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Document 61977CC0122
Opinion of Mr Advocate General Reischl delivered on 5 October 1978. # Augusta Agneessens and others v Commission of the European Communities. # Case 122/77.
Conclusions de l'avocat général Reischl présentées le 5 octobre 1978.
Augusta Agneessens et autres contre Commission des Communautés européennes.
Affaire 122/77.
Conclusions de l'avocat général Reischl présentées le 5 octobre 1978.
Augusta Agneessens et autres contre Commission des Communautés européennes.
Affaire 122/77.
Recueil de jurisprudence 1978 -02085
ECLI identifier: ECLI:EU:C:1978:171
CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL M. GERHARD REISCHL;
PRÉSENTÉES LE 5 OCTOBRE 1978 ( 1 )
Monsieur le Président,
Messieurs les Juges,
Par règlement no 1473/72 du Conseil (JO no L 160, du 16. 7. 1972) des emplois types nouveaux d'assistants de secrétariat adjoints, de la carrière B 5/B 4 ont été introduits à l'annexe 9 du statut des fonctionnaires.
L'autorité budgétaire ayant décidé, en application de ces dispositions, la transformation — de la catégorie C en B — d'un certain nombre de postes à la Commission, cette dernière a publié, en juillet 1976, l'avis de concours interne COM/BS/14/75, en vue de la constitution d'une liste de réserve d'assistants de secrétariat adjoints de la carrière B 5/B 4. La sélection devait s'opérer sur titres et, le cas échéant — si le jury en décidait ainsi — sur épreuves; cette dernière modalité n'a en fin de compte pas été retenue. L'avis de concours indiquait les conditions d'admission (notamment: diplôme de fin d'études et expérience professionnelle) ainsi que certains critères dont le jury devait tenir compte lors de l'établissement de la liste d'aptitude.
Le nombre des candidates qui ont fait acte de candidature à ce concours était de 775. Comme le prévoit le statut des fonctionnaires, un jury composé d'un président et de deux membres a été constitué entre le 22 septembre et le 8 octobre 1976. Il a examiné en premier lieu quelles étaient les candidates remplissant les conditions d'admission. Il y en avait 550 — selon une liste établie le 13 octobre 1976 — parmi lesquelles toutes les requérantes, à l'exception de Mlle Wilhelmina Scheffelaar. Le même jour, le jury a désigné (et c'est là un premier point en litige) un comité d'assesseurs, composé d'un président et de dix membres — cinq représentants de l'administration et cinq représentants du personnel chargé d'assister le jury dans le déroulement de la procédure. Ces assesseurs — nous reviendrons par la suite sur les détails concernant la fixation des critères et le contrôle exercé par le jury — ont examiné les candidatures sur la base de critères dits objectifs, tels que l'âge, l'ancienneté dans le service, les diplômes et le grade. Au début de novembre 1976, le comité des assesseurs a informé le jury de ce qu'il y avait lieu, en fonction de ces critères, de retenir 247 candidates. L'examen de ces candidatures s'est alors poursuivi par l'appréciation des «qualités professionnelles». Il semble qu'à cet égard, les dossiers des candidates, et en particulier les rapports établis conformément aux dispositions de l'article 43 du statut, aient joué un rôle. En outre — et c'est là un autre point controversé en l'espèce — les directions générales ou services auxquels étaient affectées ces candidates ont été contactés pour avis. Il en est résulté un projet de liste d'aptitude, qui a été communiqué au jury le 6 décembre 1976, accompagné d'un rapport du 2 décembre 1976. Après d'ultimes délibérations, les 6, 7 et 8 décembre, le jury a finalement soumis à l'autorité investie du pouvoir de nomination un rapport sur la procédure de recrutement ainsi qu'une liste d'aptitude comprenant les noms de 114 candidates. Parmi elles, 109 ont été nommées en novembre 1977 au grade B 5.
