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Document 61987CC0062
Opinion of Mr Advocate General Lenz delivered on 19 January 1988. # Exécutif régional wallon and SA Glaverbel v Commission of the European Communities. # State aid - Flat-glass industry - Pyrolytically coated glass. # Joined cases 62/87 and 72/87.
Conclusions de l'avocat général Lenz présentées le 19 janvier 1988.
Exécutif régional wallon et SA Glaverbel contre Commission des Communautés européennes.
Aides d'État - Industrie du verre plat - Verre à couches pyrolithiques.
Affaires jointes 62/87 et 72/87.
Conclusions de l'avocat général Lenz présentées le 19 janvier 1988.
Exécutif régional wallon et SA Glaverbel contre Commission des Communautés européennes.
Aides d'État - Industrie du verre plat - Verre à couches pyrolithiques.
Affaires jointes 62/87 et 72/87.
Recueil de jurisprudence 1988 -01573
ECLI identifier: ECLI:EU:C:1988:18
Conclusions de l'avocat général Lenz présentées le 19 janvier 1988. - Exécutif régional wallon et SA Glaverbel contre Commission des Communautés européennes. - Aides d'État - Industrie du verre plat - Verre à couches pyrolithiques. - Affaires jointes 62/87 et 72/87.
Recueil de jurisprudence 1988 page 01573
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Monsieur le Président,
Messieurs les Juges,
A - Les faits
1 . Les deux affaires jointes dans lesquelles nous présentons ces conclusions portent sur la question de savoir si c' est à bon droit que la Commission des Communautés européennes (" défenderesse ") s' est opposée à ce que le royaume de Belgique laisse l' une de ses instances régionales ( l' exécutif régional wallon, requérant dans l' affaire 62/87 ) accorder une aide aux investissements à la SA Glaverbel ( requérante dans l' affaire 72/87 ).
2 . Au cours des années 1982 et 1983, la SA Glaverbel a réalisé dans son usine de Moustier un volume d' investissement de 1,2 milliard de BFR pour rénover et moderniser une ligne de production de verre plat, moderniser une autre installation et développer la capacité d' une ligne de production de verre à couches pyrolytiques . Le gouvernement belge avait projeté de soutenir ces investissements, sous réserve de l' approbation de la Communauté européenne, en octroyant une subvention en intérêts, une prime en capital et une exonération du précompte immobilier en application d' une loi du 17 juillet 1959, ce qui correspondait au total à un équivalent subvention net de 5,8 % du volume des investissements réalisés . La décision d' octroyer l' aide a été prise en novembre 1984 . En novembre 1985, le gouvernement belge a fait part à la Commission de son intention d' octroyer ces aides aux investissements .
3 . Dans le cadre de la procédure de vérification des aides qui a alors été engagée, le gouvernement belge, les gouvernements de deux autres États membres, une fédération sectorielle, un groupe producteur du secteur économique concerné et l' entreprise en cause ont présenté leurs observations .
4 . Par décision du 3 décembre 1986 ( 1 ), la Commission des Communautés européennes a établi que l' aide aux investissements projetée ne pouvait être octroyée . Elle a estimé que l' aide projetée affecterait les échanges entre les États membres et fausserait la concurrence . Les aides en cause seraient en effet absolument incompatibles avec le marché commun en vertu de l' article 92, paragraphe 1, du traité CEE; les conditions d' une dérogation en application de l' article 92, paragraphes 2 et 3, du traité CEE ne seraient pas non plus réunies .
5 . L' exécutif régional wallon, qui est devenu dans l' intervalle l' organisme compétent en matière d' aide au développement économique régional dans la partie wallonne de la Belgique, de même que la SA Glaverbel jugent cette décision illégale . Ils invoquent sur le fond l' application erronée de l' article 92, paragraphe 1, du traité CEE et l' inapplication des dispositions dérogatoires de l' article 92, paragraphe 3, sous b ) et c ), du traité CEE; ils invoquent, en outre, le non-respect sur plusieurs points de l' article 190 du traité CEE, c' est-à-dire de l' obligation de motiver la décision .
