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Document 62016CC0231

    Conclusions de l'avocat général M. M. Szpunar, présentées le 3 mai 2017.
    Merck KGaA contre Merck & Co. Inc. e.a.
    Demande de décision préjudicielle, introduite par le Landgericht Hamburg.
    Renvoi préjudiciel – Règlement (CE) no 207/2009 – Marque de l’Union européenne – Article 109, paragraphe 1 – Actions civiles sur la base de marques de l’Union européenne et de marques nationales – Litispendance – Notion de “mêmes faits” – Utilisation du terme “Merck” dans des noms de domaines et sur des plateformes de médias sociaux sur Internet – Action fondée sur une marque nationale suivie d’une action fondée sur une marque de l’Union européenne – Dessaisissement – Étendue.
    Affaire C-231/16.

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2017:330

    CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

    M. MACIEJ SZPUNAR

    présentées le 3 mai 2017 ( 1 )

    Affaire C‑231/16

    Merck KGaA

    contre

    Merck & Co. Inc.,

    Merck Sharp & Dohme Corp,

    MSD Sharp & Dohme GmbH

    [demande de décision préjudicielle formée par le Landgericht Hamburg (tribunal régional de Hambourg, Allemagne)]

    « Renvoi préjudiciel – Marque de l’Union européenne – Règlement (CE) no 207/2009 – Lis pendens – Article 109, paragraphe 1 – Actions simultanées sur la base d’une marque de l’Union européenne et d’une marque nationale – Notion de “mêmes parties” – Sociétés économiquement liées utilisant la même marque – Notion de “mêmes faits” – Utilisation du nom “Merck” sur les sites Internet et sur des plateformes en ligne – Action fondée sur une marque nationale suivie d’une action fondée sur une marque de l’Union européenne – Incompétence partielle de la juridiction saisie en second lieu en ce qui concerne une partie du territoire de l’Union »

    Introduction

    1.

    La demande de décision préjudicielle dans la présente affaire offre pour la première fois à la Cour l’opportunité d’interpréter la règle de litispendance visée à l’article 109, paragraphe 1, du règlement (CE) no 207/2009 ( 2 ), applicable dans le cas d’actions simultanées sur la base de marques de l’Union européenne et de marques nationales.

    2.

    Cette demande – qui ne constitue qu’un épisode de la bataille juridique que se livrent deux entreprises mondialement connues pour l’usage du nom « Merck » – a été présentée dans le cadre d’une action en contrefaçon formée par la société Merck KGaA devant une juridiction allemande, saisie en sa qualité de tribunal des marques de l’Union européenne.

    3.

    La société requérante vise à faire interdire aux trois défenderesses au principal – Merck & Co. Inc., Merck Sharp & Dohme Corp et MSD Sharp & Dohme GmbH – l’usage du terme « Merck », protégé par la marque de l’Union européenne, sur des sites Internet accessibles dans l’Union européenne ainsi que sur les plateformes en ligne Facebook, Twitter et Youtube.

    4.

    Au moment de la saisine de la juridiction allemande, une action était déjà pendante entre ces mêmes sociétés, à l’exception de l’une des sociétés défenderesses, devant une juridiction du Royaume-Uni . Ce recours parallèle vise, notamment, une action en contrefaçon en raison de l’usage sur Internet du terme « Merck » visé par les marques nationales.

    5.

    Le nœud du problème soulevé dans le cadre de la présente demande réside dans l’interprétation des conditions d’application de l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 dans l’hypothèse où la juridiction première saisie est appelée à trancher, sur la base des marques nationales, le litige relatif à la contrefaçon sur le territoire d’un État membre, alors que la juridiction saisie en second lieu est un tribunal des marques de l’Union européenne jouissant de la compétence pour l’ensemble de l’Union.

    Le cadre juridique

    6.

    L’article 109, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 dispose ce qui suit :

    « Lorsque des actions en contrefaçon sont formées pour les mêmes faits entre les mêmes parties devant des juridictions d’États membres différents saisies l’une sur la base d’une marque [de l’Union européenne] et l’autre sur la base d’une marque nationale :

    a)

    la juridiction saisie en second lieu doit, même d’office, se dessaisir en faveur de la juridiction première saisie lorsque les marques en cause sont identiques et valables pour des produits ou services identiques. La juridiction qui devrait se dessaisir peut surseoir à statuer si la compétence de l’autre juridiction est contestée ;

    b)

    la juridiction saisie en second lieu peut surseoir à statuer lorsque les marques en cause sont identiques et valables pour des produits ou services similaires ainsi que lorsque les marques en cause sont similaires et valables pour des produits ou services identiques ou similaires. »

    Le litige au principal

    7.

    La requérante au principal est une société à la tête du groupe allemand Merck, qui exerce ses activités dans le secteur chimique et pharmaceutique ; son histoire remonte au 17e siècle.

    8.

    Les défenderesses au principal, deux sociétés américaines et la filiale allemande de l’une d’entre elles, appartiennent au groupe Merck & Co (Merck Sharp & Dohme), qui est l’une des plus grandes entreprises pharmaceutiques mondiales. Historiquement, ce groupe est issu de l’ancienne filiale américaine du groupe allemand Merck. Depuis l’année 1919, les deux groupes sont totalement distincts sur le plan économique.

    9.

    À la suite de cette scission, plusieurs accords de coexistence ont été conclus entre le groupe allemand et le groupe américain en ce qui concerne l’utilisation des marques qui protègent le nom « Merck ». L’accord du 1er janvier 1970 conclu entre la requérante au principal et Merck & Co en fait partie.

    10.

    La requérante au principal est titulaire de plusieurs marques protégeant ce nom, dont notamment des marques nationales protégées au Royaume-Uni, et la marque de l’Union européenne verbale « Merck », enregistrée pour des produits des classes 5, 9, 16, et des services de la classe 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.

    11.

    Les défenderesses au principal exploitent plusieurs sites Internet utilisant le nom « Merck ». Dans le cadre de l’activité de ces sites Internet, la diffusion des informations n’a pas été ciblée géographiquement, les contenus étant donc accessibles sous la même forme dans le monde entier, et donc aussi dans l’ensemble de l’Union. Les défenderesses au principal ont également mis en place d’autres formes de présence sur Internet, à savoir sur les plateformes en ligne Facebook, Twitter et Youtube.

    12.

    Le 8 mars 2013, la requérante au principal a saisi la High Court of Justice (England and Wales), Chancery Division [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division de la Chancery, Royaume-Uni] d’un recours visant les deux premières défenderesses au principal ainsi que trois autres sociétés appartenant au même groupe. Ce recours vise, d’une part, la violation de l’accord du 1er janvier 1970 et, d’autre part, la contrefaçon des marques nationales et des marques internationales protégées au Royaume-Uni, en raison de l’utilisation par les défenderesses au principal du nom « Merck » sur Internet.

