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Document 61996TJ0036(01)

    Urteil des Gerichts erster Instanz (Dritte Kammer) vom 8. Juli 1999.
    Giuliana Gaspari gegen Europäisches Parlament.
    Beamte - Rechtsmittel - Verweisung an das Gericht - Krankheitsurlaub - Ärztliche Bescheinigung - Ärztliche Kontrolluntersuchung - Der ärztlichen Bescheinigung widersprechendes Ergebnis.
    Rechtssache T-36/96.

    Sammlung der Rechtsprechung – Öffentlicher Dienst 1999 I-A-00135; II-00729

    ECLI identifier: ECLI:EU:T:1999:143

    ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

    8 juillet 1999 ( *1 )

    «Fonctionnaires — Pourvoi — Renvoi au Tribunal — Congé de maladie — Certificat médical — Visite médicale de contrôle — Conclusions contredisant le certificat médical»

    Dans l'affaire T-36/96,

    Giuliana Gaspari, fonctionnaire du Parlement européen, demeurant à Sandweiler (Luxembourg), représentée par Me Lucette Defalque, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la fiduciaire Myson SARL, 30, rue de Cessange,

    partie requérante,

    contre

    Parlement européen, représenté par MM. Manfred Peter, chef de division au service juridique, et Antonio Caiola, membre du service juridique, en qualité d'agents, ayant élu domicile au secrétariat général du Parlement européen, Kirchberg,

    partie défenderesse,

    ayant pour objet une demande d'annulation de la décision du 22 mai 1995, par laquelle le Parlement a considéré comme irrégulière l'absence de la requérante du 5 mai 1995 et a imputé un jour sur son congé annuel, par application de l'article 60 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, et, pour autant que de besoin, de la décision confirmative du 9 août 1995,

    LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

    composé de MM. M. Jaeger, président, K. Lenaerts et J. Azizi, juges,

    greffier: Mme B. Pastor, administrateur principal,

    vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 22 avril 1999,

    rend le présent

    Arrêt

    Cadre réglementaire

    1

    L'article 59, paragraphes 1 à 3, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «statut») dispose:

    «1.

    Le fonctionnaire qui justifie être empêché d'exercer ses fonctions par suite de maladie ou d'accident bénéficie de plein droit d'un congé de maladie.

    L'intéressé doit aviser, dans les délais les plus brefs, son institution de son indisponibilité en précisant le lieu où il se trouve. Il est tenu de produire, à partir du quatrième jour de son absence, un certificat médical. Il peut être soumis à tout contrôle médical organisé par l'institution.

    Lorsque ces absences pour maladie non supérieures à trois jours dépassent, sur une période de douze mois, un total de douze jours, le fonctionnaire est tenu de produire un certificat médical pour toute nouvelle absence pour cause de maladie.

    L'autorité investie du pouvoir de nomination peut saisir la commission d'invalidité du cas du fonctionnaire dont les congés cumulés de maladie excèdent douze mois pendant une période de trois ans.

    2.

    Le fonctionnaire peut être mis en congé d'office à la suite d'un examen pratiqué par le médecin-conseil de l'institution, si son état de santé l'exige ou si une maladie contagieuse s'est déclarée dans son foyer.

    3.

    En cas de contestation, la commission d'invalidité est saisie pour avis.

    [...]»

    2

    L'article 60 du statut prévoit:

    «Sauf en cas de maladie ou d'accident, le fonctionnaire ne peut s'absenter sans y avoir été préalablement autorisé par son supérieur hiérarchique. Sans préjudice de l'application éventuelle des dispositions prévues en matière disciplinaire, toute absence irrégulière dûment constatée est imputée sur la durée du congé annuel de l'intéressé. En cas d'épuisement de ce congé, le fonctionnaire perd le bénéfice de sa rémunération pour la période correspondante.»

    3

    La composition et les modalités de fonctionnement de la commission d'invalidité sont déterminées conformément aux dispositions de la section 4 de l'annexe II du statut. Aux termes de l'article 7 de ladite annexe II, la commission d'invalidité est composée de trois médecins: le premier est désigné par l'institution dont relève le fonctionnaire intéressé, le deuxième par l'intéressé, et le troisième d'un commun accord entre les deux médecins ainsi désignés ou, à défaut d'accord, par le président de la Cour de justice.

    Faits

    4

    La requérante, fonctionnaire de grade B 2 du Parlement, affectée à la direction générale Greffe (DG I) à Luxembourg, a transmis au défendeur un certificat de son médecin traitant, daté du 3 mai 1995, la reconnaissant incapable de travailler pour la période du mercredi 3 mai au vendredi 5 mai 1995 inclus.

