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Document 61992TJ0097

Sentencia del Tribunal de Primera Instancia (Sala Cuarta) de 22 de junio de 1994.
Loek Rijnoudt y Michael Hocken contra Comisión de las Comunidades Europeas.
Funcionarios - Contribución temporal - Tipo de contribución al regimen de pensiones.
Asuntos acumulados T-97/92 y T-111/92.

Recopilación de Jurisprudencia – Función Pública 1994 I-A-00159; II-00511

ECLI identifier: ECLI:EU:T:1994:69

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

22 juin 1994 ( *1 )

«Fonctionnaires — Contribution temporaire — Taux de contribution au régime des pensions»

Dans les affaires jointes T-97/92 et T-111/92,

Loek Rijnoudt et Michael Hocken, fonctionnaires de la Commission des Communautés européennes, demeurant respectivement à Bruxelles et à Jauchelette (Belgique), représentés par Me Georges Vandersanden, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me Alex Schmitt, 62, avenue Guillaume,

parties requérantes,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. Gianluigi Valsesia, conseiller juridique principal, en qualité d'agent, assisté de Me Denis Waelbroeck, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Georgios Kremlis, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet l'annulation du bulletin de rémunération des requérants du mois de janvier 1992, dans la mesure où celui-ci contient application de la contribution temporaire et établit, dès cette date, l'augmentation inévitable de leur contribution au régime de pensions,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de MM. C. P. Briët, président, A. Saggio et C. W. Bellamy, juges,

greffier: M. H. Jung,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 19 janvier 1994,

rend le présent

Arrêt

Les faits à l'origine du litige

1

L'article 65 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «statut») prévoit que le Conseil de l'Union européenne (ci-après «Conseil») procède annuellement à un examen du niveau des rémunérations des fonctionnaires afin de décider, sur proposition de la Commission, si une adaptation des rémunérations est appropriée. Ces modifications se font dans le cadre d'une méthode d'adaptation des rémunérations (ci-après «méthode») adoptée par le Conseil.

2

Par décision 81/1061/Euratom, CECA, CEE, du 15 décembre 1981, portant modification de la méthode d'adaptation des rémunérations des fonctionnaires et autres agents des Communautés (JO L 386, p. 6), le Conseil a précisé les modalités selon lesquelles il allait appliquer l'article 65 du statut pour la période du 1er juillet 1981 au 30 juin 1991.

3

A la même occasion, il a également été instauré, par le règlement (Euratom, CECA, CEE) no 3821/81 du Conseil, du 15 décembre 1981, modifiant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés (JO L 386, p. 1), à titre temporaire et pour une période expirant au 1er juillet 1991. un prélèvement sur les rémunérations, dit «prélèvement de crise». Les modalités de ce prélèvement ont été incorporées dans le statut sous la forme de son article 66 bis.

4

Le 7 juin 1989, la Commission et les organisations syndicales et professionnelles (ci-après «OSP») représentant son personnel ont signé un «contrat social de progrès 1989-1992», qui contient dans sa deuxième partie des dispositions concernant la concertation et la conciliation entre les parties dans certains domaines, y compris celui du renouvellement, pour la période postérieure au 30 juin 1991, de la méthode adoptée en 1981.

5

Le 5 juillet 1990, la Commission et les OSP ont signé un protocole d'accord portant, notamment, sur le renouvellement de la méthode. La Commission s'y est engagée à proposer l'incorporation de la méthode dans une annexe au statut. Elle comptait reprendre l'essentiel de la méthode précédente mais considérait qu'il n'y avait plus lieu d'appliquer un prélèvement de crise «qui ne saurait trouver de justification dans la situation économique et sociale». Elle a également confirmé son engagement, conformément au contrat social de progrès, d'agir dans le cadre d'un consensus le plus large possible avec son personnel.

6

Le 10 octobre 1990, la Commission a soumis au Conseil une proposition relative au renouvellement de la méthode, qui a fait l'objet de plusieurs examens au cours des premiers mois de 1991.

7

Le 22 mai 1991, le dossier a été examiné par la commission de concertation établie par la décision du Conseil du 23 juin 1981, instituant une procédure de concertation dans le cadre, notamment, des propositions de la Commission relatives à la modification du statut.

8

Aux mois de mai et juin 1991 le dossier a été examiné à plusieurs reprises par le comité des représentants permanents (ci-après «Coreper»), le Conseil et le Conseil européen. Des rencontres informelles entre la présidence du Conseil et les OSP ont eu lieu à trois reprises en juin 1991.

9

Le 27 juin 1991, la commission de concertation a été saisie d'un projet de compromis de la présidence luxembourgeoise, qui n'a pu recueillir la majorité nécessaire au Conseil. Le prélèvement de crise et la méthode adoptés en 1981 sont donc venus à expiration le 30 juin 1991.

10

Les négociations ont repris ensuite sous la présidence néerlandaise et se sont poursuivies au cours du second semestre de l'année 1991. Le Coreper a poursuivi l'examen du dossier aux mois de juillet, septembre et octobre 1991. De nombreuses rencontres entre la présidence du Conseil, la Commission et les OSP ont eu lieu en juillet, septembre et octobre 1991.

11

La commission de concertation s'est réunie à nouveau les 19 juillet et 11 octobre 1991.

12

Le 10 octobre 1991 s'est tenue une réunion de concertation politique sur la méthode d'adaptation des rémunérations entre la Commission et les OSP.

13

A la suite des ces négociations, un nouveau compromis a été dressé le 15 octobre 1991, prévoyant notamment:

le renouvellement de la méthode, avec certaines modifications, pour la période du 1er juillet 1991 au 30 juin 2001;

l'adaptation des rémunérations une fois par an;

la pondération de l'indice commun prévu à l'article 65 du statut de façon à incorporer pour 25 % l'indice belge (composante Bruxelles-capitale);

l'augmentation, à partir du 1er janvier 1993, de la contribution au régime des pensions (de 6,75 % à 8,25 %);

l'instauration, du 1er janvier 1992 au 30 juin 2001, d'une contribution temporaire au taux brut de 5,83 % calculée selon les modalités du prélèvement en vigueur jusqu'au 30 juin 1991;

l'insertion dans le statut de la nouvelle méthode et de la contribution temporaire.

14

Le 17 octobre 1991, un échange de vues a eu lieu entre la Commission et la représentation du personnel.

