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Document 62013TJ0276

Arrêt du Tribunal (cinquième chambre) du 9 juin 2016.
Growth Energy et Renewable Fuels Association contre Conseil de l'Union européenne.
Dumping – Importations de bioéthanol originaire des États-Unis – Droit antidumping définitif – Recours en annulation – Association – Défaut d’affectation directe des membres – Irrecevabilité – Droit antidumping à l’échelle nationale – Traitement individuel – Échantillonnage – Droits de la défense – Non-discrimination – Devoir de diligence.
Affaire T-276/13.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2016:340

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

9 juin 2016 ( *1 )

«Dumping — Importations de bioéthanol originaire des États-Unis — Droit antidumping définitif — Recours en annulation — Association — Défaut d’affectation directe des membres — Irrecevabilité — Droit antidumping à l’échelle nationale — Traitement individuel — Échantillonnage — Droits de la défense — Non-discrimination — Devoir de diligence»

Dans l’affaire T‑276/13,

Growth Energy, établie à Washington, DC (États-Unis),

Renewable Fuels Association, établie à Washington,

représentées initialement par Me P. Vander Schueren, avocat, puis par Mes Vander Schueren et M. Peristeraki, avocats,

parties requérantes,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme S. Boelaert, en qualité d’agent, assistée initialement de Me G. Berrisch, avocat, et de M. B. Byrne, solicitor, puis de Mes R. Bierwagen et C. Hipp, avocats,

partie défenderesse,

soutenu par

Commission européenne, représentée par MM. M. França et T. Maxian Rusche, en qualité d’agents,

et par

ePURE, de Europese Producenten Unie van Hernieuwbare Ethanol, représentée par Mes O. Prost et A. Massot, avocats,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande d’annulation partielle du règlement d’exécution (UE) no 157/2013 du Conseil, du 18 février 2013, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de bioéthanol originaire des États-Unis d’Amérique (JO L 49, p. 10), dans la mesure où il concerne les requérantes et leurs membres,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. A. Dittrich, président, J. Schwarcz et Mme V. Tomljenović (rapporteur), juges,

greffier : Mme C. Heeren, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience des 20 et 21 mai 2015,

rend le présent

Arrêt

Antécédents du litige

1

Les requérantes, Growth Energy et Renewable Fuels Association, sont des associations qui représentent les producteurs américains de bioéthanol ainsi que d’autres organisations actives dans les biocarburants, dans le cas de Growth Energy, et des partisans de l’éthanol aux États-Unis, dans le cas de Renewable Fuels Association.

2

À la suite d’une plainte déposée par ePURE, de Europese Producenten Unie van Hernieuwbare Ethanol (association européenne des producteurs d’éthanol renouvelable, ci-après « ePure »), la Commission européenne a ouvert une procédure antidumping concernant les importations dans l’Union européenne de bioéthanol originaire des États-Unis au titre de l’article 5 du règlement (CE) no 1225/2009 du Conseil, du 30 novembre 2009, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO L 343, p. 51, ci-après le « règlement de base »).

3

Les requérantes affirment qu’elles ont eu la qualité d’associations représentatives lors de la procédure antidumping et qu’elles ont été traitées comme des parties intéressées tout au long de l’enquête.

4

Par l’avis d’ouverture d’une procédure antidumping concernant les importations de bioéthanol originaire des États-Unis d’Amérique (JO 2011, C 345, p. 7), la Commission a signalé que, en raison du nombre élevé de producteurs-exportateurs aux États-Unis ainsi que de producteurs de l’Union, elle avait l’intention de recourir à un échantillonnage tant des premiers que des seconds, conformément à l’article 17 du règlement de base.

5

Le 16 janvier 2012, la Commission a notifié par courrier à Marquis Energy LLC, à Patriot Renewable Fuels LLC, à Plymouth Energy Company LLC, à POET LLC et à Platinum Ethanol LLC (ci-après les « producteurs échantillonnés »), sociétés qui sont membres des requérantes, qu’elles avaient été retenues dans l’échantillon des producteurs-exportateurs aux États-Unis. Par la suite, ces sociétés ont envoyé à la Commission leurs réponses respectives au questionnaire antidumping le 22 février 2012 et la Commission a effectué des visites de vérification dans les locaux de celles-ci.

6

Le 26 mars 2012, les requérantes ont communiqué à la Commission leurs observations écrites sur l’ouverture de la procédure antidumping.

7

Le 24 août 2012, la Commission a communiqué aux requérantes le document d’information provisoire dans lequel elle a exposé les faits et considérations sur le fondement desquels elle a décidé de poursuivre l’enquête sans imposer de mesures provisoires (ci-après le « document d’information provisoire »). Aux points 45 à 47 dudit document, elle a notamment constaté qu’il n’était pas possible à ce stade d’apprécier si les exportations de bioéthanol originaire des États-Unis avaient été effectuées à des prix de dumping, au motif que les producteurs échantillonnés ne faisaient pas de distinction entre les ventes intérieures et les ventes à l’exportation et qu’ils effectuaient toutes leurs ventes vers des négociants/mélangeurs indépendants établis aux États-Unis, qui mélangeaient ensuite le bioéthanol à de l’essence et le revendaient. Par conséquent, les producteurs échantillonnés n’avaient aucune connaissance de la destination du produit et de son prix à l’exportation. Dès lors, la Commission a décidé de poursuivre l’enquête et de l’étendre de manière à couvrir les négociants/mélangeurs afin d’obtenir des données sur le prix à l’exportation ainsi qu’une image complète du marché du bioéthanol (point 50 dudit document).

8

Le 11 septembre 2012, à la suite d’une demande des requérantes, de Plymouth Energy Company et de POET, a eu lieu une audition devant le conseiller-auditeur de la Commission.

9

Le 24 septembre 2012, les requérantes ont déposé leurs observations sur le document d’information provisoire.

10

Le 6 décembre 2012, la Commission a envoyé aux requérantes le document d’information définitif, dans lequel elle examinait, sur la base des données des négociants/mélangeurs indépendants, l’existence d’un dumping qui causerait un préjudice à l’industrie de l’Union (ci-après le « document d’information définitif »). Elle a donc envisagé d’imposer des mesures définitives, à un taux de 9,6 % à l’échelle nationale, pour une période de trois ans.

11

Les requérantes ont déposé leurs observations sur ce document le 17 décembre 2012.

12

Par courrier du 21 décembre 2012, la Commission a communiqué un document d’information supplémentaire, d’une part, envisageant de faire passer, en substance, la période de validité de la mesure antidumping définitive de trois à cinq ans et, d’autre part, invitant les requérantes à fournir des observations écrites sur cette modification ainsi que sur le document d’information définitif jusqu’au 2 janvier 2013 au plus tard.

13

Le 2 janvier 2013, les requérantes ont déposé leurs observations sur ce document.

14

Par lettre du 30 janvier 2013, la Commission a répondu aux observations des requérantes relatives au document d’information définitif.

15

Le 18 février 2013, le Conseil de l’Union européenne a adopté le règlement d’exécution (UE) no 157/2013 instituant un droit antidumping définitif sur les importations de bioéthanol originaire des États-Unis d’Amérique (JO L 49, p. 10, ci-après le « règlement attaqué »), par lequel il a institué un droit antidumping sur le bioéthanol, appelé « éthanol-carburant », c’est-à-dire de l’alcool éthylique obtenu à partir de produits agricoles, dénaturé ou non dénaturé, à l’exclusion des produits d’une teneur en eau supérieure à 0,3 % (m/m) mesurée conformément à la norme EN 15376, mais incluant de l’alcool éthylique obtenu à partir de produits agricoles et mélangé à l’essence dans une proportion supérieure à 10 % (v/v), destiné à être utilisé comme carburant, originaire des États-Unis et relevant actuellement des codes NC ex 2207 10 00, ex 2207 20 00, ex 2208 90 99, ex 2710 12 21, ex 2710 12 25, ex 2710 12 31, ex 2710 12 41, ex 2710 12 45, ex 2710 12 49, ex 2710 12 51, ex 2710 12 59, ex 2710 12 70, ex 2710 12 90, ex 3814 00 10, ex 3814 00 90, ex 3820 00 00 et ex 3824 90 97 (codes TARIC 2207100012, 2207200012, 2208909912, 2710122111, 2710122592, 2710123111, 2710124111, 2710124511, 2710124911, 2710125111, 2710125911, 2710127011, 2710129011, 3814001011, 3814009071, 3820000011 et 3824909767), à un taux de 9,5 % à l’échelle nationale, défini sous la forme d’un montant fixe de 62,30 euros par tonne nette, applicable au prorata de la teneur totale, en poids, de la teneur en bioéthanol, pour une période de cinq ans.

16

S’agissant de l’échantillonnage des producteurs-exportateurs aux États-Unis, le Conseil a constaté, aux considérants 12 à 16 du règlement attaqué, que l’enquête avait montré qu’aucun des producteurs échantillonnés mentionnés au point 5 ci-dessus n’avait exporté de bioéthanol sur le marché de l’Union. En fait, leurs ventes avaient été effectuées sur le marché intérieur à des négociants/mélangeurs indépendants qui mélangeaient ensuite le bioéthanol à de l’essence en vue de la revente sur le marché intérieur et à l’exportation, en particulier vers l’Union. Ces producteurs n’auraient pas su nécessairement si leur production était destinée au marché de l’Union et n’auraient eu aucune connaissance des prix de vente pratiqués par les négociants/mélangeurs. Cela signifierait que les producteurs américains de bioéthanol ne seraient pas les exportateurs du produit concerné vers l’Union. Les exportateurs seraient en fait les négociants/mélangeurs. Afin de mener à bien l’enquête relative au dumping, le Conseil s’est appuyé sur les données des deux négociants/mélangeurs qui ont accepté de coopérer à l’enquête.

17

Concernant la constatation d’un dumping, le Conseil a expliqué, aux considérants 62 à 64 du règlement attaqué, qu’il jugeait opportun d’établir une marge de dumping à l’échelle nationale. Même si certains producteurs avaient affirmé qu’il était possible d’identifier leurs produits et de reconstituer leur parcours lorsqu’ils étaient vendus à des opérateurs aux États-Unis en vue de l’exportation, ils n’auraient pas été en mesure d’établir le lien entre leurs ventes sur le marché des États-Unis et les exportations vers l’Union réalisées par d’autres opérateurs et ils n’auraient pas eu connaissance du niveau des prix à l’exportation vers l’Union. Selon le Conseil, la structure de l’industrie du bioéthanol et la manière dont le produit concerné était fabriqué et vendu sur le marché des États-Unis et exporté vers l’Union rendaient irréalisable l’établissement de marges de dumping individuelles pour les producteurs des États-Unis.

18

Par lettre du 20 février 2013, la Commission a répondu aux observations des requérantes et de Plymouth Energy Company relatives au document d’information supplémentaire.

Procédure et conclusions des parties

19

Par requête, déposée au greffe du Tribunal le 15 mai 2013 et modifiée par une lettre du 17 mai 2013, les requérantes ont introduit le présent recours.

1. Sur la demande de jonction avec l’affaire T‑277/13, Marquis Energy/Conseil

20

Par acte déposé au greffe du Tribunal le 18 juin 2013, les requérantes ont demandé la jonction de la présente affaire avec l’affaire T‑277/13, Marquis Energy/Conseil. Dans ses observations, le Conseil a demandé au Tribunal de surseoir à statuer sur une éventuelle jonction des deux affaires jusqu’à la clôture de la phase écrite de la procédure et jusqu’à ce qu’il ait examiné les arguments des parties sur la recevabilité.

21

Le 31 juillet 2013, le président de la cinquième chambre du Tribunal a décidé de ne pas joindre la présente affaire avec l’affaire T‑277/13, Marquis Energy/Conseil.

2. Sur les interventions

22

Par acte déposé au greffe du Tribunal le 16 juillet 2013, la Commission a demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions du Conseil. Les requérantes et le Conseil n’ont pas soulevé d’objections à l’encontre de cette intervention.

23

Par acte déposé le 20 septembre 2013, ePure a demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions du Conseil. Les requérantes et le Conseil n’ont pas soulevé d’objections à l’encontre de cette intervention.

24

Par ordonnances du 4 février 2014, le président de la cinquième chambre du Tribunal a fait droit aux demandes d’intervention.

25

Le 18 avril 2014, la Commission et ePure ont déposé leurs mémoires en intervention.

3. Sur les mesures d’organisation de la procédure et sur la phase orale de la procédure

26

Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 de son règlement de procédure du 2 mai 1991, a posé des questions écrites au Conseil et aux requérantes. Les parties ont répondu aux questions écrites dans le délai imparti.

27

Toutefois, le Conseil a informé le Tribunal par lettre du 29 avril 2015 qu’il considérait que certaines informations nécessaires pour répondre auxdites questions étaient confidentielles, invitant le Tribunal à adopter des mesures d’instruction pour qu’il puisse « fournir ces documents » en demandant leur traitement confidentiel.

28

Par lettre du 19 mai 2015, les requérantes ont formulé trois demandes au Tribunal, consistant, premièrement, à adopter des mesures d’instruction en ordonnant au Conseil de fournir lesdits documents, deuxièmement, à retirer la section (i) 1 de la réponse du Conseil aux questions écrites du Tribunal ou, alternativement, à leur permettre de fournir des observations écrites et, troisièmement, à leur accorder la possibilité de fournir des observations par écrit afin de rectifier les fautes factuelles commises dans la réponse du Conseil.

29

Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience des 20 et 21 mai 2015. Lors de celle-ci, les requérantes ont partiellement renoncé à leur demande du 19 mai 2015 en retirant, notamment, leurs deuxième et troisième demandes exposées au point 28 ci-dessus, ce dont le Tribunal a pris acte dans le procès-verbal d’audience.

30

À la fin de l’audience, le président de la cinquième chambre du Tribunal a reporté la clôture de la phase orale de la procédure à une date ultérieure.

31

Le Tribunal n’ayant pas estimé nécessaire d’ordonner la mesure d’instruction susmentionnée, les parties ont été informées, par lettre du 9 décembre 2015, que la phase orale de la procédure avait été close à la même date.

4. Sur les demandes de traitement confidentiel

32

Par acte déposé le 22 novembre 2013, les requérantes ont demandé le traitement confidentiel, à l’égard d’ePure, de certaines pièces annexées à la requête, d’une partie de leur réplique ainsi que de certaines pièces annexées à celle-ci.

33

Par acte déposé le 15 mai 2015, les requérantes ont demandé le traitement confidentiel, à l’égard d’ePure, de certaines parties de la réponse du Conseil aux questions posées par le Tribunal dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure.

34

ePure a reçu seulement des versions non confidentielles desdites pièces et n’a soulevé aucune objection à l’encontre des demandes de traitement confidentiel formulées à son égard.

5. Sur les conclusions des parties

35

Dans la requête telle que modifiée par la lettre du 17 mai 2013, les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler le règlement attaqué en ce qu’il les affecte, elles, ainsi que leurs membres ;

condamner le Conseil aux dépens.

36

Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours comme étant irrecevable ;

à titre subsidiaire, rejeter le recours comme étant non fondé ;

condamner les requérantes aux dépens.

37

La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours comme étant irrecevable ;

à titre subsidiaire, rejeter le recours comme étant non fondé ;

condamner les requérantes aux dépens.

38

ePure conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter les moyens soulevés par les requérantes ;

condamner les requérantes aux dépens.

En droit

39

Au soutien de leur recours, les requérantes invoquent dix moyens. Le premier moyen est tiré d’une violation de l’article 2, paragraphe 8, de l’article 9, paragraphe 5, et de l’article 18, paragraphes 1, 3 et 4, du règlement de base, d’une violation des principes de sécurité juridique, de confiance légitime et de bonne administration ainsi que d’erreurs manifestes d’appréciation. Le deuxième moyen est tiré d’une erreur manifeste d’appréciation des faits et d’une violation de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base. Le troisième moyen est tiré d’une erreur manifeste d’appréciation et d’une violation du principe de non-discrimination ainsi que de l’article 3, paragraphe 2, du règlement de base. Le quatrième moyen est tiré d’une violation de l’article 3, paragraphe 2, du règlement de base et d’une erreur manifeste d’appréciation. Le cinquième moyen est tiré d’une erreur manifeste d’appréciation et d’une violation de l’article 1er, paragraphe 4, de l’article 3, paragraphes 1 à 3 et 5 à 7, et de l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base. Le sixième moyen est tiré d’une erreur manifeste d’appréciation et d’une violation de l’article 3, paragraphe 1, du règlement de base. Le septième moyen est tiré d’une erreur manifeste d’appréciation en ce qui concerne le lien de causalité. Le huitième moyen est tiré d’une violation de l’article 9, paragraphe 2, du règlement de base et du principe de proportionnalité. Le neuvième moyen est tiré d’une violation de l’article 5, paragraphes 2 et 3, du règlement de base et des principes de bonne administration et de non-discrimination. Enfin, le dixième moyen est tiré d’une violation de l’article 6, paragraphe 7, de l’article 19, paragraphes 1 et 2, de l’article 20, paragraphes 2, 4 et 5, du règlement de base, des droits de la défense et des principes de non-discrimination et de bonne administration ainsi que d’une absence de motivation suffisante.

40

Dans ce contexte, il convient de relever que, dans leurs écritures, les requérantes soulèvent une série d’arguments qui, tout en visant à établir l’illégalité du règlement attaqué, renvoient toutefois aux violations de droit commises par la « Commission ». À titre d’exemple, les premier à cinquième, septième et neuvième moyens tels que résumés au point 5 de la requête reposent sur le constat des diverses violations du règlement de base commises par la « Commission ». Force est de constater, à cet égard, que la référence aux violations découlant du règlement attaqué et commises par la « Commission » plutôt que par le « Conseil » constitue une erreur de plume dans les écritures des requérantes. En effet, d’une part, il ressort sans ambiguïté de la lecture des écritures des requérantes que leur argumentation vise à obtenir l’annulation du règlement attaqué en raison des violations commises par le Conseil. D’autre part, il importe de relever que la réponse que le Conseil et la Commission ont apportée à ces arguments montre qu’ils ont considéré que les requérantes faisaient en réalité référence à des violations commises par le Conseil. Dans ces conditions, il y a lieu d’examiner ces arguments des requérantes dans le sens susmentionné, également retenu par le Conseil et la Commission.

41

Le Conseil, soutenu par la Commission et ePure, sans soulever formellement une exception d’irrecevabilité en vertu de l’article 130, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, fait valoir que le recours est irrecevable. Il estime que les requérantes n’ont pas qualité pour agir, ni en tant que représentants de leurs membres, ni à titre personnel, au motif que, selon lui, les conditions prévues par l’article 263, quatrième alinéa, TFUE ne sont pas remplies. En outre, la Commission fait valoir que les requérantes n’ont pas d’intérêt à agir.

1. Sur la recevabilité

42

Les requérantes étant des associations représentant les intérêts de l’industrie américaine du bioéthanol, il convient, tout d’abord, d’examiner la question de savoir si de telles associations peuvent faire valoir un droit d’agir en l’espèce, avant d’examiner, ensuite, si elles ont qualité pour agir à titre individuel et, également, si elles ont qualité pour agir pour certains de leurs membres. Enfin, il y a lieu d’examiner l’intérêt à agir des requérantes en l’espèce.

Sur le droit d’agir des associations telles que les requérantes

43

Le Conseil considère que les requérantes, en tant qu’associations représentant les intérêts de leurs membres, ne peuvent demander l’annulation du règlement attaqué que dans la mesure où il affecte leurs membres qui sont individuellement concernés. Il fait également valoir que, sauf dans le cas de Marquis Energy qui a décidé d’attaquer personnellement le règlement attaqué (dans l’affaire T‑277/13, Marquis Energy/Conseil), le règlement attaqué est devenu définitif à l’égard des membres des requérantes. À cet égard, il soutient que le présent recours, formé par une association, ne peut avoir pour résultat, dans l’hypothèse où il serait recevable et fondé, de remettre en question le caractère définitif du règlement attaqué, faute de quoi le principe général de sécurité juridique, consacré par le droit de l’Union, serait violé.

44

Les requérantes contestent l’argumentation du Conseil, en soutenant que cette dernière priverait les associations de leur droit d’agir devant le Tribunal. En revanche, un recours en annulation introduit par une association, lorsqu’il est admis, devrait produire ses effets vis à vis de tous les membres de l’association qui y étaient légalement inscrits au moment de l’introduction du recours.

45

Il ressort de la jurisprudence que la recevabilité d’un recours en annulation introduit par une association chargée de défendre les intérêts collectifs de ses membres ne peut être admise que dans trois types de situations, à savoir, premièrement, lorsqu’une disposition légale le reconnaît expressément (voir, en ce sens, ordonnance du 10 décembre 2004, EFfCI/Parlement et Conseil, T‑196/03, Rec, EU:T:2004:355, point 42), deuxièmement, lorsque les entreprises qu’elle représente ou certaines d’entre elles ont qualité pour agir à titre individuel ou, troisièmement, si elle peut faire valoir un intérêt propre (voir, en ce sens, arrêt du 22 juin 2006, Belgique et Forum 187/Commission, C‑182/03 et C‑217/03, Rec, EU:C:2006:416, point 56 et jurisprudence citée, et ordonnance du 24 juin 2014, PPG et SNF/ECHA, T‑1/10 RENV, EU:T:2014:616, point 30).

46

Il convient donc d’identifier si les requérantes se prévalent en l’espèce de l’une ou l’autre ou de plusieurs de ces trois hypothèses.

47

En premier lieu, s’agissant de la première hypothèse selon laquelle le recours introduit par une association est recevable lorsqu’une disposition légale le reconnaît expressément, il convient de relever, d’une part, que les requérantes n’identifient aucune disposition légale leur octroyant un droit spécifique d’introduire un recours et, d’autre part, qu’aucun élément ressortant du dossier devant le Tribunal ne permet de conclure à l’existence d’une disposition légale dont les requérantes pourraient se prévaloir à cet égard.

48

Le présent recours ne saurait donc être déclaré recevable au motif que les requérantes bénéficieraient d’une disposition légale spécifique les autorisant à agir.

49

En deuxième lieu, s’agissant de la deuxième hypothèse, selon laquelle le recours introduit par une association est recevable lorsqu’elle représente une ou des entreprises ayant qualité pour agir à titre individuel, il y a lieu de constater que les requérantes font valoir, en substance, qu’elles ont qualité pour agir, au motif que certains de leurs membres sont « exportateurs de bioéthanol provenant des États-Unis vers l’Union ».

50

S’agissant des membres des requérantes, il convient donc d’examiner si les quatre catégories suivantes d’opérateurs ont qualité pour agir :

Marquis Energy, qui est un producteur américain de bioéthanol qui a été échantillonné et qui a introduit son propre recours à l’encontre du règlement attaqué dans l’affaire T‑277/13, Marquis Energy/Conseil ;

les quatre producteurs américains de bioéthanol échantillonnés, autres que Marquis Energy, qui ont été mentionnés au considérant 36 du règlement attaqué (ci-après les « quatre producteurs échantillonnés »), à savoir Patriot Renewable Fuels, Plymouth Energy Company, POET et Platinum Ethanol, et qui sont chacun membre d’au moins l’une des requérantes. En effet, ces quatre groupes de producteurs sont membres de la première requérante, Growth Energy, et Patriot Renewable Fuels ainsi que Plymouth Energy Company sont également membres de la seconde requérante, Renewable Fuels Association. ;

les négociants/mélangeurs de bioéthanol Murex et CHS ;

tout autre membre des requérantes.

