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Document 62017CC0151

    Conclusions de l'avocat général M. H. Saugmandsgaard Øe, présentées le 12 avril 2018.
    Swedish Match AB contre Secretary of State for Health.
    Demande de décision préjudicielle, introduite par la High Court of Justice (England & Wales), Queen's Bench Division (Administrative Court).
    Renvoi préjudiciel – Rapprochement des législations – Fabrication, présentation et vente des produits du tabac – Directive 2014/40/UE – Article 1er, sous c), et article 17 – Interdiction de mise sur le marché des produits du tabac à usage oral – Validité.
    Affaire C-151/17.

    Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2018:241

    CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

    M. HENRIK SAUGMANDSGAARD ØE

    présentées le 12 avril 2018 ( 1 )

    Affaire C‑151/17

    Swedish Match AB

    contre

    Secretary of State for Health,

    en présence de

    New Nicotine Alliance

    (demande de décision préjudicielle formée par la High Court of Justice [England & Wales], Queen’s Bench Division [Administrative Court] [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division du Queen’s Bench (chambre administrative)], Royaume‑Uni)

    « Renvoi préjudiciel – Rapprochement des législations – Fabrication, présentation et vente des produits du tabac – Directive 2014/40/UE – Article 1er, sous c) – Article 17 – Interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral – Demande d’appréciation de validité – Principe de proportionnalité – Principe de précaution »

    I. Introduction

    1.

    Par sa demande de décision préjudicielle, la High Court of Justice (England & Wales), Queen’s Bench Division (Administrative Court) [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division du Queen’s Bench (chambre administrative), Royaume‑Uni] interroge la Cour quant à la validité de l’article 1er, sous c), et de l’article 17 de la directive 2014/40/UE ( 2 ). Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Swedish Match AB au Secretary of State for Health (secrétaire d’État à la Santé, Royaume‑Uni), en présence de la New Nicotine Alliance (ci‑après la « NNA »), au sujet de la validité d’une législation nationale transposant ces dispositions.

    2.

    En vertu de l’article 1er, sous c), et de l’article 17 de la directive 2014/40, les États membres sont tenus d’interdire la mise sur le marché du tabac à usage oral. Ces dispositions maintiennent ainsi une obligation qui lie les États membres depuis 1992 ( 3 ) et avait déjà été reconduite à l’article 8 de la directive 2001/37/CE ( 4 ), l’instrument prédécesseur de la directive 2014/40. Le Royaume de Suède s’en trouve cependant exempté, au titre d’une disposition de l’acte d’adhésion de ce dernier à l’Union européenne ( 5 ), en raison de l’usage traditionnel dans ce pays d’un produit du tabac à usage oral dénommé « snus ».

    3.

    Dans les arrêts Swedish Match ( 6 ) et Arnold André ( 7 ), la Cour a déjà examiné la validité de l’article 8 de la directive 2001/37 et conclu à l’absence d’élément de nature à affecter celle‑ci. Dans le cadre de la présente affaire, la Cour est essentiellement invitée à déterminer si la validité des dispositions de portée similaire prévues par la directive 2014/40 doit désormais être remise en cause eu égard à l’évolution des connaissances scientifiques et du cadre réglementaire applicable aux produits du tabac et aux produits connexes intervenue depuis lors.

    4.

    La question déférée par la juridiction de renvoi soulève plusieurs causes d’invalidité éventuelle de l’article 1er, sous c), et l’article 17 de la directive 2014/40. Conformément à la demande de la Cour, les présentes conclusions se limiteront cependant à l’analyse de cette question en ce qu’elle tend à savoir si ces dispositions sont contraires au principe de proportionnalité. Certaines des considérations développées dans ce contexte seront, néanmoins, également pertinentes en vue de l’examen de cette question en ce qu’elle porte sur la compatibilité desdites dispositions avec le principe de non‑discrimination.

    5.

    J’indique d’emblée que cette analyse ne fera apparaître aucun élément de nature à entraîner l’invalidité des dispositions en cause.

    II. Le cadre juridique

    6.

    Le 19 décembre 2012, la Commission européenne a adopté une proposition de directive visant à réviser la directive 2001/37 (ci‑après la « proposition de la Commission ») ( 8 ), accompagnée d’une analyse d’impact résumant les résultats d’une étude détaillée réalisée par les services de la Commission après avoir lancé une consultation publique des parties intéressées (ci‑après l’« analyse d’impact ») ( 9 ). La Commission y a examiné les différentes options qui s’offraient au législateur en ce qui concerne notamment la réglementation du tabac à usage oral et en a évalué les impacts sanitaires et socio‑économiques potentiels. Elle a tenu compte, à cet effet, d’études scientifiques alors disponibles, et en particulier d’un avis délivré par le comité scientifique des risques sanitaires émergents et nouveaux (CSRSEN) en 2008 à la demande de la Commission (ci‑après l’« avis du CSRSEN ») ( 10 ).

    7.

    La proposition de la Commission et l’analyse d’impact ont servi de base à l’adoption de la directive 2014/40, dont le considérant 32 est ainsi libellé :

    « La directive 89/622/CEE du Conseil [ ( 11 )] a interdit la vente dans les États membres de certains tabacs à usage oral. La directive [2001/37] a réaffirmé cette interdiction. L’article 151 de l’[acte d’adhésion] accorde à la Suède une dérogation à l’interdiction. L’interdiction de la vente de tabac à usage oral devrait être maintenue afin d’empêcher l’introduction dans l’Union (à l’exception de la Suède) de ce produit qui entraîne une dépendance et a des effets indésirables sur la santé humaine. Pour les autres produits du tabac sans combustion qui ne sont pas produits pour le marché de masse, des dispositions strictes en matière d’étiquetage et certaines dispositions concernant leurs ingrédients sont jugées suffisantes pour contenir leur expansion sur le marché au‑delà de leur usage traditionnel. »

    8.

    L’article 1er, sous c), de cette directive dispose :

    « La présente directive a pour objectif le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres concernant :

    [...]

    c)

    l’interdiction de mettre sur le marché les produits du tabac à usage oral ;

    [...] »

    9.

    Aux termes de l’article 2, point 8, de ladite directive, le « tabac à usage oral » désigne « tous les produits du tabac destinés à un usage oral, à l’exception de ceux destinés à être inhalés ou mâchés, constitués intégralement ou partiellement de tabac, présentés sous forme de poudre, de particules fines ou de toute combinaison de ces formes, notamment ceux présentés en sachets‑portions ou sachets poreux ».

    10.

    Selon l’article 17 de la même directive, « [l]es États membres interdisent la mise sur le marché du tabac à usage oral, sans préjudice des dispositions de l’article 151 de l’[acte d’adhésion] ».

    11.

    En vertu de l’article 151, paragraphe 1, de l’acte d’adhésion, « [l]es actes figurant dans la liste de l’annexe XV du présent acte s’appliquent à l’égard des nouveaux États membres dans les conditions prévues dans cette annexe ». Ladite annexe dispose, notamment, que l’interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral ne s’applique pas au Royaume de Suède, à l’exception de l’interdiction de commercialiser ce produit sous une forme ressemblant à un produit alimentaire.

    12.

    Au Royaume‑Uni, l’article 1er, sous c), et l’article 17 de la directive 2014/40 ont été mis en œuvre par l’article 17 des Tobacco and Related Products Regulations 2016 (arrêté de 2016 sur le tabac et les produits connexes, ci‑après l’« arrêté sur le tabac »), lequel prévoit que « nul ne peut produire ni fournir du tabac à usage oral ».

    III. Le litige au principal, la question préjudicielle et la procédure devant la Cour

    13.

    Swedish Match est une société à responsabilité limitée constituée en Suède qui commercialise principalement des produits du tabac sans combustion, et notamment du snus. Le snus est consommé par voie orale et composé de tabac haché pasteurisé ainsi que d’additifs alimentaires autorisés. La production du snus est soumise, en Suède, aux réglementations qui s’appliquent aux produits alimentaires. Les teneurs maximales de ce produit en substances indésirables ont été strictement définies par l’agence suédoise des aliments.

    14.

    Cette société a introduit un recours contre l’article 17 de l’arrêté sur le tabac devant la juridiction de renvoi. Le secrétaire d’État à la Santé revêt la qualité de défendeur dans le cadre de cette procédure. La NNA, une association dont l’objet social consiste à promouvoir la santé publique en réduisant les méfaits du tabac, a été autorisée à intervenir dans ladite procédure.

    15.

    Dans le cadre de son recours, Swedish Match fait valoir que l’interdiction absolue frappant la mise sur le marché du tabac à usage oral au Royaume‑Uni, imposée par l’article 17 de l’arrêté sur le tabac, n’est pas conforme au droit de l’Union. En effet, selon cette dernière, les dispositions que cet article vise à transposer, à savoir l’article 1er, sous c), et l’article 17 de la directive 2014/40, sont elles‑mêmes contraires à des normes de rang supérieur du droit de l’Union.

