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Document 62011CJ0679

    Arrêt de la Cour (neuvième chambre) du 26 septembre 2013.
    Alliance One International, Inc (anciennement Dimon, Inc.) contre Commission européenne.
    Pourvoi – Concurrence – Ententes – Marché espagnol de l’achat et de la première transformation de tabac brut – Fixation des prix et répartition du marché – Infraction à l’article 81 CE – Imputabilité du comportement infractionnel d’une filiale à sa société mère – Obligation de motivation – Droits fondamentaux – Effet dissuasif – Égalité de traitement – Circonstances atténuantes – Coopération – Pouvoir de pleine juridiction – Ne ultra petita – Droit à un procès équitable.
    Affaire C‑679/11 P.

    Recueil de jurisprudence 2013 -00000

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2013:606

    ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)

    26 septembre 2013 (*)

    «Pourvoi – Concurrence – Ententes – Marché espagnol de l’achat et de la première transformation de tabac brut – Fixation des prix et répartition du marché – Infraction à l’article 81 CE – Imputabilité du comportement infractionnel d’une filiale à sa société mère – Obligation de motivation – Droits fondamentaux – Effet dissuasif – Égalité de traitement – Circonstances atténuantes – Coopération – Pouvoir de pleine juridiction – Ne ultra petita – Droit à un procès équitable»

    Dans l’affaire C‑679/11 P,

    ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 23 décembre 2011,

    Alliance One International Inc., établie à Morrisville (États-Unis), représentée par Mes M. Odriozola et A. Vide, abogados,

    partie requérante,

    l’autre partie à la procédure étant:

    Commission européenne, représentée par MM. F. Castillo de la Torre, E. Gippini Fournier, J. Bourke et C. Urraca Caviedes, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

    partie défenderesse en première instance,

    LA COUR (neuvième chambre),

    composée de M. J. Malenovský, président de chambre, MM. U. Lõhmus (rapporteur) et M. Safjan, juges,

    avocat général: M. P. Mengozzi,

    greffier: Mme L. Hewlett, administrateur principal,

    vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 10 janvier 2013,

    vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

    rend le présent

    Arrêt

    1        Par son pourvoi, Alliance One International Inc. (ci-après «AOI»), anciennement Dimon Inc. (ci-après «Dimon»), demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 12 octobre 2011, Alliance One International/Commission (T‑41/05, Rec. p. II‑7101, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a, d’une part, réduit la part du montant de l’amende infligée à Agroexpansión SA (ci-après «Agroexpansión») par la décision C(2004) 4030 final de la Commission, du 20 octobre 2004, relative à une procédure d’application de l’article 81, paragraphe 1, [CE] (affaire COMP/C.38.238/B.2 − Tabac brut – Espagne) (ci-après la «décision litigieuse»), et, d’autre part, rejeté pour le surplus le recours dirigé par Dimon contre cette décision.

    2        La Commission européenne a formé un pourvoi incident contre l’arrêt attaqué dans lequel elle demande l’annulation de celui-ci en tant que le Tribunal a appliqué, à la part du montant de l’amende infligée à Agroexpansión et au paiement de laquelle AOI est tenue pour solidairement responsable, la même réduction supplémentaire de 5 % que celle qu’il a octroyée à Agroexpansión, au titre de sa coopération, dans son arrêt du 12 octobre 2011, Agroexpansión/Commission (T‑38/05, Rec. p. II‑7005).

     Les antécédents du litige et la décision litigieuse

    3        Agroexpansión, Compañía española de tabaco en rama SA (ci-après «Cetarsa»), Tabacos Españoles SL (ci-après «Taes») et World Wide Tobacco España SA (ci-après «WWTE») sont les quatre entreprises de première transformation de tabac brut en Espagne (ci-après, ensemble, les «transformateurs»). Par ailleurs, Deltafina SpA (ci-après «Deltafina»), qui transforme également du tabac brut et qui est une société italienne sœur de Taes, était le principal acheteur de ce produit sur le marché espagnol.

    4        À l’origine, Agroexpansión était une entreprise familiale. Le 18 novembre 1997, la totalité de ses actions a été acquise par Intabex Netherlands BV (ci-après «Intabex»). Celle-ci faisait alors partie du groupe de sociétés Intabex, lequel avait été acquis par Dimon au mois d’avril 1997. AOI est issue d’une fusion, réalisée au mois de mai 2005, de Dimon et de la société américaine Standard Commercial Corp.

    5        Les 3 et 4 octobre 2001, la Commission a effectué des vérifications au titre de l’article 14 du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [81 CE] et [82 CE] (JO 1962, 13, p. 204), dans les locaux, notamment, d’Agroexpansión, afin de vérifier des informations selon lesquelles les transformateurs et les producteurs espagnols de tabac brut auraient commis des infractions à l’article 81 CE.

    6        Le 11 décembre 2003, la Commission a engagé la procédure à l’origine du présent litige et adopté une communication des griefs qu’elle a adressée à 20 entreprises ou associations, dont les transformateurs, Deltafina, Dimon et Intabex.

    7        Le 20 octobre 2004, la Commission a adopté la décision litigieuse qui concerne, notamment, une entente horizontale conclue et mise en œuvre sur le marché espagnol du tabac brut par les transformateurs et Deltafina.

    8        Selon les constatations de la Commission, cette entente avait pour objet de fixer, chaque année, pendant les années 1996 à 2001, le prix moyen de livraison de chaque variété de tabac brut, toutes qualités confondues, et de répartir les quantités de chaque variété de tabac brut que chacun des transformateurs pouvait acheter auprès des producteurs. De 1999 à 2001, les transformateurs et Deltafina étaient également convenus des fourchettes de prix par grade qualitatif de chaque variété de tabac brut ainsi que des prix minimaux moyens par producteur et par groupement de producteurs.

    9        Dans la décision litigieuse, la Commission a considéré que ladite entente constitue une infraction unique et continue à l’article 81, paragraphe 1, CE, a imputé la responsabilité de l’entente, notamment, aux transformateurs ainsi qu’à Deltafina et a ordonné à ces entreprises de mettre immédiatement fin à cette infraction ainsi que de s’abstenir désormais de toute pratique restrictive ayant un objet ou un effet équivalent. À l’article 3 de cette décision, elle a infligé des amendes auxdites entreprises ainsi qu’aux représentants des producteurs.

    10      Il ressort également de la décision litigieuse que Dimon a été tenue pour solidairement responsable du paiement de l’amende infligée à Agroexpansión, tout comme les trois sociétés mères de WWTE l’ont été pour l’amende infligée à celle-ci. En revanche, la responsabilité d’Intabex n’a pas été retenue à l’égard de l’amende infligée à Agroexpansión. En ce qui concerne les amendes infligées à Taes et à Deltafina, Universal Leaf Tobacco Co. Inc. (ci-après «Universal Leaf»), société mère à 100 % de ces dernières, et Universal Corp. (ci-après «Universal»), qui détenait 100 % des actions d’Universal Leaf, n’ont pas non plus été considérées comme solidairement responsables.

