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Document 61996TJ0101

Urteil des Gerichts erster Instanz (Zweite Kammer) vom 6. November 1997.
Maria Elisabeth Wolf gegen Kommission der Europäischen Gemeinschaften.
Beamte - Allgemeines Auswahlverfahren - Nichtzulassung zu den Prüfungen - Erforderliche Berufserfahrung.
Rechtssache T-101/96.

Sammlung der Rechtsprechung – Öffentlicher Dienst 1997 I-A-00351; II-00949

ECLI identifier: ECLI:EU:T:1997:171

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

6 novembre 1997 ( *1 )

«Fonctionnaires — Concours général — Non-admission aux épreuves — Expérience professionnelle requise»

Dans l'affaire T-101/96,

Maria Elisabeth Wolf, agent auxiliaire de la Commission des Communautés européennes, représentée par Mes Jean-Noël Louis, Thierry Demaseure et Ariane Tornei, avocats au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la fiduciaire Myson SARL, 30, rue de Cessange,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. Julian Currall, membre du service juridique, assisté de NT Bertrand Wägenbaur, avocat à Hambourg, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet l'annulation de la décision du jury du concours COM/A/955 de ne pas admettre la requérante audit concours, ainsi que l'indemnisation du dommage moral qu'elle aurait subi du fait de cette décision,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre),

composé de MM. C. W. Bellamy, président, A. Kalogeropoulos et M. Jaeger, juges,

greffier: M. A. Mair, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 3 juillet 1997,

rend le présent

Arrêt

Faits à l'origine du litige

1

Le 4 octobre 1995, la Commission a publié l'avis de concours général COM/A/955, en vue du recrutement d'administrateurs principaux (A 5/A 4) de nationalité autrichienne (JO C 259 A, p. 9, version allemande uniquement).

2

Cet avis indiquait que les candidats auraient à choisir l'une des cinq options suivantes: administration générale, administration publique et gestion; droit; économie; statistiques; gestion financière et contrôle de la comptabilité.

3

Le point III.B.3 de l'avis énonçait une condition d'admission de douze années d'expérience professionnelle dans les termes suivants:

«Berufserfahrung

Die Bewerber müssen eine mindestens zwölfjährige Berufserfahrung nachweisen, die im Anschluß an den zur Teilnahme an diesem Auswahlverfahren berechtigenden Hochschulabschluß in einer der Ausbildung entsprechenden Position erworben wurde, davon mindestens sechs Jahre im Zusammenhang mit der für dieses Auswahlverfahren relevanten Art der Tätigkeit.

Die Berufserfahrung ist im Bewerbungsfragebogen im einzelnen anzugeben.»

Ledit point III.B.3 se traduit comme suit:

«Expérience professionnelle requise

Les candidats doivent démontrer qu'ils ont acquis, postérieurement au diplôme universitaire donnant accès au présent concours et dans une position correspondant à leur formation, une expérience professionnelle d'une durée minimale de douze ans, dont au moins six ans en rapport avec la nature des fonctions pertinentes pour le présent concours.

L'expérience professionnelle doit être précisée en détail dans l'acte de candidature.»

4

Le 16 novembre 1995, la requérante a déposé son acte de candidature au concours, en indiquant qu'elle souhaitait être recrutée dans le domaine des statistiques.

5

A la rubrique 8 «Bildungsweg» (formation) du formulaire de l'acte de candidature, elle a mentionné un «Magister der Naturwissenschaften (Lehramt Biologie)», obtenu le 21 octobre 1982 auprès de l'université de Vienne, et un «Dr. phil. Hauptfach: Zoologie, Nebenfach Botanik», obtenu le 28 avril 1987 auprès de la même université, à la suite d'études faites entre octobre 1982 et avril 1987.

6

A la rubrique 10 «Berufserfahrung» (expérience professionnelle) du formulaire, la requérante a indiqué les activités suivantes:

expert national de l'Office central de statistiques autrichien (ci-après «ÖSTAT») détaché auprès de l'Office statistique des Communautés européennes (ci-après «Eurostat») (de janvier 1993 au 28 février 1996);

employée de l'ÖSTAT (de juin 1991 jusqu'à ce jour);

consultante indépendante sur cinq projets relatifs à la protection de la nature et à l'écologie appliquée (du 16 février 1988 à mai 1991);

employée scientifique à la station ornithologique suisse (du 12 juillet 1987 au 15 février 1988);

collaboratrice indépendante à la société ornithologique autrichienne, chargée de recherches en vue de la publication d'un livre de la Série verte publiée par le ministère de la Santé et de la Protection de l'environnement autrichien (de septembre 1986 à juillet 1987).

7

II ressort des documents produits par la Commission en réponse à une question du Tribunal que la requérante a joint à son acte de candidature du 16 novembre 1995 des pièces justificatives pour chacune des cinq activités mentionnées sous la rubrique «Berufserfahrung». En ce qui concerne son emploi à l'ÖSTAT, la requérante a notamment fourni son contrat de travail, daté du 26 juin 1991, ainsi qu'un avenant à ce contrat, daté du 12 janvier 1993. Il ressort de ces documents que son «Vorriickungsstichtag» (date de référence pour l'avancement à l'ancienneté) a été fixé d'abord au 14 septembre 1982 et, ensuite, au 26 février 1980.

8

La requérante a également joint à son acte de candidature un curriculum vitae en langue anglaise, comportant quatre annexes. Ses études de doctorat figurent à l'annexe intitulée «Education» et non pas à celle intitulée «Employment».