Parce qu'elles n'avaient pas été inscrites sur la liste d'aptitude, les requérantes en l'espèce ont adressé, en mars 1977, une réclamation formelle à l'autorité investie du pouvoir de nomination. Elles ont demandé l'annulation de la décision du jury fixant la liste d'aptitude ainsi que l'annulation des décisions de nomination prises par l'autorité investie du pouvoir de nomination sur la base de cette liste. Après rejet de cette réclamation, notifié par lettre du 12 juillet 1977, les requérantes ont formé le 10 octobre 1977 un recours devant la Cour de justice, concluant à ce qu'il plaise à la Cour:
— |
annuler la décision du jury du concours interne COM/BS/14/75 relative à l'établissement et au contenu d'une liste de 114 lauréates, et |
— |
annuler la décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination de nommer en suite de ce concours. |
Sur ces deux chefs de demande, nous présentons les conclusions suivantes:
I — |
Il se pose en premier lieu un problème de recevabilité en ce qui concerne le recours formé par Mlle Scheffelaar. La Commission se réfère à cet égard au fait déjà mentionné, que la requérante ne figure pas au nombre des candidates admises au concours. D'autre part, il résulte de la demande que le recours ne vise pas la phase même de l'admission, mais uniquement la phase postérieure à l'admission, correspondant à la sélection opérée entre les candidates admises au concours. Dès lors, Mlle Scheffelaar doit être considérée, selon la Commission, comme n'ayant pas d'intérêt pour agir dans le cadre de la présente procédure, étant donné que même s'il était fait droit au recours, et la liste d'aptitude établie ultérieurement annulée, les titres de la requérante ne pourraient être examinés. Mlle Scheffelaar a fait valoir, à cet égard, qu'elle avait déposé à l'époque — le 5 novembre 1976 — une réclamation du fait de sa non-admission au concours. Elle n'a reçu, dans un premier temps, aucune réponse de l'administration. Elle n'a obtenu de réponse qu'en même temps que les autres requérantes, en juillet 1977, cette lettre ayant le même libellé que la réponse de l'autorité investie du pouvoir de nomination aux réclamations des autres requérantes. Elle avait légitimement pu supposer, selon elle, que l'administration était revenue sur sa décision de ne pas l'admettre au concours et qu'elle se trouvait donc au nombre des candidates admises. Mais si tel n'était pas le cas en réalité, la Commission devrait, au minimum, être condamnée aux dépens de l'instance, étant donné qu'elle a induit la requérante en erreur en lui notifiant la lettre de réponse du mois de juillet 1977. A notre avis, il y a lieu de faire droit à l'exception d'irrecevabilité soulevée par la Commission. Ce qui importe à cet égard, c'est que l'intéressée a été informée, immédiatement après la fin de la phase d'admission, par lettre du 26 octobre 1976, de ce qu'elle ne remplissait pas les conditions requises pour l'admission. On peut également admettre que sa réclamation — qui, au contraire d'autres requêtes (voir le rapport du jury de concours du 10. 12. 1976) n'a pas tout de suite fait l'objet d'une décision expresse — est demeurée sans succès. Sur ce point, il nous semble qu'une assurance formelle donnée par la Commission suffit en l'espèce. Il n'est donc pas nécessaire, par exemple, de démontrer, en produisant la liste des candidates admises, que Mlle Scheffelaar n'a pas été admise au concours. Étant donné cependant que la présente instance ne concerne que les opérations postérieures à la phase d'admission, et que cette dernière n'est pas en soi en cause, il y a lieu, en effet, de dénier à la requérante Scheffelaar un intérêt à attaquer le déroulement ultérieur de la procédure de recrutement. En ce qui concerne les dépens, nous partageons, bien entendu, la thèse de la requérante. En effet, l'administration aurait dû l'informer de manière claire, suite à sa réclamation, de ce qu'elle n'avait pas été admise à concourir. Il n'en a pas été ainsi; bien au contraire, elle a simplement reçu en juillet 1977, comme d'ailleurs les autres requérantes, notification de la décision précitée, laquelle ne fait aucune référence à sa non-admission au concours. La requérante pouvait donc, en effet, supposer que la Commission était revenue sur sa décision de ne pas l'admettre au concours et qu'elle ne faisait que rejeter les griefs afférents à la phase ultérieure de la procédure de recrutement. La requérante Scheffelaar a, par suite, été induite en erreur du fait du comportement de la Commission, ce qui a été à l'origine du recours. Aux termes de l'article 69, paragraphe 3, alinéa 2, la Cour peut condamner une partie, même gagnante, à rembourser à l'autre partie les frais qu'elle lui a fait exposer et que la Cour reconnaît comme frustratoires ou vexatoires. Cette condition étant manifestement remplie, les dépens exposés par Mlle Scheffelaar aux fins du présent recours, par ailleurs irrecevable, doivent être en tous cas mis à la charge de la Commission. |
