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Document 62013CJ0647

    Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 4 février 2015.
    Office national de l'emploi contre Marie-Rose Melchior.
    Demande de décision préjudicielle, introduite par la cour du travail de Bruxelles.
    Renvoi préjudiciel – Sécurité sociale – Conditions d’admissibilité au bénéfice des allocations de chômage dans un État membre – Prise en compte des périodes de travail effectuées comme agent contractuel au service d’une institution de l’Union européenne établie dans cet État membre – Assimilation des journées de chômage indemnisées au titre du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes à des journées de travail – Principe de coopération loyale.
    Affaire C-647/13.

    Court reports – general

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2015:54

    ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

    4 février 2015 ( *1 )

    «Renvoi préjudiciel — Sécurité sociale — Conditions d’admissibilité au bénéfice des allocations de chômage dans un État membre — Prise en compte des périodes de travail effectuées comme agent contractuel au service d’une institution de l’Union européenne établie dans cet État membre — Assimilation des journées de chômage indemnisées au titre du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes à des journées de travail — Principe de coopération loyale»

    Dans l’affaire C‑647/13,

    ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la cour du travail de Bruxelles (Belgique), par décision du 27 novembre 2013, parvenue à la Cour le 6 décembre 2013, dans la procédure

    Office national de l’emploi

    contre

    Marie-Rose Melchior,

    LA COUR (troisième chambre),

    composée de M. M. Ilešič, président de chambre, M. A. Ó Caoimh, Mme C. Toader, MM. E. Jarašiūnas (rapporteur) et C. G. Fernlund, juges,

    avocat général: M. P. Mengozzi,

    greffier: M. A. Calot Escobar,

    vu la procédure écrite,

    considérant les observations présentées:

    pour Mme Melchior, par Me S. Capiau, avocat,

    pour le gouvernement belge, par Mmes M. Jacobs et L. Van den Broeck, en qualité d’agents,

    pour la Commission européenne, par MM. G. Gattinara et D. Martin, en qualité d’agents,

    ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 16 octobre 2014,

    rend le présent

    Arrêt

    1

    La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation du principe de coopération loyale et de l’article 34, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la «Charte»).

    2

    Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant l’Office national de l’emploi (ci-après l’«ONEM») à Mme Melchior au sujet du refus de cet organisme d’octroyer à l’intéressée le bénéfice d’allocations de chômage.

    Le cadre juridique

    Le droit de l’Union

    3

    L’article 96 du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes, établi par le règlement (CEE, Euratom, CECA) no 259/68 du Conseil, du 29 février 1968, fixant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés, et instituant des mesures particulières temporairement applicables aux fonctionnaires de la Commission (JO L 56, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE, Euratom) no 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004 (JO L 124, p. 1, ci-après le «RAA»), prévoit:

    «1.   L’ancien agent contractuel se trouvant sans emploi après la cessation de son service auprès d’une institution des Communautés européennes et

    a)

    qui n’est pas titulaire d’une pension d’ancienneté ou d’une allocation d’invalidité à charge des Communautés européennes,

    b)

    dont la cessation de service n’est pas consécutive à une démission ou à une résiliation du contrat pour motif disciplinaire,

    c)

    qui a accompli une durée minimale de service de six mois,

    d)

    qui est résident dans un État membre,

    bénéficie d’une allocation mensuelle de chômage dans les conditions déterminées ci-après.

    Lorsqu’il peut prétendre à une allocation de chômage au titre d’un régime national, il est tenu d’en faire la déclaration auprès de l’institution dont il relevait, qui en informe immédiatement la Commission. Dans ce cas, le montant de cette allocation vient en déduction de celle versée au titre du paragraphe 3.

    2.   Pour bénéficier de l’allocation de chômage, l’ancien agent contractuel:

    a)

    est, à sa demande, inscrit comme demandeur d’emploi auprès des services de l’emploi de l’État membre où il établit sa résidence;

    b)

    remplit les obligations prévues par la législation de cet État membre incombant au titulaire des prestations de chômage au titre de cette législation;

    c)

    est tenu de transmettre mensuellement à l’institution dont il relevait, qui la transmet immédiatement à la Commission, une attestation émanant du service national de l’emploi compétent, précisant s’il a ou non satisfait aux obligations et conditions fixées aux points a) et b).