    11      S’agissant des destinataires de la décision litigieuse, la Commission s’est prononcée comme suit aux considérants 372, 375 et 376 de la décision litigieuse:

    «(372) Selon une jurisprudence constante, lorsque la société mère détient la totalité du capital de sa filiale, on peut légitimement supposer que la société mère exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale [...]. Cette supposition peut être confirmée par des facteurs particuliers propres à certaines affaires.

    [...]

    (375) En l’espèce, trois des quatre transformateurs espagnols de tabac brut sont contrôlés (à 100 % ou à 90 %) par des multinationales américaines. Il existe par ailleurs d’autres éléments factuels qui confirment la présomption selon laquelle le comportement d’Agroexpansión et de WWTE doit être imputé à leur société mère respective. Dans ces cas, les deux sociétés – la société mère et sa filiale – doivent être considérées comme solidairement responsables des infractions constatées dans la présente décision.

    (376) Par ailleurs, après l’envoi de la communication des griefs et l’audition des parties, il est apparu que les preuves du dossier ne pouvaient pas justifier une conclusion similaire au sujet des participations d’Universal [...] et d’Universal Leaf [...] dans Taes et Deltafina. En fait, outre le lien [social] entre les sociétés mères et leurs filiales, le dossier ne contient aucune indication de participation matérielle d’Universal [...] et d’Universal Leaf dans les faits examinés dans la présente décision. Il ne conviendrait donc pas d’en faire les destinataires d’une décision dans cette affaire. La même conclusion s’appliquerait a fortiori à Intabex puisque sa participation de 100 % dans Agroexpansión était purement financière.»

    12      La Commission a indiqué qu’il pouvait être légitimement supposé que Dimon exerçait une influence déterminante sur le comportement d’Agroexpansión à partir du moment où elle avait acquis la totalité des actions de celle-ci par l’intermédiaire d’Intabex. Elle a conclu qu’une série d’éléments énoncés, notamment, au considérant 379 de la décision litigieuse confirmait que Dimon était en mesure d’exercer une influence sur Agroexpansión et était informée des pratiques reprochées à cette dernière, que les arguments avancés par Dimon dans sa réponse à la communication des griefs ne justifiaient pas de conclusions différentes à ce propos et que cette dernière société devait être tenue conjointement responsable du comportement d’Agroexpansión établi par la décision litigieuse pour la période allant du second semestre de l’année 1997 au 10 août 2001.

    13      Les montants des amendes ont été déterminés par la Commission conformément à la méthode définie dans les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 15 paragraphe 2 du règlement n° 17 et de l’article 65, paragraphe 5, [CA] (JO 1998, C 9, p. 3, ci-après les «lignes directrices») et dans la communication de la Commission concernant la non-imposition d’amendes ou la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 1996, C 207, p. 4, ci-après la «communication sur la coopération»).

    14      Ayant qualifié les infractions constatées de «très graves», la Commission a fixé le montant de départ des amendes infligées aux transformateurs, notamment, en fonction de leur taille et de leurs parts de marché respectives.

    15      Dans les considérants 422 et 423 de la décision litigieuse, la Commission a estimé que, afin que les amendes infligées à Agroexpansión et à WWTE aient un caractère suffisamment dissuasif eu égard au fait que ces dernières appartiennent à des multinationales qui ont une force économique et financière considérable et sous l’influence décisive desquelles ces deux sociétés ont agi, il était nécessaire d’augmenter le montant de départ de l’amende pour ces deux transformateurs en l’affectant d’un coefficient multiplicateur qui tienne compte tant de la taille des groupes auxquels ils appartiennent que de leur taille comparée par rapport aux autres transformateurs espagnols. En ce qui concerne Agroexpansión, la Commission a appliqué, aux fins de dissuasion, un coefficient de 2.

    16      Pour ce qui est de la durée de l’infraction, la Commission a constaté, au considérant 432 de la décision litigieuse, que l’entente entre les transformateurs et Deltafina avait commencé au moins le 13 mars 1996 et avait cessé d’exister, selon les déclarations des transformateurs, le 3 octobre 2001. Toutefois, la dernière preuve dont disposait la Commission étant une réunion du 10 août 2001, cette dernière a estimé, aux fins de la détermination de la durée des infractions concernées, que ladite entente avait duré plus de 5 ans et 4 mois, ce qui correspond à une infraction de longue durée.

    17      Après avoir fixé les montants de base, la Commission a examiné les circonstances aggravantes et atténuantes ainsi que le point de savoir s’il y avait lieu d’adapter les montants de base calculés pour les différents destinataires afin qu’ils n’excèdent pas la limite de 10 % du chiffre d’affaires prévue à l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [81 CE] et [82 CE] (JO 2003, L 1, p. 1).

    18      Enfin, la Commission a fait application du titre D de la communication sur la coopération qui prévoit une réduction significative du montant de l’amende et dont le point 2 mentionne qu’une telle réduction peut bénéficier à l’entreprise concernée soit lorsque des informations sont fournies à la Commission avant l’envoi d’une communication des griefs (premier tiret de ce point 2), soit lorsque est transmise à la Commission, après réception de cette communication, l’information selon laquelle l’entreprise ne conteste pas la matérialité des faits fondant l’accusation (second tiret du même point 2). La Commission a décidé que Taes devait bénéficier d’une réduction de 40 % au titre dudit point 2, eu égard tant à sa coopération particulièrement utile pendant la procédure, notamment en ce qui concerne la participation de Deltafina à l’entente, qu’au fait qu’elle n’avait jamais contesté les faits tels qu’établis dans la communication des griefs.

    19      S’agissant de Cetarsa et de WWTE, la Commission a estimé, d’une part, que les renseignements fournis par celles-ci, tout en étant significatifs, ne s’étaient pas avérés aussi utiles pour les investigations de la Commission que ceux fournis par Taes et, d’autre part, que ces deux transformateurs avaient contesté certains faits dans leurs réponses à la communication des griefs. Compte tenu de ces circonstances et conformément au titre D, point 2, premier tiret, de la communication sur la coopération, la Commission a accordé à Cetarsa et à WWTE une réduction de l’amende de 25 %.

    20      En ce qui concerne Agroexpansión, la Commission a considéré que cette dernière lui avait également fourni des renseignements utiles, mais que, dans sa réponse à la communication des griefs, elle avait contesté les faits dans les mêmes termes que Cetarsa et WWTE et avait, en outre, nié la nature secrète des accords des transformateurs sur les prix de livraison moyens (maximaux). Par conséquent, la Commission a accordé à Agroexpansión une réduction de l’amende de 20 %. Le montant final de l’amende infligée à cette dernière s’est élevé à 2 592 000 euros, Dimon étant tenue pour solidairement responsable du paiement de cette amende.

     La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

    21      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 janvier 2005, Dimon a introduit un recours tendant à l’annulation des articles 1er, 3 et 5 de la décision litigieuse dans la mesure où ils la concernaient ainsi que, à titre subsidiaire, à la réduction du montant de l’amende infligée à Agroexpansión et à elle-même en tant que société solidairement responsable du paiement de celle-ci.

