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Document 62004TJ0005
Judgment of the Court of First Instance (Fourth Chamber) of 13 July 2005. # Carlo Scano v Commission of the European Communities. # Officials - Internal competition - Equal treatment - Action for annulment - Action for damages. # Case T-5/04.
Urteil des Gerichts erster Instanz (Vierte Kammer) vom 13. Juli 2005.
Carlo Scano gegen Kommission der Europäischen Gemeinschaften.
Beamte - Internes Auswahlverfahren - Gleichbehandlung - Nichtigkeitsklage - Schadensersatzklage.
Rechtssache T-5/04.
Urteil des Gerichts erster Instanz (Vierte Kammer) vom 13. Juli 2005.
Carlo Scano gegen Kommission der Europäischen Gemeinschaften.
Beamte - Internes Auswahlverfahren - Gleichbehandlung - Nichtigkeitsklage - Schadensersatzklage.
Rechtssache T-5/04.
Sammlung der Rechtsprechung – Öffentlicher Dienst 2005 I-A-00205; II-00931
ECLI identifier: ECLI:EU:T:2005:287
ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)
13 juillet 2005
Affaire T-5/04
Carlo Scano
contre
Commission des Communautés européennes
« Fonctionnaires – Concours interne – Questions à choix multiples – Refus de neutralisation de certaines questions par le jury – Égalité de traitement – Principe de bonne administration – Portée du contrôle juridictionnel – Recours en annulation – Recours en indemnité »
Objet : Recours ayant pour objet, d’une part, une demande en annulation de la décision du jury du concours interne COM/PA/02 pour le passage de la catégorie B à la catégorie A arrêtant les résultats du requérant aux tests de présélection et refusant de l’admettre à l’épreuve orale dudit concours, des décisions confirmatives postérieures, de la liste des lauréats de ce concours dans le domaine dans lequel le requérant a subi les épreuves et de toute décision qui serait adoptée sur cette base, et, d’autre part, une demande en indemnité.
Décision : Le recours est rejeté. Chaque partie supportera ses propres dépens.
Sommaire
1. Fonctionnaires – Concours – Obligation des institutions communautaires d’assurer à tous les candidats un déroulement serein et régulier des épreuves – Violation – Incidence sur la légalité des épreuves – Conditions – Charge de la preuve
2. Fonctionnaires – Concours – Concours sur titres et épreuves – Contenu des épreuves – Irrégularités ou erreurs intervenues lors du déroulement d’un concours à participation nombreuse – Questions à choix multiple – Pouvoir d’appréciation du jury – Contrôle juridictionnel – Limites
(Statut des fonctionnaires, annexe III)
1. Il incombe aux institutions communautaires d’assurer à tous les candidats à un concours le déroulement le plus serein et régulier possible des épreuves. Une irrégularité intervenue pendant le déroulement des épreuves d’un concours n’affecte toutefois la légalité desdites épreuves que si elle est de nature substantielle et susceptible de fausser les résultats de celles‑ci. Lorsqu’une telle irrégularité intervient, il incombe à l’institution défenderesse de prouver qu’elle n’a pas affecté les résultats des épreuves.
(voir point 43)
Référence à : Tribunal 11 février 1999, Jiménez/OHMI, T‑200/97, RecFP p. I‑A‑19 et II‑73 ; point 55 ; Tribunal 24 avril 2001, Torre e.a./Commission, T‑159/98, RecFP p. I‑A‑83 et II‑395, points 46 et 47 ; Tribunal 7 février 2002, Felix/Commission, T‑193/00, RecFP p. I‑A‑23 et II‑101, point 45
2. Le jury d’un concours dispose d’un large pouvoir d’appréciation en ce qui concerne les modalités et le contenu détaillé des épreuves. Le juge communautaire ne peut, dès lors, censurer les modalités des épreuves que dans la mesure nécessaire pour assurer le traitement égal des candidats et l’objectivité du choix opéré entre ceux‑ci.
S’agissant, plus particulièrement, du principe d’égalité de traitement, il revêt une importance très grande dans le cadre des procédures de concours et il appartient au jury de veiller à ce que les épreuves présentent sensiblement le même degré de difficulté pour tous les candidats.
De même, le jury dispose d’un large pouvoir d’appréciation quant à la question de savoir s’il est confronté à des irrégularités ou des erreurs intervenues lors du déroulement d’un concours général à participation nombreuse, notamment en ce qui concerne la formulation des questions à choix multiples. Ainsi, le juge communautaire doit se limiter à un contrôle restreint en ce qui concerne l’intelligibilité des questions. En conséquence, le juge communautaire n’annulera une décision du jury en raison du défaut d’intelligibilité d’une question qu’en cas d’erreur manifeste d’appréciation sur le caractère substantiel ou non de l’irrégularité invoquée par le candidat.
(voir points 44 à 46)
Référence à : Cour 24 mars 1988, Goossens/Commission, 28/86, Rec. p. 1819, points 14 et 15 ; Tribunal 27 juin 1991, Valverde Mordt/Cour de justice, T‑156/89, Rec. p. II‑407, point 123 ; Tribunal 2 mai 2001, Giulietti e.a./Commission, T‑167/99 et T‑174/99, RecFP p. I‑A‑93 et II‑441, point 61 ; Tribunal 19 février 2004, Konstantopoulou/Cour de justice, T‑19/03, non encore publié au Recueil, point 48
ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)
13 juillet 2005(*)
« Fonctionnaires – Concours interne – Questions à choix multiples – Refus de neutralisation de certaines questions par le jury – Égalité de traitement – Principe de bonne administration – Portée du contrôle juridictionnel – Recours en annulation – Recours en indemnité »
Dans l’affaire T‑5/04,
Carlo Scano, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Me M.‑A. Lucas, avocat,
partie requérante,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall, en qualité d’agent, assisté de Me D. Waelbroeck, avocat, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie défenderesse,
ayant pour objet, d’une part, une demande en annulation de la décision du jury du concours interne COM/PA/02 pour le passage de la catégorie B à la catégorie A, arrêtant les résultats du requérant aux tests de présélection et refusant de l’admettre à l’épreuve orale dudit concours, des décisions confirmatives postérieures, de la liste des lauréats de ce concours dans le domaine dans lequel le requérant a subi les épreuves et de toute décision qui serait adoptée sur cette base et, d’autre part, une demande en indemnité,
LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),
composé de MM. H. Legal, président, P. Mengozzi et Mme I. Wiszniewska-Białecka, juges,
greffier : M. I. Natsinas, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 13 janvier 2005,
rend le présent
Arrêt
Faits à l’origine du litige
1 Le requérant a participé au concours interne COM/PA/02 de passage de la catégorie B vers la catégorie A, organisé par la Commission pour la constitution d’une réserve de recrutement d’administrateurs de grade A 7/A 6 dans différents domaines (ci-après le « concours »). Un maximum de 90 lauréats était prévu pour l’ensemble des cinq domaines spécifiés dans l’avis de concours. L’acte de candidature devait préciser le choix de la langue communautaire retenue par le candidat pour les épreuves. L’avis de concours a été publié le 31 mai 2002.