    La prestation peut être accordée ou maintenue par la Communauté, malgré le fait que les obligations nationales visées au point b) ne sont pas remplies, en cas de maladie, d’accident, de maternité, d’invalidité ou de situation reconnue comme analogue, ou de dispense par l’autorité nationale compétente de satisfaire à ces obligations.

    [...]

    7.   Tout agent contractuel contribue pour un tiers au financement du régime d’assurance contre le chômage [...]

    [...]

    9.   Les services nationaux compétents en matière d’emploi et de chômage, agissant dans le cadre de leur législation nationale, et la Commission assurent une coopération efficace afin d’assurer une bonne application du présent article.

    [...]»

    Le droit belge

    4

    L’arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage (Moniteur belge du 31 décembre 1991, p. 29888, ci-après l’«arrêté royal»), dans sa version applicable à l’époque des faits du litige au principal, prévoit, à son article 30, que, pour être admis au bénéfice des allocations de chômage, le travailleur à temps plein de plus de 50 ans doit accomplir un stage comportant 624 journées de travail au cours des 36 mois précédant la demande d’allocations.

    5

    Aux termes de l’article 37, paragraphe 1, de l’arrêté royal:

    «[...] sont pris en considération comme prestations de travail le travail effectif normal et les prestations supplémentaires sans repos compensatoire, effectuées dans une profession ou une entreprise assujetties à la sécurité sociale, secteur chômage, pour lesquelles simultanément:

    a été payée une rémunération au moins égale au salaire minimum fixé par une disposition légale ou réglementaire ou une convention collective de travail qui lie l’entreprise ou, à défaut, par l’usage;

    ont été opérées sur la rémunération payée les retenues réglementaires pour la sécurité sociale, y compris celles pour le secteur chômage.

    [...]»

    6

    L’article 37, paragraphe 2, de l’arrêté royal dispose:

    «Le travail effectué à l’étranger est pris en considération s’il l’a été dans un emploi qui donnerait lieu en Belgique à des retenues pour la sécurité sociale, y compris celles pour le secteur chômage.

    L’alinéa 1er ne vaut toutefois que si le travailleur a, après le travail effectué à l’étranger, accompli des périodes de travail comme salarié en vertu de la réglementation belge.»

    7

    Selon l’article 38, paragraphe 1, 1°, sous a), de l’arrêté royal, sont assimilées à des journées de travail, pour l’application des articles 30 et suivants de cet arrêté, les journées qui ont donné lieu au paiement d’une indemnité en application de la législation relative à l’assurance chômage.

    Le litige au principal et la question préjudicielle

    8

    Ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, Mme Melchior, de nationalité belge, a occupé différents emplois en qualité de travailleur salarié en Belgique avant de travailler à la Commission des Communautés européennes à Bruxelles, du 1er mars 2005 au 29 février 2008, en qualité d’agent contractuel.

    9

    Par décision du 5 mars 2008, l’ONEM lui a refusé le bénéfice des allocations de chômage, qu’elle avait sollicité le 1er mars 2008, au motif qu’elle ne justifiait pas avoir accompli 624 journées de travail au cours des 36 mois précédant sa demande, cet organisme ne prenant pas en compte la période pendant laquelle l’intéressée a travaillé à la Commission.

    10

    Après avoir obtenu le bénéfice de l’allocation de chômage prévue par le RAA pour une durée de 12 mois à partir du 1er mars 2008 et occupé divers emplois en Belgique entre le 20 août 2008 et le 13 juillet 2009, Mme Melchior a de nouveau introduit une demande d’allocations de chômage qui a été rejetée par une décision de l’ONEM en date du 26 août 2009 au motif, encore, qu’elle ne prouvait pas avoir accompli 624 journées de travail au cours des 36 mois précédant ladite demande, à savoir au cours de la période allant du 14 juillet 2006 au 14 juillet 2009.

    11

    Pour déterminer le nombre de journées de travail accomplies, l’ONEM n’a retenu que les périodes correspondant à ces divers emplois. Il a refusé, d’une part, de prendre en compte la période d’activité accomplie au service de la Commission comme une période de travail effectué à l’étranger, au sens de l’article 37, paragraphe 2, de l’arrêté royal, et, d’autre part, d’assimiler, sur le fondement de l’article 38, paragraphe 1, 1°, sous a), du même arrêté, la période de chômage indemnisée au titre du RAA comme une période de travail.

