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Document 61993TJ0035

    Urteil des Gerichts erster Instanz (Vierte Kammer) vom 28. April 1994.
    Vincent Cucchiara und andere gegen Kommission der Europäischen Gemeinschaften.
    Beamte - Sachbearbeiter einer Abrechnungsstelle des gemeinsamen Krankheitsfürsorgesystems der Organe der europäischen Gemeinschaften, die den Erstattungssatz festlegen - Einstufung in die Laufbahngruppe C -Dienstposten, der nach Ansicht der Kläger zur Laufbahngruppe B gehört.
    Rechtssache T-35/93.

    Sammlung der Rechtsprechung – Öffentlicher Dienst 1994 I-A-00127; II-00413

    ECLI identifier: ECLI:EU:T:1994:44

    ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

    28 avril 1994 ( *1 )

    «Fonctionnaires — Tarificateurs d'un bureau liquidateur du régime d'assurance maladie commun aux institutions des Communautés européennes — Classement dans la catégorie C — Emplois relevant, selon les requérants, de la catégorie B»

    Dans l'affaire T-35/93,

    Vincent Cucchiara, demeurant à Bruxelles,

    Léon Carlier, demeurant à Bruxelles,

    Mercedes Gonzalez, demeurant à Bruxelles,

    Anna Benedetti, demeurant à Bruxelles,

    Michèle Seminckx, demeurant à Gembloux (Belgique),

    Marie-Jeanne Frittella Baecke, demeurant à Bruxelles,

    Edouard Bejaer, demeurant à Bruxelles,

    tous fonctionnaires de la Commission des Communautés européennes, représentés par Me Jean-Noël Louis, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la fiduciaire Myson SARL, 1, rue Glesener,

    parties requérantes,

    contre

    Commission des Communautés européennes, représentée par Mme Ana Maria Alves Vieira, membre du service juridique, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Georgios Kremlis, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

    partie défenderesse,

    ayant pour objet la régularisation de la situation administrative des tarificateurs classés dans la catégorie C et affectés à un bureau liquidateur du régime d'assurance maladie commun aux institutions des Communautés européennes,

    LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

    composé de MM. C. P. Briët, président, A. Saggio et H. Kirschner, juges,

    greffier: M. H. Jung,

    vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 3 mars 1994,

    rend le présent

    Arrêt

    Cadre juridique et faits à l'origine du litige

    1

    Les requérants, fonctionnaires de la Commission classés dans la catégorie C, sont affectés, en qualité de tarificateurs, au bureau liquidateur bruxellois du régime d'assurance maladie commun aux institutions des Communautés européennes (ci-après «régime commun»). A ce titre, ils procèdent, en substance, à l'examen, au contrôle et à la tarification des demandes de remboursement des frais médicaux exposés par les bénéficiaires du régime commun.

    2

    Selon l'article 20, paragraphe 3, de la réglementation relative à la couverture des risques de maladie des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «réglementation de couverture»), les bureaux liquidateurs sont notamment chargés de recevoir et de liquider les demandes de remboursement de frais médicaux et d'exécuter les paiements y afférents. En ce qui concerne le fonctionnement de ces bureaux, l'article 24 de la réglementation de couverture dispose que «les paiements à effectuer par les bureaux liquidateurs sont ordonnancés et contrôlés par la Commission selon le règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes».

    3

    Les dispositions pertinentes dudit règlement financier du 21 décembre 1977 (JO L 356, p. 1) sont contenues dans les articles 40 à 46, tels que modifiés par le règlement (Euratom, CECA, CEE) no 610/90 du Conseil, du 13 mars 1990 (JO L 70, p. 1), qui définissent et réglementent la liquidation et l'ordonnancement des dépenses.

    4

    Enfin, l'article 4 des règles internes sur l'exécution du budget général des Communautés européennes (ci-après «règles internes»), arrêtées par la Commission sur la base de l'article 22 du règlement financier et de l'article 4 du règlement no 86/610/CEE, Euratom, CECA de la Commission, du 11 décembre 1986, portant modalités d'exécution de certaines dispositions du règlement financier (JO L 360, p. 1), énonce que «les subdélégations ne peuvent être consenties:

    ...

    en matière de liquidation des dépenses, d'ordonnancement des paiements et d'établissement des ordres de recouvrement, qu'à des fonctionnaires appartenant aux catégories A et B».

    5

    En juillet 1991, une société privée belge de conseil en gestion et organisation, la société MCO (management, culture, organisation), chargée par la Commission d'analyser la situation de la caisse d'assurance maladie du régime commun et, en particulier, celle des tarificateurs, a déposé son rapport d'analyse. Le rapport constate qu'il règne un malaise parmi les tarif icateurs qui est lié fondamentalement à une conception «non positive» de leur fonction et de leur charge de travail. Le contenu de la fonction de tarificateur serait perçu comme très différent de toute autre fonction de «niveau ‘C’», étant donné que ce seraient les tarif icateurs eux-mêmes qui apprécieraient et jugeraient de l'opportunité de «payer» ou de «refouler». Le rapport résume la situation des tarificateurs en ce sens que leur fonction (autonome et quasiment sans contrôle), en particulier leur fonction de contrôle, leur donne un très grand pouvoir, les fonctionnaires de la catégorie B n'étant chefs d'équipe que pro forma ou très accessoirement.

    6

    Sur la base de son rapport d'analyse, la société MCO a présenté, en septembre 1991, des propositions d'actions pour les tarificateurs. Ces propositions portent, en substance, sur la mise en œuvre d'un processus de formation-action.