    13.

    Le 11 mars 2013, la requérante au principal a également saisi la juridiction de renvoi, le Landgericht Hamburg (tribunal régional de Hambourg, Allemagne), d’une action en contrefaçon fondée sur la marque de l’Union européenne Merck, et visant les défenderesses au principal en raison de l’utilisation du nom « Merck » sur leurs sites Internet ainsi que sur les plateformes Facebook, Twitter et Youtube.

    14.

    Par mémoires du 11 novembre 2014 ainsi que des 12 mars, 10 septembre et 22 décembre 2015, la requérante au principal s’est désistée de son recours en ce qui concerne le territoire du Royaume-Uni. Ce désistement a été contesté par les défenderesses au principal.

    15.

    Les défenderesses au principal estiment que le recours pendant devant la juridiction de renvoi est irrecevable au vu de l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, à tout le moins dans la mesure où il concerne le moyen tiré de la contrefaçon de la marque de l’Union européenne de la requérante au principal dans toute l’Union. Le désistement partiel formulé par la requérante au principal serait sans incidence à cet égard.

    16.

    La requérante au principal soutient pour sa part que, dans la mesure où, dans la seconde procédure, elle fait valoir les droits qui lui sont conférés par la marque de l’Union européenne, valables pour toute l’Union, l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 n’est pas applicable et que, en tout état de cause, cette disposition n’est plus applicable en raison de son désistement partiel en ce qui concerne le territoire du Royaume-Uni.

    17.

    La juridiction de renvoi éprouve des doutes quant à l’interprétation de l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 compte tenu des circonstances du cas d’espèce. Elle tend à penser que les deux procédures en cause coïncident et que le libellé de cette disposition ne permet pas de déclaration d’incompétence partielle, limitée à un seul État membre. En outre, elle s’interroge sur le choix entre l’application de l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 et l’application du paragraphe 1, sous b), de cet article, soulignant que la marque de l’Union européenne invoquée devant elle vise une liste de produits et de services plus large que celle de la marque nationale invoquée devant la juridiction du Royaume-Uni.

    Les questions préjudicielles et la procédure devant la Cour

    18.

    Dans ces conditions, le Landgericht Hamburg (tribunal régional de Hambourg) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

    « 1)

    Le maintien et l’exploitation d’une présence sur Internet accessible sous un même domaine de façon identique dans le monde entier – et donc aussi dans l’Union – en raison de laquelle des actions en contrefaçon ont été formées entre les mêmes parties devant les juridictions de différents États membres, un tribunal étant saisi pour contrefaçon d’une marque de l’Union européenne et l’autre pour contrefaçon d’une marque nationale, rentrent-ils dans la notion de “mêmes faits” figurant à l’article 109, paragraphe 1, sous a), du [règlement no 207/2009] ?

    2)

    Le maintien et l’exploitation de contenus sur Internet sous les domaines “facebook.com” et/ou “youtube.com” et/ou “twitter.com”, accessibles de façon identique dans le monde entier – et donc aussi dans l’Union – toujours sous le même nom d’utilisateur pour ce qui est de chacun des domaines “facebook.com” et/ou “youtube.com” et/ou “twitter.com”, en raison desquels des actions en contrefaçon ont été formées entre les mêmes parties devant les juridictions de différents États membres, un tribunal étant saisi pour contrefaçon d’une marque de l’Union européenne et l’autre pour contrefaçon d’une marque nationale, rentrent-ils dans la notion de “mêmes faits” figurant à l’article 109, paragraphe 1, sous a), du [règlement no 207/2009]?

    3)

    L’article 109, paragraphe 1, sous a), du [règlement no 207/2009] impose-t-il à la “juridiction saisie en second lieu” dans un État membre d’une “action en contrefaçon” pour atteinte à une marque de l’Union européenne du fait du maintien d’une présence sur Internet sous un même domaine, accessible de façon identique dans le monde entier – et donc aussi dans l’Union – devant laquelle sont invoqués des faits de contrefaçon commis ou menaçant d’être commis sur le territoire de tout État membre, en vertu de l’article 97, paragraphe 2, et de l’article 98, paragraphe 1, sous a), du [règlement no 207/2009], de ne se dessaisir qu’en ce qui concerne le territoire de l’autre État membre dans lequel une juridiction a été saisie en premier lieu d’une action en contrefaçon d’une marque nationale identique à la marque de l’Union européenne invoquée devant la “juridiction saisie en second lieu”, et protégée pour des produits identiques, du fait du maintien et de l’exploitation d’une présence sur Internet sous un même domaine, accessible de façon identique dans le monde entier – et donc aussi dans l’Union – et ce en raison de cette double identité, ou bien la “juridiction saisie en second lieu” doit-elle, au vu d’une telle double identité, se déclarer incompétente pour connaître de l’ensemble des demandes portées devant elle en application de l’article 97, paragraphe 2, et de l’article 98, paragraphe 1, sous a), du [règlement no 207/2009] et fondées sur des faits de contrefaçon commis ou menaçant d’être commis dans tout État membre et donc dans l’Union ?

    4)

    L’article 109, paragraphe 1, sous a), du [règlement no 207/2009] impose-t-il à la “juridiction saisie en second lieu” dans un État membre d’une “action en contrefaçon” pour atteinte à une marque de l’Union européenne du fait du maintien et de l’exploitation de contenus sur Internet sous les domaines “facebook.com” et/ou “youtube.com” et/ou “twitter.com” accessibles de façon identique dans le monde entier – et donc aussi dans l’Union –, toujours sous le même nom d’utilisateur en ce qui concerne chacun des domaines “facebook.com” et/ou “youtube.com” et/ou “twitter.com”, devant laquelle sont invoqués des faits de contrefaçon commis ou menaçant d’être commis dans tout État membre en vertu de l’article 97, paragraphe 2, et de l’article 98, paragraphe 1, sous a), du [règlement no 207/2009], de ne se dessaisir qu’en ce qui concerne le territoire de l’autre État membre dans lequel une juridiction a été saisie en premier lieu pour contrefaçon d’une marque identique à la marque de l’Union européenne invoquée devant la juridiction saisie en second lieu et protégée pour des produits identiques, du fait du maintien et de l’exploitation de contenus sur Internet sous les domaines “facebook.com” et/ou “youtube.com” et/ou “twitter.com” accessibles de manière identique dans le monde entier – et donc aussi dans l’Union – avec toujours le même nom d’utilisateur pour chacun des domaines “facebook.com” et/ou “youtube.com” et/ou“twitter.com”, et ce en raison de cette double identité, ou bien la “juridiction saisie en second lieu” doit-elle, au vu d’une telle double identité, se déclarer incompétente pour connaître de l’ensemble des demandes portées devant elle en vertu de l’article 97, paragraphe 2, et de l’article 98, paragraphe 1, sous a), du [règlement no 207/2009], fondées sur des faits de contrefaçon commis, ou menaçant d’être commis dans tout État membre et donc dans l’Union ?