6 . L' exécutif régional wallon fait valoir, au surplus, que la Commission aurait violé les droits de la défense .
7 . Les requérants concluent donc à l' annulation de la décision de la Commission du 3 décembre 1986 et à la mise des dépens à la charge de la défenderesse .
8 . La défenderesse conclut au rejet des recours pour défaut de fondement et à la mise des dépens à la charge des requérants .
9 . La Commission tient sa décision du 3 décembre 1986 pour légale; elle a présenté quelques observations supplémentaires pour expliciter cette décision .
10 . Nous reviendrons dans le courant de nos conclusions sur la teneur de la décision attaquée et sur divers points des arguments des parties . Nous renvoyons pour le reste au texte du rapport d' audience .
B - Analyse
I - Sur la recevabilité
11 . 1 ) La recevabilité de la requête de la SA Glaverbel ne devrait pas pouvoir être contestée . En sa qualité de bénéficiaire éventuelle de l' aide litigieuse, elle est directement et individuellement concernée, au sens de l' article 173, alinéa 2, du traité CEE, par la décision de la Commission .
12 . 2 ) En principe, la recevabilité de la requête de l' exécutif régional wallon ne devrait pas davantage pouvoir être mise en question . Il doit, lui aussi, être considéré comme une personne morale au sens de l' article 173, alinéa 2, du traité CEE . En sa qualité d' organisme désormais compétent pour verser l' aide litigieuse en Belgique, il est également directement et individuellement concerné .
13 . Cela ne vaut toutefois pas pour l' ensemble des griefs qu' il soulève . Un organe d' un État membre investi de prérogatives de puissance publique, même lorsqu' il exécute des tâches qui sont du ressort de l' État, ne saurait être considéré comme un État membre au sens de l' article 173, alinéa 1, du traité CEE . C' est pourquoi, en sa qualité de personne morale, au sens de l' article 173, alinéa 2, du traité CEE, il doit établir son intérêt à agir ( 2 ). L' intérêt à agir de l' exécutif régional wallon n' est certainement pas niable pour les griefs matériels; en revanche, l' exécutif régional wallon n' a pas satisfait à ces exigences pour les griefs fondés sur la violation des droits de la défense par la Commission, défenderesse, au cours de la procédure administrative . La décision de la défenderesse ne lui était pas adressée, et il n' a pas non plus pris part à la procédure administrative évoquée, ne serait-ce qu' en présentant des observations . Aucun de ses droits n' a donc pu être violé au cours de la procédure administrative . A cet égard, on peut laisser en suspens la question de savoir si le royaume de Belgique, en qualité de destinataire de la décision, aurait pu invoquer une violation éventuelle des droits de la défense subie par la société Glaverbel; en tout état de cause, puisque l' exécutif régional wallon ne peut pas être considéré comme un État membre au sens de l' article 173, premier alinéa du traité CEE, le grief de violation des droits de la défense que lui seul a soulevé ne peut pas être considéré comme recevable .
II - Sur le bien-fondé
14 . Nous examinerons le bien-fondé du recours en suivant l' ordre des griefs matériels déjà évoqués et nous analyserons en même temps les griefs portant sur l' insuffisance des motifs au regard de l' article 190 du traité CEE, puisque les griefs matériels et formels sont à cet égard inséparables .
1 . Sur l' application de l' article 92, paragraphe 1, du traité CEE - Existence d' une aide
15 . Les requérants contestent, en premier lieu, l' existence d' une aide au sens de l' article 92, paragraphe 1, du traité CEE, l' aide étant insignifiante par rapport à la production appelée à en bénéficier, et donc non susceptible de fausser la concurrence et d' affecter les échanges entre États membres .