    7

    Le 1er avril 1992, les requérants ont introduit, chacun pour leur part, une demande type, dans laquelle ils ont soutenu, en substance, que c'est en violation de l'article 41 du règlement financier et de l'article 4 des règles internes de la Commission qu'ils sont chargés par l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après «AIPN») d'exécuter des tâches réservées exclusivement aux fonctionnaires des catégories A et B. Ils ont demandé, en application de ces dispositions et de l'article 21, paragraphe 3, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «statut»), que l'AIPN confirme par écrit qu'ils sont effectivement tenus d'accomplir des tâches pour lesquelles aucune subdélégation ne leur a été — et ne peut leur être — légalement donnée, que l'AIPN mette immédiatement fin à cette situation administrative irrégulière et adopte toutes les mesures de régularisation nécessaires et, notamment, qu'elle organise, sans aucun délai, un concours interne de passage de la catégorie C à la catégorie B.

    8

    Ces demandes, après avoir été rejetées implicitement, ont fait l'objet d'une réponse type explicite de rejet, datée du 2 septembre 1992, soulignant notamment le caractère préparatoire des tâches exercées par les tarificateurs. Celles-ci ne constitueraient pas des tâches de liquidation et d'ordonnancement de dépenses, incombant aux seuls fonctionnaires de catégorie B ou A. La réponse donnée se poursuit en ces termes:

    «Sans vouloir sous-estimer le travail effectué par les tarificateurs, je vous confirme que le type de tâche et le niveau de responsabilité et d'initiative qui leur sont confiés ne sortent pas du cadre défini actuellement pour la catégorie ‘C’. L'intérêt particulier que présente leur travail ne constitue pas, en tant que tel, un argument pour prétendre à un reclassement dans une catégorie supérieure.»

    9

    Par la suite, les requérants ont introduit une réclamation commune dirigée contre la décision de rejet de leurs demandes. A cette occasion, ils ont, en substance, répété les arguments avancés dans leurs demandes et ont renvoyé au rapport d'analyse établi par la société MCO, qui démontrerait à suffisance que leur travail de tarificateur n'est pas un travail de pure exécution. En conclusion, les requérants ont demandé à la Commission de faire droit à leur réclamation en retirant la réponse de rejet opposée à leurs demandes et, en conséquence, de mettre fin à leur situation irrégulière et d'organiser, notamment, un concours interne de passage de la catégorie C à la catégorie B.

    10

    La réclamation, enregistrée le 29 octobre 1992, a fait l'objet d'une réponse implicite de rejet.

    Procédure et conclusions des parties

    11

    C'est dans ces conditions que les requérants ont introduit le présent recours, qui a été enregistré au greffe du Tribunal le 1er juin 1993. La procédure écrite a suivi un cours régulier.

    12

    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables. Il a toutefois posé des questions aux parties et a invité la partie défenderesse à produire certains documents.

    13

    La procédure orale s'est déroulée le 3 mars 1994. Les représentants des parties ont été entendus en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal.

    14

    Les requérants concluent à ce qu'il plaise au Tribunal:

    déclarer le recours recevable et fondé;

    en conséquence, annuler la décision de rejet opposée par la Commission à leur demande tendant à obtenir:

    la confirmation écrite de ce qu'ils sont tenus d'accomplir des tâches pour lesquelles aucune subdélégation ne leur a été et ne peut leur être légalement donnée;

    l'adoption par l'AIPN de toutes les mesures nécessaires à la régularisation de leur situation administrative irrégulière;

    l'organisation, sans délai, d'un concours interne de passage de la catégorie C à la catégorie B;

    condamner la partie défenderesse aux dépens de l'instance.

    La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

    déclarer irrecevables les prétentions des requérants visant à obtenir des injonctions ainsi que celles fondées sur des règles purement internes;

    déclarer le recours non fondé pour le surplus;

    statuer sur les dépens comme de droit.

    Sur la recevabilité

    Quant au déroulement régulier de la procédure précontentieuse prescrite par les articles 90 et 91 du statut

    15

    Bien que les parties n'aient pas formulé d'observations au sujet de la procédure précontentieuse, le Tribunal estime que, les conditions de recevabilité d'un recours étant d'ordre public, ce point doit être examiné d'office (voir les arrêts de la Cour du 16 décembre 1960, Humblet/État belge, 6/60, Rec. p. 1125, 1147, et du Tribunal du 6 décembre 1990, Mme B./Commission, T-130/89, Rec. p. II-761, point 13). En effet, les requérants ont fait valoir, dans leurs demandes introduites au titre de l'article 90, paragraphe 1, du statut, qu'ils se trouvent dans une situation administrative irrégulière à laquelle l'AIPN doit mettre fin, quoique les décisions constitutives de leur situation administrative, à savoir celles par lesquelles l'AIPN les a initialement affectés à leurs emplois et les a classés dans la catégorie C, soient probablement devenues définitives. Or, il est de jurisprudence constante que, si tout fonctionnaire peut demander à l'AIPN de prendre à son égard une décision, cette faculté ne permet pas d'écarter les délais prévus par les articles 90 et 91 du statut pour l'introduction d'une réclamation et d'un recours, en mettant indirectement en cause, par le biais d'une demande, une décision antérieure non contestée dans les délais (voir, par exemple, l'arrêt de la Cour du 26 septembre 1985, Valentini/Commission, 231/84, Rec. p. 3027, point 14).

    16

    A cet égard, il y a toutefois lieu de constater que les requérants n'ont à aucun moment remis en question leurs classements et affectations initiaux. Ils ont plutôt souligné que c'est en raison de l'évolution intervenue ultérieurement en droit et en fait - notamment l'augmentation de leur charge de travail et la modification des textes applicables - que leur situation administrative est devenue irrégulière. Il apparaît donc que les requérants entendent se prévaloir d'éléments nouveaux susceptibles de modifier substantiellement les conditions qui ont régi les décisions relatives à leurs classements et affectations initiaux, de tels éléments pouvant justifier, selon l'arrêt Valentini/Commission, précité, la présentation de demandes tendant au réexamen de ces décisions. Par ailleurs, la réponse type du 2 septembre 1992, par laquelle l'AIPN a explicitement rejeté les demandes et motivé ce rejet, loin de se référer à ces décisions antérieures, contient le résultat d'un nouvel examen de la situation administrative des requérants et souligne que leurs tâches ne sortent pas du cadre défini «actuellement» pour la catégorie C. Il s'ensuit que, en l'espèce, la procédure précontentieuse a suivi un cours régulier.