2 Le concours comprenait des tests de présélection, suivis d’une épreuve orale. Le point V A de l’avis de concours précisait que les tests de présélection comprenaient deux épreuves. La première épreuve était constituée d’une série de questions à choix multiples visant à évaluer les aptitudes et compétences générales des candidats en matière de capacité de raisonnement verbal et numérique (ci-après le « test verbal et numérique »). La seconde épreuve était constituée d’une série de questions à choix multiples visant à évaluer les connaissances spécifiques des candidats dans un des domaines choisi par le candidat parmi les cinq proposés (ci-après le « test de connaissances »). Chacun de ces tests était noté de 0 à 40 points, avec un minimum requis de 20 points.
3 Pour être admis à l’épreuve orale, les candidats devaient au préalable réussir les tests de présélection et figurer parmi les candidats ayant obtenu les meilleures notes dans le domaine choisi. Le nombre de candidats admis à l’épreuve orale était limité, pour chaque domaine, au double du nombre de lauréats prévus pour le même domaine.
4 Le requérant, fonctionnaire de la Commission de catégorie B, a opté pour le domaine n° 3 « Gestion des ressources humaines/Organisation et coordination administrative » et a choisi de subir les tests de présélection en italien. Ces tests ont eu lieu le 13 décembre 2002.
5 Le test verbal et numérique était précédé des instructions suivantes (version française) :
« Chaque question comprend un texte et quatre affirmations. Vous devez indiquer laquelle de ces affirmations peut le mieux être déduite du texte.
NB : Une affirmation peut être en contradiction totale ou partielle avec le texte. Parfois, une affirmation est vraie en soi, mais son contenu ne peut être déduit du texte. Vous devez fonder votre réponse exclusivement sur les informations figurant dans le texte. Vous ne pouvez choisir qu’une réponse pour chaque texte. »
6 La question n° 6 du test verbal et numérique (ci-après la « question n° 6 ») était libellée comme suit, respectivement dans ses versions française, italienne et anglaise :
« En l’espace de quatre jours à peine, le plus petit site Internet du monde – un demi-centimètre carré environ – a attiré plus de 100 000 visiteurs. Le site a été créé par un collectif qui a cependant dû tempérer ses prétentions. Si, au sens strict, le site n’est pas le plus petit au monde, c’est certainement le plus petit site sur lequel on puisse jouer une partie de ping-pong.
a) À ce jour, le site qui pourrait bien être le plus petit au monde a attiré plus de 100 000 visiteurs.
b) Sur une période limitée, le plus petit site du monde sur lequel on peut jouer une partie de ping-pong a attiré une moyenne d’au moins 25 000 visiteurs par jour.
c) Dans un concours consistant à créer le plus petit site du monde, un collectif a opté pour l’installation d’un site où il serait possible de jouer une partie de ping-pong.
d) La plupart des personnes qui naviguent sur Internet aiment jouer, notamment des parties de ping-pong en ligne. »
(« In soli quattro giorni, il sito web più piccolo del mondo – circa mezzo centimetro quadrato – ha attirato circa 100 000 visitatori. Il sito è un’iniziativa di un gruppo di progettatori che afferma, in difesa del proprio primato, che il sito non sarà forse in assoluto il più piccolo del mondo, ma è certamente il più piccolo in cui si possa giocare una partita di ping-pong.
a) Sino ad oggi, il sito web che è forse il più piccolo del mondo ha attirato circa 100 000 visitatori.
b) Per un breve periodo, il sito più piccolo del mondo in cui si possa giocare una partita di ping-pong ha attirato una media di almeno 25 000 visitatori al giorno.
c) Nell’ambito di un concorso volto a creare il sito più piccolo del mondo, un gruppo di progettatori ha scelto di creare un sito in cui fosse possibile giocare una partita di ping-pong.
d) La maggior parte delle persone che navigano in rete ama giocare in linea a giochi come il ping-pong. »)
(« In just four days, the smallest web-site in the world – about a half a square centimetre – attracted more than 100 000 visitors. The site is an initiative of a Design Collective, but they have hedged their claim. The site may not strictly be the smallest in the world, but it is certainly the smallest site on which you can play a game of ping-pong.
a) Up to now, the site which may well be the smallest web-site in the world has attracted more than 100 000 visitors.
b) For a short time, the smallest site in the world on which you can play a game of ping-pong attracted an average of 25 000 visitors a day.
c) In a competition to build the smallest site in the world, a Design Collective chose to create a site on which people could play a game of ping-pong.
d) The majority of people who surf the net like to play games such as ping-pong on-line. »)
7 Selon la grille des bonnes réponses, la réponse correcte est la proposition b). Le requérant a choisi la proposition a).
8 Par lettre du 24 février 2003, l’Office de sélection du personnel des Communautés européennes (EPSO) a notifié au requérant ses résultats aux tests de présélection. Il a obtenu un total de 55,96 points sur 80, soit 33,103 points sur 40 pour le test verbal et numérique, et 22,857 points sur 40 pour le test de connaissances (ci-après la « notification des résultats »). Il a été informé que, compte tenu de ces résultats, il ne figurait pas parmi les 80 meilleurs candidats admis à l’épreuve orale. Ces derniers avaient obtenu au minimum un total de 56,059 points.