9

Le 6 décembre 1995, en réponse à une demande adressée par le jury du concours, la requérante a déposé un formulaire complémentaire en langue anglaise reprenant son curriculum vitae déjà déposé. Sous le titre «Educational Background», elle a notamment indiqué «October 1982: Degree ‘Magister der Naturwissenschaften’ from the University of Vienna. April 1987: ‘Dr. philosphiae’ from the University of Vienna. The thesis involved collecting capture-recapture data on birds in the field and analysing their population dynamics». Sous le titre «Professional Background», elle a mentionné les mêmes activités que celles indiquées à la rubrique 10 «Berufserfahrung» de l'acte de candidature (voir point 6 ci-dessus).

10

Sous le titre «Miscellaneous» du curriculum vitae, la requérante a notamment indiqué: «I have sound working experience in national (1.5 yr.) and Community (3 yr.) statistics [...] I have previous experience in free-lance consultancy work in the field of the environment in general. In five very diverse projects, I defined the work, collected the data and applied statistical inference methods in the analysis. This type of work began with my thesis (5 yr.) and continued with the following projects (the contracts alone cover 1 yr. 10.5 months) [...] I have applied both my own computer programmes and statistical software packages to data analysis and hypothesis testing in all my work, beginning with my thesis.»

11

Selon la requérante, elle a joint à ce curriculum vitae quatre annexes essentiellement identiques à celles jointes au curriculum vitae initial fourni avec son acte de candidature (point 8 ci-dessus).

12

Par lettre du 15 février 1996, le chef de l'unité 7 «recrutement» de la direction A «personnel» de la direction générale Personnel et administration (DG IX) (ci-après «unité IX.A.7») de la Commission a informé la requérante que le jury ne l'avait pas admise au concours. Sur le formulaire annexé à cette lettre, et comprenant la liste des motifs possibles de rejet des candidatures, la rubrique indiquant que la candidate n'avait pas produit les documents établissant son expérience professionnelle avant la date limite fixée au 8 décembre 1995 était cochée.

13

Par lettre du 4 mars 1996 au chef de l'unité IX.A.7, la requérante a demandé le réexamen de sa candidature, en précisant qu'elle supposait que son curriculum vitae, déposé dans les bureaux de la DG IX à Luxembourg le 6 décembre 1995, n'était jamais parvenu au jury.

14

Par lettre du 26 mars 1996, le chef de l'unité IX.A.7 a informé la requérante que son acte de candidature ainsi que le curriculum vitae lui étaient bien parvenus dans les délais, mais que le jury avait néanmoins décidé de maintenir sa décision de ne pas l'admettre au concours, au motif qu'elle ne disposait pas de l'expérience professionnelle requise de douze ans. En effet, son premier diplôme universitaire datant du 21 octobre 1982, son expérience professionnelle n'avait commencé qu'après l'obtention de son doctorat en avril 1987, et plus précisément en février 1988, de sorte qu'elle totalisait moins de huit ans d'expérience professionnelle à la date limite de l'envoi des candidatures.

15

Le 28 mars 1996, alors qu'elle n'avait pas encore reçu la lettre du 26 mars 1996, la requérante a écrit au chef de l'unité IX.A.7 pour demander son admission au concours, en faisant les remarques suivantes: «I can only assume that the problem with my admission might be non-recognition of the period I have spent working on my thesis after my first university degree (Magister). This error may have been due to the fact that your administration did not appreciate the full meaning of my work on estimation of the population dynamics of an animal species by means of the Jolly-Seber method, including its application to different cohorts of the population. This method and its further development is applied in estimates of fish populations under the Common Fisheries Policy, as described for exploratory fisheries in the proposed Council Regulation COM(95) 475 final - 95/0252(CNS). I enclose a summary of my thesis (annex 1) and letters exchanged with the Austrian administration for the recognition of this work in the calculation of my working years before entering ÖSTAT (annex 2). The Austrian administration decided that these years were to be taken in toto. This resulted in the amendment to my contract with ÖSTAT (already provided with my documents). I also attach an excerpt from the competition notice in which I have filled in my relevant experience (annex 3).»

16

A l'annexe 3 à sa lettre du 28 mars 1996, la requérante a repris le texte du point III.B.3 de l'avis de concours et a indiqué comme «expérience professionnelle» les activités suivantes:

études de doctorat (quatre ans et six mois);

collaboratrice scientifique à la station ornithologique suisse (sept mois);

consultante à la station ornithologique suisse (deux mois);

consultante sur la protection de la nature et l'écologie appliquée (trois ans et un mois et demi);

employée de 1'ÖSTAT (quatre ans et quatre mois et demi).

17

En ce qui concerne ses études de doctorat, la requérante a notamment précisé que sa thèse avait pour objet l'évaluation de populations d'oiseaux au moyen de méthodes utilisées dans le cadre de la politique communautaire de la pêche et que cette période d'études a été reconnue comme expérience professionnelle par l'ÖSTAT, d'abord à concurrence de la moitié de cette période et, ensuite, à concurrence de la totalité de la période des études, ainsi que l'atteste l'avenant au contrat de travail du 12 janvier 1993.

18

Par lettre du 1er avril 1996, en réponse à la lettre du chef de l'unité IX.A.7 du 26 mars 1996, la requérante a fait remarquer que son expérience professionnelle après l'obtention de son doctorat avait débuté à la date du 12 juillet 1987 et non pas en février 1988. Elle a rappelé que la période de ses études de doctorat devait être reconnue comme faisant partie de son «expérience professionnelle» et a demandé une nouvelle fois le réexamen de sa candidature.

19

Par lettre du 31 mai 1996, le chef de l'unité IX. A.7 a informé la requérante que le jury avait réexaminé son dossier et décidé de maintenir sa décision initiale de ne pas l'admettre au concours, au motif qu'elle ne disposait pas d'une expérience professionnelle de douze ans. Il a précisé que, dans le calcul de l'expérience professionnelle, le jury n'avait pris en considération, pour tous les candidats et candidates, que la seule activité professionnelle effective, et n'avait pas considéré les études complémentaires ou de post-graduat.