51

À cet égard, premièrement, il importe de constater qu’il doit être exclu que le présent recours puisse être recevable pour le premier de ces motifs, à savoir que les requérantes représenteraient Marquis Energy. En effet, selon la jurisprudence, une association, agissant en tant que représentant de ses membres, est recevable à agir en annulation lorsque ceux-ci n’ont pas eux-mêmes formé un recours alors qu’ils auraient été recevables à le faire (voir ordonnance du 29 mars 2012, Asociación Española de Banca/Commission, T‑236/10, Rec, EU:T:2012:176, points 23 et 24 et jurisprudence citée). Il découle donc de cette jurisprudence que, en l’espèce, dans la mesure où Marquis Energy a introduit son propre recours devant le Tribunal, dans l’affaire T‑277/13, Marquis Energy/Conseil, à l’encontre du règlement attaqué, le présent recours introduit par les requérantes pour autant qu’elles invoquent qu’elles représentent Marquis Energy est en toute hypothèse irrecevable. Cette conclusion est sans conséquence, en revanche, sur la nécessité d’examiner la question de savoir si le recours des requérantes serait recevable pour autant qu’elles représentent également d’autres membres.

52

Deuxièmement, s’agissant des membres des requérantes qui seraient des négociants/mélangeurs exportateurs de bioéthanol, il importe de relever que, lors de l’audience, les requérantes ont soulevé l’argument selon lequel deux de leurs membres « associés », Murex et CHS, étaient des négociants/mélangeurs qui étaient des exportateurs de bioéthanol. Murex serait « membre associé » de Growth Energy et CHS serait « membre associé » de Renewable Fuels Association. Pour cette raison, elles estimaient avoir, par conséquent, qualité pour agir, en tant que représentants de ceux-ci. De plus, les requérantes ont fait observer que ces deux exportateurs auraient soumis des formulaires d’échantillonnage.

53

Il est constant que CHS est un membre « associé » de Renewable Fuels Association. Or, ainsi que la Commission l’a indiqué à juste titre lors de l’audience, l’article IV, paragraphe 4, sous b), du statut de Renewable Fuels Association énonce qu’un membre « associé » de cette association a le droit d’assister aux réunions des membres, mais n’a pas le droit en revanche de voter, comme cela a été acté dans le procès-verbal de l’audience.

54

S’agissant de Murex, il est constant que ce dernier est un membre « associé » de Growth Energy. Or, ainsi que la Commission l’a indiqué à juste titre lors de l’audience, le quatrième article des « articles of incorporation » (statuts) de Growth Energy prévoit des catégories de membres avec et sans droit de vote, comme cela a été acté dans le procès-verbal de l’audience. Plus spécifiquement, selon l’article II, section 2.01, sous c), des « Second Amended and Restated Bylaws » (seconds règlements amendés et modifiés) de Growth Energy, un membre « associé » de cette association n’a pas le droit de voter.

55

Or, sans droit de vote, CHS et Murex n’ont pas la possibilité de faire prévaloir leurs intérêts lors d’une éventuelle représentation de ceux-ci par l’association concernée. Dans ces conditions et en l’absence d’autres éléments qui pourraient démontrer qu’un membre « associé » aurait une telle possibilité de faire prévaloir ses intérêts, il convient de conclure que, en l’espèce, Renewable Fuels Association n’a pas qualité pour agir dans la mesure où elle fait valoir qu’elle représentait CHS et que Growth Energy n’a pas qualité pour agir dans la mesure où elle fait valoir qu’elle représentait Murex.

56

Il ressort des considérations exposées aux points 51 à 55 ci-dessus que, s’il est à exclure que le présent recours soit recevable pour autant que les requérantes invoquent le fait qu’elles représentent Marquis Energy ainsi que CHS ou Murex, il doit en revanche être examiné si leur recours est recevable pour autant qu’elles invoquent le fait qu’elles représentent, premièrement, les quatre producteurs échantillonnés autres que le groupe Marquis Energy et, deuxièmement, tout membre autre que les quatre producteurs échantillonnés, Marquis Energy ou les négociants/mélangeurs CHS et Murex.

57

En troisième lieu, il convient d’écarter également l’argument des requérantes selon lequel un recours en annulation introduit par une association, lorsqu’il est recevable, doit produire ses effets vis à vis de tous les membres de l’association qui y étaient légalement inscrits au moment de l’introduction du recours.

58

À cet égard, il convient de rappeler que, s’il est vrai que, au regard des critères de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, les règlements instituant des droits antidumping ont effectivement, de par leur nature et leur portée, un caractère normatif, en ce qu’ils s’appliquent à la généralité des opérateurs économiques intéressés, il n’est pas exclu pour autant que certains opérateurs économiques ont qualité pour agir contre certaines de leurs dispositions (voir, en ce sens, arrêts du 21 février 1984, Allied Corporation e.a./Commission, 239/82 et 275/82, Rec, EU:C:1984:68, point 11, et du 20 mars 1985, Timex/Conseil et Commission, 264/82, Rec, EU:C:1985:119, point 12).

59

Or, selon la jurisprudence, lorsqu’un règlement instituant un droit antidumping impose des droits différents à une série de sociétés, une société n’a qualité pour agir qu’à l’encontre des seules dispositions qui lui imposent un droit antidumping particulier et en fixent le montant, et non par rapport à celles qui imposent des droits antidumping à d’autres sociétés, de telle sorte que le recours de cette société n’est recevable que dans la mesure où il tend à l’annulation du règlement dans celles de ses dispositions qui la concernent exclusivement (voir, en ce sens, arrêt du 15 février 2001, Nachi Europe, C‑239/99, Rec, EU:C:2001:101, point 22 et jurisprudence citée).

60

D’ailleurs, il ressort du point 29 de l’arrêt du 21 mars 2012, Fiskeri og Havbruksnæringens Landsforening e.a./Conseil (T‑115/06, EU:T:2012:136), que les requérantes invoquent à cet égard, lu conjointement avec les points 27 et 28 du même arrêt, que les effets d’une annulation ne peuvent se produire que vis-à-vis de tous les membres d’une association dans la mesure où les recours desdits membres auraient été recevables.

61

En effet, s’il en était autrement, une association professionnelle pourrait invoquer la qualité pour agir de certains de ses membres pour obtenir l’annulation d’un règlement au profit de tous ses membres, y compris ceux qui ne remplissent pas, à titre individuel, les conditions visées à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE. Cela reviendrait à contourner les règles relatives aux conditions de recevabilité des recours qui peuvent être introduits contre des règlements instituant des droits antidumping.

62

En l’espèce, les requérantes ne peuvent donc demander l’annulation du règlement attaqué au profit de leurs membres que pour autant qu’il affecte ceux de leurs membres qui ont eux-mêmes qualité pour introduire un recours en annulation en vertu de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE à l’encontre du règlement attaqué.

63

En quatrième lieu, s’agissant de la troisième hypothèse selon laquelle le recours d’une association est recevable lorsqu’une association peut faire valoir un intérêt propre, les requérantes estiment qu’elles sont en droit d’exercer un recours à titre individuel en leur qualité d’associations représentatives des principaux producteurs d’éthanol et rappellent qu’elles ont été des parties intéressées à la procédure administrative antidumping. Il convient donc de rechercher à cet égard si les requérantes disposent d’un intérêt propre en l’espèce, en leur qualité d’association ayant participé à la procédure antidumping (voir points 75 à 87 ci-après).

Sur la qualité pour agir des requérantes

64

Il convient de rappeler que l’article 263, quatrième alinéa, TFUE vise trois hypothèses dans lesquelles toute personne physique ou morale peut introduire un recours en annulation. Dans les conditions prévues aux premier et deuxième alinéas de cet article, elle peut, premièrement, former un recours contre les actes dont elle est le destinataire. Deuxièmement, elle peut former un recours contre les actes qui la concernent directement et individuellement, ainsi que, troisièmement, contre les actes réglementaires qui la concernent directement et qui ne comportent pas de mesures d’exécution.

65

Il y a lieu de relever que le critère de l’affectation directe est identique dans les deuxième et troisième hypothèses visées à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE (ordonnance du 13 mars 2015, European Coalition to End Animal Experiments/ECHA, T‑673/13, Rec, EU:T:2015:167, point 67).

66

En l’espèce, il est constant que les requérantes ne sont pas destinataires du règlement attaqué. Dès lors, il convient d’examiner la question de savoir si les requérantes peuvent former un recours en annulation contre le règlement attaqué en vertu des deuxième ou troisième hypothèses visées à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, soit, premièrement, en ce qu’elles agiraient à titre individuel, soit, deuxièmement, en ce qu’elles agiraient en tant que représentants de l’une des catégories d’opérateurs qui en sont membres.

67

S’agissant de la notion d’affectation directe prévue à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, il y a lieu de constater que celle-ci requiert la réunion de deux critères cumulatifs, à savoir, d’une part, que l’acte dont les requérantes poursuivent l’annulation produise directement des effets sur leur situation juridique et, d’autre part, que cet acte ne laisse aucun pouvoir d’appréciation aux destinataires de cette mesure chargés de sa mise en œuvre, celle-ci ayant un caractère purement automatique et découlant de la seule réglementation du droit de l’Union sans l’application d’autres règles intermédiaires (ordonnance du 24 septembre 2009, Município de Gondomar/Commission, C‑501/08 P, EU:C:2009:580, point 25, et arrêt du 13 octobre 2011, Deutsche Post et Allemagne/Commission, C‑463/10 P et C‑475/10 P, Rec, EU:C:2011:656, point 66).

68

En ce qui concerne la notion d’affectation individuelle prévue à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, il est de jurisprudence constante que les sujets autres que les destinataires d’une décision ne sauraient prétendre être individuellement concernés que si cette décision les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d’une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d’une manière analogue à celle dont le destinataire d’une telle décision le serait (arrêts du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25/62, Rec, EU:C:1963:17, p. 223, et du 13 décembre 2005, Commission/Aktionsgemeinschaft Recht und Eigentum, C‑78/03 P, Rec, EU:C:2005:761, point 33).

69

S’agissant du domaine de la défense contre les pratiques de dumping, premièrement, il ressort d’une jurisprudence constante que les actes portant institution de droits antidumping sont de nature à concerner directement et individuellement celles des entreprises productrices et exportatrices qui peuvent démontrer qu’elles ont été identifiées dans les actes de la Commission ou du Conseil ou concernées par les enquêtes préparatoires (arrêts Allied Corporation e.a./Commission, point 58 supra, EU:C:1984:68, point 12, et du 23 mai 1985, Allied Corporation e.a./Conseil, 53/83, Rec, EU:C:1985:227, point 4).

70

Deuxièmement, les importateurs du produit concerné dont les prix de revente ont été pris en compte pour la construction des prix à l’exportation et qui sont, dès lors, concernés par les constatations relatives à l’existence d’une pratique de dumping sont directement et individuellement concernés par des règlements instituant des droits antidumping (arrêts du 14 mars 1990, Nashua Corporation e.a./Commission et Conseil, C‑133/87 et C‑150/87, Rec, EU:C:1990:115, point 15, et Gestetner Holdings/Conseil et Commission, C‑156/87, Rec, EU:C:1990:116, point 18). Il en va de même pour ceux des importateurs associés avec des exportateurs de pays tiers dont les produits sont frappés de droits antidumping notamment dans le cas où le prix à l’exportation a été calculé à partir des prix de revente sur le marché de l’Union pratiqués par ces importateurs et dans le cas où le droit antidumping lui-même est calculé en fonction de ces prix de revente (voir, en ce sens, arrêt du 11 juillet 1990, Neotype Techmashexport/Commission et Conseil, C‑305/86 et C‑160/87, Rec, EU:C:1990:295, points 19 et 20).

71

Troisièmement, la Cour a jugé qu’un fabricant d’équipements d’origine, sans qu’il y eût lieu de le qualifier d’importateur ou d’exportateur, était directement et individuellement concerné par les dispositions du règlement relatives aux pratiques de dumping du producteur auprès duquel il achetait les produits en raison des particularités de ses relations commerciales avec ce producteur. En effet, la Cour a considéré que c’était pour tenir compte de ces particularités que le Conseil avait fixé un certain taux de marge bénéficiaire dans le cadre de la construction de la valeur normale, laquelle avait ensuite été prise en compte dans le calcul de la marge de dumping sur la base de laquelle le droit antidumping avait été fixé, de sorte que le fabricant d’équipements d’origine était concerné par les constatations relatives à l’existence de la pratique de dumping incriminée (voir, en ce sens, arrêts Nashua Corporation e.a./Commission et Conseil, point 70 supra, EU:C:1990:115, points 17 à 20, et Gestetner Holdings/Conseil et Commission, point 70 supra, EU:C:1990:116, points 20 à 23).

72

Quatrièmement, la jurisprudence a retenu la qualité pour agir d’un producteur de l’Union dès lors que le règlement instituant un droit antidumping était fondé sur la situation individuelle de ce producteur, principal fabricant du produit concerné dans l’Union. Pour parvenir à ce constat, la Cour a retenu que les griefs présentés par ledit producteur étaient à l’origine de la plainte ayant donné lieu à l’ouverture de la procédure d’enquête, qu’il avait été entendu en ses observations au cours de cette procédure, dont le déroulement avait été largement déterminé par lesdites observations, et que le droit antidumping avait été établi en fonction des conséquences que le dumping constaté avait entraînées pour lui (voir, en ce sens, arrêt Timex/Conseil et Commission, point 58 supra, EU:C:1985:119, points 14 et 15).

73

Cinquièmement, la Cour a également jugé que la reconnaissance du droit de certaines catégories d’opérateurs économiques d’introduire un recours en annulation d’un règlement antidumping ne saurait empêcher que d’autres opérateurs puissent également être individuellement concernés par un tel règlement, en raison de certaines qualités qui leur sont particulières et qui les caractérisent par rapport à toute autre personne. Partant, elle a jugé recevable le recours introduit par la partie requérante dans ladite affaire, au motif qu’elle était l’importateur le plus important du produit faisant l’objet de la mesure antidumping, l’utilisateur final de ce produit et que ses activités économiques dépendaient, dans une très large mesure, de ces importations et étaient sérieusement affectées par le règlement litigieux (voir, en ce sens, arrêt du 16 mai 1991, Extramet Industrie/Conseil, C‑358/89, Rec, EU:C:1991:214, points 16 à 18).

74

C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner la qualité pour agir des requérantes en l’espèce.

Sur la qualité pour agir des requérantes à titre individuel

75

Les requérantes font valoir qu’elles sont des associations dont les membres sont les principaux producteurs américains d’éthanol, qui ont participé activement à la procédure administrative ayant conduit à l’adoption du règlement attaqué. Leur objectif serait de protéger l’industrie américaine de l’éthanol. Étant donné que l’adoption du règlement attaqué constitue un problème important pour les requérantes et qu’elles ont été reconnues comme des parties intéressées pendant toute la procédure antidumping, elles devraient avoir qualité pour former le présent recours en leur propre nom, à titre individuel.

76

Le Conseil, soutenu par la Commission, rétorque qu’il ne suffit pas, pour les requérantes, de prétendre qu’elles représentent l’industrie américaine du bioéthanol dans son ensemble ou qu’elles promeuvent ses intérêts ou avoir collaboré avec la Commission lors de l’enquête en représentant les intérêts de leurs membres pour pouvoir agir devant le Tribunal. Il fait valoir qu’il n’existe pas de circonstances particulières individualisant les requérantes.

77

Il convient donc de rechercher si, en l’espèce, le règlement attaqué affecte directement et individuellement les requérantes à titre individuel, en ce que leur situation juridique s’en trouverait modifiée au sens de la jurisprudence citée au point 67 ci-dessus.

78

D’une part, il importe de relever d’emblée qu’il est constant que le règlement attaqué impose un droit antidumping unique à toutes les importations de bioéthanol dans son état pur, c’est-à-dire de l’alcool éthylique obtenu à partir de produits agricoles, ainsi que de bioéthanol mélangé à l’essence dans une proportion supérieure à 10 % (v/v), au niveau du pays fournisseur, à savoir les États-Unis. D’autre part, il n’est pas contesté que, si les requérantes sont des associations dont il est constant qu’elles représentent les intérêts de l’industrie américaine du bioéthanol et qu’elles ont participé à la procédure antidumping, elles ne sont toutefois pas tenues de s’acquitter à titre individuel dudit droit.

79

Dès lors, il y a lieu de constater que le règlement attaqué, pour autant qu’il impose des droits antidumping aux seuls produits des membres des requérantes, ne modifie pas la situation juridique de celles-ci. En effet, l’imposition dans le règlement attaqué de droits antidumping aux produits des membres des requérantes n’a pas modifié les droits au profit des requérantes à titre individuel, ou les obligations à la charge de celles-ci.

80

Si le fait que les requérantes aient été parties à la procédure antidumping est sans influence sur le constat que l’imposition des droits antidumping aux produits de leurs membres ne crée aucun droit à leur profit et aucune obligation à leur charge, il y a lieu de faire observer qu’elles font valoir, dans le dixième moyen du recours, que, en tant que parties intéressées à la procédure antidumping, elles ont un intérêt propre à obtenir l’annulation du règlement attaqué au motif que leurs droits procéduraux auraient été violés, à savoir ceux tirés de l’article 6, paragraphe 7, de l’article 19, paragraphes 1 et 2, et de l’article 20, paragraphes 2, 4 et 5, du règlement de base.

81

Or, il résulte de la jurisprudence que le fait qu’une personne intervienne d’une manière ou d’une autre dans le processus menant à l’adoption d’un acte de l’Union n’est de nature à individualiser cette personne par rapport à l’acte en question que lorsque la réglementation de l’Union applicable lui accorde certaines garanties de procédure (voir, par analogie, arrêts du 4 octobre 1983, Fediol/Commission, 191/82, Rec, EU:C:1983:259, point 31, et du 17 janvier 2002, Rica Foods/Commission, T‑47/00, Rec, EU:T:2002:7, point 55).

82

Il convient donc d’examiner si lesdites dispositions du règlement de base mentionnées au point 80 ci-dessus accordent des garanties de procédure aux personnes étant intervenues dans le processus d’adoption d’un règlement instituant des droits antidumping, comme les requérantes le soutiennent.

83

L’article 6, paragraphe 7, du règlement de base reconnaît pour les associations représentatives, telles que les requérantes, qui se sont fait connaître conformément à son article 5, paragraphe 10, le droit de prendre, sur demande écrite, connaissance de tous les renseignements fournis par toute partie concernée par l’enquête, mis à part les documents internes établis par les autorités de l’Union ou de ses États membres, pour autant que ces renseignements soient pertinents pour la défense de leurs intérêts, qu’ils ne soient pas confidentiels au sens de son article 19 et qu’ils soient utilisés dans l’enquête. De plus, le droit de répondre à ces renseignements leur est accordé et leurs commentaires doivent être pris en considération dans la mesure où ils sont suffisamment étayés dans la réponse.

84

D’ailleurs, l’article 20, paragraphes 2, 4 et 5, du même règlement accorde aux associations représentatives le droit de demander une information finale sur les faits et considérations essentiels sur la base desquels il est envisagé de recommander l’institution de mesures définitives ou la clôture d’une enquête ou d’une procédure sans institution de mesures. Elles ont le droit de faire des observations sur l’information finale dans un délai d’au moins dix jours. En l’espèce, il est constant que les requérantes ont eu accès au dossier d’enquête non confidentiel et qu’elles ont reçu l’information finale aux termes de l’article 20, paragraphe 2, du règlement de base ainsi que l’information supplémentaire du 21 décembre 2012.

85

Dès lors, dans la mesure où les requérantes fondent leur recours sur la protection des garanties de procédure qui leur sont accordées par l’article 6, paragraphe 7, par l’article 19, paragraphes 1 et 2, et par l’article 20, paragraphes 2, 4 et 5, du règlement de base, il y a lieu de constater que le présent recours est recevable dans la mesure où il concerne les requérantes agissant à titre individuel.

86

Dans ce contexte, les requérantes soulignent avoir la qualité pour agir au motif qu’elles ont participé à la procédure antidumping en tant qu’associations représentatives qui étaient les interlocuteurs entre la Commission et « l’industrie américaine du bioéthanol dans son ensemble ». Elles invoquent, à cet égard, l’arrêt du 24 mars 1993, CIRFS e.a./Commission (C‑313/90, Rec, EU:C:1993:111, points 28 à 30), dans lequel la Cour a reconnu que la position d’une association en sa qualité de négociateur était affectée par la décision en cause. Toutefois, d’une part, il y a lieu de constater que la position des requérantes en tant qu’associations représentatives aux termes du règlement de base n’est pas comparable à celle d’un négociateur agissant formellement au nom de ses membres. D’autre part, il convient de faire observer que ledit arrêt concernait une demande d’annulation, formulée par une association, d’une décision prise dans le domaine des aides d’État, à savoir un refus de la Commission d’ouvrir la procédure prévue par l’article 108, paragraphe 2, TFUE visant au constat qu’une aide accordée n’est pas compatible avec le marché intérieur. Le CIRFS ne représentait notamment pas les intérêts de la société bénéficiant de l’aide en cause. Cependant, la présente affaire concerne un règlement adopté dans le domaine de l’antidumping. Par le règlement attaqué, le Conseil n’a pas refusé d’ouvrir une quelconque procédure et les requérantes considèrent être les représentants des intérêts des opérateurs économiques dont le produit est frappé par la mesure antidumping. La présente affaire concerne donc une situation différente de celle ayant donné lieu à l’arrêt CIRFS e.a./Commission, précité (EU:C:1993:111), qui n’est pas, à cet égard, pertinent dans le cas d’espèce.

87

À la lumière des considérations exposées aux points 77 à 86 ci-dessus, il y a lieu de conclure que les requérantes doivent se voir reconnaître, en tant que parties intéressées à la procédure, qualité pour agir au motif qu’elles sont directement et individuellement concernées, mais qu’elles ne peuvent invoquer de façon recevable que le dixième moyen du recours, celui-ci étant le seul moyen tendant à la sauvegarde de leurs droits procéduraux.

Sur la qualité pour agir des requérantes en tant que représentants de leurs membres

88

Le Conseil, soutenu par la Commission, estime que les requérantes n’ont pas qualité pour agir en tant que représentants de leurs membres.

89

Les requérantes contestent cette argumentation.

90

En l’espèce, il convient, aux fins de l’examen de la qualité pour agir, de faire une distinction entre les quatre producteurs américains de bioéthanol échantillonnés et les autres membres des requérantes.

91

Afin de déterminer si les quatre producteurs américains échantillonnés ont qualité pour agir contre le règlement attaqué, il y a lieu d’examiner s’ils sont directement et individuellement concernés par celui-ci au sens de la deuxième hypothèse visée à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.