    22      À l’appui de son recours, Dimon a soulevé cinq moyens, tirés:

    –        le premier, de la violation de l’article 81, paragraphe 1, CE, de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 et du principe de proportionnalité en tant que la décision litigieuse l’a déclarée responsable des infractions commises par Agroexpansión;

    –        le deuxième, de la violation des principes de proportionnalité et de la responsabilité personnelle en tant que la Commission l’a tenue pour responsable de l’infraction commise par Agroexpansión sans avoir démontré qu’elle avait participé directement à celle-ci;

    –        le troisième, de la violation des principes de proportionnalité et de la responsabilité personnelle ainsi que de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 en ce qui concerne les infractions commises par Agroexpansión avant que cette société n’intègre le groupe Dimon;

    –        le quatrième, de la violation du principe de protection de la confiance légitime en omettant de prendre en compte une circonstance atténuante lors de la détermination du montant de l’amende;

    –        le cinquième, de la violation de l’obligation de motivation.

    23      Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a accueilli le troisième moyen et a rejeté les quatre autres moyens. Il a en outre réformé la décision litigieuse dans la mesure où celle-ci tenait Dimon pour solidairement responsable, avec Agroexpansión, du paiement du montant total de l’amende infligée à cette dernière. D’une part, Dimon ne pouvant être tenue pour solidairement responsable de l’infraction avant le 18 novembre 1997, qui est la date d’acquisition d’Agroexpansión par Intabex, le Tribunal a, en ce qui concerne Dimon, réduit de 50 % à 35 % le taux de majoration appliqué au montant de départ de l’amende au titre de la durée de l’infraction. D’autre part, il a appliqué à cette dernière la même réduction supplémentaire de 5 % que celle qu’il a accordée à Agroexpansión, au titre de la coopération de celle-ci, dans son arrêt Agroexpansión/Commission, précité.

     Les conclusions des parties

    24      AOI demande à la Cour:

    –        d’annuler l’arrêt attaqué ainsi que la décision litigieuse;

    –        de rejeter le pourvoi incident de la Commission, et

    –        de condamner cette dernière aux dépens.

    25      La Commission demande à la Cour:

    –        à titre principal, de rejeter le pourvoi;

    –        à titre subsidiaire, de rejeter le recours en annulation dirigé contre la décision litigieuse;

    –        de faire droit à son pourvoi incident, et

    –        de condamner AOI aux dépens.

     Sur le pourvoi principal

    26      À l’appui de son pourvoi, AOI soulève quatre moyens tirés, le premier, de la violation des articles 101, paragraphe 1, TFUE, 296 TFUE ainsi que 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, le deuxième, de la violation des principes généraux du droit de l’Union ainsi que des droits contenus dans la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, et dans la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, le troisième, de la violation des principes de proportionnalité, de responsabilité solidaire ainsi que d’égalité de traitement et, le quatrième, de la non-application du point 3, troisième tiret, des lignes directrices ainsi que d’une violation du principe de protection de la confiance légitime.

     Sur le premier moyen

     Argumentation des parties

    27      Par la première branche de son premier moyen, AOI considère que le Tribunal a commis une erreur de droit en n’annulant pas la décision litigieuse pour défaut de motivation. À cet égard, elle soutient que la Commission n’a pas défini le seul critère de preuve établi dans cette décision pour imputer la responsabilité du comportement illégal d’une filiale à sa société mère, à savoir celui de la «participation matérielle» de celle-ci aux faits visés, mentionné au considérant 376 de ladite décision, et n’a pas expliqué dans cette dernière la raison pour laquelle elle impliquait certaines sociétés mères et pas d’autres.

    28      AOI fait valoir que le Tribunal a outrepassé les limites de sa compétence dès lors qu’il a tenté de corriger ledit défaut de motivation ex post facto en exposant, au point 112 de l’arrêt attaqué, la méthode dite «de la double base». Toutefois, la Commission aurait affirmé pour la première fois devant le Tribunal, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt de ce dernier du 27 octobre 2010, Alliance One International e.a./Commission (T‑24/05, Rec. p. II‑5329), avoir employé cette méthode dans la décision litigieuse.

    29      En réinterprétant ainsi la décision litigieuse, le Tribunal aurait cherché à sauvegarder le principe d’égalité de traitement en prétendant que la Commission avait appliqué ladite méthode de manière identique à toutes les sociétés mères concernées. Cependant, la Commission aurait affirmé avoir appliqué cette même méthode à certaines de ces sociétés mères tout en précisant, dans sa réponse à une question écrite du Tribunal, qu’elle avait tenu Dimon pour responsable de l’infraction commise par Agroexpansión sur le seul fondement de la présomption qu’une société mère détenant 100 % du capital d’une filiale exerce effectivement une influence déterminante sur celle-ci.

    30      En outre, le considérant 372 de la décision litigieuse indiquerait seulement que cette présomption peut être confirmée par d’autres facteurs. L’existence de preuves supplémentaires ne constituant donc pas une condition d’imputation de la responsabilité à la société mère, l’application de la méthode de la double base serait arbitraire dès lors que ladite présomption pourrait être appliquée de manière stricte dans certains cas et non dans d’autres.

    31      Au demeurant, même si la méthode de la double base était applicable, les preuves relatives à la participation de Dimon à l’infraction ne seraient pas plus solides que celles relatives à la participation d’Universal et d’Universal Leaf à cette même infraction.

    32      Par la seconde branche de son premier moyen, AOI prétend que le Tribunal aurait dû déclarer que la Commission n’avait pas suffisamment motivé, dans la décision litigieuse, son rejet des arguments d’Agroexpansión tendant à réfuter l’application de la présomption susvisée à Dimon.

    33      À cet égard, la Commission se serait bornée à examiner un seul des éléments avancés relatifs au comportement autonome d’Agroexpansión à l’égard de sa société mère. Il serait donc impossible de déterminer si elle avait attribué la responsabilité à Dimon sur le fondement de ladite présomption seulement ou après la prise en considération des éléments invoqués par Agroexpansión afin de renverser une telle présomption. Dans la mesure où la Commission estimait que cette attribution de responsabilité pouvait se fonder sur les éléments figurant au considérant 379 de la décision litigieuse, qui contiendrait des arguments vagues et inexacts, une telle position n’aurait pas non plus été suffisamment motivée.

    34      La Commission considère que le premier moyen est, en partie, irrecevable et doit, en tout état de cause, être rejeté comme non fondé.

     Appréciation de la Cour

    35      S’agissant de la première branche du premier moyen, l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission, tirée du caractère nouveau des arguments invoqués par AOI, ne saurait être accueillie. En effet, il est en substance reproché au Tribunal d’avoir réinterprété la décision litigieuse, à la suite des explications de la Commission émises postérieurement à celle-ci, afin de pallier les violations de l’obligation de motivation ainsi que du principe d’égalité de traitement prétendument commises par cette institution dans ladite décision. Or, de tels arguments n’ayant pu être soulevés en première instance, ils ne sauraient être considérés comme irrecevables dans le cadre du pourvoi (voir, en ce sens, arrêts du 18 janvier 2007, PKK et KNK/Conseil, C‑229/05 P, Rec. p. I‑439, point 33, ainsi que du 28 juillet 2011, Diputación Foral de Vizcaya e.a./Commission, C‑471/09 P à C‑473/09 P, point 124).

