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Document 61994TJ0006
Judgment of the Court of First Instance (Second Chamber) of 24 April 1996. # Mrs A v European Parliament. # Officials - Unauthorized absence - Remuneration - Article 60 of the Staff Regulations - Inadmissibility. # Case T-6/94.
Urteil des Gerichts erster Instanz (Zweite Kammer) vom 24. April 1996.
Frau A. gegen Europäisches Parlament.
Beamte - Unbefugtes Fernbleiben vom Dienst - Dienstbezüge - Artikel 60 des Statuts - Unzulässigkeit.
Rechtssache T-6/94.
Urteil des Gerichts erster Instanz (Zweite Kammer) vom 24. April 1996.
Frau A. gegen Europäisches Parlament.
Beamte - Unbefugtes Fernbleiben vom Dienst - Dienstbezüge - Artikel 60 des Statuts - Unzulässigkeit.
Rechtssache T-6/94.
Sammlung der Rechtsprechung – Öffentlicher Dienst 1996 I-A-00191; II-00555
ECLI identifier: ECLI:EU:T:1996:55
Arrêt du Tribunal de première instance (deuxième chambre) du 24 avril 1996. - Mme A. contre Parlement européen. - Fonctionnaires - Absence irrégulière - Rémunération - Article 60 du statut - Irrecevabilité. - Affaire T-6/94.
Recueil de jurisprudence - fonction publique 1996 page IA-00191
page II-00555
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif
++++
Dans l'affaire T-6/94,
A, ancienne fonctionnaire du Parlement européen, demeurant à Luxembourg, représentée par Me Catherine Thill-Kamitaki, avocat au barreau de Luxembourg, ayant élu domicile à Luxembourg en son étude, 15, avenue du Bois,
partie requérante,
contre
Parlement européen, représenté par M. Ezio Perillo, membre du service juridique, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg au secrétariat général du Parlement européen, Kirchberg,
partie défenderesse,
ayant pour objet la condamnation du Parlement européen, sur la base de l'article 88, quatrième alinéa, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, à verser à la requérante le montant, assorti d'intérêts légaux depuis la date de leur échéance jusqu'à leur solde, en premier lieu, des traitements que le Parlement européen ne lui a pas versés pour les mois de décembre 1990, février, mars, mai, juin et la moitié du mois de juillet 1991, en second lieu, des traitements qu'il ne lui a pas versés pendant la période du 1er août 1991 au 31 décembre 1992, déduction faite des indemnités partielles qu'elle a perçues pour cette dernière période, et, en troisième lieu, de l'indemnité à laquelle elle estime avoir droit pour congé non pris en 1992,
LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
(deuxième chambre),
composé de MM. H. Kirschner, président, C. W. Bellamy et A. Kalogeropoulos, juges,
greffier: Mme B. Pastor, administrateur principal,
vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 30 novembre 1995,
rend le présent
Arrêt
Les faits et la procédure à l'origine du litige
1 La requérante était fonctionnaire de grade C 3, affectée à la division de traduction grecque du Parlement européen. A partir de 1988, elle est souvent tombée malade et a effectué, les années suivantes, plusieurs séjours en Grèce. Par le présent recours, elle demande, en substance, le paiement des parties de sa rémunération qui ne lui ont pas été versées. Le recours ne porte que sur la période allant de décembre 1990 à décembre 1992.
La période allant jusqu'à la réclamation du 23 octobre 1991
2 La requérante, ayant été absente de son service pendant plusieurs mois en 1990 pour cause de maladie, a été convoquée à Luxembourg le 4 septembre 1990 en vue d'être examinée par le médecin-conseil du Parlement. Elle a prévenu le cabinet médical par télégramme qu'elle ne pouvait pas se déplacer de Grèce au Luxembourg. Par lettre du 24 septembre 1990 du directeur général de la direction du personnel, du budget et des finances, elle a été avertie que son comportement plaçait l'institution dans l'impossibilité de procéder aux contrôles médicaux prévus par le statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «statut») afin de justifier ses absences et que, en conséquence, son absence était déclarée irrégulière et serait imputée sur ses droits à congé puis sur sa rémunération. Le directeur ajoutait que, si elle ne se rendait pas à la prochaine convocation du médecin-conseil, le versement de son traitement serait interrompu et une sanction disciplinaire envisagée.
3 La requérante n'a pas déféré à une nouvelle convocation du 9 octobre 1990, faisant savoir par télécopie qu'elle ne pouvait toujours pas se rendre à Luxembourg. Le médecin-conseil n'a trouvé dans son dossier médical aucun élément nouveau qui aurait contre-indiqué son déplacement. Par lettre du 30 octobre 1990, la requérante a été informée que le versement de sa rémunération serait suspendu à partir de novembre 1990.
4 La requérante a protesté contre cette mesure par lettre du 5 novembre 1990. Le 19 décembre 1990, elle est venue à Luxembourg où elle a été examinée par le médecin-conseil. Celui-ci a conclu qu'elle pourrait reprendre le travail début janvier 1991.
5 La requérante n'a pas repris le travail début janvier 1991. Par lettre du 3 janvier 1991, elle a demandé à prendre tout son congé annuel, demande qui a été refusée par ses supérieurs hiérarchiques. Le 16 janvier 1991, la requérante a envoyé deux nouveaux certificats médicaux. Le médecin-conseil du Parlement les a refusés. Il a également confirmé que les absences de la requérante devaient être considérées comme injustifiées à partir du 1er septembre 1990, étant donné qu'il n'avait pas reçu de réponse du médecin traitant de la requérante auquel il avait demandé un rapport circonstancié motivant ses absences.