II — |
En ce qui concerne le fond, auquel nous voulons nous consacrer à présent, le litige — nous faisons abstraction des détails pour l'instant — porte, en premier lieu, sur la question de savoir si le jury pouvait s'adjoindre des assesseurs et, dans l'affirmative, quelles tâches pouvaient leur être confiées. En outre, le principe de l'égalité de traitement des candidates revêt également de l'importance en l'espèce, ainsi que notamment, le fait qu'au cours de la procédure de recrutement, des renseignements ont été demandés auprès des directions générales ou des services auxquels les candidates étaient affectées. Enfin, il y a lieu également d'examiner si le fait que la liste d'aptitude établie par le jury ne comportait que les noms de 114 candidates, peut susciter des critiques. |
1. Sur l'intervention d'assesseurs
a) |
A cet égard, une première question est de savoir si l'intervention d'assesseurs dans le cadre d'un concours sur titres — en l'absence d'épreuves, qu'on aurait d'ailleurs pu envisager — peut être admise en droit. Les requérantes s'y opposent avec insistance et rappellent l'article 3, paragraphe 2, de l'annexe III du statut des fonctionnaires qui dispose: «Le jury peut faire appel, pour certaines épreuves, à un ou plusieurs assesseurs ayant voix consultative». Compte tenu de ce que la condition stipulée à l'article 6 de l'annexe III, selon laquelle les travaux du jury sont secrets, et eu égard au principe de l'indépendance du jury, ce qui exclut toute influence de l'extérieur, elles estiment également que la disposition précitée doit être interprétée de manière stricte. On ne saurait, par suite, envisager l'adjonction d'assesseurs que dans le cas d'épreuves écrites et, tout au plus, pour leur confier certains travaux d'exécution, tels que la notation. En tout état de cause, on ne saurait en aucun cas admettre en l'espèce la nécessité de faire appel à des assesseurs. Selon les requérantes, le jury avait en effet la possibilité d'examiner lui-même, en moins de 15 jours, plus de 700 candidatures et de décider de l'admission au concours. Ainsi, il serait de même difficile d'imaginer que le jury eût pu être débordé s'il avait également examiné lui-même les titres de 550 candidates demeurées en lice et établi en conséquence la liste d'aptitude sans recours à une aide extérieure. Sur ce point, — disons-le tout de suite — nous ne partageons pas l'opinion des requérantes, mais bien celle de la Commission. Cette dernière, comme on sait, rejette une interprétation stricte de la disposition précitée en excipant du principe général de la liberté du jury dans l'organisation de ses travaux et en invoquant également la «ratio legis», laquelle entend manifestement permettre au jury, de manière générale, de se faire assister pour les opérations matériellement difficiles d'une procédure de recrutement. En fait, il n'est pas possible d'inférer, à partir de la nécessité de garantir l'indépendance du jury ou de préserver le caractère secret de ses travaux, un argument déterminant en l'espèce. Il est manifeste que ces deux principes sont tempérés par l'article 3 de l'annexe III, autorisant l'adjonction d'assesseurs, ce qui pourrait signifier, à la rigueur, en ce qui concerne le secret, qu'une obligation analogue pèse également sur les assesseurs. En particulier, on ne saurait inférer de l'article 3 que les assesseurs ne puissent être appelés qu'à l'occasion d'épreuves écrites et leurs fonctions limitées à des tâches matérielles d'exécution, comme le conçoivent les requérantes. Il n'existe aucun indice à cet effet, et cela irait d'ailleurs manifestement à l'encontre du bon sens. II est évident que l'adjonction d'assesseurs peut se révéler appropriée, précisément dans le cas d'épreuves orales également, par exemple lorsqu'il s'agit de vérifier des connaissances particulières, linguistiques ou autres. On voit difficilement comment à cette occasion, leur rôle pourrait être confiné à de simples tâches d'exécution; selon nous, il est clair que la compétence des assesseurs doit être utilisée en pareil cas, également en matière de notation, laquelle peut exiger de l'examinateur des appréciations particulièrement complexes. Or, si