– Sur l’affectation directe des requérantes en tant que représentants des producteurs de bioéthanol échantillonnés

92

En ce qui concerne la question de savoir si les quatre producteurs échantillonnés ont directement été affectés par le règlement attaqué, il y a lieu de constater qu’une société, dont les produits sont frappés d’un droit antidumping, est directement concernée par un règlement instituant ce droit antidumping, car ce dernier oblige les autorités douanières des États membres à percevoir le droit institué sans leur laisser une quelconque marge d’appréciation (voir, en ce sens, arrêts du 25 septembre 1997, Shanghai Bicycle/Conseil, T‑170/94, Rec, EU:T:1997:134, point 41 et jurisprudence citée, et du 19 novembre 1998, Champion Stationery e.a./Conseil, T‑147/97, Rec, EU:T:1998:266, point 31).

93

En l’espèce, premièrement, force est de constater que, au lieu d’imposer un droit individuel à chaque fournisseur du produit en question, l’article 1er, paragraphe 1, du règlement attaqué impose un droit antidumping unique à toutes les importations de bioéthanol dans son état pur, c’est-à-dire de l’alcool éthylique obtenu à partir de produits agricoles, ainsi que de bioéthanol mélangé à l’essence dans une proportion supérieure à 10 % (v/v), au niveau du pays fournisseur, à savoir les États-Unis. Plus spécifiquement, il impose un droit antidumping à l’échelle nationale à un taux de 62,30 euros par tonne nette, applicable au prorata de la teneur totale, en poids, de bioéthanol. Dès lors, il importe de constater que le règlement attaqué n’identifie pas les importations de bioéthanol par leur source individuelle en indiquant les opérateurs pertinents pour l’exportation dans la chaîne commerciale.

94

Deuxièmement, le Conseil relève, au considérant 12 du règlement attaqué ainsi que dans le mémoire en défense, que, puisqu’aucun des quatre producteurs échantillonnés n’a exporté lui-même de bioéthanol sur le marché de l’Union, les ventes de ceux-ci ont été effectuées sur le marché intérieur à des négociants/mélangeurs indépendants qui ont mélangé ensuite le bioéthanol à de l’essence afin de le revendre sur le marché intérieur et à l’exportation, en particulier vers l’Union.

95

Troisièmement, le Conseil relève, au même considérant 12 du règlement attaqué, que les cinq producteurs américains inclus dans l’échantillon ont « fait état d’exportations de bioéthanol vers l’Union dans leur formulaire d’échantillonnage ».

96

Quatrièmement, aux considérants 10 et 11 du règlement attaqué, le Conseil indique que, lors de la procédure administrative antidumping, la Commission a retenu un échantillon de six producteurs de bioéthanol aux États-Unis sur la base du plus grand volume représentatif d’exportations de bioéthanol vers l’Union sur lequel l’enquête pouvait raisonnablement porter, compte tenu du temps disponible. Une société a été retirée de l’échantillon, au cours de l’enquête, du fait qu’il a été constaté que sa production n’avait pas été exportée vers l’Union au cours de la période d’enquête, c’est-à-dire la période allant du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2011, tandis que les cinq autres producteurs échantillonnés étaient restés dans l’échantillon.

97

Il ressort donc des constatations exposées aux points 92 à 96 ci-dessus, relatives au fonctionnement du marché du bioéthanol tel qu’établi par le Conseil, que ce dernier a considéré lui-même, dans le règlement attaqué, qu’un volume important de bioéthanol provenant des quatre producteurs échantillonnés avait été exporté de façon régulière vers l’Union pendant la période d’enquête.

98

Le constat opéré au point 97 ci-dessus est par ailleurs confirmé par les appréciations du Conseil et de la Commission formulées au cours de la procédure antidumping ainsi que dans leurs plaidoiries écrites et orales.

99

En effet, tout d’abord, d’une part, il y a lieu de relever que le Conseil a constaté, dans sa réponse aux questions écrites du Tribunal, qu’il « sembl[ait] très probable » que le bioéthanol répondant aux spécifications de standards européens (ci-après les « spécifications EN ») vendu à l’Union par les deux négociants/mélangeurs qui coopéraient avec la Commission lors de l’enquête « cont[enait] du bioéthanol produit par [confidentiel] ( 1 ) ». D’autre part, le Conseil a considéré qu’il était « probable » que le bioéthanol vendu à l’Union par deux autres négociants/mélangeurs « cont[enait] du bioéthanol produit par [confidentiel] ».

100

Ensuite, la Commission a confirmé, lors de l’enquête, dans son courrier du 30 janvier 2013, adressé aux requérantes, que les huit négociants/mélangeurs qu’elle avait identifiés, qui vendaient le bioéthanol produit par les producteurs échantillonnés, représentaient plus de 90 % de la totalité des exportations de bioéthanol vers l’Union lors de la période d’enquête.

101

De plus, dans la réponse aux questions écrites du Tribunal, le Conseil a fourni des chiffres pour les quantités totales, qui répondaient aux spécifications EN, obtenues pendant la période d’enquête par les huit négociants/mélangeurs, interrogés par voie de questionnaire au cours de l’enquête, auprès des cinq producteurs américains inclus dans l’échantillon. Ces chiffres correspondaient à plus de [confidentiel] des importations de bioéthanol en provenance des États-Unis des huit négociants/mélangeurs pendant la même période.

102

Enfin, le Conseil a indiqué lors de l’audience qu’il ne contestait pas que la majorité des ventes de bioéthanol répondant aux spécifications EN avaient été exportées vers l’Union. En effet, le Conseil s’est contenté d’indiquer à cet égard dans le mémoire en défense que les négociants/mélangeurs ayant coopéré lors de la procédure se procuraient le bioéthanol auprès de divers producteurs, le mélangeaient et le vendaient à l’exportation. Selon lui, il n’était donc plus possible d’identifier le producteur au moment de l’exportation vers l’Union ni de reconstituer le parcours de tous les achats individuellement et de comparer les valeurs normales avec les prix à l’exportation correspondants.

103

Il résulte de ces considérations qu’il a été établi de façon suffisante que les volumes très considérables de bioéthanol qui ont été achetés pendant la période d’enquête par les huit négociants/mélangeurs enquêtés auprès des cinq producteurs américains de bioéthanol échantillonnés ont été en grande partie exportés vers l’Union. Le Conseil n’a apporté aucune information qui contredirait ou pourrait infirmer ce constat.

104

Partant, il y a lieu de constater que les quatre producteurs américains échantillonnés sont directement concernés, au sens de la jurisprudence citée aux points 67 et 92 ci-dessus, par le droit antidumping institué dans le règlement attaqué au motif qu’ils étaient les producteurs du produit qui, lors de son importation dans l’Union depuis l’entrée en vigueur du règlement attaqué, était frappé par le droit antidumping.

105

Ce constat ne saurait être infirmé par les autres arguments du Conseil et de la Commission.

106

Premièrement, le Conseil, soutenu par la Commission, fait observer que les requérantes représentaient, pour ce qui concerne la période d’enquête, les producteurs de bioéthanol, mais pas les exportateurs de bioéthanol. Or, les producteurs de bioéthanol ne seraient pas, à la différence des mélangeurs/exportateurs, directement concernés par le règlement attaqué dans la mesure où, dans le règlement attaqué, le Conseil ne leur « reproche » pas de mettre en œuvre des pratiques de dumping et où leurs ventes directes ne sont pas soumises aux droits antidumping.

107

À cet égard, il convient de relever que, contrairement à ce que l’argumentation du Conseil et de la Commission implique, il n’y a pas lieu d’exclure à titre de principe que les producteurs échantillonnés, à la différence des exportateurs, soient en droit d’introduire un recours contre le règlement attaqué.

108

En effet, comme il ressort de la jurisprudence citée aux points 67, 69 et 92 ci-dessus, la recevabilité d’un recours contre un règlement imposant des droits antidumping ne dépend pas de son statut de producteur ou d’exportateur.

109

De plus, il convient de rappeler que les règles antidumping visent à assurer la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping. D’une part, selon l’article 1er, paragraphe 1, du règlement de base, un droit antidumping peut être appliqué à tout produit faisant l’objet d’un dumping lorsque sa mise en libre pratique dans l’Union cause un préjudice. D’autre part, selon la jurisprudence, les procédures antidumping concernent en principe toutes les importations d’une certaine catégorie de produits à partir d’un pays tiers et non les importations des produits d’entreprises déterminées (arrêt du 7 décembre 1993, Rima Eletrometalurgia/Conseil, C‑216/91, Rec, EU:C:1993:912, point 17). Pour l’examen de l’affectation directe, il n’est donc pas pertinent de savoir à qui les institutions « reprochent » de mettre en œuvre les pratiques de dumping en question.

110

Il découle de ce qui précède que, étant donné que les droits antidumping sont liés aux produits exportés, un producteur, même s’il n’a pas la qualité d’exportateur desdits produits, peut se trouver substantiellement affecté par l’imposition de tels droits antidumping sur le produit concerné importé dans l’Union.

111

À cet égard, il importe de souligner que, en l’espèce, il est constant que les quatre producteurs échantillonnés produisaient le bioéthanol dans son état pur lors de la période d’enquête et que ce sont leurs produits que les négociants/mélangeurs mélangeaient avec de l’essence et exportaient vers l’Union.

112

Il découle des considérations mentionnées aux points 107 à 111 ci-dessus que les circonstances relevées par le Conseil et la Commission, selon lesquelles le règlement attaqué ne « reproche » pas aux membres des requérantes de mettre en œuvre des pratiques de dumping, selon lesquelles leurs ventes directes ne sont pas soumises aux droits antidumping et selon lesquelles, en substance, ils ne sont pas des exportateurs, ne permettent pas d’écarter, à titre de principe, qu’ils aient été directement affectés par l’adoption du règlement attaqué en leur qualité de producteurs échantillonnés.

113

Deuxièmement, la Commission fait valoir que le règlement attaqué n’a pas d’effets juridiques sur les membres des requérantes et ne peut avoir que des effets indirects sur ceux-ci du fait qu’ils vendaient du bioéthanol à des tiers, susceptibles, quant à eux, d’exporter une partie de ce bioéthanol dans l’Union. Selon elle, le seul constat d’un effet économique sur la situation des membres des requérantes ne suffisait pas pour démontrer leur affectation directe.

114

À cet égard, même à supposer que les négociants/mélangeurs supportent le droit antidumping et qu’il soit avéré que la chaîne commerciale du bioéthanol soit interrompue de façon à ce qu’ils ne soient pas en mesure de répercuter le droit antidumping sur les producteurs, il y a néanmoins lieu de rappeler que l’institution d’un droit antidumping change les conditions légales sous lesquelles la commercialisation du bioéthanol produit par les quatre producteurs échantillonnés aura lieu sur le marché de l’Union. Dès lors, la position légale des producteurs en question sur le marché de l’Union sera, en tout état de cause, directement et substantiellement affectée.

115

Pour le même motif, il y a donc lieu de constater que c’est également à tort que la Commission conteste le fait qu’une entreprise de la chaîne commerciale autre que ce dernier exportateur, dont il est constaté qu’il se livre au dumping, puisse contester un droit antidumping « qui vise la pratique de dumping de l’exportateur et non celle des entreprises de la chaîne d’approvisionnement ».

116

Troisièmement, la Commission estime que le règlement attaqué n’a que des effets indirects sur les membres des requérantes du fait que le droit antidumping affecterait directement la transaction entre le négociant/mélangeur et l’importateur. À cet égard, il convient de relever que la structure des arrangements contractuels entre des opérateurs économiques au sein de la chaîne commerciale du bioéthanol n’a aucune incidence sur la question de savoir si un producteur de bioéthanol est directement concerné par le règlement attaqué. En effet, d’une part, une conclusion contraire reviendrait à considérer que seul un producteur qui vend directement son produit à l’importateur dans l’Union peut être directement concerné par un règlement instituant un droit antidumping sur des produits issus de sa production, ce qui ne ressort nullement du règlement de base. D’autre part, une telle approche aurait pour effet de restreindre la protection juridique des producteurs de produits frappés par des droits antidumping en fonction de la seule structure commerciale des exportations du producteur en question.

117

Dans ce contexte, il convient également de rejeter comme étant inopérant l’argument de la Commission soulevé lors de l’audience, selon lequel, afin d’avoir qualité pour agir, un producteur doit être conscient que son produit spécifique est exporté vers l’Union. En effet, le fait qu’un producteur sache exactement quelles marchandises issues de sa production sont exportées vers l’Union est sans incidence sur la question de savoir s’il est directement affecté par le règlement attaqué.

118

Il découle de l’examen effectué aux points 106 à 117 ci-dessus que les arguments du Conseil et de la Commission selon lesquels les quatre producteurs échantillonnés ne sont pas directement concernés par le règlement attaqué doivent être rejetés.

– Sur l’affectation individuelle des requérantes en tant que représentants des producteurs de bioéthanol échantillonnés

119

S’agissant de la question de savoir si les quatre producteurs américains échantillonnés ont été individuellement concernés par le règlement attaqué, il convient de rappeler que, ainsi que cela a été constaté au point 69 ci-dessus, les actes portant institution de droits antidumping sont de nature à concerner individuellement celles des entreprises productrices et exportatrices qui peuvent démontrer qu’elles ont été identifiées dans les actes de la Commission ou du Conseil ou concernées par les enquêtes préparatoires.

120

Certes, les parties sont en désaccord quant à la question de savoir si les quatre producteurs échantillonnés ont la qualité d’exportateur du produit issu de leur production en l’espèce.

121

Or, il y a lieu de noter que, selon la jurisprudence exposée au point 73 ci-dessus, il n’est pas exclu que de tels opérateurs puissent également être individuellement concernés par un tel règlement, en raison de certaines qualités qui leur sont particulières et qui les caractérisent par rapport à toute autre personne. Si les requérantes mettent en cause, au nom des quatre producteurs échantillonnés, le bien-fondé de la décision instituant un droit antidumping en tant que telle, elles doivent démontrer que ceux-ci ont un statut particulier au sens de l’arrêt Plaumann/Commission, point 68 supra (EU:C:1963:17, p. 223) (voir, en ce sens et par analogie, arrêt Commission/Aktionsgemeinschaft Recht und Eigentum, point 68 supra, EU:C:2005:761, point 37).

122

À cet égard, il y a lieu de constater que, même à supposer qu’il s’agisse des producteurs du produit qui est frappé par un droit antidumping, mais qui ne sont aucunement impliqués dans l’exportation de celui-ci, il en serait certainement ainsi au cas où, premièrement, ils pourraient démontrer qu’ils avaient été identifiés dans les actes de la Commission ou du Conseil ou concernés par les enquêtes préparatoires (voir, en ce sens et par analogie, arrêt Allied Corporation e.a./Commission, point 58 supra, EU:C:1984:68, point 12) et, deuxièmement, leur position sur le marché serait substantiellement affectée par le droit antidumping faisant l’objet du règlement attaqué (voir, en ce sens et par analogie, arrêt Commission/Aktionsgemeinschaft Recht und Eigentum, point 68 supra, EU:C:2005:761, point 37).

123

En l’espèce, s’agissant de la participation des quatre producteurs américains échantillonnés à la procédure administrative, tout d’abord, il convient de relever que, ainsi que le font valoir les requérantes, ceux-ci ont déposé en tant que producteurs américains de bioéthanol des formulaires d’échantillonnage en réponse à l’avis d’ouverture de la Commission (voir point 4 ci-dessus). Ils ont été inclus dans l’échantillon et sont restés membres de l’échantillon tout au long de l’enquête.

124

Ensuite, force est de constater que les quatre producteurs américains échantillonnés ont participé à l’enquête préparatoire. En tant que producteurs échantillonnés, ils ont notamment coopéré à l’enquête en fournissant des réponses aux questionnaires de la Commission et en accueillant ses services, dans leurs locaux, pour effectuer des visites de vérification.

125

De plus, leurs données ont été utilisées pour le calcul de la valeur normale au stade du document d’information provisoire.

126

Enfin, d’autres éléments indiquent que certains des quatre producteurs américains échantillonnés étaient également impliqués dans d’autres étapes de la procédure antidumping en cause. En effet, d’une part, dans le rapport de la Commission du 15 novembre 2012 relatif à l’audience du 11 septembre 2012, le conseiller-auditeur a confirmé que la tenue de celle-ci avait été demandée par les requérantes ainsi que par Plymouth Energy Company et POET. D’autre part, dans la lettre du 20 février 2013 adressée aux avocats des requérantes, la Commission indique répondre aux arguments soulevés, notamment, par « Plymouth » concernant leurs observations écrites quant au document d’information du 21 décembre 2012.

127

Partant, il y a lieu de constater que les quatre producteurs américains échantillonnés étaient intensivement engagés dans l’enquête préparatoire. Ils ont été, tant de leur propre point de vue que de celui de la Commission, des parties participant à l’enquête préparatoire et leur position a été examinée par la Commission dans le cadre de la procédure menant à l’institution du droit antidumping.

128

Par ailleurs, s’agissant de la question de savoir si la position des quatre producteurs américains échantillonnés sur le marché était substantiellement affectée par le droit antidumping faisant l’objet du règlement attaqué, il a déjà été exposé aux points 93 à 103 ci-dessus que des volumes très considérables de bioéthanol qui ont été achetés pendant la période d’enquête par les huit négociants/mélangeurs enquêtés auprès des producteurs américains de bioéthanol échantillonnés ont été en grande partie exportés vers l’Union et que le bioéthanol produit par les quatre producteurs américains échantillonnés est, depuis l’entrée en vigueur du règlement attaqué, frappé par le droit antidumping imposé par ce dernier lors de son importation dans l’Union. En effet, il n’est pas contesté que ce sont les producteurs échantillonnés qui ont produit le bioéthanol exporté vers l’Union lors de la période de l’enquête, et non pas des négociants/mélangeurs qui le mélangeaient avec de l’essence et l’exportaient vers l’Union. Sur ce point, il y a lieu de faire observer que ces derniers ne sont pas définis comme des producteurs du produit concerné dans le règlement attaqué.

129

Il ressort de ces constatations que les quatre producteurs américains échantillonnés ont été concernés par les enquêtes préparatoires du fait qu’ils ont intensivement participé à celle-ci et qu’ils ont été substantiellement affectés par le droit antidumping faisant l’objet du règlement attaqué.

130

Il découle des considérations exposées aux points 119 à 129 ci-dessus qu’il y a lieu de conclure que les quatre producteurs échantillonnés, qui sont membres des requérantes, sont individuellement concernés par le règlement attaqué aux termes de la deuxième hypothèse visée à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.

131

Cette conclusion n’est pas remise en cause par les autres arguments soulevés par le Conseil et par la Commission.

132

Premièrement, le Conseil, soutenu par la Commission, considère d’abord que les membres des requérantes ne sont pas individuellement concernés par le règlement attaqué du fait que, même si certains de leurs membres ont été identifiés comme producteurs dans le règlement attaqué, le dumping était pratiqué par les négociants/mélangeurs et imputé à ces derniers.

133

Tout d’abord, il y a lieu de relever, d’emblée, que, comme cela a été constaté aux points 123 à 127 ci-dessus, les quatre producteurs échantillonnés ont pleinement participé à l’enquête préparatoire et que leur position a été examinée par la Commission dans le cadre de la procédure menant à l’institution du droit antidumping. De plus, il a été expliqué, aux points 128 et 129 ci-dessus, que la position des quatre membres échantillonnés des requérantes sur le marché était substantiellement affectée par le droit antidumping faisant l’objet du règlement attaqué. Pour ces motifs, il y a lieu de considérer que les quatre producteurs échantillonnés sont individuellement concernés par le règlement attaqué.

134

Ensuite, pour autant que la Commission ajoute qu’il n’était pas « reproché » aux quatre producteurs échantillonnés de mettre en œuvre des pratiques de dumping et que le règlement attaqué ne constitue pas une décision les affectant en raison de leur propre comportement, il convient de rappeler que ledit règlement institue un droit antidumping à l’échelle nationale sur l’importation vers l’Union du bioéthanol, y compris celui issu de la production des quatre producteurs échantillonnés. La question de savoir qui exactement a mis en œuvre les pratiques de dumping en question n’est donc pas pertinente afin de déterminer si les quatre producteurs échantillonnés sont individuellement concernés par le règlement attaqué. En effet, les producteurs en question subissent les conséquences de l’imputation des pratiques antidumping même si ces pratiques ne leur sont pas imputées.

135

Enfin, dans la mesure où le Conseil fait valoir que les quatre producteurs échantillonnés ne seraient pas individuellement concernés, aux termes du point 45 de l’arrêt du 28 février 2002, BSC Footwear Supplies e.a./Conseil (T‑598/97, Rec, EU:T:2002:52), du fait qu’ils ne sauraient être considérés comme des producteurs ou exportateurs « auxquels sont imputées les pratiques de dumping », il importe de constater que l’imputation des pratiques de dumping à l’entreprise dont la qualité pour agir est examinée n’est pas une condition nécessaire afin de conclure à l’affectation individuelle de celle-ci. Selon la jurisprudence exposée au point 73 ci-dessus, la reconnaissance du droit de certaines catégories d’opérateurs économiques d’introduire un recours en annulation d’un règlement antidumping ne saurait empêcher que d’autres opérateurs puissent également être individuellement concernés par un tel règlement, en raison de certaines qualités qui leur sont particulières et qui les caractérisent par rapport à toute autre personne. À cet égard, il convient de relever que l’imputation de la pratique de dumping à un producteur ou à un exportateur est un élément susceptible d’individualiser celui-ci, mais n’est pas un prérequis pour ces opérateurs économiques. En effet, le juge de l’Union a reconnu l’affectation individuelle de tels opérateurs économiques sans se fonder sur le fait que les pratiques de dumping pouvaient leur être imputées (arrêts Allied Corporation e.a./Conseil, point 69 supra, EU:C:1985:227, point 4 ; Shanghai Bicycle/Conseil, point 92 supra, EU:T:1997:134, point 39, et Champion Stationery e.a./Conseil, point 92 supra, EU:T:1998:266, point 47).

136

Partant, l’argument du Conseil selon lequel les membres des requérantes ne sont pas individuellement concernés, car ils ne sauraient être considérés comme des producteurs ou des exportateurs auxquels sont imputées les pratiques de dumping, sur la base de données relatives à leur activité commerciale, ne saurait être accueilli. En effet, s’il en allait autrement, cela serait contraire au principe, tel qu’il ressort de la jurisprudence exposée aux points 69 à 73 ci-dessus, selon lequel il ne saurait même être exclu que tant les importateurs que les producteurs de l’Union puissent avoir qualité pour agir.

137

Deuxièmement, le Conseil, soutenu par la Commission, estime que le facteur individualisant certaines entreprises par rapport aux autres entreprises dans la chaîne de valeur est le fait que le dumping a été établi sur la base des données fournies par celles-ci et concernant leurs activités commerciales. Le Conseil et la Commission renvoient à cet égard à la jurisprudence relative à l’affectation individuelle des importateurs liés. Plus spécifiquement, la Commission relève qu’il ressort de l’arrêt Nashua Corporation e.a./Commission et Conseil, point 70 supra (EU:C:1990:115), ainsi que de l’ordonnance du 7 mars 2014, FESI/Conseil (T‑134/10, EU:T:2014:143), que l’élément déterminant est de savoir si les institutions ont effectivement utilisé les données d’une manière qui individualise l’entreprise qui les a fournies.

