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Document 62010CC0357
Opinion of Mr Advocate General Cruz Villalón delivered on 16 November 2011. # Duomo Gpa Srl (C-357/10), Gestione Servizi Pubblici Srl (C-358/10) and Irtel Srl (C-359/10) v Comune di Baranzate (C-357/10 and C-358/10) and Comune di Venegono Inferiore (C-359/10). # References for a preliminary ruling: Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia - Italy. # Articles 3 EC, 10 EC, 43 EC, 49 EC and 81 EC - Freedom of establishment - Freedom to provide services - Directive 2006/123/EC - Articles 15 and 16 -Concession relating to the assessment, verification and collection of taxes and other local authority revenue - National legislation - Minimum share capital - Obligation. # Joined cases C-357/10 to C-359/10.
Conclusions de l'avocat général Cruz Villalón présentées le 16 novembre 2011.
Duomo Gpa Srl (C-357/10), Gestione Servizi Pubblici Srl (C-358/10) et Irtel Srl (C-359/10) contre Comune di Baranzate (C-357/10 et C-358/10) et Comune di Venegono Inferiore (C-359/10).
Demandes de décision préjudicielle: Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia - Italie.
Articles 3 CE, 10 CE, 43 CE, 49 CE et 81 CE - Liberté d’établissement - Libre prestation des services - Directive 2006/123/CE - Articles 15 et 16 - Concession de services de liquidation, de vérification et de recouvrement des impôts ou d’autres recettes des administrations locales - Législation nationale - Capital social minimal - Obligation.
Affaires jointes C-357/10 à C-359/10.
Conclusions de l'avocat général Cruz Villalón présentées le 16 novembre 2011.
Duomo Gpa Srl (C-357/10), Gestione Servizi Pubblici Srl (C-358/10) et Irtel Srl (C-359/10) contre Comune di Baranzate (C-357/10 et C-358/10) et Comune di Venegono Inferiore (C-359/10).
Demandes de décision préjudicielle: Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia - Italie.
Articles 3 CE, 10 CE, 43 CE, 49 CE et 81 CE - Liberté d’établissement - Libre prestation des services - Directive 2006/123/CE - Articles 15 et 16 - Concession de services de liquidation, de vérification et de recouvrement des impôts ou d’autres recettes des administrations locales - Législation nationale - Capital social minimal - Obligation.
Affaires jointes C-357/10 à C-359/10.
Recueil de jurisprudence 2012 -00000
ECLI identifier: ECLI:EU:C:2011:736
CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. PEDRO CRUZ VILLALÓN
présentées le 16 novembre 2011 ( 1 )
Affaire C-357/10
Duomo Gpa Srl
contre
Comune di Baranzate
Affaire C-358/10
Gestione Servizi Pubblici Srl
contre
Comune di Baranzate
Affaire C-359/10
Irtel Srl
contre
Comune di Venegono Inferiore
[demandes de décisions préjudiciellesformées par le Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia (Italie)]
«Services dans le marché intérieur — Liberté d’établissement — Libre prestation de services — Concession de services de liquidation, d’établissement et de recouvrement de redevances — Législation nationale exigeant un capital social minimal à la société concessionnaire — Applicabilité de la directive 2006/123/CE — Articles 15 et 16 de la directive 2006/123 — Proportionnalité»
I – Introduction
1. |
Les trois affaires jointes en l’espèce portent sur la compatibilité avec le droit de l’Union d’une disposition nationale en vertu de laquelle les entreprises souhaitant se voir attribuer un service de liquidation, d’établissement et de recouvrement de redevances et autres recettes des collectivités locales doivent disposer d’un capital social minimal entièrement libéré de dix millions d’euros, sous peine, en simplifiant, de ne pouvoir participer à la procédure correspondante ou, le cas échéant, que l’attribution soit déclarée nulle. |
2. |
La juridiction de renvoi nous interroge notamment sur la compatibilité de ladite disposition nationale avec, d’une part, les articles 15 et 16 de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur ( 2 ), et, d’autre part, le droit primaire. |
3. |
L’insertion de cette directive dans le droit de l’Union a soulevé plusieurs questions: en premier lieu quant à son caractère d’harmonisation ( 3 ), mais également concernant son applicabilité à des affaires purement internes ( 4 ) ainsi que la portée et la validité de l’article 16 ( 5 ), entre autres. La présente affaire ne nécessite toutefois pas l’examen de tous ces problèmes, ni même de la plupart d’entre eux. Notamment, dans l’hypothèse d’une prestation de services sans recours à la liberté d’établissement, nous proposerons à la Cour, sans nécessité de «parcourir» à cette occasion tous les points indiqués, de se pencher directement sur la conformité de la disposition nationale concernée avec le droit de l’Union du point de vue du principe de proportionnalité. |
II – Le cadre juridique
A – Le droit de l’Union: la directive 2006/123
4. |
La directive 2006/123, dite «directive sur les services», établit les «dispositions générales permettant de faciliter l’exercice de la liberté d’établissement des prestataires ainsi que la libre circulation des services, tout en garantissant un niveau de qualité élevé pour les services» (article 1er, paragraphe 1). |
5. |
Son chapitre III porte sur la liberté d’établissement des prestataires. Son article 15, paragraphe 2, stipule que «[l]es États membres examinent si leur système juridique subordonne l’accès à une activité de service ou son exercice au respect» d’une série d’exigences, dont les «exigences relatives à la détention du capital d’une société» [sous c)]. |
6. |
Aux termes de l’article 15, paragraphe 3: «Les États membres vérifient que les exigences visées au paragraphe 2 remplissent les conditions suivantes:
|
7. |
Le chapitre IV de la directive est consacré à la libre circulation des services. L’article 16, qui en fait partie, est intitulé «Libre prestation des services» et établit, dans son paragraphe 1: «Les États membres respectent le droit des prestataires de fournir des services dans un État membre autre que celui dans lequel ils sont établis. L’État membre dans lequel le service est fourni garantit le libre accès à l’activité de service ainsi que son libre exercice sur son territoire. Les États membres ne peuvent pas subordonner l’accès à une activité de service ou son exercice sur leur territoire à des exigences qui ne satisfont pas aux principes suivants:
|
B – La réglementation italienne
8. |
L’article 32, paragraphe 7 bis, du décret-loi no 185, du 29 novembre 2008 ( 6 ), validé par la loi no 2, du 28 janvier 2009 ( 7 ), disposait: «[l]e montant minimal du capital exigé des sociétés, aux termes de l’article 53, paragraphe 3, du décret législatif no 446 du 15 décembre 1997, tel que modifié, en vue de l’inscription au registre des personnes privées habilitées à réaliser des activités de liquidation, établissement et recouvrement des redevances et autres recettes des provinces et des communes, est de dix millions d’euros au moins, entièrement libéré. Ce seuil ne s’applique pas aux sociétés à participation publique majoritaire. L’attribution de services de liquidation, établissement et recouvrement des redevances et autres recettes des collectivités locales à des personnes qui ne satisfont pas à cette exigence financière est frappée de nullité. Les personnes inscrites au registre susmentionné doivent adapter leur capital social au seuil minimal précité. En tout état de cause, jusqu’à cette adaptation, elles ne peuvent obtenir l’attribution de nouveaux marchés ou participer à des appels d’offres ouverts à cet effet». |
9. |
Cette disposition a été abrogée par l’article 3 bis, paragraphe 3, du décret-loi no 40, du 25 mars 2010 ( 8 ), validé par la loi no 73, du 22 mai 2010 ( 9 ). La nouvelle réglementation exige différents niveaux de capital social minimal en fonction du nombre d’habitants de l’entité locale concernée. |
III – Les litiges au principal et les questions préjudicielles
10. |
Les affaires C-357/10 et C-358/10 ont pour origine l’ouverture, par la commune de Baranzate (Italie), d’une procédure d’appel d’offres pour l’attribution d’une concession pour le service de gestion, de liquidation, d’établissement et de recouvrement de certaines redevances et autres recettes locales pendant une période de cinq ans allant du 1er mai 2009 au 30 avril 2014. La valeur des services pour la totalité de la période a été estimée à 57 000 euros. Six entreprises privées, toutes établies en Italie, ont présenté des offres. Parmi elles se trouvaient les entreprises Duomo Gpa Srl (ci-après «Duomo»), Gestione Servizi Pubblici Srl (ci-après «GSP») et Agenzia Italiana per le Pubbliche Amministrazioni SpA (ci-après «AIPA»). Les 1er et 3 avril 2009, la commune de Baranzate a informé Duomo et GSP qu’elles avaient été exclues de la procédure pour non-respect de l’exigence prévue à l’article 32, paragraphe 7 bis, du décret-loi no 185/08. |
11. |
L’affaire C-359/10 a pour origine l’ouverture d’une procédure similaire par la commune de Venegono Inferiore, en vue de la concession du service d’établissement et de recouvrement ordinaire et forcé de l’impôt communal sur la publicité et des droits sur les affichages publics, pour une période de quatre ans allant du 23 février 2009 au 31 décembre 2012, d’un montant total prévu de 48765 euros. Parmi les entreprises ayant présenté des offres se trouvaient Irtel SpA (ci-après «Irtel») et AIPA. Le 9 mars 2009, l’organisme adjudicateur a décidé d’exclure Irtel de la procédure pour non-respect de l’exigence prévue à l’article 32, paragraphe 7 bis, du décret-loi no 185/08. |
12. |
Duomo, GSP et Irtel ont introduit des recours contre les décisions d’exclusion des procédures d’adjudication précitées. |
13. |
Le Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia a sursis à statuer dans les procédures en cause, posant relativement à chacune d’entre elles les questions préjudicielles suivantes:
|
IV – La procédure devant la Cour
14. |
Les demandes de décisions préjudicielles ont été enregistrées au greffe de la Cour le 19 juillet 2010. |
15. |
La commune de Baranzate, les gouvernements italien et néerlandais et la Commission européenne ont déposé des observations écrites. |
V – L’examen des questions préjudicielles
16. |
Les deux questions posées dans les présents renvois portent, comme nous l’avons indiqué, sur la compatibilité d’une même disposition nationale avec les libertés respectivement d’établissement et de prestation de services telles que régies par la directive sur les services, en premier lieu, et telles qu’elles résultent directement du traité, en second lieu. |
17. |
Bien que la seconde question ne soit pas formellement présentée comme subsidiaire de la première, il n’est pas déraisonnable d’affirmer que ce sont les éventuels problèmes d’applicabilité de la directive aux présentes affaires qui ont conduit la juridiction de renvoi à demander en second lieu l’examen de la disposition nationale concernée au regard des libertés précitées telles qu’elles résultent directement du traité. |
A – La première question préjudicielle
18. |
La première question préjudicielle concerne la compatibilité avec les articles 15 et 16 de la directive sur les services de la norme italienne maintes fois citée, en vertu de laquelle les entreprises qui souhaitent se voir attribuer un service de liquidation, d’établissement et de recouvrement de redevances et autres recettes des collectivités locales doivent avoir un capital social entièrement libéré d’au minimum dix millions d’euros, sous peine de ne pouvoir participer à la procédure correspondante ou, le cas échéant, que l’attribution soit déclarée nulle. |
19. |
Les dispositions précitées de la directive font partie de la réglementation, distincte selon le cas, des deux «situations» dans lesquelles le prestataire de services peut se trouver: la situation «liberté d’établissement» et la situation «libre prestation de services», soumises à des régimes juridiques quelque peu différents ( 10 ). Mais, avant de nous pencher sur la question visant à savoir si l’une ou l’autre disposition, voire les deux, doit être considérée comme pertinente à nos fins, il convient d’examiner l’applicabilité de la directive en tant que telle. |
1. La question de l’applicabilité de la directive sur les services
20. |
L’applicabilité de la directive sur les services a été contestée essentiellement sous deux angles différents: l’un temporel et l’autre touchant au fond. |
a) Les objections temporelles: une disposition nationale adoptée pendant le délai de transposition
21. |