16 . On retiendra, en premier lieu, que les concours prévus représentant 5,8 % des coûts d' investissement ( lesquels se montent à 1,2 milliard de BFR ) déchargeraient l' entreprise bénéficiaire, à concurrence d' environ 70 millions de BFR ( 4 ), d' une partie des coûts d' investissement qu' elle doit normalement supporter . Même s' il faut reconnaître que la Cour a admis, dans le cadre des règles de concurrence de l' article 85 du traité CEE, la pratique de la Commission qui consiste à exclure de l' interdiction posée par l' article 85 les restrictions de concurrence des entreprises qui n' influent pas sensiblement sur la concurrence et sur les échanges entre les États membres, il ne nous semble pas bon de transposer cette tendance à l' interdiction des aides établie par l' article 92 du traité CEE . Ni la teneur littérale des dispositions applicables ni la jurisprudence de la Cour à ce jour ( 5)n' indiquent l' existence d' une pareille exception au principe de l' interdiction des aides . Puisque les aides d' État troublent le système de concurrence non faussée voulu par le traité, et puisque les États membres sont tenus en vertu de l' article 5 du traité CEE de faciliter à la Communauté l' accomplissement de sa mission, il est absolument justifié que le comportement des États membres soit soumis à des conditions plus strictes que le comportement des entreprises . L' article 92 contient de surcroît sous ses paragraphes 2 et 3 un système de dispositions dérogatoires plus différencié que ce que prévoit par exemple l' article 85, paragraphe 3, du traité CEE . C' est ainsi que certaines aides sont en principe compatibles avec le marché commun aux termes de l' article 92, paragraphe 2, et que certaines aides peuvent être considérées par la Commission comme compatibles avec le marché commun aux termes de l' article 92, paragraphe 3, sous a ) à c ). En outre, aux termes de l' article 92, paragraphe 3, sous d ), le Conseil, sur proposition de la Commission, peut autoriser d' autres formes d' aides, donc des aides qui ne sont en principe pas compatibles avec les dispositions intrinsèques de l' article 92 .
17 . Compte tenu de la vaste portée de ces dispositions dérogatoires, on ne peut pas penser qu' il pourrait encore exister d' autres dérogations non écrites à l' interdiction des aides . C' est pourquoi il est impossible de se rallier à la thèse selon laquelle l' article 92 du traité CEE ne s' appliquerait qu' aux seules entraves sensibles à la concurrence et aux échanges intracommunautaires .
18 . De même, la décision de la Commission du 17 juin 1975 ( 5 ), selon laquelle les aides en application de la loi belge du 17 juillet 1959 ne peuvent notamment être octroyées que lorsque les cas individuels ou significatifs ont préalablement été communiqués à temps à la Commission, ne peut être interprétée en ce sens que la Commission accorderait dans le cadre de l' article 92 du traité CEE à la notion d' effet sensible l' importance que lui attribuent les requérants . Cette décision ne pouvait se référer qu' à l' obligation d' information incombant au royaume de Belgique, sans faire allusion aux critères matériels au regard desquels la licéité d' une aide doit être examinée . Ces critères, en dépit de toutes les compétences conférées à la Commission dans la procédure de vérification des aides, et en particulier en matière de pouvoir discrétionnaire, sont fixés par l' article 92 du traité CEE lui-même, dont la Commission n' est pas autorisée à s' écarter .
19 . Du reste, dans l' hypothèse où on entendrait prêter à cette décision une signification concrète, à l' encontre de la thèse que nous soutenons, l' aide présentement en cause entrerait dans le cadre des dispositions combinées de l' article 2, premier tiret, et de l' article 1er, deuxième tiret, et devrait donc être considérée comme "sensible ".
