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Document 61963CC0097
Opinion of Mr Advocate General Roemer delivered on 27 June 1964. # Luigi de Pascale v Commission of the European Economic Community. # Case 97-63.
Conclusions de l'avocat général Roemer présentées le 27 juin 1964.
Luigi de Pascale contre Commission de la Communauté économique européenne.
Affaire 97-63.
Conclusions de l'avocat général Roemer présentées le 27 juin 1964.
Luigi de Pascale contre Commission de la Communauté économique européenne.
Affaire 97-63.
édition spéciale anglaise 1964 01011
ECLI identifier: ECLI:EU:C:1964:52
Conclusions de l'avocat général
M. KARL ROEMER
24 juin 1964
Traduit de l'allemand
Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
L'affaire pour laquelle nous présentons aujourd'hui nos conclusions a pour objet une question de promotion, tout comme les affaires Raponi et Bernusset contre Commission de la C.E.E.
Par avis de vacance d'emploi publié au Bulletin d'information du personnel du 12 juillet 1963, la Commission a fait savoir qu'un poste de chef de division (grade A 3) était vacant à la direction générale «marché intérieur», direction du droit d'établissement et des services.
Le requérant, qui était au service de la Commission depuis décembre 1958, en qualité de fonctionnaire de grade A 4 à la direction générale du marché intérieur, a posé sa candidature à ce poste. Cependant, la Commission a choisi un autre candidat qui a été nommé chef de division par décision du 29 juillet 1963, avec effet du 16 août 1963.
Le recours en annulation que nous allons maintenant examiner attaque cette décision. Notre travail, ce faisant, sera considérablement facilité par les arrêts de la Cour 27-63, 94 et 96-63 qui, en gros, portent sur les mêmes problèmes.
Cette similitude a amené les parties à renoncer au cours des débats oraux à discuter toute une série d'arguments juridiques qui figurent dans leurs mémoires mais dont on peut considérer qu'ils ont été résolus par les arrêts de la Cour, après la fin de la procédure écrite.
C'est pourquoi nous ne nous arrêterons pas davantage sur les questions suivantes :
1o |
Qui est la partie défenderesse dans le procès, la Communauté économique européenne en tant que telle ou seulement la Commission de la C.E.E. ? |
2o |
L'article 45 du statut du personnel exige-t-il l'adoption de mesures générales d'exécution selon l'article 110 du statut du personnel, notamment l'adoption générale préalable de critères d'appréciation pour le choix du candidat à promouvoir? |
3o |
Les promotions ne pouvaient-elles avoir lieu qu'après la description des emplois prévue à l'article 5 du statut du personnel? |
4o |
Une décision de promotion doit-elle être motivée pour les candidats non promus? |
Seules les méthodes de préparation de la décision de promotion, thème auquel les parties ont consacré la plus grande part de leurs plaidoiries au cours de l'audience, méritent un examen détaillé et cela dans la seule mesure où il s'agit du choix, prescrit d'après l'article 45, du candidat à promouvoir, après appréciation de ses mérites car, d'après la jurisprudence de la Cour, l'absence des rapports d'appréciation prévus à l'article 43 ne peut être considérée comme un vice lors de l'adoption de la décision de promotion.
Dans le cas présent, la procédure de promotion s'est déroulée ainsi: après le dépôt des candidatures, la direction générale de l'administration a commencé par procéder à un examen des exigences légales (ancienneté, grade, etc.). Elle a dit ensuite lequel des candidats admis lui paraissait le plus apte pour le poste vacant. Le chef du groupe de travail du marché intérieur a repris cette proposition qui a été motivée par écrit et communiquée aux autres membres de la Commission par le secrétariat exécutif de la Commission le 26 juillet 1963.
Au cours de sa 238e séance, du 29 juillet 1963, la Commission a décidé de promouvoir le candidat proposé et cela, comme le dit le procès-verbal de la séance, après avoir été saisie des candidatures, après avoir examiné la proposition du chef du groupe de travail du marché intérieur et après avoir procédé à «un examen comparatif des mérites des candidats». On ne sait si, au cours de cette séance, les membres de la Commission ont eu entre les mains les fiches de candidature des différents candidats. L'agent de la Commission l'affirme; le requérant a des doutes sur ce point.
