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Document 62010CJ0101

    Arrêt de la Cour (quatrième chambre) du 7 juillet 2011.
    Gentcho Pavlov et Gregor Famira contre Ausschuss der Rechtsanwaltskammer Wien.
    Demande de décision préjudicielle: Oberste Berufungs- und Disziplinarkommission - Autriche.
    Relations extérieures - Accords d’association - Réglementation nationale excluant, avant l’adhésion de la République de Bulgarie à l’Union européenne, les ressortissants bulgares de l’inscription au tableau des avocats stagiaires - Compatibilité d’une telle réglementation avec l’interdiction de toute discrimination fondée sur la nationalité, en ce qui concerne les conditions de travail, prévue dans l’accord d’association CE-Bulgarie.
    Affaire C-101/10.

    Recueil de jurisprudence 2011 I-05951

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2011:462

    Affaire C-101/10

    Gentcho Pavlov
    et
    Gregor Famira

    contre

    Ausschuss der Rechtsanwaltskammer Wien

    (demande de décision préjudicielle, introduite par

    l'Oberste Berufungs- und Disziplinarkommission)

    «Relations extérieures — Accords d’association — Réglementation nationale excluant, avant l’adhésion de la République de Bulgarie à l’Union européenne, les ressortissants bulgares de l’inscription au tableau des avocats stagiaires — Compatibilité d’une telle réglementation avec l’interdiction de toute discrimination fondée sur la nationalité, en ce qui concerne les conditions de travail, prévue dans l’accord d’association CE-Bulgarie»

    Sommaire de l'arrêt

    Accords internationaux — Accord d'association Communautés-Bulgarie — Circulation des travailleurs — Accès aux professions réglementées

    (Accord d'association Communautés-Bulgarie, art. 38, § 1, et 47)

    Le principe de non-discrimination énoncé à l’article 38, paragraphe 1, premier tiret, de l’accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République de Bulgarie, d’autre part, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’opposait pas, avant l’adhésion de la République de Bulgarie à l’Union européenne, à une réglementation d’un État membre en vertu de laquelle un ressortissant bulgare, en raison d’une condition liée à la nationalité imposée par cette réglementation, ne pouvait pas obtenir son inscription au tableau des avocats stagiaires ni, en conséquence, une attestation d’aptitude à la représentation en justice.

    En effet, ledit accord d'association ne contient aucun élément permettant de déduire de son article 38, paragraphe 1, premier tiret, ou d'autres dispositions, la volonté des parties contractantes d’éliminer toute discrimination fondée sur la nationalité en ce qui concerne l’accès des ressortissants bulgares aux professions réglementées. À cet égard, il importe en outre de tenir compte du fait que cette disposition est insérée dans le titre IV dudit accord, chapitre I, intitulé «Circulation des travailleurs», tandis que ce même accord mentionne les professions réglementées à son article 47, qui figure dans le chapitre II du même accord, consacré à l’établissement, et qui traite de l’accès aux professions réglementées sans imposer à cet égard une obligation de non-discrimination fondée sur la nationalité.

    L’inscription au tableau des avocats stagiaires, qui constitue une condition d’accès à la profession réglementée d’avocat, ne saurait donc être considérée comme constituant une condition de travail au sens dudit article 38, paragraphe 1, premier tiret.

    (cf. points 27-28, 30 et disp.)







    ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

    7 juillet 2011 (*)

    «Relations extérieures – Accords d’association – Réglementation nationale excluant, avant l’adhésion de la République de Bulgarie à l’Union européenne, les ressortissants bulgares de l’inscription au tableau des avocats stagiaires – Compatibilité d’une telle réglementation avec l’interdiction de toute discrimination fondée sur la nationalité, en ce qui concerne les conditions de travail, prévue dans l’accord d’association CE-Bulgarie»

    Dans l’affaire C‑101/10,

    ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Oberste Berufungs- und Disziplinarkommission (Autriche), par décision du 18 janvier 2010, parvenue à la Cour le 23 février 2010, dans la procédure

    Gentcho Pavlov,

    Gregor Famira

    contre

    Ausschuss der Rechtsanwaltskammer Wien,

    LA COUR (quatrième chambre),

    composée de M. J.-C. Bonichot, président de chambre, M. L. Bay Larsen (rapporteur), Mmes C. Toader, A. Prechal et M. E. Jarašiūnas, juges,

    avocat général: M. P. Mengozzi,

    greffier: M. K. Malacek, administrateur,

    vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 13 janvier 2011,

    considérant les observations présentées:

    –        pour MM. Pavlov et Famira, par Mes R. Keisler et S. Werinos, Rechtsanwälte,

    –        pour le gouvernement autrichien, par MM. E. Riedl et G. Holley, en qualité d’agents,

    –        pour la Commission européenne, par MM. F. Erlbacher et G. Braun, en qualité d’agents,

    ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 17 mars 2011,

    rend le présent

    Arrêt

    1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 38, paragraphe 1, premier tiret, de l’accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République de Bulgarie, d’autre part, conclu et approuvé au nom des Communautés par la décision 94/908/CECA, CE, Euratom du Conseil et de la Commission, du 19 décembre 1994 (JO L 358, p. 1, ci-après l’«accord d’association avec la République de Bulgarie»).

    2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Pavlov, ressortissant bulgare, et M. Famira, avocat à Vienne, à l’Ausschuss der Rechtsanwaltskammer Wien (commission du barreau de Vienne) à propos du rejet par celle-ci de la demande tendant à obtenir, d’une part, l’inscription de M. Pavlov au tableau des avocats stagiaires et, d’autre part, une attestation relative au pouvoir de représentation en justice au bénéfice de ce dernier.

     Le cadre juridique

     Le droit de l’Union

     L’accord d’association avec la République de Bulgarie

    3        L’article 7, paragraphe 1, de l’accord d’association avec la République de Bulgarie prévoit que «[l]’association comprend une période de transition d’une durée maximale de dix ans, divisée en deux étapes successives, de cinq années chacune, en principe. La première étape commence au moment de l’entrée en vigueur du présent accord». Cet accord d’association est entré en vigueur le 1er février 1995.

    4        L’article 38, paragraphe 1, de l’accord d’association avec la République de Bulgarie, qui figure sous le titre IV de celui-ci, intitulé «Circulation des travailleurs, droit d’établissement, prestation de services», chapitre I, consacré à la circulation des travailleurs, dispose:

    «Sous réserve des conditions et modalités applicables dans chaque État membre:

    –        le traitement des travailleurs de nationalité bulgare légalement employés sur le territoire d’un État membre ne doit faire l’objet d’aucune discrimination fondée sur la nationalité, en ce qui concerne les conditions de travail, de rémunération ou de licenciement, par rapport aux ressortissants dudit État membre,

    […]»

    5        L’article 42, paragraphe 1, dudit accord d’association énonce:

    «Compte tenu de la situation sur le marché de l’emploi de l’État membre, sous réserve de l’application de sa législation et du respect des règles en vigueur dans ledit État membre en matière de mobilité des travailleurs:

    –        les possibilités d’accès à l’emploi accordées par les États membres aux travailleurs bulgares en vertu d’accords bilatéraux devraient être préservées et, si possible, améliorées,

    –        les autres États membres examinent la possibilité de conclure des accords similaires.»

    6        L’article 45, paragraphe 1, du même accord d’association, qui figure sous le titre IV, chapitre II, de celui-ci, intitulé «Établissement», prévoit:

    «Dès l’entrée en vigueur du présent accord, chaque État membre réserve à l’établissement de sociétés et de ressortissants bulgares et à l’activité de sociétés et de ressortissants bulgares établis sur son territoire un traitement non moins favorable que celui accordé à ses propres sociétés et ressortissants, à l’exception des domaines visés à l’annexe XVa.»

    7        L’article 47 du même accord d’association, qui figure sous ledit chapitre II, dispose:

    «Afin de faciliter aux ressortissants de la Communauté et aux ressortissants bulgares l’accès aux activités professionnelles réglementées et leur exercice en Bulgarie et dans la Communauté, le conseil d’association examine les dispositions qu’il est nécessaire de prendre pour une reconnaissance mutuelle des qualifications. Il peut prendre toutes les mesures nécessaires à cette fin.»