15

Le nouveau compromis a été soumis au personnel des institutions par référendum. Le référendum organisé pour le personnel de la Commission a eu lieu le 18 octobre 1991 et, à la question posée, «acceptez-vous le compromis de la présidence du Conseil?», il a été répondu «oui» à 61 % et «non» à 36 % (2 % de votes nuls ou blancs). Le résultat pour l'ensemble des institutions a été de 57 % de «oui», 41 % de «non» et 2 % de bulletins «nuls ou blancs».

16

Le 25 octobre 1991, les cinq propositions résultant du compromis ont été transmises au comité du statut, qui a rendu son avis le 5 novembre 1991.

17

Le 29 octobre 1991, la commission de concertation a émis son rapport.

18

Le 30 octobre 1991, une réunion de concertation politique entre la Commission et les OSP s'est tenue conformément, notamment, aux dispositions d'un accord entre la Commission et les OSP du 20 septembre 1974. Certaines des OSP, dont la Fédération de la fonction publique européenne, à laquelle appartiennent les requérants, se sont prononcées contre le compromis et les propositions de la Commission, tandis que d'autres s'y sont montrées favorables.

19

Le 4 novembre 1991, le Conseil a marqué un accord politique sur le compromis «méthode» dans l'attente de l'achèvement de la procédure législative.

20

Le groupe «statut» du Conseil a examiné les cinq propositions de la Commission en novembre 1991. En décembre 1991, le Coreper a examiné le dossier.

21

Le 16 décembre 1991, le président du Conseil a rencontré les OSP conformément, notamment, au point II.2 de la décision du Conseil du 23 juin 1981 instituant une procédure de concertation.

22

Finalement, le 19 décembre 1991, le Conseil a adopté les règlements (CECA, CEE, Euratom) nos 3830/91, 3831/91, 3832/91, modifiant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes et le régime applicable aux autres agents de ces Communautés, respectivement, en ce qui concerne les modalités d'adaptation des rémunérations, en vue de l'instauration d'une contribution temporaire et en ce qui concerne la contribution au régime des pensions, le règlement (CECA, CEE, Euratom) no 3833/91, rectifiant à compter du 1er juillet 1990 les rémunérations et les pensions des fonctionnaires et autres agents des Communautés européennes, et le règlement (CECA, CEE, Euratom) no 3834/91, adaptant à compter du 1er juillet 1991 les rémunérations et les pensions des fonctionnaires et autres agents des Communautés européennes ainsi que les coefficients correcteurs dont sont affectées ces rémunérations et pensions (JO L 361, respectivement p. 1, 7, 9, 10 et 13, ci-après «règlement no 3830/91», «règlement no 3831/91», «règlement no 3832/91», «règlement no 3833/91» et «règlement no 3834/91»). Ces règlements ont notamment:

renouvelé la méthode précédente pour dix ans, avec certaines modifications, tout en l'incorporant au statut en tant qu'annexe XI (règlement no 3830/91);

instauré une contribution temporaire au taux brut de 5,83 % à compter du 1er janvier 1992 par l'insertion dans le statut d'un nouvel article 66 bis (règlement no 3831/91);

relevé le taux de contribution au régime des pensions de 6,75 % à 8,25 % à compter du 1er janvier 1993 par une modification de l'article 83, paragraphe 2, du statut (règlement no 3832/91);

ajusté rétroactivement les montants figurant au barème des rémunérations (règlements nos 3833/91 et 3834/91).

23

Le 15 janvier 1992, les requérants ont reçu leur bulletin de rémunération pour le mois de janvier 1992. Celui-ci avait été établi en tenant compte des dispositions des règlements précités du 19 décembre 1991, saufen ce qui concerne l'augmentation des cotisations au régime des pensions, qui ne devait s'appliquer qu'à partir du 1er janvier 1993.

24

Chacun des requérants a introduit, à l'encontre de ce bulletin, une réclamation dans des termes identiques. La réclamation de M. Rijnoudt est datée du 13 mars 1992 et celle de M. Hocken du 3 avril 1992. Ils ont contesté, notamment, le prélèvement de la contribution temporaire (au titre du règlement no 3831/91) et la future augmentation de leur contribution au régime de pensions (au titre du règlement no 3832/91).

25

Par décision de la Commission communiquée par lettre du 5 août 1992, la réclamation de M. Rijnoudt a été rejetée. M. Hocken n'a pas reçu de réponse individuelle à sa réclamation, mais la décision de rejet de la réclamation de M. Rijnoudt a été publiée dans le no 737 des Informations administratives du 24 septembre 1992. Cette publication était accompagnée d'une déclaration du directeur général du personnel et de l'administration précisant que, «suite à une série de réclamations collectives ...,1a Commission a adopté la réponse suivante qui a été adressée à l'un des réclamants. ... la direction générale du personnel et de l'administration a opté, en termes de procédure, pour un rejet implicite des autres réclamations au terme du délai prévu par le statut».

La procédure

26

Les requérants ont introduit les présents recours par requêtes déposées au greffe du Tribunal le 5 novembre 1992 par M. Rijnoudt dans l'affaire T-97/92 et le 21 décembre 1992 par M. Hocken dans l'affaire T-111/92.

27

Par ordonnance du Tribunal (quatrième chambre) du 18 février 1993, les affaires T-97/92 et T-111/92 ont été jointes aux fins de la procédure écrite, de la procédure orale et de l'arrêt.

28

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 9 mars 1993, M. Gambari, fonctionnaire de la Commission, a demandé à intervenir dans l'affaire T-97/92 à l'appui des conclusions de la partie requérante. Par ordonnance du 15 juin 1993 (Rec. p. II-587), la demande d'intervention a été rejetée.

29

Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables. La procédure orale s'est déroulée le 19 janvier 1994.

Conclusions des parties

30

Les parties requérantes concluent à ce qu'il plaise au Tribunal:

déclarer les recours recevables et fondés;

annuler leur bulletin de rémunération de janvier 1992 dans la mesure où il prévoit l'institution d'une contribution temporaire et établit, dès cette date, l'augmentation inévitable de leur contribution de pension;

condamner la Commission aux dépens.