    5)

    Faut-il considérer que fait obstacle à une déclaration d’incompétence de la part de la juridiction “saisie en second lieu” en application de l’article 109, paragraphe 1, sous a), du [règlement no 207/2009], en raison de la double identité, le désistement d’une action en contrefaçon formée devant elle pour contrefaçon d’une marque de l’Union européenne du fait du maintien et de l’exploitation d’une présence sur Internet sous le même domaine, accessible de façon identique dans le monde entier – et donc dans l’Union européenne–, si elle a d’abord été saisie de demandes en vertu de l’article 97, paragraphe 2, et de l’article 98, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 fondées sur des faits de contrefaçon commis ou menaçant d’être commis dans tout État membre, ce désistement entendant jouer pour le territoire de l’autre État membre dans lequel une juridiction a été saisie “en premier lieu” d’une action en contrefaçon d’une marque nationale identique à la marque de l’Union européenne invoquée devant la juridiction “saisie en second lieu” et protégée pour des produits identiques, du fait du maintien et de l’exploitation d’une présence sur Internet sous le même domaine, accessible de façon identique dans le monde entier – et donc dans l’Union ?

    6)

    Faut-il considérer que fait obstacle à une déclaration d’incompétence de la part de la juridiction “saisie en second lieu” en application de l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, en raison de la double identité, le désistement d’une action en contrefaçon formée devant elle pour contrefaçon d’une marque de l’Union européenne du fait du maintien et de l’exploitation de contenus sur Internet sous les domaines “facebook.com” et/ou “youtube.com” et/ou “twitter.com” accessibles de manière identique dans le monde entier – et donc aussi dans l’Union – avec toujours le même nom d’utilisateur pour chacun des domaines “facebook.com” et/ou “youtube.com” et/ou “twitter.com”, si elle a d’abord été saisie de demandes en vertu de l’article 97, paragraphe 2, et de l’article 98, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 fondées sur des faits de contrefaçon commis ou menaçant d’être commis dans tout État membre, ce désistement entendant jouer pour le territoire de l’autre État membre dans lequel une juridiction a été saisie “en premier lieu” d’une action en contrefaçon d’une marque nationale identique à la marque de l’Union européenne invoquée devant la juridiction “saisie en second lieu” et protégée pour des produits identiques, du fait du maintien et de l’exploitation de contenus sur Internet sous les domaines “facebook.com” et/ou “youtube.com” et/ou “twitter.com” accessibles de manière identique dans le monde entier – et donc aussi dans l’Union – avec toujours le même nom d’utilisateur pour chacun des domaines “facebook.com” et/ou “youtube.com” et/ou “twitter.com” ?

    7)

    L’article 109, paragraphe 1, sous a), du [règlement no 207/2009] implique-t-il que la formule “lorsque les marques en cause sont identiques et valables pour des produits ou services identiques” ne donne lieu à une incompétence de la juridiction “saisie en second lieu” en cas d’identité des marques que dans la mesure où la marque de l’Union européenne et la marque nationale concernées ont été enregistrées pour les mêmes produits et/ou services, ou bien la juridiction “saisie en second lieu” est-elle totalement incompétente même dans le cas où la marque de l’Union européenne invoquée devant elle est protégée pour d’autres produits et/ou services pour lesquels la marque nationale n’est pas protégée et pour lesquels il est envisageable qu’ils soient concernés par des actes identiques ou similaires aux actes litigieux ? »

    19.

    La décision de renvoi est parvenue au greffe de la Cour le 25 avril 2016. Des observations écrites ont été déposées par les parties au principal et par la Commission européenne. Les parties au principal et la Commission ont participé à l’audience, qui s’est tenue le 15 février 2017.

    Analyse

    Observations liminaires

    20.

    La demande de décision préjudicielle dans la présente affaire va donner à la Cour l’occasion de se pencher sur plusieurs aspects inédits de la règle de litispendance applicable en droit de marques de l’Union européenne, prévue à l’article 109, paragraphe 1, du règlement no 207/2009.

    21.

    En premier lieu, ainsi qu’il ressort des observations écrites de la Commission et des échanges qui ont eu lieu entre les parties lors de l’audience, les faits décrits dans la décision de renvoi font apparaître un doute en ce qui concerne la condition de l’identité des parties. En effet, l’action devant la juridiction de renvoi a été formée contre la filiale allemande du groupe américain qui n’est pas impliquée dans la première procédure. Je considère qu’il convient d’examiner cette question – bien qu’elle ne soit pas évoquée dans les questions préjudicielles – afin d’éclairer la juridiction de renvoi sur tous les aspects pertinents de l’article 109, paragraphe 1, du règlement no 207/2009.

    22.

    En deuxième lieu, j’analyserai la problématique centrale de la présente affaire, qui concerne l’interprétation de la condition de l’identité des actions au sens de l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009. Cette analyse couvrira également la question de l’obligation de la juridiction saisie en second lieu de se dessaisir partiellement en ce qui concerne une partie du territoire de l’Union (première à quatrième questions préjudicielles).

    23.

    En troisième lieu, même si les réponses aux questions précédentes devaient permettre à la juridiction de renvoi de trancher la question de l’exception de litispendance, j’examinerai à titre subsidiaire les deux autres aspects de la demande préjudicielle. Ceux-ci portent, d’une part, sur la prise en compte du désistement partiel pour apprécier la situation de litispendance (cinquième et sixième questions préjudicielles) et, d’autre part, sur la délimitation entre les points a) et b) de l’article 109, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 (septième question préjudicielle).

    La règle de litispendance contenue à l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009

    24.

    L’article 94, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 opère un renvoi général aux dispositions du règlement (CE) no 44/2001 ( 3 ).

    25.

    Ce renvoi s’opère sous réserve des règles spécifiques. L’article 109, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 prévoit une telle règle spécifique en ce qui concerne la litispendance d’actions civiles simultanées sur la base de marques de l’Union européenne et de marques nationales.

    26.

    Cette règle trouve sa justification dans la coexistence entre la marque de l’Union européenne et les marques nationales, trait caractéristique du système de la protection des marques dans l’Union.

    27.

    L’objectif de la règle visée à l’article 109, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 concorde, en substance, avec celui des règles de litispendance visées à l’article 27 du règlement Bruxelles I ( 4 ). Cet objectif consiste à éviter que des jugements contradictoires ne soient rendus à la suite d’actions parallèles impliquant les mêmes parties et ayant le même objet et la même cause ( 5 ).