20 . Puisque la défenderesse indique que le producteur qui bénéficierait de l' aide exporte environ 50 % de sa production de verre plat dans les autres États membres et 20 % dans les États tiers, les 30 % restants étant vendus ou transformés à l' intérieur de l' Union économique du Benelux, donc dans une zone de trois États membres de la Communauté européenne, on ne peut contester que le producteur en cause participe aux échanges intracommunautaires . Si ce producteur est déchargé de frais d' investissement qu' il aurait normalement dû supporter lui-même et dont ses concurrents non bénéficiaires de l' aide ne sont pas déchargés, il est évident que sa situation concurrentielle est améliorée et que la concurrence à l' intérieur du marché commun est ainsi faussée . Compte tenu du volume des exportations du producteur en cause, il faut de surcroît admettre que les échanges intracommunautaires sont également affectés . Il convient d' indiquer dans ce contexte que l' entreprise qui bénéficierait de la mesure d' aide projetée est en concurrence avec d' autres producteurs non seulement en ce qui concerne les produits sur lesquels portaient les mesures concrètes d' investissement, mais aussi pour l' ensemble de sa gamme de produits . Il est donc indifférent que le produit précis concerné par l' investissement en cause fasse concurrence à des produits d' autres producteurs de la Communauté; ce qui est en revanche décisif, c' est que la situation financière d' ensemble d' un producteur est améliorée, de sorte qu' il pourrait par exemple offrir, même pour des produits non concernés par la subvention en cause, des prix plus avantageux que ceux de ses concurrents .
21 . Cette première conclusion demeure en dépit du fait que la défenderesse a pu procéder dans ce contexte à certaines évaluations qui n' étaient peut-être pas justifiées compte tenu de la situation de fait . La défenderesse a en effet exposé que les difficultés de l' industrie du verre plat, dues à une stagnation de la demande et à un faible taux d' utilisation des capacités, auraient eu des effets négatifs sur la structure bénéficiaire des entreprises et auraient entraîné la réduction de leurs effectifs et la fermeture d' unités de production . Elle a en outre évalué les excédents de capacités de la Communauté à Dix dans ce secteur, pour les années 1982 à 1984, à environ 10 à 16 % de la capacité totale .
22 . Les requérants n' ont pas contesté pour l' essentiel les arguments de la défenderesse sur le taux d' utilisation des capacités, certaines divergences devant être admises à cet égard compte tenu des méthodes d' évaluation des capacités . En revanche, l' opinion de la défenderesse selon laquelle un taux d' utilisation des capacités de 84 à 90 % doit être considéré comme faible est indifférente en l' espèce . Si ces chiffres avaient correspondu à un taux faible, la décision de la défenderesse ne serait pas contestable; s' il s' agissait en revanche d' un taux normal ou même élevé, cela prouverait seulement que l' octroi d' une aide aurait été superflu et que la défenderesse pouvait donc à plus forte raison la refuser . Il ressort du reste des observations déposées par la requérante Glaverbel au cours de la procédure administrative qu' elle aussi a été contrainte de supprimer certains secteurs de production . De surcroît, le comportement même de l' entreprise concernée indique que l' aide n' était pas nécessaire, puisqu' elle avait effectué les investissements en cause dès les années 1982 et 1983, alors que l' État belge avait effectivement fait certaines promesses concernant la mesure de soutien, mais que les autorités belges n' avaient pas encore pris de décision définitive, en l' absence en particulier de l' accord de la défenderesse . Le projet d' investissement a donc pu être exécuté sur la base des seules lois du marché, de sorte qu' il n' était nul besoin d' une aide d' État . Si l' aide était cependant accordée maintenant, elle ne vaudrait plus que pour l' avenir et améliorerait l' ensemble des résultats d' exploitation de l' entreprise bénéficiaire, mais elle n' irait plus à un projet concret .
23 . C' est donc à juste titre que la Commission a vu dans la mesure belge projetée une aide, et elle en a suffisamment indiqué les motifs, si on considère en particulier que les parties prenantes étaient parfaitement informées de la situation tant de l' entreprise concernée que du secteur économique concerné . Le fait que la défenderesse a peut-être repris dans sa décision des remarques erronées ou seulement superflues ne peut pas porter atteinte à la validité de sa décision, dans la mesure où la partie matériellement exacte des motifs peut suffire à justifier la décision . C' est le cas en l' espèce, puisque la défenderesse a établi que l' aide projetée correspond aux critères de l' article 92, paragraphe 1 .