    16.

    Swedish Match soutient que le raisonnement adopté par la Cour dans l’arrêt Swedish Match ( 12 ), dans lequel celle‑ci a conclu à l’absence d’éléments permettant de mettre en doute la validité de l’interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral prévue à l’article 8 de la directive 2001/37, n’est plus de mise compte tenu des évolutions intervenues depuis lors concernant la réglementation applicable, les données scientifiques disponibles ainsi que les caractéristiques du marché des produits du tabac.

    17.

    Cette société excipe, plus précisément, de l’incompatibilité de l’article 1er, sous c), et de l’article 17 de la directive 2014/40 avec les principes de non‑discrimination, de proportionnalité et de subsidiarité, avec l’obligation de motivation prévue à l’article 296 TFUE, ainsi qu’avec la liberté de circulation des marchandises garantie par les articles 34 et 35 TFUE.

    18.

    La NNA allègue, dans le cadre de son intervention, que l’interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral est non seulement disproportionnée, mais également contraire aux droits au respect de la dignité humaine et de la vie privée et familiale, consacrés respectivement aux articles 1er et 7 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci‑après la « Charte »), ainsi qu’au droit d’accès aux soins médicaux prévu à l’article 35 de la Charte.

    19.

    Dans ces conditions, la juridiction de renvoi a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

    « L’article 1er, sous c), et l’article 17 de la directive [2014/40] sont‑ils invalides pour :

    i.

    méconnaissance du principe général du droit de l’Union de non‑discrimination ;

    ii.

    méconnaissance du principe général du droit de l’Union de proportionnalité ;

    iii.

    méconnaissance de l’article 5, paragraphe 3, TUE et du principe de subsidiarité du droit de l’Union ;

    iv.

    méconnaissance de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE ;

    v.

    méconnaissance des articles 34 et 35 TFUE, et

    vi.

    méconnaissance des articles 1er, 7 et 35 de la [Charte] ? »

    20.

    Swedish Match, la NNA, les gouvernements hongrois et finlandais, le Parlement européen, le Conseil de l’Union européenne ainsi que la Commission ont déposé des observations écrites devant la Cour.

    21.

    Swedish Match, la NNA, les gouvernements du Royaume‑Uni et norvégien, le Parlement, le Conseil ainsi que la Commission ont comparu lors de l’audience de plaidoiries qui s’est tenue le 25 janvier 2018.

    IV. Analyse

    A.   Considérations liminaires

    22.

    L’interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral énoncée à l’article 1er, sous c), et à l’article 17 de la directive 2014/40 poursuit, à l’instar des autres dispositions de cette directive, le double objectif de faciliter le bon fonctionnement du marché intérieur tout en prenant pour base un niveau élevé de protection de la santé, particulièrement pour les jeunes ( 13 ).

    23.

    Cette interdiction a été maintenue dans cette directive en vue d’éviter de réintroduire la fragmentation du marché intérieur qui existait avant qu’une telle mesure soit imposée au niveau de l’Union en 1992 ( 14 ). Plusieurs États membres avaient alors prohibé la mise sur le marché du tabac à usage oral ou étaient en voie de le faire, si bien qu’une harmonisation des législations nationales avait été jugée nécessaire pour prévenir les obstacles aux échanges qui auraient vraisemblablement résulté d’une évolution hétérogène de celles‑ci ( 15 ).

    24.

    Le législateur a estimé, comme il l’avait déjà fait en 1992 et en 2001, qu’une telle harmonisation devait, aux fins de réaliser également l’objectif de protection de la santé susmentionné, être effectuée au moyen de l’interdiction de ce produit. Ainsi que le précise le considérant 32 de la directive 2014/40, cette interdiction vise à empêcher l’accès à des produits du tabac addictifs et nocifs qui sont fabriqués pour le marché de masse.

    25.

    Ce considérant, lu à la lumière de la proposition de la Commission et de l’analyse d’impact, indique que le législateur a mis en exergue la nocivité intrinsèque du tabac à usage oral et la nécessité d’éviter qu’une nouvelle forme de dépendance à la nicotine ne s’installe dans l’Union, en particulier parmi les jeunes (effet d’initiation). Le maintien de l’interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral était jugé d’autant plus nécessaire que cette dépendance pourrait accroître le risque d’un usage ultérieur de tabac à fumer (effet de passerelle). En outre, la levée de cette interdiction pourrait entraver les efforts de sevrage des fumeurs en leur permettant de consommer du tabac de façon inaperçue dans les environnements non‑fumeurs. Ceux dont les efforts de sevrage ne sont pas couronnés de succès risqueraient alors de faire un double usage du tabac à fumer et du tabac à usage oral. En revanche, il ne serait pas établi que le tabac à usage oral représenterait, en tant qu’alternative au tabac à fumer, une aide efficace au sevrage (effet de substitution). Le législateur en a conclu que le maintien de ladite interdiction serait globalement bénéfique à la santé publique ( 16 ).

    26.

    Tel qu’il ressort de la décision de renvoi, Swedish Match et la NNA contestent la conformité de l’interdiction en cause au principe de proportionnalité en soulignant la moindre nocivité relative du tabac à usage oral par rapport aux autres produits du tabac. Selon ces dernières, la levée de cette interdiction permettrait de remplacer les produits du tabac à fumer par d’autres produits du tabac moins nocifs (effet de substitution). Un grand nombre de fumeurs passifs s’en trouveraient corrélativement épargnés. Par ailleurs, aucun élément ne prouverait que la consommation de tabac à usage oral provoque un effet de passerelle vers la consommation de tabac à fumer. Partant, bien que le tabac à usage oral ne soit pas totalement dépourvu d’effets nocifs, ladite interdiction serait globalement préjudiciable à la santé publique. Swedish Match et la NNA excipent, de surcroît, de l’incohérence de l’interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral par rapport au traitement réservé à d’autres produits couverts par la directive 2014/40.

    27.

    Ces approches opposées reflètent deux axes distincts de la lutte antitabac. Alors que l’interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral participe d’une stratégie de réduction de l’offre et de la consommation des produits du tabac, la levée de cette interdiction préconisée par Swedish Match et la NNA s’inscrirait dans le cadre d’une stratégie de réduction des effets nocifs du tabac.

    28.

    En l’espèce, la Cour n’est, cependant, pas amenée à vérifier si la mesure retenue par le législateur était « la seule ou la meilleure possible », mais uniquement si elle était « manifestement inappropriée» ( 17 ). En effet, le législateur de l’Union dispose d’un large pouvoir d’appréciation dans les domaines qui impliquent de sa part des choix de nature politique, économique et sociale, en vue desquels il est appelé à effectuer des appréciations complexes. La Cour a déjà jugé que ces domaines incluent celui de la réglementation des produits du tabac ( 18 ), en ce compris du tabac à usage oral ( 19 ).

    29.

    Le contrôle juridictionnel du respect du principe de proportionnalité s’en trouve atténué en ce qui concerne les trois volets qui le composent. À cet égard, je rappelle que, selon une jurisprudence constante, ce principe requiert, en premier lieu, que les actes des institutions de l’Union soient aptes à réaliser les objectifs légitimes qu’ils poursuivent (« test d’aptitude »). En second lieu, ces actes ne peuvent pas dépasser les limites de ce qui est nécessaire à cet effet, étant entendu que lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, la moins contraignante doit être privilégiée (« test de nécessité »). En troisième lieu, les inconvénients causés ne peuvent pas être démesurés par rapport aux buts visés (« test de proportionnalité au sens strict ») ( 20 ).

    B.   Test d’aptitude

    30.

    Sous l’angle du test d’aptitude, un acte adopté dans un domaine où le législateur de l’Union dispose d’un large pouvoir normatif ne peut être invalidé que dans la mesure où il est manifestement inapte à réaliser les objectifs poursuivis. Cela étant, le législateur reste tenu, même en présence d’un tel pouvoir, de baser son choix sur des critères objectifs et appropriés par rapport aux buts recherchés, en tenant compte de tous les éléments factuels ainsi que des données techniques et scientifiques disponibles au moment de l’adoption de l’acte en question ( 21 ).

    31.

    Dans les arrêts Swedish Match ( 22 ) et Arnold André ( 23 ), la Cour a déjà jugé que l’interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral prévue à l’article 8 de la directive 2001/37 n’était pas manifestement inappropriée à la poursuite de son double objectif.

    32.