L’adoption de la disposition nationale litigieuse ainsi que l’ouverture des procédures d’attribution et les décisions d’exclusion des entreprises requérantes ont toutes eu lieu avant le 28 décembre 2009, date d’expiration du délai de transposition de la directive sur les services (article 44, paragraphe 1). |
22. |
Cela est toutefois dénué de pertinence du point de vue de la liberté d’établissement, car l’article 15, paragraphe 6, de la directive établit que, «[à] partir du 28 décembre 2006, les États membres ne peuvent plus introduire de nouvelles exigences du type de celles visées au paragraphe 2, à moins que ces exigences soient conformes aux conditions prévues au paragraphe 3». Par conséquent, la condition litigieuse, introduite après cette date, doit être appréciée au regard de l’article 15 de la directive. |
23. |
Concernant les dispositions relatives à la libre prestation de services, la directive ne contient pas de clause de «standstill» analogue à celle précitée; toutefois, la même conclusion que la précédente peut être tirée ici. Conformément aux arrêts du 18 décembre 1997, Inter-Environnement Wallonie ( 11 ), et du 5 avril 2011, Société fiduciaire nationale d’expertise comptable ( 12 ), les États membres doivent s’abstenir de prendre, pendant le délai de transposition, des dispositions «de nature à compromettre sérieusement le résultat prescrit» par une directive. |
24. |
Il convient en outre de tenir compte du fait que, en l’espèce, il ne semble pas que la disposition nationale ait été adoptée avec un caractère provisoire (elle a, de fait, été adoptée seulement un an avant l’expiration du délai de transposition de la directive) ( 13 ). La brève durée de validité de la norme litigieuse n’est par conséquent pas suffisante pour considérer qu’il s’agissait d’une simple «étape» dans la transposition de la directive ( 14 ), ni pour affirmer qu’elle ne pouvait pas «compromettre sérieusement le résultat prescrit» par la directive: si nous nous attachons à la rédaction des deux arrêts cités, le point déterminant n’est pas que la mesure ait finalement compromis le résultat de la directive, mais qu’elle eût pu le compromettre (si elle était restée en vigueur). |
b) Les objections sur le fond: les cas «exclus» du champ d’application de la directive sur les services
25. |
Comme la Commission le rappelle à juste titre, l’activité de liquidation, d’établissement et de recouvrement de redevances et autres recettes des collectivités locales constitue, en Italie, un «service» au sens de l’article 4, paragraphe 1, de la directive et relève donc du champ d’application de cette dernière (article 2, paragraphe 1). |
26. |
L’applicabilité de la directive sur les services fait toutefois également l’objet de diverses objections de fond, liées à l’invocation de différentes exclusions du champ d’application de ladite directive. En tant que clauses exceptionnelles, ces dérogations doivent être interprétées strictement et, en tout état de cause, sans recourir à l’analogie. Aucune de celles qui ont été invoquées en l’espèce n’est, selon nous, pertinente en l’espèce. |
27. |
En premier lieu, il convient de signaler que, malgré son lien évident avec l’exercice du pouvoir de taxation, l’activité de liquidation, d’établissement et de recouvrement de redevances en cause ne peut être considérée comme une activité exclue du champ d’application de la directive pour «participation à l’exercice de l’autorité publique» au sens de l’article 51 TFUE [article 2, paragraphe 2, sous i), de la directive sur les services]. Conformément à une jurisprudence abondante, la dérogation prévue à cet article du traité ne peut être étendue aux fonctions simplement auxiliaires et préparatoires vis-à-vis d’une entité qui exerce effectivement l’autorité publique en disposant de la décision finale. La Cour a en outre précisé que la possibilité d’invoquer l’article 51 TFUE est exclue lorsque les organismes privés concernés exercent des prérogatives de puissance publique «sous la supervision active de l’autorité publique compétente» ( 15 ). Il est clair que l’ordre juridique italien réserve l’exercice des pouvoirs de taxation proprement dits aux entités publiques, considérant le recouvrement de certaines redevances comme une activité auxiliaire pouvant être exercée sous un régime de gestion indirecte, sous la tutelle desdites entités, et relevant donc du champ d’application de la directive. |
28. |
Le cas examiné en l’espèce ne peut pas non plus être exclu du champ d’application de la directive sur les services au regard de l’article 2, paragraphe 3, de cette dernière, aux termes duquel la directive ne s’applique pas «en matière fiscale». Comme il découle du vingt-neuvième considérant, cette dérogation vise à exclure du champ d’application de la directive les mesures fiscales adoptées par les États membres, qui sont régies par les dispositions spécifiques du traité. Au contraire, les activités administratives s’exerçant, comme celle en cause en l’espèce, dans le domaine de la «fiscalité» relèvent du champ d’application de la directive, tout comme les activités de conseil fiscal, spécifiquement mentionnées dans le trente-troisième considérant de la directive. |
29. |
Enfin, la dérogation visée à l’article 17, paragraphe 5, de la directive, selon laquelle l’article 16 ne s’applique pas aux «activités de recouvrement judiciaire des dettes», ne semble pas non plus être pertinente en l’espèce, car l’activité est exercée sans participation des autorités judiciaires. |
30. |
Au vu des considérations précédentes, il convient par conséquent de conclure que la directive sur les services est applicable à la présente affaire. |
2. Les libertés concernées: les deux situations dans lesquelles le prestataire du service peut se trouver
31. |
La disposition nationale litigieuse constitue clairement une «exigence», au sens de la directive sur les services, visant les prestataires du service en cause. En d’autres termes, sa réglementation des conditions de prestation du service inclut une condition impérative, qui doit passer avec succès un contrôle de conformité à la directive en tant qu’«exigence». La directive traite toutefois ces «exigences» séparément pour les deux situations «liberté d’établissement» et «libre prestation de services». Cela ressort de la formulation même de la première des questions de la juridiction de renvoi, qui mentionne tant l’article 15 que l’article 16 de la directive. Il convient donc de déterminer si la disposition litigieuse doit être ou non examinée exclusivement vis-à-vis de l’une ou de l’autre liberté. |