31

La partie défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

rejeter les recours

comme irrecevables en ce qui concerne le moyen tiré de l'illégalité du règlement no 3832/91 et en tout cas comme non fondés;

comme irrecevables en ce qui concerne le moyen tiré, à l'encontre du règlement no 3831/91, de la violation des engagements collectifs et de la méconnaissance de la procédure de concertation par le Conseil sauf

le grief selon lequel la Commission a violé la procédure de conciliation instaurée par le contrat social de progrès 1989-1992,

le grief selon lequel le référendum n'a pas permis à la procédure de concertation de se dérouler régulièrement,

l'argument selon lequel le référendum ne constitue pas une simple mesure d'ordre interne,

et en tout cas comme non fondés en ce qui concerne les moyens tirés de l'illégalité du règlement no 3831/91;

statuer comme de droit sur les dépens.

Sur la recevabilité

Sur les délais applicables au recours de M. Hocken

32

A la différence du recours de M. Rijnoudt, le recours de M. Hocken soulève une question quant au respect des délais de recours prévus par les dispositions combinées des articles 90, paragraphe 2, et 91, paragraphe 3, du statut. S'agissant d'une question d'ordre public, il appartient au Tribunal de vérifier d'office, à titre liminaire, si le recours de M. Hocken a été introduit dans les délais prévus.

33

A cet égard, si, comme le prétend la déclaration précitée du directeur général du personnel et de l'administration, publiée aux Informations administratives du 24 septembre 1992 (voir point 25), la réclamation de M. Hocken a fait l'objet uniquement d'une décision implicite de rejet au sens de l'article 90, paragraphe 2, du statut, son recours est irrecevable pour cause de tardiveté; si, par contre, la publication précitée dans les Informations administratives de la réponse de la Commission à la réclamation de M. Rijnoudt vaut également décision explicite de rejet de la réclamation de M. Hocken, le recours de ce dernier a été introduit dans les délais.

34

Les parties ayant été invitées à s'exprimer sur ce point lors de l'audience, la défenderesse a affirmé qu'elle considérait que la communication au personnel du 24 septembre 1992 a constitué la notification à M. Hocken d'un rejet explicite de sa réclamation et a marqué son accord pour que cette déclaration soit portée au procès-verbal.

35

Le Tribunal constate que la décision adressée à M. Rijnoudt et publiée aux Informations administratives apportait, en fait, une réponse détaillée à la réclamation de M. Hocken, qui était rédigée dans des termes identiques. Une interprétation selon laquelle la réclamation de M. Hocken et celles de nombreux autres fonctionnaires dans la même situation n'auraient fait l'objet que d'une décision implicite de rejet signifierait qu'un seul fonctionnaire, M. Rijnoudt, aurait reçu une décision explicite de rejet de sa réclamation tandis que, pour les autres fonctionnaires, les délais de recours auraient commencé à courir sans qu'ils fussent en mesure de connaître la motivation du rejet de leurs réclamations.

36

Le Tribunal considère qu'une telle approche irait à l'encontre du principe de l'égalité de traitement entre fonctionnaires en créant une différenciation non objectivement justifiée entre tous ceux qui ont introduit des réclamations en termes identiques. En outre, la disposition de l'article 90, paragraphe 2, dernier alinéa, du statut, selon laquelle, à l'expiration d'un délai de quatre mois, le défaut de réponse à une réclamation vaut décision implicite de rejet, n'a pas pour but d'exonérer l'institution de son devoir, prévu à la première phrase du même alinéa, de répondre par une décision motivée.

37

Dans ces circonstances, le Tribunal considère que la communication au personnel publiée dans les Informations administratives du 24 septembre 1992 constituait également une décision explicite de rejet de chacune des réclamations identiques introduites par tous les autres fonctionnaires concernés, y compris M. Hocken.

38

Il s'ensuit que le recours de M. Hocken a été introduit dans les délais.

Sur la recevabilité des recours dans la mesure où ils visent à voir déclarer inapplicable le règlement no 3832/91

39

La défenderesse fait valoir que les recours sont irrecevables pour autant qu'ils visent à voir déclarer illégal le règlement no 3832/91 - qui a augmenté le taux de la contribution des fonctionnaires au régime des pensions à partir du 1er janvier 1993 - dans la mesure où ils sont dirigés contre un bulletin de rémunération qui ne constituerait pas une mesure individuelle d'exécution de ce règlement. Il manquerait donc un acte faisant grief.

40

En réponse, les requérants se réfèrent aux arrêts de la Cour du 1er février 1979, Deshormes/Commission (17/78, Rec. p. 189), et du Tribunal du 12 février 1992, Pfloeschner/Commission (T-6/91, Rec. p. II-141, point 27), et considèrent que la future augmentation du taux de la contribution était déjà déterminable à la date des bulletins de rémunération contestés, de façon certaine, sans ambiguïté ni condition, et ne dépendait d'aucune mesure future d'intervention. Par ailleurs, la défenderesse elle-même mettrait en évidence l'interdépendance entre les cinq règlements du 19 décembre 1991, qui formeraient un «paquet».

41

Le Tribunal souligne que, dans le système de recours instauré par les articles 90 et 91 du statut, un fonctionnaire ne peut attaquer qu'un acte lui faisant individuellement grief, et que ce n'est que dans ce cadre qu'il peut invoquer, par la voie d'une exception d'illégalité, l'inapplicabilité d'un règlement d'application générale (voir l'arrêt de la Cour du 16 juillet 1981, Bowden e.a./Commission,153/79, Rec. p. 2111, point 13, et l'ordonnance du Tribunal du 7 juin 1991, Weyrich/Commission, T-14/91, Rec. p. II-235, point 46).

42

Or, le règlement no 3832/91 n'est entré en vigueur, selon son article 2, que le 1er janvier 1993 et toute demande tendant à le voir déclarer inapplicable est exclue avant cette date en l'absence d'un acte individuel d'exécution faisant grief. En l'espèce, un tel acte individuel portant application des dispositions du règlement no 3832/91 fait défaut. A cet égard, la référence aux arrêts Deshormes/Commission et Pfloeschner/Commission, précités, est sans pertinence, car ceux-ci concernaient des décisions individuelles prises à l'égard des fonctionnaires concernés.

43

L'argument selon lequel les cinq règlements précités forment un «paquet» est également sans pertinence. Quelles qu'aient été les raisons et modalités de l'adoption du règlement no 3832/91, les bulletins de rémunération individuels attaqués par les requérants ne pouvaient pas constituer des actes individuels d'exécution de ce règlement, qui n'était pas encore en vigueur.

