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Document 62013CC0222

    Conclusions de l'avocat général Bot présentées le 12 juin 2014.
    TDC A/S contre Erhvervsstyrelsen.
    Demande de décision préjudicielle: Teleklagenævnet - Danemark.
    Renvoi préjudiciel - Réseaux et services de communications électroniques - Directive 2002/22/CE - Article 32 - Services obligatoires additionnels - Mécanisme de compensation des coûts liés à la fourniture de ces services - Notion de ʻjuridictionʼ au sens de l’article 267 TFUE - Incompétence de la Cour.
    Affaire C-222/13.

    Court reports – general

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2014:1979

    CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

    M. YVES BOT

    présentées le 12 juin 2014 ( 1 )

    Affaire C‑222/13

    TDC A/S

    contre

    Erhvervsstyrelsen

    [demande de décision préjudicielle formée par le Teleklagenævnet (Danemark)]

    «Recevabilité de la demande préjudicielle — Notion de ‘juridiction nationale’ au sens de l’article 267 TFUE — Indépendance de l’organisme de renvoi — Secteur des télécommunications — Service universel et droits des utilisateurs — Directive 2002/22/CE — Fourniture par le prestataire du service universel de services obligatoires additionnels au sens de l’article 32 de la directive — Financement des services obligatoires additionnels — Calcul du coût net — Détermination de la charge injustifiée»

    1. 

    Par le présent renvoi préjudiciel, le Teleklagenævnet (Danemark) demande à la Cour de préciser les modalités de financement d’un service obligatoire additionnel fourni au titre de l’article 32 de la directive 2002/22/CE ( 2 ) par l’entreprise prestataire du service universel.

    2. 

    La directive «service universel» vise à créer un cadre réglementaire harmonisé qui doit garantir, dans toute l’Union européenne, un accès abordable à des services de communications de base et de bonne qualité ( 3 ). Ces services sont expressément déterminés par le législateur de l’Union au chapitre II de ladite directive. Dans la mesure où ils sont fournis à un prix qui s’écarte de celui fixé dans des conditions normales d’exploitation commerciale, l’entreprise prestataire du service universel est indemnisée par l’État membre à travers un financement public ou par les entreprises du secteur à travers un fonds sectoriel.

    3. 

    Conformément au principe de subsidiarité, les États membres peuvent aller au-delà du périmètre restreint du service universel et de ses services complémentaires ( 4 ), en rendant accessibles et abordables sur leur territoire des «services obligatoires additionnels» si le marché ne répond pas aux exigences des utilisateurs finals.

    4. 

    L’article 32 de la directive «service universel», dont la portée doit être ici interprétée, dispose ainsi ce qui suit:

    «Les États membres peuvent décider de rendre accessibles au public, sur le territoire national, des services additionnels, à l’exception des services qui relèvent des obligations du service universel définies dans le chapitre II, mais, dans ce cas, aucun mécanisme de compensation impliquant la participation d’entreprises spécifiques ne peut être imposé.»

    5. 

    Cette disposition laisse aux États membres une grande latitude quant aux services susceptibles d’être fournis sur leur territoire au titre d’un «service obligatoire additionnel». Dans la présente affaire, le Royaume de Danemark a ainsi chargé TDC A/S (ci-après «TDC»), le principal opérateur danois dans le secteur des télécommunications, d’assurer des services de sécurité et d’urgence maritime par radio sur son territoire national ainsi qu’au Groenland. Ces services radio sont mis gratuitement à la disposition de tous les navires, quelle que soit leur nationalité, et permettent à ces derniers de demander une assistance lorsqu’ils sont en détresse ( 5 ).

    6. 

    Néanmoins, contrairement aux règles régissant l’indemnisation des prestataires du service universel, le législateur de l’Union ne précise pas les conditions dans lesquelles un État membre doit indemniser l’entreprise prestataire d’un service obligatoire additionnel. S’il exclut expressément le financement sectoriel, il ne précise pas, en revanche, dans quelle mesure les États membres sont tenus d’indemniser la prestation d’un service obligatoire additionnel et de quelle façon ils sont tenus de calculer les coûts afférents à cette prestation aux fins d’un financement public.

    7. 

    Dans l’affaire au principal, l’organisme compétent en matière de télécommunications ( 6 ) a ainsi refusé d’accorder à TDC une indemnisation des coûts liés à la prestation des services de sécurité et d’urgence maritime en cause pour l’année 2010. Cet organisme a, en effet, considéré que, conformément à la législation nationale applicable jusqu’au 31 mars 2012, TDC n’avait droit à aucune indemnisation quant aux frais exposés au titre de ce service obligatoire additionnel étant donné qu’elle réalisait, globalement, un excédent au titre de ses obligations de service universel et des services obligatoires additionnels pris dans leur ensemble ( 7 ). Il ressort de la décision de renvoi que, en pratique, les frais liés aux services de sécurité en cause s’élevaient à environ 60000000 couronnes danoises (DKK) par an (soit environ 8036000 euros), dont près de la moitié étaient liées à la prestation de ces services au Groenland.

    8. 

    Dans le cadre du recours dont elle a été saisie, la juridiction de renvoi s’est interrogée sur les principes et les règles gouvernant le financement de ce service obligatoire additionnel au sens de l’article 32 de la directive «service universel». Empreint de doutes quant à l’interprétation de cette disposition, le Teleklagenævnet a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

    «1)

    La [directive ‘service universel’] et, en particulier, l’article 32 de celle-ci s’opposent-ils à ce qu’un État membre instaure des règles en vertu desquelles une entreprise n’a pas droit à la couverture spécifique par l’État membre du coût net de la fourniture d’un service obligatoire additionnel qui ne relève pas du chapitre II de [cette] directive, dès lors que les excédents réalisés par l’entreprise au titre d’autres services qui relèvent de ses obligations de service universel au sens du chapitre II de [ladite] directive sont supérieurs au déficit lié à la fourniture du service obligatoire additionnel?

    2)

    La directive ‘service universel’ s’oppose-t-elle à ce qu’un État membre instaure des règles en vertu desquelles les entreprises n’ont droit à la couverture par l’État membre du coût net de la fourniture de services obligatoires additionnels ne relevant pas du chapitre II de [cette] directive que si le coût net constitue une charge injustifiée pour les entreprises en question?

    3)

    Au cas où la deuxième question appellerait une réponse négative, l’État membre peut-il décider que la fourniture d’un service obligatoire additionnel ne relevant pas du chapitre II de la directive [‘service universel’] ne se traduit pas par une charge injustifiée lorsque l’entreprise a réalisé, globalement, un excédent dans le cadre de la fourniture de tous les services pour lesquels elle a une obligation de service universel, et notamment de la fourniture des services que l’entreprise aurait également assurés si elle n’avait pas été opérateur de service universel?

    4)

    La directive ‘service universel’ s’oppose-t-elle à ce qu’un État membre instaure des règles en vertu desquelles le coût net supporté par une entreprise désignée dans le cadre de son obligation de service universel au sens du chapitre II de [cette] directive est calculé sur la base de l’ensemble des recettes et des coûts qui sont liés à la fourniture du service en question, et notamment des recettes et des coûts que l’entreprise aurait également enregistrés si elle n’avait pas été opérateur de service universel?

    5)

    La réponse aux première à quatrième questions est-elle influencée par le fait que la gestion d’un service obligatoire additionnel doit être assurée au Groenland qui, en vertu de l’annexe II du traité FUE, est un pays ou territoire d’outre-mer [(ci-après les ‘PTOM’)], dès lors que sa gestion est confiée par des autorités danoises à une entreprise établie au Danemark et que cette entreprise n’a pas d’autres activités au Groenland?

    6)

    Quelle est l’incidence des articles 107, paragraphe 1, TFUE et 108, paragraphe 3, TFUE ainsi que de la décision [2012/21/UE] de la Commission, du 20 décembre 2011, relative à l’application de l’article 106, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides d’État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général [ ( 8 )] sur la réponse aux première à cinquième questions?

    7)

    Quelle est l’incidence du principe de distorsion minimale du marché, énoncé notamment aux articles 1er, paragraphe 2, et 3, paragraphe 2, aux considérants 4, 18, 23 et 26, ainsi qu’à l’annexe IV, partie B, de la directive ‘service universel’, sur la réponse aux première à cinquième questions?

    8)

    Si les dispositions de la directive ‘service universel’ font obstacle aux régimes juridiques nationaux visés aux première, deuxième et quatrième questions, ces dispositions ou ces restrictions sont-elles assorties de l’effet direct?»

    9. 

    Dans l’affaire que nous examinons, nous avons, en particulier, de sérieux doutes concernant l’indépendance de jugement des membres composant l’organisme de renvoi dans la mesure où ces derniers, désignés et révoqués par le ministre compétent, ne disposent, notamment, d’aucune garantie particulière concernant leur révocation à l’exception de celles prévues par le droit du travail.

    I – Le droit de l’Union

    A – La directive «service universel»

    10.

    Conformément à son article 1er, la directive «service universel» vise à assurer la disponibilité, dans toute l’Union, de services de bonne qualité accessibles au public grâce à une concurrence et à un choix effectifs ainsi qu’à traiter les cas dans lesquels les besoins des utilisateurs finals ne sont pas correctement satisfaits par le marché. À cette fin, elle établit les droits des utilisateurs finals et les obligations correspondantes des entreprises fournissant des réseaux et des services de communications électroniques.

    11.

    Conformément à l’article 3, paragraphe 2, de la directive «service universel», les États membres doivent déterminer l’approche la plus efficace et la plus adaptée pour assurer la mise œuvre du service universel, dans le respect des principes d’objectivité, de transparence, de non-discrimination et de proportionnalité. Ils doivent, en outre, s’efforcer de réduire au minimum les distorsions sur le marché, en particulier lorsqu’elles prennent la forme de fournitures de services à des tarifs ou à des conditions qui diffèrent des conditions normales d’exploitation commerciale, tout en sauvegardant l’intérêt public.

    12.

