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Document 61996TO0112

Beschluss des Präsidenten des Gerichts Erster Instanz vom 28. August 1996.
Jean-Claude Séché gegen Kommission der Europäischen Gemeinschaften.
Beamte - Ablehnung einer Bewerbung und Ernennung eines anderen Bewerbers - Vorläufiger Rechtsschutz - Antrag auf Aussetzung des Vollzugs - Keine Dringlichkeit.
Rechtssache T-112/96 R.

Sammlung der Rechtsprechung – Öffentlicher Dienst 1996 I-A-00379; II-01121

ECLI identifier: ECLI:EU:T:1996:116

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

28 août 1996 ( *1 )

«Fonctionnaires — Rejet d'une candidature et nomination d'un autre candidat -Référé — Demande de sursis à exécution — Urgence — Absence»

Dans l'affaire T-112/96 R,

Jean-Claude Séché, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, représenté par Me Eric Boigelot, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me Louis Schiltz, 2, rue du Fort Rheinsheim,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. Gianluigi Valsesia, conseiller juridique principal, et Julian Currall, membre du service juridique, en qualité d'agents ayant élu domicile auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique. Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande de sursis à l'exécution des décisions de la Commission du 22 mai 1996 portant rejet de la candidature du requérant et nomination d'un autre candidat à l'emploi de conseiller juridique principal déclaré vacant par l'avis COM/20/96,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

rend la présente

Ordonnance

Faits et procédure

1

M. Séché, fonctionnaire de grade A 3 de la Commission, exerce depuis cinq ans les fonctions de chef d'équipe au sein du service juridique de cette institution.

2

A la suite de la publication, les 7 et 21 mars 1996, des avis de vacance COM/20/96 et COM/22/96 (annexe 2 à la requête), M. Séché a présenté sa candidature aux deux emplois de conseiller juridique principal de grade A 2 à pourvoir. Les avis de vacance définissaient les fonctions correspondant à ces deux emplois de la manière suivante:

«Conseiller juridique principal, appelé, sous l'autorité du directeur général, notamment à:

conseiller la Commission et ses services en ce qui concerne les problèmes juridiques se posant au regard du droit communautaire et les législations nationales;

représenter la Commission en qualité d'agent au contentieux devant la Cour de justice dans les affaires importantes;

représenter la Commission dans des comités et groupes de travail;

coordonner les activités d'une équipe de juristes ou être responsable d'un secteur au sein d'une équipe.»

3

M. Séché a été informé, par note du 8 mai 1996 (annexe 4 à la requête), qu'après avoir examiné toutes les candidatures et procédé à l'audition du directeur général du service juridique, le comité consultatif des nominations avait émis l'avis que quatre candidatures, dont celle de l'intéressé, pourraient être prises en considération pour le pourvoi du poste en question. Les candidatures ainsi retenues étaient, dans l'ordre alphabétique, celles de M. B., Mme D., MM. M. et Séché. Trois d'entre-eux, à savoir MM. B., M. et Séché exerçaient les fonctions de chef d'équipe au sein du service juridique, en qualité de conseillers juridiques de grade A 3. Mme D., également conseiller juridique de grade A 3, exerçait les fonctions d'assistante du directeur général du service juridique.

4

Par décision du 8 mai 1996, la Commission a nommé M. B. ad interim aux fonctions de conseiller principal au service juridique. Le 22 mai 1996, elle a nommé Mme D. et M. M. aux emplois déclarés respectivement vacants par les avis COM/20/96 et COM/22/96, susmentionnés (annexe 6 à la requête).

5

Le requérant a eu un entretien avec le directeur général du service juridique, le 28 mai 1996, au sujet de ces nominations.

6

Le «groupe de transparence», créé en 1980 pour permettre un échange d'informations entre l'ensemble du personnel du service juridique et son directeur général, et composé de représentants de fonctionnaires de ce service, a sollicité un entretien avec le directeur général à la suite de la décision de la Commission du 22 mai 1996, susvisée. Cette réunion s'est tenue le 4 juin 1996. D'après le compte rendu de la réunion (annexe 8 à la requête), le directeur général du service juridique aurait expliqué:

«1)

[...] Les propositions précédentes des trois chefs d'équipe A 3 faisant fonction (MM. B., M. et Séché) n'ayant pas rencontré de succès lors des nominations précédentes en A 2, [le directeur général du service juridique] a compris qu'il fallait élargir le choix en faisant une proposition supplémentaire et a décidé de proposer Mme D. Il a choisi Mme D., la considérant comme ayant plus de mérites, à tout le moins autant que M. Séché.