    5

    Le 4 mai 1995, le médecin-contrôleur de l'institution défenderesse à Luxembourg s'est rendu au domicile de la requérante pour un examen de contrôle.

    6

    A l'issue de celui-ci, il l'a informée qu'il la jugeait apte à reprendre ses fonctions dès le lendemain, le vendredi 5 mai 1995.

    7

    La requérante n'a repris son service que le lundi 8 mai 1995.

    8

    Le même jour, elle a adressé une note au directeur général du personnel, du budget et des finances de l'institution défenderesse, dénonçant le comportement du médecin-contrôleur à son égard.

    9

    Par lettre datée du 22 mai 1995, l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après «AIPN»), l'a informée, d'une part, que son absence du 5 mai 1995 était considérée comme irrégulière, étant donné que le médecin-contrôleur l'avait informée qu'elle était apte à reprendre ses fonctions à cette date, et, d'autre part, que ce jour d'absence serait imputé sur son congé annuel en application de l'article 60 du statut.

    10

    Par lettre datée du 9 août 1995, elle a confirmé cette décision.

    11

    Dans une lettre que le médecin-contrôleur a adressée le 28 mai 1996 au défendeur, faisant suite aux mesures d'organisation de la procédure ordonnées par le Tribunal le 15 mai 1996 (voir ci-après point 15), il a déclaré avoir tenté en vain de joindre par téléphone le médecin traitant de la requérante à la suite de la visite de contrôle. Cette allégation est contestée par la requérante. Le rapport médical rédigé à l'occasion de cette visite ne fait pas mention de cette tentative infructueuse.

    Procédure précontentieuse

    12

    Par note datée du 11 août 1995, enregistrée le 21 août 1995, la requérante a introduit une réclamation contre la décision du 22 mai 1995. Elle a fait valoir, premièrement, qu'elle s'était bornée à suivre scrupuleusement les indications de son médecin et, deuxièmement, que les observations du médecin-contrôleur étaient dénuées de fondement, car il ne l'avait jamais vue auparavant et avait usé de méthodes qu'elle qualifiait de «partisanes».

    13

    Par décision du 13 décembre 1995, le défendeur a explicitement rejeté la réclamation de la requérante. Il a exposé que le fonctionnaire ou l'agent qui s'absente pour raison médicale ne peut pas différer la date de reprise des fonctions si le médecin mandaté par l'institution concernée conclut qu'il est capable de reprendre son activité professionnelle avant la date indiquée par le médecin traitant. Le défendeur a ajouté que, si le fonctionnaire ou l'agent ne reprend pas ses activités à la date indiquée par le médecin-contrôleur, l'article 60 du statut doit lui être appliqué. Enfin, il a considéré que la réclamante n'avait pas prouvé ses allégations selon lesquelles le comportement du médecin-contrôleur aurait été arbitraire ou illégitime.

    Procédure judiciaire

    14

    La requête introductive du présent recours a été déposée au greffe du Tribunal le 14 mars et enregistrée le 15 mars 1996.

    15

    Le 15 mai 1996, le Tribunal a demandé au défendeur, d'une part, de produire le rapport médical établi par le médecin-contrôleur à l'issue de la visite de contrôle litigieuse et, d'autre part, de préciser si ce dernier avait pris contact avec le médecin traitant de la requérante à la suite de cette visite.

    16

    Par lettre du 3 juin 1996, le défendeur a produit le rapport médical demandé et a répondu à la question du Tribunal (voir ci-dessus point 11).

    17

    Le 21 mars 1997, le Tribunal a demandé au défendeur de produire copie d'une lettre adressée le 31 mai 1995 par le médecin-contrôleur à un médecin du service médical du Parlement, laquelle a été versée au dossier.

    18

    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal à l'audience du 29 avril 1997.

    19

    Par arrêt du 10 juillet 1997, Gaspari/Parlement (T-36/96, RecFP p. II-595), le Tribunal a annulé les décisions des 22 mai (voir ci-dessus point 9) et 9 août 1995 (voir ci-dessus point 10), pour violation de l'obligation de motivation et des droits de la défense.

    20

    Par requête déposée au greffe de la Cour le 12 septembre 1997, le Parlement européen a, en vertu de l'article 49 du statut (CE) de la Cour de justice, formé un pourvoi contre cet arrêt.

