This document is an excerpt from the EUR-Lex website
Document 61988CC0116
Opinion of Mr Advocate General Mischo delivered on 12 December 1989. # André Hecq v Commission of the European Communities. # Officials - Allocation of duties - Reassignment. # Joined cases C-116/88 and C-149/88.
Conclusions de l'avocat général Mischo présentées le 12 décembre 1989.
André Hecq contre Commission des Communautés européennes.
Fonctionnaires - Attribution des fonctions - Réaffectation.
Affaires jointes C-116/88 et C-149/88.
Conclusions de l'avocat général Mischo présentées le 12 décembre 1989.
André Hecq contre Commission des Communautés européennes.
Fonctionnaires - Attribution des fonctions - Réaffectation.
Affaires jointes C-116/88 et C-149/88.
Recueil de jurisprudence 1990 I-00599
ECLI identifier: ECLI:EU:C:1989:628
Conclusions de l'avocat général Mischo présentées le 12 décembre 1989. - André Hecq contre Commission des Communautés européennes. - Fonctionnaires - Attribution des fonctions - Réaffectation. - Affaires jointes C-116/88 et C-149/88.
Recueil de jurisprudence 1990 page I-00599
++++
Monsieur le Président,
Messieurs les Juges,
1 . La Cour est saisie de deux recours de M . Hecq assez similaires à ceux précédemment formés par le même requérant et qui ont fait l' objet des arrêts du 23 mars 1988 ( affaire 19/87 ) et du 14 décembre 1988 ( affaire 280/87 ).
2 . Quant aux faits et aux moyens à la base de ces nouveaux recours, nous nous permettons de renvoyer au rapport d' audience . Nous ne les rappellerons ici que dans la mesure où cela est nécessaire à la compréhension de notre raisonnement .
3 . Du 6 février au 4 mai 1987, M . Hecq s' est absenté de son travail pour des raisons de santé . Pendant cette période, M . Petersen, chef du service "immeubles", a attribué à d' autres fonctionnaires la responsabilité des bâtiments dont la surveillance incombait précédemment à M . Hecq . Par une note du 22 avril 1987, M . Petersen, escomptant le retour de M . Hecq pour le 27 avril 1987, a fait savoir à celui-ci ce qui suit :
"J' ai retenu de vous confier, à l' occasion de votre reprise de fonctions, l' établissement d' un audit du complexe d' Overijse . Cet audit, que je vous serais reconnaissant de me présenter pour le 18 mai, fera le bilan exhaustif du complexe, corps d' état par corps d' état, et proposera d' éventuelles actions de remise en ordre, voire d' aménagements, pour une meilleure fonctionnalité de l' établissement . Toutes ces propositions devront évidemment être chiffrées pour en apprécier l' impact sur le plan budgétaire ."
4 . Il a pu être établi au cours de l' audience que M . Hecq, qui n' a finalement repris son service que le 4 mai 1987, a pris contact dès avant cette date, par téléphone, avec le gérant du complexe de loisirs d' Overijse . Ce dernier lui a adressé, le 29 avril 1987, une note de deux pages énumérant "les travaux restant à réaliser au centre" ( annexe 4 à la requête ). Cette liste a été complétée par des notes des 6 mai et 1er juin 1987 qui concernaient des questions d' importance mineure .
5 . Il est constant que M . Hecq n' a jamais remis à son supérieur le bilan exhaustif et chiffré des travaux qui lui avait été demandé .
6 . Le 13 juillet 1987, M . Hecq a, au contraire, introduit une réclamation contre la décision du 22 avril 1987 . Celle-ci ayant été rejetée par la Commission le 25 novembre 1987, il a alors formé le recours en cause dans l' affaire C-116/88, qui vise à l' annulation tant du rejet de la réclamation que de la décision faisant l' objet de cette dernière .
7 . Par décision du 31 juillet 1987, confirmée par un acte formel en date du 16 septembre 1987, le requérant s' est ensuite vu affecté à de nouvelles fonctions à Luxembourg . S' estimant l' objet d' une mesure disciplinaire déguisée, M . Hecq a introduit, le 28 octobre 1987, une réclamation à laquelle la Commission a répondu négativement le 27 mai 1988 . A la suite de cela, le requérant a introduit le recours dans l' affaire C-149/88, qui a pour objet l' annulation de la décision du 31 juillet 1987 ainsi que du rejet de la réclamation contre cette décision .
8 . En ce qui concerne ce dernier aspect des deux recours, nous voudrions rappeler qu' il résulte, entre autres, de l' arrêt Vainker ( 1 ) que les recours contre le rejet des réclamations se confondent avec les recours formés contre les actes considérés comme faisant grief, c' est-à-dire en l' occurrence, d' une part, la décision confiant au requérant l' établissement d' un audit du complexe d' Overijse et, d' autre part, celle l' affectant à la DG IX-E-2 à Luxembourg .