9 La notification des résultats était accompagnée d’une information adressée à tous les candidats : en raison d’erreurs constatées après le déroulement des tests de présélection, et afin de garantir l’égalité de traitement des candidats, la question n° 24 du test verbal et numérique et les questions nos 2, 6 et 23 du test de connaissances dans le domaine choisi par le requérant avaient été neutralisées. La neutralisation concernait toutes les versions linguistiques du concours. En conséquence, la valeur de chaque question restante a été calculée en divisant la notation indiquée dans l’avis de concours par le nombre de questions restantes.
10 Par lettre du 7 mars 2003, le requérant a appelé l’attention du président du jury sur une discordance existant entre, d’une part, la version italienne de la question n° 6 et, d’autre part, les versions française et anglaise de la même question. Le requérant faisait valoir que le terme « circa » utilisé dans la version italienne pour qualifier le nombre de visiteurs du site ne traduisait ni l’anglais « more than » ni le français « plus de », mais signifiait plutôt « à peu près » ou « environ ». Selon le requérant, cette discordance, due à une erreur de traduction, a rendu impossible l’identification de la réponse correcte dans la version italienne, violant ainsi le principe d’égalité des candidats. Il demandait en conséquence que cette question soit neutralisée, et que la liste des candidats admis à l’épreuve orale soit modifiée en conséquence. Il affirmait qu’il était probable que cette rectification ait pour conséquence son admission à l’épreuve orale, du fait de la différence minime (0,099 point) existant entre sa note et la note minimale obtenue par les 80 meilleurs candidats admis à se présenter à l’épreuve orale.
11 Par télécopie du 13 mars 2003, il a demandé communication du corrigé de ses épreuves et de la grille des bonnes réponses, demande à laquelle l’EPSO a répondu favorablement par lettre du 19 mars 2003.
12 Par lettre du 22 avril 2003, l’EPSO, au nom du président du jury, a informé le requérant qu’il ne considérait pas que la discordance relevée ait pu avoir une incidence sur la compréhension du texte et sur la déduction de la bonne réponse dans la version italienne de la question n° 6. Au soutien de sa position, il avançait notamment que le terme « circa » était repris à la fois dans l’énoncé du texte et dans la possibilité de réponse, aux mêmes endroits que les termes utilisés à la place de « circa » dans les versions anglaise et française.
13 Par lettre du 28 avril 2003, le requérant s’est à nouveau adressé au président du jury et a réitéré sa demande du 7 mars 2003. Alternativement, il a demandé que la réponse a) ne soit pas considérée comme incorrecte. Il y précisait également son grief : l’expression « circa 100 000 visitatori » (environ 100 000 visiteurs) utilisée dans l’énoncé ne permettait pas de choisir la réponse b), qui faisait référence à « una media di almeno 25 000 visitatori al giorno » (une moyenne d’au moins 25 000 visiteurs par jour), car cette réponse impliquait le dépassement du nombre de 100 000 visiteurs, alors qu’un tel dépassement ne pouvait être déduit avec certitude de l’énoncé de la question. Le choix de la réponse b) aurait au contraire été possible dans les versions française et anglaise de la question n° 6, car celles-ci faisaient respectivement référence, dans leur énoncé et dans la réponse b), à « plus de 100 000 visiteurs » et « au moins 25 000 visiteurs par jour » et à « more than 100 000 visitors » et « an average of 25 000 visitors a day ». Il était d’avis que seule la réponse a) pouvait être déduite de l’énoncé de la question n° 6 dans la version italienne.
14 Par lettre du 21 mai 2003, le jury a confirmé la position déjà exprimée dans sa lettre du 22 avril 2003. Il précisait en outre que la réponse a) était bien incorrecte, du fait de la différence temporelle introduite entre les termes de l’énoncé (« en l’espace de quatre jours à peine ») et ceux de la réponse a) (« à ce jour »), ayant été précisé que la réponse devait être déduite du seul texte de l’énoncé.
15 Le 22 mai 2003, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut »). Il y concluait à l’annulation de la décision du jury du concours de ne pas l’admettre à l’épreuve orale et, pour autant que de besoin, de la décision du jury de concours rejetant sa demande de réexamen du 7 mars 2003 (lettre de l’EPSO du 22 avril 2003), de l’ensemble du concours ou, à tout le moins, de la liste des candidats admis à participer à l’épreuve orale, en tout cas pour le domaine choisi par le requérant, et de toute autre décision adoptée à la suite de l’illégalité constatée. Le requérant visait également la lettre confirmative de l’EPSO du 21 mai 2003. Il souhaitait en particulier que le jury réexamine, après neutralisation de la question n° 6, l’ensemble des résultats au regard de la nouvelle pondération des questions non neutralisées du test verbal et numérique. Il demandait également le paiement d’un euro à titre de réparation du dommage moral subi. Il fondait principalement sa réclamation sur le fait que le jury n’aurait pas veillé à assurer l’égalité de traitement des candidats.
16 Par lettre du même jour, le conseil du requérant a informé le directeur général de la direction générale « Personnel et administration » de la Commission des irrégularités qui auraient entaché le concours. Cette lettre a été transmise à l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») compétente en la matière, à savoir le directeur de l’EPSO. L’EPSO a répondu à cette lettre par un courrier en date du 2 juin 2003, en indiquant que le jury avait déjà répondu aux deux demandes du requérant.
17 La réclamation a été traitée lors d’une réunion interservices du 23 juillet 2003. Le 24 septembre 2003, l’AIPN a adopté une décision rejetant la réclamation (ci-après la « décision de rejet »). L’AIPN y avançait deux motifs principaux. Premièrement, la réponse a) aurait été exclue du fait de la différence temporelle existant entre ses termes et ceux de l’énoncé de la question n° 6. Deuxièmement, les statistiques relatives à la question n° 6 démontreraient que la divergence entre les versions linguistiques, mise en cause par le requérant, n’a eu aucune incidence sur les résultats du concours. Elle concluait donc que la décision du jury de concours de ne pas revoir les résultats du requérant au test verbal et numérique n’était entachée ni d’erreur manifeste d’appréciation ni de violation du principe de non-discrimination entre les candidats. Cette décision a été notifiée au requérant par lettre du 25 septembre 2003.