    28.

    Cependant, l’article 109, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 traite de la problématique de la litispendance dans un contexte très limité, à savoir celui de deux actions en contrefaçon parallèles, l’une formée sur la base d’une marque de l’Union européenne et l’autre sur la base d’une marque nationale identique.

    29.

    S’agissant ainsi d’une réglementation directement inspirée des règles de litispendance contenues dans la convention de Bruxelles ( 6 ) et, ensuite, reprises dans le règlement Bruxelles I, la jurisprudence de la Cour relative à l’interprétation de ces dernières garde tout son intérêt ( 7 ).

    30.

    Cette considération est corroborée par le fait que le règlement no 207/2009 ne vise pas toutes les situations de litispendance impliquant une marque de l’Union européenne. Les actions parallèles formées devant les juridictions des différents États membres sur la base d’une même marque de l’Union européenne relèvent notamment des règles de litispendance visées par le règlement Bruxelles I (ou, pour les actions formées à compter du 10 janvier 2015, le règlement no 1215/2012) ( 8 ).

    31.

    Il s’ensuit que le concept de litispendance sous-tendant l’article 109, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 doit nécessairement être le même que celui sous-tendant l’article 27, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I.

    32.

    Les notions utilisées dans l’article 27 du règlement Bruxelles I pour déterminer une situation de litispendance sont autonomes des concepts analogues préexistants en droit national ( 9 ).

    33.

    La Cour a interprété la notion de litispendance en posant un test qui comprend trois éléments : l’identité des parties, l’identité de la cause et l’identité de l’objet des demandes. À cet égard, la Cour s’est appuyée sur les termes de l’article 21 de la convention de Bruxelles, dans la version française ainsi que dans d’autres versions linguistiques, en faisant abstraction du fait que les versions allemande et anglaise ne distinguaient pas les notions d’« objet » et de « cause » des demandes ( 10 ).

    34.

    L’interprétation de l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 pose un problème linguistique similaire. En effet, la version anglaise de l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 utilise la même expression que celle employée dans l’article 27, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I ( 11 ), alors que, en langues française et allemande, ces deux dispositions utilisent des termes différents ( 12 ).

    35.

    Or, eu égard au fait qu’il s’agit clairement d’une règle inspirée des règles de litispendance formulées dans le contexte de la convention de Bruxelles, il convient à mon avis de faire abstraction de cette divergence linguistique. En interprétant l’article 109, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, il convient de partir de l’hypothèse que cette disposition repose sur la même notion de litispendance que l’article 27, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I – incorporant le test à trois niveaux relatifs à l’identité des parties, de la cause et de l’objet des demandes ( 13 ).

    36.

    La différence entre les règles de litispendance dudit article 109 et celles du règlement Bruxelles I tient au fait que, dans le premier cas, la condition relative à l’identité des demandes est remplie, malgré leurs fondements juridiques formellement distincts – l’une étant formée sur la base d’une marque de l’Union européenne et l’autre sur celle d’une marque nationale – lorsque les marques en cause sont identiques et valables pour les mêmes produits ou services.

    Sur l’identité des parties

    37.

    Il ressort de la décision de renvoi que la deuxième procédure engagée dans la présente affaire implique un défendeur qui ne l’était pas dans la première procédure, à savoir la filiale allemande du groupe constitué par les deux premières défenderesses au principal.

    38.

    Il convient ainsi d’examiner si les deux actions sont formées entre les mêmes parties.

    39.

    En effet, lorsque les parties à des procédures parallèles ne coïncident que partiellement, la juridiction saisie en second lieu n’est tenue de se dessaisir que pour autant que les parties aux deux procédures sont les mêmes, la procédure pouvant donc continuer entre les autres parties ( 14 ).

    40.

    L’identité des parties suppose, en principe, qu’il s’agisse des mêmes personnes.

    41.

    Cependant, dans certaines hypothèses exceptionnelles, cette condition peut être remplie même si les parties aux procédures parallèles sont des personnes différentes.

    42.

    En effet, la Cour a admis qu’il ne saurait être exclu que les intérêts des deux parties puissent être considérés comme étant à tel point identiques et indissociables, par rapport à l’objet de deux litiges, que ces parties doivent être considérées comme étant une seule et même partie aux fins de l’application des règles en matière de litispendance ( 15 ).

    43.

    Je considère qu’une telle hypothèse exceptionnelle se présente dans le cas de deux actions en contrefaçon parallèles – telles que celles en l’espèce – impliquant le même signe utilisé par des sociétés économiquement liées.

    44.

    En effet, dans le cadre d’un groupe de sociétés, le contrôle des droits de propriété intellectuelle, y compris des droits des marques, doit être confié à l’une des personnes morales, souvent la société à la tête du groupe, alors même que, dans la pratique, les signes peuvent être utilisés d’une manière uniforme par l’ensemble des sociétés du groupe.

    45.

    Dans ces conditions, les intérêts des sociétés concernées, bien qu’il s’agisse de personnes distinctes, se caractérisent par une telle unicité que lesdites sociétés peuvent être considérées comme étant une seule et même partie au regard de l’objectif d’éviter des jugements contradictoires en matière de marques ( 16 ).

    46.

    Je considère donc que, dans des conditions telles qu’en l’espèce, deux actions en contrefaçon parallèles formées, l’une, contre la société mère et, l’autre, contre cette même société et sa filiale, doivent être considérées comme étant formées entre les mêmes parties, lorsque ces actions ont pour objet l’usage du même signe par des sociétés économiquement liées. Il appartiendra, bien évidemment, au juge national d’appliquer ces considérations au litige au principal.

    Sur l’identité des actions en contrefaçon

    47.

    Ainsi que je l’ai déjà relevé, l’article 109, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 repose sur la même notion de litispendance que l’article 27, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I.

    48.

    Il ressort de la jurisprudence relative à ce dernier règlement que les actions relevant d’une règle de litispendance doivent avoir la même « cause », à savoir le même fondement factuel et juridique ( 17 ), et le même « objet », à savoir poursuivre le même but ( 18 ).

    49.

    Ainsi, les actions ne doivent pas être « identiques » au sens propre du terme, mais doivent coïncider pour ce qui est de leur cause et de leur objet ( 19 ).

    50.

    Selon moi, l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 repose sur les mêmes éléments, en ce qu’il prévoit qu’il s’applique aux actions en contrefaçon formées pour les mêmes faits et sur la base de marques identiques, nationales et de l’Union européenne.

    51.