    8        L’article 59, paragraphe 1, dudit accord d’association, qui figure sous le titre IV, chapitre IV, de celui-ci, intitulé «Dispositions générales», prévoit:

    «Aux fins de l’application du titre IV, aucune disposition du présent accord ne fait obstacle à l’application, par les parties, de leurs lois et réglementations concernant l’admission et le séjour, le travail, les conditions de travail, l’établissement des personnes physiques et la prestation de services, à condition que n’en soient pas réduits à néant ou compromis les avantages que retire l’une des parties d’une disposition spécifique du présent accord. […]»

     La réglementation nationale

    9        Les dispositions régissant la profession d’avocat et l’accès à cette profession figurent respectivement dans la loi sur l’examen d’accès à la profession d’avocat (Rechtsanwaltsprüfungsgesetz, BGBl. 556/1985, dans la version publiée au BGBl. 71/1999, applicable audit litige, ci-après le «RAPG»), et dans le règlement autrichien relatif à la profession d’avocat (Österreichische Rechtsanwaltsordnung, RGBl. 96/1868, dans la version publiée au BGBl. 128/2004, applicable au litige au principal, ci-après la «RAO»).

     Le RAPG

    10      Les dispositions du RAPG pertinentes au regard du litige au principal sont libellées comme suit:

    «Article 1er

    L’examen d’accès à la profession d’avocat doit attester des capacités et des connaissances du candidat nécessaires à l’exercice de la profession d’avocat, en particulier son aptitude à entamer et à assumer les démarches afférentes aux affaires à caractère public et privé confiées à un avocat ainsi que son aptitude à rédiger des documents et expertises juridiques et à présenter de manière ordonnée par écrit et oralement les éléments juridiques et factuels d’une affaire.

    Article 2

    1)      L’examen d’avocat peut être passé après l’obtention du doctorat en droit («Doktorat der Rechte») ou, pour les titulaires d’un Diplomstudium au sens de la loi du 2 mars 1978, […] relative aux études de droit, du Magisterium der Rechtswissenschaften et un stage pratique d’une durée de trois ans, dont au moins neuf mois dans une juridiction et au moins deux ans dans un cabinet d’avocat.

     […]»


     La RAO

    11      Les dispositions de la RAO pertinentes au regard du litige au principal sont rédigées comme suit:

    «Article 1er

    1)      Pour exercer la profession d’avocat en [Autriche], aucune nomination par une autorité n’est nécessaire, il faut simplement apporter la preuve que les conditions suivantes sont remplies et être inscrit au tableau des avocats (articles 5 et 5a).

    […]

    2)      Ces conditions sont les suivantes:

    a)      la nationalité autrichienne;

    […]

    d)      un stage pratique, selon les modalités et la durée prévues par la législation;

    e)      la réussite de l’examen d’accès à la profession d’avocat;

    […]

    3)      La nationalité d’un État membre de l’Union européenne ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou de la Confédération suisse est considérée comme équivalente à la nationalité autrichienne.

    Article 2

    1)      Le stage pratique exigé pour exercer la profession d’avocat consiste nécessairement en une activité juridique au sein d’une juridiction et chez un avocat; […] Le stage pratique chez un avocat ne peut être pris en compte que si cette activité est exercée à titre d’activité professionnelle principale sans être entravée par une autre activité professionnelle […]

    2)      Le stage pratique au sens du paragraphe 1 doit durer cinq ans, dont au moins neuf mois au sein d’une juridiction et au moins trois ans chez un avocat en Autriche.

    […]

    Article 15

    1)      Lorsque la représentation par un avocat est prescrite par la loi, l’avocat peut se faire représenter, sous sa responsabilité, devant toute juridiction et devant toute administration, également par un avocat stagiaire habilité à représenter un avocat et effectuant son stage auprès de lui; la signature, par un avocat stagiaire, de requêtes adressées à des juridictions ou à des administrations est toutefois illicite.

    2)      Est habilité à représenter un avocat, un avocat stagiaire ayant passé avec succès l’examen d’accès à la profession d’avocat. […]

    3)      Lorsque la représentation par un avocat n’est pas prescrite par la loi, l’avocat peut également se faire représenter, sous sa responsabilité, devant toute juridiction et devant toute administration, par tout autre avocat stagiaire effectuant son stage auprès de lui; la signature, par un avocat stagiaire, de requêtes adressées à des juridictions ou à des administrations est toutefois illicite.