20

Le 27 juin 1996, la requérante a introduit le présent recours.

21

Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (deuxième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale. Dans le cadre des mesures d'organisation de la procédure, le Tribunal a invité la Commission à répondre par écrit à certaines questions, et à produire certains documents, avant l'audience.

Conclusions des parties

22

La partie requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

annuler la décision de ne pas admettre la requérante au concours COM/A/955;

condamner la Commission à payer à la requérante, en indemnisation du dommage moral subi, un écu symbolique;

condamner la partie défenderesse aux dépens.

23

La partie défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

rejeter le recours;

condamner la partie requérante aux dépens, y compris ceux de la défenderesse.

Sur la recevabilité du recours en tant qu'il est dirigé contre la décision du jury du 31 mai 1996

Arguments des parties

24

La partie défenderesse soutient que le recours est irrecevable dans la mesure où il est dirigé contre la décision du jury contenue dans la lettre du 31 mai 1996. Cette décision ne serait pas un acte attaquable puisqu'elle se borne à confirmer la décision du jury contenue dans la lettre du 26 mars 1996, en réitérant les motifs déjà portés à la connaissance de la requérante, sans apporter d'autres éléments que ceux déjà connus d'elle. La Commission souligne que, conformément à l'avis de concours, le jury n'était pas tenu de procéder à un second réexamen du dossier de la requérante.

25

La partie requérante précise que le recours est dirigé, à titre principal, contre la décision définitive du jury contenue dans la lettre du 31 mai 1996 et, à titre subsidiaire, contre la décision du jury contenue dans la lettre du 26 mars 1996.

26

Elle relève que, dans le cas où la décision confirmée n'est pas devenue définitive, la personne intéressée est en droit d'attaquer soit la décision confirmée, soit la décision confirmative, soit l'une et l'autre de ces décisions (arrêt du Tribunal du 27 octobre 1994, Chavanne de Dalmassy e.a./Commission, T-64/92, RecFP p. II-723, point 25).

27

En outre, le jury aurait adopté la décision contenue dans la lettre du 31 mai 1996 après un véritable réexamen du dossier à la lumière de nouvelles précisions et pièces et aurait approfondi la motivation de la décision initiale (arrêt du Tribunal du 3 mars 1994, Cortes Jimenez e.a./Commission, T-82/92, RecFP. p. II-237, points 14 et 17).

Appréciation du Tribunal

28

La décision initiale du jury, telle que communiquée à la requérante le 15 février 1996 (point 12 ci-dessus), est fondée sur la circonstance que la requérante n'avait pas produit de documents prouvant son expérience professionnelle avant la date limite du 8 décembre 1995, tandis que la raison invoquée dans la lettre du jury du 26 mars 1996 (point 14 ci-dessus) est que la requérante ne disposait pas de l'expérience professionnelle requise de douze ans. Ce n'est donc que par sa lettre du 1er avril 1996, après réception de la lettre de la Commission du 26 mars 1996 (point 18 ci-dessus), que la requérante a été en mesure de demander formellement un réexamen de son dossier, en pleine connaissance du motif finalement retenu par le jury pour rejeter sa candidature.

29

Dans ces circonstances, le Tribunal estime que le jury était fondé à entreprendre un second réexamen de la candidature de la requérante, même si un tel réexamen n'était pas spécifiquement prévu par l'avis de concours.

30

II ressort de la lettre de la Commission du 31 mai 1996 qu'un réexamen du dossier a effectivement eu lieu après réception des lettres des 28 mars et 1er avril 1996, de sorte que la décision du jury contenue dans la lettre du 31 mai 1996 ne saurait être considérée comme un acte purement confirmatif (voir l'arrêt Coites Jimenez e.a./Commission, précité, points 14 à 17).

31

Par ailleurs, dans le cas où une décision confirmée n'est pas devenue définitive, l'intéressé est en droit d'attaquer soit la décision confirmée, soit la décision confirmative, soit l'une et l'autre de ces décisions (voir arrêt Chavarme de Dalmassy e.a./Commission, précité, point 25). En l'espèce, le délai de recours contre la décision du 26 mars 1996, notifiée à la requérante à une date postérieure au 28 mars 1996 (point 15 ci-dessus), n'était pas expiré à la date d'introduction du recours (le 27 juin 1996), de sorte que la requérante était en droit d'attaquer à la fois les décisions des 26 mars et 31 mai 1996.

32

II s'ensuit que l'exception d'irrecevabilité du recours, dans la mesure où il est dirigé contre la décision du 31 mai 1996, doit être rejetée.

Sur le fond

33

Le Tribunal relève que la requérante soulève deux groupes de moyens. Par son premier groupe de moyens, invoqué à l'appui de sa demande d'octroi d'une indemnité d'un écu symbolique, elle se fonde, en substance, sur la prétendue erreur commise par le jury, dans sa première décision du 15 février 1996, en rejetant sa candidature sur la base de l'absence de documents établissant son expérience professionnelle, alors que le jury a ultérieurement maintenu sa décision initiale sur une autre base, à savoir qu'elle ne justifiait pas d'une expérience professionnelle de douze ans. Par son second groupe de moyens la requérante fait valoir, en substance, que le jury a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne tenant pas compte de ses études de doctorat en tant qu'«expérience professionnelle». Dans sa réplique elle fait valoir que cette erreur constitue également une faute de service ouvrant droit à une indemnisation symbolique de un écu.

34

II convient de commencer par l'examen du second groupe de moyens.