    Le champ du service universel est précisé aux articles 4 à 7 de la directive «service universel». Il comprend un raccordement en position déterminée à un réseau de communications public ainsi que la mise à la disposition des utilisateurs finals d’un service de renseignements téléphoniques et d’un annuaire complets. Il comprend également la mise à disposition de postes téléphoniques payants publics, permettant, notamment, d’effectuer des appels d’urgence ainsi que des mesures particulières assurant un accès à ces services aux utilisateurs handicapés.

    13.

    Le financement du coût lié à la fourniture du service universel est réglementé aux articles 12 à 14 de la directive «service universel».

    14.

    L’article 12 de la directive «service universel», intitulé «Calcul du coût des obligations de service universel», énonce, à son paragraphe 1:

    «Lorsque les [ARN] estiment que la fourniture du service universel, telle qu’elle est énoncée dans les articles 3 à 10, peut représenter une charge injustifiée pour les entreprises désignées comme fournisseurs de service universel, elles calculent le coût net de cette fourniture.

    À cette fin, les [ARN]:

    a)

    calculent le coût net de l’obligation de service universel, compte tenu de l’avantage commercial éventuel que retire une entreprise désignée pour fournir un service universel, conformément aux indications données à l’annexe IV, partie A, ou

    b)

    utilisent le coût net encouru par la fourniture du service universel et déterminé par mécanisme de désignation conformément à l’article 8, paragraphe 2.»

    15.

    L’annexe IV, partie A, de la directive «service universel» décrit la façon dont le coût net des obligations de service universel doit être calculé.

    16.

    L’article 13, paragraphes 1 et 2, de cette directive établit les règles de financement des obligations de service universel. Cette disposition précise ce qui suit:

    «1.   Lorsque, sur la base du calcul du coût net visé à l’article 12, les [ARN] constatent qu’une entreprise est soumise à une charge injustifiée, les États membres décident, à la demande d’une entreprise désignée:

    a)

    d’instaurer un mécanisme pour indemniser ladite entreprise pour les coûts nets tels qu’ils ont été calculés, dans des conditions de transparence et à partir de fonds publics, et/ou

    b)

    de répartir le coût net des obligations de service universel entre les fournisseurs de réseaux et de services de communications électroniques.

    2.   En cas de répartition du coût comme prévu au paragraphe 1, point b), les États membres instaurent un mécanisme de répartition géré par l’[ARN] ou un organisme indépendant de ses bénéficiaires, sous la surveillance de l’[ARN].

    Seul le coût net des obligations définies dans les articles 3 à 10, calculé conformément à l’article 12, peut faire l’objet d’un financement.»

    17.

    Les États membres peuvent ainsi indemniser le prestataire à partir de fonds publics. Ils peuvent également répartir le coût net des obligations de service universel entre tous les opérateurs de réseaux et de services de communications électroniques fournissant des services sur son territoire à travers l’établissement d’un fonds sectoriel. Ces règles sont précisées aux considérants 21 à 23 ainsi qu’à l’annexe IV, partie B, de la directive «service universel».

    18.

    Enfin, l’article 32 de cette directive, intitulé «Services obligatoires additionnels», dont nous devons ici interpréter les termes, dispose ce qui suit:

    «Les États membres peuvent décider de rendre accessibles au public, sur le territoire national, des services additionnels, à l’exception des services qui relèvent des obligations du service universel définies dans le chapitre II, mais, dans ce cas, aucun mécanisme de compensation impliquant la participation d’entreprises spécifiques ne peut être imposé.»

    B – La directive 2002/77/CE

    19.

    L’article 6 de la directive 2002/77/CE ( 9 ), intitulé «Obligations de service universel», précise, à son paragraphe 1:

    «Tout régime national au sens de la directive [‘service universel’] servant à partager le coût net de l’exécution d’obligations de service universel se fonde sur des critères objectifs, transparents et non discriminatoires et est conforme aux principes de proportionnalité et de distorsion minimale du marché. En particulier, si des obligations de service universel sont imposées, en tout ou en partie, à des entreprises publiques fournissant des services de communications électroniques, ceci doit être pris en considération lors du calcul de toute contribution au coût net de l’exécution d’obligations de service universel.»

    II – Notre analyse relative à la compétence de la Cour

    20.

    Dans le cadre de l’affaire au principal, la compétence de la Cour se pose compte tenu de l’identité de l’organisme de renvoi.

    21.

    Dans sa décision de renvoi, le Teleklagenævnet expose les raisons pour lesquelles il considère remplir l’ensemble des conditions requises pour être considéré comme une «juridiction» au sens de l’article 267 TFUE et être ainsi en mesure de poser une question préjudicielle à la Cour.

    22.

    En revanche, dans ses observations, la Commission éprouve quelques doutes à ce sujet. La Cour a, par conséquent, invité le gouvernement danois à préciser les règles régissant l’activité du Teleklagenævnet et, notamment, celles qui garantissent son indépendance ainsi que celles relatives au caractère obligatoire de sa juridiction. Dans les précisions qu’il a fournies à la Cour, le gouvernement danois soutient que le Teleklagenævnet satisfait à l’ensemble des critères fixés par la jurisprudence pour être qualifié de «juridiction» et que la Cour est, dès lors, compétente, pour se prononcer sur les questions préjudicielles qui lui sont posées par cet organisme.

    23.

    Selon une jurisprudence constante, la question relative à la qualité de l’organisme de renvoi relève uniquement du droit de l’Union. Pour apprécier si celui-ci relève de la notion de «juridiction» au sens de l’article 267 TFUE, la Cour tient compte d’un ensemble d’éléments, tels l’origine légale de l’organisme, sa permanence, le caractère obligatoire de sa juridiction, la nature contradictoire de la procédure, l’application, par cet organisme, des règles de droit ainsi que son indépendance ( 10 ).

    24.

    La Cour apprécie donc la qualité de cet organisme au regard de critères tant structurels que fonctionnels, en prenant le soin de se placer dans le contexte normatif particulier dans lequel celui-ci est appelé à saisir la Cour ( 11 ). En d’autres termes, la Cour vérifie in concreto la nature spécifique des fonctions que l’organisme de renvoi exerce. Un seul et même organisme national peut ainsi être qualifié à la fois de «juridiction» et d’«administration» selon qu’il exerce des fonctions juridictionnelles ou s’acquitte de missions administratives dans un cas concret ( 12 ). À cet égard, la Cour prête une attention particulière quant au point de savoir si un litige est pendant devant l’organisme de renvoi et si celui-ci est appelé à statuer dans le cadre d’une procédure destinée à aboutir à une décision à caractère juridictionnel ( 13 ).

    25.

    Nous allons, à présent, exposer les raisons pour lesquelles nous pensons que, dans le cadre de l’affaire au principal, le Teleklagenævnet n’est pas compétent pour saisir la Cour d’une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE.

    26.

    Certes, il résulte de la décision de renvoi que les conditions énoncées dans la jurisprudence de la Cour portant sur l’origine légale de l’organisme de renvoi, son caractère permanent, la nature contradictoire de sa procédure et l’application des règles de droit sont remplies.

    27.

    En effet, le Teleklagenævnet est un organe public permanent de résolution des différends qui a été institué par l’article 68, paragraphe 1, de la loi no 169 relative aux réseaux et aux services de communications électroniques (lov nr. 169 om elektroniske kommunikationsnet og -tjenester), du 3 mars 2011 ( 14 ). Son origine légale ne saurait donc être contestée. Les modalités de son fonctionnement sont fixées par le règlement no 383 sur l’activité du Teleklagenævnet (bekendtgørelse nr. 383 om teleklagenævnets virksomhed), du 21 avril 2011 ( 15 ).

    28.

    En outre, conformément à l’article 70, paragraphe 1, de la loi sur les télécommunications, cet organisme rend ses décisions sur la base d’une application de la règle de droit, à savoir la loi sur les télécommunications.

    29.

    Par ailleurs, il ressort de la décision de renvoi que la procédure devant le Teleklagenævnet est purement écrite, mais que cet organisme veille à ce que les parties puissent présenter leurs observations conformément au principe du contradictoire.

    30.

    En revanche, le caractère obligatoire de sa compétence et l’indépendance des membres qui le composent peuvent susciter quelques réserves.

    A – Le caractère obligatoire de la compétence du Teleklagenævnet

    31.

    Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Dorsch Consult (EU:C:1997:413), la Cour a précisé la notion de juridiction obligatoire. Selon la Cour, cette notion recouvre deux réalités. Une juridiction serait «obligatoire» dans l’hypothèse où, premièrement, l’organisme de renvoi offrirait, en réalité, la seule voie de recours possible et, deuxièmement, cet organisme rendrait des décisions ayant force obligatoire ( 16 ). Dans cette affaire, la Cour n’a pas eu à donner une délimitation claire et nette qui aurait permis d’accorder la préférence à l’une ou à l’autre possibilité d’interprétation.

    32.

    En l’espèce, la Commission exprime des doutes quant au caractère obligatoire de la compétence du Teleklagenævnet, dans la mesure où la saisine de cet organisme ne constitue pas la seule voie de recours possible, l’opérateur concerné étant libre d’introduire directement un recours devant les juridictions ordinaires.

    33.

    Premièrement, sur le fondement des informations dont nous disposons, il semble que la loi sur les télécommunications ait mis en place deux procédures alternatives permettant à un opérateur économique qui, à l’instar de TDC, estime être lésé dans ses droits de contester une décision rendue par l’autorité administrative chargée de la surveillance du secteur des télécommunications, à savoir l’Erhvervsstyrelsen, lequel relève du ministère de l’Entreprise et de la Croissance. L’opérateur économique serait, en effet, libre d’introduire un recours soit devant le Teleklagenævnet (relevant du ministère de la Recherche, de l’Innovation et de l’Enseignement supérieur), soit directement devant les juridictions de droit commun ( 17 ).

    34.