    À cet égard, la Cour a souligné la dangerosité intrinsèque du tabac à usage oral. En premier lieu, celui‑ci contient de la nicotine, une substance qui provoque une dépendance et dont la toxicité n’est pas contestée. En second lieu, la Cour a relevé que la consommation de tabac à usage oral s’accompagne d’effets nocifs tels qu’un risque accru de cancer de la bouche, tout en reconnaissant qu’une controverse scientifique subsistait sur ce point. En outre, il n’avait pas été démontré, lors de l’adoption de la directive 2001/37, que ces effets nocifs étaient moindres que ceux associés à la consommation d’autres produits du tabac ( 24 ).

    33.

    La Cour a également examiné les effets que la levée de l’interdiction en cause serait susceptible d’exercer sur les habitudes de consommation. Elle a rappelé que cette interdiction avait été introduite pour répondre au risque réel que le tabac à usage oral soit utilisé par les jeunes. Par ailleurs, l’existence éventuelle d’un effet de substitution n’était pas établie, celle‑ci faisant toujours débat au sein de la communauté scientifique ( 25 ).

    34.

    À mes yeux, ni l’évolution des connaissances scientifiques ni les changements du cadre juridique applicable aux produits du tabac et aux produits connexes intervenus depuis la date de ces arrêts ne commandent une conclusion différente en ce qui concerne l’aptitude de l’article 1er, sous c) et de l’article 17 de la directive 2014/40 à réaliser leur double objectif.

    1. Sur l’argument tiré de l’existence d’évolutions d’ordre scientifique

    a) Précisions liminaires relatives à l’application du principe de précaution

    35.

    À l’instar de la directive 2001/37, la directive 2014/40 a été adoptée dans un contexte caractérisé par la prévalence d’incertitudes et de controverses relatives à la nature et à l’étendue tant des effets nocifs du tabac à usage oral que des effets que sa mise sur le marché dans l’ensemble de l’Union provoquerait sur les habitudes de consommation.

    36.

    La Commission a reconnu dans l’analyse d’impact que, bien que l’existence de certains effets nocifs liés à la consommation de tabac à usage oral fût considérée comme établie, l’existence et la portée d’autres effets nocifs demeuraient incertaines. De même, au vu de leur nature prospective, les effets les plus probables que la levée de l’interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral entraînerait sur les comportements des consommateurs dans les États membres autres que la Suède ne pouvaient pas être anticipés avec certitude ( 26 ).

    37.

    En outre, les appréciations effectuées dans l’analyse d’impact, sur la base de divers travaux scientifiques, et en particulier de l’avis du CSRSEN, au sujet de ces effets potentiels ne faisaient pas l’unanimité. Swedish Match et la NNA ont tiré des conclusions distinctes de certaines parties de cet avis ainsi que de certains articles qui y sont cités. Ces dernières invoquent, en particulier, un rapport scientifique, annexé aux observations écrites de Swedish Match, réalisé sur mandat de cette dernière aux fins d’évaluer de manière critique les fondements scientifiques de la directive 2014/40. Elles mentionnent également certaines études postérieures à l’analyse d’impact, voire à l’adoption de cette directive, lesquelles contrediraient les évaluations opérées dans cette analyse.

    38.

    Dans ces conditions, il conviendra d’examiner l’aptitude de l’article 1er, sous c), et de l’article 17 de la directive 2014/40 à protéger la santé publique à la lumière du principe de précaution, tel que consacré à l’article 191, paragraphe 2, TFUE et précisé dans la jurisprudence. En vertu de ce principe, « lorsque des incertitudes subsistent quant à l’existence ou à la portée de risques pour la santé des personnes, des mesures de protection peuvent être prises sans avoir à attendre que la réalité et la gravité de ces risques soient pleinement démontrées» ( 27 ). Ainsi qu’il ressortira de la suite de mon exposé, les incertitudes justifiant l’application dudit principe peuvent concerner aussi bien les effets nocifs d’un produit que les effets qu’entraînerait sa mise sur le marché sur les habitudes de consommation ( 28 ).

    39.

    La validité de mesures de précaution est subordonnée à la conduite préalable d’une évaluation des risques aussi complète que possible. Aussi des considérations purement hypothétiques relatives à l’existence d’un risque, fondées sur de simples suppositions scientifiquement non démontrées, ne justifient‑elles pas l’adoption de telles mesures ( 29 ). Celle‑ci n’est permise que « lorsqu’il s’avère impossible de déterminer avec certitude l’existence ou la portée du risque allégué, en raison de la nature insuffisante, non concluante ou imprécise des résultats des études menées, mais que la probabilité d’un dommage réel pour la santé publique persiste dans l’hypothèse où le risque se réaliserait» ( 30 ).

    40.

    Le respect de l’obligation de fonder toute mesure de précaution sur une telle évaluation des risques doit être vérifié à la lumière du large pouvoir d’appréciation dont dispose le législateur de l’Union dans les domaines impliquant de sa part des appréciations complexes ( 31 ). En effet, ce pouvoir s’étend non seulement à la nature et à la portée des mesures à adopter, mais également à l’appréciation des éléments factuels d’ordre scientifique effectuée en vue de déterminer celles‑ci ( 32 ). Il en va ainsi dès lors que « le juge [de l’Union] ne [saurait] substituer son appréciation des éléments factuels d’ordre scientifique et technique à celle du législateur à qui le traité a conféré cette tâche» ( 33 ).

    41.

    Lorsque l’évaluation des risques laisse subsister des incertitudes scientifiques, il appartient alors au législateur de l’Union de déterminer le niveau de risque jugé inacceptable pour la population et d’élaborer les mesures de précaution appropriées. Cette tâche relative à la gestion des risques, en aval de l’évaluation de ceux‑ci, suppose également une large marge d’appréciation pour adopter des choix politiques relatifs au niveau de protection à atteindre et aux moyens mis en œuvre à cette fin ( 34 ).

    42.

    C’est au regard de ces considérations qu’il convient d’examiner si le législateur a adopté l’article 1er, sous c), et l’article 17 de la directive 2014/40 sans excéder les limites de son pouvoir d’appréciation en ce qui concerne l’évaluation des risques liés à la consommation de tabac à usage oral ainsi que le choix consécutif de la nature et de la portée de la mesure en cause.

    b) Sur le constat selon lequel le tabac à usage oral est addictif et nocif

    43.

    Aux termes du considérant 32 de la directive 2014/40, le tabac à usage oral « entraîne une dépendance et a des effets indésirables sur la santé humaine ». Ce constat repose sur l’appréciation, figurant dans l’analyse d’impact, selon laquelle la consommation de tabac à usage oral entraîne des risques avérés de dépendance à la nicotine ainsi que de certains effets indésirables tels que des complications de grossesse et s’accompagne, de surcroît, de risques incertains d’autres effets nocifs ( 35 ). À cet égard, cette analyse fait état d’incertitudes scientifiques relatives à l’existence de risques accrus de cancers du pancréas, de la bouche et de l’œsophage ainsi que de mortalité à la suite d’un infarctus du myocarde ( 36 ).

    44.

    Swedish Match et la NNA font valoir, en premier lieu, que les risques d’effets nocifs liés à la consommation de tabac à usage oral seraient inférieurs à ceux qui s’attachent à la consommation de tabac à fumer.

    45.

    À ce propos, j’observe que l’analyse d’impact reconnaît effectivement la moindre nocivité du tabac à usage oral par rapport au tabac à fumer ( 37 ). Cependant, cette considération ne remet pas en cause la conclusion, qui se trouve au fondement du choix législatif de maintenir l’interdiction en cause, selon laquelle le tabac à usage oral nuit, en termes absolus, à la santé.

    46.

    En second lieu, ces dernières mettent en doute le constat, dressé dans l’analyse d’impact, selon lequel la consommation de tabac à usage oral pourrait accroître, en particulier, les risques de développer certains cancers. D’après elles, plusieurs études, parmi lesquelles des examens systématiques et des méta‑analyses d’études individuelles, qui permettraient d’appréhender ces risques de façon plus fiable que les travaux repris dans l’analyse d’impact ( 38 ), contrediraient ce constat.

    47.

    À mon avis, cette argumentation ne permet pas d’établir que le législateur a dépassé sa marge d’appréciation en constatant que des incertitudes scientifiques persistaient quant à l’existence et à la portée desdits risques et que ces incertitudes ne l’empêchaient pas d’agir en vue de prévenir ceux‑ci ( 39 ). En effet, les risques en cause ont été évalués sur la base d’une appréciation d’ensemble des données scientifiques disponibles. Au regard de cette évaluation, le législateur a, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, considéré que ces risques, bien qu’entourés d’incertitudes scientifiques, étaient suffisamment documentés.

    48.

