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Document 62005TJ0058

Arrêt du Tribunal de première instance (quatrième chambre élargie) du 11 juillet 2007.
Isabel Clara Centeno Mediavilla et autres contre Commission des Communautés européennes.
Fonction publique - Fonctionnaires - Nomination - Entrée en vigueur du nouveau statut - Règles transitoires de classement en grade lors du recrutement - Article 12 de l’annexe XIII du nouveau statut.
Affaire T-58/05.

Recueil de jurisprudence 2007 II-02523;FP-I-A-2-00157
Recueil de jurisprudence - Fonction publique 2007 II-A-2-01087

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2007:218

Parties
Motifs de l'arrêt
Dispositif

Parties

Dans l’affaire T‑58/05,

Isabel Clara Centeno Mediavilla, demeurant à Séville (Espagne),

Delphine Fumey, demeurant à Evere (Belgique),

Eva Gerhards, demeurant à Bruxelles (Belgique),

Iona M. S. Hamilton, demeurant à Bruxelles,

Raymond Hill, demeurant à Bruxelles,

Jean Huby, demeurant à Bruxelles,

Patrick Klein, demeurant à Bruxelles,

Domenico Lombardi, demeurant à Bruxelles,

Thomas Millar, demeurant à Londres (Royaume-Uni),

Miltiadis Moraitis, demeurant à Woluwe-Saint-Lambert (Belgique),

Ansa Norman Palmer, demeurant à Bruxelles,

Nicola Robinson, demeurant à Bruxelles,

François-Xavier Rouxel, demeurant à Bruxelles,

Marta Silva Mendes, demeurant à Bruxelles,

Peter van den Hul, demeurant à Tervuren (Belgique),

Fritz Von Nordheim Nielsen, demeurant à Hoeilaart (Belgique),

Michaël Zouridakis, demeurant à Bruxelles,

représentés initialement par M es  G. Vandersanden, L. Levi et A. Finchelstein, puis par M es Vandersanden et Levi, avocats,

parties requérantes,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. J. Currall et H. Kraemer, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Conseil de l’Union européenne, représenté initialement par M mes  M. Arpio Santacruz, M. Sims et I. Sulce, puis par M mes Arpio Santacruz et Sulce, en qualité d’agents,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d’annulation des décisions nommant les requérants fonctionnaires stagiaires, en ce qu’elles fixent leur classement en grade en application des dispositions transitoires de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, tel que modifié par le règlement (CE, Euratom) n° 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004 (JO L 124, p. 1),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre élargie),

composé de M. H. Legal, président, M me I. Wiszniewska-Białecka, MM.V. Vadapalas, E. Moavero Milanesi et N. Wahl, juges,

greffier : M me K. Pocheć, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 6 décembre 2006,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

Cadre juridique

1. Dans sa version applicable jusqu’au 30 avril 2004, l’article 31 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après l’« ancien statut ») disposait que les lauréats de concours généraux choisis par l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci‑après l’« AIPN ») sur les listes d’aptitude établies par les jurys à l’issue des épreuves de sélection étaient nommés fonctionnaires de la catégorie A, au grade de base, et fonctionnaires des autres catégories, au grade de base correspondant à l’emploi pour lequel ils avaient été recrutés.

2. En vertu de son article 2, le règlement (CE, Euratom) n° 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004, modifiant l’ancien statut ainsi que le régime applicable aux autres agents des Communautés européennes (JO L 124, p. 1), est entré en vigueur le 1 er  mai 2004.

3. Ce règlement introduit un nouveau système de carrières dans la fonction publique communautaire en substituant les nouveaux groupes de fonctions d’administrateurs (AD) et d’assistants (AST) aux anciennes catégories de fonctionnaires des Communautés européennes, A, B, C et D.

4. En raison de cette modification, l’article 5 du statut, dans sa rédaction en vigueur à compter du 1 er mai 2004 (ci-après le « statut »), prévoit désormais ce qui suit :

« 1. Les emplois relevant du présent statut sont classés, suivant la nature et le niveau des fonctions auxquelles ils correspondent, en un groupe de fonctions des administrateurs (ci-après dénommés ‘AD’) et un groupe de fonctions des assistants (ci-après dénommés ‘AST’).

2. Le groupe de fonctions AD comporte douze grades correspondant à des fonctions de direction, de conception et d’étude ainsi qu’à des fonctions linguistiques ou scientifiques. Le groupe de fonctions AST comporte onze grades correspondant à des fonctions d’application, de nature technique et d’exécution.

[…]

4. Un tableau descriptif des différents emplois-types figure à l’annexe I, section A. Sur la base de ce tableau, chaque institution arrête, après avis du comité du statut, la description des fonctions et attributions associées à chaque emploi type.

5. Les fonctionnaires appartenant au même groupe de fonctions sont soumis à des conditions identiques de recrutement et de déroulement de carrière. »

5. L’article 31 du statut dispose :

« 1. Les candidats ainsi choisis sont nommés au grade du groupe de fonctions indiqué dans l’avis du concours auquel ils ont été reçus.

2. Sans préjudice de l’article 29, paragraphe 2, les fonctionnaires sont recrutés uniquement aux grades AST 1 à AST 4 ou AD 5 à AD 8. Le grade de l’avis de concours est déterminé par l’institution, conformément aux critères suivants :

a) l’objectif de recruter les fonctionnaires possédant les plus hautes qualités visées à l’article 27 ;

b) la qualité de l’expérience professionnelle requise.

Afin de répondre aux besoins spécifiques des institutions, les conditions du marché du travail communautaire peuvent également être prises en considération lors du recrutement de fonctionnaires.

[…] »

6. Dans sa version en vigueur depuis le 1 er mai 2004, le statut comporte une nouvelle annexe, l’annexe XIII, intitulée « Mesures de transition applicables aux fonctionnaires des Communautés », dont les dispositions pertinentes sont libellées comme suit :

« Article premier

1. Pendant la période comprise entre le 1 er mai 2004 et le 30 avril 2006, les paragraphes 1 et 2 de l’article 5 du statut sont remplacés par le texte suivant :

‘1. Les emplois relevant du statut sont classés, suivant la nature et le niveau des fonctions auxquelles ils correspondent, en quatre catégories désignées dans l’ordre hiérarchique décroissant par les lettres A*, B*, C*, D*.

2. La catégorie A* comprend douze grades, la catégorie B* neuf grades, la catégorie C* sept grades et la catégorie D* cinq grades.’

2. Toute référence à la date de recrutement s’entend comme faite à la date d’entrée en service.

Article 2

1. Le 1 er mai 2004 et sous réserve de l’article 8 de la présente annexe, les grades des fonctionnaires placés dans l’une des positions [administratives] visées à l’article 35 du statut sont renommés comme suit :

>lt>3

[…] »

7. L’article 4 de l’annexe XIII du statut dispose notamment ce qui suit :

« Aux fins de l’application du statut et de ses annexes pendant la période visée à la phrase d’introduction de l’article 1 er de la présente annexe :

a) les termes ‘groupe de fonctions’ sont remplacés par le terme ‘catégorie’

i) aux articles suivants du statut :

– l’article 5, paragraphe 5,

– […]

– l’article 31, paragraphe 1,

[…]

b) les termes ‘groupes de fonctions AD’ sont remplacés par les termes ‘catégorie A*’

i) aux articles suivants du statut :

– l’article 5, paragraphe 3, point c),

[…]

e) à l’article 5, paragraphe 3, point a), du statut, les termes ‘le groupe de fonctions AST’ sont remplacés par les termes ‘les catégories B* et C*’;

[…]

n) à l’article 5, paragraphe 4, du statut, les termes ‘annexe I, section A’ sont remplacés par les termes ‘annexe XIII.1’;

[…] »

8. L’article 12 de l’annexe XIII du statut dispose :

« 1. Pendant la période allant du 1 er mai 2004 au 30 avril 2006, toute référence faite aux grades des groupes de fonctions AST et AD, à l’article 31 paragraphes 2 et 3, du statut, doit être comprise selon les modalités qui suivent :

– AST 1 à AST 4 : C *1 à C *2 et B *3 à B *4

– AD 5 à AD 8 : A *5 à A *8

– AD 9, AD 10, AD 11, AD 12 : A *9, A *10, A *11, A *12.