Quant à l' affaire C-116/88
1 . La recevabilité du recours
9 . La Commission oppose, tout d' abord, une exception d' irrecevabilité à ce recours, et ce à un double titre .
10 . a ) Elle estime, en premier lieu, que le recours contre la décision de confier à M . Hecq l' établissement d' un audit du complexe d' Overijse est devenu sans objet, parce que celle-ci a cessé de produire tout effet bien avant l' introduction du recours . M . Hecq a, en effet, été réaffecté à Luxembourg à partir du 1er novembre 1987, alors que le recours n' a été introduit que le 14 avril 1988 . Le recours serait, dès lors, irrecevable à défaut d' intérêt actuel .
11 . Il faut effectivement reconnaître que l' annulation de la décision du 22 avril 1987 ne permettrait pas à M . Hecq de réintégrer les fonctions qui étaient les siennes avant cette date puisque entre-temps il a été nommé à d' autres fonctions à Luxembourg .
12 . Il reste, cependant, que la décision du 22 avril 1987 comportait un élément définitif susceptible, éventuellement, de léser un intérêt encore actuel de M . Hecq .
13 . En effet, contrairement à ce qu' on aurait pu supposer à la lecture de son seul texte, la note du 22 avril 1987 n' était pas une mesure purement intérimaire laissant ouverte la possibilité pour M . Hecq de retrouver automatiquement son ancien poste à l' issue de sa mission à Overijse . La Commission admet, au contraire, dans une note figurant à la page 6 A de son mémoire en défense, que la décision constituait bien une véritable mesure de réaffectation en ce sens qu' elle retirait à M . Hecq ses anciennes fonctions, tout en ne lui confiant, pour le moment, qu' une tâche purement temporaire .
14 . Or, cet élément du retrait des anciennes fonctions pourrait, le cas échéant, poser des problèmes au regard du statut dans la mesure où les nouvelles fonctions, même temporaires, seraient, dans leur ensemble, d' un niveau inférieur à celles incombant normalement à un fonctionnaire de grade B 3 . En second lieu, dans la mesure où le requérant n' a pas mené à bonne fin la tâche nouvelle qui lui avait été confiée, il est dans l' intérêt de la sauvegarde de la bonne réputation du requérant et de ses perspectives de carrière de faire établir l' éventuelle illégalité de la décision en question .
15 . b ) A titre subsidiaire, la Commission considère que le recours est également irrecevable, parce que la décision ne serait pas susceptible de faire grief au requérant . Il ne s' agirait que d' une simple "mesure destinée à améliorer l' organisation des services, sans affecter les droits que le fonctionnaire intéressé tient des articles 5 et 7 du statut" ( 2 ).
16 . Or, c' est justement cela que le requérant conteste, en invoquant des arguments de fond . Nous estimons, dès lors, qu' il n' est pas possible de conclure d' emblée à l' irrecevabilité du recours C-116/88 et qu' au contraire son examen au fond s' impose .
2 . Quant à la violation des articles 5, paragraphe 4, et 7, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires
17 . Le requérant affirme, tout d' abord, que la Commission lui a attribué des fonctions ne correspondant pas à ses grade et emploi . Elle aurait, de ce fait, violé notamment les articles 5, paragraphe 4, et 7, paragraphe 1, du statut .
18 . A l' appui de cette thèse, le requérant invoque deux arguments qui vont en sens contraire l' un de l' autre .
19 . Il soutient, en premier lieu, que si sa mission relative au complexe immobilier d' Overijse ne concernait que le corps d' état "thermie et sanitaire", elle se situerait nettement en deçà de ce que l' on peut attendre d' un assistant B 3/B 2 .
20 . Mais il suffit de constater, à cet égard, que l' audit ne concernait pas uniquement les domaines "thermie et sanitaire ". M . Hecq n' a donc pas fait l' objet d' une "dégradation ".
21 . Ce dernier soutient, par ailleurs, que s' il fallait considérer que l' audit visait tous les corps d' état de l' immeuble d' Overijse, la fonction à lui attribuée se situerait nettement au-delà de ce qu' il est raisonnable d' attendre d' un assistant de grade B 3 .