    36      Quant au fond, il convient de rappeler, à titre liminaire, qu’une infraction aux règles de la concurrence commise par une filiale peut être imputée à la société mère notamment lorsque, bien qu’ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques (voir arrêts du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, C‑97/08 P, Rec. p. I‑8237, point 58, ainsi que du 19 juillet 2012, Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a., C‑628/10 P et C‑14/11 P, non encore publié au Recueil, point 43).

    37      En effet, dans une telle situation, la société mère et sa filiale faisant partie d’une même unité économique et formant ainsi une seule entreprise au sens de l’article 81 CE, la Commission peut adresser une décision infligeant des amendes à la société mère sans qu’il soit requis d’établir l’implication personnelle de cette dernière dans l’infraction (voir arrêts précités Akzo Nobel e.a./Commission, point 59, ainsi que Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a., point 44).

    38      La Cour a précisé que, dans le cas particulier où une société mère détient 100 % du capital de sa filiale ayant commis une infraction aux règles de la concurrence de l’Union, d’une part, cette société mère peut exercer une influence déterminante sur le comportement de cette filiale et, d’autre part, il existe une présomption réfragable selon laquelle ladite société mère exerce effectivement une telle influence (arrêt Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a., précité, point 46 et jurisprudence citée).

    39      Dans ces conditions, il suffit que la Commission prouve que la totalité du capital d’une filiale est détenue par sa société mère pour qu’il puisse être présumé que cette dernière exerce effectivement une influence déterminante sur la politique commerciale de cette filiale. La Commission sera en mesure, par la suite, de considérer la société mère comme tenue solidairement au paiement de l’amende infligée à sa filiale, à moins que cette société mère, à laquelle il incombe de renverser cette présomption, n’apporte des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que sa filiale se comporte de façon autonome sur le marché (arrêts précités Akzo Nobel e.a./Commission, point 61, ainsi que Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a., point 47).

    40      Toutefois, cette jurisprudence n’implique pas que la Commission est tenue de se fonder exclusivement sur ladite présomption. En effet, rien n’empêche cette institution d’établir l’exercice effectif, par une société mère, d’une influence déterminante sur sa filiale par d’autres éléments de preuve ou par une combinaison de tels éléments avec ladite présomption (arrêt Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a., précité, point 49).

    41      En l’espèce, ainsi que le Tribunal l’a constaté aux points 105 à 119 de l’arrêt attaqué, il ressort de la décision litigieuse que la Commission avait décidé, pour l’appréciation de l’exercice effectif d’une influence déterminante sur les filiales par les sociétés mères, de ne tenir ces dernières pour responsables que lorsque des éléments de preuve venaient confirmer la présomption de l’exercice effectif d’une influence déterminante sur les filiales qui découle du contrôle de l’ensemble du capital de celles-ci par les sociétés mères (méthode de la double base) et que, partant, elle avait renoncé à s’en tenir à l’application de la seule présomption d’influence déterminante (arrêt Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a., précité, point 50).

    42      En ce qui concerne l’emploi de cette méthode dans la décision litigieuse, le Tribunal s’est prononcé comme suit aux points 112 et 113 de l’arrêt attaqué:

    «112      [...] en l’espèce, pour imputer aux sociétés mères se trouvant dans un tel cas de figure la responsabilité de l’infraction commise par leur filiale, la Commission a choisi de ne pas se contenter d’avoir recours à [la présomption selon laquelle une société mère qui détient la totalité du capital de sa filiale exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de cette dernière], mais de se fonder également sur des éléments de fait visant à établir que ces sociétés mères exerçaient effectivement une influence déterminante sur leur filiale et, partant, à corroborer ladite présomption (voir, notamment, considérants 372, 375, 376 et 378 de la décision [litigieuse]).

    113      Ainsi, il ressort expressément du considérant 18 de la décision [litigieuse] que, si la Commission n’a pas tenu les sociétés mères faîtière et intermédiaire de Deltafina, à savoir Universal et Universal Leaf, pour responsables du comportement infractionnel de leur filiale, en dépit du fait qu’elles la contrôlaient à 100 %, c’est au motif qu’elle ne disposait pas de preuves suffisantes de ce qu’elles exerçaient effectivement une influence déterminante sur ladite filiale. C’est également dans ce sens qu’il convient de comprendre le considérant 376 de la décision [litigieuse], même s’il est rédigé en des termes quelque peu ambigus. Plus particulièrement, s’il est vrai que la Commission déclare, dans ce considérant, que son dossier ne contient ‘aucune indication de participation matérielle d’Universal [...] et d’Universal Leaf dans les faits examinés dans la [décision litigieuse]’, toutefois, lue en parallèle avec le considérant 18 de cette décision et replacée dans le contexte de celle-ci, cette déclaration ne saurait être interprétée comme signifiant que la raison pour laquelle elle n’a pas retenu la responsabilité de ces deux sociétés mères – ou d’une quelconque autre société mère – est leur absence d’implication dans l’infraction.»

    43      Il découle de ces points de l’arrêt attaqué que le Tribunal a fondé son appréciation de la méthode de la double base adoptée par la Commission dans la décision litigieuse sur sa propre interprétation de celle-ci, considérée dans son ensemble (voir arrêt Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a., précité, points 121 et 132).

    44      Cette appréciation du Tribunal n’est entachée d’aucune erreur de droit. En particulier, c’est à bon droit que, par son interprétation, le Tribunal a réfuté la lecture du considérant 376 de la décision litigieuse proposée par Agroexpansión dans son mémoire en réplique, selon laquelle c’est en raison de l’absence d’éléments indiquant la participation matérielle des sociétés mères de Taes à l’infraction que la Commission n’a pas retenu la responsabilité de celles-ci, une telle lecture étant en contradiction avec une lecture d’ensemble de cette décision (voir arrêt Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a., précité, point 133).

    45      Il s’ensuit, premièrement, que, le critère de la «participation matérielle» n’ayant pas été employé dans la décision litigieuse pour déterminer la responsabilité éventuelle des sociétés mères à raison du comportement de leurs filiales, l’argument d’AOI tiré d’un défaut de motivation, tel que résumé au point 27 du présent arrêt, n’est pas fondé.

    46      Deuxièmement, l’allégation d’AOI selon laquelle le Tribunal a défini la méthode de la double base à la suite des explications de la Commission émises postérieurement à ladite décision est également dénuée de fondement dès lors que, ainsi qu’il ressort du point 43 du présent arrêt, l’appréciation faite par le Tribunal de cette méthode était fondée sur son interprétation de la décision litigieuse.