    Quant à l'objet des conclusions du recours

    Arguments des parties

    17

    La Commission considère que le libellé de l'objet du litige est «un peu obscur», dans la mesure où les requérants semblent vouloir obtenir, par leur recours, qu'un concours interne soit organisé par 1'AIPN. Une telle prétention serait irrecevable, le Tribunal n'ayant pas compétence pour adresser des injonctions aux autorités administratives.

    18

    Les requérants répondent que le troisième chef de leurs conclusions, visant à l'organisation d'un concours interne, est, de toute évidence, subsidiaire par rapport aux deux chefs de conclusions principaux et n'a pour but que de proposer l'adoption de la seule décision de nature à régulariser leur situation administrative sans porter atteinte au travail du bureau liquidateur de Bruxelles du régime commun.

    19

    La Commission rétorque que les requérants introduisent une distinction entre, d'une part, chefs de conclusions principaux et, d'autre part, chefs de conclusions subsidiaires. Or, une telle distinction n'aurait pas été opérée lors de la phase précontentieuse.

    Appréciation du Tribunal

    20

    A cet égard, il suffit de relever que les requérants ont conclu à ce qu'il plaise au Tribunal ď «annuler la décision de rejet opposée par la Commission à la demande des requérants», laquelle avait effectivement pour objet plusieurs mesures précises à adopter par la Commission. Or, à supposer que ce recours en annulation soit déclaré fondé, il appartiendrait à la Commission de prendre toutes les mesures nécessaires à l'exécution de l'arrêt annulant sa décision de rejet (voir, par exemple, les arrêts de la Cour du 27 octobre 1977, Moli/Commission, 121/76, Rec. p. 1971, point 24, et du 9 juin 1983, Verzyck/Commission, 225/82, Rec. p. 1991, point 19). Dans une telle hypothèse, qui correspondrait à la règle énoncée à l'article 176, premier alinéa, du traité CE, il ne saurait être question, contrairement à l'interprétation donnée par la Commission aux conclusions du recours, que le juge communautaire, en excédant ses compétences, adresse des injonctions directes à l'institution défenderesse. Par conséquent, les griefs soulevés à l'encontre de l'objet des conclusions du recours doivent être écartés.

    Quant au moyen unique du recours

    21

    Les requérants avancent un moyen unique à l'appui de leur recours, en faisant essentiellement valoir que leur situation administrative est devenue irrégulière du fait qu'ils sont tenus de remplir, en leur qualité de fonctionnaires de la catégorie C, des tâches qui ne peuvent, en vertu des dispositions pertinentes de la réglementation de couverture, du règlement financier et des règles internes de la Commission, être exercées que par des fonctionnaires de la catégorie A ou B.

    Arguments des parties

    22

    La Commission fait valoir que tout litige entre la Communauté et ses agents ne peut être fondé que sur des dispositions statutaires, des principes généraux du droit de la fonction publique ou des réglementations y afférentes, susceptibles de fonder les prétentions des intéressés. Or, en l'espèce, la requête ne ferait aucune allusion à une telle base juridique, comme l'article 5 du statut, de sorte que le moyen avancé par les requérants serait irrecevable. En effet, de l'avis de la Commission, les requérants basent leurs prétentions sur des règles purement internes dont le contenu, pas plus d'ailleurs que la fonction, n'est de déterminer leur position statutaire.

    23

    Dans ce contexte, la Commission relève que, parmi les dispositions invoquées par les requérants, ni l'article 24 de la réglementation de couverture, ni l'article 41 du règlement financier, ni l'article 4 de ses règles internes n'a une nature statutaire, déterminant soit la position administrative d'un fonctionnaire au sein de la fonction publique communautaire, soit d'éventuels droits ou prétentions y rattachés. Par ailleurs, l'invocation de l'article 4 des règles internes de la Commission serait dépourvue de pertinence, le budget du régime commun étant hors budget général, ainsi qu'il résulte expressément de l'article 25 de la réglementation de couverture.

    24

    Les requérants estiment, dans la réplique, que, compte tenu de son évidence, toute référence, dans leur requête, aux articles 5 et 7 du statut était superfétatoire. Par ailleurs, la Commission aurait elle-même mentionné, dans son mémoire en défense, l'article 5 du statut. Elle ne pourrait, dès lors, soutenir avoir eu des doutes quant au fondement juridique du recours. Enfin, les requérants soutiennent que c'est à juste titre que leur recours fait référence, pour établir l'irrégularité de leur situation administrative, aux dispositions susmentionnées de la réglementation de couverture, du règlement financier et des règles internes de la Commission.

    25

    La Commission s'oppose à l'affirmation selon laquelle toute référence à l'article 5 du statut et à son annexe I était superfétatoire. En tout état de cause, les développements faits à ce sujet par les requérants dans leur réplique seraient frappés d'irrecevabilité, puisque tardifs. Ils ne pourraient en aucun cas suppléer l'absence totale d'une argumentation basée sur des dispositions statutaires susceptibles de justifier une revalorisation des emplois concernés.