22 . Or, nous avons déjà indiqué ci-dessus que M . Hecq disposait de la collaboration du gérant de l' immeuble, qui lui avait adressé une liste assez longue de travaux à effectuer . Il lui suffisait donc de passer en revue, avec le gérant, les problèmes signalés par ce dernier, de se faire une opinion à leur égard et de prendre contact avec des fournisseurs potentiels, des entrepreneurs et des artisans pour déterminer d' une manière aussi précise que possible le coût prévisible des travaux reconnus comme nécessaires . Il lui aurait été loisible d' attirer, dans son bilan chiffré, l' attention sur le fait qu' il n' est pas un spécialiste dans tous les domaines concernés et que son évaluation des coûts était faite sous toutes réserves .
23 . La description de l' emploi type d' assistant technique B 3/B 2, arrêtée par la Commission prévoit, entre autres, qu' un fonctionnaire de ce niveau est
"chargé d' effectuer dans le cadre de directives générales des travaux difficiles et complexes ".
Ceux dont M . Hecq a été chargé correspondaient à cette définition et, effectués de la manière indiquée ci-dessus, ils n' auraient pas dépassé les aptitudes d' un assistant technique de grade B 3 .
24 . Par ailleurs, on peut considérer que, en raison de l' envergure de la mission qui lui avait été confiée à Overijse, M . Hecq était chargé d' une "section d' une unité administrative" au sens où l' entend la description de l' emploi type susmentionnée .
25 . Il y a lieu de conclure que M . Hecq n' a pas été affecté, à Overijse, à un emploi ne correspondant pas à son grade ( article 7, paragraphe 1, du statut ) ou ne correspondant pas à la description des fonctions et attributions que comporte l' emploi type d' assistant technique de grade B 3/B 2 ( article 5, paragraphe 4, du statut ).
26 . L' ordre de service du 22 avril 1987 n' a donc pas violé le principe de l' équivalence entre le grade et l' emploi .
3 . Quant à la violation de l' article 25 en conjonction avec l' article 7, paragraphe 1, du statut
27 . Il résulte de l' article 25, deuxième alinéa, du statut que
"toute décision faisant grief doit être motivée ".
Or, il résulte de la jurisprudence constante de la Cour
"qu' on ne saurait considérer comme acte faisant grief au sens de l' article 25 du statut, soumis comme tel à une obligation de motivation de la part de l' autorité administrative, une mesure d' organisation interne qui n' est pas de nature à porter atteinte à la position statutaire des intéressés ou au respect du principe de la correspondance entre le grade des fonctionnaires et l' emploi auquel ils sont affectés" ( 3 ).
28 . Comme tel était le cas en l' espèce, le grief de la violation de l' article 25 ne saurait être retenu .
29 . Le requérant fait cependant encore valoir que, même si l' acte ne devait pas comporter une "motivation externe", il devait cependant être fondé sur une "motivation interne" conforme au statut . Autrement dit, il devait être fondé sur l' intérêt du service, expressément cité par l' article 7, paragraphe 1, comme seul motif valable de toute décision d' affectation ou de réaffectation . En l' espèce, il y aurait eu erreur dans les motifs ainsi qu' excès de pouvoir .
30 . Nous estimons qu' à cet égard il y a lieu de se référer à la lettre du 22 décembre 1987 par laquelle la Commission a rejeté la réclamation de M . Hecq .
31 . Le document en question invoque, à l' appui de la décision incriminée, les arguments suivants :
- pendant une longue période d' absence de l' intéressé, le chef du service "immeubles" s' est trouvé obligé, pour des raisons de bon fonctionnement du service, d' attribuer les bâtiments qui étaient confiés à M . Hecq à d' autres fonctionnaires, ces bâtiments ne pouvant pas rester pour une telle période sans responsable;
- lors du retour de M . Hecq, les nécessités du service existant en ce moment exigeaient de donner une priorité à l' établissement d' un audit du complexe d' Overijse;
- les tâches confiées à cet égard à M . Hecq correspondaient à son grade;
- la décision en cause a été prise dans l' intérêt du service, domaine dans lequel l' administration dispose et doit toujours disposer d' un large pouvoir d' appréciation .
32 . Le seul point de cette motivation susceptible de prêter encore à discussion à ce stade est celui relatif à la priorité à donner à l' établissement d' un audit du complexe d' Overijse . Or, le requérant n' a pas réussi à démontrer que la Commission ait commis à cet égard une erreur manifeste d' appréciation . Le fait qu' après le refus du requérant d' établir cet audit la Commission n' ait conclu que beaucoup plus tard un contrat avec un bureau d' architectes n' est pas concluant . Il résulte, en effet, de ce contrat, versé au dossier par la Commission, qu' il avait une portée beaucoup plus large que le mandat confié au requérant .
33 . La décision du directeur général du personnel a donc été prise sur la base de motifs légalement admissibles et ne comportant aucune erreur manifeste . Il n' est, dès lors, pas nécessaire d' examiner les motifs supplémentaires invoqués par la Commission au cours de la procédure écrite .