2)

Le comité consultatif des nominations a retenu les quatre propositions faites par [le directeur général ...] Ensuite, certains chefs de cabinet ne semblant pas favorables à l'octroi du grade A 2 à un fonctionnaire se trouvant à un an de la retraite, ceux-ci ont proposé la nomination et la promotion de Mme D. en point A de l'ordre du jour.

3)

Quant aux conséquences du pourvoi des deux postes A 2 sur la structure du service, celles-ci ne pourront être envisagées avant tard dans l'automne 1996, lorsque [le directeur général] saura mieux le sort réservé à tous les postes A 2 (dix) promis par le président Santer pour le service juridique.»

7

Le 14 juin 1996, le requérant a été informé par la Commission, au moyen d'un formulaire type, du rejet de sa candidature (annexe 3 à la requête).

8

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 22 juillet 1996, M. Séché a demandé l'annulation de la décision de la Commission du 22 mai 1996 portant nomination de Mme D. en qualité de conseiller juridique principal de grade A 2, et de la décision du même jour de ne pas retenir la candidature du requérant à l'emploi en cause, ainsi que la reconstitution de la carrière de ce dernier à compter du 1er juin 1996, en conséquence de l'annulation des décisions susvisées. Il a également conclu à la condamnation de la Commission à lui verser un écu symbolique en réparation du préjudice moral qui lui aurait été causé par les décisions litigieuses.

9

Par requête enregistrée au greffe du Tribunal le 23 juillet 1996, le requérant a également demandé, en vertu de l'article 185 du traité, le sursis à l'exécution des deux décisions attaquées. La Commission a présenté des observations écrites par acte déposé au greffe du Tribunal le 25 juillet 1996. Eu égard aux éléments du dossier, le juge de référés a estimé qu'il disposait de tous les éléments nécessaires pour statuer sur la présente demande de mesures provisoires, sans qu'il soit utile d'entendre, au préalable, les parties en leurs explications orales.

En droit

10

En vertu des dispositions combinées des articles 185 et 186 du traité et de l'article 4 de la décision 88/591/CECA, CEE, Euratom du Conseil, du 24 octobre 1988, instituant un Tribunal de première instance des Communautés européennes (JO L 319, p. 1), telles que modifiées par la décision 93/350/Euratom, CECA, CEE du Conseil, du 8 juin 1993 (JO L 144, p. 21), et par la décision 94/149/CECA, CE du Conseil, du 7 mars 1994 (JO L 66, p. 29), le Tribunal peut, s'il estime que les circonstances l'exigent, ordonner le sursis à l'exécution de l'acte attaqué ou prescrire les autres mesures provisoires nécessaires.

11

L'article 104, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal précise qu'une demande de sursis à exécution n'est recevable que si le demandeur a attaqué l'acte en question dans un recours devant le Tribunal. Le paragraphe 2 du même article prévoit que les demandes relatives à des mesures provisoires doivent spécifier les circonstances établissant l'urgence ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant, à première vue, l'octroi de la mesure à laquelle elles concluent. Les mesures demandées doivent présenter un caractère provisoire en ce sens qu'elles ne doivent pas préjuger la décision sur le fond (voir l'ordonnance du président du Tribunal du 3 juin 1996, Bayer/Commission, T-41/96 R, Rec, point 13).

Sur l'urgence

Arguments des parties

12

Le requérant soutient qu'il ne saurait attendre l'issue de la procédure au principal sans subir un préjudice grave et irréparable. Compte tenu des divers délais de procédure, la procédure écrite au principal ne pourrait être clôturée avant le mois de février 1997. Or, le requérant atteindra l'âge de la retraite le 31 mai 1997. Si le Tribunal estimait le recours au principal fondé, l'annulation des décisions attaquées interviendrait donc vraisemblablement à une date ultérieure à son départ du service juridique. A défaut de suspension des décisions attaquées, la promotion du requérant au grade A 2 deviendrait ainsi impossible, en raison de l'article 3 du statut interdisant les nominations rétroactives.