44

Il s'ensuit que les recours sont irrecevables pour autant qu'ils visent à voir déclarer inapplicable le règlement no 3832/91.

Sur le fond

Sur les moyens concernant le règlement no 3831/91

45

Les requérants soutiennent que le règlement no 3831/91 est illégal, pour autant qu'il prévoit une contribution temporaire. A l'appui de cette exception d'illégalité, ils invoquent en substance cinq moyens tirés, premièrement, d'une motivation insuffisante, deuxièmement, de l'illégalité du principe même d'une telle contribution, troisièmement, du non-respect par la Commission de ses engagements envers le personnel, quatrièmement, du non-respect par le Conseil des termes de sa décision du 23 juin 1981 instituant une procédure de concertation, et, cinquièmement, de la violation des principes de protection de la confiance légitime, de bonne administration et de saine gestion.

Sur le moyen tiré d'une motivation insuffisante du règlement no 3831/91

Arguments des parties

46

Les requérants font valoir que le règlement no 3831/91 instaurant la contribution temporaire ne contient aucune motivation suffisante. A la différence du règlement no 3821/81 instaurant le prélèvement de crise, le règlement no 3831/91 ne ferait aucune référence explicite aux difficultés particulières de la situation économique et sociale. Par ailleurs, la référence faite dans le préambule du règlement no 3831/91 à des «éléments interdépendants d'une solution d'ensemble» indiquerait que la seule véritable motivation n'était pas la résurgence d'une situation économique difficile mais l'imposition aux fonctionnaires d'une compensation des avantages de la nouvelle méthode, qui ne serait pas justifiée.

47

La défenderesse répond que la motivation du règlement no 3831/91 remplit les critères définis par la Cour dans ses arrêts du 30 novembre 1978, Welding (87/78, Rec. p. 2457), et du 3 juillet 1985, Abrias e.a./Commission (3/83, Rec. p. 1995). La contribution temporaire constituerait une mesure de modération salariale, ce qui ressortirait notamment du premier considérant du règlement attaqué. De plus, la situation économique et sociale difficile dans de nombreux États membres et les finalités de la mesure auraient été notoires et connues des requérants, d'autant plus que ceux-ci auraient été membres actifs de l'une des OSP participant aux négociations. Ces aspects seraient également confirmés par le rapport de la commission de concertation auquel le préambule du règlement no 3831/91 se réfère.

48

En outre, il ne serait pas surprenant que la contribution temporaire constitue l'un des éléments d'une solution d'ensemble, vu les longues négociations avec les OSP et le fait qu'un lien entre le prélèvement exceptionnel et la méthode aurait déjà été établi en 1981. Les fonctionnaires auraient bénéficié du fait qu'en adoptant la nouvelle méthode le Conseil a limité son large pouvoir d'appréciation en matière de rémunérations et a inscrit cette autolimitation dans le statut.

Appréciation du Tribunal

49

Le Tribunal rappelle que dans son arrêt Abrias e.a./Commission, précité, concernant le prélèvement exceptionnel instauré par le règlement no 3821/81, la Cour a estimé que la motivation d'un acte d'application générale peut se borner à indiquer, d'une part, la situation d'ensemble qui a conduit à son adoption et, d'autre part, les objectifs généraux qu'il se propose d'atteindre (points 30 et 31).

50

En l'espèce, la partie pertinente du préambule du règlement no 3831/91 se lit comme suit:

«ayant pris connaissance du rapport de la commission de concertation instituée par la décision du Conseil du 23 juin 1981;

considérant qu'il résulte des travaux de ladite commission de concertation qu'une mesure affectant à titre temporaire les rémunérations versées par les Communautés devait être instaurée sous la forme d'une contribution temporaire prélevée à la source, conjointement avec l'adoption d'une méthode fixant les modalités d'application des articles 64 et 65 du statut, comme éléments interdépendants d'une solution d'ensemble;

considérant que le niveau, les modalités d'application, la date d'effet et la date d'expiration de cette contribution ont été négociés dans ce cadre;

considérant qu'il y a lieu de modifier en conséquence le statut et le régime applicable aux autres agents...».

51

Le Tribunal relève que, à la différence de celle du règlement no 3821/81, la motivation du règlement no 3831/91 ne fait pas référence aux difficultés particulières de la situation économique et sociale. En outre, le rapport de la commission de concertation du 29 octobre 1991 — qui est cité dans le préambule du règlement no 3831/91 et qui est le seul document que la partie défenderesse a versé au dossier attestant des travaux de ladite commission — se borne à indiquer que l'instauration de la contribution temporaire faisait partie du compromis avancé par la présidence néerlandaise. La majeure partie de ce rapport est consacrée aux positions des OSP.

52

Néanmoins, conformément au principe énoncé par la Cour dans son arrêt Abrias e.a./Commission, précité, la motivation d'un règlement comme celui de l'espèce peut être succincte (voir également l'arrêt de la Cour du 4 février 1982, Adam/Commission, 828/79, Rec. p. 269, point 37).

53

A cet égard, le Tribunal relève, en premier lieu, que les considérants du règlement no 3831/91 indiquent clairement que le Conseil entendait instaurer, sous forme d'une contribution temporaire, «une mesure affectant ... les rémunérations versées par les Communautés aux fonctionnaires», ce qui implique nécessairement qu'il avait comme objectif l'introduction d'une mesure de modération salariale, comme l'a fait valoir la Commission et comme les requérants eux-mêmes le reconnaissent à la page 7 de leurs requêtes respectives.

54

En deuxième lieu, il est notoire — et confirmé par les considérants précités du règlement no 3831/91 - que la contribution litigieuse a été adoptée dans le contexte des longues négociations menées entre les Communautés et leur personnel, au cours desquelles les parties ont cherché à trouver une «solution d'ensemble» pour certains éléments interdépendants dans le domaine délicat des rémunérations. Ces négociations ont finalement abouti à un compromis dans lequel l'instauration de la contribution a été accompagnée notamment par le renouvellement de la méthode et son incorporation dans le statut, ce qui a satisfait à l'une des demandes principales des OSP. C'est dans ce cadre spécifique que tous les éléments importants de la contribution, à savoir son niveau, ses modalités d'application et sa durée, ont été également négociés, comme le confirme le deuxième considérant du règlement no 3831/91.