    Contrairement à l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Belov (EU:C:2013:48), il semble que ces deux procédures ne soient pas autonomes. En effet, ainsi que l’a précisé le gouvernement danois dans sa réponse écrite aux questions adressées par la Cour, ni la saisine des juridictions de droit commun ni même l’engagement d’un arbitrage ne s’opposent à ce que le recours soit examiné par le Teleklagenævnet ( 18 ). Dans cette hypothèse, le gouvernement danois relève que, aux termes de l’article 345 de la loi relative à l’administration de la justice (Retsplejeloven), le juge de droit commun doit alors surseoir à statuer dans l’attente de la décision du Teleklagenævnet.

    35.

    En outre, le gouvernement danois indique que, en pratique, il ne semble pas exister de cas dans lesquels les décisions de l’Erhvervsstyrelsen ont été directement contestées devant les juridictions ordinaires sans que le Teleklagenævnet ait été saisi au préalable.

    36.

    Deuxièmement et dans l’hypothèse où l’opérateur économique concerné engagerait un recours devant le Teleklagenævnet, il ressort de l’article 71, paragraphe 2, de la loi sur les télécommunications que les décisions de celui-ci sont contraignantes pour les parties, à moins que celles-ci n’introduisent un recours devant le juge judiciaire dans un délai de huit semaines.

    37.

    En effet, aux termes de l’article 71, paragraphe 1, de la loi sur les télécommunications, le Teleklagenævnet statue définitivement en matière administrative, ces décisions ne pouvant être contestées devant aucune autre autorité administrative.

    38.

    L’ensemble de ces éléments ne s’oppose pas, à notre sens, à ce que l’on reconnaisse dans le chef du Teleklagenævnet une compétence obligatoire au sens de la jurisprudence de la Cour.

    39.

    Tout autre est la question de l’indépendance de cet organisme qui concentre, à notre sens, toutes les difficultés.

    B – L’indépendance du Teleklagenævnet

    40.

    La Commission estime que le Teleklagenævnet ne présente pas de garanties suffisantes quant à son indépendance. Elle relève, en effet, que cet organisme est lié à la structure organisationnelle du ministère de la Recherche, de l’Innovation et de l’Enseignement supérieur, ce dernier mettant à la disposition du Teleklagenævnet des services de secrétariat, conformément à l’article 69, paragraphe 2, de la loi sur les télécommunications. Cette constatation est remise en cause par le gouvernement danois.

    41.

    Comme la Cour l’a rappelé dans l’arrêt Wilson ( 19 ), la notion d’indépendance est inhérente à la mission de juger et implique avant tout que l’organisme concerné ait la qualité de tiers par rapport à l’autorité qui a adopté la décision frappée d’un recours ( 20 ).

    42.

    Selon la jurisprudence de la Cour, la notion d’indépendance comporte deux aspects.

    43.

    Le premier aspect est externe. Il suppose que l’organisme de renvoi soit protégé d’interventions ou de pressions extérieures susceptibles de mettre en péril l’indépendance de jugement de ses membres quant aux litiges qui leur sont soumis ( 21 ). Il implique que soient reconnues, dans le chef de ceux qui ont pour tâche de juger, certaines garanties telles que l’inamovibilité.

    44.

    Le second aspect que la Cour examine s’agissant de l’indépendance de l’organisme de renvoi est interne. Il rejoint la notion d’impartialité et vise l’égale distance par rapport aux parties au litige et à leurs intérêts respectifs au regard de l’objet de celui-ci ( 22 ). Cet aspect exige le respect de l’objectivité et l’absence de tout intérêt dans la solution du litige en dehors de la stricte application de la règle de droit.

    45.

    Selon la Cour, ces garanties d’indépendance et d’impartialité postulent l’existence de règles, notamment en ce qui concerne la composition de l’organisme, la nomination, la durée des fonctions ainsi que les causes d’abstention, de récusation et de révocation de ses membres. Ces règles doivent permettre d’écarter tout doute légitime, dans l’esprit des justiciables, quant à l’imperméabilité de l’organisme à l’égard d’éléments extérieurs et à sa neutralité par rapport aux intérêts qui s’affrontent. À cet égard, la Cour considère que la condition relative à l’indépendance de l’organisme de renvoi ne peut être remplie que si les cas de révocation des membres composant cet organisme sont déterminés par des dispositions législatives expresses ( 23 ).

    46.

    Or, en l’occurrence, ces conditions ne sont pas satisfaites et nous devons admettre qu’aucun des éléments fournis par le gouvernement danois dans sa réponse aux questions adressées par la Cour et lors de l’audience n’a permis d’écarter nos doutes quant à l’indépendance de jugement des membres du Teleklagenævnet et à l’imperméabilité de celui-ci à l’égard d’éléments extérieurs.

    47.

    La composition du Teleklagenævnet est régie par l’article 68 de la loi sur les télécommunications.

    48.

    Il ressort des paragraphes 2 et 3 de cette disposition que le Teleklagenævnet se compose de cinq à sept membres. Le gouvernement danois a confirmé, lors de l’audience, que le Teleklagenævnet peut donc être composé d’un nombre pair de membres, ce qui est d’ailleurs le cas à l’heure actuelle, et que, en cas de partage des voix, le président de cet organisme dispose d’une voix prépondérante conformément à l’article 5, paragraphe 3, du règlement no 383.

    49.

    Au sens de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, le fait que le président puisse disposer d’une voix prépondérante justifie à double titre un examen approfondi de son indépendance et de son impartialité, ainsi que de celles de la formation à laquelle il appartient ( 24 ). Dans son arrêt Grande Stevens et autres c. Italie, précité, rendu en grande chambre, la Cour européenne des droits de l’homme a ainsi pris en compte, dans le cadre de cet examen, le mode de désignation des membres de l’organisme en cause, la durée de leur mandat, l’existence d’une protection contre les pressions extérieures, leur impartialité à la fois subjective et objective et l’apparence d’indépendance.

    50.

    À cet égard, il ressort de la législation applicable que les membres du Teleklagenævnet sont nommés par le ministre de l’Entreprise et de la Croissance. Aux termes de l’article 68, paragraphe 2, seconde phrase, de la loi sur les télécommunications, ce dernier doit veiller à ce que cet organisme soit composé de personnalités possédant non seulement des qualifications dans les domaines du droit, et en particulier du droit de la concurrence, de l’économie et du commerce, mais également des compétences techniques dans le domaine des télécommunications ( 25 ). Il ressort, néanmoins, de l’article 68, paragraphe 4, de cette loi que le président du Teleklagenævnet doit être juriste. En vertu de cette même disposition, le ministre de l’Entreprise et de la Croissance peut désigner, parmi les membres, un juriste comme vice-président, lequel pourra remplacer le président en cas d’empêchement ou de récusation.

    51.

    Concernant l’indépendance des membres du Teleklagenævnet, le gouvernement danois indique, dans sa réponse écrite aux questions adressées par la Cour, que, conformément à l’article 69, paragraphe 3, de la loi sur les télécommunications, le Teleklagenævnet est indépendant, pour son fonctionnement, de toute instruction relative au traitement et à l’issue d’une affaire donnée.

    52.

    S’agissant, en particulier, de la révocation des membres composant cet organisme, le gouvernement danois précise également que la «révocation des membres du Teleklagenævnet n’est régie ni par la loi sur les télécommunications ni par le règlement [no 383]». Il indique, néanmoins, que ces derniers sont nommés pour une durée de quatre ans et qu’ils sont «protégés contre une révocation arbitraire et abusive conformément aux règles générales du droit administratif et du droit du travail». Lors de l’audience, le gouvernement danois a, en outre, indiqué que le pouvoir de révocation incombe à la même personne que celle à laquelle appartient le pouvoir de nomination, à savoir le ministre de l’Entreprise et de la Croissance. Le gouvernement danois a, néanmoins, souligné qu’il n’existait pas, à sa connaissance, de cas dans lesquels un membre du Teleklagenævnet a été révoqué.

    53.

    Ces éléments ne sont pas suffisants pour nous convaincre que les membres du Teleklagenævnet sont, de par leur indépendance et leur impartialité, soustraits à toute pression extérieure.

    54.

    En effet, il n’existe aucune disposition législative expresse déterminant les cas dans lesquels les membres du Teleklagenævnet peuvent être révoqués ou leur nomination peut être annulée. Par ailleurs, les garanties destinées à protéger les membres des juridictions de droit commun ne leur sont pas applicables par analogie.

    55.

    Par conséquent, les membres du Teleklagenævnet, lesquels sont, par ailleurs, désignés et révoqués par la même autorité, ne disposent d’aucune garantie particulière concernant leur révocation, à l’exception de celles prévues par le droit général du droit administratif et du droit du travail. Or, cela n’est, à notre sens, pas suffisant au sens de la jurisprudence de la Cour, car leur révocation doit être prévue par des dispositions particulières, exorbitantes du droit commun. Enfin, il est évident que leur mandat d’une durée de quatre ans ne saurait garantir leur inamovibilité.

    56.

    Ces éléments nous semblent rédhibitoires et s’opposent, à notre sens, à ce que l’on reconnaisse au Teleklagenævnet la qualité de «juridiction», au sens de l’article 267 TFUE, l’ensemble de ces circonstances tendant à démontrer que cet organisme s’apparente davantage à une autorité administrative.

    57.

    À ce stade de notre analyse, il convient, néanmoins, de préciser que les décisions du Teleklagenævnet peuvent, conformément à l’article 71, paragraphe 2, de la loi sur les télécommunications, faire l’objet d’un recours devant les juridictions judiciaires dans un délai de huit semaines. L’existence de ce recours permet donc de garantir l’effectivité du mécanisme de renvoi préjudiciel prévu à l’article 267 TFUE et l’unité d’interprétation du droit de l’Union, et, en l’occurrence, notamment de la directive «service universel», que ladite disposition du traité FUE vise à assurer. En effet, pour reprendre les termes d’une jurisprudence constante, ces juridictions nationales disposent, conformément à l’article 267 TFUE, de la faculté ou sont, le cas échéant, tenues de saisir la Cour à titre préjudiciel lorsqu’une décision sur l’interprétation ou sur la validité du droit de l’Union est nécessaire pour rendre leur jugement ( 26 ).

    58.