    Appréciation du Tribunal

    26

    Dans la mesure où la Commission fait grief aux requérants de n'avoir soulevé aucun moyen fondé sur une règle statutaire, il y a lieu de reconnaître que les requérants n'ont pas expressément indiqué, dans leur requête, quelle était la disposition statutaire précise régissant leur situation administrative qu'ils jugeaient violée en l'espèce et que les différentes réglementations qu'ils ont explicitement citées ne font pas partie du droit de la fonction publique des Communautés proprement dit. Toutefois, il est de jurisprudence constante que l'absence de référence explicite à la disposition réglementaire ou au principe de droit dont la violation fournit un moyen du recours n'est pas de nature à rendre irrecevable ledit moyen, à condition que l'argumentation développée ait permis à la partie adverse de défendre effectivement ses intérêts et au juge communautaire d'exercer son contrôle (voir les arrêts de la Cour du 15 décembre 1966, Serio/Commission, 62/65, Rec. p. 813, 824, et du 14 mai 1975, CNTA/Commission, 74/74, Rec. p. 533, point 4, ainsi que du Tribunal du 7 mai 1991, Jongen/Commission, T-18/90, Rec. p. II-187, point 13, et du 9 février 1994, Lacruz Bassols/Cour de justice, T-109/92, RecFP p. II-105, point 67).

    27

    Or, en l'espèce, il résulte clairement de la procédure précontentieuse et de la requête que les requérants demandent, en substance, une régularisation de leur situation administrative, en faisant valoir que les fonctions qu'ils remplissent actuellement devraient légalement être exercées par des fonctionnaires d'une catégorie supérieure, du fait qu'elles dépassent le niveau de fonctions d'exécution. Par conséquent, il est évident que les requérants invoquent implicitement une violation de l'article 5, paragraphe 1, quatrième alinéa, du statut, selon lequel les différents grades de la catégorie C correspondent à des fonctions d'exécution, ainsi que du principe, reconnu dans le droit de la fonction publique communautaire, de la correspondance entre le grade et l'emploi. Par ailleurs, il convient de rappeler que la Commission a elle-même mentionné cet article 5 du statut (p. 4 du mémoire en défense) et souligné que les prétentions des requérants visant à une revalorisation d'emploi constituent le noyau du présent litige (p. 3 de la duplique). Il s'ensuit que la Commission n'a pas été empêchée de défendre effectivement ses intérêts et que le Tribunal peut valablement exercer son contrôle. Par conséquent, le présent recours doit être considéré comme étant basé sur un moyen recevable.

    28

    Dans la mesure où la Commission soutient encore que les dispositions de la réglementation de couverture, du règlement financier et de ses propres règles internes, invoquées par les requérants, présentent un caractère purement interne et étranger à tout litige entre un fonctionnaire et son institution, il y a lieu de relever que le moyen unique du recours porte sur la question de savoir quel est objectivement le niveau des fonctions remplies par les requérants. Pour répondre à cette question, il convient de prendre en considération tous les facteurs permettant d'apprécier le niveau des fonctions en question, y compris les dispositions réglementaires et internes, les décisions générales et individuelles et même les simples pratiques administratives internes qui sont susceptibles de fournir des indications à cet égard. Ceci vaut surtout pour l'article 24 de la réglementation de couverture, qui, en ce qu'il renvoie au règlement financier, a pour objet et pour effet de rendre applicable mutatis mutandis les dispositions pertinentes dudit règlement. Par conséquent, l'argument avancé par la Commission selon lequel le budget du régime commun se trouve hors budget général est inopérant. Les arguments que la Commission entend tirer de la nature interne des dispositions invoquées par les requérants doivent, dès lors, être rejetés.

    29

    Il résulte de ce qui précède que le recours doit être déclaré recevable.

    Sur le fond

    Arguments des parties

    30

    Dans le cadre de leur moyen unique, les requérants soutiennent que c'est en violation des dispositions susmentionnées de la réglementation de couverture, du règlement financier et des règles internes de la Commission qu'ils sont chargés par l'AIPN d'exécuter des tâches réservées exclusivement à des fonctionnaires de la catégorie A ou B. Contrairement à la thèse défendue par la Commission et ainsi qu'il résulte clairement, selon eux, du rapport d'analyse établi par la société MCO, le travail des tarificateurs ne serait pas un travail purement préparatoire à la liquidation au sens de l'article 40 du règlement financier.

    31

    Les requérants procèdent ensuite à une description des tâches qui leur sont confiées, à savoir:

    a)

    la vérification du droit au remboursement: examen du fichier et identification des affiliés et ayants droit,

    b)

    la vérification de la conformité des pièces justificatives,

    par rapport au règlement financier (légalité des factures, etc.),

    par rapport aux dispositions pertinentes (articles 72 et 73 du statut, réglementation de couverture et règles d'interprétation),

    appréciation de l'opportunité de demander l'avis du médecin-conseil,

    c)

    la tarification de la demande,

    d)

    l'introduction des données à l'écran,

    e)

    l'établissement et le contrôle de la liste hebdomadaire des demandes introduites, 0 la gestion du dossier et les contacts avec les affiliés et les ayants droit.

    L'avis du médecin-conseil ne serait, exception faite des avis donnés préalablement, sollicité que dans l'hypothèse où les tarificateurs le demandent. Ces avis ne porteraient, d'ailleurs, que sur des questions d'ordre médical et en aucun cas sur la vérification du droit au remboursement et de la conformité des pièces justificatives produites. La majorité des demandes de remboursement seraient, dès lors, traitées exclusivement par les requérants et ne seraient contrôlées qu'une fois par semaine par un fonctionnaire relevant de la catégorie B qui travaille exclusivement par échantillonnage. Par conséquent, les requérants seraient les ordonnateurs — au sens de l'article 41 du règlement financier — de la majorité des demandes de remboursement de frais médicaux ou, à tout le moins, d'une partie de celles-ci.