la portée de l'article 3 doit, par principe, être entendue dans le sens qui vient d'être indiqué — à notre avis, il n'est pas besoin de préciser que les assesseurs peuvent être chargés, également dans le cadre d'épreuves écrites, de procéder à des appréciations très délicates — on ne voit assurément pas pourquoi on devrait conclure à l'exclusion d'une telle assistance en cas de concours sur titres. Dans ce cas également il se peut que — s'agissant, par exemple, d'apprécier des certificats ou des qualifications nationales — l'avis d'une personne compétente se révèle nécessaire, en l'absence d'avis autorisé au sein du jury. En outre, il convient de tenir compte du volume du travail. Négliger ce dernier aspect pourrait avoir pour conséquence, dans le cas d'un nombre élevé de candidatures, comme dans la présente espèce, qu'une procédure de recrutement, confiée à un jury se composant de trois membres, prenne un temps anormalement long, ce qui irait sans nul doute à l'encontre à la fois des intérêts du personnel et du service. Si, reprenant l'argumentation des requérantes, nous examinons en outre s'il y avait véritablement, en l'espèce, nécessité de recourir à des assesseurs, il résulte de l'ensemble des faits soumis à l'appréciation de la Cour que rien ne s'y opposait — compte tenu de ce qu'en raison de la marge de pouvoir discrétionnaire reconnue à un jury de concours, le contrôle juridictionnel est assurément limité. A cet égard, il suffit de faire observer qu'il était nécessaire d'examiner et de comparer les diplômes et les qualifications d'un grand nombre de candidates originaires de différents pays. A l'opposé, l'argumentation des requérantes porte à faux lorsqu'elles rappellent que le jury a décidé seul de l'admission des candidates au concours au regard des conditions figurant dans le texte même de l'avis de concours; cette tâche, en effet, était manifestement moins complexe et moins longue que celle se rapportant à l'examen des titres, et notamment à leur examen comparatif. En définitive, compte tenu également de ce que le jury a pris soin de nommer un comité d'assesseurs à composition paritaire, offrant une garantie d'objectivité égale, sinon supérieure, à celle issue de la composition du jury, force est de constater qu'il n'existe assurément aucun motif de critiquer la procédure de recrutement eu égard au premier moyen invoqué par les requérantes. |
b) |
Les requérantes contestent ensuite les modalités suivant lesquelles les assesseurs ont été associés aux travaux du jury. A cet égard, le grief formulé initialement par les requérantes, suivant lequel le jury aurait délibéré en présence d'un groupe d'assesseurs, a apparemment été abandonné, après que la Commission eut donné l'assurance que le jury n'avait à aucun moment délibéré avec les assesseurs sur des cas individuels. Les requérantes invoquent au contraire, d'une part, que le comité d'assesseurs a été chargé, contrairement à l'avis du concours, de prendre en considération «tous autres éléments … qu'il estimerait … valables». D'autre part, elles estiment qu'il y a eu délégation illégale du pouvoir d'appréciation normalement reconnu au jury, au profit des assesseurs. En effet, le jury aurait laissé aux assesseurs le soin de déterminer les critères applicables en vue de garantir une comparaison équitable des qualifications acquises dans les différents États membres. Toujours selon les requérantes, les assesseurs auraient, en outre, décidé de la combinaison des critères objectifs, sur la base desquels il a opéré une première sélection de 247 candidates. Enfin, les assesseurs auraient également modulé les critères objectifs par rapport aux critères subjectifs et, après classement en fonction de cette pondération, présenté un projet de liste d'aptitude. Ces modalités, disent-elles, ne sont certainement pas en accord avec l'arrêt rendu le 16 octobre 1975 par la Cour de justice des Communautés européennes dans l'affaire 90/74, Francine Deboeck/Commission des Communautés européennes (Recueil 1975, p. 1123), à l'occasion duquel la Cour a jugé que les assesseurs ne sauraient avoir qu'une voix consultative, le jury devant garder en dernière instance le contrôle des opérations et son pouvoir d'appréciation. Dans la mesure où ces griefs portent sur le fait que les assesseurs pouvaient également prendre en considération «d'autres éléments», il n'y a assurément aucune violation de l'avis de concours. En effet, celui-ci n'envisage pas de manière limitative les éléments à prendre en considération, comme l'indique clairement le fait que l'énumération, indiquée entre parenthèses