaluation, le comité des produits biocides de l’ECHA et la Commission auraient fait de multiples références croisées avec le PHMB de Lonza dans le cadre de leur évaluation du PHMB de Pareva, alors que les deux substances sont différentes. Par ailleurs, ces références croisées avec le PHMB de Lonza ne seraient pas suffisamment motivées.

a)   Sur la première branche du deuxième moyen, relative aux multiples références croisées avec le PHMB de Lonza

108

Les requérants soutiennent que l’autorité compétente d’évaluation, le comité des produits biocides de l’ECHA et la Commission ont évalué le PHMB de Pareva en se contentant de reprendre de façon systématique les conclusions de l’examen du PHMB de Lonza. Or, il s’agirait de deux substances différentes, comme en attestent, notamment, leurs numéros CAS distincts ainsi que leur masse moléculaire moyenne en nombre (Mn) et leur indice de polydispersité (PDI) différents. L’ECHA aurait d’ailleurs reconnu qu’au moins un paramètre était considéré comme différent pour les deux substances en cause. La décision et le règlement attaqués seraient ainsi fondés largement et de façon déterminante sur des données afférentes à une autre substance.

109

Les requérants ajoutent que, même si les références croisées ont été uniquement utilisées pour un seul indicateur, relatif à la toxicité par inhalation, cela a eu une incidence négative sur l’évaluation du PHMB (1415 ; 4.7). Des études disponibles sur la toxicité par inhalation montreraient des différences très nettes entre le PHMB de Pareva et celui de Lonza. De plus, le dossier soumis par Laboratoire Pareva contiendrait une étude relative à l’administration d’une dose répétée par voie orale qui aurait pu être utilisée afin de ne pas recourir à une valeur par défaut.

110

La Commission, soutenue par l’ECHA et la République française, conteste les arguments des requérants.

1) Observations liminaires

111

Il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort de son considérant 3, le règlement no 528/2012 a pour but d’améliorer la libre circulation des produits biocides dans l’Union tout en garantissant un niveau élevé de protection de la santé humaine et animale et de l’environnement. Ce règlement se fonde sur le principe de précaution afin de garantir que la fabrication et la mise à disposition sur le marché de substances actives et de produits biocides n’ont pas d’effets nocifs sur la santé humaine ou animale ou d’incidences inacceptables sur l’environnement.

112

Afin de pouvoir poursuivre efficacement l’objectif qui lui est assigné, et en considération des appréciations scientifiques complexes qu’elle doit opérer lorsque, dans le cadre de l’examen des demandes d’approbation de substances actives en vertu du règlement no 528/2012, elle procède à l’évaluation des risques posés par l’utilisation de ces substances, un large pouvoir d’appréciation doit être reconnu à la Commission (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 22 décembre 2010, Gowan Comércio Internacional e Serviços, C‑77/09, EU:C:2010:803, point 55).

113

L’exercice du pouvoir d’appréciation de la Commission n’est toutefois pas soustrait au contrôle juridictionnel. En effet, dans le cadre de ce contrôle, le juge de l’Union doit vérifier le respect des règles de procédure, l’exactitude matérielle des faits retenus par la Commission, l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits ou l’absence de détournement de pouvoir (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 22 décembre 2010, Gowan Comércio Internacional e Serviços, C‑77/09, EU:C:2010:803, point 56).

114

En particulier, afin de vérifier si une erreur manifeste d’appréciation a été commise par l’institution compétente, le juge de l’Union doit contrôler si cette institution a examiné, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce, éléments qui appuient les conclusions qui en sont tirées (arrêt du 22 décembre 2010, Gowan Comércio Internacional e Serviços, C‑77/09, EU:C:2010:803, point 57).

115

C’est à la lumière de ces principes qu’il y a lieu d’examiner si l’évaluation du PHMB de Pareva repose sur des références croisées systématiques avec le PHMB de Lonza et si la décision et le règlement attaqués sont entachés d’une erreur manifeste d’appréciation pour ce motif.

2) Sur le recours systématique à des références croisées avec le PHMB de Lonza

116

Les requérants citent, à titre non exhaustif, plusieurs exemples de références au PHMB de Lonza dans le dossier soumis au Tribunal, qu’ils qualifient de références croisées illicites avec cette substance. Ces références se refléteraient, premièrement, dans la classification du PHMB de Pareva comme substance cancérogène de catégorie 2 dans le rapport d’évaluation de décembre 2016, deuxièmement, dans les valeurs utilisées afin de déterminer la concentration acceptable d’exposition (ci-après l’« AEC ») par inhalation du PHMB de Pareva, troisièmement, dans le tableau de discussion en vue de la réunion de suivi ad hoc du groupe de travail « Environnement » du comité des produits biocides de l’ECHA du 26 juin 2017, concernant la détermination de la concentration prédite sans effet (PNEC) sur les sédiments, quatrièmement, dans les discussions relatives aux AEL faisant l’objet de la réunion de suivi ad hoc du groupe de travail « Santé humaine » du comité des produits biocides de l’ECHA du 5 juillet 2017 et, cinquièmement, dans une liste en annexe de chacune des requêtes.

117

Il convient d’examiner chacun des exemples mentionnés par les requérants. Bien que, selon ceux-ci, ces exemples ne soient pas exhaustifs, il n’incombe néanmoins pas au Tribunal de rechercher dans le dossier produit devant lui d’éventuelles autres références au PHMB de Lonza qui figureraient dans les documents issus de la procédure administrative ayant conduit à l’adoption des actes attaqués. En effet, ainsi qu’il ressort du point 77 ci-dessus, il n’appartient pas au Tribunal de rechercher et d’identifier dans les annexes les moyens et les arguments qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours, celles-ci ayant une fonction purement probatoire et instrumentale.

i) Sur la classification du PHMB de Pareva en tant que substance cancérogène de catégorie 2

118

Tout d’abord, il est vrai que, dans le rapport d’évaluation de décembre 2016, dans sa partie commune aux types de produits 1, 2, 4, 5 et 6, l’autorité compétente d’évaluation a constaté l’existence d’une classification harmonisée du PHMB à l’annexe I du règlement no 1272/2008. Il ressort de cette classification que le PHMB était considéré comme une substance cancérogène de catégorie 2. Néanmoins, après avoir opéré une telle constatation, l’autorité compétente d’évaluation a vérifié si une telle classification pouvait également s’appliquer au PHMB (1415 ; 4.7), à la lumière des données et des études soumises par Laboratoire Pareva dans le dossier visé à l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 528/2012.

119

En particulier, l’autorité compétente d’évaluation a examiné les résultats de l’étude menée conformément aux lignes directrices 453 de l’OCDE pour les essais de produits chimiques, fournie par Laboratoire Pareva. Elle a constaté que cette étude mettait en lumière le potentiel cancérogène du PHMB de Pareva compte tenu, notamment, des hamartomes et adénomes hépatocellulaires observés dans le foie des rats. Elle en a conclu que les résultats de cette étude ne remettaient pas en cause la classification existante du PHMB comme substance cancérogène de catégorie 2, de sorte que celle-ci s’appliquait aussi au PHMB de Pareva.

120

En outre, les requérants ont reconnu que la classification existante du PHMB, à l’annexe I du règlement no 1272/2008, résultait d’une proposition de classification du PHMB introduite par l’autorité compétente d’évaluation, qui se fondait sur des études relatives non seulement au PHMB de Lonza, mais aussi, dans une certaine mesure, au PHMB de Pareva.

121

Partant, il ne saurait être soutenu que l’autorité compétente d’évaluation se soit exclusivement fondée sur les résultats d’études réalisées sur le PHMB de Lonza, sans aucun examen des données propres au PHMB de Pareva, pour classer cette substance comme étant cancérogène de catégorie 2.

122

Par ailleurs, de manière plus générale, la classification existante du PHMB, qui figurait à l’annexe I du règlement no 1272/2008, n’a nullement été appliquée comme telle au PHMB de Pareva, sans autre appréciation. Au contraire, il ressort des rapports d’évaluation de décembre 2016 et de novembre 2017, dans leur partie commune aux types de produits 1, 2, 4, 5 et 6, que l’autorité compétente d’évaluation a effectué un examen détaillé des propriétés du PHMB de Pareva, compte tenu des études disponibles et des données fournies par Laboratoire Pareva.

