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Document 61979CC0093
Opinion of Mr Advocate General Mayras delivered on 6 December 1979. # Commission of the European Communities v Italian Republic. # Failure of a State to fulfil its obligations - Approximation of laws - Weighing machines. # Case 93/79.
Conclusions de l'avocat général Mayras présentées le 6 décembre 1979.
Commission des Communautés européennes contre République italienne.
Manquement d'État - Rapprochement des législations - Instruments de pesage.
Affaire 93/79.
Conclusions de l'avocat général Mayras présentées le 6 décembre 1979.
Commission des Communautés européennes contre République italienne.
Manquement d'État - Rapprochement des législations - Instruments de pesage.
Affaire 93/79.
Recueil de jurisprudence 1979 -03837
ECLI identifier: ECLI:EU:C:1979:282
CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL M. HENRI MAYRAS,
PRÉSENTÉES LE 6 DÉCEMBRE 1979
Monsieur le Président,
Messieurs les Juges,
La présente affaire en manquement contre l'Italie n'est pas sans présenter d'étroites analogies avec d'autres affaires du même type que vous avez jugées dans le passé. Aussi nous permettrons-nous de vous présenter des conclusions relativement brèves.
I — |
La Commission reproche à la République italienne d'avoir manqué à ses obligations communautaires en ne prenant pas, dans le délai prescrit, les mesures nécessaires pour transposer en droit interne les dispositions de la directive 75/410/CEE du Conseil du 24 juin 1975. Cette directive concerne le rapprochement des législations des États membres relatives aux instruments de pesage totalisateur continu. Ceux-ci sont des instruments de pesage à fonctionnement automatique ayant pour but la détermination de la masse d'un produit en vrac, sans fractionnement systématique, le mouvement de la bande étant ininterrompu. Ce texte s'inscrit dans une série de directives relatives aux instruments de mesure et a été prévu expressément par le programme général en vue de l'élimination des entraves techniques aux échanges résultant des disparités entre les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres, adopté par le Conseil le 28 mai 1969. Le rapprochement des dispositions nationales impératives, qui diffèrent d'un État membre à l'autre, dans le domaine d'application de la directive a donc pour but de libérer de toute entrave les échanges commerciaux dans ce secteur. Le délai donné aux États par la directive pour s'y conformer et informer la Commission des mesures qu'ils avaient prises en ce sens était, aux termes de son article 4, de dix-huit mois à compter de sa notification. La directive ayant été notifiée le 27 juin 1975, le délai a donc expiré le 27 décembre 1976. Il n'est pas contesté que, jusqu'à cette date, l'adaptation nécessaire des dispositions juridiques italiennes n'a pas été effectuée. Devant cette carence, la Commission a, par lettre du 16 juin 1977, demandé au gouvernement italien de bien vouloir lui faire connaître ses observations dans un délai de deux mois, conformément aux dispositions de l'article 169, alinéa 1, du traité CEE. Le gouvernement italien n'y réagit qu'en demandant une prolongation de ce délai. Celle-ci lui fut accordée jusqu'au 16 septembre 1977. Une nouvelle demande de prorogation fut introduite le 31 octobre par la Représentation permanente de l'Italie auprès de la Commission. La Représentation permanente faisait en même temps savoir que les autorités nationales responsables s'employaient activement à opérer l'intégration de la directive dans le droit national, ce qui, semble-t-il, demandait des efforts importants. En mai 1978, la Représentation permanente faisait savoir à la Commission que le gouvernement italien avait approuvé, le 14 avril, un décret-loi par lequel était opérée la transposition en droit italien de la directive en cause. Malheureusement, en vertu de l'article 77 de la Constitution italienne, un décret-loi perd tous ses effets, et ceci dès son entrée en vigueur, s'il n'est pas converti en loi dans les 60 jours après sa publication. Or, la Commission ne reçut ultérieurement aucune information lui permettant de conclure que ce résultat avait été obtenu. Le