    47      En ce qui concerne l’affirmation d’AOI selon laquelle la Commission n’a pas appliqué la méthode de la double base à Dimon, il convient de constater que c’est à bon droit que le Tribunal a relevé, aux points 112 à 119 de l’arrêt attaqué, que la Commission avait appliqué la méthode de la double base à toutes les sociétés mères dans la décision litigieuse (voir, par analogie, arrêt Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a., précité, point 137), y compris, ainsi qu’il ressort des points 116 et 117, à Dimon. Cette constatation n’est pas susceptible d’être infirmée par la réponse de la Commission à une question du Tribunal au cours de l’instance, telle que mentionnée au point 29 du présent arrêt, à supposer même que l’interprétation de cette réponse avancée par AOI soit correcte.

    48      Quant à l’argument, énoncé au point 30 du présent arrêt, selon lequel la méthode de la double base est susceptible d’être appliquée à l’égard de certaines sociétés mères et non à l’endroit d’autres sociétés mères, il suffit de constater que, dès lors que, ainsi qu’il résulte du point précédent, la Commission a bien fait application de la méthode de la double base à toutes les sociétés mères concernées en l’occurrence, cet argument est dépourvu de toute pertinence.

    49      S’agissant de l’argument selon lequel, même en admettant l’application de la méthode de la double base, les preuves de la participation de Dimon à l’infraction en cause ne seraient pas plus solides que celles relatives aux sociétés mères dont la responsabilité n’a pas été retenue pour cette même infraction, force est de constater qu’AOI tend à remettre en cause des constatations et des appréciations de nature factuelle effectuées par le Tribunal.

    50      À cet égard, il convient de rappeler que l’appréciation des faits ne constitue pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve produits devant le Tribunal, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour (arrêts du 18 mai 2006, Archer Daniels Midland et Archer Daniels Midland Ingredients/Commission, C‑397/03 P, Rec. p. I‑4429, point 85, ainsi que du 29 mars 2011, ThyssenKrupp Nirosta/Commission, C‑352/09 P, Rec. p. I‑2359, point 180).

    51      Aucune dénaturation n’ayant été alléguée par AOI en l’occurrence, ledit argument doit par conséquent être considéré comme irrecevable.

    52      En ce qui concerne, enfin, la seconde branche du premier moyen, il convient de rappeler qu’il résulte des articles 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE, 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne ainsi que 168, paragraphe 1, sous d), et 169, paragraphe 2, du règlement de procédure de celle-ci qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande (voir arrêt du 11 avril 2013, Mindo/Commission, C‑652/11 P, non encore publié au Recueil, point 21 et jurisprudence citée).

    53      Force est de constater qu’AOI, par ses arguments avancés dans le cadre de la seconde branche de son premier moyen, reproche non pas au Tribunal, mais à la Commission un défaut de motivation de la décision litigieuse. En particulier, son argumentation ne contient aucun argument relatif à un défaut de motivation de l’arrêt attaqué. Dans la mesure où il est fait grief au Tribunal de ne pas avoir annulé cette décision pour défaut de motivation, lesdits arguments ne permettent d’identifier avec la précision requise ni les éléments critiqués de l’arrêt attaqué ni les arguments juridiques invoqués au soutien de cette critique (voir, par analogie, ordonnance du 3 mai 2012, World Wide Tobacco España/Commission, C‑240/11 P, points 52 et 53).

    54      Il s’ensuit que la seconde branche du premier moyen doit être considérée comme irrecevable.

    55      Par conséquent, il y a lieu d’écarter le premier moyen du pourvoi comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, non fondé.

     Sur le deuxième moyen

     Argumentation des parties

    56      Par son deuxième moyen, invoqué à titre subsidiaire, AOI considère que l’arrêt attaqué enfreint certains de ses droits fondamentaux, à savoir le droit à la présomption d’innocence ainsi que les principes de légalité et de personnalité des délits et des peines prévus, notamment, aux articles 48 et 49 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

    57      AOI ajoute que, conformément auxdits droits fondamentaux, une présomption de culpabilité est en principe interdite et ne doit être admise que lorsque certaines circonstances strictes sont réunies. Or, la Commission aurait appliqué la présomption tirée de l’exercice effectif d’une influence déterminante découlant de la détention de 100 % des actions d’une filiale par la société mère en l’absence, en l’espèce, de circonstances exceptionnelles. En outre, l’amende qui lui a été infligée serait substantielle et non pas minimale.

    58      La Commission invoque l’irrecevabilité de ce moyen en faisant valoir, notamment, qu’il repose sur des arguments nouveaux dirigés contre la décision litigieuse.

     Appréciation de la Cour

    59      Ainsi que le fait valoir à bon droit la Commission, AOI n’a pas soulevé dans sa requête en première instance les arguments qu’elle invoque dans le cadre du présent moyen.

    60      Or, il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que permettre à une partie de soulever pour la première fois devant la Cour un moyen qu’elle n’a pas soulevé devant le Tribunal reviendrait à lui permettre de saisir la Cour d’un litige plus étendu que celui dont a eu à connaître le Tribunal. Dans le cadre d’un pourvoi, la compétence de la Cour est, en principe, limitée à l’examen de l’appréciation par le Tribunal des moyens qui ont été débattus devant lui (arrêt Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a., précité, point 111 et jurisprudence citée).

    61      Il en découle que le deuxième moyen doit être écarté comme étant irrecevable.

     Sur le troisième moyen

     Argumentation des parties

    62      Par la première branche de son troisième moyen, AOI fait valoir que c’est à tort que, compte tenu de la réduction du taux de la majoration appliqué au montant de départ de l’amende au titre de la durée de l’infraction, le Tribunal a appliqué, à l’égard de Dimon, un taux de 35 % au lieu de 30 %. En effet, les lignes directrices permettraient des augmentations de 10 % par année d’infraction sans qu’il soit permis d’«arrondir les années». Cette méthode ayant été appliquée à l’égard des autres destinataires de la décision litigieuse, le principe d’égalité de traitement exigerait que la même méthode soit utilisée pour le calcul de l’amende dont Dimon a été tenue pour solidairement responsable.

    63      Par la seconde branche dudit moyen, AOI prétend qu’il ressort du considérant 423 de la décision litigieuse que, pour justifier l’application au montant de départ de l’amende d’un coefficient multiplicateur, la Commission a appliqué le point 1, A, cinquième alinéa, des lignes directrices, relatif à la possibilité de tenir compte du fait que les entreprises de grande dimension disposent la plupart du temps de connaissances et des infrastructures juridico-économiques leur permettant de mieux apprécier le caractère infractionnel et les conséquences de leur comportement.

    64      Or, conformément au point 125 de l’arrêt du Tribunal du 24 mars 2011, Pegler/Commission (T‑386/06, Rec. p. II‑1267), ce serait la taille de l’entreprise en cause au moment de l’infraction qui constituerait le critère pertinent pour justifier une telle augmentation au titre de ladite disposition des lignes directrices. Dès lors, le coefficient multiplicateur appliqué à l’égard de Dimon aurait dû être réduit par le Tribunal après qu’il a été déterminé que cette dernière n’était solidairement responsable de l’infraction commise par Agroexpansión qu’à partir du 18 novembre 1997.