Sur le second groupe de moyens, tirés notamment d'une erreur manifeste d'appréciation entachant les décisions du jury contenues dans les lettres des 26 mars et 31 mai 1996

Arguments des parties

35

Selon la requérante, le jury a commis une erreur manifeste d'appréciation et a méconnu l'avis de concours et le guide aux candidats, ainsi que les principes de bonne gestion et de bonne administration, en refusant de prendre en considération l'expérience acquise par la requérante pendant la période courant d'octobre 1982 à avril 1987, consacrée à la rédaction de sa thèse de doctorat. La décision serait également entachée d'une insuffisance de motivation.

36

La requérante invoque la jurisprudence du Tribunal selon laquelle il y a lieu d'interpréter la notion d'expérience professionnelle requise des candidats à un concours exclusivement à la lumière des finalités de ce concours, telles qu'elles résultent de la description générale des tâches donnée dans l'avis de concours (arrêt du Tribunal du 22 mai 1990, Sparr/Commission, T-50/89, Rec. p. II-207, point 18).

37

Elle relève que le concours COM/A/955 a été organisé en vue de la constitution d'une liste de réserve de recrutement d'administrateurs principaux de nationalité autrichienne. La finalité de ce concours aurait tendu au recrutement de fonctionnaires de niveau universitaire, hautement qualifiés, possédant une expérience considérable et capables de s'adapter à des tâches variées.

38

La requérante expose que, pendant la période courant d'octobre 1982 à avril 1987, elle a entrepris, sous la direction d'un directeur de thèse, des travaux de recherche consacrés aux changements saisonniers d'une population d'oiseaux. A cette fin, la requérante aurait développé des méthodes pour la collecte, le traitement, la validation, l'analyse et la modélisation des données collectées, et elle aurait notamment perfectionné une méthode stochastique assez complexe permettant de tenir compte des nouvelles générations. Elle aurait eu recours aux langages informatiques Fortran et SAS pour procéder à l'analyse des données collectées, et au programme DCF pour élaborer et rédiger sa thèse. Elle se serait familiarisée avec l'utilisation des «mainframes» (grands ordinateurs) et avec la programmation informatique.

39

Or, cette expérience serait analogue aux tâches décrites au point II.4 de l'avis de concours. En outre, les méthodes de travail expérimentées par la requérante pendant la période de préparation de sa thèse seraient celles appliquées par Eurostat, notamment dans la mise en œuvre de la politique commune de la pêche, et les logiciels Fortran, SAS et DCF seraient ceux utilisés par 1'ÖSTAT.

40

Le jury aurait donc commis une erreur manifeste d'appréciation en écartant cette expérience de la requérante et aurait de surcroît violé la pratique en vigueur à la Commission comme dans toutes les institutions communautaires selon laquelle une formation complémentaire postérieure au diplôme donnant accès au concours est, sauf exception, toujours assimilée à une expérience professionnelle.

41

La requérante ajoute que le guide aux candidats, publié en rapport avec l'avis de concours, précise que seule la période postérieure à l'obtention du diplôme universitaire ou d'un autre certificat de fin de formation donnant accès au concours est prise en considération pour le calcul de l'expérience professionnelle. La décision attaquée serait donc entachée d'une insuffisance de motivation en ce qu'elle n'indique pas pour quelles raisons le jury a refusé de prendre en considération une partie de l'expérience professionnelle acquise par elle «postérieurement au diplôme universitaire donnant accès au concours».

42

Dans sa réplique, la requérante fait remarquer que l'avis de concours n'aurait pas prévu que seule une activité rémunérée serait prise en considération et que le jury serait lié par cet avis (arrêt Cortes Jimenez e.a./Commission, précité, point 32). Aux yeux du législateur communautaire, l'activité professionnelle n'impliquerait d'ailleurs pas nécessairement la perception d'une rémunération en contrepartie. En effet, l'article 16, paragraphe 2, du statut se réfère à une «activité professionnelle, rémunérée ou non».

43

La requérante précise qu'elle a perçu, en 1981 et 1983, des subventions du gouvernement de Basse-Autriche pour la rédaction de sa thèse, dont les résultats l'intéressaient. Du 6 septembre 1982 au 12 février 1983, puis du 5 septembre 1983 au 2 avril 1984, elle aurait enseigné la biologie dans l'enseignement secondaire. Du 12 février au 5 septembre 1983 elle aurait poursuivi ses travaux en vue de la rédaction de sa thèse. Du 1er mars 1983 au 31 août 1983, elle aurait travaillé sur l'analyse des données collectées l'année précédente et sur la préparation d'un rapport final sous la direction du Dr Egon Zwicker. De décembre 1984 à décembre 1985, la requérante aurait exercé, pour compte de la société ornithologique autrichienne, des activités financées par un organisme professionnel de jeunes universitaires et consistant dans la gestion et l'analyse de données destinées à être insérées dans l'atlas ornithologique autrichien, dans l'organisation et l'animation d'un groupe déjeunes ainsi que dans l'administration de la bibliothèque. Elle aurait poursuivi cette activité pendant deux ans sans être rémunérée. En même temps, en 1986 et 1987, la requérante aurait collaboré aux recherches en vue de la rédaction du livre de la Série verte consacré aux oiseaux et aux mammifères en voie de disparition. En 1988 elle aurait perçu des subventions du gouvernement provincial pour l'étude de la migration avec radar.

44

Ces activités devraient être considérées comme une expérience professionnelle, et non comme une formation. La requérante fait valoir qu'elles ont été mentionnées à l'annexe intitulée «employment» au curriculum vitae transmis au jury du concours le 6 décembre 1995. Ayant invité la requérante à déposer ce curriculum vitae, le jury aurait été tenu de prendre en considération toutes les informations qui s'y trouvaient.

45

La requérante précise qu'elle n'aurait pas pu expliquer l'expérience acquise dans le cadre de l'élaboration de sa thèse sous la rubrique de l'acte de candidature relative à l'expérience professionnelle, dans la mesure où cette expérience s'acquiert en dehors de toute autorité d'un employeur et ne confère au chercheur aucun «titre professionnel exact».