    21

    Par arrêt du 19 novembre 1998, Parlement/Gaspari (C-316/97 P, Rec. p. I-7597), la Cour a annulé l'arrêt du Tribunal, en tant qu'il avait annulé les décisions des 22 mai et 9 août 1995 pour violation de l'obligation de motivation et des droits de la défense. Elle a renvoyé l'affaire devant le Tribunal pour qu'il statue sur les autres moyens invoqués par la requérante en première instance. Elle a, enfin, réservé les dépens.

    22

    Le Tribunal étant ainsi à nouveau saisi de l'affaire en vertu de l'article 117 du règlement de procédure, la requérante a déposé, le 18 janvier 1999, un mémoire d'observations écrites, en application de l'article 119, paragraphe 1, sous a), dudit règlement.

    23

    Le 19 février 1999, le défendeur a déposé un mémoire d'observations écrites, en application de l'article 119, paragraphe 1, sous b), du règlement de procédure.

    24

    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal à l'audience du 22 avril 1999 organisée à la suite du renvoi de l'affaire par la Cour.

    Conclusions des parties

    25

    La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

    annuler la décision par laquelle l'AIPN a, d'une part, considéré son absence du 5 mai 1995 comme irrégulière et, d'autre part, imputé un jour sur la durée de son congé annuel;

    pour autant que de besoin, annuler la décision confirmative du 9 août 1995;

    condamner la partie défenderesse aux dépens.

    26

    Le défendeur conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

    rejeter le recours comme non fondé;

    statuer sur les dépens comme de droit.

    Sur le fond

    27

    A l'appui de son recours, la requérante invoque trois moyens, tirés respectivement d'une violation de l'article 25 du statut et des droits de la défense, d'une violation de l'article 59 du statut et d'une erreur manifeste d'appréciation. Conformément au dispositif de l'arrêt Parlement/Gaspari, précité, seuls les deux derniers moyens doivent être examinés.

    Sur le moyen tiré de la violation de l'article 59 du statut (saisine de la commission d'invalidité)

    Argumentation des parties

    28

    La requérante fait valoir que, aux termes de l'article 59, paragraphe 1, du statut, le fonctionnaire qui justifie être empêché d'exercer ses fonctions par suite de maladie ou d'accident bénéficie de plein droit d'un congé de maladie.

    29

    Elle neparagraphe 1 reproche pas à l'institution concernée de l'avoir soumise à un contrôle médical, mais soutient que l'article 59, paragraphe 1, quatrième alinéa, du statut n'autorise pas celle-ci, dans l'hypothèse où le médecin-contrôleur contesterait la validité du certificat médical produit par le fonctionnaire, à ne pas tenir compte dudit certificat et à imputer les jours d'absence couverts par ce certificat sur la durée du congé annuel de l'intéressé. En cas de contestation par le médecin-contrôleur des conclusions médicales du médecin traitant, la commission d'invalidité devrait être saisie pour avis, conformément à l'article 59, paragraphe 3, du statut. La consultation de cette commission serait d'autant plus justifiée que le médecin-contrôleur procède à un examen sommaire, alors que le fonctionnaire peut être atteint de troubles graves que seul un véritable examen clinique permettrait de déceler.

    30

    En l'espèce, le médecin-contrôleur aurait contesté la validité du certificat médical produit par la requérante. Or, la commission d'invalidité n'aurait pas été réunie pour avis. Le défendeur aurait donc illégalement considéré l'absence du 5 mai 1995 comme irrégulière et imputé ce jour d'absence sur la durée de son congé annuel.

    31

    Les références faites par le défendeur (voir ci-après point 35) aux conclusions de l'avocat général M. Mayras sous l'arrêt de la Cour du 9 juillet 1975, Vellozzi/Commission (42/74 et 62/74, Rec. p. 871, 882, 888), et de l'avocat général Sir Gordon Slynn sous l'arrêt de la Cour du 6 juillet 1983, Geist/Commission (285/81, Rec. p. 2217, 2241), seraient dénuées de pertinence. En effet, dans l'arrêt Vellozzi/Commission, la Cour aurait déclaré que l'application de l'article 59, paragraphe 3, du statut présuppose nécessairement l'existence d'une contestation qui n'a pas été définitivement tranchée. Or, à la différence de la présente espèce, dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt Vellozzi/Commission, la commission d'invalidité avait été saisie, de sorte que la contestation avait été définitivement tranchée et, dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt Geist/Commission, la commission d'invalidité s'était déjà prononcée sur l'affection en cause.

    32

    En toute hypothèse, aucun principe ne permettrait de faire prévaloir systématiquement l'avis du médecin-contrôleur sur celui du médecin consulté par le fonctionnaire.