Procédure et conclusions des parties
18 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 janvier 2004, le requérant a introduit le présent recours.
19 Le 2 avril 2004, la Commission a déposé son mémoire en défense au greffe du Tribunal.
20 En application de l’article 47, paragraphe 1, de son règlement de procédure, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé qu’un second échange de mémoires n’était pas nécessaire en l’espèce. Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a décidé d’ouvrir la procédure orale.
21 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales du Tribunal lors de l’audience du 13 janvier 2005.
22 Par ailleurs, la défenderesse a, dans les délais impartis, répondu à la demande de production de documents formulée par le Tribunal au cours de l’audience, relative à la neutralisation de la question n° 24 du test verbal et numérique, et transmis au greffe du Tribunal son analyse de ces documents. Le requérant a formulé dans les délais impartis ses observations écrites sur cette réponse.
23 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision du jury du concours arrêtant ses résultats aux tests de présélection et refusant en conséquence de l’admettre à l’épreuve orale, qui lui a été notifiée par lettre de l’EPSO du 24 février 2003 ;
– annuler la décision du jury confirmant cette décision, qui lui a été notifiée par lettre de l’EPSO du 22 avril 2003, en réponse à sa demande de réexamen du 7 mars 2003 ;
– annuler la décision du jury de confirmer les précédentes décisions, qui lui a été notifiée par lettre de l’EPSO du 21 mai 2003, en réponse à sa demande de réexamen du 28 avril 2003 ;
– annuler la liste des lauréats du domaine n° 3 du concours ainsi que toute décision qui serait adoptée sur cette base ;
– condamner la Commission à lui payer, en réparation de son préjudice moral, une somme dont le Tribunal appréciera le montant ;
– condamner la Commission aux dépens.
24 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours comme non fondé ;
– statuer sur les dépens comme de droit.
En droit
Sur les conclusions en annulation
25 Le requérant invoque un moyen unique, tiré de la violation des principes de bonne administration, de sollicitude, d’égalité de traitement des candidats dans le déroulement du concours et d’« objectivité » du choix opéré entre eux ainsi que d’une erreur manifeste d’appréciation et d’un détournement de pouvoir, en ce que la version italienne de la question n° 6 présenterait, en raison d’erreurs de traduction, des différences par rapport à ses versions française et anglaise qui ont eu pour effet de le confronter à une question plus difficile que les candidats ayant opté pour la version française ou anglaise des tests de présélection et de lui faire logiquement choisir une réponse considérée comme erronée.
Sur la violation du principe d’égalité de traitement des candidats
– Arguments des parties
26 Le requérant fait valoir, en premier lieu, qu’il incombe à un jury de concours de respecter, sous le contrôle du juge communautaire, le principe d’égalité de traitement des candidats lors du déroulement d’un concours, et ce nonobstant le large pouvoir d’appréciation dont il jouit quant aux modalités et au contenu détaillé des épreuves. Le Tribunal disposerait ainsi du pouvoir de censurer la décision d’un jury de concours constatant l’échec d’un candidat à une épreuve et l’excluant dudit concours dès lors que cette décision est prise en violation d’une règle régissant les travaux du jury, telle que le principe d’égalité de traitement des candidats.
27 En l’espèce, la discordance entre les différentes versions linguistiques de la question n° 6 ne serait ni contestable ni contestée par le jury ou par l’AIPN. Elle aurait eu pour effet de confronter les candidats ayant passé les tests de présélection en italien à une question plus difficile que ceux ayant fait le choix d’une autre langue, en violation du principe d’égalité de traitement des candidats.
28 Le requérant fait valoir, en second lieu, qu’une irrégularité de procédure n’est de nature à vicier un acte que s’il est établi qu’en l’absence de cette irrégularité ledit acte aurait pu avoir un contenu différent. Il en déduit que, en application de la jurisprudence du Tribunal, il revenait à l’institution défenderesse de prouver que les irrégularités qu’il a invoquées n’avaient pas affecté son résultat final au concours.
29 Trois éléments soutiendraient son argumentation : l’impossibilité de déduire la réponse b) dans la version italienne de la question n° 6, le caractère correct de la réponse a) et la non-pertinence du recours aux statistiques relatives à la question n° 6.
30 S’agissant tout d’abord de la possibilité de déduire la réponse b) dans la version italienne de la question n° 6, le requérant considère que la justification avancée à ce sujet par le jury dans sa lettre du 22 avril 2003, à savoir que les termes correspondant à l’italien « circa » dans les versions anglaise (more than) et française (plus de) seraient employés aux mêmes endroits que le terme « circa » dans la version italienne, repose sur une déformation du grief qu’il a avancé dans sa lettre du 7 mars 2003. Le jury n’aurait pas démontré par cette indication que les irrégularités dénoncées n’ont pas faussé son propre résultat au concours. En effet, les termes utilisés dans la version italienne de la question n° 6 rendraient impossible la déduction de la réponse b), les termes de l’énoncé (« In soli quattro giorni […] circa 100 000 visitatori ») (En seulement quatre jours […] environ 100 000 visiteurs) ne pouvant pas être conciliés avec ceux de la réponse b) (« Per un breve periodo […] una media di almeno 25 000 visitatori al giorno ») (Sur une brève période […] une moyenne d’au moins 25 000 visiteurs par jour), qui impliquerait un dépassement du nombre de 100 000 visiteurs au total. En outre, il résulterait de l’arrêt du Tribunal du 11 février 1999, Jiménez/OHMI (T‑200/97, RecFP p. I‑A‑19 et II‑73), que l’absence de reprise de cette justification par l’AIPN dans la décision de rejet constitue un indice de l’existence de cette erreur.