138

À cet égard, il y a lieu de relever d’abord que la jurisprudence invoquée par la Commission n’est pas pertinente en l’espèce, du fait que la situation des quatre producteurs échantillonnés n’est pas comparable à celle des importateurs liés. La jurisprudence opère une distinction concernant les conditions dans lesquelles les producteurs et les exportateurs, d’une part, et les importateurs, d’autre part, seraient individuellement concernés par les règlements instituant des droits antidumping (arrêts Nashua Corporation e.a./Commission et Conseil, point 70 supra, EU:C:1990:115, points 14 et 15, et Gestetner Holdings/Conseil et Commission, point 70 supra, EU:C:1990:116, points 17 et 18).

139

En outre, contrairement à ce qu’affirme le Conseil, le fait qu’il ait décidé de ne pas utiliser les données fournies par les producteurs de bioéthanol échantillonnés pour calculer une marge de dumping individuelle à leur égard, ce qui est précisément contesté par les requérantes sous leur premier moyen, ne saurait exclure la recevabilité d’un recours introduit par ces producteurs.

140

À cet égard, il y a lieu de relever que le Tribunal a constaté dans l’affaire Shanghai Bicycle/Conseil (point 92 supra, EU:T:1997:134, point 38), dans laquelle un droit antidumping unique a été imposé aux importations du produit concerné originaire de Chine, que la protection juridictionnelle d’entreprises individuellement concernées par un droit antidumping ne saurait être affectée par la seule circonstance que le droit en cause est unique et institué par référence à un État et non par référence à des entreprises individuelles. Pour le même motif, le fait que le droit antidumping imposé, en l’espèce, par le règlement attaqué est un droit antidumping unique, imposé à l’échelle nationale et non par référence aux producteurs échantillonnés, ne saurait faire obstacle à la protection juridictionnelle des membres des requérantes.

141

D’une part, en effet, le seul recours par les institutions aux échantillons ne saurait constituer un motif valable pour rejeter la qualité pour agir des producteurs en dehors de l’échantillon, dont les données n’ont pas été utilisées par les institutions. Cela ressort notamment de l’arrêt du 11 juillet 1996, Sinochem Heilongjiang/Conseil (T‑161/94, Rec, EU:T:1996:101, points 47 et 48), dans lequel le Tribunal a constaté que le fait que la Commission ait décidé de ne pas retenir les informations fournies par un exportateur et portant sur le fond de l’affaire n’était pas de nature à remettre en cause la conclusion selon laquelle cet exportateur était concerné par les enquêtes préparatoires. Il en est donc, a fortiori, de même de la situation d’un producteur faisant partie d’un échantillon.

142

D’autre part, le fait de faire dépendre la recevabilité d’un recours introduit par un producteur ou un exportateur inclus dans l’échantillon de l’utilisation des données fournies par celui-ci reviendrait à soustraire, au gré du Conseil, l’application des dispositions du règlement de base aux producteurs, comme ceux de l’espèce, à tout contrôle direct par le Tribunal.

143

Partant, il convient de rejeter l’argument selon lequel le facteur individualisant certaines entreprises par rapport aux autres dans la chaîne de valeur est le fait que le dumping a été établi sur la base des données fournies par celles-ci.

144

Troisièmement, la Commission considère, à la différence des requérantes, que l’importance de la production de leurs membres ne constitue pas un élément pertinent afin de déterminer l’affectation individuelle de celles-ci par le règlement attaqué. À cet égard, il convient de faire observer qu’il ressort des constatations exposées aux points 119 à 130 ci-dessus que les quatre producteurs échantillonnés, qui sont membres des requérantes, sont individuellement concernés par le règlement attaqué, sans qu’il ne soit nécessaire d’examiner l’importance de leur production du produit en question.

145

Partant, il ressort des constatations faites aux points 132 à 144 ci-dessus que les arguments du Conseil et de la Commission, selon lesquels les quatre producteurs échantillonnés ne sont pas individuellement concernés par le règlement attaqué, doivent être rejetés.

– Sur l’existence de voies de recours alternatives

146

La Commission soutient que les membres des requérantes ne seraient pas privés de voies de recours dans l’hypothèse où ils souhaiteraient commencer à exporter du bioéthanol dans l’Union. D’une part, ils pourraient prévoir, dans leurs contrats avec les importateurs, de prendre en charge les droits douaniers afin d’être en mesure de contester la dette douanière devant les juridictions des États membres. D’autre part, les membres concernés par un droit antidumping auraient également la possibilité de demander un réexamen au titre de nouvel exportateur, en vertu de l’article 11, paragraphe 4, du règlement de base. Selon la Commission, conformément à cette disposition, les nouveaux exportateurs dans le pays d’exportation en question, qui n’ont pas exporté le produit au cours de la période d’enquête sur laquelle les mesures ont été fondées, pourraient prétendre à l’ouverture d’un tel réexamen s’ils démontraient qu’ils avaient effectivement exporté dans l’Union à la suite de la période d’enquête ou s’ils étaient en mesure de démontrer qu’ils avaient souscrit une obligation contractuelle et irrévocable d’exportation d’une quantité importante de produits dans l’Union. Le droit en vigueur serait abrogé pour ces importations, qui sont soumises à enregistrement. Les institutions procéderaient à un réexamen accéléré, à l’issue duquel elles détermineraient l’existence ou non d’un dumping pour ce nouvel exportateur. Le cas échéant, elles percevraient le droit rétroactivement.

147

Tout d’abord, il convient de constater que la question de savoir si les membres des requérantes auraient d’autres voies de recours afin de faire valoir leurs droits n’a aucune incidence pour l’examen de l’affectation directe et individuelle par rapport au règlement attaqué.

148

Ensuite, pour autant que, par cet argument, la Commission propose que le producteur ou l’exportateur vende les marchandises selon la condition d’exécution des contrats commerciaux (incoterm) dite « rendu droits acquittés » (RDA) afin d’avoir la possibilité de contester la communication de la dette douanière par les autorités nationales devant les juridictions nationales ou de concevoir une transaction commerciale avec un acheteur dans l’Union, dans l’unique objectif de pouvoir attaquer la dette douanière devant les juridictions nationales et éventuellement devant la Cour, il y a lieu de relever que, conformément aux considérations exposées aux points 69 à 73 et 122 ci-dessus, il n’existe pas une telle restriction à la recevabilité d’un recours en annulation introduit par des producteurs tels que les quatre producteurs échantillonnés. En effet, ainsi que cela a été relevé aux points 109 et 110 ci-dessus, les droits antidumping s’attachent au produit en question. Il s’ensuit que les liens contractuels entre un exportateur et un producteur n’ont aucune incidence quant à la question de savoir si les conditions prévues par ladite jurisprudence doivent être remplies ou non. Partant, il convient de rejeter cet argument de la Commission.

149

Enfin, pour autant que la Commission invoque par son argument la possibilité de demander un réexamen au titre de nouvel exportateur en vertu de l’article 11, paragraphe 4, du règlement de base, d’une part, force est de constater que le quatrième alinéa dudit paragraphe exclut expressément la possibilité d’un tel réexamen dans des situations dans lesquelles la Commission a recouru à la méthode d’échantillonnage. D’autre part, ledit paragraphe ne constitue, en tout état de cause, pas une voie de recours alternative appropriée pour un producteur qui remplit les conditions prévues par la jurisprudence exposée aux points 69 à 73 ci-dessus. En effet, elle ne lui permet pas, par exemple, de remédier aux effets du droit antidumping sur sa production, dans la mesure où le producteur en question n’a pas commencé à exporter directement celle-ci vers l’Union. Cet argument doit, par conséquent, être rejeté.

150

Il découle de toutes les considérations exposées aux points 92 à 149 ci-dessus que, en vertu de la deuxième hypothèse visée à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, les requérantes ont qualité pour introduire le présent recours dans la mesure où il tend à l’annulation du règlement attaqué en ce que ce dernier concerne les quatre producteurs échantillonnés.

Sur la qualité pour agir des requérantes en tant que représentants de leurs membres autres que les quatre producteurs échantillonnés

151

Il y a lieu de constater que les requérantes n’ont avancé aucun argument concret dans leurs écritures et n’ont fourni aucune information qui figure au dossier devant le Tribunal qui permettrait à ce dernier de conclure qu’un ou plusieurs de leurs membres qui ne faisaient pas partie de l’échantillon des producteurs américains auraient été directement concernés par le droit antidumping institué par le règlement attaqué.

152

En effet, hormis les quatre producteurs américains échantillonnés, Marquis Energy, Murex et CHS, les requérantes n’ont identifié aucun autre de leurs membres nommément qui, selon elles, pourrait avoir qualité pour agir en l’espèce.

153

De plus, les requérantes n’ont apporté aucun élément démontrant que le bioéthanol de tel ou tel autre membre a été exporté vers l’Union et était, par conséquent, frappé par le droit antidumping en cause. Dans de telles conditions, il ne peut être considéré que les autres membres des requérantes auraient pu être directement concernés par le règlement attaqué.

154

Étant donné qu’il n’est pas établi que les membres des requérantes, autres que les quatre producteurs échantillonnés, étaient directement concernés par le règlement attaqué, il convient de relever, selon la jurisprudence citée au point 65 ci-dessus, que les requérantes n’ont pas, en vertu des deuxième et troisième hypothèses visées à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, qualité pour introduire le présent recours dans la mesure où il tend à l’annulation du règlement attaqué en ce que ce dernier concerne leurs membres autres que les quatre producteurs échantillonnés.

Sur l’intérêt à agir

155

Il convient de relever que la Commission estime que les requérantes n’ont pas un intérêt né et actuel à l’annulation du règlement attaqué. Elle fait valoir que les requérantes n’ont pas contesté que leurs membres n’avaient pas exporté de bioéthanol vers l’Union pendant la période d’enquête et qu’elles n’ont pas non plus établi que leurs membres avaient commencé à le faire à la date de la formation du recours. Leurs ventes n’auraient donc pas été soumises au droit antidumping institué par le règlement attaqué. Par voie de conséquence, l’annulation du règlement attaqué ne serait pas susceptible d’avoir des conséquences juridiques pour leurs membres.

156

Les requérantes contestent ces arguments.

157

À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon l’article 40, quatrième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, les conclusions du mémoire en intervention ne peuvent avoir d’autre objet que le soutien des conclusions de l’une des parties principales. En outre, aux termes de l’article 142, paragraphe 3, du règlement de procédure, la partie intervenante accepte le litige dans l’état où il se trouve lors de son intervention. Il en résulte que la Commission n’a pas qualité pour soulever une fin de non-recevoir, tirée du défaut d’intérêt à agir des requérantes, qui n’a pas été soulevée par le Conseil et que le Tribunal n’est dès lors pas tenu d’examiner le présent moyen d’irrecevabilité. Toutefois, s’agissant d’une fin de non-recevoir d’ordre public, il convient d’examiner d’office l’intérêt à agir des requérantes (voir, en ce sens, arrêt CIRFS e.a./Commission, point 86 supra, EU:C:1993:111, points 20 à 23).

158

Il convient de constater que l’intérêt à agir constitue la condition essentielle et première de tout recours en justice (arrêt du 10 avril 2013, GRP Security/Cour des comptes, T‑87/11, EU:T:2013:161, point 44) et doit, au vu de l’objet du recours, exister au stade de l’introduction de celui-ci sous peine d’irrecevabilité. L’intérêt à agir doit perdurer jusqu’au prononcé de la décision juridictionnelle (voir arrêt du 7 juin 2007, Wunenburger/Commission, C‑362/05 P, Rec, EU:C:2007:322, point 42 et jurisprudence citée).

159

L’existence d’un intérêt à agir suppose que le recours est susceptible, par son résultat, de procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (voir, en ce sens, arrêts du 19 juillet 2012, Conseil/Zhejiang Xinan Chemical Industrial Group, C‑337/09 P, Rec, EU:C:2012:471, point 46 et jurisprudence citée, et du 18 mars 2009, Shanghai Excell M&E Enterprise et Shanghai Adeptech Precision/Conseil, T‑299/05, Rec, EU:T:2009:72, point 43 et jurisprudence citée).

160

En l’espèce, il suffit de constater que, en substance, la Commission estime que le droit antidumping institué par le règlement attaqué ne frappe pas le bioéthanol issu de la production des membres des requérantes au motif qu’il est exporté par les négociants/mélangeurs. Toutefois, il a déjà été constaté au point 104 ci-dessus que les quatre producteurs américains échantillonnés étaient les producteurs du produit qui, lors de son importation dans l’Union, était frappé par le droit antidumping. Par conséquent, d’une part, les requérantes ont un intérêt à agir en l’espèce en ce que l’annulation du droit antidumping imposé par le règlement attaqué, qui frappe les importations dans l’Union de bioéthanol produit par leurs membres inclus dans l’échantillon, est susceptible d’apporter un bénéfice auxdits membres. D’autre part, il convient de relever que les requérantes ont un intérêt à agir en l’espèce en ce qu’elles font valoir une violation de leurs propres droits procéduraux dans le cadre du dixième moyen.

161

Il découle de tout ce qui précède qu’il y a lieu de :

rejeter le présent recours comme étant irrecevable dans la mesure où il vise à l’annulation du règlement attaqué pour autant qu’il concerne Marquis Energy (voir point 51 ci-dessus) ;

rejeter les neuf premiers moyens comme étant irrecevables dans la mesure où les requérantes font valoir leur qualité pour agir à titre personnel (voir point 87 ci-dessus) ;

rejeter le présent recours comme étant irrecevable dans la mesure où il vise à l’annulation du règlement attaqué pour autant qu’il concerne les membres des requérantes autres que les cinq producteurs américains échantillonnés (voir points 55 et 154 ci-dessus).

162

Toutefois, il y a lieu de constater que le présent recours est recevable dans la mesure où les requérantes demandent :

premièrement, l’annulation du règlement attaqué pour autant que celui-ci concerne les quatre producteurs américains échantillonnés (voir point 150 ci-dessus) et,

deuxièmement, l’annulation du règlement attaqué dans la mesure où elles font valoir, dans le dixième moyen, une violation de leurs propres droits procéduraux lors de la procédure antidumping (voir point 87 ci-dessus).

2. Sur le fond

Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 2, paragraphe 8, de l’article 9, paragraphe 5, et de l’article 18, paragraphes 1, 3 et 4, du règlement de base, d’une violation des principes de sécurité juridique, de confiance légitime et de bonne administration ainsi que d’erreurs manifestes d’appréciation commises par le Conseil en raison de son refus de calculer une marge de dumping individuelle et d’attribuer un droit antidumping individuel, le cas échéant, aux membres des requérantes inclus dans l’échantillon

163

Dans la mesure où le présent recours est recevable au motif qu’il a été introduit au nom des quatre producteurs américains échantillonnés, il convient de commencer l’examen du fond de l’affaire par celui du premier moyen.

164

Par leur premier moyen, les requérantes font valoir, en substance, que, en refusant de calculer des marges de dumping individuelles pour leurs membres, qui sont des producteurs du produit concerné aux États-Unis inclus dans l’échantillon de producteurs/exportateurs, et en établissant à leur place une marge de dumping à l’échelle nationale, le Conseil a violé plusieurs articles du règlement de base ainsi que les principes de sécurité juridique, de confiance légitime et de bonne administration.

165

Le premier moyen se divise en quatre branches. La première branche concerne une violation de l’article 2, paragraphe 8, du règlement de base en ce qui concerne la détermination du prix à l’exportation. La deuxième branche concerne une violation de l’article 9, paragraphe 5, dudit règlement, qui définit l’obligation des institutions d’imposer des droits individuels pour chaque fournisseur. La troisième branche concerne de prétendues violations de l’article 18, paragraphes 1, 3 et 4, dudit règlement, relatif au recours aux meilleures données disponibles, en ce que les institutions auraient recouru aux données fournies par des négociants/mélangeurs indépendants pour calculer une marge du dumping à l’échelle nationale. Enfin, la quatrième branche concerne une violation des principes de sécurité juridique, de confiance légitime et de bonne administration.

166

Il convient, par la suite, de commencer par l’examen de la deuxième branche du premier moyen.

167

Par la deuxième branche du premier moyen, les requérantes font valoir, en substance, que le Conseil aurait dû calculer une marge de dumping individuelle ainsi qu’un droit antidumping individuel pour chacun des quatre producteurs américains échantillonnés. En recourant à la place à une marge de dumping et à un droit antidumping à l’échelle nationale pour toutes les parties opérant dans l’industrie du bioéthanol aux États-Unis, le Conseil aurait violé l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base, les principes de sécurité juridique et de confiance légitime ainsi que son obligation de motivation.

168

Plus spécifiquement, les requérantes estiment que l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base transpose en droit de l’Union les articles 6.10 et 9.2 de l’accord sur la mise en œuvre de l’article VI de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (GATT) (JO L 336, p. 103, ci-après l’« accord antidumping de l’OMC »). Selon les requérantes, les articles 6.10 et 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC imposent une obligation de calculer des marges de dumping individuelles et d’attribuer des droits antidumping individuels aux producteurs et exportateurs, sauf pour les « exportateurs » non inclus dans l’échantillon dans le cas d’échantillonnage et, d’autre part, dans le cas des exportateurs qui constituent une entité économique unique avec l’État. Dès lors, l’interprétation par la Commission du terme « irréalisable » utilisé à l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base, selon laquelle il serait possible d’appliquer des exceptions à l’obligation d’attribuer des marges de dumping et des droits antidumping individuels autres que celles-ci, telles que la structure des exportations américaines de bioéthanol ou la manière dont le produit est exporté, serait erronée et illégale.

169

Le Conseil, soutenu par ePure, conteste ces arguments. En substance, d’une part, il estime que, lorsque les institutions ne sont pas en mesure de reconstituer le parcours de chaque achat ni de comparer les valeurs normales avec les prix à l’exportation correspondants, comme dans le cas d’espèce, l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base ne saurait les obliger à définir des mesures antidumping individuelles pour chaque producteur. Il serait dans l’impossibilité de le faire. D’autre part, il soutient que le terme « irréalisable » utilisé à l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base a une portée plus générale que celui utilisé aux articles 6.10 et 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC, permettant donc l’application d’une exception à l’obligation d’attribuer en l’espèce des marges de dumping et des droits antidumping individuels.

170

À cet égard, il y a lieu de relever que l’article 9, paragraphe 5, premier alinéa, du règlement de base, dans sa version originale, qui est d’application en l’espèce, puisque l’article 2, second alinéa, du règlement (UE) no 765/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 13 juin 2012, modifiant le règlement de base (JO L 237, p. 1), prévoit que la version modifiée de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base s’applique à toutes les enquêtes ouvertes après la date d’entrée en vigueur du règlement no 765/2012, énonce qu’un droit antidumping dont le montant est approprié à chaque cas est imposé d’une manière non discriminatoire sur les importations d’un produit, de quelque source qu’elles proviennent, dont il a été constaté qu’elles font l’objet d’un dumping et causent un préjudice, à l’exception des importations en provenance des sources dont un engagement pris au titre du règlement de base a été accepté. Le même paragraphe prévoit également que le règlement imposant le droit précise le montant du droit imposé à chaque fournisseur ou, si cela est irréalisable et, en règle générale, dans les cas visés à l’article 2, paragraphe 7, sous a), du même règlement, le nom du pays fournisseur concerné.

171

L’article 6.10 de l’accord antidumping de l’OMC prévoit ce qui suit :

« En règle générale, les autorités détermineront une marge de dumping individuelle pour chaque exportateur connu ou producteur concerné du produit visé par l’enquête. Dans les cas où le nombre d’exportateurs, de producteurs, d’importateurs ou de types de produits visés sera si important que l’établissement d’une telle détermination sera irréalisable, les autorités pourront limiter leur examen soit à un nombre raisonnable de parties intéressées ou de produits, en utilisant des échantillons qui soient valables d’un point de vue statistique d’après les renseignements dont elles disposent au moment du choix, soit au plus grand pourcentage du volume des exportations en provenance du pays en question sur lequel l’enquête peut raisonnablement porter. »

172

L’article 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC énonce ce qui suit :

« Lorsqu’un droit antidumping est imposé en ce qui concerne un produit quelconque, ce droit, dont les montants seront appropriés dans chaque cas, sera recouvré sans discrimination sur les importations dudit produit, de quelque source qu’elles proviennent, dont il aura été constaté qu’elles font l’objet d’un dumping et qu’elles causent un dommage, à l’exception des importations en provenance des sources dont un engagement en matière de prix au titre du présent accord aura été accepté. Les autorités feront connaître le nom du ou des fournisseurs du produit en cause. Si, toutefois, plusieurs fournisseurs du même pays sont impliqués et qu’il ne soit pas réalisable de les nommer tous, les autorités pourront faire connaître le nom du pays fournisseur en cause. »

173

Afin de déterminer si le Conseil a pu, à bon droit, calculer une marge de dumping à l’échelle nationale et, par conséquent, instituer un droit antidumping à une telle échelle, il convient donc d’examiner, premièrement, si l’accord antidumping de l’OMC est pertinent pour l’interprétation de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base en l’espèce, deuxièmement, si les quatre producteurs américains échantillonnés ont, en règle générale, un droit de se voir appliquer un droit antidumping individuel en vertu de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base et, troisièmement, si le Conseil a considéré à bon droit qu’il existait une exception à cette règle générale au motif qu’il était « irréalisable » de préciser dans le règlement attaqué les montants individuels pour chaque fournisseur.

Sur l’application de l’accord antidumping de l’OMC en l’espèce

174

Il ressort du préambule du règlement de base, et en particulier de son considérant 3, que ledit règlement a notamment pour objet de transposer dans le droit de l’Union les règles nouvelles et détaillées contenues dans l’accord antidumping de l’OMC (voir, par analogie, arrêts du 9 janvier 2003, Petrotub et Republica/Conseil, C‑76/00 P, Rec, EU:C:2003:4, point 55, et du 24 septembre 2008, Reliance Industries/Conseil et Commission, T‑45/06, Rec, EU:T:2008:398, point 89). En outre, le même considérant prévoit également que, afin d’assurer une application appropriée et transparente desdites règles, il convient de transposer, dans toute la mesure du possible, les termes dudit accord dans le droit de l’Union. Parmi les règles énumérées dans le même considérant, qui sont transposées par le règlement de base dans le droit de l’Union, figurent notamment celles portant sur l’imposition des droits antidumping, à savoir les articles 6.10 et 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC.

175

Cependant, il a été itérativement jugé que, compte tenu de leur nature et de leur économie, les accords de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), dont fait partie l’accord antidumping de l’OMC, ne figurent pas, en principe, parmi les normes au regard desquelles le juge de l’Union contrôle la légalité des actes des institutions de l’Union (voir arrêts Petrotub et Republica/Conseil, point 174 supra, EU:C:2003:4, point 53 et jurisprudence citée, et du 18 décembre 2014, LVP, C‑306/13, Rec, EU:C:2014:2465, point 44 et jurisprudence citée).