    32

    Les requérants se réfèrent enfin au rapport de notation établi, pour la période 1989/1991, pour le requérant Cucchiara, dans lequel les fonctions des tarificateurs sont décrites de la manière suivante:

    «Examen, contrôle et tarification des demandes de remboursement des frais médicaux, en application des articles 72 et 73, titre V, du statut, ainsi que de la réglementation et des règles d'interprétation du RCAM (régime commun).

    L'engagement des dépenses, la constatation des créances et la liquidation des dépenses s'effectuent selon les dispositions du règlement financier.

    Utilisation de la nomenclature et de l'équipement informatique, malgré une formation limitée.

    Les tâches sont exécutées sans subdélégation.»

    Cette description des fonctions démontrerait que les supérieurs hiérarchiques des requerants ne contestent pas que l'engagement des dépenses, la constatation des créances et la liquidation des dépenses relèvent des responsabilités des requérants et s'effectuent, en outre, suivant les dispositions du règlement financier.

    33

    La Commission expose, tout d'abord, le déroulement des travaux de tarification au sein du régime commun, afin de mettre en lumière la véritable nature des tâches des requérants: dans le bureau liquidateur de Bruxelles, les tarificateurs seraient au nombre de 26, divisés en quatre équipes, le chef d'équipe étant un fonctionnaire de la catégorie B. Les tarificateurs recevraient, d'après une ventilation par groupe de numéros personnels, les demandes de remboursement de frais médicaux provenant des bénéficiaires du régime commun. A ces demandes seraient jointes les pièces justificatives et les preuves de paiement. Les tarificateurs devraient alors vérifier que la pièce justificative est conforme à la demande de remboursement et s'assurer, par exemple, que les prestations dont le remboursement est demandé sont étayées par des documents prouvant le paiement des frais exposés et que le montant remboursable est compris dans la fourchette fixée par la réglementation. A cette fin, les tarificateurs disposeraient d'un listing qui reprendrait le pourcentage du montant remboursable. La demande serait ensuite encodée et le travail du tarificateur s'arrêterait à ce stade.

    34

    La Commission ajoute que la grande majorité des documents de remboursement ne présentent aucune difficulté en matière de tarification. Les tâches incombant aux tarificateurs seraient des tâches d'exécution administrative très simples et seraient, dès lors, conformes à l'article 5 du statut, en ce sens que, en tant que fonctions d'exécution, elles seraient ajuste titre confiées à des fonctionnaires de catégorie C. Pour les demandes de remboursement plus compliquées ou dont le montant est important, il serait procédé de la manière suivante:

    a)

    les tarificateurs recevraient l'avis du médecin-conseil pour toute demande relative à une intervention chirurgicale et à une maladie grave dont les frais sont remboursés à 100 %;

    b)

    le dentiste-conseil devrait approuver au préalable le devis des soins dentaires à effectuer;

    c)

    en ce qui concerne la tarification des hospitalisations, il y aurait un secteur chargé des hospitalisations au-delà de trois jours pour lesquelles une prise en charge serait assurée sous la surveillance d'un fonctionnaire de catégorie B;

    d)

    toute demande de remboursement dépassant le montant de 20000 BFR ferait l'objet d'un contrôle systématique par un fonctionnaire de catégorie B au sein du secteur comptable.

    Au surplus, les chefs d'équipe auraient l'obligation d'assurer la répartition du travail sous la responsabilité du chef du bureau liquidateur, d'aider les tarificateurs en toute question de tarification qui se pose, de contrôler leur travail et, le cas échéant, de rectifier les données tarifiées.

    35

    La Commission souligne que les fonctions de pure vérification matérielle des pièces justificatives pour le remboursement de frais médicaux ne sauraient être assimilées à des tâches de liquidation ou d'ordonnancement au sens du règlement financier. En effet, l'ordonnateur dans le bureau liquidateur concerné ne serait autre que le chef de l'unité «assurance maladie et accidents», fonctionnaire de grade A 3, les requérants ne pouvant nullement prétendre que les fonctions qu'ils exercent puissent être assimilées aux fonctions dévolues à ce dernier. L'ordonnancement ferait l'objet d'un formulaire spécifique, dûment rempli et signé de la part de l'ordonnateur. A ce document seraient annexées les tarifications effectuées par les tarificateurs.

    36

    En ce qui concerne l'argument tiré du rapport de notation d'un des requérants, M. Cucchiaia, la Commission allègue que le «descriptif des fonctions» mentionné par les requérants n'est pas celui qui a été donné, à la page 1 du rapport de notation, par le notateur du fonctionnaire concerné, mais celui donné, à la page 8 dudit rapport, comme «remarques éventuelles» du fonctionnaire noté lui-même. Il ne saurait être confondu avec la description détaillée des tâches effectuée par le notateur.

    37

    A ce propos, les requérants répondent que la description des fonctions litigieuses a effectivement été insérée par M. Cucchiara lui-même. Ce ne serait qu'ensuite que le notateur a établi la notation pour la période de référence, sans contester la pertinence de cette description qui corrige et précise celle que le notateur avait lui-même indiquée. Or, le notateur aurait été tenu de contester toute indication inexacte insérée par le fonctionnaire noté dans son rapport de notation. La Commission serait, dès lors, malvenue de contester, pour la première fois, dans son mémoire en défense, la pertinence d'un rapport de notation établi plus d'un an auparavant.

    38

    Sur ce dernier point, la Commission souligne que la description des fonctions est faite par le supérieur hiérarchique avant que le fonctionnaire noté n'ait l'occasion de formuler ses observations. Il résulterait des dispositions générales d'exécution de l'article 43 du statut qui sont en vigueur au sein de la Commission (guide de la notation, annexe 4 à la duplique) que, une fois que le fonctionnaire noté a signé le rapport de notation, en y apposant le cas échéant ses observations, s'il n'interjette pas appel devant les instances compétentes, le caractère définitif de son rapport est acquis et ne saurait être mis en cause postérieurement. En conséquence, il n'y aurait pas lieu pour le supérieur hiérarchique de formuler des observations complémentaires.