    Comme l’a constaté la Commission dans l’analyse d’impact, le fait que certaines données sur la base desquelles elle a conclu à la nocivité du tabac à usage oral soient contestées par des études en sens contraire ne suffit pas à remettre en cause cette conclusion globale ( 40 ). La marge d’appréciation dont dispose le législateur pour évaluer les risques s’étend, me semble‑t‑il, à l’évaluation de la fiabilité et de la pertinence des études disponibles, à l’interprétation de leurs résultats et à la détermination du poids relatif à attribuer à chaque étude pertinente.

    49.

    Par ailleurs, dans la mesure où Swedish Match et la NNA invoquent certaines études postérieures à l’adoption de la directive 2014/40 qui excluraient toute association entre la consommation de tabac à usage oral et l’augmentation des risques de cancers de la bouche et du pancréas, je ne crois pas nécessaire de préciser si et, le cas échéant, dans quelle mesure ces études doivent être prises en considération lors de l’examen de la validité des dispositions en cause ( 41 ). Il suffit de constater qu’en tout état de cause, il n’est, d’une part, pas établi que les conclusions que ces dernières tirent desdites études feraient consensus au sein de la communauté scientifique et que les incertitudes dont le législateur a tenu compte seraient ainsi dissipées. D’autre part, c’est en raison non pas de ces seuls risques, mais de l’ensemble des risques liés aux effets du tabac à usage oral sur la santé et sur les habitudes de consommation, que le législateur a opté pour le maintien de l’interdiction le concernant.

    50.

    Eu égard à ces considérations, le législateur n’a pas outrepassé les limites de son pouvoir d’appréciation en constatant que le tabac à usage oral est addictif et nuit à la santé dans la mesure où il augmente les risques de certains effets nocifs et pourrait, en outre, accroître les risques d’autres effets nocifs.

    c) Sur l’appréciation des effets que la levée de l’interdiction en cause pourrait entraîner sur les habitudes de consommation

    51.

    Dans l’analyse d’impact, la Commission a souligné que, bien que la santé d’un individu qui remplacerait entièrement le tabac à fumer par du tabac à usage oral s’en trouverait améliorée, l’incidence globale que provoquerait la levée de l’interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral sur la santé publique dépendrait de la façon dont réagiraient les consommateurs à cette levée à l’échelle de l’Union. Seule l’observation de ces réactions sur le marché pourrait révéler si un éventuel effet de substitution l’emporterait sur les possibles effets d’initiation, de passerelle et de double usage, ou vice‑versa, étant entendu que l’ensemble de ces effets pourraient se produire simultanément ( 42 ).

    52.

    La Commission a néanmoins examiné tour à tour, de façon détaillée, les arguments relatifs à la probabilité de chacun de ces effets sur la base d’une appréciation globale des données scientifiques récoltées dans des pays où le tabac à usage oral peut être commercialisé ( 43 ). Elle a conclu, en substance, que ces données ne permettaient pas de tirer de conclusions fiables quant à l’efficacité du tabac à usage oral pour cesser de fumer. Par ailleurs, lesdites données étayaient l’existence de risques non négligeables d’effets d’initiation et de double usage et ne permettaient ni d’affirmer ni d’exclure le risque d’effet de passerelle ( 44 ). Sur la base de cette évaluation, la Commission et, par la suite, le législateur ont considéré que la levée de l’interdiction en cause risquerait d’exercer des effets négatifs sur les habitudes de consommation qui ne seraient pas contrebalancés par un éventuel effet de substitution.

    53.

    Swedish Match et la NNA contestent ladite évaluation en ce qui concerne la probabilité des effets de substitution et de passerelle ainsi que l’impact global d’une telle levée sur la santé publique ( 45 ). Ces dernières mettent essentiellement l’accent sur les données et arguments plaidant en faveur de l’efficacité du tabac à usage oral en tant qu’aide au sevrage et de l’absence d’un effet de passerelle. Elles ne nient cependant pas que d’autres données et arguments, avancés par la Commission sur la base notamment de l’avis du CSRSEN, étayent des conclusions opposées.

    54.

    Il n’appartient pas à la Cour de se prononcer quant au bien‑fondé de ces thèses distinctes et d’ainsi substituer son appréciation des données factuelles pertinentes à celle du législateur. Il suffit de constater que l’argumentation de Swedish Match et de la NNA témoigne, tout au plus, de la persistance d’incertitudes scientifiques concernant la nature et l’ampleur respectives des effets qu’entraînerait la levée de l’interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral dans l’ensemble de l’Union sur les comportements des consommateurs.

    55.

    Dans la mesure où les risques qui pourraient découler d’une telle levée en raison de ses effets sur les habitudes de consommation ont été dûment identifiés et évalués préalablement à l’adoption de la directive 2014/40, de telles incertitudes n’empêchaient pas le législateur d’adopter des mesures de précaution même si la réalité et la gravité de ces risques n’avaient pas été pleinement démontrées ( 46 ).

    56.

    Je tire, à cet égard, enseignement de l’arrêt Pillbox 38 ( 47 ), dans lequel la Cour a relevé l’absence de données scientifiques concluantes relatives, notamment, à l’efficacité de la cigarette électronique comme méthode de sevrage tabagique ainsi qu’à l’existence d’un effet de « porte d’entrée » vers le tabagisme lié à l’utilisation de ce produit ( 48 ). Dans ces conditions, la Cour a estimé que le législateur de l’Union devait agir en conformité avec les exigences découlant du principe de précaution. Partant, la disposition de la directive 2014/40 relative aux conditions encadrant la mise sur le marché des cigarettes électroniques ( 49 ) n’était pas contraire au principe de proportionnalité ( 50 ).

    57.

    En conséquence, le législateur de l’Union n’a pas franchi les limites de son pouvoir d’appréciation en concluant, sur la base de l’analyse d’impact, que la levée de l’interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral risquerait d’entraîner un accroissement global des méfaits du tabac au sein de l’Union en raison de ses effets sur les habitudes de consommation.

    d) Sur le choix de la nature et de la portée de la mesure en cause

    58.

    Compte tenu de l’évaluation des risques pour la santé publique qui pourraient découler de la levée de l’interdiction en cause, le législateur a décidé de maintenir cette interdiction dans la directive 2014/40. Selon moi, un tel choix n’est pas manifestement inapproprié à la poursuite du double objectif de cette directive.

    59.

    Ainsi que je l’ai souligné plus haut, en l’absence de certitude quant à la nature et à la portée des risques pour la santé de certains produits, la détermination du niveau de risque jugé inacceptable pour la population participe d’un choix de nature politique, économique et sociale relevant de la discrétion du législateur guidé par le principe de précaution ( 51 ).

    60.

    Le législateur était tenu d’exercer ce pouvoir d’appréciation en veillant, comme l’exigent plusieurs dispositions du droit primaire ( 52 ), à assurer un niveau élevé de protection de la santé. À cet égard, la Cour a ajouté que la directive 2014/40 vise à garantir un tel niveau de protection de la santé pour l’ensemble de la population, si bien que son aptitude à atteindre cet objectif ne saurait être appréciée au regard uniquement d’une seule catégorie de consommateurs ( 53 ).

    61.

    En l’occurrence, le législateur a mis en balance, d’une part, le risque, certes incertain, d’un effet global négatif de la levée de l’interdiction en cause sur la santé publique, et, d’autre part, le risque, également incertain, que le maintien de cette interdiction empêche les fumeurs actuels de bénéficier d’une alternative moins nocive au tabac à fumer.

    62.

    Ayant estimé que le premier de ces risques l’emportait sur le second, le législateur a considéré qu’il convenait de privilégier un objectif intermédiaire (celui d’éviter l’apparition d’une nouvelle source de dépendance à la nicotine, en particulier chez les jeunes, laquelle pourrait en outre favoriser un glissement ultérieur vers la consommation de tabac à fumer) sur un autre (celui de rendre disponible une aide potentielle au sevrage) en vue de la réalisation de l’objectif ultime de protection de la santé publique.

    63.

    Il ne fait guère de doute, à mes yeux, que le législateur a ainsi agi en conformité avec le principe de précaution. En effet, la marge d’appréciation dont il dispose aux fins de déterminer le niveau de risque jugé inacceptable pour la population s’étend, le cas échéant, à l’arbitrage entre la prévention de plusieurs risques pour la santé lorsque ceux‑ci ne peuvent pas être évités simultanément ( 54 ).

    64.

    Il importe également d’écarter l’argumentation, avancée par Swedish Match, selon laquelle le législateur aurait méconnu le principe de proportionnalité en subordonnant la levée de l’interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral à la démonstration du caractère inoffensif de celui‑ci, alors qu’un tel standard n’est exigé pour aucun autre produit relevant du champ d’application de la directive 2014/40.

    65.