    En l’espèce, s’agissant de la cause des actions, il ressort de la décision de renvoi que les deux demandes reposent sur les fondements juridiques qui sont assimilés aux fins de la règle de litispendance visée à l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, à savoir sur les droits exclusifs découlant des marques nationales et d’une marque de l’Union européenne identiques.

    52.

    En outre, les deux procédures impliquent des éléments factuels qui coïncident d’une certaine manière, en ce qu’ils se rapportent à l’usage du signe « Merck » sur les mêmes sites Internet.

    53.

    Les difficultés interprétatives inhérentes au présent litige concernent l’aspect territorial de ces demandes.

    54.

    En effet, bien que les deux actions visent à faire interdire l’usage du même signe, l’étendue du constat de contrefaçon dans les deux actions ainsi que les effets territoriaux des interdictions ne se recoupent que partiellement.

    55.

    Ainsi, dans les circonstances du cas d’espèce, la compétence de la juridiction saisie du premier recours intenté sur la base de la marque nationale est limitée au territoire du Royaume-Uni, alors que le second recours est introduit devant un tribunal des marques de l’Union européenne, au titre de l’article 97, paragraphes 1 à 4, du règlement no 207/2009, ce tribunal étant compétent pour examiner l’existence de faits de contrefaçon sur le territoire de tout État membre et pour adopter une interdiction s’étendant à toute l’Union.

    56.

    Quelle incidence cette différence a-t-elle sur l’appréciation de l’identité de la cause et de l’objet dans les deux actions ?

    57.

    Les opinions des parties sont partagées sur ce point. La requérante au principal considère que la différence de portée territoriale des deux actions exclut que l’on puisse conclure à leur identité. Les parties défenderesses au principal soutiennent quant à elles que la situation en cause concerne deux actions identiques aux fins de l’application de l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009.

    58.

    La Commission, pour sa part, indique que la condition de l’identité des « faits » doit se rapporter à une contrefaçon des mêmes marques sur le territoire des mêmes États membres. La notion de « mêmes faits » doit selon elle être comprise, dans le contexte de l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, comme visant deux demandes invoquant non seulement la contrefaçon de marques identiques, mais également le même territoire.

    59.

    J’observe que la question soulevée par le présent litige concerne une problématique qui voit s’affronter en doctrine deux positions.

    60.

    Selon la première position, l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 fait obstacle à une seconde action en contrefaçon visant une marque identique, indépendamment des aspects territoriaux des deux demandes. En d’autres termes, cette disposition exige que la juridiction saisie en second lieu sur la base d’une marque de l’Union européenne se dessaisisse, même dans l’hypothèse où la première action est fondée sur la marque nationale et concerne donc un constat de contrefaçon limité au territoire de l’État membre concerné ( 20 ).

    61.

    Selon la seconde position, deux actes de contrefaçon, visés par des actions simultanées sur la base d’une marque nationale, d’une part, et d’une marque de l’Union européenne, d’autre part, ne sont identiques que lorsque les faits concernent le même territoire. Le tribunal des marques de l’Union européenne n’est pas tenu de se dessaisir dans la mesure où l’étendue territoriale du litige dont il est saisi est plus large que celle du litige devant la juridiction nationale saisie en premier lieu ( 21 ). Le même doute concernant les deux interprétations auxquelles se prête l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 se reflète également dans certains jugements nationaux ( 22 ).

    62.

    Ces deux positions s’entendent pour admettre que la formulation de l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 est problématique. Comprise dans un sens large, elle fait apparaître une lacune dans la protection juridictionnelle du titulaire d’une marque de l’Union européenne. Celui-ci se trouverait dans l’impossibilité de former une action visant à la protection de ses droits à l’échelle européenne, en raison de l’existence d’une action simultanée sur la base de la marque nationale, pendante devant une juridiction compétente pour statuer sur la contrefaçon limitée au territoire d’un seul État membre ( 23 ).

    63.

    Selon moi, afin de dissiper ce doute interprétatif, il convient de se référer à l’économie de la disposition concernée.

    64.

    Le but poursuivi par l’article 109, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 ressort de l’articulation entre deux principes à savoir, d’une part, le caractère unitaire de la marque de l’Union européenne et, d’autre part, la coexistence de cette marque avec les marques nationales, conduisant à la nécessité d’éviter des jugements contradictoires.

    65.

    Le lien entre ces principes ressort des objectifs décrits aux considérants 16 et 17 du règlement no 207/2009. Aux termes de ces considérants, les effets des décisions relatives à la validité et à la contrefaçon des marques de l’Union européenne doivent s’étendre à l’ensemble de l’Union. Il convient par ailleurs d’éviter que des jugements contradictoires ne soient rendus à la suite d’actions formées, pour les mêmes faits, sur la base d’une marque de l’Union européenne et de marques nationales parallèles ( 24 ).

    66.

    Or, l’articulation entre ces deux objectifs serait compromise si l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 devait être interprété d’une manière large, en ce sens qu’elle empêcherait le titulaire d’une marque de l’Union européenne de se prévaloir de l’effet paneuropéen d’une telle marque, en raison de l’existence d’une action simultanée formée sur la base d’une marque nationale et portant sur la contrefaçon sur le territoire plus limité. Une telle interprétation contribuerait, certes, à promouvoir l’objectif consistant à éviter des jugements contradictoires, mais elle mettrait en péril l’objectif de garantir que les effets des décisions sur la contrefaçon d’une marque de l’Union européenne s’étendent à l’ensemble de l’Union.

    67.

    En revanche, l’équilibre entre ces deux objectifs peut être pleinement assuré en interprétant l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 comme étant applicable aux seules actions parallèles dont les aspects territoriaux coïncident. En effet, une telle interprétation garantit, d’une part, que le titulaire d’une marque de l’Union européenne puisse protéger ses droits à l’échelle européenne, et ce même en présence d’une action simultanée sur la base d’une marque nationale. D’autre part, elle permet également d’éviter des jugements contradictoires, dans la mesure où les compétences territoriales des juridictions saisies parallèlement sur la base de marques nationales et de l’Union européenne peuvent être clairement délimitées.

    68.

    Je considère donc, dans l’hypothèse où la première action est formée sur la base d’une marque nationale, concernant la contrefaçon sur le territoire de l’État membre concerné et, la seconde, sur la base d’une marque de l’Union européenne, concernant la contrefaçon dans cet État membre, mais également dans d’autres parties du territoire de l’Union, que ces deux actions ne coïncident que partiellement pour ce qui est de la contrefaçon sur le territoire sur lequel cette marque nationale est protégée.

    69.

    Cette considération me semble être corroborée par l’approche plus générale sous-tendant l’application de l’article 27 du règlement Bruxelles I.

    70.