123

Il résulte de ce qui précède que les arguments des requérants selon lesquels la classification du PHMB de Pareva comme substance cancérogène de catégorie 2 reposerait sur une simple reprise systématique des données afférentes au PHMB de Lonza sont non fondés.

ii) Sur la détermination des valeurs afférentes à l’AEC par inhalation

124

La Commission et l’ECHA ont reconnu qu’une référence croisée avec le PHMB de Lonza avait effectivement été appliquée dans le cadre de l’évaluation du PHMB de Pareva en ce qui concerne la détermination des valeurs afférentes à l’AEC par inhalation, faute d’étude disponible sur ce point concernant cette dernière substance.

125

En l’espèce, premièrement, il ressort du procès-verbal des réunions du groupe de travail « Santé humaine » du comité des produits biocides de l’ECHA que, dans le cadre de ses observations sur le projet de rapport d’évaluation de juin 2016, soit à un stade très avancé de la procédure d’évaluation, Laboratoire Pareva avait soumis de nouveaux scénarios d’utilisation pour les types de produits 2 et 4, notamment sous forme de vaporisateurs. Dans ce contexte, afin de pouvoir évaluer les risques dans le cadre de tels scénarios d’utilisation, le groupe de travail a décidé qu’il y avait lieu d’établir une valeur de référence spécifique en ce qui concerne la toxicité par inhalation. Faute d’étude disponible dans le dossier, le groupe de travail a alors décidé d’examiner, dans le cadre d’une réunion de suivi ad hoc, le recours à une référence croisée avec le PHMB de Lonza.

126

À cet égard, il ressort du dossier que Laboratoire Pareva avait, certes, soumis une étude préliminaire de toxicité subaigüe par inhalation à l’autorité compétente d’évaluation, mais que cette étude avait été jugée non fiable en raison de l’absence de validation des méthodes d’analyse utilisées. Laboratoire Pareva avait alors indiqué qu’une autre étude était en cours, mais n’avait finalement soumis aucun rapport sur cette étude à l’autorité compétente d’évaluation. Le dossier ne contenait donc pas d’étude spécifique relative à la toxicité par inhalation du PHMB de Pareva, ce que les requérants ne contestent pas.

127

En ce qui concerne l’étude relative à l’administration d’une dose répétée par voie orale, qui aurait prétendument pu être utilisée pour déterminer, par dérivation, la valeur de référence en ce qui concerne la toxicité par inhalation, il y a lieu de constater que cette étude ne concerne pas l’administration d’une dose répétée par inhalation. Or, ainsi qu’il ressort du point 4 du procès-verbal des réunions du groupe de travail « Santé humaine » du comité des produits biocides de l’ECHA, les valeurs d’absorption par voie orale, par voie cutanée et par inhalation ne sont pas identiques. De plus, la Commission a indiqué, sans être contredite sur ce point par les requérants, que les valeurs afférentes à l’AEC sont fixées dans le cadre d’évaluations spécifiques à la voie concernée.

128

Deuxièmement, il est vrai que l’autorité compétente d’évaluation et le comité des produits biocides de l’ECHA ont tous deux estimé que le PHMB de Lonza et celui de Pareva étaient des substances distinctes.

129

Toutefois, le fait que le PHMB de Pareva et le PHMB de Lonza ne sont pas des substances identiques n’implique nullement qu’ils ne puissent pas partager certaines caractéristiques pertinentes et présenter un profil toxicologique similaire. Telle était d’ailleurs initialement la position de Laboratoire Pareva, puisque celui-ci avait tenté de déposer un dossier commun avec Lonza en vue de l’approbation du PHMB.

130

S’agissant des quatre critères permettant de différencier le PHMB de Pareva et le PHMB de Lonza, à savoir le poids moléculaire moyen, la polydispersité moyenne, le ratio biguanide-guaninide ainsi que la répartition et le ratio des groupes terminaux de la chaîne polymère, les requérants n’avancent aucune explication circonstanciée permettant de démontrer pourquoi ces deux substances auraient dû avoir des valeurs manifestement différentes en ce qui concerne ces critères pour l’AEC par inhalation.

131

En outre, ainsi qu’il ressort du procès-verbal des réunions du groupe de travail « Santé humaine » du comité des produits biocides de l’ECHA, l’autorité compétente d’évaluation a exposé qu’il n’était pas possible d’exclure un effet local du PHMB de Pareva, lié à une exposition par inhalation, aux motifs, d’une part, que la classification « toxicité aigüe par inhalation » figurant à l’annexe I du règlement no 1272/2008 reposait sur les données relatives aux deux sources de PHMB et, d’autre part, que l’étude préliminaire de toxicité subaigüe par inhalation de Laboratoire Pareva avait déjà montré une irritation des voies respiratoires. Sur la base de ces éléments, la majorité des membres du groupe de travail a accepté d’avoir recours à une référence croisée avec la valeur concernant l’AEC du PHMB de Lonza. Le groupe de travail n’a donc pas accepté les arguments de Laboratoire Pareva selon lesquels son PHMB et celui de Lonza avaient des profils toxicologiques à ce point différents qu’ils auraient empêché une telle référence croisée.

132

Par conséquent, les arguments des requérants selon lesquels l’autorité compétente d’évaluation et l’ECHA auraient commis une erreur manifeste d’appréciation en appliquant une référence croisée avec le PHMB de Lonza sont non fondés.

133

En tout état de cause, ainsi qu’il ressort du point 81 ci-dessus, l’effet tératogène a été identifié comme l’un des effets préoccupants pour la santé humaine en ce qui concerne le PHMB de Pareva. Un niveau de concentration de 12 mg/kg/jour de cette substance a été retenu à cet égard, qui constitue le niveau de concentration le plus faible parmi les niveaux de concentration auxquels les autres effets du PHMB de Pareva pourraient se réaliser. Ainsi, ce niveau a été retenu comme NOAEL de référence permettant de calculer les AEL à cette substance, ce que les requérants n’ont pas contesté, ni dans leurs écritures ni au cours de l’audience. C’est donc l’effet tératogène, et non la toxicité subaigüe par inhalation, qui constitue le facteur déterminant pour l’appréciation des risques inacceptables que présente le PHMB de Pareva pour la santé humaine.

134

Partant, même si les arguments des requérants visant à contester le recours à la référence croisée litigieuse étaient fondés, ils ne seraient pas de nature à remettre en cause le résultat de l’évaluation du PHMB de Pareva, de sorte qu’ils peuvent également être écartés comme inopérants.

iii) Sur le tableau de discussion en vue de la réunion de suivi ad hoc du groupe de travail « Environnement » du comité des produits biocides de l’ECHA du 26 juin 2017

135

Il ressort du tableau de discussion en vue de la réunion de suivi ad hoc du groupe de travail « Environnement » du comité des produits biocides de l’ECHA du 26 juin 2017, concernant la question du calcul de la concentration prédite sans effet sur les sédiments, que Laboratoire Pareva avait fourni une nouvelle étude sur l’espèce Lumbriculus variegatus, acceptée par le groupe de travail. Conformément aux points 39 et suivants de l’annexe VI du règlement no 528/2012, le groupe de travail a proposé d’appliquer un facteur d’évaluation aux résultats de cette étude, compte tenu de sa durée et de l’espèce visée, afin de prendre en compte le degré d’incertitude entachant l’extrapolation à l’environnement réel des résultats de l’essai effectué sur un nombre limité d’espèces. Ce facteur était, en l’occurrence, de 100.

136

À cet égard, il a certes été souligné que le facteur d’évaluation retenu était cohérent avec le facteur précédemment utilisé dans le dossier d’évaluation du PHMB de Lonza. Ce facteur ne se confond toutefois pas avec les données de l’étude fournie par Laboratoire Pareva, propres au PHMB (1415 ; 4.7), auxquelles il s’applique.

137

Par ailleurs, il ressort du tableau de discussion en cause que Laboratoire Pareva avait proposé, dans un document soumis conjointement avec l’étude sur l’espèce Lumbriculus variegatus, de normaliser la valeur de référence de la concentration sans effet observé pour tenir compte de la teneur en carbone organique. Toutefois, une telle normalisation n’a pas été acceptée, au motif qu’elle n’était pas recommandée en vertu du guide de l’ECHA sur le règlement sur les produits biocides. À cet égard, il a été ajouté, à titre d’information, qu’une telle normalisation n’avait pas non plus été effectuée pour le PHMB de Lonza. Il était ainsi proposé, pour des raisons de cohérence, de ne pas appliquer ce facteur pour le PHMB de Pareva.