    33

    Le défendeur se réfère d'abord à une communication au personnel du 15 février 1994 interdisant au fonctionnaire de «différer la date de reprise des fonctions si le médecin mandaté par l'institution conclut à une reprise anticipée de l'activité professionnelle».

    34

    Cette règle se déduirait également des arrêts de la Cour du 27 avril 1989, Fedeli/Parlement (271/87, Rec. p. 993), et du 19 juin 1992, V./Parlement (C-18/91 P, Rec. p. I-3997, point 29).

    35

    L'article 59, paragraphe 3, du statut prévoyant la saisine de la commission d'invalidité ne s'appliquerait que dans la seule hypothèse, visée par l'article 59, paragraphe 2, du statut, de la mise en congé d'office du fonctionnaire. Cette thèse serait corroborée par les conclusions présentées par l'avocat général M. May ras sous l'arrêt Vellozzi/Commission, citées au point 31 ci-dessus. Elle trouverait également appui dans le libellé de l'article 59 du statut, qui ne prévoit pas la convocation de la commission d'invalidité dans une situation comme celle de la présente espèce. D'après le défendeur, si le législateur avait voulu que la commission d'invalidité soit saisie lorsque les conclusions des certificats médicaux du médecin-contrôleur et du médecin consulté par le fonctionnaire ne coïncident pas, il l'aurait expressément prévu dans l'article 59, paragraphe 1, quatrième alinéa, du statut.

    36

    Le défendeur estime qu'il serait inutile de convoquer la commission d'invalidité afin que celle-ci se prononce sur l'état de santé de l'intéressé au jour précis faisant l'objet de la contestation sur la base d'un examen effectué postérieurement, à un moment où l'état de santé de la personne concernée pouvait avoir évolué. La convocation de la commission d'invalidité, prévue à l'article 59, paragraphe 3, du statut, viserait uniquement à permettre à l'AIPN de trancher la contestation portant sur la mise en congé d'office d'un fonctionnaire atteint d'une maladie grave, chronique ou de longue durée.

    37

    A tout le moins, la saisine de la commission d'invalidité supposerait une divergence d'opinion en ce qui concerne l'état de santé du fonctionnaire. Or, pareille divergence ne serait pas établie en l'espèce. En effet, la visite de contrôle se limiterait à constater la situation médicale du fonctionnaire concerné au moment où la visite a lieu. Le fait que le médecin-contrôleur juge le fonctionnaire apte à reprendre le travail par anticipation ne remettrait pas en cause la validité du certificat médical délivré par le médecin consulté par celui-ci.

    38

    Le défendeur admet que l'avis du médecin-contrôleur ne prime pas nécessairement celui du médecin consulté par le fonctionnaire. Cependant, au cas où ce dernier entendrait contester l'avis du médecin-contrôleur, il lui appartiendrait de démontrer qu'il n'est pas fondé. En l'espèce, la requérante n'aurait pas rapporté cette preuve, le certificat médical présenté ne constituant pas en lui-même la preuve déterminante d'une incapacité de travail (conclusions des avocats généraux M. Mayras et Sir Gordon Slynn, citées au point 31 ci-dessus).

    39

    Le défendeur aurait donc imputé à bon droit le jour d'absence litigieux sur la durée du congé annuel de la requérante, l'application de l'article 60 du statut étant la conséquence nécessaire de l'avis du médecin-contrôleur concluant à l'aptitude de celle-ci à reprendre le travail dès le 5 mai 1996.

    40

    Le défendeur conclut au rejet du moyen.

    Appréciation du Tribunal

    41

    Il ressort de l'article 59, paragraphe 3, du statut que, «en cas de contestation», l'AIPN a l'obligation de saisir la commission d'invalidité.

    42

    Toutefois, le statut ne détermine, ni dans ses dispositions, ni dans l'annexe II susvisée, le mode de saisine de la commission d'invalidité. Il ne précise pas non plus si cette dernière doit être saisie en cas de divergence entre les appréciations médicales du médecin consulté par le fonctionnaire et celles du médecin-contrôleur ou en cas de désaccord du fonctionnaire sur les appréciations du médecin-contrôleur.

    43

    Il appartient donc au Tribunal, pour répondre à la question de savoir si le défendeur était, en l'espèce, tenu de saisir la commission d'invalidité, de préciser la notion de contestation visée à l'article 59, paragraphe 3. A cette fin, il y a lieu d'analyser, premièrement, l'économie de l'article 59 du statut.