31 Ensuite, quant au caractère correct de la réponse a), le requérant conteste la justification, avancée par le jury et reprise par l’AIPN, relative à l’existence d’une différence temporelle entre l’énoncé de la question et la réponse a), car le choix de cette réponse méconnaîtrait les instructions de réponse accompagnant le test verbal et numérique, les termes « en l’espace de quatre jours à peine » figurant dans l’énoncé n’étant pas incompatibles avec les termes « à ce jour » figurant dans la réponse a). Par conséquent, le jury et l’AIPN n’auraient pas démontré que les erreurs de traduction n’ont pas eu d’influence sur les résultats du concours et auraient au contraire commis une erreur manifeste d’appréciation et violé le « principe » de l’appréciation objective des épreuves des candidats.
32 Enfin, quant au recours aux statistiques s’agissant de l’établissement des violations alléguées, d’une part, le requérant fait valoir que la Commission ne peut pas se fonder sur des statistiques pour démontrer que les irrégularités dénoncées n’ont pas affecté le résultat du concours, la question étant de savoir si les discordances linguistiques ont pu avoir une incidence sur ses propres résultats et sur la décision du jury de l’exclure des épreuves orales du concours. De plus, l’interprétation de ces statistiques par l’AIPN serait tendancieuse, dans la mesure où celles-ci pourraient tout aussi bien être interprétées comme démontrant l’incidence générale des discordances linguistiques sur le concours. La comparaison avec les résultats du test en anglais serait également dénuée de pertinence, cette version de la question n° 6 étant aussi entachée d’une erreur de traduction de nature à détourner les candidats de la réponse b) vers la réponse a).
33 D’autre part, le recours de l’AIPN à ces statistiques dans sa décision de rejet illustrerait les erreurs manifestes d’appréciation commises par le jury quant à l’appréciation de l’impact des irrégularités dénoncées sur le résultat du concours.
34 La Commission rétorque qu’un large pouvoir d’appréciation est reconnu au jury s’agissant des modalités et du contenu détaillé des épreuves prévues pour un concours. Elle reconnaît cependant que le bien-fondé des jugements de valeur effectués par le jury peut être contrôlé par le juge communautaire en cas de violation des règles, qui président à ses travaux. Toutefois, le Tribunal ne pourrait substituer son appréciation à celle du jury en ce qui concerne le degré de difficulté des épreuves et il ne saurait censurer les modalités d’une épreuve que dans la mesure nécessaire pour assurer le traitement égal des candidats et l’objectivité du choix opéré entre ceux-ci. Elle en déduit qu’il n’est possible de constater une irrégularité encourant la sanction du juge communautaire que si une question est manifestement entachée d’une erreur telle qu’elle aurait nécessairement dû être annulée par le jury afin de préserver l’égalité entre tous les candidats, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce.
35 Dans l’éventualité où le contenu d’une épreuve serait entaché d’une irrégularité, celle-ci justifierait l’annulation de l’épreuve en cause et des actes ultérieurs uniquement si cet élément avait faussé le résultat final du concours de telle sorte qu’il apparaisse clairement que le principe d’égalité de traitement entre les candidats n’a pas été respecté. En l’espèce, le requérant n’apporterait aucune preuve de l’irrégularité commise susceptible de renverser la présomption de légalité dont jouit toute décision administrative, la simple existence de divergences n’étant pas suffisante pour démontrer que les candidats ayant choisi l’italien ont manifestement fait l’objet d’une discrimination par rapport aux candidats ayant choisi une autre langue.
36 Quant à la possibilité de déduire la réponse b) dans la version italienne de la question n° 6, la Commission conteste la position du requérant. En effet, seule la réponse b) répondrait aux conditions cumulatives de ne pas être en contradiction avec le sens de l’énoncé et de pouvoir se déduire exclusivement des informations contenues dans celui-ci.
37 La Commission conteste également la position du requérant s’agissant du caractère correct de la réponse a), en soulignant notamment que les termes « à ce jour » ne peuvent être déduits de l’expression « en l’espace de quatre jours ».
38 Quant au recours aux statistiques, la Commission précise que c’est la version anglaise du questionnaire qui a servi de base aux traductions vers les autres versions linguistiques.
39 Elle fait valoir que les statistiques utilisées dans la décision de rejet de l’AIPN permettent justement de vérifier l’existence de l’irrégularité alléguée. Or, ces statistiques feraient apparaître que les différences terminologiques relevées par le requérant n’ont justement pas eu pour conséquence de rendre la question n° 6 manifestement plus difficile pour les candidats ayant subi les épreuves en italien, les statistiques de réussite à la question n° 6 auxquelles l’AIPN a eu recours ne variant que faiblement entre les versions linguistiques, ainsi qu’il résulterait du tableau suivant :
Langue |
Réponse a) |
Réponse b) |
Nombre de candidats |
Anglais |
34,38 % |
63,54 % |
96 |
Français |
27,57 % |
64,32 % |
370 |
Italien |
29,58 % |
61,97 % |
71 |
40 La prise en compte des résultats de l’ensemble des candidats serait nécessaire pour pouvoir déterminer les effets éventuellement discriminatoires des différences linguistiques constatées. La Commission considère que l’erreur commise par le requérant dans sa réponse à la question n° 6 ne suffit pas à démontrer que les différences entre les versions linguistiques de cette question méconnaissent le principe d’égalité de traitement.
41 La Commission conclut que le principe d’égalité de traitement n’a pas été violé.
42 En tout état de cause, même si l’atteinte au principe d’égalité était reconnue, l’annulation de la liste des lauréats du domaine choisi par le requérant et des actes ultérieurs ne se justifierait pas, car il suffirait au jury et à l’AIPN de chercher une solution équitable au cas du requérant.