    39

    A l'audience, les requérants se sont opposés à la description, faite par la Commission, du traitement des demandes de remboursement plus compliquées ou dont le montant est important, en précisant que,

    a)

    en matière d'intervention chirurgicale, les tarificateurs ne reçoivent l'avis du médecin-conseil que pour les interventions importantes ou graves;

    b)

    le dentiste-conseil doit approuver exclusivement les soins qui se rapportent aux prothèses dentaires et aux soins qui relèvent de l'orthodontie;

    c)

    en matière d'hospitalisation, dès l'acceptation de la prise en charge, le montant facturé par l'hôpital est imputé sur le compte du fonctionnaire, le travail de vérification de la facture et de l'imputation étant exclusivement effectué par le tarificateur, sans le moindre contrôle;

    d)

    un contrôle systématique des demandes de remboursement a exclusivement eu lieu lorsque le solde net à financer est supérieur à 20000 BFR, ce qui n'est le cas que pour des montants d'intervention extrêmement importants.

    Ceci démontre, de l'avis des requérants, que les tarificateurs de la catégorie C travaillent de manière autonome et, la plupart du temps, sans contrôle et que ce sont eux qui déterminent les droits au remboursement et qui sont, en définitive, les ordonnateurs de la dépense.

    40

    En réponse aux questions posées par le Tribunal, les requérants ont ajouté que les tarificateurs ne se limitent pas à exercer le contrôle purement matériel de la correspondance entre les demandes de remboursement et les pièces justificatives y annexées, mais qu'ils examinent également quels sont la nature de l'acte et le pourcentage du remboursement prévu. Ils devraient vérifier aussi si les soins ne relèvent pas d'un abus manifeste et s'il est opportun d'obtenir un avis d'un médecin-conseil. En outre, ils introduiraient dans l'ordinateur les ordres pour que le paiement intervienne, selon le système dit de la signature électronique. Il s'agirait là précisément des fonctions de l'ordonnateur qui doit vérifier personnellement tous les justificatifs des frais et donc des dépenses à intervenir; à ce titre, il devrait avoir physiquement en main les justificatifs des paiements qui sont demandés. On ne pourrait, dès lors, pas considérer que l'ordonnateur assume simplement la responsabilité générale d'un paiement collectif. Par conséquent, seuls les tarificateurs pourraient «être considérés comme ordonnateurs». Les requérants ont souligné, dans ce contexte, que le bureau liquidateur de Bruxelles est organisé de manière telle que les tarificateurs prennent toutes les décisions depuis la première jusqu'à celle du paiement final, tout en admettant qu'il y a, dans certains cas, des contrôles et que les tarificateurs, dans l'hypothèse où ils sont confrontés à un problème extrêmement délicat qu'ils ne peuvent pas résoudre seuls, ont la possibilité de s'adresser à quelqu'un d'autre pour obtenir une aide.

    41

    La Commission a répété, à l'audience, que les travaux de tarification ne sont autres que des travaux de vérification purement matérielle de la conformité des pièces justificatives, qui ne sauraient aucunement être assimilés aux opérations de liquidation ou d'ordonnancement au sens du règlement financier. La prétendue autonomie dont disposent les tarificateurs dans l'exercice de leurs fonctions ne serait pas synonyme de pouvoir décisionnel. Enfin, la Commission a confirmé que les tâches actuellement exécutées par les requérants correspondent à celles qui ont été voulues par l'AIPN lorsqu'elle les a affectés à leurs emplois actuels.

    Appréciation du Tribunal

    42

    Il importe de rappeler que le présent recours en annulation est dirigé contre les deux décisions par lesquelles la Commission a implicitement rejeté, d'une part, les demandes initiales des requérants et, d'autre part, leur réclamation commune subséquente. Le motif de ce rejet n'a été explicité que dans la lettre du 2 septembre 1992, qui indique que le travail de tarification exécuté par les requérants est un travail, normalement très simple, préparatoire à la liquidation au sens du règlement financier, qui relève, dès lors, de fonctions d'exécution de la catégorie C. Les requérants ayant contesté le bien-fondé de cette motivation, il y a lieu d'examiner s'ils ont établi qu'ils se trouvent dans une situation administrative irrégulière en ce que les fonctions qu'ils sont obligés de remplir sont en réalité, contrairement aux règles financières pertinentes en la matière, des fonctions relevant d'emplois de la catégorie B.

    43

    Quant à la portée de l'examen à effectuer, il convient de souligner que les requérants ont expressément déclaré que, dans le passé, les fonctions des tarificateurs du régime commun correspondaient effectivement à des emplois de la catégorie C, mais que l'évolution intervenue au cours des années les a transformées en fonctions de liquidation et d'ordonnancement au sens du règlement financier, qui relèvent d'emplois de la catégorie B. Le Tribunal estime que, dans les circonstances de l'espèce, ces allégations doivent être interprétées en ce sens que les requérants soutiennent que c'est au cours de la période qui a précédé l'introduction de leurs demandes que leur situation administrative est devenue irrégulière en raison de la transformation de leurs fonctions.