    65      À titre subsidiaire, AOI estime que le Tribunal a commis une erreur de droit en ne réduisant pas le coefficient multiplicateur de 2 appliqué par la Commission aux fins de dissuasion, afin de tenir compte du fait que la responsabilité de Dimon ne couvrait qu’une partie de la période pendant laquelle Agroexpansión a participé à l’infraction.

    66      La Commission considère que les arguments invoqués par AOI dans le cadre de son troisième moyen sont infondés.

     Appréciation de la Cour

    67      S’agissant de la première branche du troisième moyen, il ressort du point 1, B, premier alinéa, des lignes directrices que la durée de l’infraction devrait être prise en considération par la Commission aux fins de fixer un éventuel montant additionnel de l’amende. Pour les infractions de moyenne durée (en général de un à cinq ans), ce montant peut aller jusqu’à 50 % du montant retenu pour la gravité de l’infraction alors que, pour les infractions de longue durée (en général au-delà de cinq ans), il peut être fixé pour chaque année à 10 % de ce dernier montant.

    68      Or, en jugeant, aux points 202 et 212 de l’arrêt attaqué, que Dimon ne pouvait être tenue pour responsable de l’infraction que pour une durée de trois ans et neuf mois environ, le Tribunal a décidé qu’il y avait lieu de majorer le montant de départ de l’amende, à l’égard de Dimon, de 35 % et non de 50 % comme dans le cas d’Agroexpansión. Cette majoration ne diffère pas de la méthode suivie par la Commission dès lors que ladite durée est constitutive d’une infraction de moyenne durée selon les lignes directrices, lesquelles ne précisent nullement que, pour de telles infractions, le montant additionnel afférent à la durée de l’infraction ne doit être fixé que par tranches de 10 % correspondant aux années durant lesquelles celle-ci a perduré.

    69      Par ailleurs, aucune inégalité de traitement à ce titre ne saurait être reprochée au Tribunal dans la mesure où, pour les autres destinataires de la décision litigieuse, l’infraction a duré, selon le considérant 432 de celle-ci, plus de cinq ans et quatre mois et a été de ce fait considérée comme une infraction de longue durée pour laquelle une autre règle de calcul du montant de l’amende est applicable selon le point 1, B, premier alinéa, des lignes directrices.

    70      Il s’ensuit que la première branche du troisième moyen n’est pas fondée.

    71      En ce qui concerne l’argument principal avancé par AOI à l’appui de la seconde branche dudit moyen, il ressort du dossier afférent au recours devant le Tribunal que Dimon n’a pas invoqué, en première instance, une argumentation telle que celle tirée par AOI de la lecture du considérant 423 de la décision litigieuse, résumée au point 63 du présent arrêt. Conformément à la jurisprudence citée au point 60 de celui-ci, ledit argument est par conséquent irrecevable.

    72      Quant à l’argument invoqué par AOI à titre subsidiaire, il y a lieu de constater que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant, au point 210 de l’arrêt attaqué, que l’application du coefficient multiplicateur de 2 aux fins de dissuasion, dont le montant de départ de l’amende infligée à Agroexpansión a été affecté, restait justifiée dans le cadre du calcul du montant de l’amende dont Dimon a été tenue pour solidairement responsable, dès lors que ce coefficient était fondé sur la taille et les ressources globales de l’entreprise concernée en 2003, qui est l’année précédant celle au cours de laquelle la décision litigieuse a été adoptée.

    73      À cet égard, il convient de rappeler que la notion de «dissuasion» constitue l’un des éléments à prendre en compte dans le calcul du montant de l’amende. Il est en effet de jurisprudence constante que les amendes infligées en raison de violations de l’article 81 CE, telles que prévues à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, ont pour objet de réprimer les actes illégaux des entreprises concernées ainsi que de dissuader tant ces dernières que d’autres opérateurs économiques de violer, à l’avenir, les règles du droit de la concurrence de l’Union. Or, le lien entre, d’une part, la taille et les ressources globales des entreprises et, d’autre part, la nécessité d’assurer un effet dissuasif à l’amende ne saurait être contesté (voir arrêts du 29 juin 2006, Showa Denko/Commission, C-289/04 P, Rec. p. I-5859, point 16, et du 17 juin 2010, Lafarge/Commission, C‑413/08 P, Rec. p. I‑5361, point 102).

    74      En effet, c’est l’impact recherché sur l’entreprise concernée qui justifie la prise en considération de la taille et des ressources globales de cette entreprise afin d’assurer un effet dissuasif suffisant à l’amende, la sanction ne devant pas être négligeable au regard, notamment, de la capacité financière de ladite entreprise (arrêt Lafarge/Commission, précité, point 104).

    75      Il s’ensuit que, aux fins d’infliger une amende d’un montant susceptible de dissuader les entreprises concernées de violer, à l’avenir, les règles du droit de la concurrence de l’Union, il convient de prendre en considération la taille et les ressources globales de ces dernières au moment de l’adoption de la décision litigieuse (voir, en ce sens, ordonnance du 7 février 2012, Total et Elf Aquitaine/Commission, C‑421/11 P, point 82). En conséquence, le fait que Dimon n’a pas été tenue pour solidairement responsable de l’infraction d’Agroexpansión pour la période antérieure au 18 novembre 1997 est sans incidence pour la fixation d’un coefficient multiplicateur aux fins de dissuasion.

    76      Il découle de ce qui précède que le troisième moyen doit être rejeté comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, non fondé.

     Sur le quatrième moyen

     Argumentation des parties

    77      Par son quatrième moyen, AOI soutient que le Tribunal a considéré à tort, au point 193 de l’arrêt attaqué, que la circonstance atténuante visée au point 3, troisième tiret, des lignes directrices, à savoir la cessation des infractions dès les premières interventions de la Commission, ne pouvait être appliquée au motif que l’infraction commise par Agroexpansión avait cessé le 10 août 2001. À cet égard, cette institution aurait également reconnu que, selon les déclarations des transformateurs, l’entente avait cessé d’exister le 3 octobre 2001. Or, dans la mesure où la cessation de l’infraction dès les premières interventions de la Commission constituerait une circonstance atténuante, Agroexpansión pourrait légitimement s’attendre à ce qu’une réduction de l’amende lui soit accordée à ce titre.

    78      AOI fait en outre valoir que l’arrêt attaqué est entaché d’une erreur de droit dans la mesure où le Tribunal a jugé, aux points 194 et 195 de cet arrêt, que ladite circonstance atténuante n’est pas applicable en l’espèce en raison de la nature de l’infraction. Elle relève que, dans d’autres décisions de la Commission, les amendes infligées pour des infractions graves et secrètes ont bénéficié d’une réduction au titre de ladite disposition des lignes directrices. AOI demande une réduction du montant de l’amende infligée à Agroexpansión pour tenir compte du fait que la participation de celle-ci à l’infraction aurait cessé au moment où la Commission est intervenue.

