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Document 62017CO0204

Order of the Vice-President of the Court of 11 October 2017.
Hungary v European Commission.
Appeal — Order for interim measures — State aid — Hungarian tax on advertisement turnover — Progressive nature of the tax rate — Limitation of the possibility to deduct losses carried forward to companies which did not make a profit in 2013 — Decision of the European Commission declaring the aid incompatible with the internal market and ordering its recovery — Application to suspend the operation of that decision — Urgency — No need to adjudicate.
Case C-204/17 P(R).

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2017:751

ORDONNANCE DU VICE-PRÉSIDENT DE LA COUR

11 octobre 2017(*)

« Pourvoi – Ordonnance de référé – Aides d’État – Taxe hongroise sur le chiffre d’affaires lié à la publicité – Progressivité du taux d’imposition – Limitation de la possibilité de déduire les pertes reportées aux sociétés n’ayant pas enregistré de bénéfices en 2013 – Décision de la Commission européenne déclarant l’aide incompatible avec le marché intérieur et ordonnant sa récupération – Demande de sursis à l’exécution de ladite décision – Urgence – Non-lieu à statuer »

Dans l’affaire C‑204/17 P(R),

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 57, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 20 avril 2017,

Hongrie, représentée par M. M. Z. Fehér, en qualité d’agent,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Commission européenne, représentée par MM. V. Bottka et P. ‑J. Loewenthal, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

LE VICE-PRÉSIDENT DE LA COUR,

l’avocat général, M. M. Wathelet, entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, la Hongrie demande l’annulation de l’ordonnance du président du Tribunal de l’Union européenne du 23 mars 2017, Hongrie/Commission (T‑20/17 R, non publiée, ci-après l’« ordonnance attaquée », EU:T:2017:203), par laquelle celui-ci a rejeté la demande de la Hongrie tendant à obtenir le sursis à l’exécution de la décision de la Commission C(2016) 6929 final, du 4 novembre 2016, relative à la mesure SA.39235 (2015/C) (ex 2015/NN), mise en œuvre par la Hongrie en matière de taxation des recettes publicitaires (ci-après la « décision litigieuse »).

 Les antécédents du litige, la procédure devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

2        Par la décision litigieuse, la Commission européenne considère que le régime fiscal de taxation des recettes publicitaires institué par ladite mesure (ci-après le « régime fiscal litigieux ») constitue une aide d’État, octroyée par la Hongrie en violation de l’article 108, paragraphe 3, TFUE. De ce fait, la Commission a ordonné à la Hongrie de récupérer auprès des bénéficiaires le montant de l’aide incompatible avec le marché intérieur. Elle a indiqué que cette récupération devait être immédiate et effective et que la Hongrie était tenue de veiller à ce que la décision litigieuse soit pleinement exécutée dans un délai de quatre mois à compter de la notification de celle-ci.

3        Au considérant 96 de cette décision, la Commission a précisé qu’il ne serait pas nécessaire de procéder à la récupération de l’aide si la Hongrie supprimait le régime fiscal litigieux avec effet rétroactif depuis la date d’entrée en vigueur de la taxe sur la publicité en 2014.

4        Par une requête déposée au greffe du Tribunal le 16 janvier 2017, la Hongrie a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse.

5        Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le même jour, la Hongrie a introduit une demande en référé, dans laquelle elle a demandé, en substance, au président du Tribunal de surseoir à l’exécution de cette décision, jusqu’à ce que le Tribunal ait statué sur le fond, et de condamner la Commission aux dépens.

6        Dans ses observations sur la demande en référé déposées au greffe du Tribunal le 31 janvier 2017, la Commission a conclu, en substance, au rejet de la demande en référé au motif que celle-ci serait, à titre principal, irrecevable et, à titre subsidiaire, non fondée. Cette institution a également demandé la condamnation de la Hongrie aux dépens.