138

Compte tenu de ce qui précède, il ne ressort nullement du tableau de discussion en cause que les résultats des études relatives au PHMB de Lonza aient été repris comme tels afin de calculer les valeurs de référence du PHMB de Pareva. Les arguments des requérants tirés d’une erreur manifeste d’appréciation à cet égard sont donc non fondés.

iv) Sur les AEL faisant l’objet de la réunion de suivi ad hoc du groupe de travail « Santé humaine » du comité des produits biocides de l’ECHA du 5 juillet 2017

139

Le document préparé dans le cadre de la réunion de suivi ad hoc du groupe de travail « Santé humaine » du comité des produits biocides de l’ECHA du 5 juillet 2017 résume les questions qu’il appartient à ce groupe de travail de trancher ainsi que les principaux arguments et les données chiffrées du dossier devant être pris en compte. Plus précisément, le document examine des données du dossier soumis par Laboratoire Pareva concernant la tératogénicité, afin de déterminer la NOAEL applicable au PHMB de Pareva. Cette valeur devait par la suite permettre de calculer les AEL à cette même substance, nécessaires pour évaluer les risques de celle-ci pour la santé humaine.

140

Ainsi, s’il est vrai que, à la page 5 de ce document, il est observé que « les [AEL du PHMB de Pareva] seront du même ordre que ceux du dossier de Lonza (0,0057 mg/kg pc/j) », ce constat repose sur les données propres au dossier soumis par Laboratoire Pareva.

141

Il ne ressort donc pas du constat en cause que l’autorité compétente d’évaluation ou l’ECHA ait fondé les AEL du PHMB de Pareva sur les données du PHMB de Lonza.

v) Sur les autres exemples de références au PHMB de Lonza, énumérés dans la liste figurant à l’annexe A 36 de la requête dans l’affaire T‑337/18 et à l’annexe A 40 de la requête dans l’affaire T‑347/18

142

Il y a lieu de constater que les autres exemples de références au PHMB de Lonza, cités à l’annexe A 36 de la requête dans l’affaire T‑337/18 et à l’annexe A 40 de la requête dans l’affaire T‑347/18, ne démontrent pas que les données relatives au PHMB de Lonza aient été utilisées en lieu et place de celles qui figuraient dans le dossier de Laboratoire Pareva.

143

Premièrement, s’agissant des exemples tirés des documents intitulés « RCOM du 31 mars 2017 » et « RCOM complété par l’autorité compétente d’évaluation », il y a lieu de constater que ces documents ne figurent pas dans le dossier soumis au Tribunal, de sorte que les exemples qui s’y rapportent ne sont pas étayés. En tout état de cause, ces extraits constituent manifestement des commentaires, des questions et des propositions formulés par des États membres en vue de l’évaluation du PHMB de Pareva par le comité des produits biocides de l’ECHA. Ils ne traduisent aucune décision de ce comité de faire effectivement une référence croisée au PHMB de Lonza.

144

Deuxièmement, les extraits du document intitulé « Tableau de discussion pour le groupe de travail “Environnement” de l’ECHA » concernent des commentaires ou des questions formulés par un État membre, qui ne préjugent en rien la position finale du comité des produits biocides de l’ECHA, et une réponse de l’autorité compétente d’évaluation concernant les propriétés d’absorption du PHMB. Cette réponse tend uniquement à garantir la cohérence des méthodes appliquées dans le cadre de l’évaluation du PHMB de Pareva et du PHMB de Lonza, sans indiquer que les données relatives au PHMB de Lonza ont été appliquées en lieu et place de celles issues du dossier d’approbation du PHMB de Pareva.

145

Troisièmement, les extraits du document intitulé « Tableau de discussion pour le groupe de travail “Santé humaine” de l’ECHA », de même que ceux du procès-verbal des réunions du groupe de travail « Santé humaine » de l’ECHA, du procès-verbal des réunions du groupe de travail « Environnement » de l’ECHA et du document intitulé « Discussion dans le cadre du suivi ad hoc sur l’“environnement” » ne reflètent aucune décision de ces groupes de travail d’appliquer au PHMB de Pareva les données afférentes au PHMB de Lonza. Ils démontrent uniquement la volonté des participants aux groupes de travail de garantir la cohérence des méthodes appliquées dans le cadre de l’évaluation du PHMB de Pareva et du PHMB de Lonza. Par ailleurs, le document intitulé « Discussion dans le cadre du suivi ad hoc sur l’“environnement” » ne figure pas dans le dossier soumis au Tribunal, de sorte que cet exemple n’est, en tout état de cause, pas étayé.

146

Quatrièmement, les deux extraits issus du document intitulé « Discussions dans le cadre du suivi ad hoc sur la toxicité » portent sur le recours à une référence croisée avec le PHMB de Lonza en ce qui concerne la détermination de l’AEC par inhalation. Les arguments des requérants tirés d’une erreur manifeste d’appréciation concernant cette référence croisée ont déjà été examinés et rejetés aux points 124 à 132 ci-dessus.

147

Ainsi, aucun des exemples de référence au PHMB de Lonza énumérés par les requérants dans la liste en annexe de chacune des requêtes ne permet de conclure que l’autorité compétente d’évaluation, le comité des produits biocides de l’ECHA et la Commission se seraient systématiquement fondés sur les résultats de l’examen du PHMB de Lonza ou se seraient référés, à tort, aux données relatives au PHMB de Lonza. Les arguments des requérants tirés d’une erreur manifeste d’appréciation à cet égard sont donc non fondés.

148

Il résulte de tout ce qui précède que les requérants n’ont pas démontré que les autorités responsables de l’évaluation du PHMB (1415 ; 4.7) aient commis une erreur manifeste d’appréciation en ayant omis d’examiner avec soin et impartialité tous les éléments pertinents du cas d’espèce ou qu’elles aient manifestement dépassé leur pouvoir d’appréciation en ayant recours à la méthode des références croisées. Partant, la première branche du deuxième moyen doit être rejetée.

b)   Sur la seconde branche du deuxième moyen, tirée de l’absence de motivation suffisante concernant le recours aux références croisées

149

Les requérants font valoir que les références croisées avec le PHMB de Lonza ne pourraient être admises que si elles étaient accompagnées d’une description suffisante et fiable de la méthode appliquée, conformément au point 1.5 de l’annexe IV du règlement no 528/2012. Cette obligation constituerait une expression particulière de l’obligation de motivation, prévue à l’article 296 TFUE.

150

Or, le document du comité des produits biocides de l’ECHA du 27 septembre 2017 intitulé « Questions ouvertes » et le document de synthèse de l’autorité compétente d’évaluation sur le PHMB, établi en vue des discussions du groupe de travail « Santé humaine » de ce comité et accompagné des observations de Laboratoire Pareva (ci-après le « document de synthèse sur la toxicité »), ne donneraient aucune description suffisante et fiable de la méthode appliquée pour effectuer les références croisées avec le PHMB de Lonza. De surcroît, ce dernier document n’aurait pas été communiqué à Laboratoire Pareva avant les réunions du groupe de travail concerné et il n’y aurait eu aucune possibilité de débattre de la méthode à appliquer selon les règles de procédure en vigueur.

151

La Commission conteste les arguments des requérants.

152

Il ressort du premier alinéa introductif de l’annexe IV du règlement no 528/2012, lu conjointement avec l’article 6, paragraphe 3, de ce règlement, que cette annexe énonce les règles à suivre lorsqu’un demandeur propose d’adapter les exigences en matière de données requises par ce règlement. Dans ce contexte, le point 1.5, cinquième alinéa, de l’annexe IV de ce règlement prévoit que, lorsque le demandeur propose d’avoir recours à des références croisées pour des substances qui peuvent être considérées comme un groupe ou une « catégorie » de substances, il doit fournir une description suffisante et fiable de la méthode appliquée.