6 La requérante a repris son travail le 6 mars 1991 et le versement de sa rémunération a été rétabli à compter de cette date. Son médecin traitant en Grèce a envoyé un rapport complet concernant son absence du 17 novembre au 6 décembre 1990. Par la suite, son absence du 1er septembre 1990 au 5 mars 1991 a continué à être considérée comme irrégulière sauf pour la période du 17 novembre au 6 décembre 1990. La requérante en a été informée par lettre du 29 avril 1991.
7 La requérante, qui avait demandé à prendre une partie de son congé annuel du 2 au 30 avril 1991, est partie en Grèce sans attendre l'autorisation de ses supérieurs. Bien que ses supérieurs aient refusé le congé demandé, la requérante est restée en Grèce et n'a pas réagi aux appels téléphoniques lui demandant de regagner Luxembourg. Par télégramme du 30 mai 1991, elle a été informée que le versement de sa rémunération serait suspendu à partir de la date de son départ, soit le 2 avril 1991.
8 Le 3 juin 1991, la requérante a demandé un congé de convenance personnelle (ci-après «CCP») de quatre mois, couvrant la période du 1er mai au 31 août 1991. Par télégramme du 4 juillet 1991, elle a été informée que sa demande avait fait l'objet d'un avis défavorable de la part de ses supérieurs qui étaient, en revanche, favorables à un congé de sept mois permettant de disposer de son poste. Par lettre du 24 juillet 1991, la requérante a maintenu sa demande de CCP de quatre mois en décalant les dates d'un mois. Par télégramme du 28 août 1991, elle a été informée qu'elle restait en absence irrégulière, privée de sa rémunération et que, si elle n'avait pas repris le travail le 3 septembre 1991, une procédure disciplinaire serait engagée. La requérante a repris le travail le 7 octobre 1991.
9 Par lettre de son avocat du 23 octobre 1991, la requérante a introduit une réclamation contre les lettres du 24 septembre 1990, du 30 octobre 1990, du 29 avril 1991, du 4 juillet 1991 et du 28 août 1991 et a demandé une prise de position de la part de l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après «AIPN»). Elle faisait valoir que les certificats médicaux qu'elle avait produits devaient être considérés comme valables et réclamait donc le montant correspondant à son traitement pour les mois de décembre 1990, février et mars 1991. Elle insistait pour qu'un certificat du docteur Kostanis du 3 mai 1991 soit reconnu et réclamait le versement de son traitement pour le mois de mai 1991. Elle demandait également que son absence de juin à la mi-juillet de 1991 soit considérée comme un congé annuel au titre de l'année 1991 et lui soit payée. En outre, elle sollicitait le versement d'un montant correspondant aux frais de trois voyages. Enfin, elle soulignait que le Parlement avait refusé tardivement (par le télégramme du 28 août 1991) sa demande (du 4 juillet 1991) d'un CCP de quatre mois. Ce retard et l'invitation, dans le même télégramme, à reprendre le travail le 3 septembre 1991 l'auraient mise devant un «ultimatum».
10 Le 9 décembre 1991, le directeur général du personnel a répondu que la lettre du 23 octobre 1991 constituait une réclamation au sens de l'article 90 du statut et que, en tant que telle, elle relevait d'une réponse de l'AIPN, après instruction de l'affaire par le service juridique. La requérante n'a pas contesté cette analyse. La réclamation du 23 octobre 1991 a été rejetée par lettre du 10 février 1992 du secrétaire général. Relevant que la réclamation était dirigée contre diverses réponses négatives de la part de l'administration datant des 24 septembre 1990 (constat d'absence irrégulière), 30 octobre 1990 (suspension de la rémunération), 29 avril 1991 (confirmation de la suspension de la rémunération) et 4 juillet 1991 (refus d'accorder un CCP), il faisait valoir qu'elle avait été introduite tardivement. Quant à la décision du 28 août 1991, il considérait qu'elle n'était qu'une confirmation de la décision du 4 juillet. Il ajoutait que, en tout état de cause, la demande de CCP n'était pas non plus fondée. Il refusait également de lui verser le montant demandé à titre de frais de trois voyages. Enfin, il informait la requérante qu'il avait ordonné à son sujet l'audition préalable prévue par l'article 87 du statut.
11 Après le rejet de la réclamation, aucun recours n'a été introduit pendant l'année 1992.
La période entre la réclamation du 23 octobre 1991 et la fin de l'année 1992
12 La requérante a repris son travail le 7 octobre 1991. Selon les bulletins de rémunération présentés par le défendeur, elle a perçu sa rémunération pour les mois d'octobre, novembre et décembre 1991 et pour les mois de janvier, février et mars 1992.
13 Le 5 décembre 1991, le directeur général du personnel a demandé au secrétaire général d'ouvrir une procédure disciplinaire à l'encontre de la requérante.
14 La requérante, en congé de maladie en Grèce, a présenté un certificat médical couvrant la période du 6 janvier au 29 février 1992. Par télégramme du 24 février 1992, le directeur du personnel a informé la requérante - qui ne s'était pas présentée le 31 janvier 1992 à Luxembourg à une convocation du médecin-conseil destinée à contrôler son état de santé - que son absence serait considérée comme irrégulière à partir de 1er février 1992 et serait imputée sur son congé annuel.