7        Estimant qu’il disposait de tous les éléments nécessaires pour statuer sur la demande sans qu’il soit besoin d’entendre les parties oralement, le président du Tribunal a décidé d’examiner d’abord si la condition relative à l’urgence était remplie.

8        Après avoir rappelé, au point 13 de l’ordonnance attaquée, la finalité de la procédure en référé, il a relevé, aux points 15 et 16 de cette ordonnance, que, selon la Hongrie, compte tenu des caractéristiques du régime fiscal litigieux, l’exécution de la décision litigieuse pouvait être effectuée selon deux méthodes différentes. En effet, d’une part, cet État membre pourrait calculer, sur la base des critères contenus dans cette décision, pour chaque contribuable, le montant de l’aide d’État prétendument perçue et en ordonner la récupération. D’autre part, il pourrait également supprimer rétroactivement la taxe prévue par le régime fiscal litigieux et rembourser aux contribuables le montant de la taxe acquittée. Néanmoins, selon la Hongrie, indépendamment de la méthode choisie, il existerait des difficultés de nature à caractériser une urgence justifiant que l’exécution de ladite décision soit suspendue. En effet, l’application de la première méthode impliquerait une charge administrative considérable pour l’administration ainsi que pour les contribuables. Il en irait de même de la seconde méthode qui contraindrait de surcroît la Hongrie à renoncer à des recettes fiscales s’élevant à environ 20 milliards de forints hongrois (HUF) (environ 64,6 millions d’euros).

9        À cet égard, aux points 17 et 18 de ladite ordonnance, le président du Tribunal a relevé que, sans qu’il soit besoin d’examiner si les difficultés avancées par la Hongrie risquaient de compromettre une mission étatique ou l’ordre public, il suffisait de constater que, « selon les données du dossier, le gouvernement hongrois a[vait] notifié, de façon claire et univoque, aux services de la Commission son intention de procéder en suivant la seconde [méthode] ». En effet, bien avant la date d’introduction de la demande en référé, le gouvernement hongrois avait décidé, le 29 novembre 2016, de mettre en œuvre la décision litigieuse en prévoyant le remboursement intégral aux contribuables du montant de la taxe acquittée et avait transmis cette information aux services de la Commission par lettre du 16 décembre 2016.

10      Au point 19 de l’ordonnance attaquée, le président du Tribunal a en outre relevé que, au cours de la procédure de référé devant lui, les autorités hongroises avaient confirmé cette approche aux services de la Commission, par une lettre du 26 janvier 2017. Elles avaient également joint à cette lettre la proposition législative visant à la modification du régime fiscal litigieux et précisant les modes de restitution du montant de la taxe perçue et indiqué l’échéancier prévisionnel de la procédure d’adoption de cette proposition.

11      Au vu de l’ensemble de ces éléments, le président du Tribunal a estimé, au point 21 de l’ordonnance attaquée, qu’il y avait lieu de rejeter la demande en référé pour défaut d’urgence, sans examiner la condition relative au fumus boni juris et sans procéder à la mise en balance des intérêts en présence.

 Les conclusions des parties

12      La Hongrie demande à la Cour :

–        d’annuler l’ordonnance attaquée ;

–        de statuer définitivement sur le litige, et

–        de condamner la Commission aux dépens.

13      La Commission demande à la Cour :

–        de rejeter le pourvoi en ce qu’il est irrecevable, en l’absence d’un intérêt légitime suffisant ;

–        de rejeter le pourvoi en ce qu’il est non fondé ;

–        dans l’hypothèse où la Cour annulerait l’ordonnance attaquée, de renvoyer l’affaire devant le Tribunal ou de statuer elle-même au fond et de rejeter la demande de mesures provisoires comme étant dépourvue de fondement, et

–        de condamner la Hongrie aux dépens de l’instance.

 Appréciation de la Cour

14      Conformément à l’article 149 de son règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 190, paragraphe 1, de ce règlement, si la Cour constate que le recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu de statuer, elle peut, à tout moment, d’office, sur proposition du juge rapporteur, les parties et l’avocat général entendus, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée.