176

En outre, le juge de l’Union a estimé que le fait d’admettre que la tâche consistant à assurer la conformité du droit de l’Union avec les règles de l’OMC incombe directement au juge de l’Union reviendrait à priver les organes législatifs ou exécutifs de l’Union de la marge de manœuvre dont jouissent les organes similaires des partenaires commerciaux de l’Union. Il est en effet constant que certaines des parties contractantes, dont les partenaires les plus importants de l’Union du point de vue commercial, ont précisément tiré, à la lumière de l’objet et du but des accords de l’OMC, la conséquence que ceux-ci ne figuraient pas parmi les normes au regard desquelles leurs organes juridictionnels contrôlaient la légalité de leurs règles de droit interne. Une telle absence de réciprocité, si elle était acceptée, risquerait d’aboutir à une application déséquilibrée des règles de l’OMC (voir arrêts du 9 septembre 2008, FIAMM e.a./Conseil et Commission, C‑120/06 P et C‑121/06 P, Rec, EU:C:2008:476, point 119 et jurisprudence citée, et LVP, point 175 supra, EU:C:2014:2465, point 46 et jurisprudence citée).

177

Ce n’est que dans l’hypothèse où l’Union a entendu donner exécution à une obligation particulière assumée dans le cadre de l’OMC ou dans le cas où l’acte de l’Union renvoie expressément à des dispositions précises des accords de l’OMC qu’il appartient au juge de l’Union de contrôler la légalité de l’acte de l’Union en cause au regard des règles de l’OMC (voir arrêts Petrotub et Republica/Conseil, point 174 supra, EU:C:2003:4, point 54 et jurisprudence citée, et LVP, point 175 supra, EU:C:2014:2465, point 47).

178

S’agissant de la transposition de l’accord antidumping de l’OMC par l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base, il convient de faire observer que ce dernier, dont la version originale est d’application en l’espèce, a été modifié par le règlement no 765/2012 en raison de l’adoption, par l’organe de règlement des différends de l’OMC (ci-après l’« ORD »), du rapport de l’organe d’appel du 15 juillet 2011 (WT/DS397/AB/R, ci-après le « rapport de l’organe d’appel du 15 juillet 2011 dans l’affaire “éléments de fixation” ») et du rapport du groupe spécial du 3 décembre 2010 (WT/DS397/R), modifié par le rapport de l’organe d’appel, dans l’affaire intitulée « Communautés européennes – Mesures antidumping définitives visant certains éléments de fixation en fer ou en acier en provenance de Chine » (ci-après l’« affaire “éléments de fixation” »).

179

Dans les considérants du règlement no 765/2012, le législateur de l’Union rappelle que, dans les rapports de l’OMC, il a été constaté, notamment, que l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base était incompatible avec les articles 6.10, 9.2 et 18.4 de l’accord antidumping de l’OMC et avec l’article XVI.4 de l’accord instituant l’OMC (JO 1994, L 336, p. 3). Le législateur de l’Union a confirmé, aux considérants 5 et 6 du règlement no 765/2012, avoir effectué les modifications à l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base avec l’intention de mettre en œuvre les recommandations et décisions de l’ORD relatives à l’affaire « éléments de fixation », d’une manière qui respecte les obligations de l’Union dans le cadre de l’OMC.

180

Force est de constater qu’il découle de l’adoption même du règlement no 765/2012 que le législateur de l’Union considère que, par l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base, l’Union avait entendu donner exécution à une obligation particulière assumée dans le cadre de l’OMC, contenue en l’occurrence aux articles 6.10 et 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC.

181

D’une part, il découle de ces constatations que le règlement no 765/2012 reconnaît que l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base transpose en droit de l’Union les obligations découlant des articles 6.10 et 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC, comme le relèvent les requérantes à bon droit.

182

D’autre part, il y a lieu de constater que les modifications, effectuées en vertu du règlement no 765/2012, du libellé de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base concernent la modification d’une exception à l’obligation d’imposer des droits antidumping individuels, relative aux exportateurs auxquels s’appliquaient l’article 2, paragraphe 7, sous a), du règlement de base. Or, elles ne portent pas, en substance, sur la partie de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base qui est pertinente en l’espèce et selon laquelle le règlement imposant le droit précise le montant du droit imposé à chaque fournisseur ou, si cela est irréalisable, le nom du pays fournisseur concerné.

183

Plus spécifiquement, il importe de constater que le législateur de l’Union ne considérait pas nécessaire de modifier les termes d’« importations d’un produit, de quelque source qu’elles proviennent, dont il a été constaté qu’elles font l’objet d’un dumping et causent un préjudice », de même que les termes de « fournisseur » et d’« irréalisable » afin de mettre en œuvre les recommandations et décisions de l’ORD relatives à l’affaire « éléments de fixation », d’une manière qui respecte ses obligations dans le cadre de l’OMC. Dès lors, les termes pertinents en l’espèce ont la même signification à l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base dans sa version originale que dans sa version issue de la modification du règlement no 765/2012.

184

Par conséquent, il découle des considérations qui précèdent que l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base dans sa version originale, pour autant qu’il soit pertinent en l’espèce, doit être interprété en conformité avec les articles 6.10 et 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC.

Sur la question de savoir si les quatre producteurs américains échantillonnés ont un droit de se voir appliquer un droit antidumping individuel en vertu de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base

185

Les requérantes estiment qu’un producteur retenu dans l’échantillon, tel que les quatre producteurs américains échantillonnés, a le droit de se voir appliquer un droit antidumping individuel, en vertu de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base.

186

Le Conseil rétorque que ni l’accord antidumping de l’OMC ni le règlement de base n’exigent des institutions de faire l’« impossible ». Lorsque les institutions ne seraient pas en mesure de reconstituer le parcours de chaque achat ni de comparer les valeurs normales avec les prix à l’exportation correspondants, comme c’est le cas en l’espèce, elles ne seraient pas obligées d’instituer des mesures antidumping individuelles pour chaque producteur.

187

Afin de déterminer si un producteur échantillonné du produit faisant l’objet du dumping avait un droit à se voir appliquer un droit antidumping individuel, il convient de relever que l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base ainsi que l’article 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC établissent que, en principe, un droit antidumping doit être imposé individuellement à chaque fournisseur sur les importations d’un produit, de quelque source qu’elles proviennent, dont il a été constaté qu’elles font l’objet d’un dumping et causent un préjudice. Il ressort du libellé de ces dispositions qu’un opérateur qui n’est pas considéré comme ayant la qualité de « fournisseur » n’a aucun droit à l’imposition d’un droit antidumping individuel à son égard.

188

Dans ce contexte, il convient de relever que, selon le point 624, sous a), i), du rapport de l’organe d’appel du 15 juillet 2011 dans l’affaire « éléments de fixation », l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base concerne non seulement l’imposition de droits antidumping, mais également le calcul des marges de dumping.

189

S’agissant du droit de l’OMC, il y a lieu de constater que, dans les cas où les autorités appliquent une méthode d’échantillonnage, l’article 6.10.2 de l’accord antidumping de l’OMC prévoit qu’elles doivent déterminer une marge de dumping individuelle pour tout exportateur ou producteur qui n’a pas été choisi initialement et qui présente les renseignements nécessaires à temps pour qu’ils soient examinés au cours de l’enquête, sauf dans les cas où le nombre d’exportateurs ou de producteurs est si important que des examens individuels compliqueraient indûment la tâche desdites autorités et empêcheraient d’achever l’enquête en temps utile.

190

Il découle de cette disposition que, sauf dans les cas où le nombre d’exportateurs ou de producteurs est très important, l’autorité chargée de l’enquête est censée déterminer une marge de dumping individuelle pour tout exportateur ou producteur qui n’a pas été choisi initialement et qui présente les renseignements nécessaires à temps pour qu’ils soient examinés au cours de l’enquête. À cet égard, selon le point 6.90 du rapport du groupe spécial du 28 septembre 2001 (WT/DS189/R), dans l’affaire intitulée « Argentine – Mesures antidumping définitives à l’importation de carreaux de sol en céramique en provenance d’Italie », il a été relevé que la règle générale énoncée à la première phrase de l’article 6.10 de l’accord antidumping de l’OMC, qui veut que des marges de dumping individuelles soient déterminées pour chaque exportateur ou producteur connu du produit visé par l’enquête, est pleinement applicable aux exportateurs qui sont choisis pour l’examen au titre de la seconde phrase du même article. Ladite phrase permettrait à l’autorité chargée de l’enquête de limiter son examen à certains exportateurs ou producteurs, mais elle ne prévoirait pas de dérogation à la règle générale qui veut que des marges individuelles soient déterminées pour les exportateurs ou producteurs qui sont visés par l’examen. Si même les producteurs qui n’ont pas été inclus dans l’échantillon initial sont fondés à bénéficier du calcul d’une marge individuelle, il s’ensuit, selon ledit rapport, que les producteurs qui ont été inclus dans cet échantillon le sont également.

191

Il y a donc lieu de constater que l’autorité chargée de l’enquête est censée déterminer une marge de dumping individuelle pour tout exportateur ou producteur qui a été retenu dans l’échantillon des fournisseurs du produit faisant l’objet du dumping.

192

Il s’ensuit que, selon le droit de l’OMC, tout exportateur ou producteur qui a été retenu dans l’échantillon et qui a donc coopéré avec l’autorité chargée de l’enquête tout au long de l’enquête remplit les conditions pour être considéré comme étant un « fournisseur » au sens de l’article 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC.

193

En ce qui concerne les dispositions du règlement de base, il y a lieu de relever que, ainsi que cela a déjà été constaté aux points 183 et 184 ci-dessus, l’article 9, paragraphe 5, dudit règlement dans sa version originale, pour autant qu’il soit pertinent en l’espèce, doit être interprété en conformité avec les dispositions de l’accord antidumping de l’OMC. De plus, l’article 17, paragraphe 1, du règlement de base prévoit également que, dans les cas où le nombre de plaignants, d’exportateurs ou d’importateurs, de type de produits ou de transactions est important, l’enquête peut se limiter à un nombre raisonnable de parties, de produits ou de transactions en utilisant des échantillons. Le paragraphe 3 du même article énonce que, lorsque la Commission procède à l’échantillonnage, une marge de dumping individuelle est néanmoins calculée pour chaque exportateur ou producteur n’ayant pas été choisi initialement, qui présente les renseignements nécessaires dans les délais prévus, sauf dans les cas où le nombre d’exportateurs ou de producteurs est si important que des examens individuels compliqueraient indûment la tâche et empêcheraient d’achever l’enquête en temps utile. Il importe de constater qu’il ressort également desdites dispositions du règlement de base, interprétées en conformité avec le droit de l’OMC, que, si même les producteurs qui n’ont pas été inclus dans l’échantillon initial sont fondés à bénéficier du calcul d’une marge individuelle, a fortiori, les producteurs qui ont été inclus dans cet échantillon le sont également. À cet égard, il convient également de relever que la dernière phrase de l’article 9, paragraphe 6, du règlement de base rappelle que des droits individuels doivent être appliqués aux importations en provenance des exportateurs ou des producteurs bénéficiant d’un traitement individuel, conformément à l’article 17 dudit règlement.

194

Il s’ensuit que, en application des dispositions du règlement de base, tout exportateur ou producteur qui a été retenu dans l’échantillon des fournisseurs du produit faisant l’objet du dumping et qui a donc coopéré avec les institutions tout au long de l’enquête remplit les conditions pour être considéré comme un « fournisseur » au sens de l’article 9, paragraphe 5, dudit règlement.

195

À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’objectif de la constitution d’un échantillon de producteurs-exportateurs est d’établir, lors d’une enquête limitée, le plus exactement possible, la pression sur les prix subie par l’industrie de l’Union. Dès lors, la Commission a le pouvoir de modifier, à tout moment, la composition d’un échantillon selon les besoins de l’enquête. En effet, aucune disposition de l’accord antidumping de l’OMC ou du règlement de base n’oblige les institutions à garder les producteurs initialement échantillonnés dans l’échantillon des fournisseurs du produit faisant l’objet du dumping si elles considèrent que ceux-ci n’ont pas la qualité de fournisseurs ou qu’ils ne constituent pas des sources d’importation du produit faisant l’objet du dumping et causant un préjudice. S’agissant de la question de savoir s’il convient de garder un opérateur dans un échantillon, il y a lieu de constater que la Commission dispose d’un large pouvoir d’appréciation en raison de la complexité des situations économiques, politiques et juridiques qu’elle doit examiner (voir, par analogie, arrêt du 27 septembre 2007, Ikea Wholesale, C‑351/04, Rec, EU:C:2007:547, point 40). Or, dans la mesure où la Commission n’avait pas exclu un quelconque producteur faisant partie de l’échantillon des fournisseurs du produit faisant l’objet du dumping, elle était, en principe, tenue de calculer une marge de dumping individuelle ainsi que d’instituer un droit antidumping individuel pour celui-ci.

196

C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si les quatre producteurs américains échantillonnés avaient un droit à se voir appliquer un droit antidumping individuel en vertu de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base.

197

En l’espèce, il convient de constater que, tout d’abord, alors que la Commission a exclu un producteur initialement échantillonné au motif que le bioéthanol issu de sa production n’avait pas été exporté vers l’Union et que, par conséquent, il n’était pas une source du produit faisant l’objet des pratiques de dumping, elle a néanmoins retenu les quatre producteurs américains échantillonnés au sein de l’échantillon des fournisseurs du produit faisant l’objet du dumping jusqu’à la fin de la procédure administrative.

198

S’agissant de l’existence d’importations dans l’Union de bioéthanol provenant des quatre producteurs américains échantillonnés et dont il a été constaté qu’elles font l’objet d’un dumping et causent un préjudice, il a été mentionné, aux points 93 à 104 ci-dessus, qu’une partie du bioéthanol issu de la production de ceux-ci avait été exportée vers l’Union et que les exportations provenant de cette production étaient, depuis l’entrée en vigueur du règlement attaqué, soumises au droit antidumping qu’il avait institué. De plus, selon le point 338 du rapport de l’organe d’appel du 15 juillet 2011 dans l’affaire « éléments de fixation », les prescriptions formulées par l’article 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC, selon lesquelles les droits antidumping, dont les montants sont appropriés à chaque cas, sont recouvrés sur les importations de quelque source qu’elles proviennent, se rapportent aux exportateurs ou producteurs faisant l’objet de l’enquête, pris individuellement. À cet égard, le considérant 60 du règlement attaqué énonce que l’enquête a porté, d’une part, sur les producteurs de bioéthanol et, d’autre part, sur les négociants/mélangeurs qui exportaient le produit concerné sur le marché de l’Union. Il s’ensuit que les quatre producteurs américains échantillonnés sont des « sources » des importations du produit frappé par le droit antidumping institué par le règlement attaqué au sens de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base ainsi que de l’article 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC.

199

De plus, il y a lieu de faire observer que le Conseil ne conteste pas le fait que les quatre producteurs américains échantillonnés ont coopéré avec les institutions tout au long de l’enquête et qu’il n’y avait ainsi aucune raison pour les exclure de l’échantillon pour défaut de coopération.

200

De surcroît, il importe de relever que les institutions n’ont pas exclu les quatre producteurs américains échantillonnés de l’échantillon du fait qu’ils n’avaient pas la qualité de fournisseur. En revanche, au considérant 63 du règlement attaqué, le Conseil estime que la structure de l’industrie du bioéthanol et la manière dont le produit concerné était fabriqué et vendu sur le marché des États-Unis et exporté vers l’Union rendaient irréalisable l’établissement de marges de dumping individuelles pour les producteurs des États-Unis. Selon lui, il n’était pas en mesure de reconstituer le parcours des ventes individuelles ni de comparer les valeurs normales avec les prix à l’exportation correspondants pour les producteurs échantillonnés, concluant en cela qu’il ne lui était pas possible de déterminer des marges de dumping individuelles en vertu de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base. Il résulte de ce raisonnement que le Conseil souhaitait appliquer le droit antidumping aux produits issus de la production des quatre producteurs américains échantillonnés sans faire de différence entre le cas où ils étaient exportés par les négociants/mélangeurs et le cas où ils étaient exportés par ceux-ci.

201

Il s’ensuit que, en gardant les quatre producteurs américains échantillonnés comme membres de l’échantillon des producteurs et exportateurs américains, la Commission a donc reconnu qu’ils étaient des « fournisseurs » du produit faisant l’objet du dumping et, par conséquent, que le Conseil était, en principe, tenu, en vertu de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base, de calculer une marge de dumping individuelle ainsi que d’instituer des droits antidumping individuels pour chacun d’entre eux.

202

Ce constat n’est pas remis en cause par l’argument du Conseil selon lequel, lorsque les institutions ne sont pas en mesure de reconstituer le parcours de chaque achat ni de comparer les valeurs normales avec les prix à l’exportation correspondants, comme c’est le cas en l’espèce, elles ne sont pas obligées d’instituer des mesures antidumping individuelles pour chaque producteur.

203

D’emblée, il y a lieu de constater qu’il a été jugé dans l’arrêt du 15 novembre 2012, Zhejiang Aokang Shoes/Conseil (C‑247/10 P, EU:C:2012:710, point 33), que l’article 2, paragraphe 7, du règlement de base fait partie des dispositions de ce règlement consacrées à la seule détermination de la valeur normale, tandis que l’article 17 du même règlement, relatif à l’échantillonnage, fait partie des dispositions portant notamment sur les méthodes disponibles pour la détermination de la marge de dumping et que, partant, il s’agit de dispositions ayant une finalité et un contenu différents. À cet égard, il y a lieu de relever que le même principe s’applique, par analogie, à la relation entre, d’une part, l’article 2, paragraphes 8 et 9, du règlement de base portant sur une des valeurs pertinentes pour le calcul de la marge de dumping et, d’autre part, l’article 9, paragraphe 5, du même règlement portant sur la marge de dumping elle-même. Partant, les dispositions du règlement de base consacrées à la détermination de la valeur normale ou du prix à l’exportation ont un contenu et une finalité différents des dispositions portant sur les méthodes disponibles pour la détermination de la marge de dumping, telles que celles prévues à l’article 9, paragraphe 5, et à l’article 17 du même règlement.

204

De plus, il découle également du point 325 du rapport de l’organe d’appel du 15 juillet 2011 dans l’affaire « éléments de fixation » que le fait qu’une autorité doive reconstituer la valeur normale et/ou le prix à l’exportation pour un ou plusieurs exportateurs ou producteurs n’implique pas nécessairement une dérogation à la règle générale relative à la détermination des marges de dumping individuelles et que des marges de dumping fondées sur une valeur normale et un prix à l’exportation construit sur la base des mêmes renseignements pour de nombreux fournisseurs ne sont pas identiques à une marge applicable à l’échelle nationale.

205

À cet égard, il convient de relever que ni l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base ni l’article 6.10 ou l’article 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC ne prévoient que les institutions doivent être en mesure de reconstituer le parcours de chaque achat et de comparer les valeurs normales avec les prix à l’exportation correspondants afin d’être obligées de calculer une marge de dumping individuelle et d’imposer un droit antidumping individuel pour chaque fournisseur. De telles difficultés n’ont donc aucune incidence sur la question de savoir si un droit antidumping individuel doit être imposé et il convient de faire observer qu’il existe, dans le cadre du règlement de base, d’autres instruments pour remédier à une telle situation.

206

Toutefois, lorsque les institutions rencontrent des difficultés pour déterminer la valeur normale ou le prix à l’exportation pour certains producteurs ou exportateurs, l’article 2, paragraphes 3 et 9, du règlement de base définit les règles relatives à la possibilité de reconstituer ces valeurs.

207

En effet, l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base prévoit que, lorsqu’il n’y a pas de prix à l’exportation ou lorsqu’il apparaît que le prix à l’exportation n’est pas fiable en raison de l’existence d’une association ou d’un arrangement de compensation entre l’exportateur et l’importateur ou un tiers, le prix à l’exportation peut être construit sur la base du prix auquel les produits importés sont revendus pour la première fois à un acheteur indépendant ou, si les produits ne sont pas revendus à un acheteur indépendant ou ne sont pas revendus dans l’état où ils ont été importés, sur toute autre base raisonnable. Dans de tels cas, des ajustements sont opérés pour tenir compte de tous les frais, y compris les droits et les taxes, intervenus entre l’importation et la revente, et une marge bénéficiaire, afin d’établir un prix à l’exportation fiable au niveau de la frontière de l’Union.

208

En outre et sur un autre plan, l’article 18, paragraphes 1 et 3, du règlement de base prévoit les conditions dans lesquelles les institutions peuvent, respectivement, recourir aux données disponibles lorsqu’une partie intéressée ne fournit pas les informations nécessaires ou lorsqu’elle fournit les informations qui ne sont pas les meilleures à tous égards. Il a été notamment constaté aux points 7.215 à 7.216 du rapport du groupe spécial du 22 avril 2003 (WT/DS241/R) dans l’affaire intitulée « Argentine – Droits antidumping définitifs visant la viande de volaille en provenance du Brésil » que le fait que l’autorité chargée de l’enquête reçoive des renseignements qui ne sont pas utilisables ou fiables ne devrait pas empêcher le calcul d’une marge de dumping individuelle pour un exportateur, dans la mesure où l’accord antidumping de l’OMC autorise expressément les autorités chargées de l’enquête à compléter les données ayant trait à un exportateur particulier afin de déterminer une marge de dumping si les renseignements communiqués ne sont pas fiables ou si les renseignements nécessaires ne sont tout simplement pas fournis.

209

En l’espèce, s’agissant de la valeur normale des quatre producteurs échantillonnés, il ressort du point 45 du document d’information provisoire que la Commission elle-même a expliqué être en mesure de reconstituer, en application de l’article 2, paragraphe 3, du règlement de base, la valeur normale de ceux-ci sur le fondement du coût de production dans le pays d’origine, majoré d’un montant raisonnable pour les frais de vente, les dépenses administratives et autres frais généraux et d’une marge bénéficiaire raisonnable. Le Conseil ne conteste pas ce constat.

210

Dans la mesure où le Conseil considère, au considérant 76 du règlement attaqué, qu’il n’était pas possible d’établir de façon fiable un prix à l’exportation et une marge de dumping pour les producteurs américains échantillonnés, il y a lieu de relever que l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base permet la reconstitution d’un prix à l’exportation lorsqu’il n’y a pas de prix à l’exportation pour un opérateur visé par l’enquête. En effet, cette disposition permet, ainsi que cela a été exposé au point 207 ci-dessus, une reconstruction du prix à l’exportation sur le fondement du prix auquel les produits importés sont revendus pour la première fois à un acheteur indépendant ou sur toute autre base raisonnable et en opérant des ajustements appropriés. À cet égard, il convient de rappeler qu’il découle de la jurisprudence exposée au point 203 ci-dessus que, alors que l’article 2, paragraphes 8 et 9, du règlement de base établit, de façon exhaustive, les méthodes possibles pour la détermination du prix à l’exportation, une difficulté dans la détermination de ce dernier n’a aucune incidence sur la question de savoir s’il existe une obligation d’appliquer un droit antidumping individuel à certains opérateurs.

211

Il convient donc de rejeter l’argument du Conseil selon lequel les institutions n’étaient pas obligées d’instituer des mesures antidumping individuelles pour chaque producteur échantillonné en l’espèce.