15 La requérante n'a pas non plus déféré aux convocations à une audition préalable, en vue d'une procédure disciplinaire, pour le 22 janvier 1992 et, à nouveau, pour le 10 mars 1992, répondant par des télégrammes qu'elle ne pouvait pas se présenter pour des raisons de santé, celles-ci n'étant ni précisées ni certifiées.
16 Le 24 mars 1992, le directeur du personnel a informé par télégramme la requérante que le médecin-conseil du Parlement n'acceptait pas un nouveau certificat du 2 mars 1992, indiquant qu'elle n'était pas en mesure de se déplacer du 20 janvier au 10 février 1992 et attestant que son absence se prolongerait jusqu'au 31 mars 1992. Il indiquait également que, puisqu'elle ne s'était pas non plus présentée à une nouvelle convocation du 18 mars 1992, son absence devait être considérée comme irrégulière à partir du 19 mars 1992. Le télégramme se termine par la phrase suivante: «Je vous demande de reprendre votre travail sans délai, faute de quoi le versement de votre rémunération sera suspendu à partir d'avril.» Le versement du traitement de la requérante a été suspendu à partir du 1er avril 1992, aucun bulletin de rémunération pour les mois d'avril et de mai ne figurant dans le dossier.
17 Sur proposition du secrétaire général, communiquée à la requérante par lettre du 18 mai 1992, une procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle au titre de l'article 51, paragraphe 2, du statut, a été ouverte à son encontre.
18 La requérante a repris ses fonctions à compter du 10 juin 1992 (voir sa lettre du 18 juin 1992). A partir du 14 juin 1992, la requérante a de nouveau perçu sa rémunération, quatre jours de congé annuel ayant été récupérés pour avril et mai 1992.
19 La requérante a reçu les frais de voyage annuel avec son traitement d'août 1992.
20 Pendant les mois de septembre à décembre 1992, la requérante a, en règle, perçu sa rémunération.
21 Un certificat médical pour la période du 15 septembre au 9 octobre 1992 a été accepté par le médecin-conseil (voir lettre du 28 octobre 1992). La requérante ayant repris son travail le 13 octobre, le 12 octobre n'a pas été rémunéré.
22 La requérante a été absente du 2 au 3 décembre 1992 inclus, sans avoir présenté de certificat médical. Ces deux jours n'ont pas été rémunérés.
23 Le 9 décembre 1992, le conseil de discipline a émis son avis, conformément à la procédure prévue par l'article 51 et par l'annexe IX du statut. Selon cet avis, l'article 51 ne devrait pas être d'application, tous les griefs formulés à l'encontre du fonctionnaire concerné ne relevant pas, de par leur degré de gravité, d'un comportement antistatutaire permanent et caractérisé. L'avis invitait l'AIPN à examiner l'opportunité d'avoir recours aux autres procédures disciplinaires ou de mise à la retraite prévues par le statut.
24 Le 27 novembre 1992, la requérante a introduit une demande de congé annuel pour la période du 15 au 23 décembre 1992 qui a été refusée par son supérieur hiérarchique le 1er décembre 1992. Le 2 décembre 1992, une lettre de la requérante, datée du 30 novembre 1992, a été enregistrée au secrétariat général du défendeur, dans laquelle elle modifiait sa demande en proposant un report sur le congé annuel de l'année suivante ou un congé non payé. Le 8 décembre 1992, la division du personnel a rappelé à la requérante qu'elle devait être présente à son poste de travail durant les journées en question. Le 16 décembre 1992, le directeur général de l'administration a répondu à la lettre de la requérante au secrétariat général en confirmant le rejet de la demande d'un congé.
Procédure et conclusions des parties
25 Le 7 septembre 1993, l'avocat de la requérante a envoyé une lettre au secrétaire général qui a été enregistrée au service courrier du défendeur le 10 septembre 1993. Dans cette lettre, elle faisait valoir qu'elle n'était plus soumise au régime de la procédure disciplinaire et que tous les griefs formulés à son encontre avaient été écartés. La requérante en concluait que les retenues effectuées sur sa rémunération dans le passé devaient lui être versées. Elle demandait le versement, en premier lieu, des traitements afférents aux mois de décembre 1990, février, mars, mai, juin et à la moitié du mois de juillet 1991, ainsi qu'à la période du 1er août 1991 au 31 décembre 1992, déduction faite des indemnités partielles versées pour cette dernière période, en deuxième lieu de l'indemnité pour congé non pris en 1992 et, en troisième lieu, des frais de voyage auxquels, suivant le statut, le fonctionnaire a droit, déduction faite du pourcentage qui avait déjà été payé.
26 Le 12 janvier 1994, la requérante a introduit une réclamation en faisant valoir que le délai de quatre mois pour prendre une décision relative à sa demande du 7 septembre 1993 avait expiré.
27 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 12 janvier 1994, la requérante, se fondant sur l'article 88, quatrième alinéa, du statut, a introduit un recours visant à obtenir la condamnation du Parlement à lui rembourser les traitements afférents aux mois de décembre 1990, février, mars, mai, juin et à la moitié du mois de juillet 1991, ainsi qu'à la période du 1er août 1991 au 31 décembre 1992, déduction faite des indemnités partielles versées pour cette dernière période, et l'indemnité pour congé non pris en 1992.
28 Par acte séparé, déposé au greffe le 12 janvier 1994, la requérante a introduit, en vertu de l'article 104 du règlement de procédure, une demande visant à obtenir la condamnation du Parlement à lui verser une provision de 1 000 000 BFR sur le montant dont le remboursement était demandé dans le cadre du recours au principal. La demande en référé a été rejetée par ordonnance du président du Tribunal du 8 février 1994 (non publiée au Recueil).