    44

    L'argumentation du défendeur, selon laquelle la notion de contestation ne vise que les contestations susceptibles de naître à l'occasion de la mise en congé d'office d'un fonctionnaire prévue par l'article 59, paragraphe 2, du statut, ne saurait être retenue.

    45

    D'une part, en effet, si le législateur avait voulu limiter l'application de la règle de la saisine de la commission d'invalidité en cas de contestation à cette seule hypothèse, il aurait intégré cette règle dans le paragraphe 2, au lieu de la prévoir à l'article 59, paragraphe 3.

    46

    D'autre part, si le législateur avait inséré la règle litigieuse dans l'article 59, paragraphe 1, quatrième alinéa, du statut, il aurait fait supposer qu'elle n'était applicable que dans l'hypothèse spécifique où les congés cumulés de maladie excèdent douze mois sur une période de trois ans.

    47

    De même, l'inclusion de cette disposition dans l'article 59, paragraphe 1, troisième alinéa, aurait fait présumer qu'elle n'était applicable que dans l'hypothèse visée à cet alinéa, c'est-à-dire lorsque les absences pour maladie non supérieures à trois jours dépassent, sur une période de douze mois, un total de douze jours.

    48

    Enfin, l'intégration de la disposition dans l'article 59, paragraphe 1, deuxième alinéa, aurait exclu son application dans le cas de la mise en congé d'office d'un fonctionnaire, visé au paragraphe 2 précité.

    49

    Dès lors, pour couvrir la totalité des cas de contestation susceptibles de naître, que ce soit dans les différentes hypothèses envisagées au paragraphe 1 ou en cas de contestation dans le cadre de la procédure du paragraphe 2, il convenait de placer la disposition du paragraphe 3 dans un paragraphe distinct, solution retenue par le législateur.

    50

    Il résulte de ce qui précède qu'il ne ressort pas de l'économie de l'article 59 du statut que le législateur ait exclu que la commission d'invalidité soit saisie lorsque les conclusions du rapport du médecin-contrôleur ne coïncident pas avec celles du certificat médical produit par l'intéressé.

    51

    Il convient, deuxièmement, de préciser le régime juridique des absences.

    52

    Le fonctionnaire est normalement tenu de s'acquitter de ses obligations conformément aux dispositions des articles 55 et suivants du statut. Il doit, notamment, être à tout moment à la disposition de l'institution. Toute absence non justifiée est dès lors, par principe, présumée irrégulière.

    53

    Aux termes de l'article 59, paragraphe 1, premier alinéa, du statut, «le fonctionnaire qui justifie être empêché d'exercer ses fonctions par suite de maladie ou d'accident bénéficie de plein droit d'un congé de maladie». S'il incombe donc au fonctionnaire d'apporter la preuve de cet empêchement, il ressort toutefois de l'arrêt V./Parlement, cité au point 34 ci-dessus, point 33, et de l'arrêt du Tribunal du 26 janvier 1995, O/Commission (T-527/93, RecFP p. II-29, point 36), que la présentation d'un certificat médical fait naître une présomption de régularité de l'absence.

    54

    La disposition de l'article 59, paragraphe 1, deuxième alinéa, du statut, selon laquelle l'agent intéressé «peut être soumis à tout contrôle médical organisé par l'institution», a nécessairement pour objet de permettre le renversement de cette présomption par l'attestation, établie par le médecin-contrôleur à la suite d'un contrôle médical effectué selon les règles de l'art, que le fonctionnaire est apte au travail. La possibilité d'effectuer un contrôle médical, organisé dans des conditions régulières, n'aurait sinon aucun sens dans le cas d'un fonctionnaire qui a présenté un certificat médical.

    55

    Dès que la présomption de régularité de l'absence a été renversée, comme le permet ladite disposition, par les conclusions du médecin-contrôleur, le fonctionnaire ne justifie plus être empêché d'exercer ses fonctions par suite de maladie ou d'accident (arrêt du Tribunal du 6 mai 1997, Quijano/Commission, T-169/95, RecFP p. II-273, point 40).

    56

    Par conséquent, si, comme en l'espèce, le médecin-contrôleur conclut, à la suite d'un contrôle médical intervenu dans des conditions régulières, à l'aptitude au travail du fonctionnaire, celui-ci se retrouve dans la situation de devoir justifier, d'une manière ou d'une autre, notamment par la production d'un nouveau certificat médical, qu'il est néanmoins empêché d'exercer ses fonctions. A défaut, il doit reprendre ses fonctions à la date indiquée par le médecin-contrôleur. Cette règle figure d'ailleurs dans une communication du Parlement au personnel du 15 février 1994 (voir ci-dessus point 33) dont la requérante ne prétend pas ne pas avoir eu connaissance.