212

Au regard du constat exposé au point 201 ci-dessus, il convient donc, par la suite, d’examiner si le Conseil pouvait invoquer une exception à l’obligation visant à ce que soit déterminée une marge de dumping individuelle pour les quatre producteurs américains échantillonnés en l’espèce.

Sur la question de savoir s’il était irréalisable d’instituer des droits antidumping individuels en l’espèce

213

Le litige entre les parties se focalise ensuite sur l’interprétation du terme « irréalisable » figurant à l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base.

214

Selon les requérantes, le terme « irréalisable » doit, en substance, être interprété en conformité avec les articles 6.10 et 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC et avec les termes du rapport de l’organe d’appel du 15 juillet 2011 dans l’affaire « éléments de fixation ».

215

Le Conseil estime que l’article 9, paragraphe 5, deuxième alinéa, du règlement de base a une portée plus générale que lesdits articles de l’accord antidumping de l’OMC, au motif qu’il ne précise pas les circonstances dans lesquelles il est considéré comme « irréalisable » d’appliquer des droits individuels. Il rappelle à cet égard le principe selon lequel les instances de l’Union doivent interpréter dans la mesure du possible les textes de l’Union à la lumière du droit international. Ainsi, le Conseil estime, en substance, que cette différence justifie à elle seule une interprétation différente du terme « irréalisable » dans le cadre de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base.

216

En premier lieu, il convient d’examiner si les articles 6.10 et 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC permettent de faire la place à une exception à l’obligation de déterminer une marge de dumping individuelle pour chaque exportateur connu ou producteur concerné qui pourrait justifier l’institution d’un droit antidumping à l’échelle nationale en l’espèce.

217

S’agissant de l’article 6.10 de l’accord antidumping de l’OMC, les points 316 à 318 du rapport de l’organe d’appel du 15 juillet 2011 dans l’affaire « éléments de fixation » énoncent que la première phrase de celui-ci, selon laquelle les autorités détermineront une marge de dumping individuelle pour chaque exportateur connu ou producteur concerné, énonce une règle impérative et non une préférence. Ils énoncent également que cette obligation n’est pas absolue et qu’il peut y avoir des exceptions. L’échantillonnage serait la seule exception à la détermination de marges de dumping individuelles pour chaque exportateur connu ou chaque producteur concerné, qui est expressément prévue à l’article 6.10 dudit accord. En effet, la deuxième phrase dudit article prévoirait une exception dans les cas où le nombre d’exportateurs, de producteurs, d’importateurs ou de types de produits visés est si important que l’établissement de telles déterminations est irréalisable. Dans ces cas, les autorités pourraient limiter leur examen soit à un nombre raisonnable de parties intéressées ou de produits, en utilisant des échantillons qui seraient valables d’un point de vue statistique, soit au plus grand pourcentage du volume des exportations en provenance du pays en question, sur lequel l’enquête pourrait raisonnablement porter.

218

Selon le point 320 du rapport de l’organe d’appel du 15 juillet 2011 dans l’affaire « éléments de fixation », les termes « en règle générale […] détermineront », figurant à l’article 6.10 de l’accord antidumping de l’OMC, ont pour objectif de ne pas exprimer une obligation qui serait contraire à d’autres dispositions du même accord, permettant de déroger à la règle de la détermination de marges de dumping individuelles, en dehors de l’exception de l’échantillonnage. Ces exceptions devraient être prévues dans les accords visés par le mémorandum d’accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends (ci-après les « accords visés »), de façon à éviter le contournement de l’obligation visant à ce que soient déterminées des marges de dumping individuelles. Or, les membres de l’OMC n’auraient pas une possibilité illimitée de créer des exceptions à l’article 6.10 de l’accord antidumping de l’OMC.

219

Au point 323 du rapport de l’organe d’appel du 15 juillet 2011 dans l’affaire « éléments de fixation », l’organe d’appel a rejeté l’argument selon lequel l’attribution de la marge de dumping du producteur au négociant qui exporte le produit serait une exception. En effet, la référence aux « exportateurs ou producteurs », figurant à l’article 6.10 de l’accord antidumping de l’OMC, permettrait aux autorités de ne pas déterminer une marge de dumping séparée pour le producteur et pour l’exportateur du même produit, mais de déterminer une seule marge pour les deux. Cela constituerait une application de l’obligation de déterminer des marges de dumping individuelles.

220

Selon le point 327 du rapport de l’organe d’appel du 15 juillet 2011 dans l’affaire « éléments de fixation », toute exception à la règle générale énoncée à la première phrase de l’article 6.10 de l’accord antidumping de l’OMC doit donc être prévue dans les accords visés.

221

Enfin, au point 328 du rapport de l’organe d’appel du 15 juillet 2011 dans l’affaire « éléments de fixation », il est constaté que les accords de l’OMC ne prévoient aucune exception, telle que celle mentionnée à l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base, concernant les producteurs-exportateurs individuels d’un pays n’ayant pas une économie de marché, auxquels s’applique l’article 2, paragraphe 7, sous a), du même règlement et qui sont soumis à un droit antidumping à l’échelle nationale, à moins que ces exportateurs puissent démontrer qu’ils satisfont aux conditions permettant de bénéficier d’un traitement individuel.

222

En ce qui concerne l’article 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC, il est expliqué au point 344 du rapport de l’organe d’appel du 15 juillet 2011 dans l’affaire « éléments de fixation » qu’il y a un fort parallélisme entre celui-ci et l’article 6.10 de l’accord antidumping de l’OMC, en ce que ce dernier prescrit la détermination de marges de dumping individuelles, ce qui a pour conséquence d’obliger les autorités en cause à imposer des droits antidumping sur une base individuelle telle qu’elle est prévue à l’article 9.2 du même accord. En outre, l’organe d’appel constate que lesdits articles utilisent à la fois les mêmes termes « irréalisable » ou « pas réalisable » pour décrire les cas où l’exception s’applique, indiquant ainsi que les deux exceptions se rapportent à la situation dans laquelle une autorité détermine des marges de dumping en utilisant un échantillon. Cependant, l’organe d’appel de l’OMC a également observé que la question posée devant lui ne concernait ni l’étendue de l’exception prévue à l’article 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC, ni la question de savoir si cette exception et celle prévue à l’article 6.10 du même accord se chevauchaient exactement.

223

Toutefois, il est conclu, au point 354 du rapport de l’organe d’appel du 15 juillet 2011 dans l’affaire « éléments de fixation », que l’article 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC oblige les autorités à préciser les droits imposés à chaque fournisseur, sauf lorsque cela est irréalisable, lorsque plusieurs fournisseurs sont concernés.

224

Enfin, selon le point 376 du rapport de l’organe d’appel du 15 juillet 2011 dans l’affaire « éléments de fixation », les articles 6.10 et 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC n’empêchent pas que l’autorité chargée de l’enquête détermine une marge de dumping unique et un droit de dumping unique pour un certain nombre d’exportateurs si elle établit qu’ils constituent une entité unique aux fins de l’application desdits articles.

225

Dès lors, il ressort de l’examen du rapport de l’organe d’appel du 15 juillet 2011 dans l’affaire « éléments de fixation » que, lorsque l’autorité a recours à l’échantillonnage comme en l’espèce, l’accord antidumping établit l’obligation de déterminer des marges de dumping individuelles et d’instituer des droits antidumping individuels pour chaque fournisseur coopérant à l’enquête et que cette obligation a, en principe, pour exceptions, premièrement, le cas des producteurs ou exportateurs non inclus dans l’échantillon, sauf ceux visés à l’article 6.10.2 de l’accord antidumping de l’OMC, et, deuxièmement, le cas des opérateurs constituant une entité unique. Toutefois, il ne découle pas de l’accord antidumping de l’OMC qu’il existe une exception à l’obligation d’instituer un droit antidumping individuel à un producteur échantillonné qui a coopéré à l’enquête lorsque les institutions estiment ne pas être en mesure d’établir pour celui-ci un prix à l’exportation individuel.

226

En deuxième lieu, il y a lieu d’examiner si ces constatations du rapport de l’organe d’appel du 15 juillet 2011 dans l’affaire « éléments de fixation » portant sur l’interprétation des articles 6.10 et 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC s’appliquent également dans la mesure où le Conseil applique l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base.

227

S’agissant de l’argument du Conseil selon lequel l’obligation d’interpréter le règlement de base en tenant compte de l’accord antidumping de l’OMC est limitée au motif que les libellés des dispositions en cause seraient différents, premièrement, il y a lieu de rappeler que l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base ainsi que les articles 6.10 et 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC utilisent les termes « irréalisable » ou « pas réalisable », qui sont synonymes. De plus, il convient de faire observer qu’il n’y a rien dans le libellé de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base qui s’oppose à une interprétation du terme « irréalisable » conformément aux articles 6.10 et 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC. En outre, le simple fait que l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base ne fournit pas de précisions à l’égard du terme « irréalisable » ne permet pas de conclure, ainsi que le Conseil l’invoque, que ladite disposition prévoit ainsi une exception d’une portée plus large que celle prévue dans les dispositions de l’accord antidumping de l’OMC.

228

Deuxièmement, il y a lieu de rappeler qu’il ressort clairement du libellé de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base que la détermination d’une marge de dumping et l’imposition d’un droit antidumping à l’échelle nationale est une exception à la règle générale. Une interprétation « plus générale » du terme « irréalisable » telle que proposée par le Conseil accorderait à celui-ci une marge d’appréciation extrêmement large quant aux possibilités de renoncer à l’institution de droits antidumping individuels. Une telle interprétation irait à l’encontre de l’objectif du législateur de mettre en œuvre les recommandations et décisions de l’ORD relatives à l’affaire « éléments de fixation », d’une manière qui respecterait ses obligations dans le cadre de l’OMC (voir point 179 ci-dessus).

229

En effet, il ressort des considérants du règlement no 765/2012 que le législateur de l’Union voulait mettre en œuvre la décision de l’organe d’appel de l’OMC dans ladite affaire d’une manière intégrale. Spécifiquement, par l’article 1er du règlement no 765/2012, le législateur de l’Union a supprimé, dans le premier alinéa de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base, la référence à l’article 2, paragraphe 7, sous a), dudit règlement ainsi que le second alinéa, qui précisait les conditions dans lesquelles les producteurs-exportateurs individuels de pays n’ayant pas une économie de marché pouvaient démontrer qu’ils satisfaisaient aux conditions permettant de bénéficier d’un traitement individuel. De surcroît, il découle du considérant 2 du règlement no 765/2012 que le législateur de l’Union a ajouté un second alinéa nouveau à l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base afin d’inclure les précisions apportées par l’organe d’appel de l’OMC sur les circonstances dans lesquelles les autorités pouvaient déterminer une marge de dumping et un droit de dumping uniques pour plusieurs exportateurs constituant une entité unique.

230

D’ailleurs, ainsi que cela a été constaté au point 182 ci-dessus, les modifications faites à l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base ne portent pas, en substance, sur la partie qui est pertinente en l’espèce et selon laquelle le règlement imposant le droit précise le montant du droit imposé à chaque fournisseur ou, si cela est irréalisable, le nom du pays fournisseur concerné.

231

Il s’ensuit que le Conseil estime à tort que les libellés de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base ainsi que des articles 6.10 et 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC, dans la mesure où ils sont pertinents en l’espèce, sont substantiellement différents. Dès lors, l’argument du Conseil, selon lequel le terme « irréalisable », mentionné à l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base, aurait une portée générale, doit être rejeté.

232

Il résulte de ce qui précède qu’il convient d’interpréter le terme « irréalisable » mentionné à l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base conformément au terme analogue utilisé dans les articles 6.10 et 9.2 de l’accord antidumping de l’OMC. Partant, lorsque l’autorité a recours à l’échantillonnage, le terme « irréalisable » utilisé à l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base admet, en principe, deux exceptions à la détermination de marges de dumping individuelles ainsi qu’à l’institution de droits antidumping individuels pour les opérateurs ayant coopéré à l’enquête, à savoir, premièrement, le cas des producteurs ou exportateurs non inclus dans l’échantillon, sauf ceux pour lesquels l’article 17, paragraphe 3, du règlement de base prévoit une marge de dumping individuelle, et, deuxièmement, le cas des opérateurs constituant une entité unique. En d’autres termes, dans la mesure où les institutions ont eu recours à l’échantillonnage, comme en l’espèce, en principe, une exception à la détermination de marges de dumping individuelles ainsi qu’à l’institution de droits antidumping individuels n’est possible que pour les entreprises qui ne font pas partie d’un échantillon et qui n’ont pas autrement de droit à avoir leur propre droit antidumping individuel. En particulier, l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base ne permet aucune exception à l’obligation d’instituer un droit antidumping individuel à un producteur échantillonné qui a coopéré à l’enquête, lorsque les institutions estiment ne pas être en mesure d’établir pour celui-ci un prix à l’exportation individuel.

233

Dès lors, il découle de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base que, lorsque des producteurs et/ou des exportateurs font partie d’un échantillon, les institutions sont tenues de préciser les droits antidumping dus par chaque fournisseur.

234

En troisième lieu, c’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si, en l’espèce, le Conseil pouvait à bon droit recourir à une exception à l’obligation de déterminer une marge de dumping individuelle pour chaque exportateur connu ou producteur concerné, qui pourrait justifier l’institution d’un droit antidumping à l’échelle nationale.

235

En l’espèce, il ressort des considérants 6 à 10 du règlement attaqué que, en raison du nombre élevé de producteurs-exportateurs aux États-Unis, la Commission a décidé de recourir à un échantillonnage conformément à l’article 17 du règlement de base.

236

Selon le considérant 64 du règlement attaqué, la marge de dumping a été établie à l’échelle nationale pour les États-Unis. Par conséquent, le règlement attaqué impose un droit antidumping à l’échelle nationale à un taux de 62,30 euros par tonne nette, applicable au prorata de la teneur totale, en poids, de bioéthanol.

237

Au considérant 63 du règlement attaqué, le Conseil justifie la détermination d’une marge de dumping à l’échelle nationale en l’espèce en considérant que la structure de l’industrie du bioéthanol et la manière dont le produit en question était fabriqué et vendu sur le marché des États-Unis et exporté vers l’Union rendaient irréalisable l’établissement de marges de dumping individuelles pour les producteurs des États-Unis. Selon lui, les producteurs de l’échantillon américain n’ont pas exporté le produit concerné vers l’Union et les négociants/mélangeurs qui ont été soumis à l’enquête se procuraient le bioéthanol auprès de divers producteurs, le mélangeaient et le vendaient, notamment à l’exportation vers l’Union. Dès lors, le Conseil estime qu’il n’était pas possible de reconstituer le parcours de tous les achats individuellement et de comparer les valeurs normales avec les prix à l’exportation correspondants, pas plus qu’il n’est possible d’identifier le producteur au moment de l’exportation vers l’Union.

238

En substance, le Conseil estime donc qu’il ne pouvait pas, en vertu de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base, déterminer des marges de dumping individuelles au motif qu’il n’était pas possible d’établir de façon fiable un prix à l’exportation et une marge de dumping pour les quatre producteurs américains échantillonnés, étant donné qu’ils n’avaient effectué aucune exportation vers l’Union du produit concerné pendant la période d’enquête, qu’il n’était donc pas en mesure de reconstituer le parcours de leurs produits exportés vers l’Union et qu’ils n’avaient généralement aucune idée de la date des exportations ni du prix payé ou à payer par les importateurs de l’Union (voir considérant 76 du règlement attaqué).

239

À cet égard, d’une part, il y a lieu de relever que le Conseil fonde donc l’application de l’exception à la règle consistant à déterminer les marges de dumping individuelles et à instituer les droits antidumping individuels sur des raisons autres que l’exception concernant les producteurs ou exportateurs non inclus dans l’échantillon lorsque l’autorité a recours à l’échantillonnage ou celle concernant les opérateurs constituant une entité unique (voir points 225 et 232 ci-dessus).

240

D’autre part, il importe de constater que le Conseil n’invoque pas que l’exception qu’il a appliquée aurait été fondée sur une autre exception découlant des accords visés, auxquels il est fait référence aux points 218 et 220 ci-dessus.

241

Dès lors, le Conseil a conclu à tort que l’institution des droits antidumping individuels pour les membres de l’échantillon des exportateurs américains était « irréalisable » au sens de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base.

242

En effet, s’agissant de la possibilité de calculer des marges de dumping individuelles, il a été expliqué aux points 202 à 211 ci-dessus que, lorsque les institutions rencontraient des difficultés pour déterminer la valeur normale et le prix à l’exportation pour certains producteurs ou exportateurs, l’article 2, paragraphes 3 et 9, du règlement de base définissait les règles permettant de reconstituer ces valeurs.

243

De plus, en ce qui concerne les considérations selon lesquelles il n’était pas possible de reconstituer le parcours des produits des producteurs échantillonnés qui avaient été exportés vers l’Union et selon lesquelles les producteurs échantillonnés n’avaient généralement aucune idée de la date des exportations ni du prix payé ou à payer par les importateurs de l’Union, il suffit de constater que la Commission aurait pu, en vertu de sa large marge d’appréciation, exclure les quatre producteurs américains échantillonnés de l’échantillon des producteurs et exportateurs, au motif qu’ils n’étaient pas des fournisseurs impliqués dans l’exportation du bioéthanol vers l’Union, étant donné que, selon elle et selon le Conseil, ils n’étaient pas identifiables au moment de l’exportation du bioéthanol vers l’Union. Or, la Commission les a gardés dans ledit échantillon tout au long de l’enquête.

244

Dès lors, le fait que les institutions considéraient avoir des difficultés pour reconstituer le parcours des ventes individuelles ou pour comparer les valeurs normales avec les prix à l’exportation correspondants, pour les producteurs échantillonnés, ne permettait pas de considérer que, en l’espèce, l’institution des droits antidumping individuels pour les membres de l’échantillon des exportateurs américains était « irréalisable » au sens de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base.

245

Il y a lieu de conclure que le règlement attaqué viole l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base au motif qu’il institue un droit antidumping à l’échelle nationale en ce qui concerne les quatre producteurs américains échantillonnés.

246

Il résulte de ce qui précède que la deuxième branche du premier moyen doit être accueillie et, partant, le premier moyen dans son ensemble, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres branches dudit moyen ainsi que les arguments soulevés dans le cadre de la deuxième branche, par lesquels les requérantes invoquent, de façon générique, des violations des principes de sécurité juridique et de confiance légitime ainsi que de l’obligation de motivation.

Sur le dixième moyen, tiré de la violation de l’article 6, paragraphe 7, de l’article 19, paragraphes 1 et 2, de l’article 20, paragraphes 2, 4 et 5, du règlement de base ainsi que des droits de la défense, des principes de non-discrimination et de bonne administration et de l’absence de motivation suffisante

247

Dans la mesure où le présent recours est recevable au motif qu’il a été introduit par les requérantes à titre individuel, il convient d’examiner également le bien-fondé du dixième moyen.

248

Dans le cadre du dixième moyen, les requérantes font valoir, en substance, que les institutions auraient commis plusieurs irrégularités procédurales desquelles ont résulté des violations des droits procéduraux.

249

Le dixième moyen se divise en quatre branches, tirées, respectivement, la première, de la violation de l’article 20, paragraphes 2 et 4, du règlement de base et d’une insuffisance de motivation, la deuxième, de la violation de l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base, la troisième, de la violation de l’article 6, paragraphe 7, et de l’article 19, paragraphes 1 et 2, du même règlement ainsi que des droits de la défense et, la quatrième, de la violation de l’article 20, paragraphe 5, dudit règlement ainsi que des droits de la défense.

Observations liminaires

250

Il ressort d’une jurisprudence constante que le respect des droits de la défense dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief constitue un principe fondamental du droit de l’Union qui doit être assuré, même en l’absence de toute réglementation concernant la procédure. Ce principe exige que les destinataires de décisions qui affectent de manière sensible les intérêts de ceux-ci soient mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue (voir arrêt du 1er octobre 2009, Foshan Shunde Yongjian Housewares & Hardware/Conseil, C‑141/08 P, Rec, EU:C:2009:598, point 83 et jurisprudence citée).

251

À cet égard, il y a lieu de souligner que le respect des droits de la défense revêt une importance capitale dans les procédures telles que celles suivies en l’espèce (voir arrêt Foshan Shunde Yongjian Housewares & Hardware/Conseil, point 250 supra, EU:C:2009:598, point 93 et jurisprudence citée).

252

Il y a violation des droits de la défense lorsqu’il existe une possibilité que, en raison d’une irrégularité commise par la Commission, la procédure administrative menée par elle aurait pu aboutir à un résultat différent. Une requérante établit qu’une telle violation a eu lieu lorsqu’elle démontre à suffisance de droit non pas que la décision attaquée aurait eu un contenu différent, mais bien qu’elle aurait pu mieux assurer sa défense en l’absence d’irrégularité, par exemple en raison du fait qu’elle aurait pu utiliser pour sa défense des documents dont l’accès lui a été refusé lors de la procédure administrative (voir, en ce sens, arrêt Foshan Shunde Yongjian Housewares & Hardware/Conseil, point 250 supra, EU:C:2009:598, point 94 et jurisprudence citée).

253

De plus, dès lors qu’un règlement instituant des droits antidumping définitifs entre dans le cadre systématique d’un ensemble de mesures, il ne saurait être exigé que sa motivation spécifie les différents éléments de fait et de droit, parfois très nombreux et complexes, qui en font l’objet, ni que les institutions prennent position sur tous les arguments invoqués par les intéressés. Il suffit au contraire que l’auteur de l’acte expose les faits et considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie du règlement contesté (voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2010, Whirlpool Europe/Conseil, T‑314/06, Rec, EU:T:2010:390, point 114).

254

Toutefois, il y a lieu de relever qu’une requête doit, aux termes de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du 2 mai 1991, indiquer l’objet du litige et un exposé sommaire des moyens invoqués. Selon une jurisprudence constante, ces éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autres informations. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il est nécessaire, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci est fondé ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (voir, en ce sens, ordonnance du 11 janvier 2013, Charron Inox et Almet/Commission et Conseil, T‑445/11 et T‑88/12, EU:T:2013:4, point 57).

255

C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les arguments des requérantes sous les quatre branches du dixième moyen.

Sur la première branche du dixième moyen, tirée de la nature incomplète du document d’information définitif et de la violation de l’article 20, paragraphes 2 et 4, du règlement de base, ainsi que des erreurs de motivation dans le règlement attaqué

256

Les requérantes font valoir que le document d’information définitif ne contenait pas suffisamment d’informations sur divers éléments concernant le calcul de la marge de dumping et du préjudice, certains ajustements, l’industrie de l’Union et la modification de la période de validité des mesures imposées à cinq ans. Selon les requérantes, il en résulte une violation de l’article 20, paragraphes 2 et 4, du règlement de base et le règlement attaqué ne serait donc pas correctement motivé. À cet égard, les requérantes soulèvent sept griefs distincts.

257

Le Conseil conteste ces arguments.