    Cette argumentation s’articule autour de deux axes. Premièrement, Swedish Match fait grief au législateur de l’Union d’avoir maintenu cette interdiction au motif que le « risque zéro » n’était pas établi en ce qui concerne la consommation de tabac à usage oral, alors qu’un tel critère serait disproportionné en application de la jurisprudence. Deuxièmement, Swedish Match soutient, en substance, que le législateur n’a pas poursuivi l’objectif de cette directive de façon cohérente et systématique. Aucune de ces lignes d’argumentation n’emporte ma conviction.

    66.

    La première de celles‑ci procède, me semble‑t‑il, d’une compréhension erronée tant de la jurisprudence que des motifs sur lesquels s’est fondé le législateur de l’Union.

    67.

    En effet, le législateur est habilité à adopter des mesures visant à prévenir des risques sanitaires pourvu que ces risques aient été suffisamment documentés au terme d’une évaluation scientifique ( 55 ). En revanche, la jurisprudence n’exige pas que les résultats d’une telle évaluation permettent d’estimer la réalité des risques avec un seuil minimal prédéterminé de certitude ( 56 ). La Cour n’a pas davantage fixé un tel seuil concernant le degré de probabilité de réalisation des risques ou la gravité de cette réalisation devant être franchi en vue d’adopter une mesure de précaution ( 57 ).

    68.

    Or, j’ai déjà constaté que l’article 1er, sous c), et l’article 17 de la directive 2014/40 visent à prévenir certains risques sanitaires avérés ainsi que d’autres risques – liés tant à son impact direct sur la santé qu’aux conséquences possibles de la levée de cette interdiction sur les habitudes de consommation – qui ne sont pas purement hypothétiques. Ces dispositions ont donc été adoptées au motif non pas que le caractère inoffensif du tabac à usage oral n’a pas été prouvé, mais bien que la consommation de ce produit entraîne des risques d’effets nocifs démontrés ou, à tout le moins, dûment évalués.

    69.

    La seconde ligne d’argumentation invoquée par Swedish Match recoupe celle qui fait l’objet de la section suivante.

    2. Sur l’argument tiré de l’existence de modifications du contexte réglementaire

    70.

    Par leur argumentation tendant à établir le caractère manifestement inapproprié de l’interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral prévue par la directive 2014/40 au regard de l’évolution du cadre juridique intervenue depuis les arrêts Swedish Match ( 58 ) et Arnold André ( 59 ), Swedish Match et la NNA mettent essentiellement en cause l’aptitude de cette mesure à réaliser l’objectif qu’elle poursuit de façon cohérente et systématique.

    71.

    Ces dernières font valoir que la directive 2014/40 n’interdit la mise sur le marché d’aucun autre produit du tabac ( 60 ) et qu’en particulier, le tabac à fumer et le tabac à mâcher ou à priser sont plus nocifs que le tabac à usage oral. En outre, cette directive a introduit de nouvelles dispositions qui régissent spécifiquement les nouveaux produits du tabac et la cigarette électronique sans pour autant interdire ceux‑ci. Or, le considérant 34 de cette directive reconnaît que tous les produits du tabac sont nocifs et la Cour a mis en évidence les risques sanitaires potentiels des cigarettes électroniques dans l’arrêt Pillbox 38 ( 61 ). Cette argumentation s’entrecroise largement avec celle par laquelle Swedish Match et la NNA contestent la conformité de l’interdiction en cause au principe de non‑discrimination.

    72.

    À cet égard, je rappelle qu’une mesure de l’Union n’est apte à réaliser l’objectif recherché que si elle répond véritablement au souci de l’atteindre d’une manière cohérente et systématique ( 62 ). Cette exigence correspond, d’ailleurs, à celle relative au caractère objectif des critères sur lequel se fonde le législateur de l’Union ( 63 ). En l’occurrence, l’article 1er, sous c), et l’article 17 de la directive 2014/40 remplissent cette condition. En effet, ni les autres produits du tabac, ni la cigarette électronique ne se trouvent dans une situation comparable à celle du tabac à usage oral, de sorte que la différence de traitement entre ceux‑ci résulte de critères objectifs et non‑discriminatoires.

    73.

    S’agissant, en premier lieu, de la différence de traitement entre le tabac à usage oral et les autres produits du tabac sans combustion tels que le tabac à mâcher ou à priser, la Cour a déjà considéré que celle‑ci, telle qu’introduite en 1992 et maintenue par la directive 2001/37, n’était pas discriminatoire. Elle résultait de circonstances objectives tenant à la fois au caractère nouveau, sur le marché intérieur de l’époque, des produits visés par l’interdiction, à leur caractère attractif pour les jeunes et à l’existence de mesures nationales d’interdiction dans certains États membres ( 64 ). Aucun élément du dossier ne suggère qu’il n’en irait désormais plus ainsi. De surcroît, la Commission a constaté, dans l’analyse d’impact, que, à la différence du tabac à usage oral, les autres produits du tabac sans combustion ne représentent que des marchés de niche dont le potentiel d’expansion est limité, au vu notamment de leur méthode de production coûteuse et en partie artisanale ( 65 ). Ainsi qu’il ressort du considérant 32 de la directive 2014/40, le législateur de l’Union n’a, dès lors, pas jugé nécessaire d’en interdire la mise sur le marché.

    74.

    En deuxième lieu, quant à l’incohérence alléguée par rapport au traitement réservé au tabac à fumer, j’observe que, contrairement à celui‑ci, le tabac à usage oral était relativement nouveau sur les marchés des États membres (à l’exception de la Suède) au moment de l’introduction de l’interdiction de mise sur le marché le concernant. En conséquence, cette interdiction permettait d’éviter la création d’une nouvelle source de dépendance, eu égard à l’attrait particulier que le tabac à usage oral était susceptible d’exercer sur les jeunes. L’analyse d’impact indique que ces considérations demeuraient pertinentes au moment de l’adoption de la directive 2014/40. Qui plus est, la Commission y a considéré que l’interdiction du tabac à fumer entraînerait le plus probablement l’apparition d’un marché noir, dès lors que la proportion de fumeurs dans l’Union s’élevait alors à 28 % ( 66 ).

    75.

    En troisième lieu, je ne perçois pas d’incohérence entre les régimes applicables au tabac à usage oral et à la catégorie, introduite par l’article 2, point 14, de la directive 2014/40, des nouveaux produits du tabac. Cette catégorie englobe tous les produits qui ne relèvent pas des autres catégories énoncées dans cette directive et qui pourraient apparaître sur le marché dans l’Union après son entrée en vigueur ( 67 ). Leurs effets ne pouvaient, par définition, pas être observés ni a fortiori étudiés au moment de celle‑ci. Pour cette raison, ladite directive enjoint aux États membres d’instaurer un système de notification, par les fabricants et les importateurs concernés, préalable à la mise sur le marché de nouveaux produits du tabac. Cette notification doit être assortie, notamment, d’études de leurs effets sur la santé et sur les habitudes de consommation ( 68 ). Ce système facilite l’évaluation de ces effets, laquelle pourrait, le cas échéant, mener à l’adoption future d’interdictions ou de limitations à la commercialisation de tels produits. Au contraire, si tous les effets du tabac à usage oral ne pouvaient pas être évalués et quantifiés avec certitude, ceux‑ci étaient suffisamment identifiés et étayés scientifiquement pour en justifier l’interdiction de mise sur le marché.

    76.

    C’est en vain que Swedish Match et la NNA font valoir que le tabac à usage oral constitue lui aussi un produit « nouveau » aux termes du considérant 34 de la directive 2014/40 et de la jurisprudence de la Cour ( 69 ). À mon sens, le tabac à usage oral n’a été qualifié de « nouveau » que dans la mesure où, en l’absence de l’interdiction en cause, il serait un nouvel entrant sur le marché des États membres (à l’exception de la Suède). En revanche, à la différence des « nouveaux produits du tabac » au sens de l’article 2, point 14, de cette directive, le tabac à usage oral est un produit connu et déterminé dès lors qu’il est disponible de longue date en Suède et que ses effets ont fait l’objet de nombreuses études scientifiques.

    77.

    En quatrième lieu, l’argument selon lequel l’interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral serait incohérente par rapport à la réglementation des cigarettes électroniques doit être réfuté sur la base de l’arrêt Pillbox 38 ( 70 ). La Cour y a constaté que, à la différence des produits du tabac, ces dernières, premièrement, ne contiennent pas de tabac, deuxièmement, fonctionnent sans combustion et, troisièmement, sont des produits relativement nouveaux dont les risques pour la santé restent à préciser. Si la deuxième de ces observations étaye uniquement l’absence de comparabilité entre les cigarettes électroniques et les produits du tabac à fumer, la première et la troisième témoignent des caractéristiques objectives différentes des cigarettes électroniques et de l’ensemble des produits du tabac, y compris du tabac à usage oral.

    78.