    79      La Commission conclut au rejet de ce moyen.

     Appréciation de la Cour

    80      La Cour a déjà eu l’occasion de confirmer la constatation du Tribunal selon laquelle la circonstance visée au point 3, troisième tiret, des lignes directrices, consistant en la cessation des infractions dès les premières interventions de la Commission, ne peut logiquement être une circonstance atténuante que s’il existe des raisons de supposer que les entreprises en cause ont été incitées à arrêter leurs comportements anticoncurrentiels par les interventions en question (voir, en ce sens, arrêt du 25 janvier 2007, Dalmine/Commission, C‑407/04 P, Rec. p. I‑829, point 158).

    81      Au point 193 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que l’infraction en cause avait cessé le 10 août 2001, soit avant la date des premières vérifications opérées par la Commission, de sorte que cette cessation ne saurait constituer une circonstance atténuante aux fins de la fixation du montant de l’amende. À cet égard, le Tribunal a précisé au même point que, nonobstant les déclarations des transformateurs, la Commission avait retenu ladite date comme étant celle de la fin de l’infraction au motif que la dernière preuve de l’infraction dont elle disposait était une réunion qui avait eu lieu à la même date.

    82      Par son argumentation, AOI conteste essentiellement la constatation factuelle du Tribunal en ce qui concerne la date de cessation de ladite infraction, sans invoquer aucune dénaturation. Or, il résulte de la jurisprudence citée au point 50 du présent arrêt qu’une telle argumentation n’est pas recevable au stade du pourvoi.

    83      Dès lors que l’argument d’AOI selon lequel Agroexpansión pouvait légitimement s’attendre à une réduction de l’amende au titre de la circonstance atténuante énoncée au point 3, troisième tiret, des lignes directrices est tributaire de sa contestation mentionnée au point précédent, cet argument est également irrecevable.

    84      En ce qui concerne les critiques d’AOI à l’égard des points 194 et 195 de l’arrêt attaqué, il suffit de constater que les considérations développées par le Tribunal à ces points, relatives à l’hypothèse selon laquelle l’infraction aurait pu être considérée comme ayant cessé le 3 octobre 2001, comme le prétendait Dimon, constituent des motifs surabondants.

    85      Or, selon une jurisprudence constante de la Cour, les griefs dirigés contre des motifs surabondants d’une décision du Tribunal ne sauraient entraîner l’annulation de cette décision et sont donc inopérants (voir, notamment, ordonnance du 20 janvier 2009, Mebrom/Commission, C‑374/07 P, point 57, et arrêt du 29 mars 2011, Anheuser-Busch/Budějovický Budvar, C‑96/09 P, Rec. p. I‑2131, point 211).

    86      Par conséquent, il y a lieu d’écarter le quatrième moyen comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, inopérant.

    87      Aucun des moyens invoqués par AOI au soutien de son pourvoi n’étant susceptible d’être accueilli, celui-ci doit être rejeté.

     Sur le pourvoi incident

    88      À l’appui de son pourvoi incident, la Commission soulève trois moyens tirés, le premier, d’un défaut de motivation, le deuxième, d’une violation du principe ne ultra petita ainsi que de l’article 266 TFUE et, le troisième, de la violation du droit à un procès équitable.

    89      Les moyens du pourvoi incident sont dirigés contre le point 214 de l’arrêt attaqué, dans lequel le Tribunal a relevé que, dans son arrêt Agroexpansión/Commission, précité, il a accordé à Agroexpansión, au titre de la coopération, une réduction supplémentaire de 5 % s’ajoutant à celle de 20 % déjà octroyée dans la décision litigieuse. Il a estimé qu’il y avait donc lieu d’appliquer également une réduction de 25 % au montant de base de l’amende tel que calculé à l’égard de Dimon.

     Argumentation des parties

    90      Par son premier moyen, la Commission estime que le Tribunal n’explique pas la raison pour laquelle il y avait lieu, au point 214 de l’arrêt attaqué, d’accorder une réduction à la société mère, en raison du fait que sa filiale a bénéficié d’une telle réduction au titre de la coopération de celle-ci.

    91      Selon la Commission, il existe une ambiguïté quant à la question de savoir si le Tribunal a exercé sa compétence de pleine juridiction audit point 214, dès lors que, après être parvenu, au point 202 de l’arrêt attaqué, à la conclusion que la Commission avait commis une erreur quant à la durée de l’infraction, il a, au point 203 de celui-ci, affirmé qu’il y avait «donc lieu de réformer la décision attaquée». Or, s’agissant de la réduction au titre de la coopération, la question de savoir si le Tribunal a estimé qu’il était toujours dans le cadre de l’exercice de sa compétence de pleine juridiction ne serait pas claire.

    92      Par son deuxième moyen, la Commission relève, d’une part, que le principe ne ultra petita signifie que, en règle générale et à l’exception des moyens d’ordre public, le Tribunal ne peut statuer que sur les moyens qui sont invoqués devant lui. Ainsi qu’il ressortirait du point 52 de l’arrêt du 14 septembre 1999, Commission/AssiDomän Kraft Products e.a. (C‑310/97 P, Rec. p. I‑5363), l’annulation que prononce le Tribunal ne saurait excéder celle sollicitée par la partie requérante. Or, ce principe aurait été violé en l’espèce, dès lors que le Tribunal aurait réduit l’amende infligée à Dimon au titre de la coopération, sans que cette dernière ait invoqué des arguments à l’appui d’une telle demande de réduction.

    93      La Commission soutient, d’autre part, que l’arrêt attaqué a violé l’article 266 TFUE et a étendu, de manière erronée, les effets juridiques de l’arrêt Agroexpansión/Commission, précité. Aussi le Tribunal aurait-il empiété sur les responsabilités incombant, au titre dudit article, à la Commission. En effet, il appartiendrait à cette institution de tirer les éventuelles conséquences à l’égard d’une société mère d’un arrêt concernant une filiale de celle-ci.

    94      En se référant, notamment, au point 55 de l’arrêt Commission/AssiDomän Kraft Products e.a., précité, la Commission soutient qu’un arrêt annulant un acte du droit de l’Union ne peut pas entraîner l’annulation d’autres actes qui n’ont pas été contestés devant les juridictions de l’Union, mais à l’égard desquels il peut être allégué qu’ils sont entachés d’une illégalité analogue à celle sur laquelle est fondée une telle annulation.

    95      Par son troisième moyen, la Commission fait valoir que le Tribunal a violé le principe du contradictoire et le droit à un procès équitable en la privant de l’opportunité de faire des observations au sujet de l’intention de ce dernier de réduire l’amende de Dimon sur la base de moyens soulevés, par Agroexpansión, dans une affaire distincte. À cet égard, le Tribunal aurait dû communiquer aux parties les conclusions qu’il avait l’intention de tirer de certains faits.

    96      La Commission soutient qu’elle ne pouvait s’attendre à ce qu’une telle approche soit retenue dans l’arrêt attaqué, dès lors que ce serait la première fois que le Tribunal a réduit une amende sur le fondement de moyens et d’arguments invoqués dans une affaire autre que celle sous examen.