4 . Quant à la violation du principe général de bonne administration et du devoir de sollicitude
34 . Le requérant se plaint du fait que l' administration aurait pris la décision du 22 avril 1987 sans prendre en considération son intérêt à lui . De plus, la décision aurait été prise sans lui permettre de faire connaître préalablement son point de vue . Les arguments de M . Hecq ainsi que les répliques de la Commission sont exposés plus en détail dans le rapport d' audience .
35 . Nous estimons que les considérations suivantes sont déterminantes pour l' appréciation de ce moyen .
36 . Dans votre arrêt du 29 octobre 1981, Arning/Commission ( 125/80, Rec . 2539, p . 2555 ), vous avez constaté que,
"s' il est en effet exact que lorsque l' autorité statue sur la situation d' un fonctionnaire, elle doit tenir compte non seulement de l' intérêt du service, mais aussi de celui du fonctionnaire concerné, cette considération ne saurait empêcher que l' autorité procède à une rationalisation des services si elle l' estime nécessaire ".
Ce raisonnement doit s' appliquer a fortiori lorsqu' il s' agit simplement d' un ordre de service à portée temporaire impliquant un travail se situant dans la gamme de ceux qu' on peut demander à un assistant technique de grade B 3 d' accomplir .
37 . On ne voit d' ailleurs pas en quoi l' intérêt personnel de M . Hecq aurait été lésé par la mesure incriminée . M . Hecq avait été absent depuis le 6 février et il existait une incertitude au sujet de son rétablissement définitif ( 4 ). Il pouvait, dès lors, apparaître indiqué de ne lui conférer "à l' occasion de sa reprise de fonctions" et compte tenu de l' absence du chef de service entre le 24 avril et le 11 mai qu' une mission temporaire destinée, en principe, à prendre fin le 18 mai 1987 .
38 . Par ailleurs, ainsi que vous l' avez rappelé au point 20 du premier arrêt Hecq ( arrêt du 23 mars 1988, 19/87, Rec . p . 1681 ),
"il ressort de la jurisprudence de la Cour que, si le statut comporte des garanties précises pour les droits statutaires des fonctionnaires, l' administration des institutions communautaires n' est pas obligée de prendre l' avis individuel des fonctionnaires sur des mesures de réorganisation qui peuvent affecter leur position ".
Cela vaut a fortiori pour un ordre de service temporaire .
39 . Par ailleurs, dans le deuxième arrêt Hecq ( arrêt du 14 décembre 1988, 280/87, Rec . p . 0000 ), vous avez constaté que lorsqu' on n' est pas en présence d' un acte faisant grief l' administration n' est pas tenue d' entendre au préalable le fonctionnaire concerné ( point 11 ).
40 . Étant parvenu à la conclusion qu' aucun des moyens du requérant n' est susceptible d' être accueilli, nous devons évidemment vous proposer de rejeter le recours C-116/88 dans son ensemble .
41 . Quant aux dépens, la Commission demande à la Cour de déclarer ce recours frustratoire, parce qu' elle estime qu' il est constant qu' une annulation de la décision en question ne pourrait pas profiter au requérant .
42 . Le requérant, quant à lui, souligne que nous ne serions dans aucune des hypothèses où la Cour a reconnu le caractère vexatoire ou frustratoire d' un recours . Ainsi, l' action ne serait-elle ni manifestement irrecevable ni manifestement non fondée . Le requérant n' aurait pas usé de moyens d' attaque excessifs dans son recours, qui ne serait pas non plus manifestement dilatoire .
43 . Nous estimons, pour notre part, que plusieurs considérations plaident en faveur de l' acceptation de la demande de la Commission . Il y a, tout d' abord, le fait que la mesure attaquée n' avait qu' un caractère tout à fait temporaire . Même si elle impliquait le retrait de l' emploi antérieur, il est certain que, au stade où le recours a été introduit, seule une anulation de la décision du 16 septembre 1987 affectant M . Hecq à Luxembourg pouvait obliger l' administration à lui réattribuer à Bruxelles un emploi correspondant à son grade . Il faut relever aussi que les arguments par lesquels le requérant s' efforce de démontrer que la décision de l' affecter temporairement à Overijse était illégale sont particulièrement fragiles .
44 . Enfin, on pourrait prendre en considération le fait que ce recours intervient à la suite de celui introduit par le même requérant dans l' affaire 280/87, qui était déjà basé sur des arguments assez similaires et tout aussi faibles, et que vous avez rejeté .
45 . Pour ces raisons, on aurait donc pu songer à marquer, à cette occasion, qu' une succession de recours qui, tout en manquant de toute justification ( 5 ), exigent néanmoins un effort et des frais de la part de la partie défenderesse pour les réfuter n' est pas admissible .