29 Le 13 janvier 1994, le secrétaire général a répondu à la requérante que ses demandes de remboursement ne pouvaient être prises en considération. Il a fait valoir que la requérante n'avait, au moins jusqu'alors, fait l'objet d'aucune procédure disciplinaire au titre de l'article 86 du statut. En revanche, elle faisait l'objet d'une procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle au titre de l'article 51 du statut, alors en suspens. Il précisait également que la commission d'invalidité n'avait pas été saisie d'une procédure de mise à la retraite, en vertu de l'article 53, mais qu'elle avait été chargée d'établir quel était l'état de santé de la requérante à l'époque des faits faisant l'objet de la procédure ouverte au titre de l'article 51, ainsi que son état de santé actuel.
30 Le 18 mai 1994, le secrétaire général du Parlement a «confirmé» sa lettre du 13 janvier 1994. De même, il a informé la requérante de sa décision de reprendre la procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle, ouverte à son encontre en vertu de l'article 51 du statut.
31 La procédure au principal, suspendue jusqu'à ce qu'intervienne la décision sur la réclamation, a repris le 31 mai 1994. Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 5 juillet 1994, le défendeur a demandé au Tribunal de statuer sur l'irrecevabilité conformément à l'article 114 du règlement de procédure. Il a fait valoir que la requérante n'avait pas établi l'existence d'un acte lui faisant grief et, subsidiairement, qu'elle n'avait pas attaqué l'acte faisant grief dans les délais statutaires. Cette exception a été jointe au fond par ordonnance de la première chambre du Tribunal du 29 novembre 1994. Entre-temps, le Parlement avait complété le dossier suite à une mesure d'organisation de la procédure.
32 La procédure écrite a ensuite suivi un cours régulier et s'est terminée le 19 juillet 1995. Par décision du Tribunal du 19 septembre 1995, le juge rapporteur a été affecté à la deuxième chambre à laquelle l'affaire a, par conséquent, été attribuée. Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (deuxième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal à l'audience du 30 novembre 1995. Pendant l'audience, le Parlement a fait état de sa décision du 18 octobre 1995, constatant l'invalidité de la requérante, conformément aux conditions énoncées par l'article 78, troisième alinéa, du statut, avec effet à partir du 1er novembre 1995, et lui accordant une pension d'invalidité.
33 La partie requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
- recevoir le présent recours en la forme;
- au fond le déclarer justifié;
- condamner le Parlement à rembourser à la requérante:
1) le traitement de décembre 1990 avec les intérêts légaux depuis la date de son échéance jusqu'à solde;
2) le traitement de février 1991 avec les intérêts légaux depuis la date de son échéance jusqu'à solde;
3) le traitement de mars 1991 avec les intérêts légaux depuis la date de son échéance jusqu'à solde;
4) le traitement de mai 1991 avec les intérêts légaux depuis la date de son échéance jusqu'à solde;
5) le traitement de juin 1991 avec les intérêts légaux depuis la date de son échéance jusqu'à solde;
6) la moitié du traitement de juillet 1991 avec les intérêts légaux depuis la date de son échéance jusqu'à solde;
7) les traitements correspondant à la période du 1er août 1991 au 31 décembre 1992, déduction faite des indemnités partielles perçues par la requérante pour cette dernière période avec les intérêts légaux depuis la date de son échéance jusqu'à solde;
8) l'indemnité de congé non pris 1992;
- réserver à la requérante le droit d'augmenter sa demande en cours d'instance et suivant qu'il appartiendra;
- condamner le Parlement à tous les frais et dépens de l'instance.
Dans sa réplique, la requérante conclut en outre à ce qu'il plaise au Tribunal:
- condamner le défendeur conformément au dispositif du recours T-6/94 et nommer un expert ayant pour mission de décrire dans un rapport écrit, motivé et contradictoire les périodes pour lesquelles les traitements n'ont pas été régulièrement versés, les montants correspondant à ces périodes et, éventuellement, les intérêts de retard dus sur ces montants.
34 La partie défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
- faire application de l'article 113 de son règlement de procédure;
- déclarer le recours irrecevable;
- rejeter le recours comme non fondé;
- statuer comme de droit sur les dépens.
Sur la recevabilité
Moyens et principaux arguments des parties
35 Le défendeur fait valoir trois moyens qui tendent à établir l'irrecevabilité du recours. Celui-ci serait manifestement irrecevable:
- pour autant qu'il a été introduit sur la base de l'article 88, quatrième alinéa, du statut;
- pour autant qu'il a été introduit sur la base de l'article 60 du statut;
- pour autant qu'il vise à l'annulation de la décision de rejet opposée à la demande présentée par la requérante le 7 septembre 1993.
36 A l'appui du premier moyen, le Parlement, se référant au contenu de la requête, relève que la requérante justifie ses demandes par une application mutatis mutandis de l'article 88, quatrième alinéa, du statut. Or, il souligne que la requérante n'a jamais été suspendue au titre de l'article 88 du statut, pas plus que ne l'a été sa rémunération qui, au contraire, aurait été retenue exclusivement sur la base de l'article 60 du statut. Une application mutatis mutandis de l'article 88 serait donc exclue, car la décision de mettre fin au versement du traitement «ne constitue ni une sanction disciplinaire ... ni une mesure équivalente» (voir arrêt de la Cour du 6 juillet 1983, Geist/Commission, 285/81, Rec. p. 2217, points 20 et 21). L'article 88, quatrième alinéa, étant ainsi inapplicable aux absences irrégulières d'un fonctionnaire, le recours ne pourrait qu'être manifestement irrecevable, l'acte faisant grief - le non-remboursement des retenues opérées sur la rémunération de la requérante - étant en l'espèce inexistant, de facto et de jure.
