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Document 62016TO0116

    Order of the General Court (Sixth Chamber) of 27 October 2016.
    Port autonome du Centre et de l'Ouest SCRL and Others v European Commission.
    Action for annulment — State aid — Corporate tax — Aid in favour of Belgian ports granted by Belgium — Commission letter proposing the adoption of appropriate measures — Measure not open to challenge — Inadmissibility.
    Case T-116/16.

    ECLI identifier: ECLI:EU:T:2016:656

    ORDONNANCE DU TRIBUNAL (sixième chambre)

    27 octobre 2016 (1)

    « Recours en annulation – Aides d’État – Impôt sur les sociétés – Aides en faveur des ports belges accordées par la Belgique – Lettre de la Commission proposant l’adoption de mesures utiles – Acte non susceptible de recours – Irrecevabilité »

    Dans l’affaire T‑116/16,

    Port autonome du Centre et de l’Ouest SCRL, établie à La Louvière (Belgique),

    Port autonome de Namur, établi à Namur (Belgique),

    Port autonome de Charleroi, établi à Charleroi (Belgique),

    Port autonome de Liège, établi à Liège (Belgique),

    Région wallonne (Belgique),

    représentés par Me J. Vanden Eynde, avocat,

    parties requérantes,

    contre

    Commission européenne, représentée par MM. S. Noë et B. Stromsky, en qualité d’agents,

    partie défenderesse,

    ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE, tendant à l’annulation de la prétendue décision concernant l’aide d’État SA.38393 (2015/E) – Fiscalité des ports en Belgique, annexée à la lettre de la Commission du 22 janvier 2016 et visant à proposer des mesures utiles au Royaume de Belgique,

    LE TRIBUNAL (sixième chambre),

    composé de MM. G. Berardis (rapporteur), président, S. Papasavvas et Mme O. Spineanu-Matei, juges,

    greffier : M. E. Coulon,

    rend la présente

    Ordonnance

     Antécédents du litige

    1        Au cours de l’année 2013, la Commission européenne a envoyé à tous les États membres un questionnaire sur le fonctionnement et la fiscalité de leurs ports afin d’obtenir une vue d’ensemble de la matière et de clarifier la situation des ports au regard des règles de l’Union européenne sur les aides d’État. Par la suite, la Commission a échangé plusieurs courriers relatifs à cette question avec les autorités belges.

    2        Par courrier du 9 juillet 2014, en application de l’article 17 du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO 1999, L 83, p. 1), la Commission a informé les autorités belges de son évaluation préliminaire des règles belges relatives à la fiscalité des ports en ce qui concerne la possible qualification de celles-ci comme aides d’État et leur compatibilité avec le marché intérieur. En conclusion de ce courrier, elle estimait, à titre préliminaire, que l’exonération de l’impôt sur les sociétés en faveur des ports belges constituait une aide d’État incompatible au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE et annonçait son intention d’entamer une procédure de coopération, en vue de réexaminer le régime en question. Elle informait en outre les autorités belges que ce réexamen pourrait conduire à proposer des mesures utiles en vertu de l’article 18 du règlement n° 659/1999 en vue de supprimer l’aide incompatible.

    3        Les autorités belges ont transmis leurs observations à la Commission et, par lettre du 1er juin 2015, la Commission a répondu à ce courrier en précisant qu’elle maintenait son appréciation préliminaire selon laquelle le fait que les activités économiques des ports belges ne soient pas soumises à l’impôt sur les sociétés constituait une aide d’État incompatible avec le marché intérieur.

    4        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 juillet 2015, le Port autonome du Centre et de l’Ouest SCRL, le Port autonome de Namur, le Port autonome de Charleroi et la Région wallonne ont introduit un recours en annulation contre la décision que contiendrait la lettre de la Commission du 1er juin 2015.

    5        Par ordonnance du 9 mars 2016, Port autonome du Centre et de l’Ouest e.a./Commission (T‑438/15, EU:T:2016:142), le Tribunal a rejeté le recours en considérant que la lettre de la Commission du 1er juin 2015, informant le Royaume de Belgique de son appréciation préliminaire du régime d’aides en cause, ne constituait pas un acte attaquable au sens de l’article 263 TFUE.

    6        Par lettre du 22 janvier 2016, la Commission a adressé au Royaume de Belgique une proposition de mesures utiles concernant l’aide d’État SA.38393 (2015/E) – Fiscalité des ports en Belgique (ci-après l’« acte attaqué »), au sens de l’article 22 du règlement (UE) n° 2015/1589 du Conseil, du 13 juillet 2015, portant modalités d’application de l’article 108 [TFUE] (JO 2015, L 248, p. 9).

    7        Par l’acte attaqué, la Commission a conclu que l’exonération de l’impôt sur les sociétés prévue pour les ports belges constituait un régime d’aides existant incompatible avec le marché intérieur. Elle a considéré que « l[e Royaume de] Belgique d[evait] supprimer l’exonération de l’impôt [sur les] sociétés prévue pour les ports belges, au moins dans la mesure où ceux-ci se livr[ai]ent à des activités économiques » et a invité les autorités belges à adopter, dans un délai de dix mois, « une mesure législative qui fera en sorte d’assujettir les ports à l’impôt [sur les] sociétés pour ce qui est de leurs activités économiques, tout comme le sont les autres entreprises ». Les autorités belges ont été invitées à informer par écrit la Commission que, conformément à l’article 23, paragraphe 1, du règlement n° 2015/1589, elles acceptaient « sans réserve et sans équivoque » la proposition de mesures utiles dans son intégralité, dans un délai de deux mois. Dans le cas contraire, la Commission pourrait procéder conformément aux dispositions de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 2015/1589.