    Plus généralement, je partage la position exprimée par l’avocat général Geelhoed dans ses conclusions dans l’affaire Arnold André ( 71 ), selon laquelle le législateur de l’Union peut, si plusieurs produits dangereux sont présents sur les marchés des États membres, décider lesquels doivent être interdits sur la base d’une appréciation globale des circonstances pertinentes – sans préjudice de la possibilité d’en interdire d’autres si ces circonstances évoluent ( 72 ).

    79.

    Ces considérations permettent de conclure à l’absence à la fois de violation du principe de non‑discrimination en ce que le tabac à usage oral reçoit un traitement distinct de celui réservé aux autres produits susmentionnés, et de violation du principe de proportionnalité en ce que la directive 2014/40 ne poursuivrait pas ses objectifs de façon cohérente et systématique.

    C.   Test de nécessité

    80.

    L’application du test de nécessité à un acte législatif de l’Union adopté dans un domaine, tel que celui en cause en l’espèce, où le législateur dispose d’un large pouvoir d’appréciation, implique de vérifier qu’un tel acte ne dépasse pas manifestement les limites de ce qui est nécessaire pour atteindre ses objectifs ( 73 ).

    81.

    La nécessité de l’interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral prévue à l’article 8 de la directive 2001/37 aux fins de réaliser ses objectifs a été confirmée dans les arrêts Swedish Match ( 74 ) et Arnold André ( 75 ). Selon la Cour, toutes les autres mesures visant à soumettre les fabricants à des normes techniques pour réduire la nocivité du produit, ou à réglementer l’étiquetage des emballages de ce produit et les conditions de sa vente, notamment aux mineurs, n’auraient pas le même effet préventif en termes de protection de la santé en ce sens qu’elles laisseraient s’installer sur le marché un produit demeurant en tout état de cause nocif ( 76 ).

    82.

    Cette conclusion demeure valable en ce que cette interdiction est maintenue par la directive 2014/40. Tel que l’a souligné la Commission, le caractère addictif du tabac à usage oral justifie l’adoption de mesures préventives en temps opportun en raison des effets difficilement réversibles sur la santé publique que pourrait provoquer la pénétration de ce produit sur le marché dans l’ensemble de l’Union.

    83.

    Ladite conclusion s’impose d’autant plus que, ainsi qu’il ressort de l’analyse d’impact, les autres mesures envisageables n’empêcheraient pas la réalisation du potentiel commercial considérable du tabac à usage oral, compte tenu en particulier de l’introduction des environnements non‑fumeurs ( 77 ). En outre, revenir sur ladite interdiction véhiculerait un message ambigu quant à la nocivité des produits du tabac à usage oral ( 78 ). Comme l’a observé le gouvernement finlandais, dès lors que la même interdiction est déjà en place depuis 1992, la levée de celle‑ci laisserait à penser que ces produits sont inoffensifs, ce qui pourrait en renforcer l’attrait auprès des jeunes.

    D.   Test de proportionnalité au sens strict

    84.

    Le troisième volet du test de proportionnalité consiste, dans les domaines où le législateur de l’Union dispose d’un large pouvoir d’appréciation, à vérifier si l’acte en cause n’entraîne pas des inconvénients manifestement disproportionnés par rapport aux buts visés ( 79 ). Le législateur doit néanmoins tenir pleinement compte, au‑delà de l’objectif principal poursuivi, des intérêts en présence, parmi lesquels ceux des personnes négativement affectées par cet acte. Il lui incombe d’examiner si les buts poursuivis sont de nature à justifier des conséquences économiques négatives, même considérables, pour certains opérateurs ( 80 ).

    85.

    Selon moi, le législateur de l’Union s’est conformé à ces exigences en adoptant l’article 1er, sous c), et l’article 17 de la directive 2014/40.

    86.

    À cet égard, la Cour a déjà reconnu que l’objectif de protection de la santé revêt une importance prépondérante par rapport aux intérêts d’ordre économique ( 81 ). Le caractère fondamental accordé à cet objectif dans l’ordre juridique de l’Union est, dès lors, susceptible de justifier des conséquences économiques négatives, même d’une ampleur considérable, pour certains opérateurs ( 82 ).

    87.

    C’est, me semble‑t‑il, dans cette optique que, dans les arrêts Swedish Match ( 83 ) et Arnold André ( 84 ), la Cour n’a pas procédé à la pondération expresse entre les intérêts des opérateurs économiques et de la santé publique ( 85 ). Elle a implicitement considéré qu’une mesure qui vise à protéger la santé publique, pour autant qu’elle passe les deux premiers volets du test de proportionnalité, est nécessairement conforme à son troisième volet dans la mesure où les intérêts privés des opérateurs économiques doivent céder le pas face à l’intérêt général de la santé publique.

    88.

    Au terme de cette analyse, j’estime que les dispositions en cause ne sont pas manifestement inaptes à la poursuite de leur double objectif, ne vont pas manifestement au‑delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre et n’entraînent pas d’inconvénients manifestement disproportionnés par rapport aux avantages recherchés.

    V. Conclusion

    89.

    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre comme suit au point ii) de la question préjudicielle de la High Court of Justice (England & Wales), Queen’s Bench Division (Administrative Court) [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division du Queen’s Bench (chambre administrative), Royaume‑Uni].

    L’examen du point ii) de la question préjudicielle n’a révélé aucun élément de nature à affecter la validité de l’article 1er, sous c), et de l’article 17 de la directive 2014/40/UE du Parlement européen et du Conseil, du 3 avril 2014, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de fabrication, de présentation et de vente des produits du tabac et des produits connexes, et abrogeant la directive 2001/37/CE.


    ( 1 ) Langue originale : le français.

    ( 2 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de fabrication, de présentation et de vente des produits du tabac et des produits connexes, et abrogeant la directive 2001/37/CE (JO 2014, L 127, p. 1).

    ( 3 ) Article 1er, points 1, 2 et 5 de la directive 92/41/CEE du Conseil, du 15 mai 1992, modifiant la directive 89/622/CEE concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière d’étiquetage des produits du tabac (JO 1992, L 158, p. 30).

    ( 4 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2001 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de fabrication, de présentation et de vente des produits du tabac (JO 2001, L 194, p. 26).

    ( 5 ) Acte relatif aux conditions d’adhésion de la République d’Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l’Union européenne (JO 1994, C 241, p. 21, et JO 1995, L 1, p. 1, ci‑après l’« acte d’adhésion »).

    ( 6 ) Arrêt du 14 décembre 2004 (C‑210/03, EU:C:2004:802).

    ( 7 ) Arrêt du 14 décembre 2004 (C‑434/02, EU:C:2004:800).

    ( 8 ) Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil du 19 décembre 2012 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de fabrication, de présentation et de vente du tabac et de ses produits [COM(2012) 788 final].

    ( 9 ) Commission Staff Working Document, Impact Assessment accompanying the document Proposal for a directive of the European Parliament and of the Council on the approximation of the laws, regulations and administrative provisions of the Member States concerning the manufacture, presentation and sale of tobacco and related products [COM(2012) 788 final], 19 December 2012 [SWD(2012) 452 final].

    ( 10 ) Avis adopté le 6 février 2008, intitulé « Health effects of smokeless tobacco products ». Voir considérant 2 de la directive 2014/40.

    ( 11 ) Directive du 13 novembre 1989, concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière d’étiquetage des produits de tabac ainsi que l’interdiction de certains tabacs à usage oral (JO L 359 du 8.12.1989, p. 1).

    ( 12 ) Arrêt du 14 décembre 2004 (C‑210/03, EU:C:2004:802).

    ( 13 ) Voir considérants 8 et 21 de la directive 2014/40 ainsi qu’arrêts du 4 mai 2016, Philip Morris Brands e.a. (C‑547/14, EU:C:2016:325, point 171) et Pologne/Parlement et Conseil (C‑358/14, EU:C:2016:323, point 80).

    ( 14 ) Voir proposition de la Commission, p. 9 et analyse d’impact, p. 62.

    ( 15 ) Voir, à cet égard, arrêts du 14 décembre 2004, Swedish Match (C‑210/03, EU:C:2004:802, points 37 à 42) et Arnold André (C‑434/02, EU:C:2004:800, points 38 à 43).

    ( 16 ) Proposition de la Commission, p. 9 et analyse d’impact, p. 64 à 69.

    ( 17 ) Voir, notamment, arrêts du 12 juillet 2001, Jippes e.a. (C‑189/01, EU:C:2001:420, point 83) ; du 8 juin 2010, Vodafone e.a. (C‑58/08, EU:C:2010:321, point 52), et du 7 février 2018, American Express (C‑304/16, EU:C:2018:66, point 86).