32. |
Dans une première approche, la présente affaire réunirait les conditions requises par la jurisprudence pour l’application de la liberté d’établissement ( 16 ). En effet, les concessions litigieuses avaient, d’une part, une durée assez longue (respectivement quatre et cinq ans); d’autre part, il semble difficile qu’une activité telle que celle consistant dans le recouvrement de redevances puisse être menée à bien sans un établissement ou une «installation stable» dans la commune en cause ou, à tout le moins, sur le territoire national. |
33. |
Or, en ce qui concerne la durée de l’activité, il convient de considérer que la notion de service au sens du traité peut inclure les services «dont la prestation s’étend sur une période prolongée» ( 17 ). Seule «une activité exercée à titre permanent ou, en tout cas, sans limitation prévisible de durée ne relève pas des dispositions communautaires relatives aux prestations de services» ( 18 ). La prévision d’exercice de l’activité pendant quatre ou cinq ans n’est par conséquent pas suffisante. |
34. |
Disposer d’une certaine base physique dans l’État dans lequel l’activité est exercée n’est pas non plus absolument déterminant. Conformément à l’arrêt Gebhard, on ne peut exclure la «possibilité pour le prestataire de services, au sens du traité, de se doter, dans l’État membre d’accueil, d’une certaine infrastructure (y compris un bureau, un cabinet ou une étude) dans la mesure où cette infrastructure est nécessaire aux fins de l’accomplissement de la prestation en cause» ( 19 ). |
35. |
Au vu de ce qui précède, et dans la mesure où l’on ne peut exclure que, dans ce cas, la prestation du service puisse avoir lieu tant dans l’une que dans l’autre situation, nous considérons que la disposition litigieuse doit être examinée, comme le demande la juridiction italienne, au regard tant de la liberté d’établissement que de la libre prestation de services (articles 15 et 16 de la directive sur les services) ( 20 ). |
3. L’examen de la disposition litigieuse au regard de l’article 15 de la directive sur les services (liberté d’établissement)
36. |
La directive sur les services a choisi d’énumérer les restrictions à la liberté d’établissement qui, pour utiliser la terminologie classique de la Cour, ne sont pas susceptibles d’être justifiées, et celles qui peuvent l’être à condition de satisfaire à une série de conditions. Ainsi, l’article 14 énumère les exigences dites «interdites», parmi lesquelles figurent, par exemple, les exigences discriminatoires, de nationalité ou de résidence. Les États membres ne peuvent subordonner l’accès à une activité de services ou son exercice au respect de l’une de ces exigences. L’article 15, paragraphe 2, énumère au contraire une série d’exigences que les États membres peuvent maintenir à condition qu’elles respectent les conditions visées au paragraphe 3. |
37. |
Parmi les exigences soumises à cette «évaluation» ou ce contrôle, l’article 15, paragraphe 2, sous c), cite celles relatives à la «détention du capital d’une société». L’exigence que la disposition litigieuse impose aux candidats à l’attribution d’une concession telle que celle en cause en l’espèce (disposer d’un capital minimal entièrement libéré de dix millions d’euros) peut facilement être considérée comme relevant de cette disposition. Il convient par conséquent d’examiner si elle respecte les conditions visées à l’article 15, paragraphe 3, de la directive: non-discrimination, nécessité et proportionnalité. |
a) Non-discrimination
38. |
Comme nous l’avons déjà indiqué, la norme litigieuse s’applique aux ressortissants et aux non-ressortissants. L’exigence n’est, par conséquent, pas directement ou indirectement discriminatoire en fonction de la nationalité (ou du siège statutaire) ( 21 ). |
b) La condition de «nécessité» ou l’objectif invoqué
39. |
Sous la rubrique «nécessité», la directive sur les services renvoie à la traditionnelle condition selon laquelle l’exigence doit pouvoir être justifiée par un objectif légitime ( 22 ). Dans le domaine de la liberté d’établissement, en particulier, cette condition de «nécessité» consiste en ce que les «exigences [soient] justifiées par une raison impérieuse d’intérêt général» [article 15, paragraphe 3, sous b)]. Conformément à l’article 4, paragraphe 8, de la directive, on entend par «raisons impérieuses d’intérêt général» toutes «raisons reconnues comme telles par la jurisprudence de la Cour de justice», y compris celles énumérées par la suite ( 23 ). Cette liste est toutefois simplement illustrative: il semble clair que la volonté de la directive n’a pas été de limiter la liste des raisons impérieuses d’intérêt général à celles expressément citées dans son article 4, mais de renvoyer à une catégorie générale que la jurisprudence a toujours considérée ouverte. |
40. |
Dans la présente affaire, les autorités italiennes font valoir que l’exigence de capital social minimal en cause en l’espèce est nécessaire pour protéger les intérêts financiers des communes qui externalisent le service de liquidation, d’établissement et de recouvrement du risque que, le moment venu de transférer les montants perçus dans les caisses publiques, les sociétés concessionnaires ne puissent le faire en raison d’une situation d’insolvabilité. |
41. |
Cette justification invoquée par les autorités italiennes pourrait, par conséquent, être considérée comme une «raison impérieuse d’intérêt général» au regard de l’article 15 de la directive sur les services, raison en principe de nature à légitimer l’exigence litigieuse sous l’angle de la liberté d’établissement. |
c) Le contrôle de proportionnalité
42. |
Une tout autre question est celle relative à la condition de proportionnalité. |
43. |
Dans la droite ligne de la jurisprudence relative à la justification des restrictions aux libertés du traité, l’article 15, paragraphe 3, sous c), de la directive impose que les exigences soient propres à garantir la réalisation de l’objectif poursuivi, n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif et que d’autres mesures moins contraignantes ne permettent pas d’atteindre le même résultat. |
44. |