– Appréciation du Tribunal
43 Il incombe aux institutions d’assurer à tous les candidats à un concours le déroulement le plus serein et régulier possible des épreuves. Une irrégularité intervenue pendant le déroulement des épreuves d’un concours n’affectera toutefois la légalité desdites épreuves que si elle est de nature substantielle et susceptible de fausser les résultats de celles-ci. Lorsqu’une telle irrégularité intervient, il incombe à l’institution défenderesse de prouver qu’elle n’a pas affecté les résultats des épreuves (arrêt Jiménez/OHMI, précité, point 55, arrêts du Tribunal du 24 avril 2001, Torre e.a./Commission, T‑159/98, RecFP p. I‑A‑83 et II‑395, points 46 et 47, et du 7 février 2002, Felix/Commission, T‑193/00, RecFP p. I‑A‑23 et II‑101, point 45).
44 Par ailleurs, comme le rappellent justement les parties, le jury d’un concours dispose d’un large pouvoir d’appréciation en ce qui concerne les modalités et le contenu détaillé des épreuves. Le juge communautaire ne peut, dès lors, censurer les modalités des épreuves que dans la mesure nécessaire pour assurer le traitement égal des candidats et l’objectivité du choix opéré entre ceux-ci (arrêt de la Cour du 24 mars 1988, Goossens/Commission, 228/86, Rec. p. 1819, point 14, et arrêt du Tribunal du 19 février 2004, Konstantopoulou/Cour de justice, T‑19/03, non encore publié au Recueil, point 48).
45 S’agissant plus particulièrement du principe d’égalité de traitement, il revêt une importance très grande dans le cadre des procédures de concours, et il appartient au jury de veiller à ce que les épreuves présentent sensiblement le même degré de difficulté pour tous les candidats (arrêt Goossens/Commission, précité, point 15, et arrêt du Tribunal du 27 juin 1991, Valverde Mordt/Cour de justice, T‑156/89, Rec. p. II‑407, point 123).
46 De même, le jury dispose d’un large pouvoir d’appréciation quant à la question de savoir s’il est confronté à des irrégularités ou des erreurs intervenues lors du déroulement d’un concours général à participation nombreuse, notamment en ce qui concerne la formulation des questions à choix multiples. Ainsi, le juge communautaire doit se limiter à un contrôle restreint en ce qui concerne l’intelligibilité des questions (arrêt du Tribunal du 2 mai 2001, Giulietti e.a./Commission, T‑167/99 et T‑174/99, RecFP p. I‑A‑93 et II‑441, point 61). En conséquence, le juge communautaire n’annulera une décision du jury en raison du défaut d’intelligibilité d’une question qu’en cas d’erreur manifeste d’appréciation sur le caractère substantiel ou non de l’irrégularité invoquée par le requérant (voir, en ce sens, arrêt Giulietti e.a./Commission, précité, point 61).
47 Il résulte de ce qui précède que le choix de la formulation d’une question à choix multiples et des possibilités de réponse qui y sont proposées relève du large pouvoir d’appréciation du jury de concours (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 26 mars 2003, Martínez Páramo e.a./Commission, T‑33/00, RecFP p. I‑A‑105 et II‑541, point 48). En effet, dans le cadre d’un test consistant en des questions à choix multiples, c’est par définition au moment de l’élaboration des questions et des propositions de réponse que le jury de concours établit la base pour l’évaluation comparative des candidats, en déterminant dès ce stade quelle réponse devra être donnée. La même analyse doit prévaloir pour chacune des versions linguistiques de telles épreuves, dès lors que le jury de concours a procédé à leur relecture préalable.
48 En outre, comme le soutient justement la Commission, si les violations alléguées par le requérant sont établies, l’annulation de la liste des lauréats ne se justifie généralement pas (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 14 juillet 1983, Detti/Cour de justice, 144/82, Rec. p. 2421, point 33).
49 C’est compte tenu de ces éléments que les trois arguments avancés par le requérant doivent être analysés.
50 En ce qui concerne, premièrement, la possibilité de déduire de l’énoncé la réponse b) dans la version italienne de la question n° 6, il est constant qu’il existe une divergence linguistique entre la formulation de cette question dans sa version italienne et la formulation de cette question dans ses versions française et anglaise. En outre, l’argument du requérant relatif à l’absence de pertinence de la justification avancée par le jury quant à la possibilité de déduire la bonne réponse est fondé, dans la mesure où cette justification est sans pertinence par rapport au grief invoqué par le requérant, qui se référait clairement à l’impossibilité de concilier l’expression « In soli quattro giorni […] circa 100 000 visitatori » avec les termes « Per un breve periodo […] una media di almeno 25 000 visitatori al giorno ».
51 Cet élément est toutefois insuffisant pour conclure que les différences linguistiques invoquées sont telles qu’elles ont entraîné la violation du principe d’égalité de traitement des candidats. Tout d’abord, la justification avancée par le jury démontre uniquement le caractère tout aussi fallacieux de la réponse a) dans les trois versions linguistiques auxquelles se réfère le requérant, car chacune reprend un extrait de phrase de l’énoncé. Ensuite, le fait que la justification avancée par le jury n’ait pas été reprise par l’AIPN dans sa décision de rejet de la réclamation n’est pas pertinent, dès lors que cette justification ne répondait pas à l’argument présenté par le requérant. Enfin, l’arrêt Jiménez/OHMI, précité, ne permet pas de soutenir l’argumentation du requérant selon laquelle l’absence de reprise par l’AIPN des justifications avancées par le jury suffirait à démontrer l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation. En effet, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Jiménez/OHMI, les irrégularités tenant notamment au comportement du jury lors d’une épreuve orale étaient nombreuses, et ce sont les défenses contradictoires des autorités administratives concernées qui ont concouru à établir une irrégularité substantielle. Les faits particuliers à l’affaire Jiménez/OHMI ne permettent donc pas d’établir le principe général sur lequel se fonde le requérant pour tenter d’établir l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation commise par le jury.