153

Ainsi, il résulte de la lecture conjointe de l’article 6, paragraphe 3, et de l’annexe IV du règlement no 528/2012 que l’obligation de fournir une description suffisante et fiable de la méthode appliquée en cas de références croisées, prévue dans cette annexe et invoquée par les requérants, ne s’applique pas aux autorités responsables de l’évaluation d’une substance active.

154

Toutefois, il ne saurait en être conclu que, lorsque les autorités responsables de l’évaluation d’une substance active décident de pallier des lacunes dans le dossier soumis par un demandeur en ayant recours à la méthode des références croisées, elles seraient dispensées de fournir une motivation adéquate et suffisante à cet égard, conformément à l’article 296 TFUE. Une telle motivation doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement des autorités concernées, de manière à permettre au demandeur de connaître les justifications des références croisées retenues et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle.

155

En l’espèce, il ressort de l’examen de la première branche du deuxième moyen ci-dessus que l’autorité compétente d’évaluation et le comité des produits biocides de l’ECHA n’ont eu recours qu’à une seule référence croisée aux valeurs du PHMB de Lonza, qui concerne la détermination de la valeur de l’AEC par inhalation, en raison de l’absence d’étude disponible dans le dossier d’approbation du PHMB de Pareva sur cet aspect.

156

À cet égard, il est vrai que le document du comité des produits biocides de l’ECHA du 27 septembre 2017 intitulé « Questions ouvertes » ne contient pas de justification détaillée quant au recours à la référence croisée en cause.

157

Toutefois, le document de synthèse sur la toxicité examine spécifiquement la question d’une référence croisée entre le PHMB de Pareva et le PHMB de Lonza pour ce qui concerne la détermination de la valeur afférente à l’AEC par inhalation. Ainsi, ce document contient plusieurs tableaux comparatifs relatifs aux résultats des études disponibles, respectivement, sur la toxicité aigüe, sur la génotoxicité et sur la toxicité répétée du PHMB de Pareva et du PHMB de Lonza. Il y est indiqué que ces deux substances sont structurellement proches d’un point de vue physico-chimique et que leur profil de toxicité n’est que légèrement différent pour ce qui est de la toxicité orale aigüe et de l’irritation oculaire.

158

Le document de synthèse sur la toxicité indique, en outre, que la classification du PHMB à l’annexe I du règlement no 1272/2008 en ce qui concerne la toxicité par inhalation a été opérée sur la base de données relatives au PHMB de Pareva et au PHMB de Lonza. Il en ressort également que ces deux substances ont un profil de toxicité similaire après une exposition répétée et qu’une irritation des voies respiratoires avait été observée dans l’étude préliminaire de toxicité subaigüe par inhalation fournie par Laboratoire Pareva, ce que les requérants ne contestent pas.

159

Ainsi qu’il ressort du procès-verbal des réunions du groupe de travail « Santé humaine » du comité des produits biocides de l’ECHA, le contenu du document de synthèse sur la toxicité a été discuté au sein de ce groupe de travail, en présence de Laboratoire Pareva. Le recours à la référence croisée en cause, fondé sur les constats rappelés au point 158 ci-dessus, a fait l’objet d’une réunion de suivi ad hoc à laquelle Laboratoire Pareva a participé et a été validé par la majorité des membres de ce groupe au cours de cette réunion.

160

Ainsi, Laboratoire Pareva a été mis en mesure de comprendre les motifs qui ont amené le comité des produits biocides de l’ECHA à procéder à une référence croisée avec le PHMB de Lonza. Ces motifs font apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement ayant conduit à recourir à la méthode des références croisées et ont permis à Laboratoire Pareva de connaître les justifications de la mesure prise et au Tribunal d’exercer son contrôle.

161

À cet égard, le fait que le document de synthèse sur la toxicité n’a pas été communiqué à Laboratoire Pareva avant la première réunion du groupe de travail « Santé humaine » du comité des produits biocides de l’ECHA, qui s’est tenue du 29 mai au 2 juin 2017, est sans incidence dans le cadre de l’appréciation de la motivation concernant le recours à la référence croisée avec le PHMB de Lonza. En effet, il n’est pas contesté que Laboratoire Pareva s’est vu communiquer ce document peu après cette première réunion, de sorte qu’il disposait de celui-ci bien avant l’adoption de la décision et du règlement attaqués.

162

Partant, le grief tiré du défaut de motivation concernant le recours à une référence croisée avec le PHMB de Lonza est non fondé.

163

Il y a donc lieu de rejeter le deuxième moyen dans son ensemble.

3.   Sur le troisième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation liée à la non-prise en compte d’éléments pertinents

164

Les requérants soutiennent que la décision et le règlement attaqués sont entachés d’une erreur manifeste d’appréciation au motif que l’autorité compétente d’évaluation et le comité des produits biocides de l’ECHA n’ont pas pris en compte plusieurs études et documents pertinents soumis par Laboratoire Pareva.

165

Selon les requérants, l’autorité compétente d’évaluation et le comité des produits biocides de l’ECHA ont eu recours à l’utilisation de références croisées avec le PHMB de Lonza pour l’examen du PHMB de Pareva et ont considéré le recours à ces références comme une méthode par défaut. L’absence de prise en compte des données propres au PHMB de Pareva aurait donné lieu à l’établissement de faibles valeurs de référence pénalisantes, comme le démontrerait un document de synthèse établi par un consultant externe indépendant.

166

En décidant d’ignorer, de manière discrétionnaire, les données produites de bonne foi par Laboratoire Pareva, l’autorité compétente d’évaluation aurait eu un comportement incohérent, n’aurait fourni de motivation ni exhaustive ni adéquate et n’aurait pas accepté de prendre en compte de nouvelles études censées remplacer les études fournies dans le dossier d’approbation du PHMB de Pareva et non acceptées.

167

Les requérants ajoutent que, en se fondant sur la méthode et les conclusions d’études utilisées pour le PHMB de Lonza deux années avant l’examen du PHMB de Pareva, le comité des produits biocides de l’ECHA s’est fondé sur la prémisse que les avis et les méthodes des experts ne devraient pas évoluer, ce qui serait erroné.

168

La Commission, soutenue par l’ECHA, conteste les arguments des requérants.

a)   Observations liminaires

169

Il convient de rappeler que la procédure d’approbation des substances actives prévue au chapitre II du règlement no 528/2012 repose sur l’introduction d’une demande d’approbation. À cet égard, en vertu de l’article 6 de ce règlement, il incombe au demandeur de fournir à l’autorité compétente d’évaluation un dossier complet permettant à celle-ci de vérifier si la substance en cause respecte les critères d’approbation des substances actives, tels que définis à l’article 4, paragraphe 1, de ce règlement, à la lumière du principe de précaution.

170

Ainsi qu’il ressort de l’article 7, paragraphes 3 et 4, du règlement no 528/2012, après avoir accepté une demande d’approbation, l’autorité compétente d’évaluation peut, si elle estime que le dossier est incomplet, octroyer un délai supplémentaire au demandeur pour fournir les informations manquantes, qui ne dépasse pas, en principe, 90 jours. À l’issue de ce délai, la demande qui demeure incomplète ne peut être validée et est donc rejetée.

171

À l’inverse, si les données requises en vertu de l’article 6, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement no 528/2012 ont été transmises et si, partant, le dossier est considéré comme complet, l’autorité compétente d’évaluation valide la demande.

172

Dans les 365 jours suivant la validation d’une demande, l’autorité compétente d’évaluation évalue cette demande sur la base du dossier du demandeur. À cet effet, elle peut encore inviter celui-ci à soumettre des données complémentaires nécessaires à la clarification du dossier, conformément à l’article 8, paragraphe 2, du règlement no 528/2012.

173

Toutefois, le règlement no 528/2012 et le règlement délégué no 1062/2014 ne prévoient aucune possibilité pour le demandeur de compléter son dossier de sa propre initiative après la validation de sa demande, quels qu’en soient les motifs. Ces règlements ne prévoient pas non plus la possibilité, pour celui-ci, de soumettre de nouvelles informations après que l’autorité compétente d’évaluation lui a transmis son projet de rapport d’évaluation pour observations.