à la fin du premier alinéa du point II.3, se termine par trois points de suspension. En outre, on peut estimer également, à la lumière de l'ensemble des documents versés en cours de procédure et, notamment, des déclarations de la présidente du jury, qu'il n'y a pas eu de délégation illicite de compétence au profit des assesseurs, et que les principes reconnus par l'arrêt dans l'affaire 90/74 ont été parfaitement respectés. Selon nos informations, une première étape a consisté à charger les assesseurs de proposer des critères d'appréciation appropriés (13 octobre 1976). Quelques jours après, une réunion commune du jury et des assesseurs a eu lieu, au cours de laquelle le jury a fixé des critères généraux d'appréciation. Le comité a ensuite procédé à un premier examen, fondé sur des critères objectifs, et qui a abouti à l'établissement d'une liste provisoire de 247 candidatures destinées à être prises en considération. Déjà à ce stade des opérations — il n'existe aucun doute à cet égard, d'après les explications fournies par la présidente du jury — ce dernier a entretenu des contacts permanents avec le comité des assesseurs. Ces contacts ont porté sur la prise en compte de critères supplémentaires ainsi que sur la combinaison et la pondération des critères applicables. Le comité des assesseurs a informé le jury à propos de ces différents points et lui a soumis des propositions, auxquelles ce dernier a donné, après examen, son accord; le jury aurait également, de manière très générale, contrôlé le déroulement des travaux, réglé les problèmes qui pouvaient se poser, et, au besoin, donné des instructions supplémentaires aux assesseurs quant à l'application des critères à prendre en considération. Il en a été de même lorsque le comité a poursuivi ses travaux par l'examen des qualités professionnelles des candidates, comme le montre le grand nombre de réunions tenues par le jury au cours du mois de novembre. Finalement, le jury a réexaminé, à l'occasion de trois journées de réunion tenues du 6 au 8 décembre 1976, les résultats obtenus. Selon les explications fournies par la présidente du jury, ce dernier a également cherché à déterminer si, en suivant d'autres critères et à partir d'une approche différente, le résultat aurait été différent. Après avoir procédé lui-même à une étude comparative des titres de l'ensemble des candidates sur la base des dossiers à sa disposition, le jury a arrêté en définitive la liste d'aptitude, qui a été ensuite transmise à l'autorité investie du pouvoir de nomination. Toutes ces considérations autorisent à conclure que, conformément aux indications figurant dans son rapport, les assesseurs ont simplement assisté le jury lors de la détermination des critères, et que le jury lui-même a fixé les critères d'appréciation. Or, si les assesseurs ont effectivement travaillé sous le contrôle du jury, et si donc ce dernier a constamment gardé le contrôle des opérations et apprécié lui-même les titres des candidates, il est difficile dès lors de parler d'une délégation illicite de pouvoirs, qui contraindrait à annuler le concours. |
2. Sur la violation du principe de l'égalité de traitement et des dispositions relatives au caractère secret des travaux d'un jury de concours
A l'issue de la première phase du concours, qui avait abouti sur la base de critères objectifs, à l'établissement de la liste provisoire, le jury et le comité ont poursuivi leurs travaux par l'examen des qualités professionnelles et des mérites des candidates. Les rapports établis conformément à l'article 43 du statut des fonctionnaires ont joué un certain rôle à cet égard. En outre, les directions générales et les services auxquels les candidates étaient affectées ont été saisis pour avis et il est manifeste qu'à cette occasion la direction générale ou le service concerné ont reçu respectivement communication du premier examen.
Sauf erreur de notre part, les requérantes partent de l'idée que les examens complémentaires n'ont eu lieu que pour les candidates figurant sur la première liste provisoire. Elles considèrent qu'une telle modalité constitue une violation du principe de l'égalité de traitement, lequel aurait imposé l'application, dans leur intégralité, de critères identiques à l'ensemble des candidates. En outre, elles estiment que les demandes d'avis adressées aux directions générales et aux services ont porté atteinte au principe de l'indépendance du jury et que, d'autre part, la divulgation des résultats du premier examen constituait une violation du principe selon lequel les travaux du jury doivent rester secrets.