258

D’emblée, il convient de faire observer que, selon l’intitulé du dixième moyen dans la requête, les requérantes invoquent « des nombreuses violations des droits de la défense des requérantes et de leurs membres ». Or, s’agissant de la première branche du présent moyen, il y a lieu de constater qu’il ressort du point 152 de la requête qu’elle concerne « le document d’information définitif qu[e les requérantes] ont reçu ». De plus, les requérantes ne constatent nullement dans la requête que la présente branche concernerait la communication du document d’information définitif à une autre partie à la procédure administrative. Il s’ensuit que la présente branche doit être interprétée comme portant sur de prétendues violations des droits procéduraux des requérantes en tant que parties intéressées lors de la procédure antidumping.

259

Il y a lieu de constater que l’article 20, paragraphe 2, du règlement de base prévoit, notamment, que les plaignants, importateurs et exportateurs ainsi que leurs associations représentatives et représentants du pays exportateur peuvent demander une information finale sur les faits et considérations essentiels sur la base desquels il est envisagé de recommander l’institution de mesures définitives. Selon l’article 20, paragraphe 4, du même règlement, l’information finale doit être donnée par écrit et, compte tenu de la nécessité de protéger les informations confidentielles, dès que possible et, normalement, un mois au plus tard avant la décision définitive ou la transmission par la Commission d’une proposition d’une décision finale. Il prévoit également que, lorsque la Commission n’est pas en mesure de communiquer certains faits ou considérations à ce moment-là, cela doit être fait dès que possible par la suite.

260

Par le premier grief, les requérantes font valoir que le document d’information définitif n’a fourni aucune information à propos du calcul de la marge de dumping et de préjudice à l’échelle nationale, en dehors des quelques déclarations générales. Cette absence aurait mis les requérantes « et leurs membres » dans l’impossibilité de fournir des observations quelconques sur l’absence d’erreurs administratives dans les calculs, sur l’absence d’erreurs méthodologiques dans la méthodologie appliquée, sur la question de savoir si les prix de vente nationaux avaient été ramenés au niveau départ-usine et sur la question de savoir si les ajustements nécessaires avaient été effectués.

261

Premièrement, il convient de constater, en ce qui concerne la marge de préjudice, que le premier grief est contredit par le deuxième grief (voir points 268 à 270 ci-après) selon lequel la Commission aurait fourni « une note explicative et des tableaux Excel pour étayer le calcul de la marge de préjudice ». Dès lors, il convient d’écarter le premier grief dans la mesure où il concerne des informations relatives à la marge du préjudice.

262

Deuxièmement, s’agissant de la marge de dumping, il y a lieu de faire observer que, d’une part, les requérantes n’identifient pas dans leurs écritures les « quelques déclarations générales » relatives au calcul de la marge de dumping dans le document d’information définitif auxquelles elles se réfèrent. D’autre part, les requérantes n’expliquent pas pour quelles raisons elles estiment que ces déclarations sont inadéquates et elles n’identifient pas les informations dont elles auraient eu, selon elles, besoin. En l’absence de telles précisions, il convient, conformément à la jurisprudence citée au point 252 ci-dessus, ainsi que en vertu de celle citée au point 254 ci-dessus, de rejeter le premier grief comme étant irrecevable.

263

En toute hypothèse, quant à la marge de dumping, il convient de rappeler que, selon les considérations portant sur le dumping figurant aux points 60 à 74 du document d’information définitif, qui correspondent, en substance, aux considérants 60 à 62, 64 à 68, 72, 74 et 75 ainsi qu’à des parties des considérants 70, 73 et 76 du règlement attaqué, celle-ci a été déterminée en l’espèce à partir de données fournies par les négociants/mélangeurs indépendants, à savoir leurs prix de ventes intérieures pour la valeur normale et leurs prix aux clients dans l’Union pour le prix à l’exportation. Partant, ces informations constituent généralement, comme le relève à bon droit le Conseil, des données confidentielles des négociants/mélangeurs qui pouvaient, en l’absence de circonstances particulières, ne pas être communiquées aux parties intéressées telles que les requérantes qui représentaient les intérêts de leurs fournisseurs.

264

De même, force est de relever que les requérantes n’établissent pas comment elles auraient pu mieux assurer leur défense en l’absence de cette irrégularité au sens de la jurisprudence citée au point 252 ci-dessus. En effet, elles n’avancent aucun argument quant à une erreur de fait ou de droit commise par les institutions, mais elles se limitent à constater leur impossibilité de fournir des observations sur des situations hypothétiques, telles que celles relatives à l’absence d’erreurs administratives dans les calculs et d’erreurs méthodologiques dans la méthodologie appliquée, et sur la question de savoir si les ajustements nécessaires avaient été effectués. De plus, il convient de constater que les requérantes n’expliquent aucunement comment elles auraient été en mesure de fournir des observations pertinentes à l’égard des informations non confidentielles relatives aux prix des négociants/mélangeurs en question et n’expliquent pas davantage les ajustements qui, selon elles, auraient pu être nécessaires.

265

En ce qui concerne la prétendue impossibilité de fournir des observations « sur la question de savoir si les prix de vente nationaux avaient été ramenés au niveau départ-usine », les requérantes ne précisent pas le calcul auquel elles se réfèrent. Cet argument n’est pas, par conséquent, soulevé d’une façon cohérente et compréhensible au sens de la jurisprudence exposée au point 254 ci-dessus et doit être rejeté comme étant irrecevable. En toute hypothèse, il convient de constater qu’il ressort du point 94 du document d’information définitif et du considérant 97 du règlement attaqué que les prix de vente moyens pondérés par type de produit facturé par les producteurs de l’Union inclus dans l’échantillon à des clients indépendants sur le marché de l’Union ont bien été ajustés au niveau départ-usine.

266

Troisièmement, dans la mesure où les requérantes affirment que « leurs membres » étaient empêchés de fournir certaines observations, il suffit de faire observer que les requérantes n’expliquent pas dans leurs écritures quels sont ceux qui étaient concernés par leur argument. Partant, il ne ressort pas de façon compréhensible, au sens de la jurisprudence exposée au point 254 ci-dessus, des écritures des requérantes quels sont les membres auxquels elles se réfèrent et il convient donc de rejeter le premier grief comme étant irrecevable en tant qu’il concerne une violation des droits procéduraux des membres des requérantes lors de la procédure antidumping.

267

Il s’ensuit que le premier grief doit être rejeté dans son ensemble.

268

Par le deuxième grief, les requérantes font valoir que, en ce qui concerne les deux négociants/mélangeurs qui ont coopéré à l’enquête, la Commission n’a fourni ni une note explicative sur la méthode utilisée pour calculer la marge de dumping ni une version électronique des tableaux « Excel » étayant le calcul de la marge de dumping, ce qui « rendait la compréhension du résultat final encore plus difficile ».

269

Il convient de noter que les requérantes n’expliquent pas dans quelle mesure, en l’absence de l’irrégularité alléguée, la procédure antidumping aurait pu aboutir à un résultat différent, contrairement à ce qui est requis par la jurisprudence citée au point 252 ci-dessus.

270

En tout état de cause et en toute hypothèse, premièrement, il y a lieu de relever que le Conseil rétorque que les deux négociants/mélangeurs qui ont coopéré à l’enquête ont bien reçu le calcul de la marge de dumping ainsi qu’un document d’information supplémentaire à la suite de leurs observations sur le document d’information définitif. Le Conseil maintient qu’il ne pouvait pas verser ces documents au dossier non confidentiel du fait qu’ils contenaient des informations qui ne pouvaient pas être communiquées aux requérantes pour des raisons de confidentialité. Les requérantes ne contestent pas cet argument. Deuxièmement, s’agissant de l’absence alléguée d’explication concernant la méthode utilisée pour calculer la marge de dumping, les requérantes n’indiquent pas en quoi elles considèrent que les explications données aux points 72 et 73 du document d’information définitif, telles que reprises aux considérants 74 et 75 du règlement attaqué, ne sont pas adéquates. Troisièmement, en ce qui concerne l’absence de tableaux en format « Excel », il convient de constater que les institutions ne sont aucunement tenues de fournir aux parties intéressées une « version électronique des tableaux Excel étayant le calcul de la marge de dumping ».

271

Il s’ensuit que le deuxième grief doit être rejeté.

272

Par le troisième grief, les requérantes affirment que la Commission n’a pas examiné, dans le document d’information définitif les arguments avancés par les requérantes et leurs membres dans leurs observations sur le document d’information provisoire, notamment « à propos des motifs spécifiques sur le fondement desquels elle a conclu que les sociétés de l’échantillon n’avaient pas de prix à l’exportation, malgré les preuves fournies par plusieurs des membres des requérantes ».

273

En premier lieu, s’agissant des arguments des requérantes dans leurs observations données en réponse au document d’information provisoire concernant l’absence d’un prix à l’exportation des sociétés de l’échantillon, d’une part, il y a lieu de relever que l’information finale, au sens de l’article 20, paragraphe 2, du règlement de base, porte sur les faits et considérations essentiels sur la base desquels il est envisagé de recommander l’institution de mesures définitives. Il s’ensuit qu’il ne découle de cette disposition aucune obligation pour la Commission d’examiner, dans le document d’information définitif, les arguments avancés par une partie intéressée dans ses observations sur le document d’information provisoire, si elle ne considère pas que ces arguments portent sur les faits et considérations essentiels sur la base desquels il est envisagé de recommander l’institution de mesures définitives.

274

D’autre part, en l’espèce, il importe de relever que la Commission a fait observer, aux points 62 et 68 du document d’information définitif, qui correspondent en substance aux considérants 63 et 69 du règlement attaqué, que les producteurs américains échantillonnés n’avaient pas exporté le produit concerné vers l’Union, qu’il n’était pas possible de reconstituer le parcours de tous les achats individuellement et de comparer les valeurs normales avec les prix à l’exportation correspondants, qu’il n’était pas possible d’identifier le producteur au moment de l’exportation vers l’Union et que ces producteurs n’avaient pas connaissance du niveau des prix à l’exportation vers l’Union. Sur ce fondement, elle a rejeté l’argument de certains producteurs américains selon lequel le prix de vente pratiqué par les producteurs des États-Unis à l’égard des négociants/mélangeurs indépendants de leur pays pourrait servir comme prix à l’exportation. Les requérantes n’expliquent pas en quoi ces constatations seraient inadéquates.

275

En second lieu, en ce qui concerne les arguments selon lesquels la Commission a omis d’examiner dans le document d’information définitif les arguments avancés par les requérantes et leurs membres dans leurs observations sur le document d’information provisoire et selon lequel elle n’a pas pris en compte les « preuves fournies par plusieurs des membres des requérantes », il convient de constater qu’elles n’identifient pas quels arguments n’auraient pas été examinés par la Commission dans le document d’information définitif, quels sont, parmi leurs membres, ceux par qui ces arguments auraient été fournis ou quelles preuves n’auraient pas été prises en compte par la Commission. Ces arguments ne remplissent donc pas les conditions prévues à l’article 44, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure du 2 mai 1991 qui exige que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels le recours est fondé ressortent d’une façon cohérente et compréhensible du texte de la requête elle-même (voir point 254 ci-dessus) et doivent, par conséquent, être rejetés comme étant irrecevables.

276

Partant, il convient de rejeter le troisième grief dans son ensemble.

277

Par le quatrième grief, les requérantes font valoir que le document d’information définitif n’a fourni aucune explication sur l’absence d’ajustement du volume des importations américaines en fonction du pourcentage du carburant, alors que cet ajustement avait été effectué pour les importations provenant de tous les autres pays.

278

À cet égard, il convient de relever que les requérantes n’expliquent pas, dans le cadre du présent grief, comment, en l’absence de l’irrégularité alléguée, la procédure antidumping aurait pu aboutir à un résultat différent, contrairement à ce qui est requis par la jurisprudence citée au point 252 ci-dessus. En tout état de cause, il ressort du troisième moyen que l’explication donnée dans le document d’information définitif à cet égard a permis aux requérantes de contester l’absence d’un ajustement analogue dans le cas des importations en provenance des États-Unis. Il s’ensuit que le quatrième grief doit également être rejeté comme étant non fondé.

279

Par le cinquième grief, les requérantes soutiennent que le document d’information définitif n’a fourni aucun détail sur la raison pour laquelle l’exclusion « dès le départ » des producteurs de mélanges E85 et de mélanges analogues de l’industrie de l’Union n’avait eu aucun impact sur la détermination du préjudice important. Aucun élément du dossier n’étayerait à cet égard le constat de la Commission dans sa réponse aux observations des requérantes sur le document d’information définitif, selon lequel la production de tels mélanges « [était] très limitée ».

280

À cet égard, le Conseil explique dans la défense que ces allégations sont erronées du fait que la Commission n’a pas exclu les mélanges E85 « dès le départ ». Selon les informations disponibles, il n’y aurait eu que quelques producteurs de mélanges E85 dans l’Union, dont la production semblait être très limitée, les questionnaires non confidentiels de deux producteurs de l’Union ayant indiqué qu’ils produisaient de l’E85 en faibles quantités, et ces faibles quantités constatées auraient donc été utilisées dans les calculs.

281

D’une part, il convient de constater que les requérantes n’étayent pas l’expression « mélanges similaires ». Par conséquent, l’argument concernant lesdits « mélanges similaires » n’est donc pas soulevé d’une façon cohérente et compréhensible au sens de la jurisprudence exposée au point 254 ci-dessus et doit être rejeté comme étant irrecevable.

282

D’autre part, les requérantes ne contestent pas la véracité des éléments énumérés par le Conseil dans la défense. Dès lors, il y a lieu de relever qu’il résulte des explications du Conseil que les mélanges E85 n’ont pas été exclus « dès le départ » de l’enquête et qu’il y avait des éléments dans le dossier administratif étayant le fait que la production des mélanges en question dans l’Union était « très limitée ». Partant, il y a lieu de rejeter le cinquième grief pour le surplus comme étant non fondé.

283

Par le sixième grief, les requérantes font valoir que, malgré leur demande au conseiller-auditeur lors de l’audience devant la Commission, le Conseil n’a pas fourni les données relatives au coût des matières premières des producteurs de l’industrie de l’Union. Disposer de ces données leur aurait permis de démontrer « avec plus de certitude » que le préjudice important allégué était causé par l’augmentation des coûts des matières premières de l’industrie de l’Union.

284

À cet égard, tout d’abord, il convient de constater que les requérantes ont demandé lors de l’audience du 11 septembre 2012 à être informées des « données concernant les tendances des coûts de production et des matériaux primaires ». Selon le procès-verbal de cette audience, le conseiller-auditeur a invité l’équipe d’enquête de la Commission à fournir des explications par écrit le 18 septembre 2012 au plus tard. D’une part, il importe de relever que les requérantes n’affirment aucunement dans leurs écritures qu’il n’y a pas eu un suivi approprié à l’égard de cette demande du conseiller-auditeur. D’autre part, les requérantes ne démontrent pas non plus qu’elles auraient réitéré leur demande dans le cadre de l’information finale en vertu de l’article 20, paragraphe 2, du règlement de base.

285

Ensuite, il y a lieu de constater que les requérantes n’ont fourni aucun élément indiquant qu’elles auraient demandé au Conseil de leur fournir les données en question.

286

Enfin, le Conseil explique que les informations selon lesquelles la plupart des producteurs de l’industrie de l’Union couvraient le risque de fluctuation des prix des matières premières ont un caractère confidentiel et qu’il n’était donc pas possible de les verser au dossier non confidentiel, ce qui n’est pas remis en cause par les requérantes.

287

Il s’ensuit que les requérantes n’ont pas démontré que les institutions n’avaient pas donné suite de façon satisfaisante, dans le cadre des obligations découlant de l’article 20, paragraphes 2 et 4, du règlement de base, à leurs demandes d’accès aux informations supplémentaires concernant les coûts des matières premières de l’industrie de l’Union. Partant, l’argument sous-tendant le sixième grief ne peut être accueilli.

288

Par le septième grief, les requérantes font valoir que le document d’information supplémentaire, dans lequel la Commission a proposé de modifier la période de validité de la mesure antidumping définitive proposée de trois à cinq ans, n’était pas suffisamment motivé, au motif qu’il a « uniquement rejeté deux des trois raisons sur la base desquelles le Conseil avait initialement proposé une validité de trois ans » et n’aurait pas « examiné la troisième raison ».

289

Il y a lieu de constater, comme le Conseil le soulève à bon droit, sans être contredit par les requérantes à cet égard, que, en application de l’article 11, paragraphe 2, du règlement de base, la période de validité normale de mesures antidumping est de cinq ans. Ainsi, le document d’information supplémentaire prévoyait donc un retour à la période normale. À cet égard, force est de constater que l’obligation de motivation dans le cadre des mesures antidumping n’impose pas aux institutions d’expliquer en quoi une position envisagée à un certain stade de la procédure antidumping était éventuellement infondée (voir, en ce sens, arrêt Whirlpool Europe/Conseil, point 253 supra, EU:T:2010:390, point 116).

290

De surcroît, les requérantes n’exposent pas quel serait l’impact de l’absence d’examen, dans le document d’information définitif, de « la troisième raison » invoquée initialement par la Commission pour justifier une période de validité de seulement trois ans.

291

Partant, il y a lieu d’écarter le septième grief comme étant non fondé.

292

Étant donné que les sept griefs soulevés par les requérantes ne sauraient être accueillis, il convient également de rejeter l’argument des requérantes selon lequel le règlement attaqué n’est pas « correctement motivé » du fait que le document d’information définitif était incomplet. Partant, la première branche du dixième moyen doit être rejetée comme étant partiellement irrecevable et partiellement non fondée.

Sur la deuxième branche du dixième moyen, tirée du fait que le document d’information supplémentaire a été communiqué, en premier lieu, aux États membres et au plaignant et ensuite aux requérantes, et ce en violation des principes de bonne administration et de non-discrimination, des droits de la défense, ainsi que de l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base

293

Les requérantes font valoir, en substance, que la Commission a soumis la proposition de modifier la période de validité des mesures de trois à cinq ans aux représentants des États membres au sein du comité consultatif et au plaignant avant que cette information ne leur ait été communiquée, et ce en violation des principes de non-discrimination et de bonne administration, ainsi que des droits de la défense des requérantes et de « leurs membres ». De plus, le fait que le comité consultatif aurait approuvé la modification de la période de validité des mesures lors d’une réunion qui a eu lieu deux jours avant que le document d’information définitif n’ait été communiqué aux parties intéressées, et donc avant les observations des requérantes, violerait l’obligation de prendre en considération les observations relatives au document d’information définitif, prévue à l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base.

294

Le Conseil conteste les arguments des requérantes.

295

Il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base, « [l]es observations faites après que l’information finale a été donnée ne peuvent être prises en considération que si elles sont reçues dans un délai que la Commission fixe dans chaque cas en tenant dûment compte de l’urgence de l’affaire, mais qui ne sera pas inférieur à dix jours ».

296

En premier lieu, s’agissant de la prétendue violation des droits de la défense, il suffit de constater que les requérantes n’expliquent pas comment elles-mêmes ou leurs membres auraient pu mieux assurer leur défense en l’absence de l’irrégularité présumée. Dès lors, il y a lieu de rejeter cet argument au vu de la jurisprudence citée au point 252 ci-dessus.

297

En deuxième lieu, concernant l’argument selon lequel le plaignant a été informé de la modification de la période de validité des mesures avant que cette information ait été communiquée aux autres parties intéressées, les requérantes invoquent un communiqué de presse publié sur le site Internet d’ePure le20 décembre 2012, dans lequel cette dernière aurait annoncé que l’Union avait avancé dans la perspective de l’imposition de mesures antidumping, en l’espèce, pour une période de cinq ans, car une telle « décision » aurait été « approuvée » par une majorité d’États membres.

298

Le Conseil conteste cette affirmation et fait valoir dans la défense que la Commission a informé toutes les parties intéressées, y compris le plaignant, de la proposition de modifier la période de validité des mesures en même temps, à savoir le 21 décembre 2012. Il ajoute ne pas être tenu d’expliquer ou de défendre le contenu d’un communiqué de presse publié par un tiers.

299

À cet égard, il convient de relever que ledit communiqué de presse n’est qu’un indice qui ne prouve pas que le Conseil ou la Commission auraient en réalité informé le plaignant avant elles de la modification de la durée des mesures et que les requérantes n’ont apporté aucun autre élément à l’appui de leur affirmation. Par conséquent, il y a lieu de rejeter cet argument au motif que les requérantes n’en ont pas apporté la preuve.

300

En troisième lieu, il convient d’examiner l’argument selon lequel la proposition de modifier la période de validité des mesures aurait été communiquée préalablement aux représentants des États membres au sein du comité consultatif.

301

Selon les requérantes, le communiqué d’ePure du 20 décembre 2012 se réfère au vote au sein du comité consultatif lors d’une réunion qui a eu lieu le 19 décembre 2012 et démontrerait que la Commission aurait soumis la proposition de faire passer la période de validité des mesures de trois à cinq ans aux représentants des États membres au sein du comité consultatif et au plaignant avant que cette information ne leur ait été communiquée. Or, le Conseil conteste cet argument et affirme dans la défense que la Commission a informé les États membres ainsi que les parties intéressées de la proposition de modifier la période de validité des mesures en même temps, à savoir le 21 décembre 2012.

302

S’agissant, premièrement, de la prétendue violation du principe de non-discrimination par les institutions de l’Union, il convient de relever que celle-ci suppose qu’elles aient traité d’une façon différente des situations comparables, entraînant un désavantage pour certains opérateurs par rapport à d’autres, sans que cette différence de traitement soit justifiée par l’existence de différences objectives d’une certaine importance (arrêt du 23 octobre 2003, Changzhou Hailong Electronics & Light Fixtures et Zhejiang Yankon/Conseil, T‑255/01, Rec, EU:T:2003:282, point 60).

303

À cet égard, il suffit de relever que les représentants des États membres au sein du comité consultatif ne sont pas, à la différence des requérantes, des parties intéressées à la procédure antidumping. Il s’ensuit que les requérantes et les États membres ne se sont pas trouvés dans des situations comparables au sens de la jurisprudence. Dès lors, la communication d’informations aux États membres n’est pas régie par l’article 20 du règlement de base, mais est effectuée en vertu de son article 15, paragraphe 2, dans sa version originale qui est d’application en l’espèce, selon lequel la Commission communique aux États membres, préalablement à la réunion du comité consultatif, « tous les éléments d’information utiles ».

304

S’agissant, deuxièmement, de la prétendue violation du principe de bonne administration, il convient de rappeler que la Commission et le Conseil sont tenus de respecter les droits fondamentaux de l’Union au cours de la procédure administrative, parmi lesquels figure le droit à une bonne administration, consacré à l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui regroupe une série de droits spécifiques. Or, le principe de bonne administration ne confère pas, par lui-même, de droits aux particuliers, sauf lorsqu’il constitue l’expression de droits spécifiques au sens de l’article 41 de la charte des droits fondamentaux (arrêt du 4 octobre 2006, Tillack/Commission, T‑193/04, Rec, EU:T:2006:292, point 127). Cependant, les requérantes n’invoquent en aucune façon un tel droit spécifique.