55

En troisième lieu, il n'est pas nié que les intéressés - à savoir, non seulement les requérants, mais l'ensemble des fonctionnaires communautaires — ont été tenus au courant du contenu et de la portée des négociations entreprises. Il convient de rappeler, à ce propos, que le compromis final a été soumis à un référendum du personnel le 18 octobre 1991.

56

Dans un tel contexte et eu égard aux circonstances spécifiques du cas d'espèce -qui présentent, à de nombreux égards, les caractéristiques d'une négociation collective entre un employeur et ses employés —, le Tribunal considère que la motivation du règlement no 3831/91 donne une indication suffisante de la situation d'ensemble qui a conduit à son adoption ainsi que de ses objectifs généraux.

57

Il s'ensuit que le moyen tiré de la violation de l'article 190 du traité CE doit être écarté.

Sur le moyen tiré de l'absence de justification objective et d'une atteinte au principe du parallélisme

Arguments des parties

58

Dans le cadre de ce moyen, les requérants avancent deux arguments. D'abord, ils font valoir que la contribution temporaire manque de toute justification objective. Ils nient le besoin de compenser par une contribution temporaire la limitation de la marge d'appréciation du Conseil résultant de l'insertion dans le statut de la nouvelle méthode d'adaptation des rémunérations et font valoir que, en tout état de cause, le taux de cette contribution a été fixé de manière arbitraire.

59

Ensuite, les requérants font valoir que la contribution constitue une atteinte au principe, dit du parallélisme, exprimé à l'article 65 du statut et dans les méthodes précédentes, selon lequel les adaptations des rémunérations des fonctionnaires communautaires tiennent compte, entre autres facteurs, de l'évolution des traitements publics dans les États membres. Étant donné que la rémunération des fonctionnaires communautaires serait déjà affectée à la baisse par la prise en compte de l'évolution des rémunérations des différents fonctionnaires nationaux, la contribution temporaire constituerait une pénalité supplémentaire.

60

La défenderesse répond, en substance, que la contribution temporaire a été introduite à l'issue des négociations avec les OSP et des travaux de la commission de concertation portant non seulement sur cette mesure mais sur un ensemble de mesures. Au cours de ces négociations et travaux, il serait apparu que la situation économique justifiait une modération salariale, d'autant plus que de telles mesures étaient pratiquées dans les États membres, et qu'une exception en faveur des fonctionnaires communautaires aurait été inéquitable.

61

En outre, la contribution temporaire serait justifiée par l'autolimitation acceptée par le Conseil, résultant de l'adoption de la nouvelle méthode et de son incorporation dans le statut (voir le point 21 de l'arrêt Abrias e.a./Commission, précité). Le taux de contribution aurait été établi au cours des négociations avec les OSP.

62

Quant au principe du parallélisme, la défenderesse souligne que ni la Commission ni le Conseil ne sont liés par les méthodes précédentes, et que le Conseil jouit d'un large pouvoir d'appréciation en la matière (voir l'arrêt de la Cour du 5 juin 1973, Commission/Conseil, 81/72, Rec. p. 575). En outre, selon l'arrêt Abrias e.a./Commission, précité, la légalité d'une modification du statut ne saurait être mise en cause sur la base d'une autre disposition du statut.

63

Par ailleurs, le principe du parallélisme n'impliquerait pas d'indexation automatique et ne constituerait pas un principe supérieur de droit (voir les conclusions respectives de l'avocat général M. VerLoren van Themaat sous l'arrêt de la Cour du 6 octobre 1982, Commission/Conseil, 59/81, Rec. p. 3329, 3364, et de l'avocat général M. Darmon sous l'arrêt Abrias e.a./Commission, précité, Rec. p. 1995, 2001). Enfin, l'emploi du terme «notamment» dans l'article 65, paragraphe 1, du statut démontrerait que le Conseil peut également tenir compte de facteurs autres que le principe du parallélisme.

Appréciation du Tribunal

64

Le Tribunal rappelle, tout d'abord, que le règlement no 3831/91 a inséré dans le statut un nouvel article 66 bis prévoyant l'instauration de la contribution temporaire. La base juridique du règlement no 3831/91 était l'article 24, paragraphe 1, deuxième alinéa, du traité instituant un Conseil unique et une Commission unique des Communautés européennes (JO 1967, 152, p. 2, ci-après «traité de fusion»). Or, il ressort des visas du règlement no 3831/91 que celui-ci a été adopté dans le plein respect de l'article 24 du traité de fusion, qui n'impose aucune limitation au pouvoir législatif du Conseil à cet égard. Dans ces circonstances, l'argument des requérants selon lequel la contribution temporaire est dépourvue de justification objective est inopérant.

65

Par ailleurs, ainsi qu'il ressort de l'arrêt Abrias e.a./Commission, précité, point 20, la légalité d'une modification d'une disposition du statut ne saurait être mise en cause sur la base d'une autre de ses dispositions. En modifiant l'article 66 bis du statut, le Conseil n'était donc pas lié par les dispositions de son article 65, relatives au principe dit du parallélisme. En tout cas, rien dans le texte de l'article 65 n'empêche l'instauration de la contribution temporaire.

66

Il s'ensuit que les arguments des requérants tirés du défaut de justification et du taux de la contribution temporaire, ainsi que de son incompatibilité avec le principe dit du parallélisme, doivent être rejetés.

Sur le moyen tiré du non-respect par la Commission de ses engagements envers le personnel

67

Les requérants allèguent, en substance, que les négociations entre la Commission et les OSP ont été viciées, d'une part, par le non-respect par la Commission de certains de ses engagements et, d'autre part, par l'illégalité du référendum du personnel organisé par la Commission. La défenderesse conteste, d'une part, la recevabilité de ces arguments et nie, d'autre part, qu'ils soient fondés en fait.