13

Le requérant admet qu'il serait, certes, fondé à obtenir, le cas échéant, la réparation du préjudice matériel prétendument causé par les décisions attaquées. Toutefois, le «préjudice de carrière» demeurerait irréparable. En l'absence de sursis à l'exécution des décisions attaquées, une promotion, qui représenterait la reconnaissance publique des mérites correspondant aux fonctions exercées par l'intéressé pendant cinq ans, ne pourrait plus lui être accordée. Or, l'image et la réputation du requérant se trouveraient ternies du fait du rejet de sa candidature et de la nomination de Mme D. Son autorité risquerait d'en souffrir non seulement au sein de l'équipe qu'il dirige, mais aussi auprès des autres directions générales, dont son équipe assure le conseil juridique et le contentieux.

14

La Commission estime, pour sa part, que la condition relative à l'urgence n'est pas remplie, parce que le requérant n'apporte pas la preuve qu'il serait victime, en l'absence des mesures sollicitées, d'un préjudice grave et irréparable. Le préjudice prétendument subi par le requérant pourrait faire l'objet, le cas échéant, d'une compensation financière ultérieure.

15

En outre, à supposer même qu'il soit sursis à l'exécution des décisions attaquées, l'annulation éventuelle de celles-ci ne pourrait pas comporter l'obligation pour la Commission de nommer le requérant au poste en cause, ni même celle de poursuivre la procédure de nomination. De plus, et en toute hypothèse, une nomination ne pourrait intervenir qu'avec effet au premier jour du mois suivant cette décision, puisqu'il s'agirait d'une nomination/promotion dans une carrière nouvelle par rapport à celle du requérant. Or, à ce moment, le requérant aurait probablement déjà quitté les services de la Commission. Le seul effet utile d'une annulation des décisions entreprises consisterait, dès lors, à ouvrir la voie à un dédommagement pécuniaire.

Appréciation du juge des référés

16

Selon une jurisprudence bien établie, l'urgence de l'adoption de mesures provisoires doit s'apprécier en examinant si l'exécution des actes litigieux, avant l'intervention de la décision du Tribunal statuant au principal, est de nature à entraîner, pour la partie qui sollicite les mesures, des dommages graves et irréversibles, qui ne pourraient être réparés, même si la décision attaquée était annulée, ou qui, malgré leur caractère provisoire, seraient hors de proportion avec l'intérêt de la partie défenderesse à ce que ses actes soient exécutés, même lorsqu'ils font l'objet d'un recours contentieux. C'est à la partie demanderesse qu'il appartient de prouver que ces conditions sont remplies (voir les ordonnances du président du Tribunal du 11 mars 1994, Ryan-Sheridan/FEACVT, T-589/93 R, Rec. p. II-257, point 19, et du 5 juillet 1996, Clarke/Cedefop, T-85/96 R, RecFP p. II-1003, point 62).

17

En l'espèce, le requérant reconnaît que, le cas échéant, une annulation des décisions attaquées pourrait donner lieu à une indemnisation adéquate du préjudice matériel subi. Toutefois, le dommage irréversible résiderait dans l'atteinte prétendument portée à la réputation professionnelle de l'intéressé, du fait de l'impossibilité dans laquelle se trouverait l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après «AIPN»), en l'absence de sursis à l'exécution des décisions en cause, de le promouvoir à l'emploi de conseiller juridique principal de grade A 2, parce que l'annulation éventuelle de ces décisions ne pourrait vraisemblablement intervenir avant la mise à la retraite de l'intéressé, le 31 mai 1997.

