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Document 62005CJ0359

Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 18 janvier 2007.
Estager SA contre Receveur principal de la recette des douanes de Brive.
Demande de décision préjudicielle: Tribunal de grande instance de Brive-la-Gaillarde - France.
Politique économique et monétaire - Règlements (CE) nos 1103/97 et 974/98 - Introduction de l'euro - Conversion entre les unités monétaires nationales et l'unité euro - Réglementation d'un État membre portant adaptation de la valeur en euros de certains montants exprimés en monnaie nationale dans les textes législatifs de cet État.
Affaire C-359/05.

Recueil de jurisprudence 2007 I-00581

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2007:36

Affaire C-359/05

Estager SA

contre

Receveur principal de la recette des douanes de Brive

(demande de décision préjudicielle, introduite par

le tribunal de grande instance de Brive-la-Gaillarde)

«Politique économique et monétaire — Règlements (CE) nos 1103/97 et 974/98 — Introduction de l'euro — Conversion entre les unités monétaires nationales et l'unité euro — Réglementation d'un État membre portant adaptation de la valeur en euros de certains montants exprimés en monnaie nationale dans les textes législatifs de cet État»

Conclusions de l'avocat général M. M. Poiares Maduro, présentées le 26 octobre 2006 

Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 18 janvier 2007 

Sommaire de l'arrêt

Politique économique et monétaire — Introduction de l'euro — Conversion entre les unités monétaires nationales et l'unité euro

(Règlements du Conseil nº 1103/97 et nº 974/98)

S'il est vrai que les règlements nº 1103/97, fixant certaines dispositions relatives à l'introduction de l'euro, et nº 2866/98, concernant les taux de conversion entre l'euro et les monnaies des États membres adoptant l'euro, n'ont nullement porté atteinte à la compétence fiscale des États membres et à la faculté pour ces derniers d'augmenter le montant de leurs taxes, il n'en demeure pas moins que la conversion en euros du montant d'une taxe doit être effectuée dans le respect des dispositions prévues par le règlement nº 1103/97 ainsi que du principe de continuité des instruments juridiques et de l'objectif de neutralité du passage à l'euro. Cela implique, notamment, des exigences de sécurité juridique et de transparence qui permettent de protéger la confiance des agents économiques dans l'introduction de l'euro.

Dès lors, les règlements nº 1103/97 et nº 974/98, concernant l'introduction de l'euro, doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale qui, lors de l'opération de conversion en euros du montant d'une taxe portant sur les quantités de farines, de semoules et de gruaux de blé tendre livrées ou mises en oeuvre en vue de la consommation humaine, a porté celui-ci à un montant supérieur à celui qui aurait résulté de l'application des règles de conversion prévues par ces règlements, à moins qu'une telle augmentation respecte les exigences de sécurité juridique et de transparence garanties par lesdits règlements, ce qui implique que les textes réglementaires en cause permettent de distinguer clairement la décision des autorités d'un État membre d'augmenter ce montant de l'opération de conversion en euros dudit montant. Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si tel est le cas dans le litige dont elle est saisie.

(cf. points 32-33, 37 et disp.)






ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

18 janvier 2007 (*)

«Politique économique et monétaire – Règlements (CE) nos 1103/97 et 974/98 – Introduction de l’euro – Conversion entre les unités monétaires nationales et l’unité euro – Réglementation d’un État membre portant adaptation de la valeur en euros de certains montants exprimés en monnaie nationale dans les textes législatifs de cet État»

Dans l’affaire C-359/05,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le tribunal de grande instance de Brive-la-Gaillarde (France), par décision du 9 septembre 2005, parvenue à la Cour le 26 septembre 2005, dans la procédure

Estager SA

contre

Receveur principal de la recette des douanes de Brive,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. C. W. A. Timmermans, président de chambre, M. J. Klučka, Mme R. Silva de Lapuerta (rapporteur), MM. J. Makarczyk et G. Arestis, juges,

avocat général: M. M. Poiares Maduro,

greffier: M. B. Fülöp, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 7 septembre 2006,

considérant les observations présentées:

–       pour Estager SA, par Mes F. Genot-Delbecque et N. Petrignet, avocates,

–       pour le gouvernement français, par MM. G. de Bergues et J.‑C. Gracia, en qualité d’agents,

–       pour la Commission des Communautés européennes, par MM. J.‑F. Pasquier et P. Aalto, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 26 octobre 2006,

rend le présent

Arrêt

1       La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des règlements (CE) nos  1103/97 du Conseil, du 17 juin 1997, fixant certaines dispositions relatives à l’introduction de l’euro (JO L 162, p. 1), et 974/98 du Conseil, du 3 mai 1998, concernant l’introduction de l’euro (JO L 139, p. 1).