2. Les dispositions de l’article 5, paragraphe 3, du statut ne s’appliquent pas aux fonctionnaires recrutés sur des listes d’aptitude établies à la suite de concours publiés avant le 1 er mai 2004.

3. Les fonctionnaires inscrits sur une liste d’aptitude avant le 1 er mai 2006 et recrutés entre le 1 er mai 2004 et le 30 avril 2006 sont classés :

– lorsque la liste a été établie pour la catégorie A *, B * ou C *, dans le grade publié dans l’avis de concours,

– lorsque la liste a été établie pour la catégorie A, LA, B ou C, selon le tableau suivant :

>lt>4

Faits à l’origine du litige

9. La Commission a publié au Journal Officiel des Communautés européennes , au cours de la période comprise entre le 11 avril 2001 et le 18 juin 2002, plusieurs avis de concours généraux visant à constituer des réserves de recrutement d’administrateurs de carrière A 7/A 6 (COM/A/6/01, COM/A/9/01, COM/A/10/01, COM/A/1/02, COM/A/3/02 et CC/A/12/02), d’administrateurs adjoints de carrière A 8 (concours COM/A/2/02) et d’assistants adjoints de carrière B 5/B 4 (concours COM B/1/02).

10. Les 17 requérants ont été inscrits avant le 1 er mai 2004 sur les différentes listes d’aptitude dressées à l’issue du déroulement des épreuves de sélection.

11. Sous la rubrique intitulée « Conditions de recrutement », les avis de concours précisaient que l’inscription des lauréats sur les listes de réserve leur donnait vocation à être recrutés au fur et à mesure des besoins des services.

12. Au point D (« Informations générales »), in fine, des avis des concours COM/A/l/02 et COM/A/2/02, figurait la mention suivante :

« La Commission a formellement transmis au Conseil une proposition de modification du statut. Cette proposition comporte notamment un nouveau système de carrière. Les lauréats de ce concours pourraient donc se voir proposer un recrutement sur la base de nouvelles dispositions statutaires, suivant l’adoption de celles-ci par le Conseil. »

13. L’avis de concours COM/A/3/02 comportait une mention presque identique, qui se référait aux « dispositions du nouveau statut ».

14. Les listes d’aptitude établies à la suite des concours COM/A/6/01, COM/A/9/01 et COM/A/10/01 (ci-après les « concours de 2001 ») ont été publiées, au Journal officiel des Communautés européennes , respectivement, le 19 novembre 2002 (concours COM/A/6/01), le 8 mars (concours COM/A/10/01) et le 2 juillet 2003 (concours COM/A/9/01).

15. Les lettres par lesquelles les lauréats des concours de 2001 ont été informés de leur inscription sur la liste d’aptitude indiquaient notamment que la validité de cette liste devait expirer le 31 décembre 2003.

16. En décembre 2003, la direction générale « Personnel et administration » de la Commission a adressé une lettre à chacun des lauréats des concours de 2001, leur indiquant que la validité des différentes listes d’aptitude était prorogée jusqu’au 31 décembre 2004.

17. Les listes d’aptitude établies à la suite des concours COM/A/l/02, COM/A/2/02, COM/A/3/02, COM/B/1/02 et CC/A/12/02 (ci-après les « concours de 2002 ») ont été publiées au Journal officiel des Communautés européennes , respectivement, le 19 décembre 2003 (concours CC/A/12/02), le 23 mars (concours COM/A/1/02 et COM/A/2/02) et le 18 mai 2004 (concours COM/A/3/02 et COM/B/1/02).

18. Les requérants ont été nommés fonctionnaires stagiaires par des décisions adoptées postérieurement au 1 er mai 2004 (ci-après les « décisions attaquées ») et prenant effet à une échéance comprise entre cette date et le 1 er décembre 2004.

19. Par les décisions attaquées, les requérants ont été classés en grade en application de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, c’est-à-dire au grade B *3 (concours COM/B/1/02) au grade A* 5 (concours COM/A/2/02) ou au grade A *6 (tous les autres concours).

20. Chacun des requérants a, entre le 6 août 2004 et le 21 octobre 2004, introduit une réclamation, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, dirigée contre la décision le nommant fonctionnaire stagiaire en tant qu’elle fixait, en application de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, son classement à un grade moins favorable que ceux indiqués dans les différents avis de concours.

21. Par décisions prises entre le 21 octobre 2004 et le 22 décembre 2004, 1’AIPN a rejeté les réclamations introduites par les requérants.

Procédure et conclusions des parties

22. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 3 février 2005, les requérants ont introduit le présent recours.

23. Par ordonnance du 6 juin 2005 du président de la quatrième chambre du Tribunal, le Conseil a été admis à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.

24. Par décision du 6 octobre 2006, le Tribunal a décidé de renvoyer l’affaire devant la quatrième chambre élargie.

25. Les requérants concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

– annuler les décisions attaquées en ce qu’elles fixent leur classement en grade en application de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut ;

– reconstituer leur carrière (y compris la valorisation de leur expérience dans le grade ainsi rectifié, leurs droits à l’avancement et leurs droits à pension), à partir du grade auquel ils auraient dû être nommés conformément à l’avis du concours au terme duquel ils ont été placés sur la liste d’aptitude, soit au grade mentionné dans cet avis de concours, soit à celui correspondant à son équivalent selon le classement établi par les nouvelles règles statutaires (et à l’échelon approprié conformément aux règles applicables avant le 1 er mai 2004), à partir de la décision de nomination ;

– leur octroyer le bénéfice des intérêts de retard, calculés en fonction du taux fixé par la Banque centrale européenne, dus au titre de l’ensemble des sommes correspondant à la différence entre le traitement correspondant à leur classement figurant dans la décision de nomination et le classement auquel ils auraient dû avoir droit, jusqu’à la date où interviendra la décision de classement régulier en grade ;

– condamner la Commission aux entiers dépens.

26. La Commission, soutenue par le Conseil, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– rejeter le recours comme non fondé ;

– statuer sur les dépens comme de droit.

En droit

27. À l’appui de leurs conclusions en annulation, les requérants excipent, en premier lieu, de l’illégalité de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, sur le fondement duquel la Commission a déterminé leur classement en grade dans les décisions attaquées.

28. En second lieu, les requérants font valoir que les décisions attaquées méconnaissent elles-mêmes les principes de bonne administration, de sollicitude, de transparence, de protection de la confiance légitime, de bonne foi, d’égalité de traitement et de non-discrimination, ainsi que la règle de l’équivalence de l’emploi et du grade.

Sur l’illégalité de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut

29. Les requérants soutiennent que l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut est contraire à l’article 10 de l’ancien statut, méconnaît leurs droits acquis, viole les principes de sécurité juridique et de non-rétroactivité, ainsi que les principes d’égalité de traitement et de non-discrimination, méconnaît leur confiance légitime et contrevient tant à l’article 31 du statut qu’à ses articles 5 et 7.

Sur la violation de l’article 10 de l’ancien statut

– Arguments des parties

30. Les requérants reprochent à la Commission d’avoir omis de consulter le comité du statut sur un amendement apporté à la proposition de règlement modificatif de l’ancien statut et visant à la nomination des lauréats des concours dont l’avis indiquait les grades de recrutement A 7 ou A 6, non pas au grade A *7, comme cela était prévu dans le texte antérieurement soumis au comité du statut, mais au grade inférieur A *6.