46

La requérante souligne que le concours COM/A/955 visait au recrutement d'administrateurs principaux de nationalité autrichienne. Conformément aux principes énoncés au point 18 de l'arrêt Sparr/Commission, précité, seule une définition de l'expérience professionnelle requise par référence à la loi autrichienne permettrait de respecter la finalité du concours. Or, selon l'article 26, paragraphe 3, de la Vertragsbedienstetengesetz 1948 (loi relative aux agents contractuels, ci-après «VBG») en vigueur en Autriche, l'expérience acquise par la requérante dans le cadre de la rédaction de sa thèse peut être assimilée à une expérience professionnelle. A la suite d'une demande introduite par l'ÖSTAT auprès de la chancellerie fédérale autrichienne, cette expérience aurait d'ailleurs effectivement fait l'objet d'une telle assimilation.

47

Enfin, en refusant de prendre en considération toute l'expérience acquise par la requérante après l'obtention de son diplôme universitaire, la Commission aurait commis une faute de service. Cette faute lui aurait causé un préjudice donnant lieu à réparation.

48

La défenderesse souligne qu'un jury de concours sur titres et épreuves dispose d'un large pouvoir d'appréciation pour évaluer les titres et l'expérience professionnelle des candidats et que le Tribunal doit se borner à vérifier si l'exercice de ce pouvoir n'est pas entaché d'erreurs manifestes (arrêts du Tribunal du 13 décembre 1990, Gonzalez Holguera/Parlement, T-115/89, Rec. p. II-831, du 21 mai 1992, Almeida Antunes/Parlement, T-54/91, Rec. p. II-1739, et du 15 juillet 1993, Cámara Alloisio e.a./Commission, T-17/90, T-28/91 et T-17/92, Rec. p. II-841).

49

Elle soutient que la rédaction d'une thèse ne satisfait pas au critère établi par le point III.B.3 de l'avis de concours, selon lequel tout candidat doit avoir acquis une expérience professionnelle dans le cadre d'une position correspondant à sa formation. Ce critère supposerait une prestation exercée dans un contexte professionnel, en contrepartie d'une rémunération. La rédaction d'une thèse ne constituerait pas non plus, dans le contexte de l'admission au concours litigieux, une expérience professionnelle puisqu'il ne s'agirait ni d'une activité professionnelle, que ce soit en tant qu'employé ou comme indépendant, ni d'une activité rémunérée.

50

La requérante ne saurait se prévaloir de la loi autrichienne ou d'une pratique de l'administration autrichienne en matière d'assimilation d'une thèse de doctorat à une expérience professionnelle (arrêt Sparr/Commission, précité, point 18). En tout état de cause, l'article 26 du VBG ne concernerait que des éléments que l'administration nationale peut prendre en compte lors du classement du fonctionnaire, c'est-à-dire l'attribution de l'échelon. Une prise en compte de cette loi serait d'ailleurs discriminatoire par rapport aux candidats du concours COM/A/955 qui ne font pas partie de la fonction publique autrichienne.

51

Quant aux affirmations de la requérante concernant la pratique de la Commission, il pourrait s'agir d'une allusion à certains critères appliqués lors du classement après recrutement. Par ailleurs, le législateur aurait la possibilité d'assimiler une formation complémentaire postérieure au diplôme à une expérience professionnelle, mais pour ce faire il devrait prévoir une disposition à cet effet dans l'avis de concours.

52

La Commission relève que, dans son acte de candidature, la requérante a mentionné la période consacrée à la rédaction de sa thèse de doctorat sous la rubrique intitulée «Bildungsweg» (formation), et non pas sous celle intitulée «Berufserfahrung» (expérience professionnelle). De même, dans son curriculum vitae, le doctorat de la requérante serait mentionné sous la rubrique «educational background» (formation) et non pas sous celle intitulée «professional background» (expérience professionnelle).

53

Quant aux autres activités mentionnées dans la réplique (point 43 ci-dessus), la Commission souligne, notamment, que la requérante n'a produit aucun élément de preuve démontrant leur réalité, que ce soit dans son acte de candidature ou dans son curriculum vitae.

Appréciation du Tribunal

54

Le point III. B. 3 de l'avis de concours COM/A/955 dispose que les candidats doivent préciser leur expérience professionnelle en détail dans l'acte de candidature.

55

Le point IV.Cl dudit avis de concours dispose que l'admission au concours se fonde sur les indications fournies par les candidats dans leur acte de candidature et sur les pièces justificatives qui doivent l'accompagner.

56

Selon le point X.l de l'avis de concours, le formulaire d'acte de candidature doit être accompagné de la photocopie des documents justifiant que le candidat remplit les conditions particulières d'admission au concours et permettant au jury de vérifier l'exactitude des indications données par le candidat dans l'acte de candidature. Cette obligation est rappelée aux candidats sous la rubrique 10 de cet acte.

57

II ressort de ces dispositions que la requérante était tenue de préciser dans l'acte de candidature le caractère et la durée des activités par référence auxquelles elle prétendait satisfaire au critère de douze ans d'expérience professionnelle prévu par le point III.B.3 de l'avis de concours, et de produire des photocopies des pièces justificatives.

58

En l'espèce, la requérante a clairement indiqué dans son acte de candidature du 16 novembre 1995 les activités qui selon elle constituaient son expérience professionnelle (Berufserfahrung) aux fins du point III.B.3 de l'avis de concours, ainsi que les activités qu'elle considérait comme faisant partie de sa formation (Bildungsweg) (voir points 6 et 7 ci-dessus). Or, la rédaction de sa thèse de doctorat entre octobre 1982 et avril 1987 est mentionnée sous la rubrique «Bildungsweg» et ne figure pas sous la rubrique «Berufserfahrung».