    4)      La commission du barreau est tenue de délivrer à un avocat stagiaire effectuant son stage auprès d’un avocat des documents de légitimation faisant apparaître son pouvoir de substitution, au sens du paragraphe 2 [‘große Legitimationsurkunde’] ou son pouvoir de représentation, au sens du paragraphe 3 [‘kleine Legitimationsurkunde’].

    […]

    Article 30

    1)      Aux fins de l’inscription au tableau des avocats stagiaires, au moment de l’entrée dans l’étude d’avocats, une communication doit être faite à la commission [du barreau], accompagnée de la preuve de la nationalité autrichienne ainsi que du respect des conditions d’accès au stage judiciaire, la durée du stage étant calculée à compter de la réception de ladite déclaration.

    […]

    4)      Les personnes visées par un refus d’inscription au tableau des avocats stagiaires, la radiation de ce tableau ou le refus de la reconnaissance du stage en tant qu’avocat ont le droit de faire appel devant l’Oberste Berufungs- und Disziplinarkommission [commission supérieure d’appel et commission disciplinaire des avocats] […]

    5)      La nationalité d’un État membre de l’Union européenne ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou de la Confédération suisse est considérée comme équivalente à la nationalité autrichienne.»

     Le litige au principal et les questions préjudicielles

    12      M. Pavlov a achevé ses études en droit à Vienne en 2002. Depuis 2004, il est employé en tant que travailleur salarié dans le cabinet de M. Famira, avocat établi à Vienne. M. Pavlov est titulaire d’un permis de séjour autrichien et d’une autorisation d’établissement au sens du droit autrichien lui permettant d’accéder à un travail et d’exercer celui-ci sur l’ensemble du territoire autrichien. M. Famira est titulaire d’un permis, délivré par le service de l’emploi, l’autorisant à employer M. Pavlov en tant qu’avocat stagiaire salarié pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2004.

    13      Le 2 janvier 2004, MM. Famira et Pavlov ont demandé l’inscription de ce dernier au tableau des avocats stagiaires. Ils ont, dans le même temps, sollicité l’octroi au bénéfice de celui-ci d’une attestation relative au pouvoir de représentation en justice («kleine Legitimationsurkunde»), sur le fondement de l’article 15, paragraphe 3, de la RAO.

    14      Par ordonnance du 6 avril 2004, la deuxième section de l’Ausschuss der Rechtsanwaltskammer Wien a rejeté ladite demande au motif que M. Pavlov ne satisfaisait pas à la condition de nationalité prévue à l’article 30, paragraphes 1 et 5, de la RAO. La réclamation dirigée contre cette ordonnance a été rejetée le 15 juin 2004 par ladite Ausschuss, siégeant en formation plénière.

    15      Par ordonnance du 1er août 2006, l’Oberste Berufungs- und Disziplinarkommission a rejeté l’appel de MM. Pavlov et Famira dirigé contre l’ordonnance du 15 juin 2004, en considérant que la profession d’avocat est une profession réglementée, cette réglementation produisant des effets également à l’égard des avocats stagiaires. Elle a jugé que, aux termes de l’accord d’association avec la République de Bulgarie, les discriminations sont interdites uniquement en ce qui concerne les conditions de travail, mais que, en ce qui concerne l’accès aux professions réglementées, les États ayant conclu cet accord conservent la possibilité de mettre en place des limitations.

    16      Le 8 octobre 2007, le Verfassungsgerichtshof (Cour constitutionnelle) a annulé l’ordonnance du 1er août 2006 et a renvoyé l’affaire devant l’Oberste Berufungs- und Disziplinarkommission en raison du fait que celle-ci n’avait pas saisi, à titre préjudiciel, la Cour de justice de l’Union européenne d’une question portant sur l’interprétation des dispositions pertinentes dudit accord d’association, violant ainsi le droit des requérants à une procédure devant le juge naturel, tel que garanti par la Constitution nationale.

    17      Par ordonnance du 17 avril 2008, l’Oberste Berufungs- und Disziplinarkommission a annulé les ordonnances de l’Ausschuss der Rechtsanwaltskammer Wien des 6 avril et 15 juin 2004 eu égard à la modification de la situation juridique résultant de l’adhésion de la République de Bulgarie à l’Union ayant pris effet le 1er janvier 2007. Estimant que, à partir de cette date, les conditions prévues à l’article 30, paragraphes 1 et 5, de la RAO étaient remplies, elle a renvoyé l’affaire devant ladite Ausschuss afin que celle-ci statue de nouveau après un complément d’instruction.