Il n’y a rien à redire s’agissant du caractère approprié de l’exigence en cause en l’espèce par rapport à l’objectif invoqué par les autorités italiennes, à savoir la protection des intérêts financiers des communes. En effet, il convient de rappeler que les montants recouvrés ne sont pas immédiatement versés aux communes, un laps de temps ( 24 ) s’écoulant entre le recouvrement et ce versement, pendant lequel le concessionnaire peut utiliser les fonds afin de procéder à des opérations financières lui procurant un bénéfice et comportant éventuellement un risque. Dans de tels cas, le capital social du concessionnaire constituerait une garantie appropriée pour la commune créancière. |
45. |
Malgré cette «adéquation» avec l’objectif, la mesure litigieuse souffre d’un défaut de proportionnalité sur deux plans distincts. |
46. |
En premier lieu, l’exigence d’un capital minimal entièrement libéré de dix millions d’euros va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif consistant à protéger l’administration publique face à un éventuel manquement de la société concessionnaire du service. Selon nous, le problème n’est pas tant le montant élevé de la somme fixée que le caractère absolument indifférencié de la mesure, qui impose la même exigence quantitative indépendamment des montants à recouvrer et, en définitive, de la quantification économique du risque auquel la commune créancière s’expose. |
47. |
En effet, il est difficile de déterminer in abstracto si la somme de dix millions d’euros constitue une quantification appropriée de la «garantie» financière que le concessionnaire privé doit offrir à la commune, mais, en tout état de cause, il semble évident que, si l’objectif visé est d’offrir à l’administration publique une sorte d’«aval» face au risque que les montants effectivement perçus par le concessionnaire ne soient pas versés dans les caisses publiques dans les délais, le montant dudit aval ou de la garantie devrait varier en fonction de l’importance dudit risque. Or, puisque l’évaluation du risque subjectif que le concessionnaire manque à ses obligations ne semble pas une variable facilement appréciable ou prévisible ( 25 ), le plus approprié serait de partir d’une appréciation du risque objectif, à savoir de la capacité de recouvrement de la commune concernée, car plus le montant que le concessionnaire pourrait recouvrer est important, plus grand pourrait être le préjudice causé à l’administration locale en cas de non-paiement ou de retard. |
48. |
À partir de là, la quantification de cette capacité de recouvrement (et en définitive du risque objectif que prend la commune) peut être faite de manière plus ou moins exacte, en prenant uniquement en compte le nombre de contribuables de la commune en cause ou en ajoutant également d’autres facteurs (par exemple, des estimations des recouvrements lors d’exercices précédents), en procédant à une détermination ad casum de l’exigence ou en opérant par groupe ou par tranche, mais il est évident que, d’une façon ou d’une autre, seule une garantie dont le montant est fixé en fonction du risque éventuel que l’on entend couvrir peut être considérée proportionnelle. |
49. |
Avec une solution de ce type, on parviendrait très probablement à la conclusion qu’une garantie de dix millions d’euros n’est pas nécessaire dans tous les cas ( 26 ). L’exigence litigieuse serait alors disproportionnée, dans la mesure où elle exclut les entreprises de petite dimension de toute possibilité d’accès à cette activité. |
50. |
En second lieu, nous considérons que l’objectif visant à garantir les intérêts économiques des communes concernées pourrait être atteint par d’autres moyens moins contraignants, qui semblent en outre déjà exister dans la réglementation italienne en matière de marchés publics. La juridiction de renvoi a en effet mentionné le décret législatif no 163, du 12 avril 2006 ( 27 ), qui, semble-t-il, fixe des conditions générales pour la participation à des procédures de passation de marchés pouvant également servir de garantie, comme le dépôt de garantie, la preuve de la capacité technique et financière, de la fiabilité et de la solvabilité, etc. |
51. |
Au vu de ce qui précède, il conviendrait de conclure que l’article 15 de la directive sur les services s’oppose à une disposition nationale telle que celle en cause en l’espèce. |
4. L’examen de la disposition litigieuse au regard de l’article 16 de la directive sur les services (libre prestation de services)
52. |
L’examen de la disposition litigieuse à la lumière de la réglementation de la libre prestation de services figurant à l’article 16 de la directive est, dans une certaine mesure, parallèle à celui qui vient d’être fait relativement à la liberté d’établissement, et conduit à la même conclusion d’incompatibilité avec la directive pour défaut de proportionnalité. Le régime de la liberté d’établissement et celui de la libre prestation de services présentent toutefois certaines différences qu’il convient de mentionner. |
53. |
La première différence consiste dans le fait que, contrairement à l’article 15 de la directive sur les services, l’article 16 contient uniquement, dans son paragraphe 2, une liste de six types d’exigences ( 28 ), parmi lesquelles ne se trouve pas celle relative au capital social. Rien n’empêche toutefois de considérer que celle-ci est comprise dans les exigences prévues, à titre général, dans le paragraphe 1 dudit article, dont le troisième alinéa stipule que les «États membres ne peuvent pas subordonner l’accès à une activité de service ou son exercice sur leur territoire à des exigences qui ne satisfont pas aux principes» de non-discrimination, de nécessité et de proportionnalité. L’analyse consisterait donc à nouveau dans l’examen de ces trois conditions. |
54. |
La seconde différence concerne la définition de la condition «nécessité», beaucoup plus stricte dans le domaine de la libre prestation de services que dans celui de la liberté d’établissement. Contrairement à l’article 15, paragraphe 3, l’article 16, paragraphe 1, sous b), ne procède pas à un renvoi général aux «raisons impérieuses d’intérêt général» définies par la jurisprudence, intégrant à la place une liste apparemment limitative d’objectifs susceptibles de justifier l’exigence en cause: «raisons d’ordre public, de sécurité publique, de santé publique ou de protection de l’environnement» ( 29 ). |