    Nous estimons, par conséquent, que la Cour n’est pas compétente pour statuer sur les questions préjudicielles posées par le Teleklagenævnet.

    59.

    C’est donc à titre subsidiaire et dans l’hypothèse où la Cour devrait néanmoins reconnaître sa compétence que nous examinerons les questions préjudicielles posées par cet organisme de renvoi.

    III – L’examen, à titre subsidiaire, des questions préjudicielles

    60.

    L’ensemble des questions que pose le Teleklagenævnet visent à déterminer les conditions dans lesquelles un État membre est tenu, conformément à l’article 32 de la directive «service universel», de verser une compensation à une entreprise prestataire d’un service obligatoire additionnel.

    61.

    Aux fins de notre analyse, nous examinerons ces questions dans un ordre différent de celui présenté par l’organisme de renvoi.

    62.

    Nous débuterons notre étude par l’examen de la cinquième question, laquelle pose, à notre sens, une question liminaire, à savoir celle de l’incidence du lieu d’exécution de la prestation en cause sur les réponses qu’il conviendra d’apporter aux première à quatrième questions.

    63.

    Nous poursuivrons, ensuite, notre analyse par l’étude des questions relatives à l’interprétation de la directive «service universel».

    64.

    Nous aborderons, dans un premier temps, l’examen de la quatrième question, relative à la méthode de calcul du coût net des obligations de service universel.

    65.

    Nous examinerons, dans un second temps, les questions relatives aux modalités de financement des services obligatoires additionnels. Dans ce cadre, nous analyserons ensemble les première, sixième et septième questions, car elles concernent chacune les règles de base applicables à l’octroi et au calcul de l’indemnisation due au titre de la fourniture de ces services. Nous répondrons à cette occasion à la huitième question, relative à l’effet direct de l’article 32 de la directive «service universel». Enfin, nous analyserons les deuxième et troisième questions, lesquelles concernent davantage le détail même du calcul de cette indemnisation.

    A – Sur la cinquième question, relative au statut particulier du Groenland

    66.

    Par sa cinquième question, le Teleklagenævnet s’interroge sur le point de savoir si le fait que TDC fournit le service obligatoire additionnel en cause au Groenland influence les réponses qu’il convient d’apporter aux première à quatrième questions, relatives à l’interprétation de l’article 32 de la directive «service universel».

    67.

    La problématique que suscite la présente affaire réside donc dans le fait que le service de sécurité et d’urgence maritime n’est pas uniquement offert par TDC sur le territoire d’un État membre de l’Union, mais qu’il l’est également dans un PTOM. La question est, par conséquent, de savoir si le statut particulier dont jouit le Groenland implique que la Cour adopte une approche différente de celle qu’elle adopterait si l’opérateur fournissait ce service uniquement sur le territoire de l’État membre quant à l’interprétation de la directive «service universel», d’une part, et quant à l’application des règles relatives aux aides d’État, d’autre part.

    68.

    Premièrement, le fait que TDC fournit le service en cause au Groenland n’a, à notre sens, aucune incidence quant à l’applicabilité des règles relatives aux aides d’État à la présente espèce. En effet, le financement en question concerne un financement public, provenant des ressources du Royaume de Danemark, et bénéficie à une entreprise danoise installée sur le territoire national. Ce point ne soulève donc aucune difficulté particulière.

    69.

    Tout autre est la question de l’applicabilité de la directive «service universel». Pour saisir la portée de cette question, il convient de s’intéresser brièvement à la situation particulière et au statut du Groenland vis-à-vis du droit de l’Union.

    70.

    Les PTOM, visés dans le cadre de l’annexe II du traité FUE et dont fait partie le Groenland, sont des «territoires» attachés à un État membre pour des raisons historiques ou politiques. Ils ne constituent pas des États souverains dotés de la personnalité juridique internationale. En ce qui concerne le Groenland, celui-ci fait partie intégrante du Royaume de Danemark. Il dispose, néanmoins, d’un statut d’autonomie interne obtenu le 1er mai 1979 qui en fait une «communauté distincte au sein du Royaume de Danemark», et renforcé à la suite de la loi sur l’autonomie du Groenland adoptée par le Parlement danois le 20 juin 2009.

    71.

    Comme l’a indiqué la Cour dans son arrêt Antillean Rice Mills e.a./Commission ( 27 ), «bien que les PTOM soient des pays et territoires associés ayant des liens particuliers avec [l’Union], ils ne font toutefois pas partie de cette dernière» ( 28 ). Les traités, et particulièrement les articles 52 TUE et 355, point 2, TFUE, accordent donc à ces territoires un statut particulier, fondé sur un régime spécial d’association axé sur le développement économique et social des PTOM. Ce régime est défini de manière générale dans le cadre de la quatrième partie du traité FUE, laquelle regroupe les articles 198 TFUE à 204 TFUE et, pour ce qui concerne le Groenland, dans le cadre du protocole (no 34) sur le régime particulier applicable au Groenland, annexé aux traités UE et FUE.

    72.

    Malheureusement, ces dispositions ne permettent pas de déterminer avec certitude si le régime spécial d’association des PTOM fonde un ordre juridique autonome et propre dans lequel seuls les articles 198 TFUE à 204 TFUE et les actes adoptés sur le fondement de ceux-ci leur seraient applicables ou si ce régime constitue une lex specialis, s’appliquant en cas de nécessité, en lieu et place des règles générales du traité FUE.

    73.

    Les dispositions figurant dans la quatrième partie du traité FUE sont, en effet, rédigées dans des termes ambigus et la jurisprudence n’apporte pas, par ailleurs, de réponse claire. Ces difficultés ont été parfaitement bien résumées par l’avocat général Cruz Villalón dans ses conclusions dans l’affaire Prunus et Polonium ( 29 ). Après avoir dressé les deux lignes jurisprudentielles de la Cour ( 30 ), l’avocat général Cruz Villalón a considéré que «la qualification d’un PTOM en tant qu’État membre ou pays tiers est une question dont la réponse ne peut pas être catégorique, mais adaptée, au cas par cas, en fonction du cadre juridique pertinent et en tenant tout particulièrement compte des objectifs poursuivis par le régime spécial d’association prévu par la quatrième partie du [traité FUE]» ( 31 ).

    74.

    Nous partageons cette analyse. Il nous semble, en effet, que les dispositions du traité FUE et de son droit dérivé devraient être applicables aux PTOM, à moins que ces dispositions ne soient supplantées par des règles spécifiques prévues aux articles 198 TFUE à 204 TFUE ou à moins qu’elles ne compromettent les objectifs poursuivis dans le cadre du régime d’association.

    75.

    Or, dans l’affaire au principal, il est évident que la prestation d’un service obligatoire additionnel dans les conditions établies à l’article 32 de la directive «service universel» participe aux objectifs du régime d’association conclu avec le Groenland, puisqu’elle contribue au développement économique et social de ce territoire et favorise les intérêts de ses habitants conformément aux objectifs visés aux articles 198 TFUE et 199 TFUE. Par ailleurs, aucune disposition spécifique prévue dans le cadre des articles 198 TFUE à 203 TFUE ou dans le cadre du protocole (no 34) sur le régime particulier applicable au Groenland, annexé aux traités UE et FUE, ne s’oppose à une telle applicabilité.

    76.

    Nous sommes, par conséquent, d’avis que, dans une situation telle que celle en cause au principal, le fait que l’entreprise en charge du service obligatoire additionnel visé à l’article 32 de la directive «service universel» fournit ce service non seulement sur le territoire de l’État membre, mais également sur le territoire d’un PTOM n’influence pas l’interprétation qu’il convient d’adopter des dispositions de cette directive ni l’application des règles relatives aux aides d’État.

    B – Sur la quatrième question, relative à la méthode de calcul du coût net des obligations de service universel

    77.

    Par sa quatrième question, le Teleklagenævnet demande à la Cour si la directive «service universel» s’oppose à ce qu’un État membre tienne compte, aux fins du calcul du coût net supporté par une entreprise prestataire du service universel, de l’ensemble des recettes et des dépenses liées à la fourniture du service en question, et notamment de celles que l’entreprise aurait enregistrées si elle n’avait pas été en charge de ces obligations.

    78.

    La réponse à cette question se trouve dans le texte même de la directive «service universel».

    79.

    Comme l’énonce le considérant 4 de cette directive, le fait de garantir un service universel peut entraîner la fourniture de certains services à certains utilisateurs finals à des prix qui s’écartent de ceux découlant de conditions normales du marché. C’est pourquoi le législateur de l’Union a prévu, ainsi qu’il ressort du considérant 18 de ladite directive, que les États membres devraient, lorsqu’il y a lieu, établir des mécanismes de financement du coût net afférent aux obligations de service universel dans les cas où il est démontré que ces obligations ne peuvent être assumées qu’à perte ou à un coût net qui dépasse les conditions normales d’exploitation commerciale.

    80.

    Ainsi, conformément à l’article 12, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive «service universel», les ARN doivent calculer le coût net afférent à la fourniture du service universel lorsqu’elles estiment que celle-ci peut représenter une charge injustifiée pour l’entreprise prestataire.

    81.

    Le législateur de l’Union a détaillé les méthodes de calcul du coût net des obligations de service universel à l’article 12, paragraphe 1, second alinéa, sous a), de la directive «service universel» et les a précisées au considérant 19 et à l’annexe IV, partie A, de cette directive.

    82.

    Il ressort, tout d’abord, de l’article 12, paragraphe 1, second alinéa, sous a), de ladite directive que les États membres doivent calculer le coût net de l’obligation de service universel en tenant compte de l’avantage commercial éventuel que retire l’entreprise prestataire.

    83.

    Il ressort, ensuite, de l’annexe IV, partie A, de la directive «service universel» que le coût net correspond à la différence entre le coût net supporté par l’entreprise lorsqu’elle fournit un service universel et lorsqu’elle n’en fournit pas. Le législateur de l’Union ajoute que les États membres doivent alors veiller à évaluer correctement les coûts que l’entreprise aurait évités si elle avait eu le choix de ne pas remplir d’obligations de service universel.