a) |
Sur le premier point, la Commission a expliqué que l'examen des qualités professionnelles ne s'est, en aucune manière, limité aux candidates retenues sur la base de critères objectifs, mais a porté, au contraire, sur l'ensemble des candidates admises au concours. A cet égard, il aurait été tenu compte des rapports établis conformément à l'article 43 du statut des fonctionnaires, tandis que des demandes d'information étaient adressées par ailleurs aux directions générales et aux services concernés. Tous ces éléments sont corroborés sans équivoque par les déclarations de la présidente du jury, au cours de la procédure orale. On peut, en outre, se référer au fait qu'une série de candidates ont été inscrites, à ce stade-là de la procédure, sur la liste d'aptitude, alors que leur nom ne figurait pas encore sur la première liste provisoire et que leur inscription, selon les assurances qui nous ont été données à cet égard ne constituait pas seulement une rectification de la présélection opérée sur des critères objectifs, à laquelle les directions générales et les services avaient, eux aussi, été invités à participer. Une information en sens contraire parue dans le Bulletin du comité du personnel du 24 février est certainement sans importance à cet égard et repose, à notre connaissance, manifestement sur une erreur. Il est certainement impossible, par suite, de relever une violation du principe de l'égalité de traitement; il ne semble pas utile non plus de revenir sur une prétendue violation de ce même principe, tirée du fait que, pour figurer sur la liste d'aptitude, on avait exigé des candidates qui ne répondaient pas aux critères objectifs, des qualifications professionnelles et des mérites particuliers. |
b) |
Quant au deuxième point — complément d'information sollicité auprès des directions générales et des services — il convient de préciser, d'entrée, ce dont il s'agit. La présidente du jury a déclaré, lors de son audition, que seuls avaient été communiqués aux directions générales et aux services les noms des candidates relevant respectivement du service ou de la direction générale concernée, et qu'on avait indiqué à cette occasion si leur candidature avait pu ou non être retenue, sur la base de l'application de critères objectifs. Le jury aurait alors demandé aux services concernés de contrôler l'appréciation qui avait été faite à partir des critères objectifs, ce qui a apparemment abouti à une certaine modification de la première liste provisoire. En outre, des informations auraient été demandées, concernant le niveau des fonctions exercées ainsi que d'éventuels mérites particuliers. Le jury avait jugé cette intervention nécessaire, du fait que les rapports établis conformément à l'article 43 du statut des fonctionnaires ne permettaient pas toujours de se faire une idée exacte de la situation, mais aussi du fait de l'existence de certaines divergences dans l'établissement de ces rapports, entre les différentes directions générales, voire à l'intérieur même d'une direction générale. En outre, l'objet du concours était précisément, entre autres, de sélectionner des candidates exerçant d'ores et déjà des responsabilités plus élevées que celles impliquées par les fonctions afférentes à la catégorie C, et dont le classement n'avait pu être, jusqu'alors, revalorisé.
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3. |
Le dernier grief des requérantes est que la liste d'aptitude ne comporte que les noms de 114 candidates, chiffre à peu près égal au nombre de postes à pourvoir. Selon les requérantes, ce chiffre doit être rapproché des données figurant dans l'avis de concours — lequel dispose que le nombre d'emplois à pourvoir devait être de l'ordre de 100 — ainsi que des nominations intervenues à la suite de ce concours. Dans l'hypothèse où ce nombre résulterait d'une directive de l'autorité investie du pouvoir de nomination, les requérantes pourraient faire grief à cette dernière de s'être départie de son pouvoir de choisir les candidates à nommer et d'avoir de la sorte délégué illégalement son pouvoir de nomination au jury. Si, au contraire, le jury a procédé de son propre chef à une telle limitation, il aurait enfreint par là même les dispositions du statut des fonctionnaires. Selon les requérantes, l'article 30 du statut implique en effet — dans la mesure où il dispose que l'autorité investie du pouvoir de nomination choisit sur la liste d'aptitude les candidats qu'elle nomme aux postes vacants — que la liste d'aptitude comporte un nombre suffisant de noms pour que l'autorité investie du pouvoir de nomination puisse exercer son pouvoir de choisir. En outre, les requérantes se réfèrent à l'article 5 de l'annexe III du statut des fonctionnaires, lequel dispose que, dans toute la mesure du possible, la liste d'aptitude doit comporter un nombre de candidats au moins double du nombre des emplois mis au concours. Selon nous, ces griefs appellent de notre part les commentaires suivants:
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III — |
En résumé, et pour les raisons qui précèdent, il y a lieu de constater que les recours introduits — à l'exclusion du recours de Mlle Scheffelaar — sont recevables, mais qu'ils doivent être rejetés comme non fondés. Quant aux dépens, il y a lieu, de mettre à la charge de la Commission les dépens du recours introduit par Mlle Scheffelaar, en application de l'article 69, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement de procédure. Pour le reste, il y a lieu de régler les dépens conformément à l'article 70 du règlement de procédure. |
( 1 ) Traduit de l'allemand.