37 Dans le cadre du deuxième moyen, le Parlement fait valoir que, si l'on veut interpréter le recours comme visant les décisions prises sur la base de l'article 60 du statut, il ne fait aucun doute que, n'ayant jamais fait l'objet d'une réclamation, ces décisions sont devenues entre-temps définitives. Aucun fait nouveau ne serait indiqué dont la survenance aurait été susceptible de rouvrir ces délais.
38 Dans son troisième moyen, le Parlement soutient notamment que le rejet de la demande du 7 septembre 1993 ne constitue pas un acte faisant grief. Il confirmerait les décisions prises plusieurs mois auparavant et ne pourrait donc pas rouvrir les délais de recours contre des actes devenus définitifs. En outre, une demande au titre de l'article 90 du statut ne pourrait être introduite que par un fonctionnaire ou un agent des Communautés.
39 La requérante, en revanche, se référant à sa réclamation du 23 octobre 1991, à sa demande du 7 septembre 1993 et à sa réclamation du 12 janvier 1994, estime que son recours est recevable. Elle réaffirme que les dispositions de l'article 88, quatrième alinéa, du statut, sont applicables mutatis mutandis au cas d'espèce. La preuve que l'administration procéderait implicitement à une application par analogie en serait qu'un certain nombre de retenues faites initialement sur la rémunération de la requérante pour cause d'absences irrégulières lui ont été remboursées ex post, après que l'administration eut reconsidéré sa position.
40 La requérante fait valoir, en ce qui concerne le deuxième moyen du Parlement, qu'elle a introduit, le 23 octobre 1991, une réclamation visant à obtenir le remboursement des rémunérations retenues pour les mois de décembre 1990, février, mars et mai 1991 ainsi que de la rémunération correspondant à son congé annuel au titre de l'année 1991. Elle rappelle que, le 9 décembre 1991, son supérieur hiérarchique a écrit à son avocat en qualifiant la lettre du 23 octobre 1991 de réclamation au sens de l'article 90 du statut. Elle estime que c'est à juste titre qu'elle a considéré que la décision de renvoi devant le conseil de discipline suspendait la décision sur cette réclamation. Enfin, elle rappelle encore que, par lettre du 10 février 1992, le secrétaire général du Parlement a rejeté cette réclamation.
41 Quant au troisième moyen, la requérante réitère que la décision implicite (et explicite) de rejet opposée à sa lettre du 7 septembre 1993 est manifestement de nature à lui faire grief, car elle l'atteint dans ses intérêts, qu'ils soient de nature morale, matérielle ou juridique. Elle souligne que ce rejet de sa demande en remboursement des rémunérations retenues sur la base de l'article 60 du statut est intervenu alors que, implicitement mais certainement, cette base a été rejetée par le conseil de discipline qui avait à se prononcer sur cette question. Elle en conclut donc que son recours est recevable.
42 A l'audience, la requérante a expliqué que «l'avis du conseil de discipline ne pouvait avoir un autre sentiment qu'un impact certain et décisif sur la décision de la requérante de poursuivre devant une juridiction de jugement sa demande en payement de rémunération. Donc, l'ouverture de la procédure disciplinaire a, à notre avis, valablement suspendu le délai de recours et ceci pour les périodes couvertes par la réclamation du 23 octobre 1991».
43 Aux questions du Tribunal relatives à la suspension des délais, l'avocat de la requérante a répondu que «c'était justement dans l'équité et dans la logique des choses que j'ai soutenu qu'il y a eu suspension de ces délais». L'avocat a ajouté que «dans le sens strict du terme, il n'y aurait pas cas fortuit ou force majeure. Néanmoins, la requérante ... m'avait donné mandat ou ordre, si vous voulez, de ne rien faire avant qu'il y ait une décision, parce qu'elle a toujours considéré qu'une décision serait décisive, dans le sens donc oui ou non d'une absence irrégulière, pour son comportement par la suite envers son employeur. Dans ce sens, on pourrait admettre que, pour elle, c'était un cas fortuit».
44 A la question de savoir s'il entendait invoquer une erreur excusable de la requérante, l'avocat a répondu que «oui, parce que, dans son état d'esprit, elle ne pouvait pas agir contre son employeur, contre l'administration, avant qu'elle soit sûre que ce qu'elle soutenait - qu'elle était malade, que ses absences devaient être justifiées - ne soit prouvé par un avis du conseil de discipline par la suite, par la décision de l'AIPN».
Appréciation du Tribunal
La période antérieure à la réclamation du 23 octobre 1991
45 La requérante avait demandé, par la voie d'une réclamation en date du 23 octobre 1991 adressée au secrétaire général du Parlement, de lui verser les traitements afférents aux mois de décembre 1990, février, mars, mai, juin et à la moitié du mois de juillet 1991 ainsi que les frais de trois voyages auxquels elle estimait avoir droit selon les dispositions du statut.
46 Le 10 février 1992, la réclamation a été rejetée par le secrétaire général sans que la requérante ait introduit, pendant l'année 1992, un recours contre cet acte faisant grief. Sans qu'il soit nécessaire d'approfondir les questions de savoir, d'une part, s'il s'agissait d'une demande ou d'une réclamation au sens de l'article 90 du statut et, d'autre part, si des réclamations spécifiques contre les bulletins de rémunération de la période en question auraient été nécessaires, il y a lieu de constater que la requérante n'a de toute façon pas respecté le délai de trois mois prévu par l'article 91, paragraphe 3, du statut.