31. Cette modification, introduite dans la disposition devenue l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, ne serait pas, contrairement à ce que soutient la Commission, marginale, non substantielle ou encore graduelle et non structurelle, car elle entraînerait une réduction considérable des droits pécuniaires et des perspectives de carrière des requérants.

32. En omettant de consulter le comité du statut sur cette modification fondamentale du statut, la Commission aurait ainsi violé l’article 10, deuxième alinéa, de l’ancien statut.

33. La Commission objecte qu’une nouvelle consultation du comité du statut n’est exigée que lorsque la proposition sur laquelle s’est prononcé cet organe a été modifiée au point que sa substance même en a été affectée.

34. Or, la modification consistant en la substitution du grade de recrutement A *6 au grade A *7 ne revêtirait pas un caractère substantiel, car son ampleur serait très limitée et il conviendrait de considérer que la nouvelle structure des carrières est fondée sur un rythme plus soutenu de promotions que l’ancienne.

– Appréciation du Tribunal

35. Aux termes de l’article 10, deuxième alinéa, deuxième phrase, de l’ancien statut, le comité du statut est consulté par la Commission sur toute proposition de révision du statut. Cette disposition impose à la Commission une obligation de consultation qui s’étend, outre aux propositions formelles, aux modifications substantielles de propositions déjà examinées auxquelles elle procède, à moins que, dans ce dernier cas, les modifications correspondent pour l’essentiel à celles proposées par le comité du statut.

36. Cette interprétation est commandée tant par le libellé de la disposition en question que par le rôle assumé par le comité du statut. En effet, d’une part, en prévoyant la consultation sans réserve ni exception du comité du statut sur toute proposition de révision du statut, cette disposition confère une large portée à l’obligation qu’elle définit. Ses termes sont donc manifestement inconciliables avec une interprétation restrictive de sa portée. D’autre part, le comité du statut, en tant qu’organe paritaire regroupant les représentants des administrations et ceux du personnel, ces derniers étant démocratiquement élus, de toutes les institutions, est amené à prendre en considération et à exprimer les intérêts de la fonction publique communautaire dans son ensemble (arrêt du Tribunal du 30 septembre 1998, Busacca e.a./Cour des comptes, T‑164/97, RecFP p. I‑A‑565 et II‑1699, points 91 à 95).

37. Il en résulte que, lorsque des amendements à une proposition de révision du statut sont introduits lors de la négociation du texte devant le Conseil, il existe une obligation de reconsultation du comité du statut avant l’adoption par le Conseil des dispositions réglementaires concernées, lorsque ces amendements affectent de façon substantielle l’économie de la proposition. Des modifications ponctuelles et d’effet limité n’emportent pas une telle obligation, laquelle aurait, dans l’interprétation contraire, l’effet de contraindre excessivement le droit d’amendement dans le cadre du processus législatif communautaire.

38. Le caractère soit substantiel, soit ponctuel et limité des modifications en cause doit donc être apprécié du point de vue de leur objet et de la place des dispositions modifiées dans le dispositif d’ensemble proposé à l’adoption, et non de celui des conséquences individuelles qu’elles peuvent avoir sur la situation de personnes susceptibles d’être concernées par leur mise en œuvre.

39. En l’occurrence, le redéploiement des grades de classement et de l’échelle des rémunérations des fonctionnaires des Communautés européennes découlant de la réforme des carrières introduite par le législateur communautaire a eu pour effet induit immédiat l’abaissement des grades de recrutement des nouveaux fonctionnaires, accompagné à terme par un développement de leurs perspectives de carrière.

40. Il s’ensuit que la substitution du grade A* 6 au grade A 7 initialement envisagé constitue un élément complémentaire de la réforme s’insérant dans l’économie d’ensemble et dans la perspective globale d’une restructuration évolutive des carrières.

41. Cette substitution s’analyse en un aménagement ponctuel des dispositions transitoires vers la nouvelle structure des carrières, dont ni l’économie générale ni la substance même n’apparaissent ainsi remises en cause par cet aménagement, au point de justifier une nouvelle consultation du comité du statut (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 5 octobre 1994, Allemagne/Conseil, C‑280/93, Rec. p. I‑4973, point 41).

42. Il n’apparaît donc pas que, en ne procédant pas à une nouvelle consultation du comité du statut à propos d’une simple adjonction induite par l’économie générale de la proposition de modification du statut, telle qu’elle avait été antérieurement soumise au comité du statut, la Commission ait méconnu l’article 10, deuxième alinéa, deuxième phrase, de l’ancien statut, même si la substitution du grade A*6 au grade A 7* introduite postérieurement à la consultation du comité du statut a, dans l’immédiat, un effet financier non négligeable sur le niveau du classement initial des fonctionnaires concernés et sur la rémunération qui leur est versée en début de carrière.

43. Il y a donc lieu de rejeter le moyen comme non fondé.

Sur la violation des droits acquis des requérants, ainsi que des principes de sécurité juridique et de non-rétroactivité

– Arguments des parties

44. Les requérants estiment que leur droit d’être classés au grade visé par les avis des concours en cause, qui lient l’AIPN et engagent celle-ci à leur égard, procède de leur inscription sur une liste d’aptitude. En fixant leur classement à un grade de recrutement différent, l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut violerait donc leurs droits acquis.

45. Cette disposition serait également contraire au principe de non-rétroactivité, en ce qu’elle modifierait, par l’insertion de nouveaux critères de classement, la situation à laquelle les requérants pouvaient s’attendre au vu des indications contenues dans les avis de concours.

46. Enfin, la disposition critiquée méconnaîtrait le principe de sécurité juridique, en vertu duquel les administrés doivent pouvoir se fier aux conditions définies par les avis de concours. Or, celles-ci resteraient valables tant que les intéressés n’ont pas reçu en temps utile une information claire, complète et précise sur de nouvelles dispositions applicables à leur grade de classement lors de leur recrutement.

47. La Commission, soutenue par le Conseil, estime que la disposition critiquée n’est pas contraire aux principes invoqués par les requérants. Elle fait valoir en substance que l’inscription sur une liste d’aptitude confère une simple vocation, exclusive de tout droit, à être nommé fonctionnaire stagiaire et, a fortiori, ne confère pas un droit à être classé à un grade déterminé, en cas de nomination. Il ne saurait donc être question d’une remise en cause d’un quelconque droit acquis, l’antériorité de la naissance d’une situation juridique par rapport à une modification législative étant une condition nécessaire mais non suffisante de la constitution d’un droit acquis.

– Appréciation du Tribunal

48. Il est constant que le règlement n° 723/2004 insérant l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut dans le texte du statut est entré en vigueur le 1 er  mai 2004, soit à une date postérieure à celle de sa publication, le 27 avril précédent.

49. Dès lors que la date de sa prise d’effet n’est pas antérieure à la date de sa publication, le règlement n° 723/2004 ne peut être tenu pour rétroactif (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 11 décembre 1996, Barreaux e.a./Commission, T‑177/95, RecFP p. I‑A-541 et II‑1451, points 45 et 46).

50. En ce qu’il définit de nouveaux critères de classement en grade applicables lors du recrutement des lauréats de concours inscrits sur des listes d’aptitude antérieurement au 1 er mai 2004 mais nommés fonctionnaires stagiaires après cette date, l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut n’est donc pas contraire au principe de non-rétroactivité.