46 . D' un autre côté, force est de constater que la Cour a l' habitude de compenser les dépens lorsqu' une exception d' irrecevabilité du défendeur est rejetée . Cette pratique a été critiquée par le Conseil des barreaux de la Communauté européenne, qui demande que la Cour prenne uniquement en considération le sort réservé aux arguments de fond . Mais nous estimons que, aussi longtemps que la Cour n' a pas adopté à cet égard, en réunion plénière, une nouvelle position de principe, il y a lieu de maintenir la ligne antérieure, et de déclarer, en pareil cas, que chaque partie supportera ses propres dépens .
Quant à l' affaire C-149/88
47 . Par une note en date du 31 juillet 1987 et un acte formel du 16 septembre 1987, le directeur général du personnel et de l' administration a décidé, "dans l' intérêt du service", l' affectation de l' emploi B 3/B 2 et de son titulaire M . André Hecq à la direction IX-E "personnel et administration à Luxembourg et services généraux", division 2 "administration", avec effet au 1er novembre 1987 .
48 . Pour ce qui est des entretiens qui ont précédé cette décision et le choix qui avait été offert à M . Hecq, je me permets de renvoyer au rapport d' audience .
49 . La mission confiée à M . Hecq à Luxembourg a été définie dans les termes suivants :
"Sous la responsabilité directe de M . Vial, de M . Collovald et du chef de la division IX-E-2, surveiller les installations techniques de l' immeuble Cube qui vient d' être agrandi et aménagé .
S' agissant d' un immeuble destiné à héberger les services de la direction 'contrôle de sécurité de l' Euratom' de la DG XVII, direction qui compte de nombreux laboratoires et qui dispose d' équipements spécialisés, dont des équipements informatiques importants, la présence d' un fonctionnaire de catégorie BT est utile en raison de la nature, du nombre et de la qualité des équipements techniques normaux et spécialisés de cet immeuble .
Ce fonctionnaire devra apprécier le type des interventions que le fonctionnement de ces équipements nécessite, informer les services compétents et/ou effectuer les interventions d' urgence qu' impose la sécurité de cet immeuble ."
50 . Par une note du 2 mai 1988, et donc antérieure à l' introduction du présent recours, M . Hecq a également été chargé
- du suivi du fonctionnement et de l' entretien du Centre polyvalent de l' enfance;
- de la préparation d' un projet de cahier des charges en vue du lancement d' un appel d' offres pour le renouvellement des contrats d' entretien des appareils de levage du bâtiment Jean Monnet .
51 . Par la suite, M . Hecq a encore été chargé du chauffage du bâtiment Jean Monnet . Le 12 octobre 1988, on lui a demandé d' assurer les mêmes prestations que pour les immeubles Cube et Centre polyvalent de l' enfance en ce qui concerne le nouvel immeuble de la Commission à Luxembourg, le Centre Wagner .
52 . Enfin, il est apparu au cours de l' audience que M . Hecq, à un moment non précisé, a assumé de nouvelles responsabilités sur le plan syndical, qui nécessitent sa présence à Bruxelles deux jours par semaine, et qui l' empêchent, dès lors, de surveiller d' une manière constante le bon fonctionnement des installations techniques des bâtiments qui lui ont été confiés .
53 . M . Hecq invoque cinq moyens à l' appui de sa demande d' annulation de la décision de mutation du 16 septembre 1987 .
1 . Quant à la violation des articles 5, paragraphe 4, et 7, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires
54 . Le requérant soutient, tout d' abord, que la tâche de surveiller les installations techniques de l' immeuble Cube ne correspond pas à ses grade et emploi . Il estime, en effet, ne servir là que de simple "courroie de transmission des données entre la base et son supérieur hiérarchique ". Il serait totalement dépourvu du moindre pouvoir de décision . La Commission répond, cependant, que cette situation n' aurait prévalu qu' au stade initial de ses nouvelles fonctions, parce que l' immeuble Cube dont il est responsable venait d' être réaménagé et que les travaux effectués et les équipements installés se trouvaient encore sous garantie, ce qui impliquait que seul le personnel des entreprises installatrices pouvaient y procéder à des interventions . Cette argumentation nous paraît convaincante .
55 . Le requérant insiste, en outre, sur le fait qu' auparavant il était le chef d' une section d' une unité administrative, ce qui ne serait plus le cas actuellement . Il faut cependant souligner, à cet égard, que la description des fonctions d' un assistant de grade B 3/B 2 n' implique pas qu' un assistant ait nécessairement sous ses ordres une équipe de techniciens comme le requérant paraît le penser . Il ressort en effet clairement de l' arrêt rendu dans l' affaire 19/87, précité, que tel n' est pas le cas . La Cour y a constaté que, étant seul responsable de l' état de certains bâtiments, le requérant pouvait être considéré comme ayant la charge d' une unité administrative .