52 Sur ce point, s’agissant de l’argument du requérant selon lequel le nombre de visiteurs selon la réponse b) dépasse le nombre de visiteurs figurant dans l’énoncé de la question n° 6, il faut admettre qu’en termes purement mathématiques le nombre d’environ 100 000 visiteurs répartis en l’espace de quatre jours ne peut être considéré comme strictement équivalent à une moyenne d’au moins 25 000 par jour répartis sur une période limitée (version italienne). Il ne peut cependant être exclu que cette moyenne soit atteinte. En outre, il en va de même s’agissant des expressions « plus de 100 000 » visiteurs répartis sur « quatre jours » et « au moins 25 000 par jour » « sur une période limitée » (version française), car, si aucun élément de l’énoncé ne permet de déduire que « quatre jours » équivalent à une « période limitée », il ne peut, pour autant, être exclu que, compte tenu du minimum de 25 000 visiteurs par jour enregistré sur une période limitée, un nombre au moins égal à 100 000 visiteurs puisse être atteint sur une période de quatre jours. Le critère mathématique ne peut donc être considéré comme un élément dirimant en l’espèce, et cet argument du requérant doit en conséquence être rejeté.
53 Par ailleurs, d’autres éléments militaient clairement en faveur du choix de la réponse b), tant dans la version italienne que dans les autres versions linguistiques de la question n° 6. Ainsi, un élément important de choix était que le jeu de ping-pong était mentionné tant dans la proposition de réponse b) que dans l’énoncé de la question, alors qu’il n’apparaissait pas dans la proposition de réponse a). À cet égard, il faut relever que les instructions de réponse données aux candidats indiquaient expressément qu’une affirmation pouvait « être en contradiction totale ou partielle avec le texte » et qu’il convenait d’« indiquer laquelle de ces affirmations [pouvait] le mieux être déduite du texte ». Il ne s’agissait donc pas d’identifier la réponse correspondant exactement à l’énoncé, mais de choisir celle qui s’en rapprochait le plus. En outre, la réponse b) comprenait, dans les trois versions linguistiques qui ont été soumises par le requérant au Tribunal, des précisions quant au site Internet concerné dans des termes strictement identiques à ceux de l’énoncé. Cette réponse se rapprochait donc davantage de l’énoncé.
54 Au vu de ce qui précède, le requérant n’est pas parvenu à démontrer que le jury a commis une erreur manifeste d’appréciation en estimant qu’il était possible de déduire que la bonne réponse dans la version italienne de la question n° 6 était la réponse b). Il en résulte que la question n° 6 n’était pas rendue plus difficile dans la version italienne du test verbal et numérique que dans ses versions française ou anglaise, du fait de la prétendue impossibilité de déduire la bonne réponse dans cette première version.
55 En ce qui concerne, deuxièmement, le caractère prétendument correct de la réponse a), en premier lieu, comme l’a justement avancé la défenderesse, on ne saurait déduire du seul énoncé de la question, comportant les termes quatre jours, que le nombre de visiteurs en cause ait été enregistré à ce jour.
56 En deuxième lieu, la réponse a) ne mentionne pas le jeu de ping-pong, activité qui figure cependant dans l’énoncé de la question n° 6.
57 En troisième lieu, aucun argument ne peut être tiré de la présence de l’expression « circa » tant dans l’énoncé de la question que dans la réponse a), dès lors qu’il a été établi ci-dessus que cet élément démontre uniquement le caractère identiquement fallacieux de la réponse a) dans les trois versions linguistiques analysées et, donc, un degré de difficulté similaire de la question n° 6 dans les trois versions linguistiques analysées.
58 En quatrième lieu, puisqu’il est déjà établi que le choix de la réponse a) ne se justifiait pas logiquement, il convient de rejeter l’argument du requérant selon lequel le « principe » de l’appréciation objective des épreuves des candidats aurait été violé, car il n’aurait reçu aucun point « pour avoir raisonné logiquement ». Il en va de même des arguments plus généraux relatifs à la violation des « principes » d’objectivité de choix des candidats et d’appréciation objective des épreuves, qui ne sont invoqués par le requérant que de manière incidente, dans la mesure où il n’est pas établi que le jury n’a pas apprécié les candidats de manière objective et en utilisant des critères de notation uniformes et appliqués de manière cohérente (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 17 mars 1994, Hoyer/Commission, T‑43/91, RecFP p. I‑A‑91 et II‑297, point 60, et Felix/Commission, précité, point 37).
59 Au vu de ces éléments, des instructions données aux candidats, et de la démonstration du caractère correct de la réponse b) et du caractère incorrect de la réponse a), il apparaît que le jury n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en refusant de considérer que la réponse a) était correcte, quelle que soit la version linguistique en cause. Il en résulte que la question n° 6 n’était pas rendue plus difficile dans la version italienne du test que dans ses versions française ou anglaise, du fait du caractère prétendument correct de la réponse a) dans la version italienne.
60 En ce qui concerne, troisièmement, le recours aux statistiques, selon la jurisprudence citée aux points 43 à 47 ci-dessus, ce n’est que s’il est établi que les irrégularités invoquées par un requérant sont substantielles et susceptibles d’avoir eu un impact sur les résultats du concours qu’il revient alors à l’institution concernée de démontrer que celles-ci n’ont pas eu d’effet sur les résultats de ce requérant. En l’espèce, le requérant n’étant pas parvenu à démontrer l’existence d’irrégularités substantielles, les arguments qu’il tire de l’interprétation des statistiques que lui a fournies la Commission ne peuvent, dès lors, qu’être écartés comme inopérants.
61 Il résulte de ce qui précède que l’ensemble des arguments du requérant relatifs à la violation du principe d’égalité de traitement des candidats et d’objectivité de choix n’est pas fondé.
Sur la violation des principes de bonne administration et de sollicitude
– Arguments des parties
62 Le requérant considère qu’une violation des principes de bonne administration et de sollicitude est établie dès lors que les discordances linguistiques sont dues à une mauvaise organisation du concours.
63 Cette mauvaise organisation se serait concrétisée par une erreur de traduction en italien, dont l’existence aurait été confirmée par les représentants de l’EPSO, et serait illustrée par la neutralisation d’une autre question du test verbal et numérique (la question n° 24). En outre, la concordance entre les différentes versions linguistiques n’aurait pas été vérifiée avant le début des épreuves.
64 La Commission affirme que le test verbal et numérique a bien fait l’objet d’une relecture par le jury et par les traducteurs dans les onze versions linguistiques du concours. Elle conteste que les principes de bonne administration et de sollicitude aient été violés.