51. Selon une jurisprudence constante, il est en effet de principe que, en cas de modification de dispositions d’application générale et, singulièrement, des dispositions du statut, une règle nouvelle s’applique immédiatement aux effets futurs de situations juridiques, qui sont nées, sans être cependant entièrement constituées, sous l’empire de la règle antérieure (arrêts de la Cour du 14 avril 1970, Brock, 68/69, Rec. p. 171, point 7 ; du 5 décembre 1973, SOPAD, 143/73, Rec. p. 1433, point 8, et du 10 juillet 1986, Licata/CES, 270/84, Rec. p. 2305, point 31).

52. En l’espèce, l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut n’a pas pu violer un droit à l’application des anciens critères statutaires de classement dont les requérants auraient été titulaires. L’inscription de lauréats de concours généraux sur les listes d’aptitude dressées à l’issue des opérations de sélection n’emporte en effet au profit des intéressés qu’une simple vocation à être nommés fonctionnaires stagiaires, comme le rappelaient, d’ailleurs, les avis des concours généraux en cause (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 25 mai 2000, Elkaïm et Mazuel/Commission, T‑173/99, RecFP p. I‑A‑101 et II‑433, point 21).

53. Cette vocation est nécessairement exclusive de tout droit acquis, le classement en grade d’un lauréat inscrit sur la liste d’aptitude d’un concours général ne pouvant être considéré comme acquis aussi longtemps qu’il n’a pas fait l’objet d’une décision de nomination en bonne et due forme.

54. Ainsi qu’il ressort de l’article 3 du statut, la nomination d’un fonctionnaire trouve nécessairement son origine dans un acte unilatéral de l’AIPN précisant la date à laquelle cette nomination prend effet, ainsi que l’emploi auquel l’intéressé est affecté (arrêt du Tribunal du 10 avril 1992, Ventura/Parlement, T‑40/91, Rec. p. II‑1697, point 41).

55. Ainsi, ce n’est qu’après avoir fait l’objet d’une telle décision que le lauréat d’un concours général peut revendiquer la qualité de fonctionnaire et, partant, réclamer le bénéfice de dispositions statutaires (arrêt du Tribunal du 19 juillet 1999, Mammarella/Commission, T‑74/98, RecFP p. I‑A‑151 et II‑797, point 27).

56. Or, à la date de l’entrée en vigueur, le 1 er mai 2004, de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, les requérants n’avaient pas encore été admis par un acte de nomination de l’AIPN au bénéfice de l’application de dispositions statutaires.

57. Les requérants ne sont donc pas fondés à alléguer que l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut a enfreint des droits au classement dans les grades des anciennes carrières indiquées dans les avis de concours en cause qu’ils auraient acquis, antérieurement au 1 er mai 2004, du fait de leur inscription sur les listes d’aptitude dressées au terme des opérations de sélection.

58. Un fonctionnaire ne peut en effet se prévaloir d’un droit acquis que si le fait générateur de celui-ci s’est produit sous l’empire d’un statut déterminé antérieur à la modification des dispositions statutaires (arrêt de la Cour du 19 mars 1975, Gillet/Commission, 28/74, Rec. p. 463, point 5).

59. Il s’en déduit qu’aucun droit acquis des requérants à un classement en grade déterminé n’a été méconnu en l’espèce.

60. Enfin, le principe de sécurité juridique invoqué par les intéressés ne trouve à s’appliquer à des situations du type de celle ici en cause que lorsqu’un acte communautaire réglementaire voit son point de départ fixé à une date antérieure à sa publication (arrêt de la Cour du 9 janvier 1990, SAFA, C‑337/88, Rec. p. I‑1, point 13), et que les règles communautaires visent des situations acquises antérieurement à leur entrée en vigueur (arrêt de la Cour du 10 février 1982, Bout, 21/81, Rec. p. 381, point 13), hypothèses étrangères au cas d’espèce, ainsi qu’il vient d’être constaté.

61. Il s’ensuit que le principe de sécurité juridique n’a pas pu être méconnu par le législateur communautaire.

62. Les requérants ne sont donc pas fondés à soutenir que la disposition contestée par voie d’exception d’illégalité viole leurs droits acquis ou les principes de sécurité juridique et de non-rétroactivité.

63. Il y a donc lieu de rejeter le grief comme dépourvu de fondement.

Sur la violation du principe d’égalité de traitement et de non-discrimination

– Arguments des parties

64. Sans contester le droit du législateur de modifier les dispositions du statut, les requérants soutiennent que l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut traite de façon différente une catégorie identique de personnes, constituée par des lauréats d’un même concours, au regard de leur classement en grade et, par conséquent, de leur traitement mensuel, selon qu’ils ont été recrutés avant le 1 er  mai 2004 ou à partir de cette date.

65. Cette échéance ne saurait constituer, aux fins du classement en grade lors du recrutement, un critère objectif de différenciation, car la date de nomination d’un fonctionnaire dépendrait d’éléments qui ne seraient pas objectifs et dont les requérants n’auraient pas la maîtrise.

66. Le seul critère objectif à prendre en considération à cet égard serait la date, antérieure au 1 er mai 2004, de la lettre informant tous les lauréats des concours de leur inscription sur une liste d’aptitude. Même s’ils n’avaient aucun droit à être nommés, ils auraient depuis lors, en cas de nomination, le droit d’être recrutés au grade mentionné dans l’avis de vacance et dans l’avis de concours, et conformément à l’article 31 de l’ancien statut.

67. Dans son arrêt du 9 juillet 1997, Monaco/Parlement (T‑92/96, RecFP p. I‑A‑195 et II‑573), le Tribunal aurait estimé, d’une part, qu’il n’y a pas lieu de retenir la date de recrutement d’un candidat pour déterminer les dispositions qui lui sont applicables et, d’autre part, que le respect du principe de non-discrimination et d’égalité de traitement exige que tous les lauréats d’un concours soient traités de la même manière, indépendamment de l’intervention éventuelle de règles nouvelles avant la nomination de certains d’entre eux.

68. Un autre facteur de discrimination tiendrait à ce que la dépréciation de leur classement en grade aurait eu pour effet l’attribution à tous les requérants de postes « senior » avec des grades « junior ». Dans la mesure où ils avaient déjà acquis une expérience professionnelle considérable et où ils possédaient des titres et des diplômes importants, ils auraient fait l’objet, en violation de l’article 1 er  quinquies du statut, d’une discrimination en raison de leur âge, puisqu’ils n’auraient pas les mêmes perspectives de carrière que d’autres fonctionnaires moins âgés bénéficiant du même classement.

69. En outre, des requérants, ayant eu, avant leur nomination comme fonctionnaires stagiaires, la qualité d’agent temporaire ou d’agent auxiliaire des Communautés européennes, se seraient vu attribuer, sous l’empire des nouvelles règles statutaires, le même poste avec les mêmes fonctions, voire des fonctions accrues, alors que, par ailleurs, leur classement en grade a été abaissé.

70. La Commission estime au contraire que les lauréats des concours litigieux respectivement nommés avant le 1 er mai 2004 et à partir de cette date ne se trouvent pas dans une situation comparable.

71. Ainsi qu’il résulterait implicitement des dispositions combinées de l’article 3 et de l’article 4, premier alinéa, du statut, la date pertinente pour apprécier la légalité d’un acte de nomination est celle de sa prise d’effet. Or, tant les dates d’adoption des décisions attaquées que celles de leur prise d’effets seraient postérieures au 1 er  mai 2004.

72. La légalité d’un acte communautaire devant être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date de son adoption, les lauréats des concours litigieux nommés avant le 1 er mai 2004 auraient eu vocation à être nommés fonctionnaires conformément aux dispositions des articles 31 et 32 de l’ancien statut, alors que, à la suite de l’entrée en vigueur du règlement n° 723/2004, les lauréats des concours litigieux nommés après cette date auraient eu vocation à être nommés fonctionnaires en application des dispositions transitoires de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut.