    57

    Sauf à remettre en cause le principe de crédibilité des certificats médicaux (à cet égard, voir l'arrêt V./Parlement, cité au point 34 ci-dessus, point 34), un certificat médical concluant à l'inaptitude au travail du fonctionnaire pour une certaine durée et les conclusions du médecin-contrôleur préconisant, à la suite d'un contrôle postérieur intervenu dans des conditions régulières, une reprise anticipée des fonctions doivent être considérés comme des constatations médicales effectuées à des périodes différentes et successives, se rapportant à des états de santé qui ne sont pas nécessairement identiques.

    58

    Dès lors, une divergence entre les conclusions médicales contenues respectivement dans un certificat établi par le médecin traitant et dans un certificat délivré par le médecin-contrôleur à la suite d'un contrôle médical régulier ne constitue pas en soi une contestation au sens de l'article 59, paragraphe 3, du statut, puisque les conclusions du médecin-contrôleur, en l'absence de tout effet rétroactif, ne remettent pas en cause la pertinence de celles établies antérieurement par le médecin traitant.

    59

    Il s'ensuit que, dans un tel cas, l'article 59 du statut ne fait pas obligation à l'institution de saisir la commission d'invalidité. Par conséquent, la thèse de la requérante selon laquelle une simple divergence entre les conclusions du médecin traitant et celles du médecin-contrôleur sur la date de reprise de ses fonctions constituerait une contestation, au sens de l'article 59, paragraphe 3, du statut ne saurait être retenue.

    60

    Il incombait donc à la requérante, si les conclusions du médecin-contrôleur lui paraissaient médicalement injustifiées, d'appeler son médecin traitant ou le médecin de son choix afin de faire constater de nouveau son inaptitude au travail. Son absence aurait été de nouveau de plein droit présumée régulière à compter de la délivrance d'un nouveau certificat d'incapacité de travail (article 59, paragraphe 1, premier alinéa).

    61

    Il convient de préciser que, si l'institution avait entendu organiser un nouveau contrôle à la suite de ce second certificat du médecin traitant, il y aurait eu lieu de distinguer selon que le second certificat se rapportait ou non à une affection différente de celle censée avoir été l'objet du premier. Dans l'affirmative, un avis divergent rendu par le médecin-contrôleur à la suite d'un second contrôle n'aurait pu être interprété comme étant une contestation, et la saisine de la commission d'invalidité n'aurait été aucunement nécessaire. En revanche, s'il n'était pas apparu que le second certificat d'inaptitude au travail se rapportait à une affection différente, la divergence entre les certificats du médecin traitant, d'une part, et les avis du médecin-contrôleur, délivrés par hypothèse dans un court laps de temps, d'autre part, aurait dénoté une réelle contestation médicale devant être tranchée par un organe tiers. Dans un tel cas, il aurait fallu saisir la commission d'invalidité, conformément à l'article 59, paragraphe 3, du statut.

    62

    En l'espèce, force est de constater que la preuve de l'existence d'une contestation au sens de l'article 59, paragraphe 3, du statut n'est pas rapportée. Il convient par conséquent de rejeter le moyen comme étant non fondé.

    Sur le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation

    Argumentation des parties

    63

    La requérante reproche au médecin-contrôleur de s'être contenté de lui ordonner de reprendre ses fonctions le vendredi 5 mai 1995, au motif que «si [elle était ...] capable de reprendre [son ...] travail lundi, [elle pouvait ...] aussi bien le reprendre vendredi». Il n'aurait procédé à aucun examen clinique; en particulier, il n'aurait pas effectué d'«examen médical standard», contrairement à sa déclaration du 31 mai 1995 (voir ci-dessus point 17). Il n'aurait pas non plus consulté le médecin ayant délivré le certificat de maladie ni prêté attention au fait qu'elle avait dû consulter un médecin les 18 et 28 avril 1995.

    64

    Or, elle souffrirait de graves troubles hormonaux. A l'appui de cette allégation, elle produit, en annexe à ses observations du 19 février 1999 (voir ci-dessus point 23), des certificats du 18 décembre 1998 et des 9 et 12 janvier 1999 rédigés par trois médecins, dont celui ayant établi le certificat du 3 mai 1995 (voir ci-dessus point 4), attestant tous trois qu'elle a été examinée en avril et en mai 1995 pour des troubles somatiques, psychiques ou hormonaux. Dans ces conditions, le motif invoqué par le médecin-contrôleur pour conclure qu'elle était apte à reprendre le travail serait dénué de toute valeur médicale et scientifique.