    ( 18 ) Arrêts du 10 décembre 2002, British American Tobacco (Investments) et Imperial Tobacco (C‑491/01, EU:C:2002:741, point 123) ; du 4 mai 2016, Pologne/Parlement et Conseil (C‑358/14, EU:C:2016:323, point 79), et du 4 mai 2016, Pillbox 38 (C‑477/14, EU:C:2016:324, point 49).

    ( 19 ) Arrêts du 14 décembre 2004, Swedish Match (C‑210/03, EU:C:2004:802, point 48) et Arnold André (C‑434/02, EU:C:2004:800, point 46). Ce pouvoir d’appréciation n’est pas remis en cause par l’argument, soulevé par la NNA lors de l’audience, selon lequel l’interdiction de mise sur le marché du tabac à usage oral restreindrait le droit à la santé consacré à l’article 35 de la Charte. Ce droit fondamental inclurait celui de se procurer, en tant qu’alternative au tabac à fumer, des produits moins nocifs contenant de la nicotine. Je souligne, à cet égard, que cette interdiction vise, plutôt qu’à limiter, à concrétiser le droit à la santé, ce qui suppose des appréciations complexes dans l’intérêt non pas des seuls fumeurs mais bien de la population dans sa globalité [voir, en ce sens, notamment, arrêt du 4 mai 2016, Philip Morris Brands e.a. (C‑547/14, EU:C:2016:325, point 176)].

    ( 20 ) Voir, notamment, arrêt du 4 mai 2016, Pillbox 38 (C‑477/14, EU:C:2016:324, point 48 et jurisprudence citée).

    ( 21 ) Arrêt du 16 décembre 2008, Arcelor Atlantique et Lorraine e.a. (C‑127/07, EU:C:2008:728, point 58 et jurisprudence citée). Voir, également, en ce sens, arrêts du 7 septembre 2006, Espagne/Conseil (C‑310/04, EU:C:2006:521, point 122), et du 8 juillet 2010, Afton Chemical (C‑343/09, EU:C:2010:419, point 34).

    ( 22 ) Arrêt du 14 décembre 2004 (C‑210/03, EU:C:2004:802).

    ( 23 ) Arrêt du 14 décembre 2004 (C‑434/02, EU:C:2004:800).

    ( 24 ) Arrêts du 14 décembre 2004, Swedish Match (C‑210/03, EU:C:2004:802, points 51 à 53) et Arnold André (C‑434/02, EU:C:2004:800, points 49 à 51).

    ( 25 ) Arrêts du 14 décembre 2004, Swedish Match (C‑210/03, EU:C:2004:802, points 49 et 51) et Arnold André (C‑434/02, EU:C:2004:800, points 47 et 49).

    ( 26 ) Analyse d’impact, p. 64 à 68.

    ( 27 ) Voir, notamment, arrêts du 5 mai 1998, Royaume‑Uni/Commission (C‑180/96, EU:C:1998:192, point 99) ; du 9 septembre 2003, Monsanto Agricoltura Italia e.a. (C‑236/01, EU:C:2003:431, point 111), et du 9 juin 2016, Pesce e.a. (C‑78/16 et C‑79/16, EU:C:2016:428, point 47).

    ( 28 ) Voir point 56 des présentes conclusions.

    ( 29 ) Voir, notamment, arrêts du 9 septembre 2003, Monsanto Agricoltura Italia e.a. (C‑236/01, EU:C:2003:431, point 106) ; du 22 décembre 2010, Gowan Comércio Internacional e Serviços (C‑77/09, EU:C:2010:803, point 78), et du 13 septembre 2017, Fidenato e.a. (C‑111/16, EU:C:2017:676, point 51).

    ( 30 ) Voir, notamment, arrêts du 10 avril 2014, Acino/Commission (C‑269/13 P, EU:C:2014:255, point 58) ; du 17 décembre 2015, Neptune Distribution (C‑157/14, EU:C:2015:823, point 82), et du 4 mai 2016, Pillbox 38 (C‑477/14, EU:C:2016:324, point 55).

    ( 31 ) Voir, en ce sens, arrêts du 5 mai 1998, Royaume‑Uni/Commission (C‑180/96, EU:C:1998:192, point 60), et du 22 décembre 2010, Gowan Comércio Internacional e Serviços (C‑77/09, EU:C:2010:803, point 55).

    ( 32 ) Voir, notamment, arrêt du 7 septembre 2006, Espagne/Conseil (C‑310/04, EU:C:2006:521, point 121 et jurisprudence citée).

    ( 33 ) Voir, notamment, arrêt du 8 juillet 2010, Afton Chemical (C‑343/09, EU:C:2010:419, points 28 et 33, ainsi que jurisprudence citée).

    ( 34 ) Arrêts du 22 décembre 2010, Gowan Comércio Internacional e Serviços (C‑77/09, EU:C:2010:803, points 60 et 82) ; du 11 juillet 2013, France/Commission (C‑601/11 P, EU:C:2013:465, point 143), et du 9 juin 2016, Pesce e.a. (C‑78/16 et C‑79/16, EU:C:2016:428, point 49). Voir, également, à cet égard, conclusions de l’avocat général Poiares Maduro dans l’affaire Commission/Pays‑Bas (C‑41/02, EU:C:2004:520, point 32).

    ( 35 ) Voir point 36 des présentes conclusions. Dans ce contexte, la Commission a examiné spécifiquement les effets nocifs du snus suédois. Elle a considéré que, bien qu’il contienne désormais un niveau particulièrement faible des principales substances cancérigènes présentes dans le tabac à usage oral, ce produit n’est pas exempt d’effets nocifs. Elle a ajouté que le snus présentant cette composition n’a pas été présent sur le marché assez longtemps pour conclure de façon convaincante à la réduction du risque de cancer à la lumière des preuves disponibles (analyse d’impact, p. 64).

    ( 36 ) Analyse d’impact, p. 64 et 65.

    ( 37 ) Analyse d’impact, p. 23, 50 et 63. Par conséquent, le constat effectué dans les arrêts du 14 décembre 2004, Swedish Match (C‑210/03, EU:C:2004:802, point 53) et Arnold André (C‑434/02, EU:C:2004:800, point 51), selon lequel il n’avait pas été démontré que les produits du tabac à usage oral sont moins nocifs que les cigarettes, n’est plus d’actualité.

    ( 38 ) Swedish Match et la NNA ont souligné que les méta‑analyses combinent les résultats individuels de plusieurs études scientifiques au moyen de méthodes statistiques, ce qui permet d’évaluer la cohérence entre ces résultats et de réduire l’influence des variations aléatoires.

    ( 39 ) Voir points 38 à 40 des présentes conclusions.

    ( 40 ) Analyse d’impact, p. 66.

    ( 41 ) À cet égard, je rappelle que, selon une jurisprudence constante, la validité d’un acte de l’Union doit être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date de son adoption [voir, notamment, arrêt du 17 octobre 2013, Schaible (C‑101/12, EU:C:2013:661, point 50 et jurisprudence citée)]. Cependant, la Cour a ajouté, dans les arrêts du 12 janvier 2006, Agrarproduktion Staebelow (C‑504/04, EU:C:2006:30, point 40) et du 9 juin 2016, Pesce e.a. (C‑78/16 et C‑79/16, EU:C:2016:428, point 51), que lorsque des éléments nouveaux modifient la perception d’un risque ou montrent que ce risque peut être circonscrit par des mesures moins contraignantes que celles en vigueur, il appartient aux institutions de l’Union de veiller à une adaptation de la réglementation aux données nouvelles.

    ( 42 ) Analyse d’impact, p. 64. Voir, également, conclusions de l’avocat général Geelhoed dans l’affaire Arnold André (C‑434/02, EU:C:2004:487, points 53 et 54).

    ( 43 ) Analyse d’impact, p. 66 à 69.

    ( 44 ) À cet égard, la Commission a relevé que certaines preuves provenant des États‑Unis indiquent que l’utilisation de tabac à usage oral peut mener à la consommation ultérieure de tabac à fumer, tandis que certaines données suédoises n’étayent pas cette hypothèse. La Commission a également fait état d’une étude ayant associé la consommation de tabac à usage oral au début de l’adolescence à une probabilité accrue de fumer occasionnellement à la fin de celle‑ci (analyse d’impact, p. 68).

    ( 45 ) Swedish Match et la NNA ne remettent, en revanche, pas en cause les risques d’effet d’initiation et de double usage en tant que tels. Cependant, Swedish Match soutient que les études disponibles n’ont pas identifié d’effets nocifs spécifiques ou plus prononcés chez les utilisateurs mixtes de tabac à usage oral et de tabac à fumer.

    ( 46 ) Voir points 38 à 40 des présentes conclusions.

    ( 47 ) Arrêt du 4 mai 2016 (C‑477/14, EU:C:2016:324, points 50 à 55 et 60).