47 La requérante prétend à tort que l'ouverture d'une procédure disciplinaire à son encontre, le 5 décembre 1991, a entraîné une suspension des délais. Les arguments invoqués à cet effet pendant l'audience - «l'équité et la logique des choses» - ne sauraient en aucun cas permettre au juge communautaire d'écarter des délais prescrits par le statut, qui ont un caractère d'ordre public. De même, il n'existe aucune base statutaire permettant de procéder à une application mutatis mutandis de l'article 88, quatrième alinéa, du statut.
48 Il y a lieu d'examiner ensuite si la lettre de l'avocat de la requérante du 7 septembre 1993, demandant le versement des traitements litigieux, a fait valoir un fait nouveau et a donc fait courir un nouveau délai. L'avocat de la requérante s'est référé dans cette lettre au fait que les griefs formulés contre elle «n'ont pas été établis». A l'audience il a fait valoir, dans ce contexte, que la commission médicale d'invalidité avait émis le 10 juin 1993 un avis dont il avait lui-même été informé le 29 juin 1993 (voir la page 3 de la lettre du secrétaire général du Parlement au président du conseil de discipline du 26 juillet 1994, jointe en annexe D du mémoire en défense). Cet avis contient les conclusions suivantes: «A l'issue de ses travaux, la Commission estime ne pas pouvoir retenir la conclusion que l'intéressée présente une affection médicale qui ne permet pas de la rendre responsable de ses actes. Par ailleurs, la Commission tient à souligner que Mme A présente des troubles de santé importants rendant nécessaire une prise en charge thérapeutique. Celle-ci n'exclut cependant pas la poursuite de son activité professionnelle» (annexe II à la lettre du 26 juillet 1994, précitée).
49 A l'audience, l'avocat de la requérante a ajouté que, suite à cet avis, l'AIPN n'avait pris aucune décision dans le sens qu'on aurait pu attendre, c'est-à-dire dans celui d'un licenciement. C'est ainsi que la requérante aurait décidé, le 7 septembre 1993, d'attaquer cette «inaction de l'AIPN». Si l'on prend en considération ces dates, des 29 juin et 7 septembre 1993, elle aurait respecté le délai de trois mois endéans lequel doit être introduite une réclamation. En conséquence, la lettre du 7 septembre 1993 aurait été adressée dans les délais. En tout état de cause, la requérante aurait commis une erreur excusable quant au calcul de ces délais.
50 Il y a lieu de relever que l'avis de la commission médicale d'invalidité du 10 juin 1993 a constaté des troubles de santé importants dans le chef de la requérante. Cependant, cette conclusion globale adoptée en 1993 ne permet pas d'affirmer que l'AIPN et son médecin-conseil auraient dû prendre en considération les certificats médicaux controversés, relatifs à la période antérieure au 23 octobre 1991, pour permettre le versement du traitement de la requérante pendant ses absences. Eu égard au fait que d'après la commission médicale d'invalidité une poursuite de l'activité professionnelle n'était pas exclue en 1993, cet avis ne constitue pas un fait nouveau par rapport aux certificats médicaux se référant à des circonstances survenues presque deux ans plus tôt. Il y a lieu d'ajouter qu'il ne peut justifier les absences de la requérante qui n'étaient pas expliquées par un certificat médical. Par conséquent, le délai de recours n'a pas été rouvert par l'avis de la commission médicale en question (voir, entre autres, les arrêts de la Cour du 26 septembre 1985, Valentini/Commission, 231/84, Rec. p. 3027, point 14, et du Tribunal du 7 février 1991, Williams/Cour des comptes, T-58/89, Rec. p. II-77, point 39).
51 Pendant l'audience, en réponse aux questions orales du Tribunal, l'avocat de la requérante a expliqué, à juste titre, que la requérante n'entendait pas se prévaloir d'un cas fortuit ou de force majeure au titre de l'article 42 du statut (CE) de la Cour, applicable à la procédure devant le Tribunal, au sens strict du terme.
52 L'avocat a cependant plaidé l'existence d'une erreur excusable (voir ci-dessus point 44). Dans ce contexte, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour et du Tribunal, s'agissant du domaine des délais de recours, qui ne sont à la disposition ni du juge ni des parties et qui présentent un caractère d'ordre public, la notion d'erreur excusable doit être interprétée de façon restrictive et ne peut viser que des circonstances exceptionnelles où, notamment, l'institution concernée a adopté un comportement de nature, à lui seul ou dans une mesure déterminante, à provoquer une confusion admissible dans l'esprit d'un justiciable de bonne foi et faisant preuve de toute la diligence requise d'un opérateur normalement averti (voir les arrêts du Tribunal du 15 mars 1995, Cobrecaf e.a./Commission, T-514/93, Rec. p. II-621, point 40, du 16 mars 1993, Blackmann/ Parlement, T-33/89 et T-74/89, Rec. p. II-249, point 34, et l'arrêt de la Cour du 31 mars 1992, Burban/Parlement, C-255/90 P, Rec. p. I-2253, point 24).
53 En l'espèce, à supposer même que, comme il a été plaidé pendant l'audience, une confusion ait existé dans le chef de la requérante, celle-ci ayant attendu le déroulement des différentes procédures disciplinaires et médicales engagées contre elle jusqu'à une prise de position précise et certaine de la part de l'AIPN pour prendre une décision quant à la manière dont elle continuerait à défendre ses intérêts, force est de constater qu'il ne s'agissait pas d'une erreur excusable. En effet, le Parlement n'a nullement fait preuve d'un comportement apte à avoir provoqué une telle attitude de la part de la requérante.