    65

    En prenant une décision fondée sur un tel avis médical, le défendeur aurait nécessairement commis une erreur manifeste d'appréciation.

    66

    La requérante réfute l'objection du défendeur selon laquelle elle n'aurait pas démontré ses affirmations en ce qui concerne le déroulement du contrôle médical (voir ci-après points 67 et 68). D'une part, comme les visites de contrôle ont lieu sans que le fonctionnaire contrôlé en soit préalablement informé, exiger de celui-ci qu'il prouve ses affirmations quant au déroulement du contrôle aboutirait à mettre à sa charge une preuve impossible à produire et constituerait une atteinte aux droits de la défense. D'autre part, les affirmations du défendeur, se limitant à rapporter les déclarations unilatérales du médecin-contrôleur sans document à l'appui, seraient contradictoires. En effet, la déclaration de celui-ci, selon laquelle il aurait procédé à un examen clinique, s'opposerait à celle par laquelle il reconnaît s'être concentré «sur l'examen psychologique et sur l'entretien avec le patient».

    67

    Selon le défendeur, la requérante n'a avancé aucun élément de nature à prouver que le médecin-contrôleur n'a procédé à aucun examen clinique. Il n'y aurait aucune contradiction entre la déclaration du médecin-contrôleur selon laquelle il se serait concentré sur l'examen psychologique du patient et l'affirmation selon laquelle il aurait procédé à un examen clinique. En effet, un examen psychologique pourrait être ainsi qualifié. Sur ce point, le défendeur souligne que le médecin-contrôleur devait uniquement contrôler l'état de santé de la requérante par rapport au certificat médical qu'elle avait produit, sans devoir prendre en compte des éléments étrangers à ce certificat.

    68

    Pour que son moyen puisse prospérer, la requérante devrait établir les faits qu'elle allègue au soutien de sa prétention et, en particulier, démontrer que les résultats de la visite médicale de contrôle sont erronés. Le défendeur excipe de l'irrecevabilité des certificats médicaux du 18 décembre 1998 et des 9 et 12 janvier 1999 (voir ci-dessus point 64) en tant qu'éléments de preuve.

    69

    Il rejette également l'assertion de la requérante selon laquelle le fait d'exiger d'elle qu'elle prouve ses affirmations reviendrait à porter atteinte à ses droits de la défense, le principe actori incumbit probatio étant un principe fondamental de la procédure judiciaire.

    Appréciation du Tribunal

    70

    La requérante soutient, en substance, que la décision attaquée repose sur un avis médical entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et que, partant, elle est, elle-même, entachée d'une telle erreur. Le Tribunal est donc invité à se prononcer sur le bien-fondé de l'avis du médecin-contrôleur.

    71

    Selon une jurisprudence constante, le contrôle juridictionnel du Tribunal ne saurait s'étendre aux appréciations médicales proprement dites, qui doivent être tenues pour définitives dès lors qu'elles sont intervenues dans des conditions régulières. En revanche, le contrôle juridictionnel peut s'exercer sur la régularité de la procédure suivie lors de l'examen médical, en particulier, en cas de saisine de la commission médicale, ainsi que sur la régularité des avis émis, afin de vérifier si leur motivation permet d'apprécier les considérations sur lesquelles les conclusions qu'ils contiennent sont fondées et s'il est établi un lien compréhensible entre les constatations médicales qu'ils comportent et les conclusions auxquelles ils arrivent (arrêts du Tribunal du 27 octobre 1994, C/Commission, T-47/93, RecFP p. II-743, point 47, et du 21 mai 1996, W/Commission, T-148/95, RecFP p. II-645, points 38 et 39, et la jurisprudence y citée). Les rapports médicaux établis par les médecins-contrôleurs à la suite de visites de contrôle effectuées en application de l'article 59, paragraphe 1, deuxième alinéa, du statut étant d'une nature analogue à celle des avis des commissions médicales, ils doivent être soumis au même contrôle.

    72

    Certes, en l'espèce, le rapport du médecin-contrôleur (voir ci-dessus point 16) est médicalement peu circonstancié. Il ne précise ni la nature des troubles somatiques dont se plaint la patiente, ni la nature de l'examen médical effectué, ni s'il a été procédé à une anamnese complète, d'autant plus importante que le médecin-contrôleur n'avait jamais vu la patiente auparavant.