En comparant ces faits avec ceux de l'affaire Bernusset, on constate dans le déroulement extérieur des événements une identité qui va jusque dans les détails. Nous pouvons nous dispenser de le faire de façon plus précise, car les souvenirs du procès Bernusset sont encore frais à nos mémoires.
Nous n'avons donc plus maintenant qu'à nous demander s'il est néanmoins possible, dans le procès actuel, d'envisager les choses sous un angle différent, comme la Commission le prétend en raison de certaines particularités de fait.
Tout d'abord, en fait, il subsiste certains doutes sur la question controversée de savoir si les membres de la Commission ont eu communication des fiches de candidature ou s'ils étaient saisis seulement de la proposition de promotion mentionnée ci-dessus. Le procès-verbal de la Commission où figure la formule «la Commission a été saisie des candidatures» n'est pas parfaitement claire et, bien évidemment, la déclaration de l'agent de la Commission qui assure que la décision de promotion a été correctement préparée n'est pas suffisante. Mais on peut bien supposer que la procédure s'est déroulée tout comme dans l'affaire Bernusset, bien qu'en l'espèce la mention «P. J.» (pièces jointes) ne figure pas dans la communication du secrétariat exécutif. En tout cas, nous voulons nous abstenir de proposer à la Cour d'ouvrir une enquête pour éclaircir ce point.
En outre, à propos des particularités de procédure mentionnées par la Commission, il y a lieu de dire qu'en fait le dossier de candidature soumis par le requérant était tout particulièrement détaillé et de nature à informer les membres de la Commission de tous les détails de sa carrière à la Commission et au dehors.
Cependant, cette circonstance ne devrait pas être essentielle, vu les exigences de l'article 45, et nous ne voyons pas non plus qu'elle puisse être décisive d'après la jurisprudence actuelle de la Cour sur les questions de promotion. Ce que la Cour, et à notre avis à juste titre, a critiqué dans l'arrêt Bernusset, c'était le fait qu'outre la proposition de promotion qui ne visait qu'un seul candidat, les membres de la Commission, pour juger de l'aptitude des candidats à ce poste, ne disposaient comme moyen d'information que de leurs déclarations unilatérales sur leur carrière. En propres termes :
«… les actes de candidature, introduits par les intéressés eux-mêmes sans vérification ni contrôle de la part des services compétents de la Commission, constituent des documents de nature essentiellement subjective, dont la teneur et la portée ne peuvent être appréciées qu'avec circonspection dans une matière qui requiert un examen aussi objectif que possible des mérites des candidats».
Il n'est donc pas important que ces déclarations aient été détaillées ou non; ce qui l'est, c'est la seule circonstance qu'elles n'apportent qu'une énumération subjective de faits, un exposé personnel des requérants qui, ou bien ne disent rien du tout sur leurs mérites ou bien, tout au moins, ne permettent pas de se faire un jugement sûr et objectif sur ce point. En effet, il ne faut pas oublier que l'article 45 exige en règle générale un examen comparatif des mérites sur la base de rapports pbjectifs faits par des tiers sur les candidats. Mais, même dans une période d'adaptation, une dérogation à la règle de l'article 45 ne peut aller au point que des déclarations unilatérales des candidats soient suffisantes pour préparer les décisions de promotion.
En conséquence, dans cette affaire il nous semble indiqué de recommander la même solution que dans l'affaire Bernusset où nous avons été suivis par la Cour: comme nous ne pouvons pas déduire des documents de la Commission que ses membres aient été informés d'une façon plus complète sur les mérites des différents candidats, oralement ou par écrit, il ne reste pas d'autre solution que d'annuler la décision de promotion attaquée pour insuffisance de préparation.
Compte tenu de ce résultat indubitable, il nous semble inutile d'examiner encore les autres arguments du recours (publication tardive ou défaut de publication de la décision de promotion, appréciation erronée des faits, détournement de pouvoir à différents points de vue).
Nos conclusions sont les suivantes: le recours est recevable et bien fondé. La décision attaquée doit être annulée; la Commission doit être condamnée aux dépens d'après l'article 69 du règlement de procédure.