2 . Sur l' article 92, paragraphe 3, sous c ), du traité CEE
24 . Le grief suivant est tiré du fait que la défenderesse n' a pas accordé de dérogation à l' interdiction des aides sur la base de l' article 92, paragraphe 3, sous c ), et qu' elle n' aurait pas dûment motivé son refus d' admettre une dérogation .
25 . Il convient, en premier lieu, de retenir sur ce grief que la défenderesse s' est fondée à juste titre sur le principe selon lequel, pour assurer un fonctionnement régulier du marché commun et pour réaliser les objectifs de l' article 3, sous f ), du traité CEE, il faut interpréter de façon étroite les dispositions dérogeant à l' article 92, paragraphe 1, du traité CEE, à l' occasion de l' examen de chaque régime d' aide ou de chaque aide individuelle . En s' en tenant à cette attitude de base, la défenderesse a estimé que la rénovation d' une ligne de verre flotté qui doit être effectuée tous les six à neuf ans constitue, en principe, un investissement de remplacement dont le coût doit être imputé sur les frais d' exploitation . Il serait tout à fait habituel, et conforme à l' intérêt du producteur, d' utiliser les techniques et les matériaux les plus modernes et les plus performants afin d' abaisser les frais d' exploitation . Par conséquent, une aide en faveur de la rénovation périodique d' une ligne de verre flotté ne répondrait pas aux exigences du développement d' un secteur économique; elle altérerait obligatoirement les conditions des échanges dans une mesure contraire à l' intérêt commun au sens de l' article 92, paragraphe 3, sous c ).
26 . Lorsqu' on examine la question de savoir si ces arguments étayent suffisamment le refus d' accorder une dérogation à l' interdiction générale des aides, il convient, en premier lieu, d' indiquer que l' octroi d' une telle dérogation relève du pouvoir discrétionnaire de la Commission . C' est un fait établi, même s' il importe, après avoir constaté que les critères de l' article 92, paragraphe 1, du traité CEE sont réunis, d' examiner si les dispositions dérogatoires de l' article 92, paragraphe 3, du traité peuvent s' appliquer ( 6 ).
27 . L' exercice du pouvoir discrétionnaire n' est soumis qu' à un contrôle limité de la Cour . Si les conditions de l' article 92, paragraphe 3, du traité CEE sont réunies, la Commission peut déclarer l' aide compatible avec le marché commun; mais nul ne peut faire valoir un droit à obtenir cette dérogation . Cela résulte de l' interdiction de principe des aides posée par l' article 92, paragraphe 1, du traité CEE .
28 . L' argument de la défenderesse selon lequel le coût de la rénovation périodique nécessaire d' une ligne de production de verre plat est un investissement de remplacement ressortissant donc, en principe, aux coûts d' exploitation de l' entreprise n' est pas contestable, puisqu' une rénovation régulière utilisant les techniques et les matériaux les plus modernes et les plus performants doit être considérée comme une démarche économique absolument normale . Pareil investissement s' effectue normalement sans intervention de l' État; on ne saurait donc considérer que la subvention étatique projetée facilite le développement d' un secteur économique ( 7 ).
29 . Puisque la défenderesse a ainsi établi pourquoi à son sens l' une des deux conditions cumulativement exigées par l' article 92, paragraphe 3, sous c ), du traité CEE n' est de toute façon pas remplie, elle n' avait plus à examiner le deuxième critère posé par cet article . Cependant, d' une façon qui n' est peut-être pas tout à fait compréhensible au premier abord, elle a recherché si l' aide projetée altérait les conditions des échanges dans une mesure contraire à l' intérêt commun . Puisque cet examen n' était pas nécessaire, on l' a dit, même dans l' hypothèse où certains de ses arguments s' avéreraient non pertinents, cela ne changerait rien à la légalité du refus d' accorder la dérogation .