56 . On pourrait, certes, avoir des doutes si tel est encore le cas lorsqu' un fonctionnaire B 3 n' est chargé que d' un seul immeuble . Mais le fait est que l' immeuble Cube comporte un nombre particulièrement important d' installations techniques dont le fonctionnement doit être surveillé . Enfin et surtout, dès avant l' introduction du présent recours, les tâches de M . Hecq ont été nettement élargies et de nouvelles fonctions lui ont encore été attribuées par la suite . On peut donc considérer qu' il est demeuré responsable d' une section d' une unité administrative au sens de l' arrêt Hecq I .
57 . Il s' ensuit que le premier moyen doit être rejeté .
2 . Quant à la motivation insuffisante ou erronée de l' acte attaqué
58 . Le requérant fait valoir que la décision de le réaffecter à Luxembourg violerait l' article 25 du statut, parce qu' elle ne serait pas motivée, alors qu' elle constituerait un acte faisant grief .
59 . Il s' avère cependant, comme nous l' avons déjà signalé ci-dessus, que la décision se réfère expressément à l' "intérêt du service ". Elle est donc motivée .
60 . Reste à savoir si, comme le soutient le requérant, cette motivation est insuffisante ou si elle est erronée parce que d' autres motifs auraient, en réalité, été à la base de la décision . Dans cette dernière hypothèse, l' article 7, paragraphe 1, du statut, qui prévoit que toute nomination ou mutation doit se faire dans le seul intérêt du service, serait également violé .
61 . La Commission justifie essentiellement sa décision par la nécessité de remédier à l' ambiance déplorable qui régnait dans le service où travaillait M . Hecq et, accessoirement, par la nécessité d' appliquer sa politique de mobilité . Elle affirme, en outre, que la mesure en cause, puisqu' elle ne portait atteinte ni à la position statutaire du requérant ni au principe de correspondance entre le grade et l' emploi, n' était pas susceptible de faire grief et n' avait donc pas à être plus amplement motivée .
62 . A cet égard, nous croyons qu' il faut faire une distinction entre un ordre de service à portée temporaire, comme dans l' affaire C-116/88, et la réaffectation définitive d' un fonctionnaire . A notre avis, l' ordre de service n' a pas besoin d' être motivé . Par contre, lorsqu' il s' agit d' une réaffectation ( déplacement d' un fonctionnaire avec son poste ) ou d' une mutation ( nomination du fonctionnaire à un autre poste préalablement déclaré vacant ), deux notions qui peuvent être considérées comme équivalentes dans le contexte des développements qui vont suivre, la motivation ne saurait simplement consister en une référence à l' intérêt du service . L' administration est, en effet, toujours censée agir sur cette base, encore faut-il faire savoir au fonctionnaire pourquoi l' intérêt du service rendait nécessaire qu' on le déplace contre sa volonté . Aussi la Cour a-t-elle jugé
"qu' une décision de mutation prise contre la volonté de l' intéressé est un acte faisant grief au sens de l' article 25 du statut et doit dès lors être motivée" ( 6 ).
Mais il faut souligner qu' en l' espèce la décision prise a été précédée d' entretiens au cours desquels le directeur général du personnel et de l' administration a exposé au requérant la situation et les raisons pour lesquelles il était mis devant ce choix . Il y a donc lieu d' appliquer la jurisprudence de la Cour selon laquelle une décision est suffisamment motivée dès lors que
"l' acte sujet à recours est intervenu dans un contexte connu du fonctionnaire concerné et qui permet de comprendre la portée d' une mesure qui le concerne personnellement" ( 7 ).
63 . Quant à l' affirmation du requérant selon laquelle la mesure prise n' était aucunement justifiée par l' intérêt du service, il ressort très clairement de la jurisprudence de la Cour qu' il peut être dans l' intérêt du service de procéder à la mutation d' un fonctionnaire lorsque le climat qui règne dans son service n' est pas de nature à permettre l' exécution normale de ses tâches par chacun . Ainsi, dans l' affaire Kley, précitée, la Cour a-t-elle jugé que la mutation était dans l' intérêt du service, car le fonctionnaire était opposé aux projets qu' on lui demandait de mener à bien .
64 . Dans l' affaire Scuppa, la Cour a admis qu' il était de l' intérêt du service de muter un fonctionnaire qui ne s' entendait pas avec son supérieur ( 8 ).