73. À la différence de l’affaire Monaco/Parlement, précitée, le présent litige n’aurait trait ni à la pratique administrative d’une institution concernant le classement en grade des fonctionnaires qu’elle recrute ni à une directive interne consacrant une telle pratique administrative, mais à une disposition émanant du législateur communautaire et excluant le risque d’arbitraire inhérent à une modification spontanée par une institution d’une directive interne de classement en grade lors du recrutement.

74. Le législateur communautaire serait à tout moment en droit d’adopter, pour l’avenir, les modifications aux dispositions du statut qu’il estime conformes à l’intérêt du service, même si de telles modifications aboutissent à une situation plus défavorable pour les fonctionnaires que ne l’était celle découlant des anciennes dispositions.

– Appréciation du Tribunal

75. Selon une jurisprudence constante, le principe général d’égalité de traitement et de non-discrimination exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente, à moins qu’une différenciation ne soit objectivement justifiée (arrêt du Tribunal du 9 février 1994, Lacruz Bassols/Cour de justice, T‑109/92, RecFP p. I‑A 31 et II‑105, point 87).

76. Pour déterminer si les requérants peuvent se prévaloir utilement de ce principe, il convient donc de déterminer si tous les lauréats des concours en cause inscrits sur les listes d’aptitude établies au terme des opérations de sélection doivent être considérés comme relevant d’une seule et même catégorie de personnes, qu’ils aient été nommés avant le 1 er mai 2004 ou à partir de cette date.

77. Ainsi qu’il ressort des développements ci-dessus, le classement en grade des requérants ne pouvait être légalement effectué qu’en application des nouveaux critères en vigueur à la date de l’adoption de la décision les nommant fonctionnaires stagiaires.

78. Les requérants admettent d’ailleurs implicitement que les nouvelles dispositions du statut leur sont bien applicables, dans la mesure où ils revendiquent le bénéfice de l’application de l’article 1 er  quinquies du statut.

79. En revanche, les lauréats des concours en cause nommés antérieurement au 1 er  mai 2004 ont dû être nécessairement classés en grade sur le fondement des anciens critères encore en vigueur à la date de leur nomination mais abolis depuis cette même date, du fait de l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions statutaires.

80. Il s’ensuit que les requérants ne peuvent être regardés comme relevant de la même catégorie de personnes que les lauréats des concours en cause recrutés antérieurement au 1 er mai 2004.

81. Les requérants ne sauraient donc valablement soutenir que leur inscription sur une liste d’aptitude antérieurement au 1 er  mai 2004 leur conférait un droit à être nommés, en cas de recrutement, au grade mentionné dans l’avis de vacance ou dans l’avis de concours, ou au grade correspondant selon l’article 2, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut, et conformément à l’article 31 de l’ancien statut.

82. Tant que leur nomination demeurait hypothétique, ils n’avaient en effet aucune qualité pour se réclamer de critères de classement statutaires applicables lors du recrutement de lauréats de concours généraux.

83. D’ailleurs, en spécifiant que les dispositions transitoires du statut ne préjudicient pas aux droits acquis du personnel dans le cadre du régime communautaire avant l’entrée en vigueur du nouveau régime de la fonction publique communautaire, le 37 e  considérant du règlement n° 723/2004 confirme la distinction qu’il y a lieu d’opérer entre les lauréats des concours litigieux nommés fonctionnaires avant et à partir du 1 er  mai 2004.

84. L’idée selon laquelle tous les fonctionnaires recrutés par une institution à partir d’un même concours se trouveraient dans des situations comparables n’a été avancée au point 55 de l’arrêt Monaco/Parlement, précité, qu’aux fins de constater l’illégalité de l’application à un lauréat de concours général de directives internes de classement en grade plus sévères adoptées par l’institution employeur elle-même, postérieurement à l’inscription de l’intéressé sur la liste d’aptitude, en vue de l’application de critères de classement statutaires demeurés inchangés.

85. En l’occurrence, et en tout état de cause, c’est au contraire le législateur communautaire qui, dans l’exercice d’un droit dont les requérants affirment eux‑mêmes ne pas contester l’existence, a choisi de modifier les critères statutaires de classement en grade des nouveaux fonctionnaires lors de leur recrutement.

86. En effet, selon une jurisprudence bien établie, le législateur peut à tout moment apporter, pour l’avenir, aux dispositions statutaires les modifications qu’il estime conformes à l’intérêt du service, même si celles-ci sont, comme en l’espèce, moins favorables (arrêt du Tribunal du 30 septembre 1998, Ryan/Cour des Comptes, T‑121/97, Rec. p. II‑3885, point 98).

87. Dès lors que l’emploi auquel un fonctionnaire est affecté est lui aussi déterminé par la décision de nomination (arrêt Ventura/Parlement, précité, point 41) et que celle-ci ne peut être fondée que sur les dispositions applicables à la date de son adoption, on ne saurait davantage regarder comme discriminatoire l’attribution à certains requérants, dans le cadre des nouvelles règles statutaires, d’un classement en grade inférieur, alors même qu’ils seraient désormais affectés au même poste que celui qu’ils avaient occupé avant le 1 er mai 2004 en qualité d’agent non titulaire et qu’ils exerceraient des fonctions identiques, voire plus importantes que par le passé.

88. Doit être enfin rejeté l’argument tiré de la prétendue dépréciation du classement en grade des requérants dont procéderaient leur affectation à des postes « senior » classés en grades « junior » et l’absence de perspectives de carrière, qui seraient au contraire ouvertes à d’autres fonctionnaires moins âgés et bénéficiant du même classement.

89. Outre le fait qu’elle ne saurait être qualifiée, contrairement à ce que soutiennent les requérants, de discrimination en raison de l’âge au sens de l’article 1 er  quinquies du statut, dès lors que les nouveaux critères de classement en grade sont manifestement étrangers à toute prise en considération de l’âge des intéressés, une telle circonstance ne peut être regardée comme une violation du principe d’égalité de traitement et de non-discrimination pour les motifs exposés ci-dessus.

90. Il en résulte que l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut n’est pas contraire au principe d’égalité de traitement et de non-discrimination.

91. Dans ces conditions, le grief ne saurait prospérer.

Sur la violation du principe de protection de la confiance légitime

– Arguments des parties

92. Les requérants soutiennent que l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut viole le principe de protection de la confiance légitime, dans la mesure où ils étaient fondés à espérer bénéficier, après leur réussite aux concours en cause, d’un traitement conforme aux conditions fixées dans les avis de concours.

93. Une réglementation nouvelle ne pourrait s’appliquer aux effets futurs d’une situation née sous l’empire de dispositions antérieures, qu’à condition de ne pas modifier substantiellement des situations acquises sous l’ancien statut, d’être prévisible et justifiée par un intérêt public péremptoire.

94. La Commission répond en substance que les requérants n’étaient pas fondés à placer une confiance légitime en un classement au grade indiqué dans les avis de concours.

– Appréciation du Tribunal

95. Il suffit de rappeler qu’un fonctionnaire ne saurait se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime pour s’opposer à la légalité d’une disposition réglementaire nouvelle, surtout dans un domaine dans lequel le législateur dispose, comme en l’espèce, d’un large pouvoir d’appréciation, dont les requérants n’ont nullement contesté le principe, quant à la nécessité de réformes statutaires (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 11 février 2003, Leonhardt/Parlement, T‑30/02, RecFP p. I‑A-41 et II‑265, point 55).

96. Au demeurant, le droit de réclamer la protection de la confiance légitime s’étend à tout particulier qui se trouve dans une situation de laquelle il ressort que l’administration communautaire a fait naître chez lui des espérances fondées, en lui fournissant des assurances précises sous la forme de renseignements précis, inconditionnels et concordants, émanant de sources autorisées et fiables.