30 . Puisque la requérante Glaverbel a elle-même déclaré au cours de la procédure administrative que de nombreuses unités de production de verre plat avaient dû être fermées dans le passé, et qu' il n' est pas contesté non plus que, même après ces fermetures, 10 à 16 % de capacités excédentaires ont encore subsisté dans la Communauté, l' opinion de la défenderesse selon laquelle l' aide projetée affecterait les conditions des échanges dans une mesure contraire à l' intérêt commun, même si les investissements allaient de pair avec des innovations techniques, est irréfutable . Compte tenu de la part importante des exportations dans la production totale de l' entreprise concernée, la subvention altère les conditions des échanges par rapport à la situation qui existerait en l' absence d' aide; compte tenu de l' utilisation toujours partielle des capacités de cette branche dans la Communauté, même après la fermeture de nombreuses unités de production ( 8 ), une mesure unilatérale d' aide émanant d' un seul État ne peut être dans l' intérêt commun, puisqu' elle aurait nécessairement pour conséquence d' obliger d' autres entreprises d' autres États membres à percevoir elles aussi des aides comparables pour pouvoir soutenir la concurrence avec l' entreprise aidée . Là encore, il n' est pas nécessaire d' examiner en détail dans quelle mesure le produit aidé est concurrent d' autres produits puisque, comme on l' a exposé, il faut se baser sur la situation financière globale de l' entreprise aidée, dont la charge serait sans aucun doute allégée par l' aide projetée .
31 . Lorsque les requérants font ensuite grief à la défenderesse de n' avoir pas tenu compte dans sa décision de ce que l' aide projetée serait allée de pair avec une restructuration de l' entreprise, il faut reconnaître que le terme de "restructuration" n' apparaît effectivement pas dans la décision de la Commission . Mais il en va de même dans les documents que le royaume de Belgique et la requérante Glaverbel ont soumis à la Commission . Cependant, sur le fond, la défenderesse a évoqué une partie du problème de la restructuration dans les développements qu' elle a consacrés aux innovations techniques liées aux investissements . Il convient du reste de remarquer que, selon l' exposé de la requérante Glaverbel, les mesures de restructuration de l' entreprise étaient pour l' essentiel terminées en 1983 et qu' elles ont été antérieures aux investissements qui auraient dû bénéficier de l' aide présentement en cause .
32 . La défenderesse était donc en droit de rejeter la demande de dérogation à l' interdiction générale des aides, et elle a suffisamment motivé ce refus . C' est pourquoi ce grief des requérantes est inopérant .
3 . Sur l' article 92, paragraphe 3, sous b ), du traité CEE
33 . Les requérants font également grief à la défenderesse de ne pas s' être conformée à l' obligation de motiver les textes que lui impose l' article 190 du traité CEE, en disposant que l' aide en cause n' était manifestement pas destinée à promouvoir la réalisation d' un projet important d' intérêt européen commun .
34 . A propos de ce motif, effectivement très lapidaire, la défenderesse a déclaré au cours de la procédure qu' un projet peut être classé comme projet d' intérêt européen commun lorsqu' il fait partie des programmes transnationaux européens, qu' il est soutenu conjointement par les différents gouvernements de façon harmonisée, ou qu' il fait partie d' une action concertée par les différents États membres . La rénovation ou la modernisation de l' une des vingt-cinq lignes de production de verre plat existant dans la Communauté ne peut pas être considérée comme un projet de ce type .
35 . Selon une jurisprudence constante, la motivation d' une décision faisant grief doit permettre à la Cour d' exercer son contrôle sur la légalité et fournir à l' intéressé les indications nécessaires pour savoir si la décision est ou non bien fondée ( 9 ).
36 . L' obligation de motiver les décisions doit, par principe, être fonction du contexte dans lequel celles-ci interviennent et de ce que les parties ont exposé au cours de la procédure administrative . Il n' est pas nécessaire que la Commission, dans une décision concernant un problème sur lequel les parties sont parfaitement informées, rentre dans chaque détail envisageable 0(1 ), même si celui-ci n' a pas été évoqué au cours de la procédure administrative .