2       Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Estager SA (ci-après «Estager») au receveur principal de la recette des douanes de Brive (ci-après le «receveur principal») au sujet de l’augmentation, lors du passage à l’euro, d’une taxe portant sur les quantités de farines, de semoules et de gruaux de blé tendre livrées ou mises en œuvre en vue de la consommation humaine (ci-après la «taxe»).

 Le cadre juridique

 La réglementation communautaire

3       Aux termes de l’article 1er du règlement nº 1103/97:

«Aux fins du présent règlement, on entend par:

–       ‘instruments juridiques’: les dispositions législatives et réglementaires, actes administratifs, décisions de justice, contrats, actes juridiques unilatéraux, instruments de paiement autres que les billets et les pièces, et autres instruments ayant des effets juridiques,

[…]»

4       L’article 3 dudit règlement dispose:

«L’introduction de l’euro n’a pas pour effet de modifier les termes d’un instrument juridique ou de libérer ou de dispenser de son exécution, et elle ne donne pas à une partie le droit de modifier un tel instrument ou d’y mettre fin unilatéralement. La présente disposition s’applique sans préjudice de ce dont les parties sont convenues.»

5       L’article 4 du même règlement prévoit:

«1.      Les taux de conversion qui sont arrêtés sont exprimés pour la contre-valeur d’un euro dans chacune des monnaies nationales des États membres participants. Ils comportent six chiffres significatifs.

2.      Les taux de conversion ne peuvent pas être en arrondis ou tronqués lors des conversions.

3.      Les taux de conversion sont utilisés pour les conversions entre l’unité euro et les unités monétaires nationales et vice-versa. Il est interdit d’utiliser des taux inverses calculés à partir des taux de conversion.

4.      Toute somme d’argent à convertir d’une unité monétaire nationale dans une autre doit d’abord être convertie dans un montant exprimé dans l’unité euro; ce montant ne pouvant être arrondi à moins de trois décimales est ensuite converti dans l’autre unité monétaire nationale. Aucune autre méthode de calcul ne peut être utilisée, sauf si elle produit les mêmes résultats.»

6       L’article 5 du règlement nº 1103/97 est libellé comme suit:

«Les sommes d’argent à payer ou à comptabiliser, lorsqu’il y a lieu de les arrondir après conversion dans l’unité euro conformément à l’article 4, sont arrondies au cent supérieur ou inférieur le plus proche. Les sommes d’argent à payer ou à comptabiliser qui sont converties dans une unité monétaire nationale sont arrondies à la subdivision supérieure ou inférieure la plus proche ou, à défaut de subdivision, à l’unité la plus proche ou, selon les lois ou pratiques nationales, à un multiple ou à une fraction de la subdivision ou de l’unité monétaire nationale. Si l’application du taux de conversion donne un résultat qui se situe exactement au milieu, la somme est arrondie au chiffre supérieur.»

7       L’article 7 du règlement nº 974/98 prévoit que le remplacement de la monnaie de chaque État membre participant par l’euro n’a pas en soi pour effet de modifier le libellé des instruments juridiques existant à la date du remplacement.

8       L’article 14 du même règlement énonce:

«Les références aux unités monétaires nationales qui figurent dans des instruments juridiques existant à la fin de la période transitoire doivent être lues comme des références à l’unité euro en appliquant les taux de conversion respectifs. Les règles relatives à l’arrondissage des sommes d’argent arrêtées par le règlement […] nº 1103/97 s’appliquent.»

9       En vertu de l’article 1er du règlement (CE) nº 2866/98 du Conseil, du 31 décembre 1998, concernant les taux de conversion entre l’euro et les monnaies des États membres adoptant l’euro (JO L 359, p. 1), le taux de conversion irrévocablement fixé entre l’euro et le franc français est de 1 euro pour 6,55957 FRF.