59

De même, les pièces justificatives annexées à l'acte de candidature en rapport avec l'expérience indiquée sous la rubrique «Berufserfahrung» ne contiennent aucune indication de nature à établir que la requérante considérait que ses études de doctorat entre octobre 1982 et avril 1987 constituaient une expérience professionnelle.

60

En particulier, le seul fait qu'il ressortait de son contrat de travail avec l'ÖSTAT du 26 juin 1991 et de l'avenant à ce contrat du 12 janvier 1993 que la date de référence pour l'avancement à l'ancienneté («Vorriickungsstichtag») de la requérante avait été fixée par l'administration nationale au 14 septembre 1982 et, ensuite, au 26 février 1980, ne permettait pas au jury de déceler que la requérante entendait, nonobstant le contenu précis de son acte de candidature, demander la reconnaissance de la rédaction de sa thèse comme expérience professionnelle.

61

II en va de même en ce qui concerne le curriculum vitae daté du 16 novembre 1995 envoyé avec l'acte de candidature. Ce document inclut les études de doctorat de la requérante sous la rubrique «Education», et non pas sous la rubrique «Employment».

62

Dans son second curriculum vitae, envoyé le 6 décembre 1995, les études de doctorat figurent également sous la rubrique «Educational Background», et non pas sous la rubrique «Professional Background». De même, le Tribunal estime que les observations de la requérante sous la rubrique «Miscellaneous» (point 10 ci-dessus) ne sauraient être interprétées en ce sens que la période d'études de doctorat serait à considérer comme une «expérience professionnelle».

63

II en résulte que la requérante est mal fondée à prétendre que le jury aurait dû prendre en compte la période de ses études de doctorat comme «expérience professionnelle», alors qu'elle-même n'a respecté ni la deuxième phrase du point III.B.3 de l'avis de concours, selon laquelle «l'expérience professionnelle doit être précisée en détail dans l'acte de candidature», ni le point X.l de l'avis de concours, selon lequel l'acte de candidature doit être accompagné de la photocopie des documents justifiant que le candidat remplit les conditions particulières d'admission au concours et permettant au jury de vérifier l'exactitude des indications données par le candidat.

64

II n'appartient pas à un jury de concours, confronté à des pièces incomplètes ou ambiguës, de contacter l'intéressé aux fins de clarifier ces omissions et ambiguïtés (arrêts du Tribunal Almeida Antunes/Parlement, précité, point 36, et du 16 avril 1997, Mateus/Conseil, T-80/96, non encore publié au Recueil, point 30). A fortiori, il n'appartient pas à un jury, en présence d'un acte de candidature et d'un curriculum vitae mentionnant des listes précises d'activités que le candidat voudrait voir considérer comme des expériences professionnelles aux fins de l'admission au concours, de rechercher si le candidat aurait pu invoquer d'autres activités et de lui demander de fournir des documents justificatifs à cette fin.

65

Le Tribunal en conclut que dans sa décision du 26 mars 1996 le jury était fondé à ne pas tenir compte des études de doctorat de la requérante en tant qu'«expérience professionnelle», dès lors que la requérante n'avait nullement indiqué, ni dans son acte de candidature, ni dans les pièces justificatives jointes, ni dans ses deux curriculum fournis le 16 novembre et le 6 décembre 1995, qu'il s'agissait d'une expérience professionnelle dont le jury aurait dû tenir compte.

66

De même, le Tribunal considère que, dans ces circonstances, la lettre du 26 mars 1996, signalant à la requérante qu'elle n'avait pas été admise au concours au motif qu'elle ne disposait pas de l'expérience professionnelle de douze ans requise, était motivée de façon adéquate.

67

Ce n'est que par sa lettre du 28 mars 1996, et ensuite par sa lettre du 1er avril 1996, que la requérante a explicitement demandé que ses études de doctorat soient reconnues comme constituant une expérience professionnelle, en avançant deux arguments principaux, à savoir, d'une part, que l'expérience qu'elle avait obtenue pendant la période de son doctorat serait très utile par rapport au domaine des statistiques dans le cadre communautaire et, d'autre part, que l'ÖSTAT avait déjà reconnu cette période comme expérience professionnelle (voir points 15 à 17 ci-dessus).

68

A supposer même que le jury ait été en droit de réexaminer la candidature de la requérante sur la base d'une demande qui ne figurait pas dans l'acte de candidature, en violation des points III.B.3, IV.Cl et X.l de l'avis de concours, le Tribunal rappelle qu'un jury de concours sur titres et épreuves dispose d'un large pouvoir d'appréciation pour évaluer les titres et l'expérience professionnelle des candidats et que le Tribunal doit se borner à vérifier si l'exercice de ce pouvoir n'est pas entaché d'une erreur manifeste (voir, par exemple, l'arrêt Gonzalez Holguera/Parlement, précité, point 54).

69

Le Tribunal relève, à cet égard, qu'il s'agit en l'espèce d'un concours en vue du recrutement par la Commission d'administrateurs principaux de grade A 5/A 4. Selon la dernière phrase du point 1.1 de l'avis de concours, la Commission souhaitait recruter des fonctionnaires hautement qualifiés, possédant une longue expérience professionnelle et capables de s'adapter à des tâches variées («Die Kommission sucht hochqualifizierte Akademiker mit langjähriger Berufserfahrung, die in der Lade sind, sich in die verschiedensten Aufgabengebiete einzuarbeiten»). Les conditions de l'avis de concours, dans ses points III.B.2 et III.B.3, font une distinction claire entre, d'une part, «Diplome und sonstige Befähigungsnachweise» (diplôme et autres titres) et, d'autre part «Berufserfahrung» (expérience professionnelle). En outre, le point III.B.3 exige que les candidats démontrent une expérience professionnelle «dans une position correspondant à leur formation» («in einer der Ausbildung entsprechenden Position erworben wurde»). Enfin, à la différence du concours qui faisait l'objet de l'arrêt Sparr/Commission, précité, l'avis de concours COM/A/95 5 ne contient pas de disposition permettant à une formation complémentaire d'être assimilée à une expérience professionnelle.