    ( 48 ) Voir considérant 43 de la directive 2014/40.

    ( 49 ) Voir article 20 de la directive 2014/40.

    ( 50 ) Voir, également, conclusions de l’avocat général Kokott dans l’affaire Philip Morris Brands e.a. (C‑547/14, EU:C:2015:853, points 155 à 159).

    ( 51 ) Voir point 41 des présentes conclusions.

    ( 52 ) Article 9, article 114, paragraphe 3 et article 168, paragraphe 1, TFUE ainsi qu’article 35, deuxième phrase, de la Charte.

    ( 53 ) Voir, en ce sens, arrêts du 4 mai 2016, Philip Morris Brands e.a. (C‑547/14, EU:C:2016:325, point 176) et Pologne/Parlement et Conseil (C‑358/14, EU:C:2016:323, point 86).

    ( 54 ) Voir, en ce sens, arrêt du 4 mai 2016, Pillbox 38 (C‑477/14, EU:C:2016:324, point 96).

    ( 55 ) Voir point 39 des présentes conclusions. C’est en ce sens qu’il convient de comprendre la jurisprudence du Tribunal citée par Swedish Match lors de l’audience, selon laquelle le retrait ou l’assouplissement d’une mesure préventive ne saurait être subordonné « à la preuve d’une absence de tout risque, car une telle preuve est, en général, impossible à fournir d’un point de vue scientifique dès lors qu’un niveau de risque zéro n’existe pas en pratique », si bien « qu’une mesure préventive ne saurait être prise que si le risque, sans que son existence et sa portée aient été démontrées “pleinement” par des données scientifiques concluantes, apparaît néanmoins suffisamment documenté sur la base des données scientifiques disponibles au moment de la prise de cette mesure » [arrêt du 9 septembre 2011, France/Commission (T‑257/07, EU:T:2011:444, point 76)].

    ( 56 ) En particulier, la Cour a jugé, s’agissant du refus ou du retrait de l’autorisation de mise sur le marché d’un médicament, que la validité de telles mesures de précaution requiert uniquement la présence d’un risque devant « revêtir non pas un caractère concret, mais seulement un caractère potentiel » [arrêts du 10 avril 2014, Acino/Commission (C‑269/13 P, EU:C:2014:255, points 59 et 73) et du 3 décembre 2015, PP Nature‑Balance Lizenz/Commission (C‑82/15 P, non publié, EU:C:2015:796, point 23)].

    ( 57 ) Voir point 41 des présentes conclusions.

    ( 58 ) Arrêt du 14 décembre 2004 (C‑210/03, EU:C:2004:802).

    ( 59 ) Arrêt du 14 décembre 2004 (C‑434/02, EU:C:2004:800).

    ( 60 ) Lors de l’audience, le gouvernement du Royaume‑Uni et le Parlement ont fait remarquer, à juste titre, que l’article 7 de la directive 2014/40 interdit également la mise sur le marché des produits du tabac aromatisés, sous réserve de la période transitoire prévue au paragraphe 14 de cet article.

    ( 61 ) Arrêt du 4 mai 2016 (C‑477/14, EU:C:2016:324, points 51 et 52).

    ( 62 ) Dans l’arrêt du 5 juillet 2017, Fries (C‑190/16, EU:C:2017:513, point 48), la Cour a appliqué à une mesure de l’Union la jurisprudence constante relative à l’aptitude d’une mesure nationale restrictive des libertés de circulation garanties par le traité FUE à réaliser son objectif de façon cohérente et systématique [voir, notamment, arrêt du 23 décembre 2015, Scotch Whisky Association e.a. (C‑333/14, EU:C:2015:845, point 37 et jurisprudence citée)].

    ( 63 ) Voir point 30 des présentes conclusions.

    ( 64 ) Voir arrêts du 14 décembre 2004, Swedish Match (C‑210/03, EU:C:2004:802, points 66, 67 et 71) et Arnold André (C‑434/02, EU:C:2004:800, points 64, 65 et 69).

    ( 65 ) Analyse d’impact, p. 76.

    ( 66 ) Analyse d’impact, p. 49 et 50. Voir également conclusions de l’avocat général Geelhoed dans les affaires British American Tobacco (Investments) et Imperial Tobacco (C‑491/01, EU:C:2002:476, point 231) et Arnold André (C‑434/02, EU:C:2004:487, points 60 à 62).

    ( 67 ) Selon l’article 2, point 14, de la directive 2014/40, un nouveau produit du tabac est « un produit du tabac qui : a) ne relève d’aucune des catégories suivantes : cigarette, tabac à rouler, tabac à pipe, tabac à pipe à eau, cigare, cigarillo, tabac à mâcher, tabac à priser ou tabac à usage oral ; et b) est mis sur le marché après le 19 mai 2014 ».

    ( 68 ) Voir article 19 de la directive 2014/40.

    ( 69 ) Voir arrêts du 14 décembre 2004, Swedish Match (C‑210/03, EU:C:2004:802, point 66) et Arnold André (C‑434/02, EU:C:2004:800, point 64).

    ( 70 ) Arrêt du 4 mai 2016 (C‑477/14, EU:C:2016:324, point 36 à 42).

    ( 71 ) C‑434/02, EU:C:2004:487, point 125.

    ( 72 ) À ce propos, la Cour a également jugé que lorsque le législateur de l’Union est appelé à réglementer une situation complexe, il lui est loisible de recourir à une approche par étapes, pour autant que son choix soit basé sur des critères objectifs et appropriés par rapport aux buts poursuivis par la législation en cause [voir, notamment, arrêt du 17 octobre 2013, Schaible (C‑101/12, EU:C:2013:661, point 91 et jurisprudence citée)].

    ( 73 ) Voir, notamment, arrêt du 16 juin 2015, Gauweiler e.a. (C‑62/14, EU:C:2015:400, point 81).

    ( 74 ) Arrêt du 14 décembre 2004 (C‑210/03, EU:C:2004:802, point 57).

    ( 75 ) Arrêt du 14 décembre 2004 (C‑434/02, EU:C:2004:800, point 55).

    ( 76 ) Voir également, par analogie, arrêts du 4 mai 2016, Philip Morris Brands e.a. (C‑547/14, EU:C:2016:325, point 160), et du 4 mai 2016, Pologne/Parlement et Conseil (C‑358/14, EU:C:2016:323, point 95).

    ( 77 ) Analyse d’impact, p. 75.

    ( 78 ) Analyse d’impact, p. 68.

    ( 79 ) Voir, notamment, arrêt du 16 juin 2015, Gauweiler e.a. (C‑62/14, EU:C:2015:400, point 91).

    ( 80 ) Voir, notamment, arrêts du 16 décembre 2008, Arcelor Atlantique et Lorraine e.a. (C‑127/07, EU:C:2008:728, point 59) ; du 12 juillet 2012, Association Kokopelli (C‑59/11, EU:C:2012:447, point 40), et du 4 mai 2016, Philip Morris Brands e.a. (C‑547/14, EU:C:2016:325, point 185).

    ( 81 ) Voir ordonnance du 12 juillet 1996, Royaume‑Uni/Commission (C‑180/96 R, EU:C:1996:308, point 93) ; arrêt du 19 avril 2012, Artegodan/Commission (C‑221/10 P, EU:C:2012:216, point 99, ainsi que jurisprudence citée), ainsi qu’arrêt du 4 mai 2016, Philip Morris Brands e.a. (C‑547/14, EU:C:2016:325, point 156). Dans ses conclusions dans l’affaire Philip Morris Brands e.a. (C‑547/14, EU:C:2015:853, point 179), l’avocat général Kokott a relevé que la protection de la santé humaine occupe dans l’échelle des valeurs du droit de l’Union un rang « incomparablement supérieur » aux intérêts économiques des opérateurs. Voir, également, conclusions de l’avocat général Geelhoed dans l’affaire British American Tobacco (Investments) et Imperial Tobacco (C‑491/01, EU:C:2002:476, points 226 et 229).

    ( 82 ) Voir, par analogie, arrêts du 8 juin 2010, Vodafone e.a. (C‑58/08, EU:C:2010:321, point 69), et du 23 octobre 2012, Nelson e.a. (C‑581/10 et C‑629/10, EU:C:2012:657, point 81).

    ( 83 ) Arrêt du 14 décembre 2004 (C‑210/03, EU:C:2004:802).

    ( 84 ) Arrêt du 14 décembre 2004 (C‑434/02, EU:C:2004:800).

    ( 85 ) Voir, également, s’agissant de l’examen de la proportionnalité de mesures nationales restrictives des libertés de circulation garanties par le traité FUE, arrêt du 23 décembre 2015, Scotch Whisky Association e.a. (C‑333/14, EU:C:2015:845, points 56 et 59).

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