97. En revanche, nul ne peut invoquer une violation de ce principe en l’absence d’assurances précises que lui aurait fournies l’administration (arrêt du Tribunal du 19 mars 2003, Innova Privat-Akademie/Commission, T‑273/01, Rec. p. II‑1093, point 26).

98. Or, force est de constater que le dossier ne contient aucun élément permettant aux requérants de conclure que les institutions communautaires leur auraient fourni de quelconques assurances susceptibles de faire naître des espérances légitimes dans le maintien des anciens critères statutaires de classement en grade des fonctionnaires lors de leur recrutement. Des avis de concours et des courriers de la Commission ont même relevé que les lauréats des concours pourraient se voir proposer un recrutement sur la base de nouvelles dispositions statutaires.

99. Enfin, les requérants ne sauraient arguer utilement d’une modification substantielle d’une situation acquise sous l’ancien statut, dès lors que, ainsi qu’il a été constaté ci-dessus, l’inscription des requérants sur une liste d’aptitude n’a pas pu avoir pour effet de les admettre au bénéfice d’une telle situation.

100. Dans ces conditions, il ne peut être fait droit au grief.

Sur la contrariété de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut à l’article 31, paragraphe 1, du statut

– Arguments des parties

101. Les requérants font valoir que l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut est contraire à l’article 31, paragraphe 1, du statut, selon lequel un fonctionnaire est recruté au grade indiqué dans l’avis du concours auquel il a été reçu. Bien qu’elle vise la notion nouvelle de « groupe de fonctions », cette dernière disposition s’appliquerait à tous les concours, dont ceux organisés avant le 1 er mai 2004 et dont les lauréats ont été inscrits sur une liste d’aptitude avant cette date.

102. L’administration ne pourrait déroger unilatéralement à l’avis de concours dont elle est l’auteur et qui la lie en tous ses éléments, dès lors que son objet essentiel est d’informer aussi exactement que possible les intéressés du niveau des postes à pourvoir et des conditions requises pour y être nommé.

103. Alors que les avis de concours en cause ne contenaient aucune référence à la date du 1 er mai 2004 et ne prévoyaient aucune modification future du classement en grade des lauréats lors de leur recrutement, tous les requérants auraient été classés, en application de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, à un grade inférieur à celui mentionné dans les avis de concours et sans que la traduction de ces anciens grades soit correctement effectuée par rapport aux nouveaux grades intermédiaires définis par l’article 2, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut.

104. La Commission fait observer que les requérants critiquent en réalité le fait de ne pas avoir été nommés au grade indiqué dans les avis de concours, en application de l’article 31 du statut.

105. Selon la Commission, en tant que règle de droit transitoire, l'article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut ne saurait enfreindre l'article 31 du statut, au regard duquel il constitue une lex specialis, sans qu'il soit nécessaire de préciser expressément qu'il déroge à ce dernier.

106. En raison de l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions stat utaires, les anciens grades auraient été remplacés par de nouveaux grades : l’article 8, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut se référerait aux « grades introduits en vertu de l’article 2, paragraphe 1 » et les tableaux figurant à l’article 2, paragraphes 2 et 3, de cette annexe utiliseraient l’expression « nouveaux grades intermédiaires ».

107. Il s’ensuivrait que les avis de concours publiés avant le 1 er mai 2004 sont devenus sans objet, en ce qu’ils visaient au recrutement à un grade déterminé, d’autant plus que les concours litigieux portaient sur une carrière déterminée (deux grades), en application de l’article 5 de l’ancien statut. En effet, à partir de cette date, il n’y aurait plus lieu de se référer aux « carrières », toute mention de cette notion ayant disparu de l’article 5 du statut. Le législateur aurait donc dû combler ce vide en adoptant des « règles de transition de grade », c’est-à-dire en fixant lui-même le (nouveau) grade de classement d’un fonctionnaire recruté à la suite d’un concours dont l’avis avait été publié avant le 1 er mai 2004. Or, l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut constituerait précisément une telle « règle de transition de grade ».

– Appréciation du Tribunal

108. L’article 31, paragraphe 1, du statut dispose que les lauréats d’un concours sont nommés au grade du groupe de fonctions indiqué dans l’avis du concours auquel ils ont été reçus.

109. S’il se déduit nécessairement de cette nouvelle disposition que des lauréats de concours généraux doivent être nommés fonctionnaires stagiaires au grade indiqué dans l’avis du concours à l’issue duquel ils ont été recrutés, il résulte toutefois de la réponse apportée au grief tiré de la violation du principe d’égalité de traitement et de non-discrimination que la détermination du niveau des postes à pourvoir et des conditions de nomination des lauréats à ces postes, à laquelle la Commission avait procédé dans le cadre des dispositions de l’ancien statut en rédigeant les avis de concours litigieux, n’a pu prolonger ses effets au-delà de la date du 1 er mai 2004 retenue par le législateur communautaire pour l’entrée en vigueur de la nouvelle structure des carrières des fonctionnaires des Communautés européennes.

110. La suppression, à compter du 1 er mai 2004, des grades de classement dans les carrières indiquées dans les avis des concours, qui procède de l’introduction du nouveau système de carrières, a amené le législateur à adopter les dispositions transitoires de l’annexe XIII du statut et, singulièrement, son article 12, paragraphe 3, aux fins de déterminer le classement en grade de lauréats de concours inscrits sur des listes d’aptitude avant le 1 er  mai 2004 mais nommés fonctionnaires stagiaires à partir de cette date.

111. À cet effet, le législateur a substitué les grades intermédiaires B*3, A*5 et A*6 prévus par l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut aux grades des carrières B5/B4, A8 et A7/A6 correspondant, respectivement, aux anciennes carrières d’assistants adjoints, d’administrateurs adjoints et d’administrateurs figurant dans les avis de concours en cause mais abolies à compter du 1 er mai 2004.

112. Il est vrai que le tableau de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, qui transpose les grades indiqués dans les avis de concours en grades intermédiaires de recrutement s’écarte du tableau de l’article 2, paragraphe 1, de cette annexe, dans lequel les anciens grades des fonctionnaires en poste antérieurement au 1 er  mai 2004 sont convertis en nouveaux grades intermédiaires.

113. Ainsi qu’il a été rappelé ci-dessus, il est cependant loisible au législateur d’adopter pour l’avenir, dans l’intérêt du service, des modifications aux dispositions du statut, même si les dispositions modifiées sont moins favorables que les anciennes (arrêt Ryan/Cour des comptes, précité, point 98).

114. Il est inhérent à une disposition transitoire telle que celle ici en cause d’emporter exception à certaines règles statutaires dont l’application est nécessairement affectée par le changement de régime. En l’espèce, l’exception ne va pas au-delà de ce qui découle de la nomination comme fonctionnaires, dans le cadre des nouvelles règles statutaires, de personnes sélectionnées par des procédures de concours ouvertes et clôturées sous l’empire des anciennes dispositions.

115. Dans ces conditions, les requérants ne sauraient utilement prétendre, pour démontrer la contrariété de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut à l’article 31, paragraphe 1, du statut, qu’ils auraient été classés à un grade inférieur à celui mentionné dans les avis de concours ou en fonction d’un tableau d’équivalence de grades qui s’écarterait de la relation établie entre l’ancien et le nouveau classement en grade des fonctionnaires.

116. Il s’ensuit que le grief ne saurait être accueilli.

Sur la violation des articles 5 et 7 du statut

– Arguments des parties

117. Les requérants dénoncent une violation de l’article 5, paragraphe 5, du statut qui soumet à des conditions identiques de recrutement et de déroulement de carrière les fonctionnaires appartenant au même groupe de fonctions. Alors que les lauréats des concours litigieux nommés fonctionnaires avant le 1 er mai 2004 auraient bénéficié du classement et de la rémunération correspondant au grade mentionné dans les avis de concours, le classement des requérants aurait été effectué sur le fondement de l’article 12 de l’annexe XIII du statut.