– Appréciation du Tribunal
65 En l’espèce, pour alléguer une violation des principes de bonne administration et de sollicitude, le requérant réitère en substance les arguments qu’il a fait valoir à propos de la violation du principe d’égalité de traitement. Toutefois, ces arguments sont inopérants. En effet, même si les violations des principes de bonne administration et de sollicitude étaient établies, il résulte de l’analyse de ce qui précède qu’elles n’ont en toute hypothèse eu aucun impact sur l’issue du test. Il a en effet été démontré que seule la réponse b) convenait dans la version italienne de la question n° 6.
66 En particulier, l’argument du requérant lié à la neutralisation de la question n° 24 du test verbal et numérique est inopérant. En tout état de cause, il ressort des réponses des parties à la demande de production de documents formulée par le Tribunal que la situation ayant conduit à la neutralisation de la question n° 24 n’a rien de comparable avec les raisons pour lesquelles, selon le requérant, la question n° 6 aurait dû être neutralisée, la question n° 24 étant une question de calcul et le résultat obtenu en suivant l’énoncé de cette question dans sa version espagnole ne se trouvant parmi aucune des propositions de réponse.
67 Au vu de ces éléments, il convient de rejeter le grief tiré de la violation des principes de bonne administration et de sollicitude.
68 Il résulte également de l’ensemble des considérations qui précèdent que le concours n’est entaché d’aucune irrégularité substantielle de nature à affecter ses résultats.
Sur les erreurs manifestes d’appréciation relatives aux conséquences des irrégularités alléguées sur les résultats du requérant et le détournement de pouvoir
– Arguments des parties
69 Partant de la prémisse que les irrégularités entachant le concours sont établies, le requérant fait valoir que le jury et l’AIPN ont commis des erreurs manifestes d’appréciation en ne démontrant pas que la neutralisation de la question n° 6, ou le fait de considérer la réponse a) comme correcte, n’auraient pas eu d’incidence sur ses propres résultats. L’AIPN aurait aussi commis une erreur manifeste d’appréciation et un détournement de pouvoir en se référant au large pouvoir d’appréciation du jury pour refuser de procéder à la neutralisation de la question n° 6.
70 La Commission rétorque qu’aucune erreur manifeste d’appréciation n’a été commise en refusant de neutraliser la question n° 6. En toute hypothèse, l’annulation de la liste des lauréats ne se justifierait pas.
– Appréciation du Tribunal
71 Ce n’est que s’il avait été préalablement établi que les irrégularités invoquées par le requérant avaient porté atteinte au principe d’égalité de traitement, ou avaient méconnu la nécessité de procéder à une appréciation objective des épreuves, le principe de bonne administration ou le devoir de sollicitude, que l’administration aurait dû, dans un second temps, démontrer que celles-ci n’ont pas eu d’impact sur les résultats du requérant.
72 En l’espèce, il résulte de l’analyse effectuée ci-dessus, que, d’une part, les irrégularités invoquées par le requérant n’ont pas été de nature à entraîner une inégalité de traitement entre les candidats ou à méconnaître la nécessité de procéder à une appréciation objective des épreuves et que, d’autre part, les arguments du requérant relatifs à la violation du principe de bonne administration et du devoir de sollicitude ne sont pas fondés. Ainsi, ni le jury ni l’AIPN n’ont commis d’erreur manifeste d’appréciation en omettant d’apprécier l’impact de la neutralisation de la question n° 6 sur les résultats du requérant. En conséquence, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur chacun des arguments avancés, l’ensemble des arguments avancés par le requérant au soutien de l’existence d’erreurs manifestes d’appréciation sur ce point n’est pas fondé.
73 S’agissant du grief du requérant relatif au détournement de pouvoir, force est, en tout état de cause, de constater que le requérant n’a pas allégué d’indices objectifs, pertinents et concordants qui permettent d’établir que les actes attaqués poursuivaient un but autre que celui assigné en vertu des dispositions statutaires applicables (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 26 septembre 1996, Maurissen/Cour des comptes, T‑192/94, RecFP p. I‑A‑425 et II‑1229, point 75). Ce grief doit donc également être rejeté.
74 Au vu de ce qui précède, l’ensemble des conclusions du requérant visant à l’annulation des divers actes adoptés par le jury et par l’AIPN qui sont visés par le présent recours doit être rejeté.
Sur les conclusions en indemnité
Arguments des parties
75 Le requérant fait valoir que les illégalités dénoncées constituent des fautes de service lui ayant causé un préjudice moral que l’annulation des décisions attaquées et l’obligation qui s’ensuivrait pour la Commission d’admettre le requérant à l’épreuve orale ne répareraient pas suffisamment. Considérant que ce préjudice n’est évaluable qu’ex aequo et bono, le requérant s’en remet sur ce point à l’appréciation du Tribunal.
76 La Commission considère qu’à défaut d’acte illégal le requérant ne peut prétendre à la réparation d’aucun dommage.
Appréciation du Tribunal
77 Les conclusions tendant à la réparation d’un préjudice en matière de fonction publique doivent être rejetées dans la mesure où elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation qui ont elles-mêmes été rejetées comme non fondées (arrêt du Tribunal du 10 juin 2004, Liakoura/Conseil, T‑330/03, non encore publié au Recueil, point 69 ; voir également, en ce sens, arrêt du Tribunal du 16 juillet 1992, Della Pietra/Commission, T‑1/91, Rec. p. II‑2145, point 34).
78 En l’espèce, il existe indubitablement un lien étroit entre les conclusions en indemnité et les conclusions en annulation. L’examen des griefs présentés à l’appui des conclusions en annulation n’ayant révélé aucune illégalité et, donc, aucune faute de nature à engager la responsabilité de la Communauté, les conclusions en indemnité doivent également être rejetées.
Sur les dépens
79 Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (quatrième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Chaque partie supportera ses propres dépens.
Legal |
Mengozzi |
Wiszniewska-Białecka |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 juillet 2005.
Le greffier |
Le président |
H. Jung |
H. Legal |
* Langue de procédure : le français.