174

Néanmoins, il ressort des lignes directrices du comité des produits biocides de l’ECHA relatives à l’introduction de nouvelles informations durant le processus d’examen par les pairs de l’approbation de la substance active du 20 janvier 2016 (ci-après les « lignes directrices de l’ECHA sur l’introduction de nouvelles informations ») que, dans la pratique, il est parfois nécessaire pour ce comité de recueillir des informations supplémentaires aux fins de cet examen. La soumission de nouvelles informations à ce stade de la procédure d’évaluation est toutefois conditionnée par le respect de quatre conditions. Premièrement, le délai de 270 jours imparti à l’ECHA pour rendre son avis peut être respecté, deuxièmement, il apparaît au cours du processus que les conclusions de l’évaluation par l’autorité compétente d’évaluation peuvent être modifiées de manière significative, troisièmement, l’information nouvelle est déjà disponible et peut être soumise immédiatement après la réunion du groupe de travail concerné et, quatrièmement, ce groupe de travail a décidé que de nouvelles informations étaient nécessaires et a défini celles-ci.

175

Par conséquent, dans le cadre de l’évaluation d’une substance active en vertu du règlement no 528/2012 et du règlement délégué no 1062/2014, ni l’autorité compétente d’évaluation ni l’ECHA ne sont tenues d’accepter toute nouvelle étude ou donnée supplémentaire qu’un demandeur souhaiterait leur soumettre de sa propre initiative après que le dossier de ce demandeur a été jugé comme complet et ainsi validé par l’autorité compétente d’évaluation.

176

Par ailleurs, la simple allégation d’une évolution de l’état des connaissances scientifiques et techniques depuis la notification ne permet pas aux personnes qui ont notifié une substance active et qui sont exposées à la probabilité d’une décision de non-approbation de cette substance ou à un règlement d’approbation sous conditions de bénéficier de la possibilité de soumettre de nouvelles études et données aussi longtemps que des doutes concernant l’innocuité de ladite substance active persistent. Une telle interprétation serait contraire à l’objectif d’un niveau élevé de protection de la santé humaine et animale ainsi que de l’environnement qui sous-tend le règlement no 528/2012, en ce qu’elle équivaudrait à accorder à la partie ayant notifié la substance active, qui a la meilleure connaissance de la substance en cause, un droit de veto à l’adoption d’une éventuelle décision de non-approbation de celle-ci (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 3 septembre 2009, Cheminova e.a./Commission, T‑326/07, EU:T:2009:299, point 169).

177

Certes, il ne saurait être exclu que, dans des circonstances particulières, il soit nécessaire de tenir compte de nouveaux documents ou de nouvelles données produits par le demandeur, qui n’étaient pas disponibles au moment de la validation du dossier déposé par celui-ci. Ainsi qu’il ressort du point 174 ci-dessus, une telle possibilité est d’ailleurs prévue par les lignes directrices de l’ECHA sur l’introduction de nouvelles informations.

178

Toutefois, il convient de rappeler que c’est au demandeur qu’il incombe de démontrer que les conditions d’approbation sont satisfaites afin d’obtenir l’approbation d’une substance active, et non à la Commission de prouver qu’il n’est pas satisfait aux conditions d’approbation afin de pouvoir la refuser (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 17 mai 2018, BASF Agro e.a./Commission, T‑584/13, EU:T:2018:279, points 86 et 88). Compte tenu de cette répartition de la charge de la preuve, lorsqu’un demandeur estime que de nouvelles données ou études, soumises après la validation de son dossier, auraient dû être prises en compte pour l’évaluation de la substance en cause, il lui appartient de démontrer que de telles données ou études ne pouvaient pas être présentées avant la validation de son dossier, qu’elles sont nécessaires et qu’elles remettent manifestement en cause le résultat de la procédure d’évaluation.

b)   Sur les documents prétendument non pris en compte dans l’évaluation du PHMB de Pareva

179

Au titre des documents et des études prétendument non pris en compte dans l’évaluation du PHMB de Pareva, les requérants citent le document de synthèse du 4 juillet 2016, le document de synthèse supplémentaire du 3 mars 2017, plusieurs études soumises au groupe de travail « Environnement » du comité des produits biocides de l’ECHA, les observations sur le document de synthèse sur la toxicité ainsi qu’une étude préliminaire de toxicité subaigüe par inhalation et un rapport rédigé par un consultant externe sur la dérivation des valeurs afférentes aux AEL, à la dose de référence aigüe et à la dose journalière admissible, daté du mois de juillet 2017 (ci-après le « rapport du consultant externe »). Ils font également référence à sept nouvelles études soumises au groupe de travail « Efficacité » du comité des produits biocides de l’ECHA.

1) Sur le document de synthèse du 4 juillet 2016, le document de synthèse supplémentaire du 3 mars 2017 et la liste des nouvelles études soumises au groupe de travail « Environnement » du comité des produits biocides de l’ECHA

180

À titre liminaire, il convient de rappeler que, en vertu de l’annexe V du règlement (CE) no 2032/2003 de la Commission, du 4 novembre 2003, concernant la seconde phase du programme de travail de dix ans visé à l’article 16, paragraphe 2, de la directive 98/8, et modifiant le règlement (CE) no 1896/2000 (JO 2003, L 307, p. 1), Laboratoire Pareva était tenu de présenter un dossier complet pour le PHMB (1415 ; 4.7) au plus tard le 31 juillet 2007. Néanmoins, l’autorité compétente d’évaluation n’a considéré ce dossier comme étant complet qu’au mois de janvier 2016. Jusqu’à cette date, Laboratoire Pareva a eu l’occasion de soumettre toutes les études et tous les documents censés permettre à l’autorité compétente d’évaluation de procéder à l’évaluation du PHMB de Pareva.

181

Il ressort du dossier soumis au Tribunal que Laboratoire Pareva a communiqué le document de synthèse du 4 juillet 2016 à l’autorité compétente d’évaluation dans le cadre de ses observations sur le projet de rapport d’évaluation de juin 2016. Ce document de synthèse était accompagné d’une liste d’études en préparation, qui devaient être réalisées conformément, respectivement, aux lignes directrices 303A, 201, 212, 222, 208 et 225 de l’OCDE pour les essais de produits chimiques. Le 3 mars 2017, Laboratoire Pareva a soumis un document complémentaire à ce document de synthèse, qui incluait les résultats des nouvelles études annoncées.

182

En ce qui concerne la liste d’études en annexe de chacune des requêtes, il convient de constater qu’il y est fait référence, d’une part, aux études visées au point 181 ci-dessus et, d’autre part, à une étude intitulée « Étude comportement PHMBG (HPLC) » réalisée par l’École supérieure de physique et de chimie industrielles de la ville de Paris (ESPCI), datée du mois de mai 2016, à une étude intitulée « Observation microscopique surface (Biophy-R) », également datée du mois de mai 2016, et à une étude sur la toxicité du PHMB sur les organismes vivant dans les sédiments, intitulée « Tox to sediment-Dwelling Phase Midge », réalisée en 2015 conformément aux lignes directrices 218 de l’OCDE pour les essais de produits chimiques.

183

Premièrement, il n’est pas contesté que l’autorité compétente d’évaluation a transmis son rapport d’évaluation de décembre 2016 à l’ECHA sans attendre les résultats des études annoncées dans le document joint au document de synthèse du 4 juillet 2016, visées au point 181 ci-dessus. L’autorité compétente d’évaluation n’a pas non plus suivi l’avis exprimé par Laboratoire Pareva dans ce document, qui remet en cause l’approche suivie concernant l’évaluation de la persistance du PHMB (1415 ; 4.7).

184

Cela étant, le document de synthèse du 4 juillet 2016 ne se contente pas de formuler des observations sur le projet de rapport d’évaluation de juin 2016 au sens de l’article 8, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 528/2012. Au contraire, ainsi qu’il est indiqué dans son introduction, ce document de synthèse tend à apporter des clarifications sur la manière dont il conviendrait d’évaluer la persistance du PHMB de Pareva. Il renvoie notamment, à cet égard, aux résultats de l’étude intitulée « Étude comportement PHMBG (HPLC) » réalisée par l’ESPCI et de l’étude intitulée « Observation microscopique surface (Biophy-R) », datées de 2016, c’est-à-dire postérieures à la validation du dossier d’approbation du PHMB de Pareva. Néanmoins, il ne ressort ni du dossier soumis au Tribunal ni des arguments des parties que ces études aient été sollicitées par l’autorité compétente d’évaluation, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement no 528/2012.