118. L’article 5, paragraphes 1 et 4, du statut aurait été également méconnu, car, en raison de l’application « automatique » de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, leurs emplois n’auraient pas fait l’objet d’un « reclassement » en fonction de la nature et du niveau des fonctions auxquelles ils correspondent dans chaque emploi type.

119. L’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut méconnaîtrait encore l’article 5, paragraphe 3, du statut, tel que mis en œuvre par l’annexe I.A de ce dernier, relative à la correspondance entre les emplois types et les carrières, en ce qu’il a eu pour effet de reclasser les emplois des requérants à un niveau inférieur aux fonctions afférentes à ces emplois.

120. Enfin, le principe de l’équivalence de l’emploi et du grade, garantie de l’égalité de traitement des fonctionnaires, consacré par l’article 7, paragraphe 1, du statut, aurait également été méconnu.

121. La Commission objecte qu’il n’appartient pas au législateur communautaire mais aux seules institutions chargées d’appliquer le statut, d’arrêter, conformément à l’article 5, paragraphe 4, de ce texte, la description des fonctions associées à chaque emploi type et de respecter l’équivalence des emplois lorsqu’elles décident de l’affectation de leurs agents.

122. La référence opérée par les requérants au tableau de l’annexe I.A du statut ne serait pas admissible dans la mesure où, en vertu de l’article 4, sous n), de l’annexe XIII du statut, l’annexe XIII.1, relative aux emplois types pendant la période transitoire, remplace l’annexe I.A du 1 er  mai 2004 au 30 avril 2006.

123. Enfin, l’article 5, paragraphe 1, serait purement déclaratoire et ne consacrerait aucune obligation autonome des institutions.

– Appréciation du Tribunal

124. Ainsi qu’il se déduit de la réponse apportée ci-dessus au grief tiré de la violation du principe d’égalité de traitement et de non-discrimination, il ne saurait être valablement soutenu que l’article 5, paragraphe 5, du statut aurait été violé en raison du classement des lauréats des concours en cause recrutés avant le 1 er mai 2004 au grade mentionné dans les avis de concours, alors que les requérants ont été classés en application des critères définis par l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut.

125. Le Tribunal rappelle à cet égard qu’étaient applicables lors de la nomination des lauréats des concours en cause avant le 1 er mai 2004 les dispositions de l’ancien statut et les grades de classement indiqués dans les avis de concours, alors que le classement en grade des requérants a relevé des nouvelles dispositions en vigueur depuis cette date, y compris des dispositions transitoires de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut.

126. C’est également à tort que les requérants soutiennent que l’article 12 de l’annexe XIII du statut est contraire à l’article 5 du statut. En adoptant cette première disposition, le législateur a défini les grades de classement des fonctionnaires recrutés au cours de la période transitoire dans le cadre de l’exercice de son pouvoir de modification des dispositions statutaires.

127. L’article 12 de l’annexe XIII du statut précise, en son paragraphe 2, que les dispositions de l’article 5, paragraphe 3, du statut, qui définissent le niveau des qualifications exigées pour les nominations aux postes relevant de la nouvelle structure des carrières, ne s’appliquent pas aux fonctionnaires recrutés, comme les requérants, sur des listes d’aptitude établies à la suite de concours publiés avant le 1 er mai 2004.

128. À cet égard, l’article 4, sous n), de l’annexe XIII du statut spécifie que l’annexe I.A, intitulée « Emplois types dans chaque groupe de fonctions, visés à l’article 5, paragraphe 3 » et comprenant le tableau descriptif des nouveaux emplois types auquel renvoie l’article 5, paragraphe 4, du statut, est remplacée par l’annexe XIII.1 du statut, définissant les emplois types pendant la période transitoire.

129. L’article 12, paragraphe 3, et l’article 4, sous n), de l’annexe XIII du statut priment ainsi les dispositions générales de l’article 5 du statut, en y dérogeant en tant que loi spéciale (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 19 juin 2003, Mayer Parry Recycling, C‑444/00, Rec. p. I‑6163, point 57, et arrêt du Tribunal du 14 juillet 2005, Le Voci/Conseil, T‑371/03, RecFP p. I‑A‑209 et II‑957, point 122).

130. Les requérants ne sauraient davantage invoquer la violation de l’article 7, paragraphe 1, du statut selon lequel chaque fonctionnaire doit être nommé à un emploi de son groupe de fonctions correspondant à son grade.

131. En effet, cette disposition doit naturellement s’entendre, elle aussi, en ce sens qu’elle réserve l’application à titre transitoire, du 1 er mai 2004 au 30 avril 2006, de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut et de ses dispositions d’accompagnement.

132. Dans ces conditions, le grief ne saurait prospérer.

133. Il résulte des développements qui précèdent que l’exception d’illégalité de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut doit être rejetée dans son intégralité.

Sur la contrariété des décisions attaquées aux principes généraux de bonne administration, de transparence, de protection de la confiance légitime, d’égalité de traitement et de non-discrimination, de l’équivalence de l’emploi et du grade, de bonne foi et de sollicitude.

Arguments des parties

134. Les requérants considèrent tout d’abord que les décisions attaquées sont contraires au principe de bonne administration et à la règle de transparence, dans la mesure où ils n’ont pas été informés de façon précise et claire de la modification essentielle qui devait être apportée à leur classement en grade dans l’hypothèse de leur nomination après le 1 er mai 2004.

135. Tous les requérants n’auraient pris officiellement connaissance de leur classement en grade selon les dispositions du statut que postérieurement à cette date. En outre, les décisions attaquées ne se référeraient explicitement qu’à l’article 31 du statut, à l’avis de vacance et à l’avis de concours et ne viseraient pas l’article 12 de l’annexe XIII du statut.

136. La publication du règlement n° 723/2004 trois jours avant son entrée en vigueur et, dans la plupart des cas, postérieurement aux offres d’emploi adressées aux requérants, ne pourrait être considérée comme suffisante, eu égard à la complexité et au caractère hermétique du texte en cause, reconnue par la Commission elle‑même.

137. Si les requérants avaient été clairement informés, en temps utile, de l’incidence que la nouvelle règlementation aurait sur leur classement en cas de recrutement après le 1 er mai 2004, ils auraient pu, du moins dans certains cas, essayer d’être recrutés avant cette date, voire refuser d’être nommés dans ces nouvelles conditions préjudiciables.

138. Les requérants soutiennent également que les décisions attaquées ont été prises en violation du principe de protection de la confiance légitime. Certains requérants auraient eu, au cours d’entretiens d’embauche antérieurs au 1 er mai 2004, des contacts avec des responsables de l’administration qui leur auraient confirmé, parfois à plusieurs reprises, un classement au grade correspondant à celui mentionné dans l’avis de concours. Seraient également visés des textes et des documents publiés au Journal officiel de l’Union européenne et sur le site Internet de la Commission, ainsi que des lettres de convocation officielles à la visite médicale et à un entretien administratif.

139. Les requérants reprochent encore à l’AIPN de ne pas avoir adopté le même comportement à l’égard de tous les lauréats du concours, en violation du principe de non-discrimination. En effet, pour certaines raisons, des lauréats des concours en cause auraient pu être recrutés avant le 1 er mai 2004 et d’autres pas.

140. Par ailleurs, la Commission aurait enfreint le principe de l’équivalence de l’emploi et du grade en ne procédant pas à une évaluation des tâches et responsabilités des requérants par rapport au grade qu’ils auraient dû se voir attribuer.