54 En outre, la volonté dont fait état la requérante, assistée par son avocat, d'attendre une prise de position précise et certaine de la part de l'AIPN, doit être qualifiée comme une décision autonome de sa part, en ce qui concerne le choix des démarches qu'elle entreprendrait ultérieurement vis-à-vis de l'AIPN, ce qui exclut qu'elle ait été la victime d'une confusion génératrice d'erreur. Il s'ensuit que le recours est irrecevable pour autant qu'il porte sur la période antérieure à la réclamation du 23 octobre 1991.
La période postérieure à la réclamation du 23 octobre 1991
55 Le présent recours revêt un caractère exclusivement indemnitaire et ne tend à l'annulation d'aucun acte administratif. Une demande au titre de l'article 90, paragraphe 1, du statut précédant l'introduction d'un tel recours ne devait donc pas être introduite dans le délai fixé par cette disposition. Cependant, il convient de rappeler qu'un fonctionnaire n'ayant pas attaqué en temps utile une décision de l'AIPN à son égard ne saurait se prévaloir de l'illégalité prétendue de cette décision dans le cadre d'un recours en indemnité (voir, entre autres, les arrêts de la Cour du 19 novembre 1981, Fournier/Commission, 106/80, Rec. p. 2759, point 17, et du 7 octobre 1987, Schina/Commission, 401/85, Rec. p. 3911, 3929, ainsi que l'arrêt du Tribunal du 13 juillet 1995, Saby/ Commission, T-44/93, RecFP p. II-541, points 22 et 33). Par conséquent, il y a lieu d'examiner si la requérante a respecté les délais pour attaquer les différentes décisions de l'AIPN prises à son égard.
a) La période allant de la seconde moitié de juillet jusqu'au 6 octobre 1991
56 Il ressort du dossier que la période allant de la seconde moitié de juillet 1991 jusqu'au 6 octobre 1991 inclus n'a pas été rémunérée. Le versement du traitement de la requérante a été suspendu à partir du 2 avril 1991 par décision de l'AIPN du 30 mai 1991, prise sur la base de l'article 60 du statut, au motif pris de son absence irrégulière. Cette décision, qui a été communiquée à la requérante, par télégramme du même jour, constitue un acte faisant grief au sens de l'article 90, paragraphe 2, du statut.
57 Dans sa réclamation du 23 octobre 1991, la requérante n'a évoqué que de façon indirecte la période allant de la seconde moitié du mois de juillet jusqu'au 6 octobre 1991. A supposer même que le Tribunal admette que la réclamation s'y réfère, il n'en reste pas moins que la requérante n'a pas, dans les délais prescrits par l'article 91 du statut, introduit un recours contre le rejet de sa réclamation. Elle n'a pas non plus formulé une réclamation indépendante contre l'acte lui faisant grief qui a été arrêté le 30 mai 1991. Il y a lieu d'ajouter qu'elle n'a pas non plus introduit, dans les délais statutaires, de réclamation contre son bulletin de rémunération du mois de novembre 1991, dont il ressortait pourtant qu'elle n'avait pas perçu de rémunération pour la période susvisée (sur la qualification du bulletin de rémunération comme acte faisant grief, voir l'arrêt du Tribunal du 27 octobre 1994, Chavane de Dalmassy e.a./Commission, T-64/92, RecFP p. II-723, point 20).
b) Les mois d'octobre, novembre et décembre 1991 et de janvier, février et mars 1992
58 La défenderesse a présenté six bulletins de rémunération pour la période susmentionnée. La requérante n'a pas introduit dans les délais prescrits par l'article 90, paragraphe 2, du statut une ou plusieurs réclamations contre ces bulletins en faisant valoir que les déductions litigieuses n'étaient pas justifiées. Les bulletins de rémunération constituant des actes faisant grief (voir l'arrêt Chavane de Dalmassy e.a./Commission, précité), il s'ensuit qu'une procédure précontentieuse contre ces actes fait défaut.
c) Les mois d'avril et de mai 1992
59 Pour les mois d'avril et de mai 1992, des bulletins de rémunération font défaut. Le Tribunal estime que le télégramme du 24 mars 1992 peut difficilement être qualifié d'un acte faisant grief, étant donné qu'il annonce la suspension des traitements sous la réserve d'une condition. Il s'agit plutôt d'un acte préparatoire. La décision portant suspension du versement des traitements elle-même, qui a constitué l'acte faisant grief, a été prise et mise à exécution plus tard par les services de la défenderesse, sans que celle-ci ait produit une communication y relative destinée à la requérante.
60 Par conséquent, il y a lieu d'examiner quand le délai de trois mois pour introduire une réclamation contre la nouvelle décision de suspension du versement des traitements a commencé à courir. Selon l'article 90, paragraphe 2, du statut, le délai court au plus tard à partir du jour où l'intéressé «a eu connaissance» de la mesure à caractère individuel en question. La requérante a reçu, pour le mois d'août 1992, un bulletin de rémunération couvrant les mois de juin (en partie), juillet et août 1992. A cette date au plus tard, la requérante a donc su - par le biais de ce bulletin de rémunération - qu'aucune somme ne lui avait été versée pour les mois d'avril et de mai 1992. A ce moment-là, elle aurait pu introduire une réclamation contre la décision qui avait suspendu le versement de ses traitements, ce qu'elle a pourtant omis.
d) Les mois de juin à décembre 1992
61 Pour les mois de juin à décembre 1992, il existe des bulletins de rémunération à l'encontre desquels la requérante n'a pas introduit, dans les délais prescrits, de réclamation. Il s'ensuit qu'un éventuel recours en annulation dirigé contre ces actes serait irrecevable en raison du défaut de procédure précontentieuse.