185

Or, ainsi qu’il a été dit au point 175 ci-dessus, l’autorité compétente d’évaluation n’était nullement tenue d’accepter des données et des études supplémentaires soumises après la validation du dossier d’approbation du PHMB de Pareva, ni, a fortiori, d’attendre les résultats de celles-ci avant de transmettre son rapport d’évaluation à l’ECHA dans le délai prévu à l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 528/2012.

186

Deuxièmement, il ressort du dossier soumis au Tribunal que le document de synthèse du 4 juillet 2016 ainsi que les nouvelles études annoncées, examinées dans le document de synthèse supplémentaire du 3 mars 2017, ont fait l’objet de discussions lors des réunions du groupe de travail « Environnement » du comité des produits biocides de l’ECHA. Ce groupe de travail a vérifié si les nouvelles études sur l’environnement soumises par Laboratoire Pareva après la validation du dossier d’approbation du PHMB (1415 ; 4.7) pouvaient être prises en compte, au vu des conditions énoncées dans les lignes directrices de l’ECHA sur l’introduction de nouvelles informations.

187

Le groupe de travail « Environnement » du comité des produits biocides de l’ECHA est néanmoins parvenu à la conclusion, après avoir entendu les arguments de Laboratoire Pareva, qu’il y avait uniquement lieu de prendre en compte une nouvelle étude sur les sédiments. L’incidence des résultats de cette étude supplémentaire a été analysée au cours d’une réunion de suivi ad hoc de ce groupe de travail.

188

Par ailleurs, au cours de la réunion de suivi ad hoc visée au point 187 ci-dessus, les résultats de l’étude sur la toxicité du PHMB sur les organismes vivant dans les sédiments, intitulée « Tox to sediment-Dwelling Phase Midge », réalisée conformément aux lignes directrices 218 de l’OCDE pour les essais de produits chimiques, ainsi que les arguments de Laboratoire Pareva quant à l’interprétation de ces résultats, ont été discutés.

189

En outre, le caractère persistant du PHMB de Pareva a été examiné par le groupe de travail « Environnement » du comité des produits biocides de l’ECHA, en tenant compte des arguments de Laboratoire Pareva sur la dégradabilité du PHMB (1415 ; 4.7).

190

Certes, le groupe de travail « Environnement » du comité des produits biocides de l’ECHA a constaté que certaines des nouvelles études proposées par Laboratoire Pareva ne pouvaient pas être acceptées, conformément à des discussions ayant eu lieu dans le cadre de l’évaluation du PHMB de Lonza. Toutefois, à supposer même qu’une telle approche soit illégale, il n’en demeure pas moins que ces études ont été soumises tardivement, ce que les requérants ne contestent pas, de sorte qu’elles n’avaient pas, en tout état de cause, à être acceptées.

191

De plus, l’argument des requérants selon lequel, en insistant sur la cohérence de la méthode appliquée pour l’examen des deux substances PHMB pour écarter certaines nouvelles études, l’ECHA se serait fondée sur la prémisse erronée que les avis et les méthodes des experts ne devraient pas évoluer doit être écarté. En effet, les requérants n’indiquent nullement en quoi les méthodes sur lesquelles les études en cause sont fondées auraient évolué après la validation du dossier d’approbation du PHMB de Pareva.

192

Troisièmement, les requérants n’ont nullement expliqué pourquoi les études mentionnées au point 181 ci-dessus, qui ont été soumises après la validation du dossier d’approbation du PHMB de Pareva, n’avaient pas pu être produites plus tôt. Ils n’expliquent pas non plus, de façon circonstanciée, en quoi ces études et ces documents étaient nécessaires et devaient manifestement permettre d’aboutir à une évaluation différente du PHMB de Pareva, de sorte que cette substance aurait dû être autorisée, ou à tout le moins être autorisée moyennant certaines conditions moins contraignantes.

193

Notamment, même s’ils indiquent que les nouvelles études et les documents en cause ont été fournis afin de remplacer les études écartées par l’autorité compétente d’évaluation et que l’absence de prise en compte de ces nouvelles études et de ces documents a entraîné une lacune dans les données du dossier d’approbation du PHMB de Pareva en matière d’évaluation des risques pour l’environnement, les requérants n’identifient pas ces lacunes et ne fournissent aucune argumentation circonstanciée permettant d’établir que les conclusions de l’autorité compétente d’évaluation et de l’ECHA étaient manifestement erronées au regard des résultats de ces études.

194

À cet égard, les requérants ne sauraient se contenter d’opérer un renvoi général au document d’un consultant externe sur le ratio de caractérisation des risques pour étayer leur propos. En effet, ainsi qu’il ressort du point 77 ci-dessus, il n’appartient pas au Tribunal de rechercher et d’identifier dans les annexes les arguments qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours, les annexes ayant une fonction purement probatoire et instrumentale.

195

Par conséquent, les arguments des requérants tirés d’une erreur manifeste d’appréciation en raison de l’absence de prise en compte du document de synthèse du 4 juillet 2016, du document de synthèse supplémentaire du 3 mars 2017 et des nouvelles études soumises au groupe de travail « Environnement » du comité des produits biocides de l’ECHA doivent être écartés.

2) Sur les commentaires de Laboratoire Pareva concernant le document de synthèse sur la toxicité et l’étude préliminaire de toxicité subaigüe par inhalation

196

Le document de synthèse sur la toxicité résume la position de l’autorité compétente d’évaluation concernant, notamment, la possibilité de recourir à des références croisées entre le PHMB de Lonza et le PHMB de Pareva ainsi que la nécessité d’avoir recours à une telle référence en ce qui concerne la détermination des valeurs relatives à l’indicateur de l’AEC par inhalation pour le PHMB de Pareva. Ce document mentionne également les objections de Laboratoire Pareva quant au recours à une telle référence croisée, y compris ses arguments quant à la possibilité d’utiliser l’étude préliminaire de toxicité subaigüe par inhalation qu’il avait soumise à l’autorité compétente d’évaluation.

197

Ainsi qu’il ressort du point 126 ci-dessus, le groupe de travail « Santé humaine » du comité des produits biocides de l’ECHA a examiné l’étude préliminaire de toxicité subaigüe par inhalation soumise par Laboratoire Pareva et a estimé que celle-ci était non fiable en raison de l’absence de validation des méthodes d’analyse utilisées, ce que les requérants ne contestent pas. Ainsi, même à supposer que les résultats de cette étude aient montré un niveau de toxicité du PHMB de Pareva beaucoup moins élevé que celui du PHMB de Lonza, l’ECHA ne saurait se voir reprocher de ne pas avoir pris en compte de tels résultats.

198

En outre, comme cela est indiqué au point 131 ci-dessus, les arguments de Laboratoire Pareva visant à contester le recours à une référence croisée avec le PHMB de Lonza afin de déterminer les valeurs relatives à l’indicateur de l’AEC par inhalation n’ont pas été retenus par le groupe de travail « Santé humaine » du comité des produits biocides de l’ECHA, qui a accepté d’avoir recours à la référence croisée avec le PHMB de Lonza.

199

Par ailleurs, ainsi qu’il ressort du point 132 ci-dessus, les requérants n’ont pas démontré que l’autorité compétente d’évaluation et l’ECHA aient commis une erreur manifeste d’appréciation en appliquant la référence croisée avec le PHMB de Lonza pour ce qui concerne la détermination des valeurs d’AEC par inhalation.

200

Par conséquent, les arguments des requérants tirés d’une erreur manifeste d’appréciation en raison de l’absence de prise en compte, dans l’évaluation du PHMB (1415 ; 4.7), des observations de Laboratoire Pareva concernant le document de synthèse sur la toxicité doivent être écartés.

3) Sur le rapport du consultant externe

201

Le rapport du consultant externe vise à contester le calcul des valeurs relatives à la NOAEL ainsi qu’aux AEL proposé par l’autorité compétente d’évaluation sur la base d’une étude de toxicité développementale prénatale chez les lapins fournie par Laboratoire Pareva. Ce rapport examine, en particulier, les résultats de cette étude, tels que mis à jour par Laboratoire Pareva.