    Dans le contexte de l’article 27 de ce règlement, l’identité de cause et d’objet doit être examinée, notamment, à la lumière des effets potentiels de la décision à venir de la juridiction première saisie. Ainsi, il convient de se demander si la partie à la première procédure aurait encore quelque chose à gagner dans la deuxième procédure après avoir obtenu gain de cause ou succombé dans la première ( 25 ).

    71.

    Par conséquent, un dessaisissement au motif de la litispendance n’est approprié que pour autant que les effets potentiels des jugements dans les deux procédures se chevauchent. Ce principe, s’il est valable pour l’article 27 du règlement Bruxelles I, doit l’être également pour l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 ( 26 ).

    72.

    Or, dans l’hypothèse où – comme en l’espèce – la juridiction première saisie statue sur la contrefaçon d’une marque nationale, le fait d’obtenir gain de cause dans le cadre du premier litige n’apporterait pas au titulaire de la marque de l’Union européenne une protection aussi étendue que celle demandée dans la seconde procédure sur la base de la marque de l’Union européenne.

    73.

    Certes, l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 vise également à éviter une situation dans laquelle le titulaire de marques parallèles – une marque de l’Union européenne et une marque nationale identique – pourrait saisir deux juridictions dans différents États membres en visant la même contrefaçon.

    74.

    Cependant, j’observe qu’un tel usage abusif des procédures ne peut pas être présumé. Il ne saurait notamment être exclu que le titulaire de marques parallèles puisse, dans certaines situations, être objectivement amené à invoquer ses droits dans deux procédures parallèles. Tel semble être le cas en l’espèce, étant donné que la contrefaçon portant sur le territoire du Royaume-Uni doit être examinée conjointement avec le litige contractuel qui trouve son origine dans l’accord de coexistence du 1er janvier 1970.

    75.

    Enfin, l’interprétation que je propose me semble être confortée par des considérations encore plus fondamentales, inspirées du principe de la protection juridictionnelle effective consacré par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

    76.

    Je suis, à cet égard, conscient du fait que l’invocation de la Charte des droits fondamentaux ne saurait en principe aboutir à modifier la portée des règles de litispendance ou des règles relatives à la détermination de la juridiction compétente en général ( 27 ). Cependant, à mon avis, lorsqu’une disposition concernée s’ouvre à deux lectures possibles, il convient de choisir celle qui permet d’assurer la solution guidée par le principe de la protection juridictionnelle effective. Or, si l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 devait être interprété comme exigeant du tribunal des marques de l’Union européenne qu’il se dessaisisse dans le cas d’une action simultanée devant une juridiction jouissant d’une compétence territoriale moins étendue, la protection juridictionnelle des droits du titulaire d’une marque de l’Union européenne pourrait être compromise.

    77.

    Pour l’ensemble de ces raisons, je considère que l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 doit être interprété en ce sens que l’objet et la cause des deux actions en contrefaçon, la première intentée sur la base d’une marque nationale et visant la contrefaçon sur le territoire d’un État membre, , la seconde intentée sur la base d’une marque de l’Union européenne et visant la contrefaçon sur l’ensemble de l’Union, ne coïncident que partiellement, pour ce qui est du territoire de l’État membre dans lequel cette marque nationale est protégée.

    Sur un dessaisissement partiel, limité à une partie du territoire de l’Union

    78.

    Quelle obligation incombe, en vertu de l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, à la juridiction saisie en second lieu, dans l’hypothèse où les actions en contrefaçon ne coïncident que partiellement ?

    79.

    En principe, en cas de chevauchement partiel entre les deux procédures, la juridiction saisie en second lieu n’est tenue de se dessaisir que pour autant que cela s’avère nécessaire pour éviter cette coïncidence ( 28 ).

    80.

    Cela suppose bien sûr qu’un tel dessaisissement partiel soit possible compte tenu de la nature de la deuxième procédure.

    81.

    J’observe à cet égard que la Cour a déjà posé les principes permettant au tribunal des marques de l’Union européenne de limiter, à titre exceptionnel, les effets territoriaux d’un jugement dans une action en contrefaçon, et ce dans deux cas de figure à savoir, premièrement, dans le cas où le requérant a restreint la portée territoriale de son action dans le cadre de l’exercice de son libre pouvoir de déterminer l’étendue de l’action et deuxièmement, dans le cas où le tribunal des marques de l’Union européenne conclut, sur la base des éléments qui doivent, en principe, lui être soumis par le défendeur, que l’usage d’un signe concerné ne crée aucun risque de confusion avec la marque de l’Union européenne dans une partie, précisément définie, du territoire de l’Union ( 29 ).

    82.

    Il me semble approprié d’ajouter une troisième hypothèse de limitation de la portée territoriale du jugement rendu dans une action de contrefaçon de la marque de l’Union européenne. Elle concerne le cas où le tribunal des marques de l’Union européenne, saisi en second lieu, doit se dessaisir partiellement afin de délimiter la portée des actions simultanées sur la base de marques nationales et de marques de l’Union européenne.

    83.

    En outre, je considère que la responsabilité de délimiter sa compétence territoriale afin d’éviter une situation de litispendance incombe non pas aux parties aux litiges, mais au tribunal saisi en second lieu.

    84.

    Cette considération ressort tant du rôle d’une juridiction pour ce qui est de déterminer sa compétence territoriale que du mécanisme des règles de litispendance, qui prévoient un sursis à statuer puis un dessaisissement comme conséquence de la situation de litispendance. Elle est également reflétée dans le libellé de l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, qui exige que la juridiction saisie en second lieu se dessaisisse, même d’office.

    85.

    Au vu de ce qui précède, je considère qu’il convient d’interpréter l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 en ce sens que, dans l’hypothèse où les actions simultanées formées sur la base d’une marque nationale et d’une marque de l’Union européenne coïncident partiellement en ce qui concerne le territoire sur lequel la marque nationale est protégée, le tribunal des marques de l’Union européenne, lorsqu’il est saisi en second lieu, doit se dessaisir, même d’office, de la partie de la demande concernant le territoire pour lequel les actions coïncident.

    À titre subsidiaire, sur les conséquences du désistement partiel

    86.

    Eu égard à l’analyse qui précède, il n’est pas nécessaire de répondre aux cinquième à septième questions préjudicielles. Je les examinerai brièvement, à titre subsidiaire, pour le cas où la Cour considérerait utile d’y répondre.

    87.

    Par ses cinquième et sixième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi se demande, en substance, si un désistement partiel de la requérante au principal, concernant la contrefaçon sur le territoire du Royaume-Uni, est susceptible d’être pris en considération aux fins de l’application de l’article 109, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

    88.