    84.

    Le législateur de l’Union précise, enfin, que le calcul du coût net doit tenir compte non seulement des dépenses et des recettes, mais également des avantages immatériels découlant de la fourniture du service universel ( 32 ).

    85.

    Il faut également ajouter que, aux termes du considérant 17 de sa décision 2012/21, la Commission a indiqué que, s’agissant de l’indemnisation d’une entreprise en charge d’un service d’intérêt économique général, le coût net à prendre en considération devait être calculé soit sur la base de la différence entre le coût occasionné par la gestion du service d’intérêt économique général (ci-après le «SIEG») et les recettes tirées de ce service, soit sur la base de la différence entre le coût net pour l’entreprise assurant l’obligation de service public et le coût net ou le bénéfice de la même entreprise n’assurant pas l’obligation de service public.

    86.

    Au vu de ces éléments, nous estimons, par conséquent, que l’article 12, paragraphe 1, second alinéa, sous a), de la directive «service universel» doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale par laquelle un État membre tient compte, aux fins du calcul du coût net des obligations de service universel, de l’ensemble des recettes et des dépenses liées à la fourniture de ce service, et notamment de celles que l’entreprise aurait enregistrées si elle n’avait pas été prestataire dudit service.

    C – Sur les première, sixième et septième questions, relatives aux règles et aux principes applicables à l’indemnisation d’une entreprise prestataire d’un service obligatoire additionnel

    87.

    Les première, sixième et septième questions invitent la Cour à préciser les règles et les principes gouvernant le financement par l’État membre des services obligatoires additionnels.

    88.

    Par sa première question, le Teleklagenævnet demande, en substance, à la Cour si l’article 32 de la directive «service universel» s’oppose à ce qu’un État membre refuse d’indemniser une entreprise prestataire d’un service obligatoire additionnel au motif que le coût de ce service est couvert par les bénéfices que celle-ci a réalisés au titre de ses obligations de service universel.

    89.

    Par sa sixième question, le Teleklagenævnet s’interroge sur l’incidence quant à l’interprétation de cette disposition des règles relatives aux aides d’État établies non seulement aux articles 107, paragraphe 1, TFUE et 108, paragraphe 3, TFUE, mais également dans la décision 2012/21. Cette décision énonce les conditions dans lesquelles un État membre est exempté de notifier préalablement à la Commission une aide d’État versée sous la forme d’une compensation pour un SIEG rendu lorsque cette compensation peut être considérée comme compatible avec l’article 106, paragraphe 2, TFUE.

    90.

    De la même façon, le Teleklagenævnet s’interroge, par sa septième question, sur l’incidence quant à l’interprétation de l’article 32 de la directive «service universel» du principe de distorsion minimale du marché sur lequel se fonde le législateur de l’Union dans le cadre de cette directive ( 33 ).

    91.

    Nous examinerons ensemble ces trois questions dans la mesure où les règles et les principes que vise le Teleklagenævnet dans ses sixième et septième questions n’influencent pas, mais gouvernent la mise en œuvre des obligations découlant de la directive «service universel», et notamment les mécanismes de compensation qui doivent être instaurés aux fins du financement du service universel et des services obligatoires additionnels.

    92.

    Pour les raisons que nous allons, à présent, exposer, nous estimons qu’un État membre ne peut, en vertu de l’article 32 de la directive «service universel», refuser d’indemniser une entreprise prestataire d’un service obligatoire additionnel lorsque le coût de ce service est couvert par les bénéfices que celle-ci a réalisés au titre de ses obligations de service universel.

    93.

    À l’instar de la Commission, nous estimons que les régimes de compensation prévus par la directive «service universel» relatifs, d’une part, au service universel et, d’autre part, aux services obligatoires additionnels sont indépendants l’un de l’autre et que les coûts nets engagés pour chacun de ces services doivent faire l’objet d’une comptabilité séparée de façon à garantir que l’intégralité des recettes dégagées dans le cadre du service universel n’entre pas dans le calcul du coût net du service obligatoire additionnel et ne conditionne pas l’octroi de l’indemnisation due au titre de la prestation de ce service.

    94.

    Il est vrai que l’obligation de tenir une comptabilité séparée n’est pas prévue expressément dans le cadre du financement des services obligatoires additionnels. Néanmoins, cette exigence se dégage des principes fixés par le législateur de l’Union dans le cadre de la directive «service universel» et de l’applicabilité des règles relatives aux aides d’État.

    95.

    En premier lieu, les règles établies à l’article 32 de la directive «service universel» impliquent que l’entreprise prestataire d’un service obligatoire additionnel soit indemnisée. Certes, le législateur de l’Union ne précise pas de façon détaillée les principes applicables à cette indemnisation. Il se contente d’interdire aux États membres de répercuter le coût de ce service sur les opérateurs de réseaux et de services de communications électroniques présents sur le marché national ( 34 ). Le législateur de l’Union tend ainsi à garantir que les contributions que versent les acteurs du marché sont directement liées à la fourniture du service universel et ne s’étendent pas à des activités connexes ou accessoires. Son objectif est de garantir une distorsion minimale du marché en évitant d’imposer, à travers l’établissement d’un fonds sectoriel, une charge financière disproportionnée aux opérateurs du secteur, et notamment aux nouveaux entrants ( 35 ). Aucune des entreprises du secteur, parmi lesquelles figure l’entreprise prestataire, ne doit donc être appelée à contribuer au financement d’un service obligatoire additionnel.

    96.

    Le texte de l’article 32 de la directive «service universel» implique donc que l’entreprise prestataire d’un service obligatoire additionnel ne soit pas conduite à supporter le coût lié à la prestation de ce service et puisse obtenir de la part de l’État membre une compensation de ce coût.

    97.

    Les termes de cette disposition sont, à cet égard, suffisamment précis et inconditionnels pour être revêtus, à notre sens, de l’effet direct.

    98.

    Dans ces conditions, nous estimons qu’un État membre ne peut adopter une réglementation nationale qui tend in fine à priver l’entreprise prestataire d’un service obligatoire additionnel d’une indemnisation.

    99.

    En second lieu, les règles relatives au financement du service universel impliquent une séparation comptable des activités relevant du service universel et de celles afférentes aux autres types de services parmi lesquels figurent les services obligatoires additionnels. Ainsi, aux fins du calcul de l’indemnisation, les États membres sont tenus de prendre uniquement en compte les recettes réalisées par le prestataire du service universel dans le cadre de la fourniture de ce service ( 36 ).

    100.

    L’exigence d’une séparation comptable figure à l’article 13, paragraphe 1, sous a), de la directive 2002/21. Conformément à cette disposition, les entreprises ont l’obligation de tenir une comptabilité séparée permettant d’identifier tous les éléments de dépenses et de recettes liés à leurs activités associées à la fourniture de réseaux ou de services de communications électroniques lorsqu’elles jouissent, en outre, de droits spéciaux ou exclusifs pour la fourniture de services dans d’autres secteurs dans le même État membre.

    101.

    Cette exigence a été reprise dans le cadre de la directive «service universel» s’agissant de la fourniture du service universel.

    102.

    En effet, le respect des principes visés par le législateur de l’Union aux articles 12 à 14 de cette directive, lesquels doivent être lus à la lumière des considérants 3, 18, 22 à 25 et de l’annexe IV de ladite directive, implique que le régime d’indemnisation soit en rapport direct avec le coût net généré par les obligations de service universel, ce que la Cour a, par ailleurs, confirmé dans sa jurisprudence ( 37 ). Il ressort ainsi des considérants 3 et 18 de la directive «service universel» que les États membres sont tenus d’indemniser les entreprises désignées pour le coût net «spécifiquement encouru» pour la fourniture du service universel. Le respect de ces principes exige de la part des ARN qu’elles établissent une distinction entre, d’une part, le coût net lié au service universel et, d’autre part, les coûts liés à la fourniture de services ne relevant pas du chapitre II de cette directive, qu’il s’agisse de services obligatoires additionnels ou de services marchands. À cet égard, le législateur de l’Union a d’ailleurs prévu des modalités de financement distinctes selon la nature du service, excluant ainsi expressément le financement sectoriel dans le cadre de la mise en œuvre de l’article 32 de ladite directive ( 38 ).

    103.

    L’exigence d’une séparation comptable non seulement participe à la transparence de la procédure de financement ( 39 ), mais permet également de garantir que le financement du service universel est opéré par un moyen neutre du point de vue de la concurrence ( 40 ).

    104.

    Une telle exigence assure aussi, conformément au considérant 18 de la directive «service universel», que le financement du service universel et des services obligatoires additionnels respecte les règles relatives aux aides d’État ( 41 ).

    105.

    La séparation comptable est, en effet, une exigence gouvernant l’octroi par les États membres des compensations dues au titre de la prestation de services d’intérêt économique général.

    106.

    La prestation d’un service obligatoire additionnel relève, à l’évidence, tout comme le service universel, d’un service d’intérêt économique général au sens de l’article 106, paragraphe 2, TFUE. Si les services obligatoires additionnels ne peuvent être qualifiés de «service universel» au sens de la directive «service universel», il n’en reste pas moins que, par leur nature et leur finalité, ils répondent aux mêmes préoccupations que celles auxquelles répond le service universel et sont fournis dans les mêmes conditions ( 42 ). Ainsi, la fourniture d’un service obligatoire additionnel s’exécute, le plus souvent, à un prix qui s’écarte de celui fixé dans des conditions normales d’exploitation commerciale.

    107.