Sur la recevabilité

68

Au point 15 de chaque requête, il est affirmé: «Le requérant avance, ... à l'appui de l'illégalité du règlement no 3831/91 du Conseil, que la Commission n'a pas respecté ses engagements collectifs à l'égard de son personnel et que le Conseil n'a pas respecté la procédure de concertation. A cet égard, le requérant se permet de se référer à sa réclamation...» En ce qui concerne le non-respect par la Commission de ses engagements il ressort des pages 10 et suivantes de la réclamation, annexée à la requête, que les requérants invoquent, en substance, quatre éléments, à savoir la violation de l'accord du 20 septembre 1974, la violation du contrat social de progrès du 7 juin 1989, la violation du protocole d'accord du 5 juillet 1990 et l'illégalité du référendum du 18 octobre 1991. Toutefois, seuls sont mentionnés dans la requête elle-même le contrat social de progrès (très brièvement) et certains aspects du référendum.

69

Dans ces circonstances, la défenderesse excipe de l'irrecevabilité des arguments des requérants, autres que ceux portant sur la violation du contrat social de progrès et de certains aspects du référendum, en faisant valoir que le renvoi à la réclamation fait par chaque requérant dans sa requête est contraire à l'article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure, qui prévoit que la requête doit contenir l'objet du litige et l'exposé sommaire des moyens invoqués.

70

Le Tribunal relève que l'exception d'irrecevabilité soulevée par la Commission ne concerne que les prétendues violations de la part de la Commission de l'accord du 20 septembre 1974 et du protocole d'accord du 5 juillet 1990. Or, dans son mémoire en défense, la partie défenderesse a néanmoins répondu explicitement aux arguments des requérants portant sur ces deux accords, tels qu'ils avaient été exposés dans la réclamation annexée à la requête, ainsi qu'aux autres arguments invoqués dans la réclamation, concernant notamment le contrat social de progrès et le référendum. Tous ces arguments ont également été développés dans les mémoires en réplique et en duplique.

71

Dans ces circonstances particulières, le Tribunal considère qu'il n'y a pas lieu de déclarer les arguments en cause des requérants irrecevables pour non-respect de l'article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure. S'il n'est pas acceptable, en règle générale, de remplacer l'exposé des faits, moyens et arguments dans la requête elle-même par un simple renvoi à une annexe, il y a lieu de relever que la requête, en l'espèce, a indiqué brièvement le moyen en cause et que ni la partie défenderesse ni le Tribunal n'ont été mis dans l'impossibilité de comprendre les arguments invoqués à cet égard.

72

La situation en l'espèce diffère, en effet, de celles qui sont à l'origine de la jurisprudence citée par la défenderesse. Ainsi, dans les affaires Prakash/Commission de la CEEA (arrêt de la Cour du 8 juillet 1965, 19/63 et 65/63, Rec. p. 677), et Ascasibar Zubizarreta e.a. (ordonnance du Tribunal du 26 mars 1992, T-35/89 TO1, Rec. p. II-1599), la requête comportait un renvoi à un document produit dans une autre procédure, tandis que dans l'affaire Benzler/Commission (ordonnance du Tribunal du 24 mars 1993, T-72/92, Rec. p. II-347), le Tribunal a été, notamment, dans l'impossibilité d'identifier l'acte dont le requérant demandait l'annulation.

73

La défenderesse fait valoir également que les arguments des requérants mettant en cause la légalité du référendum organisé le 18 octobre 1991 sont irrecevables au motif qu'il s'agit là d'une mesure d'ordre interne, ainsi qu'il ressortirait de l'ordonnance de la Cour du 3 décembre 1992, TAO/AF1/Commission (C-322/91, Rec. p. I-6373). Selon les requérants, dans l'ordonnance précitée, la Cour n'a qualifié le référendum de mesure d'ordre interne que dans le contexte d'un recours dirigé contre l'organisation même du référendum, ce qui n'exclurait pas l'examen de sa légalité dans le contexte du présent recours.

74

A cet égard, le Tribunal relève que, dans la présente espèce, les arguments des requérants relatifs au référendum du 18 octobre 1991 sont tirés, notamment, d'un prétendu non-respect par la Commission de ses engagements envers son personnel. Le Tribunal estime que le fait qu'un tel référendum soit une mesure d'ordre interne ne signifie pas que le Tribunal ne peut pas examiner les arguments développés sous cet aspect par les requérants.

75

Le moyen tiré du non-respect par la Commission de ses engagements est donc rece vable.

Sur le fond

— Arguments des parties

76

Les requérants font valoir, premièrement, que la Commission a violé l'accord du 20 septembre 1974, qu'elle a signé avec six OSP. Il ressort des termes mêmes de cet accord qu'il couvre différents aspects des relations entre la Commission et les OSP sur lesquels une concertation peut être engagée à la demande de la Commission ou des OSP. Ladite concertation comporte un niveau technique, avec des représentants de l'administration, et un niveau politique, avec un ou plusieurs membres de la Commission (articles 6 à 11 de l'accord). Elle «aboutit à un projet d'accord ou à un procès-verbal faisant état des différents points de vue, sur lesquels la Commission se prononce» (article 12).

77

Les requérants affirment que la réunion de concertation technique qui s'est tenue avant le référendum du 18 octobre 1991 n'a été qu'une parodie et que la concertation politique demandée par les OSP n'a jamais eu lieu. Toutes les réunions de concertation qui se sont tenues après le référendum n'auraient également nullement servi leur objet. Les articles 10, 11 et 12 de l'accord du 20 septembre 1974 n'auraient donc pas été respectés.

78

Deuxièmement, les requérants font valoir que la Commission a violé le contrat social de progrès 1989-1992 (voir ci-dessus point 4). Ce document prévoit, notamment, qu'une conciliation peut être demandée en cas de conflit majeur par avis majoritaire des OSP. Les requérants soutiennent que ces dispositions n'ont pas été respectées en ce que la Commission n'a pas engagé la procédure de conciliation en dépit d'une telle demande émanant de la majorité des OSP.

79

Troisièmement, les requérants font valoir que la Commission n'a pas respecté le protocole d'accord du 5 juillet 1990 (voir ci-dessus point 5), notamment en ce qui concerne son affirmation qu'il n'y avait plus lieu d'appliquer un prélèvement de crise, et son engagement d'agir dans le cadre d'un consensus le plus large possible. L'organisation du référendum aurait empêché que se forme un consensus et divisé le personnel.

80

Quatrièmement et dernièrement, les requérants estiment que le recours au référendum du 18 octobre 1991 était illégal. Ils font valoir, notamment, que la consultation par voie de référendum n'est prévue par aucun texte, que les OSP et le personnel n'ont été informés que le 15 octobre de l'organisation d'un référendum le 18 octobre, que le référendum n'a pas été organisé dans des conditions objectives, que la formulation de la question posée était tendancieuse et que l'intervention du référendum a interrompu de façon illégale la procédure de concertation.