     Procédure et conclusions des parties

    8        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 mars 2016, les requérants, le Port autonome du Centre et de l’Ouest SCRL, le Port autonome de Namur, le Port autonome de Charleroi, le Port autonome de Liège et la Région wallonne, ont introduit le présent recours.

    9        Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 20 juin 2016, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 130, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.

    10      Les requérants n’ont pas présenté d’observations sur cette exception.

    11      Dans la requête, les requérants concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

    –        déclarer le recours recevable ;

    –        annuler l’acte attaqué ;

    –        condamner la Commission aux dépens.

    12      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

    –        rejeter le recours comme manifestement irrecevable ;

    –        condamner les requérants aux dépens.

     En droit

    13      En vertu de l’article 130, paragraphes 1 et 7, du règlement de procédure, si la partie défenderesse le demande, le Tribunal peut statuer sur l’irrecevabilité ou l’incompétence sans engager le débat au fond.

    14      En l’espèce, la Commission ayant demandé qu’il soit statué sur l’irrecevabilité, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, décide de statuer sur cette demande sans poursuivre la procédure.

    15      À cet égard, il y a lieu de constater que, par le présent recours, les requérants demandent l’annulation de l’acte attaqué, par lequel la Commission a proposé des mesures utiles au Royaume de Belgique concernant le régime d’exonération de l’impôt sur les sociétés en faveur des ports belges. Ce régime d’exonération fiscale a été qualifié par la Commission d’aide d’État existante, incompatible avec le marché intérieur.

    16      Or, il convient de rappeler que, s’agissant des articles 21 à 23 du règlement n° 2015/1589 et, en particulier, de la possibilité de demander l’annulation d’une proposition de mesures utiles, le fait, pour la Commission, de proposer ou non des mesures utiles ne produit aucun effet juridique obligatoire définitif, puisque, en l’absence d’acceptation par l’État membre des mesures utiles proposées, celui-ci n’est pas tenu de s’y soumettre (voir ordonnance du 9 mars 2016, Port autonome du Centre et de l’Ouest e.a./Commission, T‑438/15, EU:T:2016:142, point 15 et jurisprudence citée).

    17      En effet, il découle de l’article 23 du règlement n° 2015/1589 que, dans l’hypothèse où l’État membre accepte les mesures utiles proposées par la Commission, cette dernière en prend acte et en informe celui-ci, qui est tenu, par cette acceptation, de mettre en œuvre ces mesures. La décision de la Commission actant les propositions de l’État membre et rendant lesdites propositions contraignantes, conformément à cet article, constitue un acte attaquable (voir ordonnance du 9 mars 2016, Port autonome du Centre et de l’Ouest e.a./Commission, T‑438/15, EU:T:2016:142, point 16 et jurisprudence citée).

    18      Dans l’hypothèse où l’État membre refuse les mesures utiles proposées par la Commission, celle-ci est tenue, si elle estime que de telles mesures sont toujours nécessaires pour le bon fonctionnement du marché intérieur, d’ouvrir la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE. Au terme de cette procédure, la Commission est tenue d’adopter l’une des décisions prévues par l’article 9 du règlement n° 2015/1589. La décision adoptée à l’issue de cette procédure produit des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts des parties intéressées et constitue, dès lors, un acte attaquable, puisqu’elle met fin à la procédure en cause et se prononce définitivement sur la compatibilité de la mesure examinée avec les règles applicables aux aides d’État (voir ordonnance du 9 mars 2016, Port autonome du Centre et de l’Ouest e.a./Commission, T‑438/15, EU:T:2016:142, point 17 et jurisprudence citée).

    19      Il ressort donc clairement de la jurisprudence susmentionnée qu’une décision de la Commission visant à proposer des mesures utiles à l’État membre concerné dans le cadre d’une procédure relative à une aide d’État existante, prévue à l’article 108, paragraphes 1 et 2, TFUE, ne constitue pas un acte attaquable, au sens de l’article 263 TFUE.

    20      En effet, il convient de rappeler que, dans le cadre d’une telle procédure, l’État membre reste libre d’appliquer le régime d’aides concerné et d’octroyer des aides individuelles au titre de ce régime tant qu’il ne décide pas de mettre un terme ou de modifier ce régime, à la suite de l’acceptation de mesures utiles proposées par la Commission, ou tant que la Commission n’adopte pas une décision finale négative, en vertu de l’article 9, paragraphe 5, du règlement n° 2015/1589, déclarant ce régime d’aides incompatible avec le marché intérieur (voir ordonnance du 9 mars 2016, Port autonome du Centre et de l’Ouest e.a./Commission, T‑438/15, EU:T:2016:142, point 26 et jurisprudence citée).

    21      Dès lors, force est de constater que l’acte attaqué ne constitue pas un acte produisant des effets juridiques obligatoires définitifs, susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation sur la base de l’article 263 TFUE.

    22      Partant, il y a lieu d’accueillir l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission et de rejeter le recours comme irrecevable.

     Sur les dépens

    23      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérants ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

    Par ces motifs,

    LE TRIBUNAL (sixième chambre)

    ordonne :

    1)      Le recours est rejeté comme irrecevable.

    2)      Le Port autonome du Centre et de l’Ouest SCRL, le Port autonome de Namur, le Port autonome de Charleroi, le Port autonome de Liège et la Région wallonne supporteront leurs propres dépens, ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.

    Fait à Luxembourg, le 27 octobre 2016.

    Le greffier

     

    Le Président

    E. Coulon

     

    G. Berardis


    1 Langue de procédure : le français.

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