    12

    Mme Melchior a contesté la décision de l’ONEM du 26 août 2009 devant le tribunal du travail de Bruxelles qui, par jugement du 14 février 2012, a annulé ladite décision, déclaré l’intéressée admissible au bénéfice des allocations de chômage à compter du 14 juillet 2009 et condamné l’ONEM au paiement des allocations échues à compter de cette date.

    13

    L’ONEM a interjeté appel de ce jugement devant la cour du travail de Bruxelles, à laquelle elle demande de réformer celui-ci et de rétablir la décision du 26 août 2009.

    14

    Dans la décision de renvoi, la cour du travail de Bruxelles expose que les retenues visées par l’article 37, paragraphe 1, de l’arrêté royal sont celles prévues par la législation belge et que, sans préjudice de l’incidence éventuelle du droit de l’Union, ledit arrêté royal n’impose pas de tenir compte des retenues effectuées, le cas échéant en Belgique, en vertu d’un autre régime de chômage que celui institué par lui. Elle relève, par conséquent, que, indépendamment du droit de l’Union, la juridiction de première instance ne pouvait considérer que les éventuelles retenues opérées en application du RAA étaient des retenues au sens dudit article 37, paragraphe 1, de l’arrêté royal.

    15

    Examinant les exigences pouvant découler du droit de l’Union quant à la prise en compte des périodes d’activité accomplies au service d’une institution européenne établie en Belgique, la cour du travail de Bruxelles, en se référant aux arrêts Ferlini (C‑411/98, EU:C:2000:530, point 41) et My (C‑293/03, EU:C:2004:821, point 35) ainsi qu’à l’ordonnance Ricci et Pisaneschi (C‑286/09 et C‑287/09, EU:C:2010:420, point 26), constate que Mme Melchior ne peut être qualifiée de «travailleur», au sens du règlement (CEE) no 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté (JO L 149, p. 2) ou du règlement (CE) no 883/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (JO L 166, p. 1). De même, elle constate qu’un travailleur qui, comme Mme Melchior, travaillait pour une institution européenne établie en Belgique et qui, précédemment, n’a pas travaillé ailleurs que dans cet État membre ne peut se prévaloir des dispositions du traité FUE garantissant la libre circulation des travailleurs, celles-ci ne s’appliquant pas à des situations purement internes.

    16

    La cour du travail de Bruxelles observe cependant que la Cour a, à différentes reprises, considéré que la réglementation belge en matière de pensions n’assurait pas, de manière suffisante, la portabilité des droits du travailleur qui a été occupé à la fois au service d’un employeur belge et d’une institution européenne. Elle cite à cet égard les arrêts Commission/Belgique (137/80, EU:C:1981:237, point 19) et My (EU:C:2004:821). L’ONEM soutenant que le raisonnement suivi dans ce dernier arrêt est fondé sur l’existence d’une disposition spécifique en matière de pensions, de sorte que ce raisonnement ne serait pas transposable au régime de l’assurance chômage, la cour du travail de Bruxelles émet des doutes sur cet argument et relève que la solution dégagée par la Cour dans cet arrêt semble se rattacher au principe de coopération loyale. Elle relève en outre que cette solution a été appliquée non seulement en matière de pensions, mais aussi en matière d’allocations parentales et d’allocations familiales ainsi qu’à propos d’un avantage fiscal.

    17

    La cour du travail de Bruxelles considère qu’il pourrait être déduit de cette jurisprudence que le principe de coopération loyale, tel que prévu à l’article 4, paragraphe 3, TUE, s’oppose à l’application des articles 37 et 38, paragraphe 1, 1°, sous a), de l’arrêté royal tels qu’interprétés par l’ONEM. En outre, une contradiction avec l’article 34, paragraphe 1, de la Charte, dont le premier alinéa repose notamment, selon les explications relatives à la charte des droits fondamentaux (JO 2007, C 303, p. 17), sur l’article 12 de la charte sociale européenne, signée à Turin le 18 octobre 1961 et révisée à Strasbourg le 3 mai 1996, ne lui paraît pas exclue.