    Or, les compensations accordées par les États membres pour la prestation d’un service d’intérêt économique général sont soumises au respect des règles fixées par le législateur de l’Union aux articles 107 TFUE et 108 TFUE. Pour éviter que ces compensations ne soient qualifiées d’«aides d’État» incompatibles avec l’article 107, paragraphe 1, TFUE, l’intervention étatique doit alors satisfaire aux quatre conditions cumulatives édictées par la Cour dans son arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg ( 43 ). Ces conditions sont les suivantes:

    premièrement, l’entreprise bénéficiaire doit réellement avoir la charge d’obligations de service public et ces obligations doivent être clairement définies;

    deuxièmement, les paramètres sur la base desquels est calculée la compensation doivent être préalablement établis de façon objective et transparente, afin d’éviter qu’elle comporte un avantage économique susceptible de favoriser l’entreprise bénéficiaire par rapport aux entreprises concurrentes;

    troisièmement, la compensation ne doit pas dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable, et

    quatrièmement, le niveau de la compensation doit être déterminé sur la base d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée des moyens nécessaires, aurait encourus lorsque l’entreprise n’a pas été choisie par l’intermédiaire d’une procédure de marché public.

    108.

    Si ces critères ne sont pas respectés et si les conditions générales d’applicabilité de l’article 107, paragraphe 1, TFUE sont remplies, les compensations versées par l’État membre à l’entreprise prestataire du service d’intérêt économique général constitueront alors des aides d’État et seront soumises aux dispositions des articles 106 TFUE, 107 TFUE et 108 TFUE.

    109.

    La Commission a clarifié chacune de ces conditions dans sa communication relative à l’application des règles de l’Union européenne en matière d’aides d’État aux compensations octroyées pour la prestation de services d’intérêt économique général ( 44 ). Or, s’agissant des principes gouvernant l’octroi et le calcul d’une indemnisation, celle-ci a pris de soin de préciser, au point 56 de cette communication, que «[s]euls les coûts directement liés à la prestation du SIEG peuvent être pris en compte dans ce contexte» ( 45 ).

    110.

    La Commission a également précisé, à l’article 5, paragraphe 3, de sa décision 2012/21, que toute compensation octroyée à une entreprise chargée de la gestion de services d’intérêt économique général repose sur le principe d’une comptabilité analytique permettant d’identifier chacun des coûts liés à la prestation du service en question.

    111.

    Notons que cette exigence d’une séparation comptable figurait déjà dans le cadre de la directive 2006/111/CE de la Commission, du 16 novembre 2006, relative à la transparence des relations financières entre les États membres et les entreprises publiques ainsi qu’à la transparence financière dans certaines entreprises ( 46 ). Conformément à l’article 4 de la directive 2006/111, toute entreprise en charge de la gestion d’un service d’intérêt économique général, recevant une compensation de service public en relation avec ce service et qui exerce d’autres activités, a l’obligation de tenir des comptes séparés permettant d’imputer tous les produits et toutes les charges aux différentes activités concernées.

    112.

    En l’occurrence, dans une affaire telle que celle en cause au principal, le respect d’une telle obligation permet, en outre, de garantir que l’entreprise prestataire à la fois du service universel et du service obligatoire additionnel ne sera pas pénalisée. En effet, cette séparation comptable permet d’éviter que ne soient doublement prises en compte les recettes que dégage l’entreprise au titre de ses obligations de service universel, d’une part, aux fins du calcul du coût net de l’obligation de service universel et, par conséquent, de la compensation octroyée à ce titre et, d’autre part, aux fins du calcul du coût net du service obligatoire additionnel et, par conséquent, de l’octroi de la compensation versée au titre du service obligatoire additionnel. Une telle pratique pénaliserait nécessairement l’entreprise prestataire puisqu’elle reviendrait à lui faire supporter le coût du service obligatoire additionnel, et ce contrairement aux termes mêmes de l’article 32 de la directive «service universel».

    113.

    Comme nous le verrons dans nos développements ultérieurs, cela n’exclut pas, néanmoins, que les recettes dégagées dans le cadre des obligations du service universel puissent être prises en compte à un stade ultérieur, dans le cadre de l’appréciation du caractère excessif ou injustifié de la charge pesant sur l’entreprise prestataire.

    114.

    Au vu de l’ensemble de ces éléments, nous sommes donc d’avis que l’article 32 de la directive «service universel» doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui permet à l’État membre de rejeter la demande d’indemnisation introduite par une entreprise prestataire d’un service obligatoire additionnel, au motif que le coût de ce service est couvert par les bénéfices que celle-ci a réalisés au titre de ses obligations de service universel.

    115.

    Compte tenu de la réponse que nous proposons d’apporter à cette question, il convient, à présent, d’examiner la huitième question que pose le Teleklagenævnet.

    D – Sur la huitième question, relative à l’effet direct de l’article 32 de la directive «service universel»

    116.

    Par sa huitième question, le Teleklagenævnet s’interroge sur le point de savoir si l’article 32 de la directive «service universel» est assorti d’un effet direct.

    117.

    Selon une jurisprudence constante, lorsqu’un État membre s’abstient de transposer une directive dans les délais ou en fait une transposition incorrecte, les particuliers sont fondés à invoquer contre cet État les dispositions de cette directive qui apparaissent comme étant, du point de vue de leur contenu, inconditionnelles et suffisamment précises ( 47 ).

    118.

    Dans la présente affaire, il est vrai que l’article 32 de la directive «service universel» ne précise pas les règles de calcul qu’un État membre est tenu d’adopter aux fins de l’octroi à l’entreprise prestataire d’un service obligatoire additionnel d’une indemnisation. À cet égard et sous réserve du respect des règles relatives aux aides d’État, les États membres disposent, par conséquent, d’une marge de manœuvre.

    119.

    Néanmoins, l’article 32 de la directive «service universel» crée dans le chef de l’entreprise prestataire du service obligatoire additionnel le droit à obtenir une compensation des coûts liés à la fourniture de ce service. En excluant le financement sectoriel, le législateur de l’Union interdit aux États membres de faire supporter le coût dudit service par les entreprises du secteur parmi lesquelles figure l’entreprise prestataire et impose une compensation publique. Les termes de cette disposition sont, à notre sens, suffisamment précis et inconditionnels pour revêtir, à cet égard, un effet direct.

    120.

    Dans ces circonstances, un État membre ne saurait retenir une méthode de calcul des coûts liés à la prestation du service obligatoire additionnel aboutissant à priver l’entreprise prestataire de ce service du droit à être indemnisée.

    121.

    Au vu de ces considérations, nous sommes d’avis que l’article 32 de la directive «service universel» est, en tant qu’il crée dans le chef de l’entreprise prestataire du service obligatoire additionnel le droit à obtenir une compensation des coûts liés à la fourniture de ce service, revêtu d’un effet direct.

    E – Sur les deuxième et troisième questions, relatives à l’existence d’une charge injustifiée ouvrant droit à une indemnisation

    122.

    Les deux dernières questions que nous aborderons invitent la Cour à préciser les conditions dans lesquelles les États membres peuvent tenir compte de l’existence d’une charge injustifiée dans le chef de l’entreprise prestataire d’un service obligatoire additionnel aux fins de l’octroi d’une indemnisation.

    123.

    Par sa deuxième question, le Teleklagenævnet demande, tout d’abord, à la Cour si la directive «service universel» s’oppose à une réglementation nationale qui soumet l’octroi d’une telle indemnisation à l’existence d’une charge injustifiée dans le chef de l’entreprise prestataire d’un service obligatoire additionnel.

    124.

    Dans l’hypothèse où cette directive ne s’opposerait pas à une telle réglementation nationale, il demande, par sa troisième question, si, aux fins de l’appréciation du caractère injustifié de cette charge, un État membre peut tenir compte des bénéfices que l’entreprise prestataire du service obligatoire additionnel a dégagés dans le cadre de ses obligations de service universel.

    125.

    À notre sens, rien ne s’oppose à une telle réglementation.

    126.

    En effet, il ne ressort ni de l’article 32 de la directive «service universel» ni d’aucune autre disposition de celle-ci que le législateur de l’Union ait entendu fixer lui-même les conditions dans lesquelles les ARN doivent calculer le coût net de la fourniture d’un service obligatoire additionnel et les conditions dans lesquelles celles-ci sont amenées à considérer que ladite fourniture peut représenter une charge injustifiée pour l’entreprise prestataire.

    127.

    Dans ces conditions, en l’absence d’une réglementation spécifique, les États membres sont, à notre sens, libres de fixer les conditions selon lesquelles le coût du service obligatoire additionnel doit être calculé et la charge en résultant pour l’entreprise prestataire déterminée à condition, néanmoins, qu’ils respectent les règles relatives aux aides d’État telles qu’elles découlent des conditions énoncées par la Cour dans son arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg (EU:C:2003:415), et en particulier les principes gouvernant l’octroi par les États membres des compensations de service public.

    128.

    Ces derniers sont, par conséquent, libres d’examiner si l’entreprise prestataire du service obligatoire additionnel est effectivement soumise à une charge injustifiée avant de mettre en place un mécanisme d’indemnisation en raison des coûts supportés par cette entreprise.

    129.

    Ce système est celui que le législateur de l’Union a établi dans le cadre du financement du service universel aux articles 12 et 13 de la directive «service universel».

    130.

    Il ressort, en effet, du considérant 21 de la directive «service universel» que le législateur de l’Union a entendu lier les mécanismes de financement des coûts nets engendrés par la fourniture du service universel à l’existence d’une charge excessive dans le chef de l’entreprise.

    131.

    Afin de procéder à l’indemnisation, les États membres doivent donc calculer le coût net que représente la fourniture de ce service pour chacune des entreprises concernées conformément à la méthode de calcul visée à l’article 12 de la directive «service universel» et précisée au considérant 19 et à l’annexe IV, partie A, de celle-ci ( 48 ). C’est une fois ce coût net déterminé que les États membres peuvent alors apprécier si l’entreprise prestataire du service universel est effectivement soumise à une charge injustifiée ou excessive et qu’ils peuvent alors décider, à la demande de cette entreprise, d’adopter des modalités d’indemnisation en raison dudit coût.

    132.

    En effet, ainsi que l’a relevé la Cour, le coût net du service universel ne représente pas nécessairement une charge excessive pour toutes les entreprises concernées et le coût net lié à la fourniture du service universel n’ouvre pas automatiquement un droit à indemnisation ( 49 ).

    133.