gouvernement italien ne le contesta d'ailleurs pas. Aussi, le 13 juillet 1978, soit plus de deux ans après sa lettre par laquelle elle invitait le gouvernement à présenter ses observations, la Commission émit-elle l'avis motivé prescrit par l'article 169, alinéa 1, du traité CEE. L'Italie étant restée muette dans le délai de deux mois prévu par l'avis pour qu'elle en observe les termes, la Commission saisit alors la Cour le 22 mai 1979. Dans sa requête, elle vous demande de déclarer que, pour n'avoir pas adopté dans les délais prescrits les dispositions nécessaires pour se conformer à la directive 75/410 du Conseil, la République italienne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de ce texte. Le gouvernement italien ne répondit pas à ce grief par un mémoire en défense conforme aux règles, mais seulement par une courte lettre. Dans cette lettre, le gouvernement italien indiquait que, malgré tous ses efforts, il n'avait pu s'acquitter de ses obligations en raison d'événements politiques, particulièrement la dissolution anticipée des chambres. Celle-ci avait ainsi empêché que le décret-loi entré en vigueur le 23 avril 1978 pût être transformé en loi par le Parlement, ce qui lui avait fait perdre toute valeur. Cet aveu conduisit la Commission à renoncer à la présentation d'une réplique. |
II — |
Vous êtes familiers, Messieurs, des problèmes juridiques que pose ce genre d'affaires. Comme le soulignait M. l'avocat général Reischl dans ses conclusions sur l'affaire 100/77 (CJCE 11 avril 1978, Commission/Italie, Recueil 1978, p. 879, spécialement p. 891), il existe déjà une jurisprudence claire et détaillée de votre part en ce qui concerne la mise en application de directives dans les délais prévus. Nous vous rappelons, à ce sujet, les arrêts que vous avez rendus dans les affaires 79/72 (Commission/ République italienne, arrêt du 21 juin 1973, Recueil 1973, p. 667), 52/75 (Commission/République italienne, arrêt du 26 février 1976, Recueil 1976, p. 277), 10/76 (Commission/République italienne, arrêt du 22 septembre 1976, Recueil 1976, p. 1359). A ces arrêts cités par M. l'avocat général Reischl, il faut aujourd'hui ajouter votre arrêt du 11 avril 1978, rendu dans l'affaire 100/77 (précité), et votre arrêt du 22 février 1979, rendu dans l'affaire 163/78 (Commission/République italienne, Recueil 1979, p. 771). Dans votre arrêt du 26 février 1976, vous avez marqué l'importance pour un État de respecter les délais imposés par les directives dans les termes suivants: «l'exacte application d'une directive est d'autant plus importante que les mesures d'exécution sont laissées à la discrétion des États membres et que, faute d'atteindre dans les délais fixés les objectifs visés, de tels actes seraient privés d'efficacité; si, à l'égard des État membres destinataires, les dispositions d'une directive ont un effet non moins contraignant que celui d'une autre règle de droit communautaire, un tel effet appartient à plus forte raison aux dispositions relatives au délai pour la mise en œuvre des mesures prévues, notamment du fait qu'au-delà de l'expiration de ce délai la disparité des régimes appliqués dans les État membres pourrait engendrer des discriminations.» Il est d'autre part de jurisprudence constante qu'un État membre ne saurait exciper de dispositions, pratiques ou situations de son ordre interne, même constitutionnel, pour justifier le non-respect des obligations et délais résultant des directives communautaires, ainsi que le rappelle votre arrêt du 22 février 1979 (précité). Cet arrêt n'est d'ailleurs que le dernier, remarquable par sa concision, de la jurisprudence citée plus haut. |
Dans ces conditions, nous ne pouvons que vous inviter à adopter la déclaration demandée par la Commission, suivant laquelle, en n'adoptant pas, dans les délais prescrits, les dispositions nécessaires pour se conformer à la directive 75/410/CEE du Conseil du 24 juin 1975 concernant le rapprochement des législations des État membres relatives aux instruments de pesage totalisateur continu, la République italienne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive. De plus, la République italienne doit, évidemment, être condamnée aux dépens.