62 Il y a lieu d'ajouter les précisions suivantes: la requérante a repris son travail le 10 juin 1992. Quatre jours (du 10 au 13 juin 1992) de congé annuel ont été récupérés pour les mois d'avril et de mai 1992. La requérante n'a pas introduit de réclamation spécifique contre le bulletin de rémunération afférent au mois d'août 1992, qui faisait apparaître le non-paiement de ces journées.
63 Il ressort du dossier que la requérante a reçu les frais de voyage annuel avec son traitement d'août 1992.
64 La requérante n'a pas perçu de rémunération pour la journée du 12 octobre 1992, car son congé de maladie s'était terminé le 9 octobre 1992 et elle n'avait recommencé à travailler que le 13 octobre 1992. Elle n'a pas introduit, dans les délais prescrits, de réclamation spécifique contre le bulletin de rémunération afférent au mois de décembre 1992, qui faisait apparaître le non-paiement de cette journée.
65 La requérante n'a pas perçu de rémunération pour les 2 et 3 décembre 1992, car elle a été absente de son service ces jours-là sans avoir présenté de certificat médical. Elle n'a pas introduit, dans les délais prescrits, de réclamation contre le bulletin de rémunération afférent au mois de février 1993, qui faisait apparaître le non-paiement de ces journées.
e) Le congé de 1992
66 Enfin, quant à l'indemnité pour congé non pris en 1992, il ressort des lettres des 24 février et 24 mars 1992 que l'AIPN a adressées à la requérante que l'absence de cette dernière a été considérée comme irrégulière à partir du 1er février 1992 et que les jours d'absence ont été prélevés sur son congé annuel. Celui-ci ayant été épuisé le 1er avril 1992, le versement du traitement de la requérante a été suspendu à partir de ce jour.
67 Sa demande de congé annuel pour la période du 15 décembre 1992 au 23 décembre 1992 a, par conséquent, été refusée. A supposer que la requérante ait introduit une réclamation - sous la forme de sa lettre au secrétaire général mentionnée dans la lettre de la défenderesse du 16 décembre 1992 -, celle-ci a été rejetée par le Parlement. Cela constituerait une procédure précontentieuse à deux étapes. Cependant, le délai pour un recours en annulation n'aurait pas été respecté. A supposer que la requérante n'ait pas introduit de réclamation, un recours en annulation serait irrecevable pour défaut de procédure précontentieuse.
f) Observations générales
68 Il y a lieu d'examiner encore une fois si la lettre de l'avocat de la requérante du 7 septembre 1993 a fait courir un nouveau délai. Or, l'avis de la commission médicale d'invalidité qui a précédé cette lettre (voir ci-dessus points 48, 49 et 50) ne contient qu'une conclusion médicale globale adoptée en 1993, qui ne permet pas d'affirmer que les certificats médicaux controversés présentés pendant l'année 1992 auraient dû être acceptés par l'AIPN et par son médecin-conseil, surtout si l'on considère que, selon cet avis, la poursuite de l'activité professionnelle n'était pas exclue. En outre, l'avis en question ne peut justifier les absences de la requérante qui n'étaient pas expliquées par un certificat médical. Il s'ensuit que la requérante n'a pas respecté les délais applicables aux procédures administratives qui auraient dû précéder son recours en annulation.
69 En outre, le Tribunal a déjà constaté que les délais en question ne peuvent pas être suspendus pour des raisons d'équité ou par interprétation du statut (voir ci-dessus point 47).
70 L'avocat de la requérante a expliqué, à juste titre, en répondant aux questions orales du Tribunal, qu'il ne plaidait pas un cas fortuit ou de force majeure au sens de l'article 42 du statut (CE) de la Cour, applicable à la procédure devant le Tribunal.
71 Le Tribunal constate qu'il ne s'agit pas non plus d'erreur excusable, car l'institution n'a adopté nulle part un comportement qui aurait pu laisser croire à la requérante qu'un avis de la commission médicale aurait un effet suspensif sur les délais.
72 La volonté de la requérante d'attaquer une «inaction» de l'AIPN ne constitue pas non plus une erreur excusable.
73 Par conséquent, il y a lieu de relever que les demandes pécuniaires de la requérante se heurtent au caractère définitif des actes lui faisant grief, qu'elle n'a pas attaqués en temps utile. Un éventuel recours en annulation contre ces actes faisant grief étant donc irrecevable, il découle de la jurisprudence précitée (voir point 55 ci-dessus) que le recours en indemnité est également irrecevable pour autant qu'il porte sur la période postérieure à la réclamation du 23 octobre 1991. Dans ces circonstances, il faut rejeter le recours entier comme irrecevable.
Sur les dépens
74 Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, la partie qui succombe est condamnée aux dépens s'il est conclu en ce sens. Toutefois, selon l'article 88 du même règlement, les frais exposés par les institutions dans les recours des agents des Communautés restent à la charge de celles-ci.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL
(deuxième chambre)
déclare et arrête:
1) Le recours est rejeté comme irrecevable.
2) Chaque partie supportera ses propres dépens, y compris ceux afférents à la procédure de référé.