    73

    Toutefois, dès lors, d'une part, que, comme en l'espèce, le certificat attestant l'inaptitude au travail du fonctionnaire concerné ne spécifie pas les raisons médicales justifiant la prescription de l'arrêt de travail et, d'autre part, que le contrôle que doit effectuer le médecin-contrôleur se limite à vérifier si le fonctionnaire est, lors de la visite, effectivement inapte au travail, on ne saurait exiger du médecin-contrôleur qu'il rédige un avis médical extrêmement circonstancié allant au-delà de ce qui lui est nécessaire pour constater l'aptitude ou l'inaptitude au travail de l'intéressé dans le cadre d'un contrôle de routine.

    74

    Pour regrettable que puisse être l'absence de contact entre le médecin-contrôleur et le médecin traitant de la requérante, elle n'est pas, en tant que telle, de nature à remettre en cause la validité de la décision attaquée.

    75

    En l'espèce, l'examen de l'avis du médecin-contrôleur révèle, sans se prononcer sur sa pertinence médicale, qu'il existe un lien compréhensible entre les constatations qu'il contient, les considérations sur lesquelles il s'est fondé pour conclure à l'aptitude au travail et cette dernière conclusion. En effet, le médecin-contrôleur a d'abord relevé que la patiente se plaignait de troubles somatiques sans que des symptômes ne soient toutefois perceptibles («sans support séméiologique») et a ensuite estimé que l'examen médical ne mettait pas en évidence de pathologie somatique ou psychiatrique empêchant une activité normale.

    76

    A supposer que les informations contenues dans les certificats joints par la requérante en annexe à ses observations du 18 janvier 1999 (voir ci-dessus point 23) eussent pu être pertinentes pour l'adoption de la décision attaquée, il ne saurait être reproché à l'AIPN d'avoir commis une erreur manifeste d'appréciation en se fondant sur le seul avis du médecin-contrôleur, dès lors qu'elle n'était pas en possession de ces informations lorsqu'elle a pris sa décision.

    77

    En outre, il, convient de souligner que le renvoi par la Cour d'une affaire au Tribunal à la suite d'une annulation sur pourvoi ne saurait être l'occasion pour les parties d'avancer des éléments de fait n'ayant pas été soumis au Tribunal en première instance.

    78

    Eu égard à ce qui précède, la requérante n'a pas démontré que le défendeur a commis une erreur manifeste d'appréciation en se fondant sur l'avis du médecin-contrôleur.

    79

    Il s'ensuit que le moyen doit être rejeté. Par conséquent, le recours sera également rejeté.

    Sur les dépens

    80

    Le défendeur demande que la requérante soit condamnée à supporter l'intégralité des dépens, y compris ceux qu'il a dû exposer, en application de l'article 87, paragraphe 3, du règlement de procédure, au motif que les moyens qu'elle a soulevés présenteraient un «caractère immodéré par rapport à l'objet de l'affaire», que ses allégations au sujet du médecin-contrôleur seraient purement arbitraires et que ses revendications seraient «vexatoires».

    81

    La requérante récuse ces arguments.

    82

    Il convient de relever qu'au jour de l'introduction du recours, le juge communautaire ne s'était pas encore prononcé sur la question, soulevée par ce recours, de savoir si la commission d'invalidité doit être saisie dans le cas où un médecin-contrôleur, chargé de vérifier l'état de santé d'un fonctionnaire ayant produit un certificat médical attestant son inaptitude au travail, conclut qu'il peut reprendre ses fonctions. D'ailleurs, le défendeur lui-même a demandé au Tribunal de «préciser d'une façon définitive ce que la Cour n'a pas encore eu la possibilité de faire, c'est-à-dire aborder directement la question de la portée de l'article 59, paragraphe 3». Le Tribunal ne saurait dès lors considérer les frais exposés par le défendeur comme vexatoires, la requérante ayant légitimement défendu ses droits et intérêts.

    83

    Par conséquent, il n'y a, en l'espèce, aucune raison de s'écarter de la règle de l'article 88 du règlement de procédure prévoyant que, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. La requérante ayant succombé en ses moyens, chacune des parties supportera ses propres dépens.

     

    Par ces motifs,

    LE TRIBUNAL (troisième chambre)

    déclare et arrête:

     

    1)

    Le recours est rejeté.

     

    2)

    Chaque partie supportera la totalité de ses propres dépens afférents aux procédures devant le Tribunal et la Cour.

     

    Jaeger

    Lenaerts

    Azizi

    Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 juillet 1999.

    Le greffier

    H. Jung

    Le président

    M. Jaeger


    ( *1 ) Langue de procédure: le français.

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