81

En réponse à ces arguments, la défenderesse maintient, tout d'abord, qu'elle a agi tout au long des négociations dans la recherche du consensus le plus large possible avec son personnel et nie avoir violé ses engagements collectifs. Ensuite, elle fait valoir, notamment, i) que les dispositions de l'accord du 20 septembre 1974 ont été respectées, comme le démontrerait notamment le compte rendu de la réunion de concertation politique qui s'est tenue le 30 octobre 1991, ii) que la procédure de conciliation prévue par le contrat social de progrès est facultative et qu'en tout cas les conditions nécessaires n'étaient pas réunies en l'absence d'un avis majoritaire des OSP ainsi que d'un conflit majeur (ce dernier point découlant de l'acceptation du compromis par plus de 60 % du personnel), iii) qu'elle n'a violé aucune des dispositions du protocole d'accord du 5 juillet 1990 et iv) que le référendum était une mesure interne, à la fois opportune et parfaitement légale, qui se serait déroulée dans des conditions régulières.

— Appréciation du Tribunal

82

Il convient de constater, tout d'abord, qu'il ressort tant du libellé que du contenu de l'accord du 20 septembre 1974, du contrat social de progrès 1989-1992 et du protocole d'accord du 5 juillet 1990 que ces documents concernent les relations internes entre la Commission, en tant qu'employeur, et son personnel.

83

Cependant, le règlement no 3831/91 a été adopté, sur la base de l'article 24 du traité de fusion et de l'article 13 du protocole sur les privilèges et immunités des Communautés européennes, par le Conseil sur proposition de la Commission. Par ailleurs, le Tribunal ne peut trouver aucune base juridique pour étayer la thèse selon laquelle la validité d'un règlement du Conseil pourrait être mise en cause pour non-respect d'accords internes, tels les accords susvisés, entre la Commission et son personnel.

84

En outre, le Tribunal estime que la Commission, lorsqu'elle propose au Conseil un acte de législation communautaire, est tenue d'agir en pleine indépendance, dans l'intérêt général des Communautés. Un engagement ayant force juridique pris par la Commission envers ses propres fonctionnaires, dont les intérêts ne constituent qu'un des éléments à prendre en considération, n'est pas compatible avec cette obligation. Même si un tel engagement peut revêtir une importance politique, il ne peut avoir une force juridique opposable à un règlement du Conseil.

85

Il en est de même en ce qui concerne l'organisation du référendum. Certes, comme le soulignent les requérants, le recours à un référendum du personnel n'est prévu par aucun texte, mais il peut constituer une mesure interne utile et appropriée afin de connaître l'avis des fonctionnaires. Néanmoins, dans la mesure où son résultat, quel qu'il soit, ne saurait en aucun cas limiter le pouvoir législatif des institutions communautaires ou les exonérer de leur devoir de légiférer dans l'intérêt général des Communautés, l'organisation d'une telle consultation ne peut constituer un motif de contestation de la légalité d'un acte adopté après avoir pris connaissance de son résultat.

86

Il s'ensuit que tous les arguments des requérants tirés du non-respect par la Commission de ses obligations envers les OSP et le personnel doivent être rejetés.

87

Au surplus et en tout état de cause, le Tribunal relève qu'il ressort des faits exposés ci-dessus (points 4 et suivants) que les OSP ont été régulièrement consultées tout au long des négociations. De l'avis du Tribunal, c'est donc à juste titre que la Commission a fait valoir qu'elle a cherché à agir pendant toute la période litigieuse dans le cadre du consensus le plus large possible tant avec les OSP qu'avec le personnel.

88

Quant aux arguments plus spécifiques avancés par les requérants, le Tribunal constate, d'abord, que ceux-ci n'ont pas établi que les concertations prévues par l'accord du 20 septembre 1974 n'ont pas véritablement eu lieu d'une façon régulière. En particulier, le compte rendu de la réunion du 30 octobre 1991 démontre qu'une concertation politique a eu lieu avec le membre de la Commission en charge des questions du personnel et de l'administration et qu'un procès-verbal faisant état des différents points de vue a été établi conformément aux articles 11 et 12 dudit accord.

89

Quant au contrat social de progrès, il suffit de constater que celui-ci n'impose à la Commission aucune obligation d'accepter une conciliation en cas de conflit majeur, sans qu'il soit nécessaire de décider si, dans le cas d'espèce, la conciliation a été demandée par la majorité des OSP requise par ce document.

90

En ce qui concerne le protocole d'accord du 5 juillet 1990, le Tribunal ne peut déceler, à la lumière des faits de l'espèce, aucune violation de la part de la Commission d'une obligation quelconque contenue dans ce document.

91

Quant à l'organisation du référendum, les requérants n'ont établi ni que celle-ci a constitué une violation des accords susvisés, ni qu'elle a rompu, de façon illégale, le processus de concertation y prévu.

92

Il s'ensuit que, à supposer même que le moyen des requérants tiré du non-respect par la Commission de ses engagements envers son personnel repose sur des bases juridiques susceptibles d'être invoquées devant le Tribunal, il manque, en tout état de cause, en fait.

Sur le moyen tiré du non-respect par le Conseil de sa décision du 23 juin 1981

Sur la recevabilité

93

Les requérants ayant procédé, dans leur requête, quant à ce moyen, au renvoi décrit ci-dessus au point 68, la défenderesse a soulevé, quant à sa recevabilité, la même objection qu'à ľ encontre du moyen précédent. Étant donné que dans ses mémoires en défense et en duplique la défenderesse a répondu explicitement aux arguments invoqués à son appui, cette objection doit être rejetée pour les mêmes raisons que celles exposées ci-dessus aux points 71 à 72.

Sur le fond

— Arguments des parties

94

Les requérants font valoir, en substance, que le Conseil n'a pas respecté la procédure de concertation prévue par sa décision du 23 juin 1981 dans la mesure où, premièrement, il aurait décidé, le 4 novembre 1991, de clore la négociation sans avoir rencontré les représentants du personnel, deuxièmement, il n'y aurait eu aucune concertation sur les nouvelles propositions de la Commission, et, troisièmement, la question n'aurait pas été soumise à la procédure de conciliation.