    18      Le 2 juillet 2009, le Verfassungsgerichtshof a annulé l’ordonnance du 17 avril 2008 au motif que l’adhésion de la République de Bulgarie à l’Union n’avait en rien changé le fait que les années 2004 à 2006 sont significatives pour M. Pavlov puisque, d’une part, il ne peut passer l’examen d’accès à la profession d’avocat qu’après avoir effectué un stage pratique d’au moins deux ans auprès d’un avocat et que, d’autre part, il est nécessaire, pour être inscrit au tableau des avocats, de justifier d’un stage pratique d’au moins trois ans auprès d’un avocat. Ainsi, pour régler la question relative aux années 2004 à 2006, fallait-il, conformément à la décision de 8 octobre 2007 de la même juridiction, saisir la Cour, à titre préjudiciel, d’une question d’interprétation de l’article 38 de l’accord d’association avec la République de Bulgarie.

    19      C’est dans ces conditions que l’Oberste Berufungs- und Disziplinarkommission a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

    «1)      L’article 38, paragraphe 1, de [l’accord d’association avec la République de Bulgarie] devait-il être appliqué directement, dans la période allant du 2 janvier 2004 au 31 décembre 2006, dans le cadre de la procédure d’inscription d’un ressortissant bulgare au tableau des avocats stagiaires?

    En cas de réponse affirmative à la première question:

    2)      L’article 38, paragraphe 1, de [l’accord d’association avec la République de Bulgarie] s’opposait-il, d’une part, à l’application de l’article 30, paragraphes 1 et 5, [de la RAO], exigeant, entre autres, comme condition d’inscription, la preuve de la nationalité autrichienne ou d’une nationalité jugée équivalente, à la demande d’inscription au tableau des avocats stagiaires autrichiens et d’obtention d’une attestation de l’aptitude à la représentation en justice au sens de l’article 15, paragraphe 3, [de la RAO], introduite le 2 janvier 2004 par un ressortissant bulgare employé auprès d’un avocat autrichien, et, d’autre part, au rejet de cette demande fondé sur la seule nationalité, nonobstant le respect des autres conditions et la présence d’une autorisation d’établissement et d’un permis de travail?»

     Sur les questions préjudicielles

    20      Par ses deux questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande en substance si le principe de non-discrimination énoncé à l’article 38, paragraphe 1, premier tiret, de l’accord d’association avec la République de Bulgarie s’opposait, avant l’adhésion de celle-ci à l’Union, à une réglementation d’un État membre telle que celle figurant à l’article 30, paragraphes 1 et 5, de la RAO, en vertu de laquelle un ressortissant bulgare, en raison d’une condition liée à la nationalité imposée par cette réglementation, ne pouvait pas obtenir son inscription au tableau des avocats stagiaires ni, en conséquence, une attestation d’aptitude à la représentation en justice.

    21      Il résulte du libellé de l’article 38, paragraphe 1, premier tiret, de l’accord d’association avec la République de Bulgarie que l’interdiction que cette disposition énonce s’oppose à toute discrimination fondée sur la nationalité dont l’intéressé, déjà légalement employé, pourrait faire l’objet dans ses conditions de travail, de rémunération ou de licenciement.

    22      M. Pavlov soutient à cet égard que l’inscription au tableau des avocats stagiaires concerne les conditions de travail de cette profession et que le refus d’inscription audit tableau, fondé sur la nationalité, qui lui a été opposé en application de l’article 30, paragraphes 1 et 5, de la RAO constitue par conséquent une discrimination interdite par l’article 38, paragraphe 1, premier tiret, de l’accord d’association avec la République de Bulgarie.

    23      Il résulte des informations fournies à la Cour par la juridiction de renvoi que, selon la législation nationale en cause au principal, l’accès au stage pratique est nécessairement lié à l’inscription au tableau des avocats stagiaires et que cette inscription constitue donc une condition d’accès au stage d’avocat. Avant d’être inscrit audit tableau, l’intéressé ne peut travailler légalement qu’en tant que juriste et non pas comme avocat stagiaire.