202

D’une part, il y a lieu de constater que le rapport du consultant externe a été soumis par Laboratoire Pareva à l’ECHA au mois de juillet 2017, après la tenue de plusieurs réunions de groupes de travail de l’ECHA concernant la demande d’approbation du PHMB (1415 ; 4.7), donc à un stade très avancé de la procédure d’évaluation de cette substance. Ainsi qu’il ressort du point 175 ci-dessus, l’ECHA n’avait aucune obligation d’accepter un tel rapport, que, selon les informations présentées devant le Tribunal, elle n’avait pas sollicité.

203

En outre, les requérants n’ont pas expliqué pourquoi le rapport du consultant externe n’avait pas pu être produit plus tôt.

204

D’autre part, il ressort du dossier soumis au Tribunal que le groupe de travail « Santé humaine » du comité des produits biocides de l’ECHA a bien examiné, au cours d’une réunion tenue au mois de septembre 2017, les modifications apportées par Laboratoire Pareva aux résultats de l’étude de toxicité développementale prénatale chez les lapins, qui font précisément l’objet du rapport du consultant externe. Le groupe de travail a néanmoins conclu que ces modifications n’avaient aucune incidence sur les valeurs relatives à la NOAEL. Par ailleurs, il a été établi au cours de ladite réunion que l’autorité compétente d’évaluation ferait état de ces modifications dans son rapport d’évaluation final.

205

Partant, les arguments des requérants tirés d’une erreur manifeste d’appréciation en raison de l’absence de prise en compte du rapport du consultant externe dans l’évaluation du PHMB (1415 ; 4.7) doivent être écartés.

4) Sur les sept nouvelles études soumises au groupe de travail « Efficacité » du comité des produits biocides de l’ECHA

206

Tout d’abord, il n’est pas contesté que Laboratoire Pareva a soumis les sept nouvelles études d’efficacité au groupe de travail « Efficacité » du comité des produits biocides de l’ECHA après la validation du dossier d’approbation du PHMB (1415 ; 4.7). Or, il ne ressort ni du dossier soumis au Tribunal ni des arguments des parties que ces études aient été sollicitées par l’autorité compétente d’évaluation, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement no 528/2012, ou par le comité des produits biocides de l’ECHA.

207

Ainsi qu’il ressort du point 175 ci-dessus, l’ECHA n’était donc nullement tenue d’accepter les nouvelles études en cause.

208

Ensuite, dans leurs réponses aux questions écrites du Tribunal, les requérants et l’ECHA ont indiqué que le groupe de travail « Efficacité » du comité des produits biocides de l’ECHA avait néanmoins examiné si les sept nouvelles études en cause pouvaient être prises en compte. À cet égard, il ressort du dossier soumis au Tribunal que ce groupe de travail a vérifié si les conditions énoncées dans les lignes directrices de l’ECHA sur l’introduction de nouvelles informations, mentionnées au point 174 ci-dessus, étaient remplies et a conclu que lesdites informations n’étaient pas nécessaires pour l’appréciation de l’efficacité de la substance en cause.

209

Enfin, au cours de l’audience, les requérants ont expliqué qu’ils avaient soumis les sept nouvelles études en cause après la validation du dossier d’approbation du PHMB de Pareva au motif que les études d’efficacité figurant à l’origine dans ce dossier n’avaient pas été acceptées. Toutefois, ainsi qu’il ressort des points 169 et 178 ci-dessus, il appartient au demandeur de déposer un dossier complet qui démontre que sa substance active répond aux critères du règlement no 528/2012 afin qu’elle puisse être approuvée. Dès lors qu’un demandeur soumet des études non fiables ou incomplètes à l’autorité compétente d’évaluation, il ne saurait se voir reconnaître le droit, après la validation de son dossier, de fournir de nouvelles études sans aucune limite dans le temps, sous peine de s’arroger, de facto, le droit de prolonger indéfiniment cette procédure d’évaluation sans qu’aucune décision puisse être adoptée concernant les risques de la substance évaluée, alors que cette dernière se trouve sur le marché de l’Union dans l’attente de l’adoption de ladite décision.

210

Les requérants n’expliquent pas non plus pour quels motifs ces études, qui visaient à améliorer le ratio de caractérisation des risques, n’avaient pas pu être fournies plus tôt.

211

Par conséquent, les arguments des requérants tirés d’une erreur manifeste d’appréciation en raison de l’absence de prise en compte des sept nouvelles études sur l’efficacité dans l’évaluation du PHMB (1415 ; 4.7) doivent être écartés.

212

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, lorsqu’elles ont décidé de ne pas prendre en compte toutes les nouvelles données et études fournies par Laboratoire Pareva après la validation du dossier d’approbation du PHMB (1415 ; 4.7), l’autorité compétente d’évaluation et l’ECHA n’ont pas ignoré ces nouvelles données et études de manière discrétionnaire, mais ont vérifié si les conditions énoncées dans les lignes directrices de l’ECHA sur l’introduction de nouvelles informations étaient remplies.

213

Il s’ensuit que les requérants n’ont pas démontré que l’autorité compétente d’évaluation et l’ECHA aient omis d’examiner avec soin et impartialité tous les éléments pertinents du cas d’espèce, de sorte que le moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation alléguée n’est pas fondé.

214

Cette conclusion n’est pas remise en cause par les arguments des requérants tirés du fait que l’autorité compétente d’évaluation et l’ECHA se seraient contentées de reprendre de façon systématique les données relatives au PHMB de Lonza aux fins de l’évaluation du PHMB de Pareva, dans la mesure où il ressort du point 148 ci-dessus que ces arguments sont non fondés. Les requérants ne sont donc pas fondés à affirmer que l’autorité compétente d’évaluation et l’ECHA ont écarté les nouvelles données et études soumises par Laboratoire Pareva au profit des données relatives au PHMB de Lonza.

215

Par conséquent, le troisième moyen doit être écarté.

4.   Sur le quatrième moyen, tiré de la violation du droit d’être entendu

216

Les requérants font valoir que Laboratoire Pareva n’a pas été mis en mesure de présenter son point de vue convenablement et utilement au cours de la procédure ayant mené à l’adoption de la décision et du règlement attaqués.

217

Premièrement, le document de synthèse sur la toxicité n’aurait été communiqué à Laboratoire Pareva que le 7 juin 2017, après les réunions du groupe de travail du comité des produits biocides de l’ECHA chargé de son examen. Deuxièmement, aucune des sept nouvelles études d’efficacité visant à parfaire l’évaluation pour les types de produits 5 et 6 n’aurait été prise en compte et plusieurs études environnementales auraient été écartées sans motif clair ou fondé. De même, le document de synthèse du 4 juillet 2016 et le document de synthèse supplémentaire du 3 mars 2017 n’auraient pas été pris en compte.

218

Or, selon les requérants, les études et les documents mentionnés au point 217 ci-dessus auraient pu influencer les résultats de l’évaluation du PHMB (1415 ; 4.7) et des discussions des groupes de travail du comité des produits biocides de l’ECHA, dans la mesure où ils auraient pu conduire à retenir d’autres valeurs de référence (notamment concernant la concentration prédite sans effet) et à modifier ainsi les résultats d’évaluation des risques pour les types de produits proposés.

219

La Commission, soutenue par l’ECHA, conteste les arguments des requérants.

220

Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le respect des droits de la défense, dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief à celle-ci, constitue un principe fondamental du droit de l’Union et doit être assuré, même en l’absence de toute réglementation concernant la procédure en cause. Ce principe exige que les destinataires de décisions qui affectent de manière sensible leurs intérêts soient mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue. Le droit d’être entendu, dans le contexte d’une procédure administrative visant une personne spécifique, constitue un corollaire des droits de la défense (voir arrêt du 12 décembre 2014, Xeda International/Commission, T‑269/11, non publié, EU:T:2014:1069, points 107 et 108 et jurisprudence citée).

221

En revanche, s’agissant des actes de portée générale, ni le processus de leur élaboration ni ces actes eux-mêmes n’exigent, en vertu des principes généraux du droit de l’Union, tels que le droit d’être entendu, consulté ou informé, la participation des personnes affectées. Il en est autrement si une disposition expresse du cadre juridique régissant l’adoption dudit acte confère un tel droit procédural à une personne affectée (voir arrêt du 19 décembre 2019, Probelte/Commission, T‑67/18, EU:T:2019:873, point 87 et jurisprudence citée).