305

En toute hypothèse, même à supposer que l’argument des requérantes soit compris comme alléguant une violation du devoir de diligence, il convient de rappeler que ledit devoir impose à l’institution compétente d’examiner avec soin et impartialité tous les éléments pertinents du cas d’espèce [voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2014, Crown Equipment (Suzhou) et Crown Gabelstapler/Conseil, T‑643/11, Rec (Extraits), EU:T:2014:1076, point 46 et jurisprudence citée]. Or, en l’espèce, les requérantes n’ayant apporté aucun élément qui pourrait démontrer, de la façon requise, que la Commission ou le Conseil auraient violé cette obligation, il y a donc lieu de rejeter l’argument portant sur la violation du principe de bonne administration comme étant non fondé.

306

Dès lors, il y a lieu de rejeter l’argument des requérantes portant sur une violation des principes de non-discrimination et de bonne administration.

307

En quatrième lieu, il convient également de rejeter l’argument des requérantes selon lequel l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base aurait été violé du fait que la proposition de modifier la période de validité des mesures avait été soumise au comité consultatif et « ratifiée » par lui avant que les observations des parties intéressées aient été déposées. Même à supposer que cette disposition crée, comme l’affirment les requérantes, une obligation « pour les institutions » de prendre en considération « les observations relatives au document d’information définitif », il suffit de relever que les requérantes n’expliquent pas dans quelle mesure, en l’absence de l’irrégularité alléguée, la procédure antidumping aurait pu aboutir à un résultat différent, contrairement à ce qui est requis par la jurisprudence citée au point 252 ci-dessus. En tout état de cause, il importe de rappeler que, selon l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base dans sa version originale qui est d’application en l’espèce, le comité consultatif, qui d’ailleurs n’est pas une institution, est consulté avant que le Conseil institue un droit antidumping définitif. Certes, l’article 15, paragraphe 2, du règlement de base dans sa version originale prévoit que la Commission communique préalablement aux États membres « tous les éléments d’information utiles ». Or, d’une part, les requérantes ne font pas valoir que le Conseil n’aurait pas pris en considération leurs observations soumises le 2 janvier 2013 sur la durée des mesures lors de l’adoption du règlement attaqué. D’autre part, les requérantes n’affirment pas non plus que leurs observations soumises le 2 janvier 2013 auraient contenu des éléments d’information utiles que la Commission aurait dû communiquer aux États membres, en vertu du même paragraphe.

308

Il y a donc lieu de conclure au rejet de la deuxième branche du dixième moyen.

Sur la troisième branche du dixième moyen, tirée de l’accès incomplet au dossier non confidentiel de l’enquête, en violation des droits de la défense, de l’article 6, paragraphe 7, et de l’article 19, paragraphes 1 et 2, du règlement de base

309

Les requérantes font valoir que la Commission a refusé de leur accorder l’accès à certaines informations, à certaines preuves et à certains documents en dépit de plusieurs demandes formulées par elles à cet égard au cours de l’enquête. Cela serait contraire à l’article 6, paragraphe 7, et à l’article 19, paragraphes 1 et 2, du règlement de base et violerait leurs droits de la défense. Les requérantes soulèvent cinq griefs par lesquels elles affirment que la Commission n’a pas accordé un accès complet au dossier non confidentiel de l’enquête.

310

Le Conseil conteste les arguments des requérantes.

311

L’article 6, paragraphe 7, du règlement de base prévoit ce qui suit :

« Les plaignants, les importateurs et les exportateurs ainsi que leurs associations représentatives, les utilisateurs et les associations des consommateurs qui se sont fait connaître conformément à l’article 5, paragraphe 10, ainsi que les représentants du pays exportateur, peuvent, sur demande écrite, prendre connaissance de tous les renseignements fournis par toute partie concernée par l’enquête, mis à part les documents internes établis par les autorités de [l’Union] ou de ses États membres, pour autant que ces renseignements soient pertinents pour la défense de leurs intérêts, qu’ils ne soient pas confidentiels au sens de l’article 19 et qu’ils soient utilisés dans l’enquête. Ces parties peuvent répondre à ces renseignements et leurs commentaires doivent être pris en considération dans la mesure où ils sont suffisamment étayés dans la réponse. »

312

Selon l’article 19, paragraphe 1, du règlement de base, « [t]oute information de nature confidentielle (par exemple parce que sa divulgation avantagerait de façon notable un concurrent ou aurait un effet défavorable notable pour la personne qui a fourni l’information ou pour celle auprès de qui elle l’a obtenue) ou qui serait fournie à titre confidentiel par des parties à une enquête est, sur exposé de raisons valables, traitée comme telle par les autorités ».

313

L’article 19, paragraphe 5, du règlement de base énonce ce qui suit :

« Le Conseil, la Commission et les États membres ou leurs agents s’abstiennent de révéler toute information reçue en application du présent règlement pour laquelle la personne qui l’a fournie a demandé un traitement confidentiel, sans l’autorisation spécifique de cette dernière. Les informations échangées entre la Commission et les États membres, les informations relatives aux consultations organisées en application de l’article 15 ou les documents internes préparés par les autorités de [l’Union] ou de ses États membres ne sont pas divulgués, sauf si leur divulgation est expressément prévue par le présent règlement. »

314

La violation du droit d’accès au dossier de l’enquête ne peut entraîner l’annulation du règlement attaqué que si la divulgation des documents en cause a eu une chance, même réduite, de faire aboutir la procédure administrative à un résultat différent dans l’hypothèse où l’entreprise concernée aurait pu s’en prévaloir au cours de ladite procédure (voir, en ce sens, arrêt du 16 février 2012, Conseil et Commission/Interpipe Niko Tube et Interpipe NTRP, C‑191/09 P et C‑200/09 P, Rec, EU:C:2012:78, point 174).

315

S’agissant du premier grief, les requérantes estiment que la Commission a refusé de donner accès ou de fournir un résumé non confidentiel des bases de données d’Eurostat (office statistique de l’Union européenne) et d’autres bases de données douanières nationales utilisées pour établir le volume et la valeur des diverses importations.

316

Il convient de constater que, par le premier grief, les requérantes n’expliquent pas dans quelle mesure, en l’absence de l’irrégularité alléguée, la procédure antidumping aurait pu aboutir à un résultat différent, contrairement à ce qui est requis par la jurisprudence citée aux points 252 et 314 ci-dessus. Il convient donc de rejeter le premier grief comme étant non fondé.

317

Par le deuxième grief, les requérantes font valoir que la Commission a refusé de leur communiquer un document interne contenant l’avis de sa direction générale (DG) « Fiscalité et union douanière », relatif à la définition du produit concerné.

318

D’une part, il y a lieu de constater que, par le présent grief, les requérantes n’expliquent pas dans quelle mesure, en l’absence de l’irrégularité alléguée, la procédure antidumping aurait pu aboutir à un résultat différent, contrairement à ce qui est requis par la jurisprudence citée aux points 252 et 314 ci-dessus. D’autre part, force est de relever que, selon l’article 19, paragraphe 5, du règlement de base, les documents internes ne sont pas divulgués, sauf lorsque cela est expressément prévu par ledit règlement. Partant, il convient de rejeter le deuxième grief comme étant non fondé.

319

Par le troisième grief, les requérantes font valoir que, concernant la détermination de la part de production d’éthanol à partir de betteraves à sucre, la Commission s’est appuyée sur un courriel de la plaignante qui mentionnait un chiffre de 12 %, mais ne fournissait aucun détail sur la source des données utilisées et la méthodologie appliquée pour aboutir à cette estimation. Les requérantes estiment qu’elles étaient donc dans l’impossibilité de démontrer à la Commission que leurs « chiffres plus élevés » de la production à partir de betteraves à sucre étaient les « chiffres corrects ».

320

Il convient de relever que, par cet argument, les requérantes n’expliquent pas dans quelle mesure la communication de la source et de la méthode utilisée pour le calcul aurait pu aboutir à un résultat différent de la procédure antidumping, contrairement à ce qui est requis par la jurisprudence citée aux points 252 et 314 ci-dessus.

321

En tout état de cause, la Commission explique qu’elle n’était pas autorisée à divulguer les informations en question au motif que celles-ci englobaient des informations commerciales confidentielles fournies par le plaignant. À cet égard, d’une part, les requérantes n’expliquent pas en quoi l’indication, dans la partie du courriel en question qu’elles citent à la page 434 de l’annexe A.10 de la requête, selon laquelle le pourcentage de 12 % provenait d’un analyste commercial ne serait pas suffisante afin d’identifier la source des données en question. D’autre part, il ne ressort aucunement de ladite citation que ce courriel aurait contenu une description de la méthode utilisée pour le calcul de la part du marché en question.

322

Il y a donc lieu de rejeter le troisième grief comme étant non fondé.

323

Par le quatrième grief, les requérantes font valoir qu’il n’y a aucun élément du dossier non confidentiel qui étaye le constat fait au considérant 141 du règlement attaqué selon lequel la plupart des producteurs de l’industrie de l’Union couvraient le risque de fluctuation des prix des matières premières.

324

D’une part, il convient de relever que, par le quatrième grief, les requérantes ne font valoir aucune violation de leur droit d’accès au dossier non confidentiel. Partant, le présent grief est inopérant et doit être rejeté.

325

D’autre part et en toute hypothèse, le Conseil explique que, pendant les vérifications sur place, les producteurs de l’Union ont fourni des explications détaillées concernant la couverture des risques et que les informations en question ont un caractère confidentiel et qu’il n’était donc pas possible de les verser au dossier non confidentiel. De plus, les requérantes ne contestent pas l’affirmation du Conseil selon laquelle la pratique consistant à couvrir le risque de fluctuation des prix est courante dans le secteur en question et selon laquelle il serait facile de la vérifier grâce à des informations accessibles au public dans les rapports annuels des producteurs de l’Union. Par conséquent, il y aurait également lieu de rejeter le quatrième grief comme non fondé.

326

Par le cinquième grief, les requérantes estiment que les observations d’ePure relatives à la modification de la période de validité des mesures de trois à cinq ans n’ont pas été versées au dossier non confidentiel en temps utile pour leur permettre de préparer leurs observations à l’égard de cette modification pour le 2 janvier 2013. Les observations d’ePure n’auraient été versées au dossier non confidentiel que le 4 février 2013.

327

À cet égard, il convient de constater que les requérantes n’expliquent pas dans quelle mesure, en l’absence de l’irrégularité alléguée, la procédure antidumping aurait pu aboutir à un résultat différent, tel que cela est requis par la jurisprudence citée aux points 252 et 314 ci-dessus.

328

En toute hypothèse, le Conseil fait valoir que, dans le document d’information supplémentaire du 21 décembre 2012, la Commission résumait les arguments d’ePure concernant la période de validité et expliquait les raisons du retour à la période normale de cinq ans. Concernant les observations du plaignant, il convient de faire observer que le document d’information supplémentaire contient, en substance, les mêmes informations que le considérant 173 du règlement attaqué et reproduisait donc les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels les institutions souhaitaient se fonder en l’espèce. En revanche, les requérantes se bornent, dans la réplique, à contester l’affirmation du Conseil, sans spécifier quelles observations d’ePure n’étaient pas résumées de façon suffisante dans le document d’information supplémentaire.

329

Dans la réplique, les requérantes estiment d’ailleurs que le document d’information supplémentaire constitue simplement une négation des arguments en faveur de la période de validité initialement proposée par la Commission, sans la moindre explication réelle. Il y a lieu de constater, en application des dispositions de l’article 44, paragraphe 1, sous c), et de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du 2 mai 1991, que ce nouveau grief est tardif, puisque soulevé dans la réplique, et il convient de le rejeter comme irrecevable (voir, en ce sens, ordonnance du 24 septembre 2009, Alcon/OHMI, C‑481/08 P, EU:C:2009:579, point 17, et arrêt du 30 avril 2015, VTZ e.a./Conseil, T‑432/12, EU:T:2015:248, point 158). Même à supposer que ce nouveau grief n’ait pas été soulevé tardivement, il suffirait de constater que, par celui-ci, les requérantes n’invoquent aucune violation de leur droit d’accès au dossier non confidentiel de l’enquête. Il conviendrait donc également de le rejeter comme étant inopérant.

330

Il y a donc lieu de conclure que les requérantes étaient en mesure de préparer en temps utile leurs observations à l’égard de la modification de la période de validité des mesures antidumping. Partant, le cinquième grief ainsi que le nouveau grief mentionné au point précédent doivent être rejetés.

331

Il s’ensuit que la troisième branche du dixième moyen doit être rejetée.

Sur la quatrième branche du dixième moyen, tirée d’une période insuffisante accordée aux requérantes pour présenter leurs observations sur le document d’information définitif, en violation de l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base et des droits de la défense

332

Les requérantes estiment que le Conseil ne leur a pas accordé le délai minimal légal de dix jours, prévu à l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base, pour présenter leurs observations sur le document d’information définitif. En tout état de cause, le délai minimal légal de dix jours n’aurait pas, selon elles, constitué un délai suffisant pour présenter des observations sur un document d’information aussi complexe que celui communiqué en l’espèce.

333

Le Conseil conteste les arguments des requérantes.

334

D’emblée, il convient de faire observer que, selon l’intitulé de la quatrième branche du dixième moyen dans la requête, le Conseil n’a pas accordé suffisamment de temps « aux requérantes » pour présenter leurs observations sur le document d’information définitif. Or, dans la requête, les requérantes font valoir qu’elles « et leurs membres » n’ont pas bénéficié de suffisamment de temps pour présenter leurs observations.

335

À cet égard, il importe de noter que les requérantes n’expliquent pas dans leurs écritures quels sont, parmi leurs membres, ceux qui ont reçu le document d’information définitif. Pour autant que les requérantes souhaitent donc, par la présente branche, faire valoir une violation des droits procéduraux de « leurs membres », il y a lieu de relever qu’une demande aussi peu précise ne remplit pas les conditions prévues à l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du 2 mai 1991, qui exige que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels le recours est fondé ressortent d’une façon cohérente et compréhensible du texte de la requête elle-même (voir point 254 ci-dessus). Partant, dans la mesure où les requérantes font valoir que leurs membres n’ont pas bénéficié de suffisamment de temps pour présenter leurs observations à l’égard du document d’information définitif, il convient de rejeter la présente branche comme étant irrecevable.

336

S’agissant de l’argument selon lequel le Conseil n’a pas accordé suffisamment de temps aux requérantes pour présenter leurs observations sur le document d’information définitif, il y a lieu de rappeler que l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base prévoit, en substance, que les institutions ne sont tenues de prendre en compte des observations faites par des parties intéressées qu’à condition qu’elles soient reçues dans le délai fixé par la Commission, lequel ne doit pas être inférieur à dix jours.

337

En l’espèce, la Commission a communiqué aux requérantes, le 6 décembre 2012, le document d’information définitif, demandant leurs observations éventuelles « dans un délai de 10 jours […], c’est-à-dire jusqu’au 17 décembre 2012, à midi ». Le délai de dix jours pour faire des commentaires sur ce document, prévu à l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base, a pris fin le dimanche 16 décembre 2012. En vertu de l’article 3, paragraphe 4, du règlement (CEE, Euratom) no 1182/71 du Conseil, du 3 juin 1971, portant détermination des règles applicables aux délais, aux dates et aux termes (JO L 124, p. 1), le dernier jour du délai étant un dimanche, le délai a pris fin à l’expiration de la dernière heure du jour ouvrable suivant, à savoir à l’expiration de la dernière heure du 17 décembre 2012. Cependant, la Commission a invité les parties intéressées à communiquer leurs observations sur ce document pour le 17 décembre 2012, à midi, et non pas jusqu’à minuit. Néanmoins, les requérantes ont communiqué leurs observations dans le délai imparti par la Commission. Par courrier du 21 décembre 2012, la Commission a communiqué le document d’information supplémentaire, relatif à la modification de la durée des mesures proposées. Toutefois, dans cette lettre, la Commission a demandé aux parties de communiquer leurs observations sur la modification proposée ainsi que sur le document d’information définitif du 6 décembre 2012 au plus tard le 2 janvier 2013, à la fermeture des bureaux.

338

D’une part, il y a lieu de constater que les requérantes n’expliquent pas dans leurs écritures comment, selon elles, la procédure administrative aurait pu, en raison de l’irrégularité présumée, aboutir à un résultat différent. À cet égard, il a été jugé que le non-respect du délai de dix jours prévu à l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base ne saurait conduire à l’annulation du règlement litigieux que dans la mesure où il existerait une possibilité que, en raison de cette irrégularité, la procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent, affectant ainsi concrètement les droits de la défense de la partie requérante (voir, en ce sens, arrêt Foshan Shunde Yongjian Housewares & Hardware/Conseil, point 250 supra, EU:C:2009:598, point 81 et jurisprudence citée).

339

D’autre part, ainsi que le Conseil le fait valoir à bon droit, la Commission a accordé, par sa lettre du 21 décembre 2012, un délai supplémentaire aux requérantes pour communiquer des observations sur le document d’information définitif du 6 décembre 2012. Il s’ensuit que les institutions n’ont commis aucune violation de l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base.

340

S’agissant de l’argument selon lequel le délai de dix jours n’était pas suffisant pour présenter des observations sur un document d’information aussi complexe et au vu de l’absence d’un règlement instituant des droits provisoires contenant un calcul provisoire de la marge de dumping, il suffit de rappeler, comme cela a été exposé au point 337 ci-dessus, que les requérantes n’ont pas seulement bénéficié du délai minimal légal, mais que la Commission leur a subséquemment accordé, le 21 décembre 2012, un délai supplémentaire de douze jours civils pour faire des commentaires sur ce document. Les requérantes ne font pas valoir que ce délai étendu aurait été insuffisant.

341

De plus, dans la réplique, les requérantes affirment que, par le document d’information supplémentaire du 21 décembre 2012, les institutions ont commis un autre vice de procédure au motif que le comité consultatif antidumping avait déjà été consulté lors de la réunion du 19 décembre 2012 sans avoir connaissance d’un élément essentiel, à savoir l’avis des requérantes et des producteurs américains sur la validité modifiée des mesures proposées. En application des dispositions de l’article 44, paragraphe 1, sous c), et de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du 2 mai 1991, il y a lieu de constater que ce nouveau grief est tardif, puisque soulevé dans la réplique, et il convient de le rejeter comme irrecevable (voir la jurisprudence exposée au point 329 ci-dessus).

342

Il s’ensuit que la quatrième branche du dixième moyen doit également être rejetée.

343

Il résulte de ce qui précède que le dixième moyen doit être rejeté dans son ensemble.

344

Partant, étant donné que la deuxième branche du premier moyen a été accueillie et ledit moyen par voie de conséquence, il convient d’annuler le règlement attaqué dans la mesure où il concerne Patriot Renewable Fuels, Plymouth Energy Company, POET et Platinum Ethanol, qui sont membres des requérantes. Pour le surplus, il convient de rejeter le présent recours comme étant partiellement irrecevable et comme étant partiellement non fondé.

Sur les dépens

345

Aux termes de l’article 134, paragraphes 1 et 3, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens. Toutefois, si cela apparaît justifié, au vu des circonstances de l’espèce, le Tribunal peut décider que, outre ses propres dépens, une partie supporte une fraction des dépens de l’autre partie.

346

En l’espèce, les requérantes et le Conseil ayant chacun succombé partiellement, ils supporteront chacun leurs propres dépens.

347

Conformément à l’article 138, paragraphes 1 et 3, du règlement de procédure, la Commission et ePure supporteront chacune leurs propres dépens.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

 

1)

Le règlement d’exécution (UE) no 157/2013 du Conseil, du 18 février 2013, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de bioéthanol originaire des États-Unis d’Amérique, est annulé, dans la mesure où il concerne Patriot Renewable Fuels LLC, Plymouth Energy Company LLC, POET LLC et Platinum Ethanol LLC.

 

2)

Le recours est rejeté pour le surplus.

 

3)

Growth Energy et Renewable Fuels Association, le Conseil de l’Union européenne, la Commission européenne et ePURE, de Europese Producenten Unie van Hernieuwbare Ethanol supporteront leurs propres dépens.

 

Dittrich

Schwarcz

Tomljenović

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 juin 2016.

Signatures

Table des matières

 

Antécédents du litige

 

Procédure et conclusions des parties

 

1. Sur la demande de jonction avec l’affaire T‑277/13, Marquis Energy/Conseil

 

2. Sur les interventions

 

3. Sur les mesures d’organisation de la procédure et sur la phase orale de la procédure

 

4. Sur les demandes de traitement confidentiel

 

5. Sur les conclusions des parties

 

En droit

 

1. Sur la recevabilité

 

Sur le droit d’agir des associations telles que les requérantes

 

Sur la qualité pour agir des requérantes

 

Sur la qualité pour agir des requérantes à titre individuel

 

Sur la qualité pour agir des requérantes en tant que représentants de leurs membres

 

– Sur l’affectation directe des requérantes en tant que représentants des producteurs de bioéthanol échantillonnés

 

– Sur l’affectation individuelle des requérantes en tant que représentants des producteurs de bioéthanol échantillonnés

 

– Sur l’existence de voies de recours alternatives

 

Sur la qualité pour agir des requérantes en tant que représentants de leurs membres autres que les quatre producteurs échantillonnés

 

Sur l’intérêt à agir

 

2. Sur le fond

 

Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 2, paragraphe 8, de l’article 9, paragraphe 5, et de l’article 18, paragraphes 1, 3 et 4, du règlement de base, d’une violation des principes de sécurité juridique, de confiance légitime et de bonne administration ainsi que d’erreurs manifestes d’appréciation commises par le Conseil en raison de son refus de calculer une marge de dumping individuelle et d’attribuer un droit antidumping individuel, le cas échéant, aux membres des requérantes inclus dans l’échantillon

 

Sur l’application de l’accord antidumping de l’OMC en l’espèce

 

Sur la question de savoir si les quatre producteurs américains échantillonnés ont un droit de se voir appliquer un droit antidumping individuel en vertu de l’article 9, paragraphe 5, du règlement de base

 

Sur la question de savoir s’il était irréalisable d’instituer des droits antidumping individuels en l’espèce

 

Sur le dixième moyen, tiré de la violation de l’article 6, paragraphe 7, de l’article 19, paragraphes 1 et 2, de l’article 20, paragraphes 2, 4 et 5, du règlement de base ainsi que des droits de la défense, des principes de non-discrimination et de bonne administration et de l’absence de motivation suffisante

 

Observations liminaires

 

Sur la première branche du dixième moyen, tirée de la nature incomplète du document d’information définitif et de la violation de l’article 20, paragraphes 2 et 4, du règlement de base, ainsi que des erreurs de motivation dans le règlement attaqué

 

Sur la deuxième branche du dixième moyen, tirée du fait que le document d’information supplémentaire a été communiqué, en premier lieu, aux États membres et au plaignant et ensuite aux requérantes, et ce en violation des principes de bonne administration et de non-discrimination, des droits de la défense, ainsi que de l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base

 

Sur la troisième branche du dixième moyen, tirée de l’accès incomplet au dossier non confidentiel de l’enquête, en violation des droits de la défense, de l’article 6, paragraphe 7, et de l’article 19, paragraphes 1 et 2, du règlement de base

 

Sur la quatrième branche du dixième moyen, tirée d’une période insuffisante accordée aux requérantes pour présenter leurs observations sur le document d’information définitif, en violation de l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base et des droits de la défense

 

Sur les dépens


( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.

( 1 ) Données confidentielles occultées.

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