    La Cour a défini la notion de charge excessive ou injustifiée dans sa jurisprudence. Il s’agit de la charge qui, pour chaque entreprise concernée, présente un caractère excessif au regard de sa capacité à la supporter compte tenu de l’ensemble de ses caractéristiques propres, notamment du niveau de ses équipements, de sa situation économique et financière ainsi que de sa part de marché ( 50 ).

    134.

    Lorsqu’une obligation de service universel représente une charge excessive pour une entreprise, l’État membre est alors autorisé à indemniser celle-ci par l’intermédiaire d’un mécanisme de couverture ou de compensation des coûts. Cette indemnisation entraînant des transferts de fonds, les États membres sont tenus de garantir qu’ils sont effectués de manière objective et transparente, dans le respect des règles relatives aux aides d’État et de façon à entraîner la distorsion la plus faible possible de la concurrence et de la demande.

    135.

    Nous ne voyons aucune raison susceptible de faire obstacle à ce qu’un État membre applique par analogie ces dispositions aux fins de la détermination de la compensation versée au titre de la prestation de services obligatoires additionnels. Bien au contraire. Les règles établies aux articles 12 et 13 de la directive «service universel» ont pour objectif de garantir les principes de transparence, d’objectivité, de non-discrimination et de proportionnalité ( 51 ), sur lesquels repose le financement. Elles répondent également aux préoccupations exprimées par la Cour dans son arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg (EU:C:2003:415) et aux conditions que celle-ci a établies de façon à ce que les compensations de service public tombent en dehors du champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

    136.

    À l’exception des règles spécifiques liées à la nature du financement, il nous semble donc parfaitement logique que l’indemnisation de l’entreprise prestataire d’un service obligatoire additionnel réponde aux mêmes exigences que celles dictées dans le cadre de la prestation du service universel.

    137.

    En effet, comme nous l’avons indiqué, si les services obligatoires additionnels ne peuvent être qualifiés de «service universel» au sens de la directive «service universel», il n’en reste pas moins que, par leur nature et leur finalité, ils répondent aux mêmes préoccupations que celles auxquelles répond le service universel et sont fournis dans les mêmes conditions. Ainsi, la fourniture d’un service obligatoire additionnel s’exécute, le plus souvent, à un prix qui s’écarte de celui fixé dans des conditions normales d’exploitation commerciale. Dans le cadre de la directive «service universel», le législateur de l’Union soumet la prestation des services obligatoires additionnels, comme la fourniture du service universel, au respect des mêmes principes, et en particulier au respect des règles relatives aux aides d’État.

    138.

    S’agissant de la compensation des coûts liés à la fourniture des services obligatoires additionnels, les États membres restent donc tenus de respecter les règles relatives aux aides d’État telles qu’elles découlent des conditions énoncées par la Cour dans son arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg (EU:C:2003:415), et en particulier les principes gouvernant l’octroi par les États membres des compensations de service public.

    139.

    Les États membres doivent ainsi s’assurer que les paramètres de calcul de l’indemnisation n’entraînent aucune distorsion de concurrence sur le marché et ne comportent, par conséquent, aucun avantage économique susceptible de favoriser l’entreprise bénéficiaire par rapport aux entreprises concurrentes. Selon la Commission, cette compensation ne doit donc pas excéder ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts nets spécifiquement encourus par l’accomplissement des obligations de service public compte tenu des recettes y relatives, au risque de constituer une aide d’État incompatible avec le marché intérieur. Pour autant, les États membres sont également tenus d’assurer à l’entreprise prestataire un bénéfice raisonnable ( 52 ).

    140.

    En liant, dans le cadre du service universel, le financement des coûts nets engendrés par la fourniture du service à l’existence d’une charge excessive dans le chef de l’entreprise, le législateur de l’Union répond à l’ensemble de ces préoccupations.

    141.

    Pour les motifs que nous venons d’évoquer et parce qu’il n’existe, à notre sens, aucune raison de distinguer les modalités relatives à l’indemnisation d’une entreprise selon qu’elles concernent la fourniture d’un service universel ou la prestation d’un service obligatoire additionnel – à l’exception, évidemment, de celles relatives à la nature du financement –, nous estimons qu’un État membre peut soumettre l’octroi d’une compensation versée au titre de la fourniture d’un service obligatoire additionnel à l’existence d’une charge injustifiée dans le chef de l’entreprise prestataire.

    142.

    Compte tenu de la réponse que nous proposons d’apporter à cette question, il convient, à présent, d’examiner la troisième question que pose le Teleklagenævnet à la Cour.

    143.

    Celui-ci se demande si un État membre peut tenir compte du bénéfice que l’entreprise prestataire du service obligatoire additionnel a dégagé dans le cadre de ses obligations de service universel pour apprécier si la charge que celui-ci supporte au titre de la prestation du service obligatoire additionnel représente une charge injustifiée ou excessive.

    144.

    Nous rappelons que la Cour a défini la notion de charge excessive ou injustifiée dans sa jurisprudence comme étant la charge qui, pour chaque entreprise concernée, présente un caractère excessif au regard de sa capacité à la supporter compte tenu de l’ensemble de ses caractéristiques propres, notamment du niveau de ses équipements, de sa situation économique et financière ainsi que de sa part de marché ( 53 ).

    145.

    Or, les recettes que l’entreprise dégage dans le cadre de ses obligations de service universel participent directement à sa capacité économique et financière. Par conséquent, il nous semble que ces recettes peuvent être prises en compte non pas dans le calcul du coût net du service obligatoire additionnel, mais dans le cadre de l’appréciation du caractère injustifié ou excessif de la charge que doit supporter l’entreprise au titre de la fourniture de ce service.

    146.

    Au vu de l’ensemble de ces éléments, nous considérons que la directive «service universel» ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui soumet l’octroi d’une compensation versée au titre de la fourniture d’un service obligatoire additionnel à l’existence d’une charge injustifiée dans le chef de l’entreprise prestataire dudit service. À cet égard, un État membre peut, aux fins de l’appréciation du caractère injustifié de cette charge, tenir compte des bénéfices que cette entreprise a dégagés dans le cadre de ses obligations de service universel.

    IV – Conclusion

    147.

    Au vu des considérations qui précèdent, nous estimons que la Cour n’est pas compétente pour répondre aux questions posées par le Teleklagenævnet dans sa décision de renvoi du 25 avril 2013.

    148.

    À titre subsidiaire, nous proposons à la Cour de répondre de la manière suivante aux questions préjudicielles posées par le Teleklagenævnet:

    1)

    Dans une situation telle que celle en cause au principal, le fait que l’entreprise en charge du service obligatoire additionnel visé à l’article 32 de la directive 2002/22/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques (directive «service universel»), telle que modifiée par la directive 2009/136/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2009, fournit ce service non seulement sur le territoire de l’État membre, mais également sur le territoire d’un pays et territoire d’outre-mer n’influence pas l’interprétation qu’il convient d’adopter des dispositions de cette directive ni l’application des règles relatives aux aides d’État.

    2)

    L’article 12, paragraphe 1, second alinéa, sous a), de la directive «service universel», telle que modifiée par la directive 2009/136, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale par laquelle un État membre tient compte, aux fins du calcul du coût net des obligations de service universel, de l’ensemble des recettes et des dépenses liées à la fourniture de ce service, et notamment de celles que l’entreprise aurait enregistrées si elle n’avait pas été prestataire dudit service.

    3)

    L’article 32 de la directive «service universel», telle que modifiée par la directive 2009/136, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui permet à l’État membre de rejeter la demande d’indemnisation introduite par une entreprise prestataire d’un service obligatoire additionnel, au motif que le coût de ce service est couvert par les bénéfices que celle-ci a réalisés au titre de ses obligations de service universel.

    4)

    L’article 32 de la directive «service universel», telle que modifiée par la directive 2009/136, est, en tant qu’il crée dans le chef de l’entreprise prestataire du service obligatoire additionnel le droit à obtenir une compensation des coûts liés à la fourniture de ce service, revêtu d’un effet direct.

    5)

    La directive «service universel», telle que modifiée par la directive 2009/136, ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui soumet l’octroi d’une compensation versée au titre de la fourniture d’un service obligatoire additionnel à l’existence d’une charge injustifiée dans le chef de l’entreprise prestataire dudit service. À cet égard, un État membre peut, aux fins de l’appréciation du caractère injustifié de cette charge, tenir compte des bénéfices que cette entreprise a dégagés dans le cadre de ses obligations de service universel.


    ( 1 ) Langue originale: le français.

    ( 2 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques (directive «service universel») (JO L 108, p. 51), telle que modifiée par la directive 2009/136/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2009 (JO L 337, p. 11, ci-après la «directive ‘service universel’»).

    ( 3 ) Voir article 1er, paragraphes 1 et 2, de cette directive.

    ( 4 ) Voir article 29 de la directive «service universel».

    ( 5 ) Il ressort de la décision de renvoi que, en pratique, les services de sécurité sont fournis au Groenland par Tele Greenland A/S, une entreprise détenue par les autorités autonomes du Groenland, TDC se bornant à couvrir les frais liés à la prestation de ces services.

    ( 6 ) Il ressort de la décision de renvoi que, à l’époque des faits du litige au principal, l’organisme compétent en matière de télécommunications était le Den danske telemyndighed. Depuis, les compétences de cet organisme ont été transférées à l’Erhvervsstyrelsen. Il s’agit de l’autorité réglementaire nationale (ci-après l’«ARN») en charge, notamment, de la surveillance du secteur conformément à l’article 3 de la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive «cadre») (JO L 108, p. 33).

    ( 7 ) Il ressort de la décision de renvoi que, à la suite de la mise en demeure et de l’avis motivé notifiés respectivement par la Commission européenne les 27 janvier et 29 septembre 2011, le gouvernement danois a modifié sa législation de façon à prendre en charge le coût du service obligatoire additionnel en cause à compter du 1er avril 2012. Considérant, néanmoins, que la législation antérieure n’était pas contraire à la directive «service universel», le gouvernement danois a jugé que cette modification n’avait aucun effet rétroactif et ne permettait pas de couvrir les frais exposés au titre de la fourniture des services de sécurité en cause avant le 1er avril 2012.