15      Il y a lieu de faire application de cette disposition dans le cadre du présent pourvoi dès lors que, ainsi qu’il a été confirmé par la Hongrie par lettre du 18 août 2017, le 16 mai 2017, à savoir après l’introduction du présent pourvoi, le Parlement hongrois a adopté la proposition de loi unique consolidée T/14684, portant modification de la a reklámadóról szóló 2014. évi XXII. Törvény (loi n°XXII de 2014 relative à la taxe sur la publicité). L’amendement adopté a été promulgué le 25 mai 2017 et était applicable dès le lendemain de sa promulgation, tandis que les autres dispositions législatives sont entrées en vigueur le 1er juillet 2017. Cet amendement prévoit expressément des dispositions d’exécution de la décision litigieuse par lesquelles la taxe sur la publicité acquittée précédemment en vertu de la loi n° XXII de 2014 a été supprimée au 1er juillet 2017 avec effet rétroactif.

16      Or, dans la même lettre, la Hongrie a relevé que, même s’il y a lieu d’admettre que la demande de mesures provisoires est devenue sans objet, en vertu de l’entrée en vigueur desdites dispositions visant à exécuter la décision litigieuse, et que les raisons justifiant d’ordonner de telles mesures faisaient défaut, la Cour devrait néanmoins statuer sur le présent pourvoi en ce qu’il soulève des questions de principe qui vont au-delà du cas d’espèce.

17      En particulier, selon le gouvernement hongrois, la réponse que la Cour pourrait être amenée à donner dans la présente affaire pourrait servir à l’ensemble des États membres afin qu’ils apprécient au mieux si, dans des situations analogues à celle de l’espèce, ils doivent non seulement introduire une demande de mesures provisoires, mais également entreprendre des démarches pour mettre en œuvre les obligations qui pèsent sur eux en vertu d’une décision de la Commission déclarant une aide d’État incompatible et ordonnant la récupération de celle-ci.

18      En l’occurrence, il suffit en premier lieu de constater que la Hongrie reconnaît elle-même que, par l’adoption et l’entrée en vigueur desdites dispositions nationales, la décision litigieuse a été exécutée. De ce fait, la demande de cet État membre visant à obtenir le sursis à l’exécution de cette décision est devenue sans objet.

19      S’agissant, en second lieu, de la réponse à la question de principe posée par le présent pourvoi, à laquelle la Cour devrait, selon la Hongrie, apporter une réponse, il convient, en tout état de cause, de constater qu’elle n’est plus susceptible de procurer un bénéfice à la requérante et ne serait susceptible que de se poser à l’avenir, dans des cas de figure analogues à celui ayant donné lieu au présent pourvoi. Or, cela ne saurait suffire pour justifier qu’il soit statué sur celui-ci [ordonnance du vice-président de la Cour du 17 mars 2016, EMA/Pari Pharma, C‑550/15 P(R), non publiée, EU:C:2016:196, point 45 et jurisprudence citée].

20      Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que le présent pourvoi est devenu sans objet et que, partant, il n’y a pas lieu de statuer sur celui-ci.

 Sur les dépens

21      Aux termes de l’article 149 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 190 de ce règlement, en cas de non-lieu à statuer, la Cour statue sur les dépens.

22      Conformément à l’article 142 dudit règlement, rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184 de celui-ci, les dépens sont, dans ce cas, réglés librement par la Cour.

23      Le non-lieu à statuer étant en l’occurrence imputable à la Hongrie, il y a lieu de condamner celle-ci à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission dans la présente procédure de pourvoi.

Par ces motifs, le vice-président de la Cour ordonne :

1)      Il n’y a pas lieu de statuer sur le pourvoi.

2)      La Hongrie est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne dans la présente procédure de pourvoi.

Signatures


*      Langue de procédure : le hongrois.

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