55. |
Ce libellé conduirait à poser le problème de savoir si un objectif tel que celui allégué relativement à l’exigence litigieuse peut relever de l’une des quatre catégories mentionnées. De même, rien n’empêcherait de remettre en question le caractère limitatif de cette liste de l’article 16, paragraphe 1, sous b), voire même sa compatibilité avec les dispositions du traité et, en définitive, la validité même de la directive sur ce point ( 30 ). |
56. |
Or, il s’avère que l’application du contrôle de proportionnalité dans le cas «libre prestation de services» ne varie pas par rapport au cas «liberté d’établissement», la disposition litigieuse ne passant pas non plus avec succès le test de proportionnalité dans le cadre de la libre prestation de services. Par conséquent, nous proposons à la Cour d’appliquer directement, dans le cas de la libre prestation de services, le contrôle de proportionnalité dans les termes exposés aux points 45 à 50 des présentes conclusions, sans nécessité d’aborder préalablement la question de la légitimité de l’objectif invoqué. |
57. |
En tout état de cause, l’article 16 de la directive sur les services s’oppose donc également à une disposition nationale telle que celle en cause en l’espèce. |
5. Conclusion à la première question préjudicielle
58. |
Eu égard aux considérations précédentes, il conviendrait de conclure que les articles 15 et 16 de la directive sur les services s’opposent à une disposition nationale en vertu de laquelle les entreprises qui souhaitent se voir attribuer un service de liquidation, d’établissement et de recouvrement de redevances et autres recettes des collectivités locales doivent disposer d’un capital social minimal entièrement libéré de dix millions d’euros. |
B – La seconde question préjudicielle
59. |
Dans sa seconde question préjudicielle, la juridiction de renvoi recourt au droit primaire en tant que paramètre de légalité, demandant si la norme litigieuse est conforme aux articles 3 CE, 10 CE, 43 CE, 49 CE et 81 CE. |
60. |
Selon nous, la partie de cette seconde question préjudicielle qui se réfère aux articles 3 CE ( 31 ), 10 CE ( 32 ) et 81 CE (article 101 TFUE) doit être déclarée irrecevable en raison de l’absence de précisions suffisantes sur le contexte factuel et le régime normatif permettant de relier la disposition litigieuse aux règles du traité en matière de concurrence. En effet, ces exigences, constantes dans la jurisprudence, «valent tout particulièrement dans le domaine de la concurrence, qui est caractérisé par des situations de fait et de droit complexes» ( 33 ). Ces dispositions exclues, la seconde question préjudicielle serait limitée aux articles 43 CE et 49 CE (articles 49 TFUE et 56 TFUE), à savoir à la compatibilité de la disposition litigieuse avec la liberté d’établissement et la libre prestation de services. |
61. |
Une fois réduite à ces stricts termes, et dans la mesure où nous avons conclu que la directive sur les services est applicable en l’espèce, il ne serait pas nécessaire de répondre à cette seconde question préjudicielle. En effet, il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence abondante ( 34 ), les règles sur les libertés contenues dans le traité ne s’appliquent plus aux domaines ayant fait l’objet d’une harmonisation par le législateur de l’Union ( 35 ). |
62. |
En tout état de cause, si la directive sur les services était considérée comme non applicable, un examen de la disposition litigieuse à la lumière du traité ne différerait pour l’essentiel pas de ce qui a déjà été indiqué au point précédent: le problème resterait la proportionnalité de la mesure adoptée. |
63. |
On ne pourrait, bien entendu, pas opposer le caractère purement interne des litiges au principal à une application «directe» du traité. Il est vrai qu’une règle nationale n’est «susceptible de relever des dispositions relatives à la libre prestation de services établies par le traité que dans la mesure où elle s’applique à des situations ayant un lien avec les échanges intracommunautaires». Toutefois, la jurisprudence reconnaît également que la réponse de la Cour à une question sur la compatibilité de ce type de règles avec le traité peut être utile à la juridiction de renvoi lorsque la règle en question est appliquée indistinctement aux ressortissants et aux non-ressortissants ( 36 ). |
64. |
En outre, le fait que la disposition nationale litigieuse ait déjà été abrogée n’infirme selon nous pas la conclusion précédente, car on ne peut exclure que des personnes établies dans un autre État membre aient pu être affectées par ladite disposition pendant sa période de validité. Pour répondre ici aux allégations d’irrecevabilité de la question préjudicielle posée par le gouvernement italien, la réponse de la Cour est nécessaire pour résoudre les litiges nationaux pendants, parmi lesquels se trouvent ceux initiés par Duomo, GSP et Irtel. |
65. |
En conclusion, et en tout état de cause à titre subsidiaire, il convient de considérer que les articles 49 TFUE et 56 TFUE s’opposent à une disposition nationale telle que celle en cause en l’espèce, qui souffre d’un défaut de proportionnalité dans les termes exposés aux points 45 à 50 des présentes conclusions. |
VI – Conclusion
66. |
En conclusion, nous proposons à la Cour de répondre aux questions posées par le Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia comme suit:
|
( 1 ) Langue originale: l’espagnol.
( 2 ) JO L 376, p. 36, ci-après la «directive sur les services» ou la «directive».
( 3 ) Relativement à ce point, voir Barnard, C., «Unravelling the Services Directive», Common Market Law Review, 2008, p. 382 et 383; van de Gronden, J., et de Waele, H., «All’s well that bends well: the constitutional dimension to the Services Directive», European Constitutional Law Review, 2010, p. 404; Klamert, M., «Of empty glasses and double burdens: approaches to regulating the Services Market à propos the implementation of the Services Directive», Legal Issues of Economic Integration, 37, no 2 (2010), p. 129, et Mortelmans, K., «The relationship between the Treaty rules and Community measures for the establishment and functioning of the internal market — Towards a concordance rule», Common Market Law Review, 2002, p. 1324 et suiv.