95

Pour la partie défenderesse, ces griefs ne sont pas fondés en fait. Toute la période de négociation aurait été marquée par des réunions de la commission de concertation et des rencontres informelles entre la présidence et les OSP. Le 19 décembre 1991, le Conseil aurait simplement estimé qu'un compromis équitable et équilibré, accepté par la majorité du personnel, avait été atteint dans le cadre de la procédure de concertation et qu'il n'y avait pas lieu de donner suite aux demandes de certaines OSP de rencontrer le Conseil ou d'ouvrir la procédure de conciliation.

— Appréciation du Tribunal

96

Le Tribunal relève que, selon la décision du Conseil du 23 juin 1981, une procédure de concertation doit être appliquée, dans le cas de propositions de modification du statut soumises au Conseil par la Commission, si un membre de la commission de concertation en fait la demande (article 1.3). Le but est de faire converger les positions et présenter un rapport en conséquence; si cela se révèle impossible, le rapport énonce les différentes positions (article 1.8). Avant que le Conseil n'arrête sa décision, son président rencontre les représentants du personnel en vue de les informer de sa teneur probable et de leur permettre d'exprimer leur point de vue (article II.2). En cas de désaccord grave, les représentants du personnel peuvent demander de rencontrer le président accompagné des membres du Conseil afin d'exposer leur point de vue et, en cas de persistance d'un tel désaccord, ils peuvent demander que la question soit soumise à une procédure de conciliation. Le Conseil reste seul juge des suites à donner à ces demandes (articles II.2 et 3).

97

Il est constant en l'espèce que la procédure de concertation a été engagée et que le 29 octobre 1991, à l'issue de quatre réunions, la commission de concertation a soumis son rapport, faisant état de certaines divergences d'opinion entre les parties. Il est constant également que le président du Conseil a rencontré les OSP le 16 décembre 1991. Les prescriptions obligatoires de la décision du 23 juin 1981 ont donc été respectées. A cet égard, il convient de souligner que c'est au Conseil seul qu'il appartient de décider s'il faut donner suite à une demande ultérieure de rencontre ou de conciliation en cas de désaccord grave et qu'il a donc légitimement pu refuser de telles demandes en l'espèce.

98

Cependant, de l'avis des requérants, le compromis sur la base duquel le règlement no 3831/91 a été adopté n'était pas le même que celui qui avait fait l'objet de la procédure de concertation ayant abouti au rapport du 29 octobre 1991 et une nouvelle procédure de concertation aurait donc dû être engagée à son égard.

99

Il ressort, néanmoins, d'un examen comparatif dudit rapport du 29 octobre 1991 et du règlement no 3831/91 que l'instauration d'une contribution temporaire au taux de 5,83 %, pour une période allant du 1er janvier 1992 au 30 juin 2001, telle que prévue par ledit règlement, avait fait l'objet des travaux de la commission de concertation ayant abouti au rapport susvisé. Dans ces conditions, il apparaît que la procédure de concertation préalable à l'adoption du règlement no 3831/91 a été menée de manière conforme aux prescriptions de la décision du Conseil du 23 juin 1981.

100

Il s'ensuit que le moyen tiré du non-respect par le Conseil de sa décision du 23 juin 1981 doit être rejeté sans qu'il soit besoin d'examiner si un tel non-respect aurait pu conduire à déclarer inapplicable le règlement en question.

Sur le moyen tiré de la violation des principes de protection de la confiance légitime et de bonne administration et de saine gestion

Arguments des parties

101

Pour les requérants, ces principes auraient été violés, car les fonctionnaires auraient été en droit de s'attendre à ce que leurs employeurs assument leurs obligations sociales collectives. Une transposition du raisonnement suivi par la Cour dans son arrêt Abrias e.a./Commission, précité, basé sur la participation des OSP aux travaux de préparation de la méthode et du prélèvement, ne serait pas possible en l'espèce, les négociations n'ayant, de façon illégale, pas été menées à leur terme.

102

La défenderesse estime qu'il n'y a pas eu d'illégalité dans le déroulement de la procédure et que les OSP y ont été étroitement associées. Par ailleurs, un fonctionnaire ne pourrait se prévaloir d'une confiance légitime dans le maintien inchangé des règles statutaires. Enfin, la Commission aurait fait preuve de bonne administration en prenant toutes ses responsabilités dans la gestion d'un dossier sensible.

Appréciation du Tribunal

103

Il ressort de la requête que les requérants invoquent, à l'appui de leur moyen tiré de la violation des principes de protection de la confiance légitime, de bonne administration et de saine gestion, le non-respect de la part de la Commission de ses engagements et l'illégalité du référendum. Étant donné que le Tribunal a déjà rejeté ces arguments dans le cadre de l'examen des autres moyens avancés par les requérants (voir ci-dessus points 67 à 100), il y a lieu de rejeter le présent moyen pour les mêmes motifs.

104

En outre, le Tribunal considère qu'un fonctionnaire ne peut se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime pour mettre en cause la légalité d'une disposition réglementaire nouvelle, surtout dans un domaine dont l'objet comporte une constante adaptation en fonction des variations de la situation économique (voir, notamment, l'arrêt de la Cour du 14 juin 1988, Christianos/Cour de justice, 33/87, Rec. p. 2995, point 23, et l'arrêt du Tribunal du 26 octobre 1993, Reinarz/Commission, T-6/92 et T-52/92, Rec. p. II-1047, point 85). Il en va de même pour les principes de bonne administration et de saine gestion.

105

Il s'ensuit que le présent moyen ne peut être accueilli et que les recours doivent donc être rejetés dans leur intégralité.

Sur les dépens

106

Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Toutefois, selon l'article 88 de ce même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête:

 

1)

Les recours sont rejetés comme irrecevables pour autant qu'ils visent à ce que soit déclaré inapplicable le règlement (CECA, CEE, Euratom) no 3832/91 du Conseil, du 19 décembre 1991, modifiant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés en ce qui concerne la contribution au régime des pensions, et comme non fondés pour le surplus.

 

2)

Chacune des parties supportera ses propres dépens.

 

Briët

Saggio

Bellamy

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 22 juin 1994.

Le greffier

H. Jung

Le président

C. P. Briët


( *1 ) Langue de procédure: le français.

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