65 . Enfin, dans l' affaire Mme V./Commission, la Cour n' a pas hésité à juger que
"il était dans l' intérêt du service de mettre fin à une situation administrative devenue intenable pour tous les intéressés . La mutation décidée par la Commission peut dès lors être considérée comme une mesure qui s' imposait dans l' intérêt général" ( 9 ).
66 . Or, il ressort à l' évidence du dossier que la situation était très tendue au sein du service où travaillait M . Hecq . Déjà aux points 17 et 18 du premier arrêt Hecq, vous avez constaté une détérioration du climat de travail dans la section . Par la suite, M . Hecq, après sa première mutation, s' est plaint d' avoir la charge d' un trop grand nombre de bâtiments, mais il a intenté un procès lorsque l' un de ces immeubles lui a été retiré . Cela n' a certainement pas contribué à une amélioration de ses relations avec ses supérieurs . Plus tard, il a signalé, à juste titre semble-t-il, l' existence d' anomalies, voire d' irrégularités dans des dossiers traités par sa division, ce qui a malheureusement dû susciter de nouvelles tensions . Chargé de l' audit du centre de loisirs d' Overijse, il n' a jamais remis le bilan qu' on lui avait demandé d' établir .
67 . Compte tenu de cette évolution, force est de constater que l' administration n' a pas fait d' erreur d' appréciation en estimant qu' il était dans l' intérêt du service aussi bien que dans l' intérêt de M . Hecq d' éloigner ce dernier de la division à laquelle il avait appartenu jusque-là ( voir la lettre du 27 mai 1988 portant rejet de la réclamation du requérant ).
68 . Il n' est, dès lors, pas nécessaire d' examiner les autres arguments invoqués par la Commission .
3 . Quant à la violation du principe général de bonne administration et du devoir de sollicitude de l' administration vis-à-vis de ses fonctionnaires
69 . Comme pour le recours C-116/88, la violation invoquée au titre de ce moyen dans le cadre du recours C-149/88 consisterait dans le fait que la décision attaquée aurait été prise sans égard pour les intérêts du requérant . Celui-ci aurait dû pouvoir rester dans son service pour éviter que la mesure ne soit interprétée comme étant une sanction déguisée .
70 . Force est, cependant, de remarquer ici que, lorsque le directeur général a pris la décision contestée, il a spécifiquement insisté sur le fait qu' il ne s' agissait pas d' une mesure disciplinaire déguisée, ce dont le requérant pouvait faire état publiquement .
71 . Il nous paraît, en outre, exorbitant de soutenir qu' à la seule fin d' éviter que la mesure, dont nous avons vu que l' intérêt du service la justifiait pleinement, fût faussement interprétée comme une sanction déguisée la Commission n' aurait pas dû la prendre!
72 . Il faut, de plus, souligner que la Commission s' est bel et bien efforcée de prendre en considération l' intérêt du requérant de rester dans la Région bruxelloise en lui offrant la possibilité d' occuper un poste à Zaventem . M . Hecq soutient, toutefois, que le choix n' aurait pas été "réel", puisque le poste offert n' aurait pas été en rapport avec sa spécialité . Or, la "politique de mobilité" de son personnel mise en oeuvre par la Commission implique, dans toute la mesure du possible, des changements de fonctions, ce que le requérant admet . Son argumentation en la matière n' est d' ailleurs pas des plus cohérentes : il expose que la "politique de mobilité" implique un changement de fonctions pour critiquer le fait que le poste qu' on lui avait proposé à Luxembourg n' en comportait pas et qu' une telle réaffectation ne pouvait, dès lors, pas être justifiée au titre de cette politique, mais il refuse en même temps de considérer comme réel le choix offert, sous prétexte qu' un des postes proposés impliquait justement un travail de nature différente de celui qu' il avait toujours effectué .
73 . Ajoutons encore que la prétention du requérant ne trouve aucun appui dans la jurisprudence de la Cour qui a ainsi précisé que
"le statut des fonctionnaires n' accorde à ceux-ci aucun droit à un emploi déterminé, mais laisse par contre à l' autorité investie du pouvoir de nomination la compétence d' affecter les fonctionnaires, dans l' intérêt du service, aux différents emplois correspondant à leur grade" ( 10 ).
74 . La Cour a également rappelé que, sous réserve que les fonctions correspondent à ses grade et emploi,
"le fonctionnaire a l' obligation d' accepter toute affectation, conformément aux exigences du service, dans l' ensemble de la Communauté, en tout lieu de travail de l' institution auprès de laquelle il exerce ses fonctions" ( 11 ).
75 . Il est constant, par ailleurs, que M . Hecq a eu l' occasion de faire connaître au directeur général son point de vue au sujet des deux fonctions auxquelles il était envisagé de le nommer .