    J’observe, à titre liminaire, que les parties défenderesses au principal indiquent que le désistement en cause n’est pas effectif au regard des règles procédurales nationales, selon lesquelles, pour produire effet unilatéralement, le désistement doit être formulé avant l’audience. Or, il s’agit d’une question de droit national procédural, qui ne relève pas de la compétence de la Cour. Je me limiterai donc à un examen des effets du désistement sous l’angle de l’article 109, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

    89.

    À cet égard, la partie requérante au principal soutient que le désistement en l’espèce élimine le chevauchement entre les deux procédures, de telle sorte qu’il n’y a plus de situation de litispendance. Les parties défenderesses au principal soutiennent, pour leur part, que la situation de litispendance doit être appréciée au début de la procédure, de telle sorte qu’un désistement au cours de l’instance ne peut pas être pris en considération.

    90.

    À ma connaissance, la Cour n’a pas encore eu l’occasion de se prononcer sur les conséquences d’un désistement pour l’application des règles de litispendance ( 30 ).

    91.

    Il est certes vrai que, étant donné que les règles de litispendance portent sur la compétence de la juridiction saisie, la décision à cet égard doit être prise, en principe, référence faite à la situation au moment de l’introduction du recours.

    92.

    Cependant, cette considération doit être conciliée avec l’objectif des règles concernées qui visent à éviter des jugements contradictoires. Selon moi, lorsque, à la suite de l’incident intervenu au cours de l’instance, il n’y a plus de risque de contradiction, il convient d’en tenir compte pour l’application des règles de litispendance ( 31 ).

    93.

    Je considère donc que, lorsque, compte tenu d’un désistement partiel valablement intervenu dans le cadre de la seconde procédure, les actions en contrefaçon simultanées ne peuvent plus être considérées comme étant identiques, il convient d’en tenir compte pour l’application de l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009.

    À titre subsidiaire, sur l’identité des produits et des services

    94.

    Par sa septième question préjudicielle, la juridiction de renvoi vise à distinguer les hypothèses visées à l’article 109, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement no 207/2009.

    95.

    Si la pertinence de cet aspect n’est pas explicitée dans la décision de renvoi, les arguments des parties au principal font apparaître un débat sur la question de savoir si l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 s’applique lorsque la marque de l’Union européenne invoquée devant la juridiction saisie en second lieu a aussi été enregistrée pour des produits et des services supplémentaires par rapport à la marque nationale invoquée dans la première procédure.

    96.

    À cet égard, ainsi que l’observe à juste titre la Commission, il semble pertinent de savoir, aux fins de l’application de l’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, si les actions devant les deux juridictions invoquent une contrefaçon, respectivement, d’une marque nationale et d’une marque de l’Union européenne, en ce qui concerne les mêmes produits ou services. Si la contrefaçon en relation avec les produits ou services supplémentaires n’est invoquée que devant la juridiction saisie en second lieu, la cause des deux demandes ne coïncide que partiellement, de telle sorte qu’un dessaisissement partiel doit être envisagé.

    97.

    Cependant, ainsi que je l’ai déjà relevé, cet aspect n’est pas pertinent si la Cour suit mes propositions de réponse au sujet des quatre premières questions préjudicielles.

    Conclusion

    98.

    Au vu des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre à la demande de décision préjudicielle présentée par le Landgericht Hamburg (tribunal régional de Hambourg, Allemagne) de la manière suivante :

    L’article 109, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne, doit être interprété en ce sens que, lorsque deux actions en contrefaçon sont formées devant des juridictions d’États membres différents, la première sur la base d’une marque nationale, concernant la contrefaçon sur le territoire d’un État membre et la seconde sur la base d’une marque de l’Union européenne, concernant la contrefaçon en relation avec l’ensemble du territoire de l’Union, ces actions ne coïncident que partiellement, dans la mesure où elles concernent le territoire de cet État membre.

    Le tribunal des marques de l’Union européenne, lorsqu’il est saisi en second lieu, doit se dessaisir, même d’office, de la partie de la demande concernant le territoire pour lequel les actions coïncident.


    ( 1 ) Langue originale : le français.

    ( 2 ) Règlement du Conseil du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1). Hormis l’insertion des références à la « marque de l’Union européenne », le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015, modifiant le règlement no 207/2009 et le règlement (CE) no 2868/95 de la Commission portant modalités d’application du règlement (CE) no 40/94 du Conseil sur la marque communautaire, et abrogeant le règlement (CE) no 2869/95 de la Commission relatif aux taxes à payer à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (JO 2015, L 341, p. 21), n’a pas modifié les dispositions concernées.

    ( 3 ) Règlement du Conseil du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2001, L 12, p. 1, ci-après le « règlement Bruxelles I »).

    ( 4 ) Remplacé, à partir du 10 janvier 2015, par l’article 29 du règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2012, L 351, p. 1). Eu égard à la règle transitoire visée à l’article 66, paragraphe 1, de ce règlement, la présente action, intentée avant le 10 janvier 2015, continue d’être régie par le règlement Bruxelles I. J’observe, en outre, que l’hypothèse de litispendance visée au premier paragraphe des deux articles est formulée de manière identique.

    ( 5 ) Considérant 17 du règlement no 207/2009.

    ( 6 ) Convention du 27 septembre 1968, concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 1972, L 299, p. 32), telle que modifiée par les conventions successives relatives à l’adhésion des nouveaux États membres à cette convention (ci-après la « convention de Bruxelles »)

    ( 7 ) Voir conclusions de l’avocat général Tanchev dans l’affaire Hummel Holding (C‑617/15, EU:C:2017:13, point 33).

    ( 8 ) Voir Schennen, D., dans Eisenführ, G., Schennen, D., Gemeinschaftsmarkenverordnung, 4e édition, Carl Heymanns Verlag, Cologne, 2014, article 109, point 4.

    ( 9 ) Voir, concernant l’article 21 de la convention de Bruxelles, arrêts du 8 décembre 1987, Gubisch Maschinenfabrik (144/86, EU:C:1987:528, point 11), et du 6 décembre 1994, Tatry (C‑406/92, EU:C:1994:400, point 30). Je ne souscris pas à l’opinion de D. Schennen, qui observe que l’identité des parties et des faits s’apprécie en vertu du droit procédural national. Voir Schennen, D., dans Eisenführ, G., Schennen, D., Gemeinschaftsmarkenverordnung, 4e édition, Carl Heymanns Verlag, Cologne, 2014, article 109, point 8.

    ( 10 ) Voir arrêts du 8 décembre 1987, Gubisch Maschinenfabrik (144/86, EU:C:1987:528, point 14), et du 6 décembre 1994, Tatry (C‑406/92, EU:C:1994:400, point 38).

    ( 11 ) En langue anglaise, « [actions/proceedings] involving the same cause of action ».