    ( 8 ) JO 2012, L 7, p. 3.

    ( 9 ) Directive de la Commission du 16 septembre 2002 relative à la concurrence dans les marchés des réseaux et des services de communications électroniques (JO L 249, p. 21).

    ( 10 ) Voir, notamment, arrêts Dorsch Consult (C‑54/96, EU:C:1997:413, point 23); Syfait e.a. (C‑53/03, EU:C:2005:333, point 29); RTL Belgium (C‑517/09, EU:C:2010:821, point 36), et Belov (C‑394/11, EU:C:2013:48, point 38 et jurisprudence citée), ainsi que, pour une application plus récente, ordonnance Merck Canada (C‑555/13, EU:C:2014:92, point 16).

    ( 11 ) Voir arrêt Belov (EU:C:2013:48, points 40 et 41).

    ( 12 ) Ordonnances ANAS (C‑192/98, EU:C:1999:589, point 22) et RAI (C‑440/98, EU:C:1999:590, point 13), concernant la Corte dei Conti (Italie).

    ( 13 ) Voir, notamment, arrêt Belov (EU:C:2013:48, point 39 et jurisprudence citée).

    ( 14 ) Ci-après la «loi sur les télécommunications».

    ( 15 ) Ci-après le «règlement no 383».

    ( 16 ) Points 28 et 29.

    ( 17 ) Cette liberté ne serait pas reconnue à l’Erhvervsstyrelsen, qui, aux termes de la jurisprudence nationale, ne pourrait contester «devant les tribunaux les décisions dirigées contre elle sauf circonstances tout à fait exceptionnelles» (point 21 de la réponse du gouvernement danois aux questions adressées par la Cour).

    ( 18 ) Le gouvernement danois se réfère à l’article 2, paragraphe 6, du règlement no 383.

    ( 19 ) C‑506/04, EU:C:2006:587

    ( 20 ) Point 49 et jurisprudence citée.

    ( 21 ) Voir, notamment, arrêt Wilson (EU:C:2006:587, points 50 et 51 ainsi que jurisprudence citée); ordonnance Pilato (C‑109/07, EU:C:2008:274, point 23), et arrêt RTL Belgium (EU:C:2010:821, point 39).

    ( 22 ) Arrêts Wilson (EU:C:2006:587, point 52 et jurisprudence citée) ainsi que RTL Belgium (EU:C:2010:821, point 40).

    ( 23 ) Ordonnance Pilato (EU:C:2008:274, point 24 et jurisprudence citée).

    ( 24 ) Les critères d’appréciation de l’indépendance et de l’impartialité d’une juridiction ont été largement développés par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, et récemment rappelés dans son arrêt Grande Stevens et autres c. Italie du 4 mars 2014 (§ 132 et suiv.). Voir, également, Cour eur. D. H., arrêt Parti travailliste géorgien c. Géorgie du 8 juillet 2008, dans lequel la Cour européenne des droits de l’homme a souligné, à propos des commissions électorales géorgiennes, que le fait que sept membres sur quinze de chacune de ces commissions, dont les présidents – disposant d’une voix prépondérante –, étaient nommés par le président géorgien et son parti était susceptible de remettre en cause l’impartialité et l’indépendance de l’organe amené à trancher un litige (§ 106). Cette Cour a souligné que la composition des commissions électorales n’offrait pas de freins face au pouvoir présidentiel et que ces commissions ne revêtaient pas le critère d’indépendance requis, mais elle n’a pas conclu à la violation de l’article 3 du protocole additionnel no 1 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signé à Paris le 20 mars 1952, en raison de l’absence de preuve d’actes d’abus de pouvoir (§ 110 et 111).

    ( 25 ) L’avocat général Jacobs, au point 33 de ses conclusions dans l’affaire Syfait e.a. (EU:C:2004:673), a estimé que le nombre limité de postes réservés aux juristes au sein de la Commission hellénique de la concurrence ne permettait pas d’écarter la qualification de «juridiction», dans la mesure où cet organisme devait statuer dans un domaine technique complexe, requérant des compétences économiques et techniques en plus des qualifications juridiques.

    ( 26 ) Voir arrêt Belov (EU:C:2013:48, point 52).

    ( 27 ) C‑390/95 P, EU:C:1999:66.

    ( 28 ) Point 36.

    ( 29 ) C‑384/09, EU:C:2010:759, points 23 à 40.

    ( 30 ) Voir points 37 à 39 des conclusions. L’avocat général Cruz Villalón mentionne, d’un côté, l’arrêt Eman et Sevinger (C‑300/04, EU:C:2006:545), dans lequel la Cour a jugé qu’un ressortissant d’un État membre résidant dans un PTOM peut invoquer les droits reconnus aux citoyens de l’Union dans les articles 18 TFUE et suivants, en étendant ainsi le droit d’éligibilité aux élections au Parlement européen aux résidents d’un PTOM (point 29). Dans ce cas, l’avocat général Cruz Villalón explique que l’on est dans une situation où le traité FUE ne s’est effectivement pas prononcé d’une manière claire sur son degré d’applicabilité. D’un autre côté, il vise l’arrêt van der Kooy (C‑181/97, EU:C:1999:32), dans lequel la Cour a, au contraire, considéré que les PTOM devaient faire l’objet d’un traitement équivalent à celui d’un pays tiers (points 34 à 9). Il convient également de se référer aux avis 1/78 (EU:C:1979:224) et 1/94 (EU:C:1994:384), dans lesquels la Cour a jugé que les PTOM se trouvent en dehors du domaine d’application du droit de l’Union et, par conséquent, se trouvent à l’égard de l’Union dans la même situation que les pays tiers (respectivement points 61 et 62 ainsi que point 17).

    ( 31 ) Point 39 des conclusions.

    ( 32 ) Ces avantages correspondent, par exemple, au bénéfice technique et commercial résultant de l’étendue du réseau du prestataire, par rapport à un opérateur agissant dans les conditions normales du marché, ou de l’image de marque associée à la position d’opérateur de service universel.

    ( 33 ) Le législateur de l’Union définit le principe de la distorsion minimale du marché au considérant 23 de la directive «service universel». Le respect de ce principe exige, selon lui, que les contributions soient récupérées d’une manière qui, dans la mesure du possible, réduise au minimum l’incidence de la charge financière supportée par les utilisateurs finals, par exemple par une répartition des contributions aussi large que possible.

    ( 34 ) Voir, à cet égard, considérant 21 de la directive «service universel», auquel le législateur de l’Union précise que les «mécanismes de financement devraient avoir pour but d’assurer la participation des acteurs du marché au seul financement des obligations de service universel, et non à des activités qui ne seraient pas directement liées à la fourniture du service universel» (italique ajouté par nos soins). Voir, également, considérant 25 de cette directive, auquel il ajoute que, si chaque État membre reste libre d’imposer des mesures spéciales ne relevant pas des obligations de service universel, ils doivent, néanmoins, prévoir un financement qui soit conforme au droit de l’Union et qui n’implique pas de contributions provenant des acteurs du marché.

    ( 35 ) Voir point 2.5 de la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions relative à un cadre de qualité pour les services d’intérêt général en Europe [COM (2011) 900 final].

    ( 36 ) Voir, à cet égard, considérant 19 de la directive «service universel» qui dispose que «[l]e calcul du coût net du service universel devrait tenir dûment compte des dépenses et des recettes, ainsi que des avantages immatériels découlant de la fourniture du service universel» (italique ajouté par nos soins).

    ( 37 ) Arrêt Commission/Belgique (C‑222/08, EU:C:2010:583, points 49 à 52).

    ( 38 ) En effet, dans le cadre du financement des obligations de service universel, la majorité des États membres ont opté pour un financement sectoriel. En 2011, seuls la République tchèque, la République de Finlande et le Royaume de Suède ont pris des dispositions pour que ces coûts soient uniquement couverts par un financement public, tandis que la République de Malte et la République portugaise ont prévu un financement mixte public-privé (voir, à cet égard, communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions relative au rapport sur les résultats de la consultation publique et du troisième réexamen de la portée du service universel dans les communications électroniques, conformément à l’article 15 de la directive 2002/22/CE [COM (2011) 795 final, p. 13]).

    ( 39 ) Le considérant 19 de la directive «service universel» dispose que les «coûts nets qui découlent des obligations de service universel devraient être calculés selon des procédures transparentes» (italique ajouté par nos soins).

    ( 40 ) Voir articles 1er, paragraphe 1, et 3, paragraphe 2, de la directive «service universel» ainsi que arrêt Commission/France (C‑220/07, EU:C:2008:354, point 29).

    ( 41 ) Voir, également, considérant 3 de la directive «service universel» ainsi que article 6 de la directive 2002/77. Voir, aussi, arrêt Commission/France (EU:C:2008:354, point 30).

    ( 42 ) Si nous consultons le site Internet de l’Erhvervsstyrelsen, nous constatons, à cet égard, que la fourniture des services en cause a été intégrée aux obligations relevant du service universel.

    ( 43 ) C‑280/00, EU:C:2003:415, points 88 à 94.

    ( 44 ) JO 2012, C 8, p. 4.

    ( 45 ) Italique ajouté par nos soins.

    ( 46 ) JO L 318, p. 17.

    ( 47 ) Voir, en ce sens, arrêt El Dridi (C‑61/11 PPU, EU:C:2011:268, point 46).

    ( 48 ) Nous avons précisé cette méthode de calcul aux points 81 à 84 des présentes conclusions.

    ( 49 ) Arrêt Commission/Belgique (EU:C:2010:583, point 49).

    ( 50 ) Idem.

    ( 51 ) Voir arrêt Commission/France (EU:C:2008:354, point 29) et article 6 de la directive 2002/77.

    ( 52 ) Voir considérant 3 de la directive «service universel»; points 3.4 et 3.5 de la communication de la Commission mentionnée au point 109 des présentes conclusions, ainsi que considérant 15 de la décision 2012/21.

    ( 53 ) Arrêt Commission/Belgique (EU:C:2010:583, point 49).

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