70

Dans ces circonstances, le Tribunal considère que le jury n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que les études de doctorat de la requérante entre 1982 et 1987, entreprises directement après l'obtention de son diplôme de Magister et auprès de la même université, ne constituait pas une expérience «professionnelle». En effet, la rédaction de cette thèse devrait être considérée en principe comme relevant d'une activité purement académique.

71

Le fait que, pendant la rédaction de sa thèse, la requérante a pu acquérir ou approfondir ses connaissances des méthodes utilisées pour l'exécution des tâches dans le domaine des statistiques visées par le point II.4 de l'avis de concours n'établit pas en soi qu'une telle expérience doive être considérée comme une expérience professionnelle au sens du point III.B.3 de cet avis. En effet, une activité purement académique ne donne pas à l'intéressé le même genre d'expérience que celle acquise dans le cadre d'un emploi, rémunéré ou pas, ou d'une activité professionnelle indépendante. Cette distinction revêt une importance particulière lorsque, comme en l'espèce, la finalité du concours est de recruter des administrateurs de grade relativement élevé, capables de s'adapter à des tâches variés et ayant une expérience de douze ans des exigences du monde du travail.

72

De même, le fait que, selon le guide aux candidats, seule la période postérieure à l'obtention du diplôme universitaire ou d'un autre titre certifiant la fin de la formation donnant accès au concours est prise en considération pour le calcul de l'expérience professionnelle, n'est pas en soi de nature à établir que les études de doctorat de la requérante constituaient une expérience «professionnelle».

73

Quant à la prétendue pratique de la Commission et d'autres institutions communautaires assimilant à une expérience professionnelle une formation complémentaire postérieure au diplôme donnant accès au concours, il suffit de constater que la requérante n'a fourni aucun indice permettant d'établir l'existence d'une telle pratique dans le cadre de concours pour lesquels aucune disposition n'est expressément prévue à cet effet. De même, il est de jurisprudence constante qu'un candidat à un concours donné, qui n'y a pas été admis, ne peut utilement se prévaloir des conditions d'admission à d'autres concours, organisés selon des modalités distinctes et poursuivant des finalités différentes (voir l'arrêt Coites Jimenez e.a./Commission, précité, point 44).

74

S'agissant, enfin, de l'argument de la requérante tiré de ce que l'administration autrichienne aurait assimilé ses études doctorales à une expérience professionnelle aux fins de la détermination de la date de référence pour l'avancement à l'ancienneté conformément au VBG, il convient de souligner que la notion d'expérience professionnelle doit être interprétée exclusivement à la lumière des finalités du concours en cause, étant donné notamment qu'une interprétation qui ferait appel à la loi nationale de chaque candidat entraînerait inévitablement des différences de traitement (arrêt Sparr/Commission, précité, point 18).

75

Même s'il s'agit d'un concours limité aux ressortissants autrichiens, ce principe est également applicable au cas d'espèce dès lors qu'il n'est pas établi que le VBG s'appliquait à tous les candidats de nationalité autrichienne qui pouvait poser leur candidature au concours.

76

Au surplus, il ressort du texte de l'article 26 du VBG, et notamment de son paragraphe 3, que celui-ci constitue une disposition statutaire selon laquelle une période d'études antérieure à un contrat de travail entre un agent contractuel et l'administration autrichienne est prise en compte aux fins de la détermination de la date de référence pour l'avancement à l'ancienneté («Vorriickungsstichtag»). Cette disposition du droit autrichien ne saurait donc avoir de rapport avec la question de savoir si les études de doctorat de la requérante constituaient une «expérience professionnelle» au sens de l'avis de concours COM/A/955.

77

Le fait que l'administration autrichienne a fait application de l'article 26 du VBG, et notamment de son paragraphe 3, dans le cas de la requérante, est donc sans pertinence pour la solution du litige.

78

Quant aux autres activités que la requérante invoque, au stade de la réplique, en soutenant que celles-ci auraient dû également être reconnues comme expérience professionnelle (point 43 ci-dessus), le Tribunal estime qu'il s'agit d'un moyen nouveau au sens de l'article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure, qui est donc irrecevable.

79

En tout état de cause, même si ces activités ont été mentionnées dans les curriculum de la requérante, force est de constater que seules les pièces justificatives des recherches effectuées, de septembre 1986 à juillet 1987, pour le livre de la Série verte ont été produites avec l'acte de candidature. Les preuves relatives aux autres activités, produites pour la première fois en cours d'instance, au stade de la réplique, ne sauraient être invoquées pour contester la décision du jury.

80

Au surplus, le Tribunal constate que les documents produits par la requérante au stade de la réplique ne prouvent pas qu'elle avait, sans tenir compte de ses études de doctorat, une expérience d'au moins douze ans.

81

II s'ensuit que dans sa décision du 31 mai 1996 le jury n'a ni commis une erreur manifeste d'appréciation, ni méconnu l'avis de concours et le guide aux candidats, ni violé les principes de bonne gestion ou de bonne administration, en ne reconnaissant pas comme expérience professionnelle la période courant d'octobre 1982 à avril 1987, consacrée par la requérante à la rédaction de sa thèse de doctorat.

82

Le Tribunal considère que dans cette décision le jury s'est également conformé à son obligation de motivation en précisant que, dans le calcul de l'expérience professionnelle, il n'avait pris en considération, pour tous les candidats et candidates, que la seule activité professionnelle effective, et qu'il n'avait pas tenu compte des études complémentaires ou de post-graduat.