    ( 12 ) En langue française, « demandes ayant le même objet et la même cause » (article 27 du règlement Bruxelles I) et « actions en contrefaçon […] formées pour les mêmes faits » (article 109, paragraphe 1, du règlement no 207/2009). En langue allemande, respectivement, « Klagen wegen desselben Anspruchs » et « Verletzungsklagen […] wegen derselben Handlungen ».

    ( 13 ) Voir, s’agissant du lien entre le règlement no 207/2009 et l’article 27 du règlement Bruxelles I, conclusions de l’avocat général Bobek dans l’affaire Apple and Pear Australia et Star Fruits Diffusion/EUIPO (C‑226/15 P, EU:C:2016:250, points 35 à 37). S’agissant de l’articulation entre les deux dispositions, les juridictions du Royaume-Uni ont tiré une conclusion identique, voir Hearst Holdings Inc & Anor v A.V.E.L.A. Inc & Ors [2014] EWHC 1553 (Ch) (19 May 2014), paragraphe 18.

    ( 14 ) Arrêt du 6 décembre 1994, Tatry (C‑406/92, EU:C:1994:400, point 34).

    ( 15 ) Voir en ce sens, s’agissant des procédures parallèles impliquant l’assureur et l’assuré, arrêt du 19 mai 1998, Drouot assurances (C‑351/96, EU:C:1998:242, points 19 et 23).

    ( 16 ) Voir également, pour une position similaire, Hartmann, M., Die Gemeinschaftsmarke im Verletzungsverfahren, Peter Lang, Frankfurt am Main, 2009, p. 164.

    ( 17 ) Arrêts du 6 décembre 1994, Tatry (C‑406/92, EU:C:1994:400, point 39) ; du 14 octobre 2004, Mærsk Olie & Gas, C‑39/02, EU:C:2004:615, point 38), ainsi que du 22 octobre 2015, Aannemingsbedrijf Aertssen et Aertssen Terrassements (C‑523/14, EU:C:2015:722, point 43).

    ( 18 ) Arrêts du 6 décembre 1994, Tatry (C‑406/92, EU:C:1994:400, point 41) ; du 8 mai 2003, Gantner Electronic (C‑111/01, EU:C:2003:257, point 25), ainsi que du 22 octobre 2015, Aannemingsbedrijf Aertssen et Aertssen Terrassements (C‑523/14, EU:C:2015:722, point 45).

    ( 19 ) Voir, notamment, Mankowski, P., et Magnus, U., European Commentaries on Private International Law (ECPIL), Brussels Ibis Regulation, vol. I, Otto Schmidt, Cologne, 2016, article 29, p. 726.

    ( 20 ) Voir Schack, H., « Die grenzüberschreitende Durchsetzung gemeinschaftsweiter Schutzrechte », dans Festschrift für Rolf Stürner, Mohr Siebeck, Tübingen, 2013, p. 1352.

    ( 21 ) Voir Halbsguth, D., Territorialität im Verletzungsverfahren aus der Europäischen Gemeinschaftsmarke, Hamburg, 2010 , p. 117 et 118, et Janal, R., Europäisches Zivilverfahrensrecht und Gewerblicher Rechtsschutz, Mohr Siebeck, Tübingen 2015, §13 Rn 61.

    ( 22 ) Voir, d’une part, jurisprudence allemande (OLG Düsseldorf, 08.11.2005 - I-20 U 110/04 – RODEO/RODEO DRIVE) et, d’autre part, celle du Royaume-Uni (Prudential Assurance v. Prudential Insurance [2003] EWCA Civ 327 et Hearst Holdings Inc & Anor v A.V.E.L.A. Inc & Ors [2014] EWHC 1553). Pour une analyse de ces jugements, voir Hartmann, M., Die Gemeinschaftsmarke im Verletzungsverfahren, Peter Lang, Frankfurt am Main, 2009, p. 105 à 108.

    ( 23 ) Voir Halbsguth, D., op. cit., p. 118 ; Janal, R., op. cit., p. 61 ; Schack, op. cit., p. 1352. H. Schack observe qu’un tel résultat est « dur mais apparemment voulu » par le législateur (« hart aber anscheinend gewollt »).

    ( 24 ) Voir, concernant le lien entre ces deux considérants, arrêt du 12 avril 2011, DHL Express France (C‑235/09, EU:C:2011:238, point 42).

    ( 25 ) Voir conclusions de l’avocat général Jääskinen dans l’affaire Weber (C‑438/12, EU:C:2014:43, point 67).

    ( 26 ) Voir Janal, R., op. cit., §13 Rn 61.

    ( 27 ) Voir conclusions de l’avocat général Jääskinen dans l’affaire Weber (C‑438/12, EU:C:2014:43, points 87 et 88).

    ( 28 ) Voir en ce sens, concernant l’identité partielle des parties, arrêt du 6 décembre 1994, Tatry (C‑406/92, EU:C:1994:400, point 33).

    ( 29 ) Voir arrêts du 12 avril 2011, DHL Express France (C‑235/09, EU:C:2011:238, points 46 à 48), et du 22 septembre 2016, combit Software (C‑223/15, EU:C:2016:719, point 36).

    ( 30 ) La jurisprudence de la Cour ne donne pas une réponse claire sur ce point. Dans l’arrêt du 14 octobre 2004, Mærsk Olie & Gas (C‑39/02, EU:C:2004:615, point 41), la Cour a tenu compte, aux fins de l’application de l’article 22 du règlement Bruxelles I, du fait que la première procédure était définitivement close, de telle sorte qu’il n’existait plus de « demandes connexes ». En revanche, dans l’arrêt du 8 mai 2003, Gantner Electronic (C‑111/01, EU:C:2003:257, point 30), la Cour a fait observer que la finalité de l’article 21 de la convention de Bruxelles serait méconnue si le contenu et la nature des demandes pouvaient être modifiés par des conclusions déposées nécessairement à un moment ultérieur par un défendeur, car une telle solution pourrait aboutir, en effet, à ce que la juridiction initialement désignée comme compétente, en vertu de cet article, doive se dessaisir par la suite.

    ( 31 ) Voir, dans le contexte de la jurisprudence du Royaume-Uni, Briggs, A., Civil Jurisdiction and Judgments, Routledge, New York, 2015, p. 324. Il a été relevé, à cet égard, que les articles 21 et 22 de la convention de Bruxelles concernent les procédures parallèles et ne s’appliquent donc pas lorsqu’une partie a effectivement mis fin à la première procédure (Internationale Nederlanden Aviation Lease BP -v- Civil Aviation Authority [1997] 1 Lloyd’s Reports 80). La Corte suprema di cassazione (Cour de cassation, Italie) a jugé dans le même sens, dans le cadre de l’article 21 de la même convention, dans son jugement du 28 avril 1993 (no. 4992).

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