    18

    C’est dans ces conditions que la cour du travail de Bruxelles a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

    «Le principe de coopération loyale et l’article 4, paragraphe 3, TUE, d’une part, l’article 34, paragraphe 1 de la [Charte], d’autre part, s’opposent-ils à ce que pour l’admissibilité au bénéfice des allocations de chômage, un État membre refuse:

    de prendre en compte des périodes de travail effectuées comme agent contractuel au service d’une institution de l’Union européenne établie dans cet État membre, en particulier lorsque, tant avant qu’après la période d’occupation comme agent contractuel, des prestations ont été accomplies comme travailleur salarié en vertu de la réglementation dudit État membre;

    d’assimiler les journées de chômage indemnisées dans le cadre du [RAA] à des journées de travail alors que les journées de chômage indemnisées conformément à la réglementation dudit État membre bénéficient d’une telle assimilation?»

    Sur la question préjudicielle

    19

    Il y a lieu d’observer, à titre liminaire, que la décision de l’ONEM en cause au principal est intervenue le 26 août 2009, soit antérieurement à l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne.

    20

    Dès lors, il convient de considérer que, par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 10 CE et l’article 34, paragraphe 1, de la Charte s’opposent à une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, interprétée en ce sens que, pour l’admissibilité au bénéfice des allocations de chômage, ne sont pas prises en compte les périodes de travail accomplies en qualité d’agent contractuel au sein d’une institution de l’Union établie dans cet État membre et ne sont pas assimilées à des journées de travail les journées de chômage ayant donné lieu au versement d’une allocation de chômage en application du RAA, alors que les journées de chômage indemnisées en vertu de la réglementation dudit État membre bénéficient d’une telle assimilation.

    21

    À cet égard, il convient de rappeler que le droit de l’Union ne porte pas atteinte à la compétence des États membres pour aménager leurs systèmes de sécurité sociale et que, en l’absence d’une harmonisation au niveau de l’Union, il appartient à la législation de chaque État membre de déterminer les conditions d’octroi des prestations en matière de sécurité sociale. Il demeure toutefois que, dans l’exercice de cette compétence, les États membres doivent respecter le droit de l’Union (voir notamment, en ce sens, arrêts Kristiansen, C‑92/02, EU:C:2003:652, point 31, et Elchinov, C‑173/09, EU:C:2010:581, point 40).

    22

    S’agissant du RAA, il convient de rappeler également que celui-ci, de même que le statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le «statut»), a été arrêté par un règlement du Conseil, le règlement no 259/68, qui, en vertu de l’article 249, deuxième alinéa, CE, a une portée générale, est obligatoire dans tous ses éléments et est directement applicable dans tout État membre. Il s’ensuit que, en dehors des effets qu’il déploie dans l’ordre intérieur de l’administration de l’Union, le RAA oblige également les États membres dans toute la mesure où leur concours est nécessaire à sa mise en œuvre (arrêts Commission/Belgique, EU:C:1981:237, points 7 et 8; Commission/Belgique, 186/85, EU:C:1987:208, point 21, ainsi que Kristiansen, EU:C:2003:652, point 32).

    23

    Le gouvernement belge expose que le régime de l’assurance chômage est fondé en Belgique sur un principe de solidarité qui implique le versement préalable de cotisations. Selon ce gouvernement, les conditions d’octroi des allocations de chômage établies par ce régime ne violent aucune règle du droit de l’Union et, en particulier, aucune disposition particulière du RAA. Dès lors, il considère que la solution dégagée dans l’arrêt My (EU:C:2004:821) ne peut être transposée à l’affaire au principal.

    24

    Or, certes, l’article 96, paragraphe 1, du RAA, qui prévoit le versement, sous certaines conditions, d’une allocation de chômage à l’ancien agent contractuel se trouvant sans emploi après la cessation de son service auprès d’une institution de l’Union, n’emporte pas, en lui-même, d’autre restriction à la compétence des États membres quant à la détermination des conditions d’octroi des prestations prévues par leur régime national que celle qui découle de cet article de respecter le caractère complémentaire de l’allocation de chômage prévue audit article par rapport à celle à laquelle peut éventuellement prétendre l’ancien agent contractuel au titre dudit régime national.

    25

    Cependant, la Cour a jugé, dans l’arrêt My (EU:C:2004:821), que l’article 10 CE, en liaison avec le statut, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui ne permet pas de tenir compte des années de travail qu’un ressortissant de l’Union a accomplies au service d’une institution de l’Union aux fins de l’ouverture d’un droit à une pension de retraite anticipée au titre du régime national. Dans l’ordonnance Ricci et Pisaneschi (EU:C:2010:420), la Cour a précisé qu’il en était de même en ce qui concerne l’ouverture d’un droit à une pension de retraite ordinaire.