 La réglementation nationale

10     La taxe a été instituée par l’article 1618 septies du code général des impôts français. Avant l’introduction de l’euro, son montant était fixé à 100 FRF par tonne de farines, de semoules ou de gruaux de blé tendre.

11     L’article 1er, paragraphe 1, de la loi nº 2000‑517, du 15 juin 2000, portant habilitation du gouvernement à adapter par ordonnance la valeur en euros de certains montants exprimés en francs dans les textes législatifs (JORF du 16 juin 2000, p. 9063), prévoit que le gouvernement est autorisé à prendre, par ordonnance, les mesures nécessaires à l’adaptation au passage à l’euro de certains montants exprimés en francs français dans les textes législatifs.

12     Prise en application de ladite loi, l’ordonnance nº 2000‑916, du 19 septembre 2000, portant adaptation de la valeur en euros de certains montants exprimés en francs dans les textes législatifs (JORF du 22 septembre 2000, p. 14877), a fixé le montant de la taxe à 16 euros à compter du 1er  janvier 2002.

13     L’article 1er de ladite ordonnance dispose:

«Conformément à l’article 14 du règlement [nº 974/98], les montants exprimés en francs figurant dans les textes législatifs […] sont remplacés, le 1er janvier 2002, par des montants en euros, par application du taux officiel et des règles d’arrondissement communautaires.

[…]»

14     Aux termes du rapport au président de la République relatif à l’ordonnance nº 2000‑916 (JORF du 22 septembre 2000, p. 14876):

«En application des règlements communautaires nº 1103/97 […] et nº 974/98 […], les références aux unités monétaires nationales qui figurent dans les textes législatifs devront être lues à compter du 1er janvier 2002 comme des références à l’euro, en appliquant le taux de conversion officiel de 6,55957 [FRF] pour 1 euro, avec arrondissement à la deuxième décimale.

Le résultat obtenu par application de ces règles sera, dans certains cas, peu lisible et mémorisable, ce qui risque, par voie de conséquence, de rendre les textes dans lesquels figurent les références monétaires en cause plus difficilement applicables.

Afin de préserver la clarté de la législation et de faciliter ainsi sa bonne application, il apparaît donc nécessaire de fixer les montants monétaires prévus par certains textes à des valeurs exprimées en euros sans décimales ou à des valeurs plus significatives.

[…]

La présente ordonnance, prise en application de [l’]habilitation [conférée par la loi nº 2000‑517], procède selon les principes suivants.

En premier lieu, l’adaptation des textes devant être justifiée par le souci de maintenir leur lisibilité, seuls les montants monétaires qui, à cet égard, ne peuvent que difficilement s’accommoder de valeurs comportant deux chiffres après la virgule sont modifiés.

L’application pure et simple des règles communautaires de conversion et d’arrondissement doit rester le principe et les adaptations l’exception. Il en résulte que les montants déjà exprimés en centimes ne sont généralement pas modifiés.

[…]

L’ensemble de ces adaptations entreront en vigueur au 1er janvier 2002, date de remplacement définitif et complet du franc par l’euro.

[…]»

 Le litige au principal et la question préjudicielle

15     Considérant que l’application des règlements nos  1103/97, 974/98 et 2866/98 aurait dû conduire à fixer le montant de la taxe à 15,24 euros et non à 16 euros, Estager a, par courrier du 12 mars 2002, demandé au receveur principal de lui rembourser une fraction de la taxe acquittée par cette société depuis le 1er janvier 2002.

16     Par décision du 26 mars 2002, le receveur principal a rejeté cette demande de remboursement.

17     Le 24 mai 2002, Estager a donc assigné le receveur principal devant la juridiction de renvoi afin d’obtenir le remboursement des sommes qu’elle estime avoir indûment versées.

18     C’est dans ce contexte que le tribunal de grande instance de Brive-la-Gaillarde a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«Les dispositions de l’ordonnance nº 2000-916 […] concernant la conversion de la taxe […] appliquée aux productions de farine, semoule et gruau de blé tendre de 100 [FRF] en 16 euros sont-elles conformes aux règlements communautaires concernant l’introduction de l’euro?»