( 4 ) Voir Barnard, C., précité, p. 351, et De la Quadra-Salcedo Janini, T., «Mercado interior y Directiva de servicios», Revista catalana de dret públic, no 42, 2011, p. 257 à 293.
( 5 ) Voir van de Gronden, J., et de Waele, H., précités, p. 41 et suiv., et Peglow, K., «La libre prestation de services dans la directive no 2006/123/CE — Réflexion sur l’insertion dans le droit communautaire existant», Revue trimestrielle de droit européen, 2008, points 62 et suiv.
( 6 ) Décret-loi portant mesures d’urgence pour le soutien des ménages, du travail, de l’emploi et des entreprises ainsi que pour la redéfinition du cadre stratégique national dans le contexte de la lutte contre la crise.
( 7 ) GURI (Gazzetta ufficiale della Repubblica italiana) no 22, du 28 janvier 2009, supplément ordinaire no 14.
( 8 ) GURI no 71, du 26 mars 2010.
( 9 ) GURI no 120, du 25 mai 2010.
( 10 ) Nous utiliserons cette terminologie, qui, selon nous, est conforme à l’inspiration de base d’une réglementation de l’Union dont l’objet essentiel est la prestation de services, que ce soit dans un contexte d’établissement ou dans un cadre hors établissement.
( 11 ) C-129/96, Rec. p. I-7411, points 45 et 46.
( 12 ) C-119/09, Rec. p. I-2551, points 19 et 20.
( 13 ) Voir, sur ce point, arrêt du 14 juin 2007, Commission/Belgique (C-422/05, Rec. p. I-4749, points 64 à 68), dans lequel la Cour a tenu compte du fait que la règle nationale incompatible avec une directive soit entrée en vigueur moins de trois mois avant la date d’expiration du délai de transposition de ladite directive.
( 14 ) À cet égard, voir arrêt Inter-Environnement Wallonie, précité, point 49.
( 15 ) Arrêt du 22 octobre 2009, Commission/Portugal (C-438/08, Rec. p. I-10219, points 36 et 37, et jurisprudence citée).
( 16 ) Arrêt du 25 juillet 1991, Factortame e.a. (C-221/89, Rec. p. I-3905, point 20).
( 17 ) Arrêts du 11 décembre 2003, Schnitzer (C-215/01, Rec. p. I-14847, points 30 et 31); du 29 avril 2004, Commission/Portugal (C-171/02, Rec. p. I-5645, point 26); du 16 juillet 2009, von Chamier-Glisczinski (C-208/07, Rec. p. I-6095, point 74); du 26 octobre 2010, Schmelz (C-97/09, Rec. p. I-10465, point 42), et du 18 novembre 2010, Commission/Portugal (C-458/08, Rec. p. I-11599, point 85).
( 18 ) Arrêts du 5 octobre 1988, Steymann (196/87, Rec. p. 6159, point 16); Schnitzer (précité, points 27 à 29), et du 7 septembre 2004, Trojani (C-456/02, Rec. p. I-7573, point 28).
( 19 ) Arrêt du 30 novembre 1995 (C-55/94, Rec. p. I-4165, point 27). Voir également soixante-dix-septième considérant de la directive.
( 20 ) La Cour n’examine la mesure en cause au regard de l’une seulement des libertés que s’il s’avère que l’une d’elles est entièrement secondaire par rapport à l’autre et peut lui être rattachée. Voir arrêts du 24 mars 1994, Schindler (C-275/92, Rec. p. I-1039, point 22); du 22 janvier 2002, Canal Satélite Digital (C-390/99, Rec. p. I-607, point 31), et du 3 octobre 2006, Fidium Finanz (C-452/04, Rec. p. I-9521, point 34).
( 21 ) L’éventuelle discrimination des entreprises privées par rapport à celles à participation publique majoritaire (auxquelles cette exigence n’est pas imposée) serait dénuée de pertinence relativement à cette première condition, car la directive se réfère exclusivement à une discrimination en raison de la nationalité ou du siège statutaire. En outre, la différence de traitement pourrait être justifiée au vu de l’objectif et, en tout état de cause, il ne s’agit pas d’une problématique posée directement dans la présente affaire.
( 22 ) Cela peut entraîner une certaine confusion, compte tenu du fait que le contrôle de la «nécessité» a traditionnellement été considéré comme l’une des phases ou des parties du contrôle de proportionnalité.
( 23 ) Il s’agit de «l’ordre public, la sécurité publique, la santé publique, la préservation de l’équilibre financier du système de sécurité sociale, la protection des consommateurs, des destinataires de services et des travailleurs, la loyauté des transactions commerciales, la lutte contre la fraude, la protection de l’environnement et de l’environnement urbain, la santé des animaux, la propriété intellectuelle, la conservation du patrimoine national historique et artistique, des objectifs de politique sociale et des objectifs de politique culturelle».
( 24 ) Les versements sont effectués à la fin de chaque trimestre.
( 25 ) Le législateur italien en a d’ailleurs déjà tenu compte dans une certaine mesure, en excluant l’application de l’exigence aux entreprises à participation publique majoritaire, soutenues par les caisses publiques.
( 26 ) Le législateur italien a implicitement reconnu ce défaut de proportionnalité en modifiant, en 2010, la disposition litigieuse. La nouvelle réglementation, contenue dans la loi no 73 de 2010 précitée, ventile l’exigence de capital minimal en fonction du nombre d’habitants de la commune concernée, de sorte que, actuellement, un capital de dix millions d’euros n’est exigé que si l’activité concerne des provinces ou des communes de plus de 200000 habitants (s’il s’agit d’un recouvrement pour une commune de moins de 100000 habitants ou pour plusieurs communes ne dépassant pas ensemble 100000 habitants, le montant exigé est d’un million d’euros; s’il s’agit de communes de moins de 200000 habitants, de cinq millions d’euros).