222

En l’espèce, la décision attaquée contient une mesure de portée générale qui refuse l’approbation du PHMB (1415 ; 4.7) en tant que substance active existante destinée à être utilisée dans les types de produits 1, 5 et 6. Le règlement attaqué, quant à lui, établit des mesures de portée générale concernant, d’une part, les conditions d’approbation de cette substance pour les types de produits 2 et 4 et, d’autre part, l’inscription de cette substance sur la liste des substances pour lesquelles une substitution est envisagée.

223

Ainsi, les droits procéduraux de Laboratoire Pareva dans le cadre de la procédure relative à l’approbation du PHMB (1415 ; 4.7) étaient ceux explicitement prévus au règlement no 528/2012 et au règlement délégué no 1062/2014.

224

Il ressort de l’article 8, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 528/2012 et de l’article 6, paragraphe 4, du règlement délégué no 1062/2014 que, avant de soumettre ses conclusions à l’ECHA, l’autorité compétente d’évaluation donne au demandeur la possibilité de présenter par écrit des observations sur le rapport d’évaluation et les conclusions de l’évaluation dans un délai de 30 jours. L’autorité compétente d’évaluation tient dûment compte de ces observations lors de la finalisation de son rapport.

225

À cet égard, il ressort du dossier soumis au Tribunal que, après la communication du projet de rapport d’évaluation de juin 2016, Laboratoire Pareva a bénéficié d’un délai de 30 jours pour soumettre ses observations sur ce projet. C’est dans ce contexte que Laboratoire Pareva a soumis le document de synthèse du 4 juillet 2016.

226

Ainsi, Laboratoire Pareva a exercé son droit de fournir des observations sur le projet de rapport d’évaluation de l’autorité compétente d’évaluation, conformément à l’article 8, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 528/2012 et à l’article 6, paragraphe 4, du règlement délégué no 1062/2014.

227

En outre, il n’est pas contesté que Laboratoire Pareva a assisté aux réunions des groupes de travail du comité des produits biocides de l’ECHA, au cours desquelles les risques présentés par le PHMB (1415 ; 4.7) ont été examinés, ainsi qu’à la réunion du comité des produits biocides de l’ECHA des 3 et 4 octobre 2017, au cours de laquelle l’avis de ce comité a été adopté. Il ressort également d’une liste de contacts ayant eu lieu entre l’ECHA et Laboratoire Pareva, fournie par la Commission en annexe de chacun des mémoires en défense, qui n’a pas été contestée par les requérants, que Laboratoire Pareva a eu plusieurs occasions de faire valoir son point de vue au cours du processus d’évaluation du PHMB (1415 ; 4.7) par le comité des produits biocides de l’ECHA.

228

En ce qui concerne les études et les documents qui n’auraient pas été pris en compte par l’autorité compétente d’évaluation et l’ECHA, il y a lieu de rappeler, comme il a été dit au point 173 ci-dessus, que ni le règlement no 528/2012 ni le règlement délégué no 1062/2014 ne prévoient la possibilité, pour le demandeur, de soumettre de nouvelles données et études à l’autorité compétente d’évaluation, voire à l’ECHA, après que le dossier de ce demandeur a été validé par l’autorité compétente d’évaluation.

229

Or, il n’est pas contesté que les nouvelles données contenues dans le document de synthèse du 4 juillet 2016 et le document de synthèse supplémentaire du 3 mars 2017, les nouvelles études soumises au groupe de travail « Environnement » du comité des produits biocides de l’ECHA ainsi que les sept nouvelles études d’efficacité ont été soumises par Laboratoire Pareva après la validation du dossier d’approbation du PHMB (1415 ; 4.7), sans avoir été sollicitées par l’autorité compétente d’évaluation ou par l’ECHA. Le droit de Laboratoire Pareva d’être entendu ne saurait donc avoir été méconnu en raison de la prétendue non-prise en compte de ces données et études.

230

Quant au document de synthèse sur la toxicité, la Commission reconnaît que ce document n’a été communiqué à Laboratoire Pareva qu’après la première réunion du groupe de travail « Santé humaine » du comité des produits biocides de l’ECHA du 31 mai 2017. Toutefois, cette première réunion n’a pas été l’unique occasion pour Laboratoire Pareva de faire valoir ses arguments sur la position de l’autorité compétente d’évaluation formulée dans ledit document de synthèse.

231

En effet, il ressort du procès-verbal des réunions du groupe de travail « Santé humaine » du comité des produits biocides de l’ECHA que les questions relatives à la référence croisée avec le PHMB de Lonza concernant la détermination des valeurs relatives à l’AEC par inhalation ont fait l’objet d’une réunion de suivi ad hoc. En outre, Laboratoire Pareva a encore eu l’opportunité de présenter son point de vue sur la toxicité par inhalation du PHMB (1415 ; 4.7) lors de la réunion du comité des produits biocides de l’ECHA des 3 et 4 octobre 2017.

232

De manière plus générale, les requérants n’ont pas identifié de document, d’étude ou de donnée sur lesquels l’autorité compétente d’évaluation ou l’ECHA auraient fondé l’évaluation du PHMB de Pareva sans donner à Laboratoire Pareva la possibilité d’exprimer utilement son point de vue à cet égard. Ainsi que la Commission l’a souligné au cours de l’audience, près de dix années se sont écoulées entre le dépôt, par Laboratoire Pareva, du dossier d’approbation du PHMB (1415 ; 4.7) et la communication du rapport d’évaluation de décembre 2016 à l’ECHA. Au cours de cette période, particulièrement longue compte tenu des délais prévus par le règlement no 528/2012 pour la validation d’un dossier et l’évaluation d’une substance active sur le fondement de celui-ci, l’autorité compétente d’évaluation a donné l’occasion à Laboratoire Pareva de compléter son dossier d’approbation à plusieurs reprises. De plus, ainsi qu’il ressort notamment du point 100 ci-dessus, l’ECHA a accepté de prendre en compte une nouvelle étude soumise par celui-ci, en dépit de sa tardiveté.

233

Par conséquent, le quatrième moyen est non fondé.

234

Il résulte de tout ce qui précède que les recours doivent être rejetés.

V. Sur les dépens

235

Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

236

Laboratoire Pareva ayant succombé dans l’affaire T-337/18, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission, y compris ceux afférents aux procédures de référé dans les affaires enregistrées sous les numéros T-337/18 R et T-337/18 R II.

237

Laboratoire Pareva et Biotech3D ayant succombé dans l’affaire T‑347/18, il y a lieu de les condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission, y compris ceux afférents à la procédure de référé enregistrée sous le numéro T‑347/18 R. Il convient également de condamner Laboratoire Pareva aux dépens de la procédure en référé enregistrée sous le numéro T‑347/18 R II, conformément aux conclusions de la Commission.

238

Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens. Selon l’article 1er, paragraphe 2, sous f), du règlement de procédure, le terme « institutions » désigne les institutions de l’Union visées à l’article 13, paragraphe 1, TUE ainsi que les organes ou organismes créés par les traités ou par un acte pris pour leur exécution et qui peuvent être parties devant le Tribunal. Selon l’article 100 du règlement no 1907/2006, l’ECHA est un organisme de l’Union. La République française et l’ECHA supporteront donc chacune leurs propres dépens.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

 

1)

Les affaires T‑337/18 et T‑347/18 sont jointes aux fins du présent arrêt.

 

2)

Les recours sont rejetés.

 

3)

Dans l’affaire T‑337/18, Laboratoire Pareva est condamné à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne, y compris ceux afférents aux procédures de référé enregistrées sous le numéro T-337/18 R et T-337/18 R II.

 

4)

Dans l’affaire T‑347/18, Laboratoire Pareva et Biotech3D Ltd & Co. KG sont condamnés à supporter leurs propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission, y compris ceux afférents à la procédure de référé enregistrée sous le numéro T‑347/18 R. Laboratoire Pareva est également condamné à supporter les dépens afférents à la procédure de référé enregistrée sous le numéro T‑347/18 R II.

 

5)

La République française et l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) supporteront chacune leurs propres dépens.

 

da Silva Passos

Reine

Sampol Pucurull

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 septembre 2021.

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.

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