 Sur la question préjudicielle

19     Par sa question, la juridiction de renvoi demande en substance si les règlements nos  1103/97 et 974/98 s’opposent à une réglementation nationale qui, lors de l’opération de conversion en euros du montant d’une taxe telle que celle en cause au principal, a porté celui-ci à un montant supérieur à celui qui aurait résulté de l’application des règles de conversion prévues par lesdits règlements.

20     Pour répondre à cette question, il convient de s’attacher tant au libellé des dispositions desdits règlements qu’aux finalités de ces derniers.

21     À cet égard, il y a lieu de rappeler que, aux points 30 à 34 de son arrêt du 14 septembre 2004, Verbraucher-Zentrale Hamburg (C‑19/03, Rec. p. I‑8183), la Cour a déjà eu l’occasion d’examiner les finalités du règlement nº 1103/97.

22     Il ressort de cet examen que ce règlement vise à assurer que le passage à la monnaie unique s’effectue sans affecter les engagements déjà souscrits par les citoyens et les entreprises. Dans cette perspective, son quatrième considérant énonce que «[…] l’établissement précoce de la sécurité juridique permettra aux citoyens et aux entreprises de se préparer dans de bonnes conditions». En vertu de son septième considérant, «[…] selon un principe général du droit, la continuité des contrats et autres instruments juridiques n’est pas affectée par l’introduction d’une nouvelle monnaie». Le même considérant précise que l’objectif des dispositions du règlement nº 1103/97 relatives à ladite continuité «est de fournir la sécurité juridique et la transparence pour les agents économiques, en particulier les consommateurs […]». L’article 3, première phrase, dudit règlement dispose que «[l]’introduction de l’euro n’a pas pour effet de modifier les termes d’un instrument juridique ou de libérer ou de dispenser de son exécution, et elle ne donne pas à une partie le droit de modifier un tel instrument ou d’y mettre fin unilatéralement» (arrêt Verbraucher-Zentrale Hamburg, précité, point 31).

23     En outre, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 7 du règlement nº 974/98, «[l]e remplacement de la monnaie de chaque État membre participant par l’euro n’a pas en soi pour effet de modifier le libellé des instruments juridiques existant à la date du remplacement».

24     Participe également de cet objectif de neutralité du passage à l’euro, la fixation de règles relatives aux opérations de conversion. En effet, la recherche de la plus grande neutralité possible de ces opérations, pour les citoyens comme pour les entreprises, suppose, comme l’indique le douzième considérant du règlement nº 1103/97, que soit assuré «un degré élevé de précision pour les opérations de conversion». L’article 4, paragraphe 1, du même règlement prévoit ainsi que les taux de conversion «comportent six chiffres significatifs». Le même article précise, à son paragraphe 2, que «[l]es taux de conversion ne peuvent pas être […] arrondis ou tronqués lors des conversions» et, à son paragraphe 3, qu’«[i]l est interdit d’utiliser des taux inverses calculés à partir des taux de conversion», cette dernière prescription visant, selon le dixième considérant dudit règlement, à éviter «des imprécisions significatives, notamment lorsque la conversion porte sur des montants élevés» (arrêt Verbraucher-Zentrale Hamburg, précité, point 32).

25     Le principe de continuité des instruments juridiques et l’objectif de neutralité du passage à l’euro s’appliquent aux «termes» ou au «libellé» des «instruments juridiques» au sens des règlements nos  1103/97 et 974/98.

26     Or, il ne saurait faire de doute que le montant d’une taxe telle que celle en cause au principal constitue un «terme d’un instrument juridique» au sens de l’article 3 du règlement nº 1103/97.

27     Il convient dès lors d’examiner si les règlements nos  1103/97 et 974/98 s’opposent à une réglementation nationale qui, lors du passage à l’euro, a procédé simultanément à la conversion en euros et à l’augmentation du montant d’une telle taxe.

28     Dans l’affaire au principal, il est constant que, en adoptant l’ordonnance nº 2000‑916, le législateur français a entendu appliquer la réglementation communautaire relative à l’introduction de l’euro pour fixer le montant de la taxe.

29     En effet, ainsi qu’il résulte tant du rapport au président de la République relatif à l’ordonnance nº 2000‑916 que du libellé clair de l’article 1er, paragraphe 1, de celle-ci, cette ordonnance vise, par application des règlements nos  1103/97 et 974/98 ainsi que du taux de conversion officiel, à remplacer, le 1er janvier 2002, les montants exprimés en francs français figurant dans les textes législatifs par des montants en euros.