18

Sous cet aspect, il y a lieu de rappeler, tout d'abord, que la seule circonstance qu'un candidat soit proche de la retraite n'est pas, en principe, de nature à exercer une incidence sur le déroulement de la procédure de pourvoi de l'emploi considéré et, notamment, sur la date à laquelle une nomination éventuelle devrait prendre effet. En particulier, lorsqu'un fonctionnaire proche de l'âge de la retraite obtient l'annulation des décisions rejetant sa candidature à un emploi et portant nomination d'un autre candidat à cet emploi, ses droits sont garantis de manière adéquate par la faculté dont il dispose de demander l'octroi de dommages et intérêts en raison d'un éventuel refus ou de l'impossibilité de le nommer à l'emploi en question (voir l'arrêt du Tribunal du 21 juin 1996, Moat/Commission, T-41/95, RecFP p. II-939, points 40 et 41).

19

Dans ces conditions, quand bien même les décisions attaquées en l'espèce feraient l'objet d'un sursis à exécution, une annulation ultérieure, par le Tribunal, de ces décisions ne saurait, à première vue, avoir pour effet d'imposer à l'AIPN de nommer le requérant à l'emploi en cause avec effet à compter du premier jour du mois suivant la date à laquelle les décisions attaquées avaient été adoptées, comme le suggère l'intéressé. En toute hypothèse, si une nouvelle décision de nomination à la suite d'une éventuelle annulation des décisions attaquées devait intervenir après la mise à la retraite du requérant, ses intérêts seraient suffisamment protégés par la possibilité d'obtenir une indemnisation adéquate du préjudice subi.

20

En ce qui concerne plus spécialement la prétendue atteinte à la réputation professionnelle du requérant, du fait du rejet de sa candidature et de la nomination d'un autre candidat à l'emploi en cause, le juge des référés estime que cette allégation ne se fonde, prima facie, sur aucun élément concret.

21

En outre, à supposer même que l'autorité du requérant au sein de l'équipe qu'il dirige et dans ses relations professionnelles avec les autres directions générales de la Commission soit affectée par le refus de l'AIPN de le promouvoir à l'emploi de conseiller juridique principal, ce qui, à ce stade, n'est pas établi, un tel préjudice d'ordre moral ne présenterait pas de caractère irréversible, dans l'hypothèse d'une annulation des décisions attaquées. En effet, un arrêt du Tribunal faisant droit, le cas échéant, à la demande en annulation présentée par le requérant et statuant sur la demande en réparation du préjudice moral allégué permettrait, en toute hypothèse, de rétablir la réputation professionnelle du requérant. A cet égard, il appartiendrait au Tribunal de juger si l'annulation demandée constitue en elle-même, selon une jurisprudence bien établie, une réparation adéquate et, en principe, c'est-à-dire en l'absence de toute appréciation explicitement négative des capacités du requérant susceptible de le blesser, suffisante de tout préjudice moral que celui-ci pourrait avoir subi en raison des décisions attaquées (voir l'arrêt du Tribunal du 16 décembre 1993, Moat/Commission, T-58/92, Rec. p. II-1443, point 71). En tout état de cause, si l'annulation éventuelle des actes en cause ne suffisait pas à réparer totalement le préjudice moral allégué, celui-ci pourrait être réparé, le cas échéant, en faisant droit aux propres conclusions du requérant, dans sa requête au principal, tendant à la condamnation de la Commission à lui verser un écu symbolique en réparation de son préjudice moral.

22

Il résulte de ce qui précède que le requérant n'a pas démontré que, en l'absence de sursis à l'exécution des décisions attaquées, celles-ci pourraient lui causer un préjudice auquel il ne pourrait plus être remédié par l'exécution d'un arrêt du Tribunal et que, en tout état de cause, les préjudices allégués seraient manifestement disproportionnés par rapport à l'intérêt de l'institution défenderesse à ce que ses actes soient exécutés.

23

Il s'ensuit que la condition relative à l'urgence n'est pas remplie. La présente demande en référé doit dès lors être rejetée, sans qu'il soit nécessaire d'examiner si les moyens et arguments invoqués par le requérant pour justifier l'octroi de la mesure provisoire sollicitée apparaissent fondés.

 

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

ordonne:

 

1)

La demande en référé est rejetée.

 

2)

Les dépens sont réservés.

 

Fait à Luxembourg, le 28 août 1996.

Le greffier

H. Jung

Le président

A. Saggio


( *1 ) Langue de procédure: le français.

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