    97      AOI considère que les moyens invoqués par la Commission sont tous non fondés.

     Appréciation de la Cour

    98      S’agissant du premier moyen du pourvoi incident, il convient de rappeler que l’obligation de motiver les arrêts résulte de l’article 36 du statut de la Cour, rendu applicable au Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, du même statut, et de l’article 81 du règlement de procédure du Tribunal. Selon une jurisprudence constante de la Cour, la motivation d’un arrêt du Tribunal doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de celui-ci, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la décision prise et à la Cour d’exercer son contrôle juridictionnel (voir arrêt Mindo/Commission, précité, point 29 et jurisprudence citée).

    99      En ce qui concerne la réduction supplémentaire de 5 % accordée à Dimon en application de la communication sur la coopération, l’arrêt attaqué satisfait à ces exigences.

    100    En effet, il apparaît de façon claire et non équivoque que le Tribunal a entendu procéder à l’octroi de cette réduction dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction. À cet égard, il a tout d’abord précisé, au point 204 de l’arrêt attaqué, que c’est dans l’exercice de cette compétence qu’il a estimé opportun de calculer la part du montant de l’amende que Dimon doit payer solidairement avec Agroexpansión en retenant la méthode et les critères que la Commission avait appliqués, dans la décision litigieuse, pour fixer le montant des amendes à infliger aux destinataires de celle-ci. Ensuite, les termes «[a]insi, en premier lieu» figurant au début du point 205 dudit arrêt indiquent clairement que le Tribunal y entame le calcul annoncé au point précédent. Enfin, en précisant, au point 214 du même arrêt, qu’il aborde «[e]n quatrième lieu» l’application de la communication sur la coopération, le Tribunal a montré que les considérations contenues à ce dernier point ont été prises en compte pour ce calcul.

    101    Par ailleurs, en précisant qu’il retenait la méthode et les critères appliqués dans la décision litigieuse, le Tribunal a ainsi fourni une explication concernant la réduction supplémentaire accordée à Dimon au titre de la coopération puisque, ainsi que la Commission l’a reconnu lors de l’audience, le montant de l’amende dont Dimon a été tenue pour solidairement responsable dans cette décision bénéficiait lui aussi de la réduction accordée à Agroexpansión à ce titre.

    102    Il y a donc lieu de rejeter le premier moyen du pourvoi incident comme non fondé.

    103    En ce qui concerne l’argument soulevé dans le cadre du deuxième moyen, selon lequel le Tribunal a statué ultra petita en réduisant l’amende infligée à Dimon au titre de la coopération, nonobstant l’absence de demande en ce sens dans la requête de cette dernière, il convient de rappeler, ainsi qu’il a été constaté au point 100 du présent arrêt, que ladite réduction a été effectuée par le Tribunal dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction.

    104    Une telle compétence était reconnue au juge de l’Union par l’article 17 du règlement n° 17 et elle l’est maintenant par l’article 31 du règlement n° 1/2003, conformément à l’article 261 TFUE. Ledit juge est dès lors habilité, au-delà du simple contrôle de légalité de la sanction, à substituer son appréciation à celle de la Commission et, en conséquence, à supprimer, à réduire ou à majorer l’amende ou l’astreinte infligée (voir arrêts du 8 février 2007, Groupe Danone/Commission, C‑3/06 P, Rec. p. I‑1331, point 61, ainsi que du 6 novembre 2012, Otis e.a., C‑199/11, non encore publié au Recueil, point 62). Cette compétence est exercée en tenant compte de toutes les circonstances de fait (voir, en ce sens, arrêt du 3 septembre 2009, Prym et Prym Consumer/Commission, C‑534/07 P, Rec. p. I‑7415, point 86 et jurisprudence citée).

    105    Il en résulte que le juge de l’Union est habilité à exercer sa compétence de pleine juridiction lorsque la question du montant de l’amende est soumise à son appréciation (arrêt Groupe Danone/Commission, précité, point 62).

    106    Or, il ressort du point 71 de l’arrêt attaqué que Dimon avait conclu, à titre subsidiaire, à la réduction du montant de l’amende infligée à Agroexpansión et, à titre solidaire, à elle-même et que ses troisième et quatrième moyens avaient notamment pour objet de justifier l’octroi d’une telle réduction.

    107    Dès lors, le Tribunal était en droit d’exercer sa compétence de pleine juridiction, notamment en tenant compte, au point 214 dudit arrêt, du fait qu’il avait accordé, dans l’arrêt Agroexpansión/Commission, précité, une réduction supplémentaire à Agroexpansión au titre de la coopération de cette dernière. En exerçant cette compétence, il n’a donc pas empiété sur les responsabilités incombant à la Commission au titre de l’article 266, premier alinéa, TFUE.

    108    Par conséquent, le deuxième moyen du pourvoi incident doit être considéré comme non fondé.

    109    Par son troisième moyen, la Commission allègue la violation du principe du contradictoire ainsi que du droit à un procès équitable, notamment dans la mesure où, d’une part, le Tribunal n’a pas communiqué aux parties son intention de tenir compte, dans l’exercice de sa compétence de réformation de la décision litigieuse, de la réduction supplémentaire accordée à Agroexpansión au titre de sa coopération et où, d’autre part, la Commission n’aurait pu s’attendre à ce que le Tribunal adopte une telle approche dans l’arrêt attaqué.

    110    Or, ainsi qu’il ressort des points 105 à 107 du présent arrêt, la prise en compte de ladite réduction supplémentaire relevait d’une appréciation juridique que le Tribunal était en droit de faire dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, sans en aviser les parties préalablement au prononcé de l’arrêt (voir, par analogie, arrêt du 22 janvier 2013, Commission/Tomkins, C‑286/11 P, non encore publié au Recueil, point 61).

    111    En outre, ainsi qu’il a été relevé au point 101 du présent arrêt, l’application, dans l’arrêt attaqué, de cette même réduction au bénéfice de Dimon était entièrement conforme à la méthodologie suivie par la Commission dans la décision litigieuse, de sorte que cette institution ne saurait valablement prétendre qu’elle n’était pas prévisible (voir, en ce sens, arrêt Groupe Danone/Commission, précité, point 82).

    112    Il s’ensuit que la Commission n’a pas démontré en l’occurrence une violation du principe du contradictoire ou du droit à un procès équitable.

    113    Par conséquent, le troisième moyen invoqué au soutien du pourvoi incident ne saurait être accueilli et, partant, celui-ci doit être rejeté.

     Sur les dépens

    114    En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens. Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du même règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu du paragraphe 1 dudit article 184, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

    115    S’agissant du pourvoi principal, la Commission ayant conclu à la condamnation d’AOI et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

    116    Pour ce qui est du pourvoi incident, AOI ayant conclu à la condamnation de la Commission et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

    Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) déclare et arrête:

    1)      Les pourvois principal et incident sont rejetés.

    2)      Alliance One International Inc. est condamnée aux dépens afférents au pourvoi principal.

    3)      La Commission européenne est condamnée aux dépens afférents au pourvoi incident.

    Signatures


    * Langue de procédure: l’anglais.

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