141. Il serait dès lors légitime de se demander si l’AIPN a véritablement agi de bonne foi et conformément au principe de sollicitude, alors qu’elle pouvait elle-même mesurer les conséquences – inacceptables – de la nomination à des grades différents des lauréats d’un même concours, qui pouvaient se fier au classement en grade figurant dans l’avis de concours et qui n’ont pas été informés des incidences préjudiciables du statut sur leur classement futur dans l’hypothèse où leur recrutement interviendrait après le 1 er  mai 2004.

142. La Commission réplique que les requérants ont été suffisamment informés. Le règlement n° 723/2004 aurait été publié antérieurement à l’adoption des décisions attaquées, voire, dans certains cas, avant même que les requérants n’aient accepté l’offre d’emploi qui leur a été faite. En outre, la réforme du système des carrières avait été annoncée dans les avis de concours ou dans les lettres informant les requérants de la prorogation des listes d’aptitude.

143. Contrairement à ce que semblent considérer les requérants, les institutions ne seraient pas tenues, au titre d’une obligation générale, d’attirer l’attention de leurs futurs fonctionnaires, préalablement à leur nomination, sur tous les aspects de leur situation juridique.

144. Les offres d’emploi adressées aux requérants leur auraient clairement indiqué que leur classement en grade allait être effectué en application de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut. Ces lettres auraient également renvoyé à un site Internet sur lequel de plus amples informations pouvaient être trouvées.

145. Il ne serait nullement démontré que l’administration aurait fourni aux requérants des assurances précises, inconditionnelles et concordantes dans le sens que leur classement en grade serait effectué en application des dispositions de l’ancien statut. Par ailleurs, la confiance légitime ne pourrait naître que d’assurances qui sont conformes aux normes applicables. Or, l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut étant contraignant et ne conférant aucune marge d’appréciation à l’administration, d’éventuelles promesses de celle-ci ne seraient pas de nature à pouvoir faire naître au profit des requérants une confiance légitime en un classement en grade en vertu de l’ancien statut.

146. Enfin, le devoir de sollicitude ne saurait créer à la charge d'une institution des obligations envers une personne qu'à compter de sa nomination en tant que fonctionnaire.

Appréciation du Tribunal

147. Il ressort du dossier que ni les avis de concours ni les lettres de prorogation de la validité des listes d’aptitude adressées aux requérants n’indiquaient que les nouveaux critères de classement en grade lors du recrutement étaient susceptibles de comporter une modification à la baisse des grades de recrutement figurant dans les avis des concours.

148. Ce n’est que postérieurement à leur prise de fonctions en qualité de fonctionnaire stagiaire que les requérants ont été directement informés du nouveau système de classement en grade introduit par les nouvelles dispositions statutaires et de l’abaissement corrélatif de leur grade de recrutement par rapport à celui indiqué dans les avis de concours.

149. On relèvera d’ailleurs, à cet égard, que la plupart des décisions attaquées ne comportent dans leurs visas aucune référence à l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, alors même que le grade de recrutement des requérants a été arrêté sur le fondement de cette disposition transitoire, dont le caractère de loi spéciale au regard de l’article 31 du statut a été relevé par la Commission elle‑même.

150. Toutefois, si une insuffisance d’information préalable est de nature à constituer une argumentation opérante aux fins de l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté vis-à-vis des intéressés, elle n’est pas de nature à entraîner par elle-même l’illégalité des décisions attaquées.

151. En effet, il est de jurisprudence constante que la légalité d’un acte individuel attaqué devant le juge communautaire doit être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date à laquelle l’acte a été adopté (arrêt de la Cour du 17 mai 2001, IECC/Commission, C‑449/98 P, Rec. p. I‑3875, point 87, et arrêt du Tribunal du 25 mai 2004, W/Parlement, T‑69/03, RecFP p. I‑A 153 et II‑687, point 28).

152. Or, comme les décisions attaquées ont toutes été adoptées avec effet, au plus tôt, au 1 er mai 2004, la Commission ne pouvait classer en grade les requérants dans les décisions attaquées que conformément aux nouvelles dispositions impératives de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, dont l’illégalité n’a pas été démontrée.

153. Dans ces conditions, les irrégularités que les requérants reprochent à la Commission d’avoir commises dans la gestion de leur recrutement, à les supposer contraires aux principes invoqués par les intéressés, ne sont pas, en toute hypothèse, de nature à avoir pu exercer la moindre incidence sur la légalité même du classement en grade contesté par les requérants.

154. En particulier, la circonstance que la Commission aurait pu, en violation du principe de non-discrimination, recruter par priorité certains lauréats à une date antérieure au 1 er mai 2004, ne saurait affecter la légalité des décisions attaquées.

155. En effet, à supposer même que des recrutements aient pu être ainsi traités par priorité, le respect du principe d’égalité de traitement des fonctionnaires doit trouver à se concilier avec le respect du principe de légalité selon lequel nul ne peut invoquer, à son profit, une illégalité qui aurait été commise en faveur d’autrui (arrêt de la Cour du 4 juillet 1985, Williams/Cour des comptes, 134/84, Rec. p. 2225, point 14).

156. Il s’ensuit que le moyen doit être rejeté.

157. Il résulte de l’ensemble des développements qui précèdent que le recours doit être rejeté dans son intégralité, sans qu’il soit besoin, par conséquent, de statuer sur les chefs de conclusions des requérants tendant à obtenir du Tribunal, d’une part, une reconstitution de leur carrière et, d’autre part, le bénéfice d’intérêts de retard sur les arriérés de rémunération qui auraient pu découler d’un arrêt d’annulation des décisions attaquées.

Sur les dépens

158. Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il a été conclu en ce sens.

159. En vertu de l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés européennes et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci.

160. Toutefois, en vertu de l’article 87, paragraphe 3, premier alinéa, du même règlement, le Tribunal peut répartir les dépens pour des motifs exceptionnels.

161. Dans les circonstances de l’espèce, le Tribunal estime que, ainsi qu’il résulte des développements ci-dessus, la Commission n’a pas averti les requérants avec clarté et précision de l’incidence concrète prévisible sur leur situation individuelle d’un projet de modification statutaire dont elle était elle-même l’auteur.

162. En raison de l’incertitude qui a ainsi pu subsister dans l’esprit des requérants sur le classement en grade dont ils bénéficieraient jusqu’à la notification des décisions attaquées, les intéressés ont pu se croire fondés à contester leur classement en grade devant le juge communautaire.

163. Dans ces conditions, la présente procédure peut être considérée comme ayant été en partie occasionnée par le comportement de la Commission en ce que celle-ci a pu, par défaut d’information, susciter chez les intéressés des interrogations compréhensibles sur la légalité de leur grade initial de classement en raison d’une procédure de recrutement non exempte d’ambiguïté sur une condition d’engagement essentielle.

164. De telles circonstances constituent un motif exceptionnel justifiant un partage entre l’institution défenderesse et les requérants des frais exposés par ces derniers aux fins de l’instance (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 14 juin 1967, Hoogovens en Staalfabrieken/Haute Autorité, 26/66, Rec. p. 149, 166, et du 11 juillet 1968, Danvin/Commission, 26/67, Rec. p. 463, 474).

165. Le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation des circonstances de la cause en mettant à la charge de la Commission la moitié des dépens exposés par les requérants.

166. Par ailleurs, l’article 87, paragraphe 4, du règlement de procédure précise que les institutions qui sont intervenues au litige supportent leurs dépens.

167. Il s’ensuit que le Conseil supportera ses propres dépens.

Dispositif

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre élargie)

déclare et arrête :

1) Le recours est rejeté.

2) La Commission supportera ses propres dépens et la moitié des dépens exposés par les requérants.

3) Les requérants supporteront la moitié des dépens qu’ils ont exposés.

4) Le Conseil supportera ses propres dépens.

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