    44

    En ce qui concerne le cadre juridique dans lequel cet examen doit être effectué, le Tribunal, au vu des débats qui ont opposé les parties sur la question de savoir si les requérants assument les fonctions de liquidation et d'ordonnancement au sens du règlement financier, relève, tout d'abord, que, selon l'article 40 du règlement financier, «la liquidation d'une dépense» est l'acte par lequel l'ordonnateur vérifie l'existence des droits du créancier ainsi que le montant et les conditions d'exigibilité de la créance; l'article 41 du même règlement prévoit, dans ce contexte, que toute liquidation d'une dépense est subordonnée à la présentation de pièces justifiant le paiement (paragraphe 1) et que «l'ordonnateur habilité à liquider les dépenses procède personnellement à l'examen des pièces justificatives ou vérifie, sous sa responsabilité, que cet examen a été effectué» (paragraphe 2). Le Tribunal relève, ensuite, que «l'ordonnancement d'une dépense» constitue, selon les articles 43 et 44 du règlement financier, l'acte par lequel l'ordonnateur donne au comptable, par l'émission d'un ordre de paiement - qui mentionne, entre autres, l'exercice d'imputation, l'article du budget et toute autre subdivision nécessaire -, l'ordre de payer une dépense dont il a effectué la liquidation. Il y a lieu d'ajouter que les articles 73 et 76 du règlement financier disposent, sur la base de l'article 209, sous c), du traité CE, que tout ordonnateur engage sa responsabilité disciplinaire et pécuniaire dans l'exercice de ses fonctions.

    45

    A cet égard, il convient d'observer d'emblée que les requérants n'ont jamais prétendu que l'exercice régulier de leurs fonctions comporte l'émission d'ordres de paiement et donc des tâches d'ordonnancement au sens technique que leur donnent les articles 43 et 44 susmentionnés, ni qu'ils assument la responsabilité disciplinaire et pécuniaire qui caractérise l'emploi d'ordonnateur. Il s'ensuit que l'évaluation du niveau des fonctions exercées par les requérants doit être effectuée en tenant compte du fait que les tâches d'ordonnancement ne font pas partie de ces fonctions.

    46

    En ce qui concerne les tâches de liquidation, il y a lieu de constater que les requérants n'ont pas allégué qu'ils procèdent régulièrement, en application de l'article 40 du règlement financier, au contrôle de la réalité même des droits au remboursement.

    47

    En outre, l'article 41, paragraphe 2, du règlement financier prévoit expressément, au sujet de l'examen des pièces justificatives, que l'ordonnateur n'est pas tenu d'y procéder personnellement, mais peut vérifier, sous sa responsabilité, que cet examen a été effectué. En vertu de cette disposition, l'ordonnateur est donc habilité à faire exécuter ledit examen par d'autres fonctionnaires, qui se trouvent sous sa responsabilité financière et disciplinaire, à condition de procéder au moins à des vérifications par échantillonnage. Par voie de conséquence, une telle organisation du travail ne saurait avoir, à elle seule, pour effet de conférer à celui qui procède effectivement à l'examen en cause la qualité d'ordonnateur, et ceci indépendamment de l'autonomie éventuelle dont chaque tarificateur dispose en fait dans l'exercice de ces tâches. Ainsi, l'article 4 des règles internes de la Commission, selon lequel aucune subdélégation ne peut être consentie «en matière de liquidation», a été respecté. Il s'avère donc que les arguments tirés par les requérants de leur prétendu pouvoir de contrôle autonome et de décision manquent en droit.

    48

    Dans la mesure où les requérants, pour démontrer qu'ils exercent néanmoins des fonctions de liquidation et d'ordonnancement, s'appuient sur le rapport d'analyse établi par la société MCO, il y a lieu de constater, tout d'abord, que ce rapport constitue, selon les explications de la société MCO, son «analyse de la réalité sociale dans laquelle se meuvent les personnes que nous avons interviewées, individuellement ou en groupe» (p. 1 du rapport). Il s'agissait pour la société MCO d'analyser un malaise ressenti par les tarificateurs qui, s'ils «apprécient leur travail positivement» en ce qu'il ne leur pose «pas de gros problèmes» et qu'«ils sont bien payés», «relèvent également des aspects négatifs ...: sentiment de ne pas être reconnus comme fonctionnaires au même titre que les affiliés, ... leur qualification et leur efficacité ne sont pas valorisées» (p. 2 et 3). Le rapport souligne, à plusieurs endroits, l'augmentation de la charge de travail pour les tarificateurs qui serait essentiellement liée à leurs fonctions de contrôle indépendant et quasiment autonome (p. 4, 5, 6, 9, 11 et 12). Néanmoins, cette autonomie et la «très large marge discrétionnaire» (p. 11) seraient en même temps «une cause de malaise et de stress. On dit: on est parfois un peu angoissé par la quantité des dossiers» (p. 4). Le rapport n'en relève pas moins que «les chefs peuvent sur demande ou a posteriori intervenir en tant qu'autorité de décision finale» (p. 9), cette dernière constatation étant apparemment en contradiction avec le résumé selon lequel les mêmes chefs ne seraient «chefs d'équipe que pro forma ou très accessoirement» et n'auraient «pas de prise sur le travail de tarification qu'ils ne connaissent d'ailleurs pas» (p. 13). Enfin, le rapport constate une «problématique organisationnelle» en ce que le travail de tarification serait conçu comme un travail individuel et indépendant de tout support organisationnel, pour en conclure, en vue d'actions éventuelles à entreprendre, que «ce cloisonnement» ne permet, en principe, «aucune régulation de charge» entre les tarificateurs, «les retards (étant) donc inscrits dans le principe même de l'organisation du travail... Il n'y a donc pas réellement d'esprit d'équipe ..., il y a plutôt une compétition (larvée) entre les tarificateurs, centrée sur leur capacité ‘quantitative’» (p. 12 et 13).

    49

    Il ressort du contenu du rapport établi par la société MCO que ce dernier se présente essentiellement comme une analyse sociopsychologique de la situation, telle qu'elle est ressentie par les tarificateurs du régime commun. Il ne contient pas de constatations factuelles permettant de conclure que, en dépassant le cadre juridique tracé par le règlement financier, les fonctions exercées par les tarificateurs auraient acquis le caractère de fonctions de liquidation et d'ordonnancement. Les allusions faites dans le rapport à la situation statutaire des tarificateurs sont soit dénuées de pertinence, soit trop vagues pour pouvoir être prises en considération aux fins de porter une appréciation juridique sur la nécessité d'une réévaluation des emplois occupés.