    26

    Pour statuer ainsi, la Cour ne s’est pas fondée sur une disposition particulière du statut, mais, en se référant à l’arrêt Commission/Belgique (EU:C:1981:237), a constaté, aux points 45 à 48 de l’arrêt My (EU:C:2004:821), que, à l’instar du refus de prendre les mesures nécessaires au transfert de l’équivalent actuariel ou du forfait de rachat des droits à pension acquis dans le régime de pension national au régime de pension communautaire, prévu à l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, une telle réglementation pouvait rendre plus difficile le recrutement, par les institutions de l’Union, de fonctionnaires nationaux ayant une certaine ancienneté. La Cour a relevé que, en effet, une telle réglementation était susceptible de décourager l’exercice d’une activité professionnelle au sein d’une telle institution, dans la mesure où, en acceptant un emploi auprès de l’une de celles-ci, un travailleur ayant précédemment été affilié à un régime de pension national risquait de perdre la possibilité de bénéficier, au titre de ce régime, d’une prestation de vieillesse à laquelle il aurait eu droit s’il n’avait pas accepté cet emploi. Elle a considéré que de telles conséquences ne pouvaient être admises au regard du devoir de coopération et d’assistance loyales qui incombe aux États membres à l’égard de l’Union et qui trouve son expression dans l’obligation, prévue à l’article 10 CE, de faciliter à celle-ci l’accomplissement de sa mission.

    27

    Or, la réglementation d’un État membre refusant de prendre en compte, pour l’admissibilité au bénéfice des allocations de chômage, les périodes de travail accomplies en qualité d’agent contractuel au sein d’une institution de l’Union établie dans cet État membre est également de nature à rendre plus difficile le recrutement, par ces institutions, d’agents contractuels. En effet, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général aux points 51 à 53 de ses conclusions, une telle réglementation est susceptible de dissuader les travailleurs résidant dans cet État membre d’exercer dans une institution de l’Union un emploi dont la durée réglementairement limitée les place dans la perspective de devoir s’insérer ou de se réinsérer à terme sur le marché du travail national, dès lors que, du fait de cet emploi, ils risquent de ne pas totaliser le nombre de journées de travail requis par cette réglementation pour percevoir des allocations en cas de chômage.

    28

    Une telle réglementation risque d’engendrer le même effet dissuasif en ce qui concerne la non-assimilation des journées de chômage ayant donné lieu au versement d’une allocation de chômage en application du RAA à des journées de travail pour l’ouverture du droit aux allocations de chômage dans cet État membre, étant donné que les journées de chômage indemnisées en vertu de la réglementation de celui-ci bénéficient d’une telle assimilation.

    29

    En conséquence, sans qu’il y ait lieu d’examiner la question posée au regard de l’article 34, paragraphe 1, de la Charte, il convient de répondre à cette question que l’article 10 CE, en liaison avec le RAA, s’oppose à une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, interprétée en ce sens que, pour l’admissibilité au bénéfice des allocations de chômage, ne sont pas prises en compte les périodes de travail accomplies en qualité d’agent contractuel au sein d’une institution de l’Union établie dans cet État membre et ne sont pas assimilées à des journées de travail les journées de chômage ayant donné lieu au versement d’une allocation de chômage en application du RAA, alors que les journées de chômage indemnisées en vertu de la réglementation dudit État membre bénéficient d’une telle assimilation.

    Sur les dépens

    30

    La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

     

    Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit:

     

    L’article 10 CE, en liaison avec le régime applicable aux autres agents des Communautés européennes établi par le règlement (CEE, Euratom, CECA) no 259/68 du Conseil, du 29 février 1968, fixant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés, et instituant des mesures particulières temporairement applicables aux fonctionnaires de la Commission, tel que modifié par le règlement (CE, Euratom) no 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004, s’oppose à une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, interprétée en ce sens que, pour l’admissibilité au bénéfice des allocations de chômage, ne sont pas prises en compte les périodes de travail accomplies en qualité d’agent contractuel au sein d’une institution de l’Union européenne établie dans cet État membre et ne sont pas assimilées à des journées de travail les journées de chômage ayant donné lieu au versement d’une allocation de chômage en application du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes, alors que les journées de chômage indemnisées en vertu de la réglementation dudit État membre bénéficient d’une telle assimilation.

     

    Signatures


    ( *1 ) Langue de procédure: le français.

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