76 . La conclusion s' impose donc que ce moyen doit également être rejeté .
4 . Quant à l' existence d' une sanction disciplinaire déguisée
77 . Le requérant affirme encore que la mesure attaquée constituerait bel et bien une sanction déguisée et qu' elle violerait, dès lors, l' article 86, paragraphe 3, du statut et le principe "non bis in idem ". Cette argumentation doit cependant être rejetée, puisque nous avons démontré que la mesure en question était justifiée par l' intérêt du service .
5 . Quant à l' atteinte au droit d' association et aux droits syndicaux
78 . Le requérant, qui avait été élu membre du comité exécutif de l' Union syndicale en mai 1987, fait valoir que, à cause de sa réaffectation à Luxembourg, il ne peut plus exercer correctement son mandat syndical . Il estime, dès lors, que la Commission aurait violé l' article 24 bis du statut, aux termes duquel
"les fonctionnaires jouissent du droit d' association; ils peuvent donc être membres d' organisations syndicales ou professionnelles de fonctionnaires européens ".
79 . Le fait que M . Hecq ait obtenu un nouveau mandat de la part d' une autre organisation professionnelle après son transfert à Luxembourg démontre à l' évidence, s' il en était besoin, que les droits qu' il tire de l' article 24 bis n' ont aucunement été affectés par sa mutation . Il est, par ailleurs, très douteux qu' un fonctionnaire ait le droit d' exiger de pouvoir exercer son activité syndicale dans un lieu de travail déterminé par lui seul .
80 . Enfin, le requérant allègue également la violation de l' article 13 de l' accord du 20 septembre 1974 concernant les relations entre la Commission des Communautés européennes et les organisations syndicales ou professionnelles, qui dispose que
"... l' appartenance à une organisation syndicale ou professionnelle, la participation à une activité syndicale ou l' exercice d' un mandat syndical ne peut, sous quelque forme ou à quelque titre que ce soit, porter préjudice à la situation professionnelle ou au déroulement de la carrière des intéressés ".
81 . Comme le requérant n' apporte pas la moindre preuve que sa réaffectation aurait été décidée en raison de ses activités syndicales, cet argument peut être rejeté sans même qu' il soit nécessaire d' examiner la thèse de la Commission selon laquelle la Cour ne pourrait pas contrôler la légalité des actes de la Commission au regard de cet accord .
Conclusion
82 . Pour toutes les raisons qui précèdent, nous vous proposons de rejeter les recours inscrits sous les numéros C-116/88 et C-149/88 et, en application de l' article 70 du règlement de procédure de la Cour, de déclarer que chacune des parties supportera ses propres dépens .
(*) Langue originale : le français .
( 1 ) Arrêt du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, points 7 à 9 ( 293/87, Rec . p . 0000 ).
( 2 ) La Commission cite ici l' arrêt du 11 juillet 1968, Labeyrie ( 16/67, Rec . p . 444 ), et l' arrêt du 12 juillet 1979, List ( 124/78, Rec . p . 2510 ).
( 3 ) Voir, notamment, arrêt du 17 mai 1984, Albertini et Montagnani/Commission, point 46 ( 338/82, Rec . p . 2145 ).
( 4 ) La note incriminée du 22 avril 1987 est révélatrice à cet égard, puisque son auteur "espère le retour" du requérant pour le 27 avril 1987, alors que ce dernier n' est revenu que le 4 mai 1987 .
( 5 ) Voir, par analogie, arrêt du 9 mars 1978, Herpels/Commission ( 54/77, Rec . p . 585, 601 ).
( 6 ) Voir l' arrêt du 27 juin 1973, Kley/Commission ( 35/72, Rec . p . 679 ).
( 7 ) Voir l' arrêt Kley, précité, et aussi les arrêts du 1er mai 1983, Seton ( 36/81, 37/81 et 218/81, Rec . p . 1789 ), et du 29 octobre 1981, Arning ( 125/80, Rec . 1981, p . 2553 ).
( 8 ) Arrêt de la Cour du 10 juillet 1975, Scuppa/Commission ( 4/74 et 30/74, Rec . p . 919 ).
( 9 ) Arrêt de la Cour du 14 juin 1979, Mme V./Commission ( 18/78, Rec . p . 2093 ).
( 10 ) Voir l' arrêt du 6 mai 1969, Huybrechts/Commission ( 21/68, Rec . p . 85 ).
( 11 ) Arrêt du 23 janvier 1986, Rasmussen/Commission ( 173/84, Rec . p . 204 ); arrêt du 24 février 1981, Carbognani et Coda Zabetta/Commission ( 161/80 et 162/80, Rec . p . 543, 564 ).