    50

    La société MCO a souligné, par exemple, que le contenu de la fonction «est perçu» comme différent de toute autre fonction de «niveau ‘C’» (p. 4 du rapport). Cette affirmation n'est cependant que la reproduction du point de vue des requérants. En outre, la société MCO expose que les qualifications requises pour les «fonctions ‘C’» sont «précision, discrétion et attention, c'est-à-dire rigueur», mais qu'on «leur demande en fait de ‘savoir faire la part des choses’» (p. 8). Une telle constatation n'établit nullement que les fonctions en question relèvent d'emplois de la catégorie B. De même, la phrase ambiguë du rapport, selon laquelle les tarificateurs eux-mêmes apprécient et jugent de l'opportunité de «payer» ou de «refouler» (p. 9), n'établit pas que leurs fonctions aillent au-delà d'une vérification matérielle des pièces justificatives, le rapport se poursuivant en notant «que les chefs peuvent ... intervenir en tant qu'autorité de décision finale». Ceci est également vrai pour la phrase selon laquelle leur mode de travail autonome et «quasiment» sans contrôle donne aux tarificateurs un très grand pouvoir (p. 11). Enfin, et à supposer même que les fonctionnaires de catégorie B ne soient des chefs d'équipe que «pro forma ou très accessoirement», les conséquences juridiques à en tirer quant à la qualification des fonctions des requérants restent à établir.

    51

    Il s'ensuit que le rapport d'analyse de la société MCO, que les requérants ont invoqué, ne saurait être considéré comme ayant une valeur probante en ce sens qu'il établirait que ce sont les tarificateurs eux-mêmes qui exercent des fonctions de liquidation et d'ordonnancement au sens du règlement financier. Il est donc sans pertinence que la Commission ait accepté ledit rapport, ainsi que les propositions qui y sont formulées, sans jamais en contester le contenu.

    52

    Dans la mesure où les requérants, afin de démontrer qu'ils exercent effectivement des fonctions de liquidation et d'ordonnancement, renvoient encore à l'indication figurant dans le rapport de notation de M. Cucchiara pour la période 1989/1991, selon laquelle «l'engagement des dépenses, la constatation des créances et la liquidation des dépenses s'effectuent selon les dispositions du règlement financier», il suffit de relever qu'il est constant entre les parties que ces remarques ont été insérées par M. Cucchiara lui-même et qu'elles contrastent manifestement avec la description des tâches effectuée dans le même rapport de notation par le notateur. Or, contrairement à la thèse défendue par les requérants, il ne saurait être admis que les indications reflétant l'appréciation subjective portée par M. Cucchiara, en qualité de noté, sur les tâches qui lui incombaient aient acquis un caractère objectif, faute d'avoir été contredites par les instances compétentes de la Commission. En effet, selon l'article 6 des dispositions générales d'exécution de l'article 43 du statut arrêtées par la Commission, il appartenait au contraire à M. Cucchiara, en cas de désaccord avec les remarques du notateur, de demander que le rapport de notation soit soumis au notateur d'appel; par ailleurs, il avait la faculté, dont il a fait usage, d'y joindre des observations. Dans ces circonstances, les remarques insérées par M. Cucchiara dans le rapport de notation, à la rubrique «à remplir par le fonctionnaire noté», n'ont pas perdu leur caractère purement subjectif. Dès lors, la valeur probante que les requérants voudraient voir attribuer au rapport de notation en cause ne saurait lui être reconnue.

    53

    Quant à la «description détaillée des tâches effectuées au cours de la période de référence», établie par le notateur à la page 1 du rapport de notation — selon laquelle M. Cucchiara procède aux «examen, contrôle et tarification des demandes de remboursement des frais médicaux» ainsi qu'à l'«utilisation du système informatique y relatif» — il convient d'observer que cette description, qui ne fait état ni de liquidation ni d'ordonnancement, ne saurait non plus constituer une preuve à l'appui de la thèse défendue par les requérants.

    54

    Le Tribunal constate que les requérants n'ont pas fait d'autres offres de preuve à l'appui de leur argumentation relative à la nature et au niveau des fonctions qu'ils sont appelés à exercer, bien qu'il s'agisse là d'éléments qui se situent dans leur sphère. Compte tenu de ce que les ordonnateurs ne sont pas obligés de procéder personnellement à l'examen des pièces en question (voir point 44, ci-dessus), il n'y a pas lieu, dans ces circonstances, d'ouvrir d'office une instruction sur la situation administrative des requérants. Ces derniers n'ayant pas établi qu'ils se trouvent dans une situation administrative irrégulière, leur moyen unique doit donc être rejeté comme non fondé.

    55

    Il résulte de ce qui précède que les décisions par lesquelles la Commission a rejeté les demandes et la réclamation introduites par les requérants sont bien fondées et que la Commission n'était nullement tenue de donner aux requérants la confirmation écrite de ce qu'ils devaient accomplir des tâches pour lesquelles aucune subdélégation ne pouvait leur être légalement donnée, ni d'adopter les mesures nécessaires à la régularisation de leur situation administrative ni d'organiser un concours interne de passage de la catégorie C à la catégorie B.

    56

    Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans son ensemble.

    Sur les dépens

    57

    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Il y a donc lieu de condamner chacune des parties à supporter ses propres dépens.

     

    Par ces motifs,

    LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

    déclare et arrête:

     

    1)

    Le recours est rejeté.

     

    2)

    Chacune des parties supportera ses propres dépens.

     

    Briët

    Saggio

    Kirschner

    Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 28 avril 1994.

    Le greffier

    H. Jung

    Le président

    C. P. Briët


    ( *1 ) Lingue de procedure: le français.

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