37 . C' est le cas en l' espèce . Ni le gouvernement belge ni la société Glaverbel n' ont fait valoir au cours de la procédure administrative qu' il s' agirait d' un "projet important d' intérêt européen commun ". Ils ont seulement laissé entendre que l' investissement renforcerait la situation de la Communauté sur les marchés à l' exportation et garantirait l' indépendance de la Communauté à l' égard des importations .
38 . Si l' établissement d' une politique commerciale commune envers les États tiers fait partie des principes de la Communauté en vertu de l' article 3, sous b ), du traité CEE, et si cette politique commerciale contribue notamment au développement harmonieux du commerce mondial en vertu de l' article 110 du traité CEE, il semble bien effectivement que la recherche de l' autarcie et l' effort de conquête des marchés mondiaux ne puissent pas être considérés comme constituant un projet important d' intérêt européen commun . Il n' était effectivement pas nécessaire d' indiquer d' autres motifs .
39 . L' allusion au fait que Glaverbel participe, dans le cadre du programme "ESPRIT" 1(1 ), à la mise au point de cellules photovoltaïques ne justifie pas non plus une révision de ce jugement . On pourrait certes considérer ce programme dans son ensemble comme un "projet important d' intérêt européen commun ". Cela ne vaut cependant pas automatiquement pour chacun des 220 projets ESPRIT que la Commission a choisis, parmi lesquels 201 sont en cours d' exécution 2(1 ). Les requérants auraient dû là expliquer eux-mêmes en quoi ce projet précis était d' "intérêt européen commun" et dans quelle mesure il pouvait être rattaché en quoi que ce soit aux investissements effectués durant les années 1982 et 1983 . Ils n' en ont rien fait .
40 . Compte tenu de la brièveté apodictique de l' indication donnée par les requérants, le refus tout aussi apodictique de la défenderesse n' appelle aucune critique .
C - Conclusion
41 . Nous vous proposons, par conséquent, de rejeter les recours et de condamner les requérants aux dépens .
(*) Traduit de l' allemand .
( 1 )
JO L 77 du 19.3.1987, p . 47 .
( 2 ) Voir arr t du 11 juillet 1984 dans l' affaire 222/83, Commune de Differdange et autres/Commission des Communaut s europ ennes, Rec . p . 2889, 2896 .
( 4 ) Soit environ 1,6 million d' cus au cours convertible du 28 novembre 1986 : voir Bull . CE 11-1986, p . 144; la d cision contest e est dat e du 3 d cembre 1986 .
( 5 ) Voir, en particulier, arr t du 17 septembre 1980 dans l' affaire 730/79, Philip Morris Holland BV/Commission des Communaut s europ ennes, Rec . p . 2671 .
( 5 ) JO L 177 du 8.7.1975, p . 13 .
( 6 ) Voir arr t du 14 octobre 1987 dans l' affaire 248/84, R publique f d rale d' Allemagne/Commission, Rec . p . 4013 .
( 7 ) Voir arr t pr cit dans l' affaire 730/79, points 23 et 24 .
( 8 ) Voir les chiffres indiqu s dans l' aide-m moire du GEPVP, dans la colonne de droite du tableau, p . 4, et dans la deuxi{me colonne du premier tableau, p . 6 . Il met en vidence un exc dent de capacit s de 20 } 25 % entre la capacit install e et les ventes effectives .
( 9 ) Voir, en particulier, les arr ts du 10 juillet 1986 dans les affaires 234/84 et 40/85, Royaume de Belgique/Commission, Rec . p . 2263 et 2321 .
( 1)0 Voir } cet gard, en dernier lieu, arr t du 17 novembre 1987 dans les affaires jointes 142 et 156/84, BAT et autres/Commission, Rec . p . 4487, point 72 .
( 1)1 D cision du Conseil du 28 f vrier 1984 relative } un programme europ en de recherche et de d veloppement dans le domaine des technologies de l' information ( JO L 67 du 9.3.1984, p . 54 ).
( 1)2 Voir Vingti{me Rapport g n ral sur l' activit des Communaut s europ ennes, 1986, p . 186 et 187, sp cialement point 403 .