83

Ce groupe de moyens de la requérante doit donc être rejeté.

Sur le premier groupe de moyens, tirés notamment de la violation de l'obligation de motivation et d'une erreur manifeste d'appréciation entachant la décision du jury contenue dans la lettre du 15 février 1996

Arguments des parties

84

La partie requérante tire son premier groupe de moyens de l'erreur d'appréciation, de l'insuffisance de motivation et de la violation de l'avis de concours, en ce que le jury a motivé sa première décision de rejet de sa candidature du 15 février 1996 par le défaut de production des éléments probants établissant la durée de son expérience professionnelle (point 12 ci-dessus).

85

S'agissant d'un concours à participation extrêmement limitée, le jury aurait été tenu de motiver avec beaucoup de précision toute décision portant rejet d'une candidature. La question de savoir si la défenderesse a respecté son obligation de motivation envers la requérante devrait être appréciée à la lumière des principes énoncés dans l'arrêt Almeida Antunes/Parlement, précité (points 32 et 35).

86

Selon la requérante, un jury commet une faute de service en ne communiquant pas, par écrit et sans délai, la motivation précise et exacte d'une décision portant rejet d'une candidature. La responsabilité du jury serait aggravée lorsque la faute a été commise à l'occasion d'un concours à participation restreinte. En l'espèce, la motivation donnée par la lettre type du 15 février 1996, à savoir qu'elle n'avait'pas soumis les documents établissant son expérience professionnelle avant la date de clôture, n'aurait pas satisfait à l'obligation de motivation énoncée par l'article 25 du statut, et aurait d'ailleurs été inexacte, les vrais motifs du jury étant exposés dans les lettres des 26 mars et 31 mai 1996.

87

Cette faute aurait eu pour conséquence de maintenir pendant plusieurs mois la requérante dans un état d'inquiétude et d'incertitude quant à son admission éventuelle au concours et quant à son avenir professionnel. La requérante demande donc le paiement d'un écu symbolique en réparation du dommage moral subi.

88

La partie défenderesse soutient que le premier groupe de moyens de la requérante, dirigé contre la décision du jury contenue dans la lettre du 15 février 1996, est irrecevable. En effet, la requérante n'aurait pas demandé l'annulation de cette décision.

89

La requérante méconnaîtrait d'ailleurs le fait que la décision contenue dans la lettre du 26 mars 1996 remplace, après réexamen, celle contenue dans la lettre du 15 février 1996 (ordonnance de la Cour du 8 novembre 1988, Valle Fernandez/Commission, 264/88 et 264/88 R, Rec. p. 6341, point 12, et arrêt du Tribunal du 11 février 1992, Panagiotopoulou/Parlement, T-16/90, Rec. p. II-89 point 20).

90

En toute hypothèse, la lettre du 15 février 1996 aurait bel et bien été assortie d'une motivation et serait de ce fait conforme à l'article 25 du statut. Il ressortirait de la lettre de la requérante du 28 mars 1996, rédigée avant réception de la lettre du 26 mars 1996, qu'elle avait parfaitement compris la raison de sa non-admission.

91

La Commission n'aurait donc pas commis de faute de service. Au demeurant, la requérante n'aurait pas démontré la réalité du prétendu préjudice.

Appréciation du Tribunal

92

Le Tribunal relève que le fonctionnaire a le choix d'attaquer une décision lui faisant grief, soit par la voie d'un recours en annulation, soit par la voie d'un recours en indemnité, soit encore par ces deux voies (voir, en dernier lieu, l'arrêt du Tribunal du 28 mai 1997, Burban/Parlement, T-59/96, non encore publié au Recueil, point 25). Dans le cas d'une décision de jury refusant l'admission d'un candidat à un concours, l'intéressé peut soit introduire une réclamation dans le délai prévu par l'article 90, paragraphe 2, du statut, soit introduire un recours directement devant le Tribunal dans le délai prévu par l'article 91, paragraphe 3, du statut (voir l'ordonnance Valle Fernandez/Commission, précitée, points 11 à 13).

93

En l'espèce, la requérante n'a pas introduit de réclamation contre la décision du 15 février 1996. Celle-ci lui ayant été notifiée avant le 4 mars 1996, le recours, daté du 27 juin 1996, a donc été introduit en dehors du délai de trois mois prévu par l'article 91, paragraphe 3, du statut.

94

Le premier groupe de moyens de la requérante, visant la décision du 15 février 1996, est par conséquent irrecevable.

95

En tout état de cause, le Tribunal relève que, dans la mesure où la décision du 15 février 1996 contenait une inexactitude en ce qu'elle indiquait que la requérante n'avait pas produit de documents prouvant l'expérience professionnelle acquise, cette inexactitude a été corrigée par la décision ultérieure du 26 mars 1996, à la suite de la demande de la requérante du 4 mars 1996.

96

Dans ces circonstances, le Tribunal estime que, en tout état de cause, la requérante n'a pas subi de préjudice moral de nature à justifier une réparation, même symbolique.

97

II s'ensuit que le recours doit être rejeté.

Sur les dépens

98

Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Toutefois, aux termes de l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leur agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Le Tribunal estime qu'il n'y a pas lieu de donner suite à la demande de la Commission visant l'application de l'article 87, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement de procédure. La requérante ayant succombé en ses conclusions, chaque partie supportera donc ses propres dépens.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête:

 

1)

Le recours est rejeté.

 

2)

Chacune des parties supportera ses propres dépens.

 

Bellamy

Kalogeropoulos

Jaeger

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 6 novembre 1997.

Le greffier

H. Jung

Le président

A. Kalogeropoulos


( *1 ) Langue de procédure: le français.

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