30     Il ressort également dudit rapport et de l’article 2 de l’ordonnance nº 2000‑916 que, afin de préserver la clarté de la législation et d’en faciliter l’application, certaines dispositions de cette ordonnance ont pour objet d’adapter certains montants en euros résultant de l’application des règles de conversion communautaires mentionnées à l’article 1er de la même ordonnance.

31     Or, dans leurs observations écrites, le gouvernement français et la Commission des Communautés européennes ne contestent pas qu’une augmentation du montant de la taxe a effectivement eu lieu puisque tant ces derniers qu’Estager s’accordent pour admettre que l’application stricte, d’une part, du taux de conversion irrévocablement fixé entre l’euro et le franc français par l’article 1er du règlement nº 2866/98 ainsi que, d’autre part, des règles d’arrondissement prévues à l’article 5 du règlement nº 1103/97 aurait dû conduire à fixer le montant de la taxe à 15,24 euros au lieu de 16 euros.

32     À cet égard, s’il est vrai que, ainsi que le relève le gouvernement français, les règlements nos  1103/97 et 2866/98 n’ont nullement porté atteinte à la compétence fiscale des États membres et à la faculté pour ces derniers d’augmenter le montant de leurs taxes, il n’en demeure pas moins que la conversion en euros du montant d’une taxe doit, dans des circonstances telles que celles du litige au principal, être effectuée dans le respect des dispositions prévues par le règlement nº 1103/97 ainsi que du principe de continuité des instruments juridiques et de l’objectif de neutralité du passage à l’euro.

33     Cela implique, notamment, des exigences de sécurité juridique et de transparence qui permettent de protéger la confiance des agents économiques dans l’introduction de l’euro. En effet, ainsi qu’il ressort du septième considérant du règlement nº 1103/97, l’objectif des dispositions de ce même règlement relatives à la continuité des contrats et autres instruments juridiques est de fournir la sécurité juridique et la transparence pour les agents économiques.

34     Il en résulte que, lorsqu’il procède simultanément à la conversion en euros et à l’augmentation du montant d’une taxe, comme c’est le cas dans l’affaire au principal, un État membre doit veiller à ce que la sécurité juridique et la transparence pour les agents économiques soient garanties.

35     Le respect de ces exigences suppose notamment que lesdits agents puissent distinguer clairement dans les textes réglementaires en cause la décision des autorités de cet État membre d’augmenter le montant de la taxe de l’opération de conversion en euros de ce montant.

36     Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si tel est le cas dans l’affaire au principal.

37     Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question posée que les règlements nos  1103/97 et 974/98 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale qui, lors de l’opération de conversion en euros du montant d’une taxe, telle que celle en cause au principal, a porté celui-ci à un montant supérieur à celui qui aurait résulté de l’application des règles de conversion prévues par ces règlements, à moins qu’une telle augmentation respecte les exigences de sécurité juridique et de transparence garantis par lesdits règlements, ce qui implique que les textes réglementaires en cause permettent de distinguer clairement la décision des autorités d’un État membre d’augmenter ce montant de l’opération de conversion en euros dudit montant. Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si tel est le cas dans le litige dont elle est saisie.

 Sur les dépens

38     La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit:

Les règlements (CE) nos  1103/97 du Conseil, du 17 juin 1997, fixant certaines dispositions relatives à l’introduction de l’euro, et 974/98 du Conseil, du 3 mai 1998, concernant l’introduction de l’euro, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale qui, lors de l’opération de conversion en euros du montant d’une taxe portant sur les quantités de farines, de semoules et de gruaux de blé tendre livrées ou mises en œuvre en vue de la consommation humaine, telle que celle en cause au principal, a porté celui-ci à un montant supérieur à celui qui aurait résulté de l’application des règles de conversion prévues par ces règlements, à moins qu’une telle augmentation respecte les exigences de sécurité juridique et de transparence garantis par lesdits règlements, ce qui implique que les textes réglementaires en cause permettent de distinguer clairement la décision des autorités d’un État membre d’augmenter ce montant de l’opération de conversion en euros dudit montant. Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si tel est le cas dans le litige dont elle est saisie.

Signatures


* Langue de procédure: le français.

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