( 27 ) Codice dei contratti pubblici relativi ai lavori, servizi, forniture in attuazione delle direttive 2004/17/CE e 2004/18/CE (GURI no 100, du 2 mai 2006).
( 28 ) Apparemment, il s’agit de raisons susceptibles de justification, car l’article 16, paragraphe 3, dispose que «[l]es présentes dispositions n’empêchent pas l’État membre dans lequel le prestataire se déplace pour fournir son service d’imposer des exigences concernant la prestation de l’activité de service lorsque ces exigences sont justifiées par des raisons d’ordre public, de sécurité publique, de santé publique ou de protection de l’environnement et conformément au paragraphe 1. […]».
( 29 ) À part la protection de l’environnement, dont le caractère d’objectif d’intérêt général a été consacré par la jurisprudence, les trois autres raisons coïncident avec celles prévues à l’article 52 TFUE (également applicable à la libre prestation de services en vertu de l’article 62 TFUE).
( 30 ) Dans ses conclusions dans l’affaire Société fiduciaire nationale d’expertise comptable, précitée, présentées le 18 mai 2010, l’avocat général Mazák a déjà souligné que l’éventuel caractère limitatif de la liste de l’article 16, paragraphe 1, sous b), pourrait être incohérent avec d’autres dispositions de la directive sur les services elle-même, en particulier son article 24, paragraphe 2: «Il semblerait, à première vue, que des règles professionnelles représentant une entrave à la libre prestation des services ne pourraient être justifiées que par les quatre raisons mentionnées à l’article 16, paragraphe 1, sous b), de la directive 2006/123. Or, une telle interprétation aurait pour conséquence l’impossibilité de la réalisation de l’article 24, paragraphe 2, première phrase, de la directive 2006/123, qui énonce les raisons justifiant l’existence de règles déontologiques telles que, en l’espèce, l’interdiction de démarchage, à savoir la protection de l’indépendance, la dignité et l’intégrité de la profession réglementée ainsi que le secret professionnel. Il est impossible d’exiger que les mêmes règles déontologiques suivent, en même temps, les autres raisons» (point 62).
( 31 ) Actuellement abrogé. Son contenu a été intégré dans les articles 3 TFUE à 6 TFUE.
( 32 ) Actuellement abrogé. Son contenu a été intégré dans l’article 4, paragraphe 3, TFUE, relatif à la coopération loyale.
( 33 ) Arrêts du 26 janvier 1993, Telemarsicabruzzo e.a. (C-320/90 à C-322/90, Rec. p. I-393, point 7); du 13 avril 2000, Lehtonen et Castors Braine (C-176/96, Rec. p. I-2681, point 22); du 17 février 2005, Viacom Outdoor (C-134/03, Rec. p. I-1167, point 23); du 23 novembre 2006, Asnef-Equifax et Administración del Estado (C-238/05, Rec. p. I-11125, point 23); du 13 décembre 2007, United Pan-Europe Communications Belgium e.a. (C-250/06, Rec. p. I-11135, point 20), et du 11 mars 2010, Attanasio Group (C-384/08, Rec. p. I-2055, point 32).
( 34 ) Voir, en ce sens, arrêts du 5 octobre 1977, Tedeschi (5/77, Rec. p. 1555, point 35); du 23 novembre 1989, Eau de Cologne & Parfümerie-Fabrik 4711 (C-150/88, Rec. p. 3891, point 28); du 12 octobre 1993, Vanacker et Lesage (C-37/92, Rec. p. I-4947, point 9); du 23 mai 1996, Hedley Lomas (C-5/94, Rec. p. I-2553, point 18); du 19 mars 1998, Compassion in World Farming (C-1/96, Rec. p. I-1251, point 47); du 25 mars 1999, Commission/Italie (C-112/97, Rec. p. I-1821, point 54); du 11 mai 1999, Monsees (C-350/97, Rec. p. I-2921, point 24); du 13 décembre 2001, DaimlerChrysler (C-324/99, Rec. p. I-9897, point 32); du 22 octobre 2002, National Farmers’ Union (C-241/01, Rec. p. I-9079, point 48); du 24 octobre 2002, Linhart et Biffl (C-99/01, Rec. p. I-9375, point 18); du 24 janvier 2008, Roby Profumi (C-257/06, Rec. p. I-189, point 14), et du 30 avril 2009, Lidl Magyarország (C-132/08, Rec. p. I-3841, point 42). Voir, également, point 45 des conclusions de l’avocat général Geelhoed, présentées le 4 juillet 2002 [conclusions communes aux affaires Commission/Autriche (arrêt du 23 janvier 2003, C-221/00, Rec. p. I-1007) et Sterbenz et Haug (arrêt du 23 janvier 2003, C-421/00, C-426/00 et C-16/01, Rec. p. I-1065)]. L’avocat général souligne également un certain manque de cohérence de la jurisprudence relativement à ce point (point 44).
( 35 ) Cette jurisprudence est, selon nous, applicable en l’espèce, et cela bien que la directive sur les services ne rentre pas dans le modèle «classique» de réglementation d’harmonisation de l’Union.
( 36 ) Arrêts du 5 décembre 2000, Guimont (C-448/98, Rec. p. I-10663, point 21); du 11 septembre 2003, Anomar e.a. (C-6/01, Rec. p. I-8621, point 39); du 30 mars 2006, Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti (C-451/03, Rec. p. I-2941, point 29); Attanasio Group (précité note 33, points 23 et 24), et du 1er juin 2010, Blanco Pérez et Chao Gómez (C-570/07 et C-571/07, Rec. p. I-4629, points 39 et 40).