    24      Il convient d’ajouter que l’exercice des activités qu’accomplit un avocat stagiaire, tout en pouvant relever d’un rapport de travail comme c’est le cas dans l’affaire au principal, constitue également la partie pratique de la formation nécessaire pour l’accès à la profession réglementée d’avocat (voir, en ce sens, arrêt du 13 novembre 2003, Morgenbesser, C-313/01, Rec. p. I-13467, point 51).

    25      Partant, il y a lieu d’en conclure que ladite inscription au tableau des avocats stagiaires constitue une condition d’accès à la profession réglementée d’avocat en cause au principal.

    26      Il importe, dès lors, de savoir si l’interdiction de discrimination fondée sur la nationalité, consacrée à l’article 38, paragraphe 1, premier tiret, de l’accord d’association avec la République de Bulgarie, s’étend à des règles d’accès à la profession réglementée d’avocat telles que celles en cause au principal.

    27      Il convient de relever que l’accord d’association avec la République de Bulgarie ne contient aucun élément permettant de déduire de l’article 38, paragraphe 1, premier tiret, de cet accord, ou d’autres dispositions de celui-ci, la volonté des parties contractantes d’éliminer toute discrimination fondée sur la nationalité en ce qui concerne l’accès des ressortissants bulgares aux professions réglementées. À cet égard, il importe en outre de tenir compte du fait que cette disposition est insérée dans le titre IV dudit accord, chapitre I, intitulé «Circulation des travailleurs», tandis que ce même accord mentionne les professions réglementées à son article 47, qui figure dans le chapitre II du même accord, consacré à l’établissement, et qui traite de l’accès aux professions réglementées sans imposer à cet égard une obligation de non-discrimination fondée sur la nationalité.

    28      Il s’ensuit que le principe de non-discrimination énoncé à l’article 38, paragraphe 1, premier tiret, de l’accord d’association avec la République de Bulgarie doit être interprété en ce sens qu’il ne s’étend pas à des règles nationales concernant l’accès à la profession réglementée d’avocat telles que celles en cause au principal. Ainsi, l’inscription au tableau des avocats stagiaires qui, comme il est dit au point 25 du présent arrêt, constitue une condition d’accès à la profession réglementée d’avocat ne saurait être considérée comme constituant une condition de travail au sens dudit article 38, paragraphe 1, premier tiret.

    29      S’agissant du permis de séjour et du permis de travail invoqués par M. Pavlov comme lui donnant accès au stage d’avocat, il suffit de constater qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier si ces permis, délivrés par les autorités de l’État membre d’accueil, constituent, selon la législation nationale, des décisions qui ont une telle portée et qui permettent par elles-mêmes l’accès à la profession d’avocat.

    30       Il résulte des considérations qui précèdent qu’il convient de répondre aux questions posées par la juridiction de renvoi que le principe de non-discrimination énoncé à l’article 38, paragraphe 1, premier tiret, de l’accord d’association avec la République de Bulgarie doit être interprété en ce sens qu’il ne s’opposait pas, avant l’adhésion de celle-ci à l’Union, à une réglementation d’un État membre telle que celle figurant à l’article 30, paragraphes 1 et 5, de la RAO, dans la version applicable au litige au principal, en vertu de laquelle un ressortissant bulgare, en raison d’une condition liée à la nationalité imposée par cette réglementation, ne pouvait pas obtenir son inscription au tableau des avocats stagiaires ni, en conséquence, une attestation d’aptitude à la représentation en justice.

     Sur les dépens

    31      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

    Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit:

    Le principe de non-discrimination énoncé à l’article 38, paragraphe 1, premier tiret, de l’accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République de Bulgarie, d’autre part, conclu et approuvé au nom des Communautés par la décision 94/908/CECA, CE, Euratom du Conseil et de la Commission, du 19 décembre 1994, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’opposait pas, avant l’adhésion de la République de Bulgarie à l’Union européenne, à une réglementation d’un État membre telle que celle figurant à l’article 30, paragraphes 1 et 5, du règlement autrichien relatif à la profession d’avocat (Österreichische Rechtsanwaltsordnung), dans la version applicable au litige au principal, en vertu de laquelle un ressortissant bulgare, en raison d’une condition liée à la nationalité imposée par cette réglementation, ne pouvait pas obtenir son inscription au tableau des avocats stagiaires ni, en conséquence, une attestation d’aptitude à la représentation en justice.

    Signatures


    * Langue de procédure: l’allemand.

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