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Dokument 62012TJ0530
Judgment of the General Court (Appeal Chamber) of 8 October 2014.#Moises Bermejo Garde v European Economic and Social Committee (EESC).#Appeal — Civil service — Officials — Psychological harassment — Illegal activities affecting the interests of the European Union — Serious failure to comply with the obligations of officials — Articles 12a and 22a of the Staff Regulations — Denunciation by the appellant — Reassignment following that denunciation — No consultation of OLAF by the immediate superior who received the information — Acts adversely affecting a person — Whether official acted reasonably and honestly — Rights of the defence — Competence of the authority issuing the act.#Case T‑530/12 P.
TRIBUNALENS DOM (avdelningen för överklaganden) 8 oktober 2014.
Moises Bermejo Garde mot Europeiska ekonomiska och sociala kommittén (EESK).
Överklagande – Personalmål – Tjänstemän – Mobbning – Olagliga handlingar som skadar unionens intressen – Allvarligt åsidosättande av tjänstemännens skyldigheter – Artiklarna 12a och 22 i tjänsteföreskrifterna – Sökandens angivelse – Omplacering till följd av denna angivelse – Den överordnade som mottagit informationen underrättade inte OLAF – Rättsakt som går någon emot – God tro – Rätt till försvar – Behörighet för den som antagit rättsakten.
Mål T‑530/12 P.
TRIBUNALENS DOM (avdelningen för överklaganden) 8 oktober 2014.
Moises Bermejo Garde mot Europeiska ekonomiska och sociala kommittén (EESK).
Överklagande – Personalmål – Tjänstemän – Mobbning – Olagliga handlingar som skadar unionens intressen – Allvarligt åsidosättande av tjänstemännens skyldigheter – Artiklarna 12a och 22 i tjänsteföreskrifterna – Sökandens angivelse – Omplacering till följd av denna angivelse – Den överordnade som mottagit informationen underrättade inte OLAF – Rättsakt som går någon emot – God tro – Rätt till försvar – Behörighet för den som antagit rättsakten.
Mål T‑530/12 P.
Rättsfallssamlingen – personaldelen
ECLI-nummer: ECLI:EU:T:2014:860
ARRÊT DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)
8 octobre 2014 (*)
« Pourvoi – Fonction publique – Fonctionnaires – Harcèlement moral – Activités illégales préjudiciables aux intérêts de l’Union – Grave manquement aux obligations des fonctionnaires – Articles 12 bis et 22 bis du statut – Dénonciation par le requérant – Réaffectation à la suite de cette dénonciation – Absence de saisine de l’OLAF par le supérieur hiérarchique ayant reçu des informations – Actes faisant grief – Bonne foi – Droits de la défense – Compétence de l’auteur de l’acte »
Dans l’affaire T-530/12 P,
ayant pour objet un pourvoi formé contre l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (première chambre) du 25 septembre 2012, Bermejo Garde/CESE (F-41/10, non encore publié au Recueil), et tendant à l’annulation de cet arrêt,
Moises Bermejo Garde, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Me L. Levi, avocat,
partie requérante,
l’autre partie à la procédure étant
Comité économique et social européen (CESE), représenté initialement par M. G. Nijborg, puis par Mmes U. Schwab et M. Lernhart, en qualité d’agents, assistés de Me B. Wägenbaur, avocat,
partie défenderesse en première instance,
LE TRIBUNAL (chambre des pourvois),
composé de MM. M. Jaeger, président, H. Kanninen et M. van der Woude (rapporteur), juges,
greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 25 février 2014,
rend le présent
Arrêt
1 Par son pourvoi introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le requérant, M. Moises Bermejo Garde, a demandé l’annulation de l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (première chambre) du 25 septembre 2012, Bermejo Garde/CESE (F-41/10, non encore publié au Recueil, ci-après l’« arrêt attaqué »), par lequel celui-ci a rejeté son recours.
Faits à l’origine du litige
2 Les faits à l’origine du litige sont énoncés aux points 13 à 36 de l’arrêt attaqué, dans les termes suivants :
« 13 Le requérant, fonctionnaire depuis 1990, est entré au service du CESE le 1er juin 1991 et a été affecté en tant que conseiller juridique auprès de la direction de l’administration, du personnel et des finances.
14 À compter du 1er juin 1997, le requérant a été nommé chef de l’unité ‘Service juridique’ (ci-après le ‘service juridique’) de la direction de l’administration, du personnel et des finances.
15 Le 1er avril 2007, le requérant a été promu au grade AD 13.
16 Le 1er octobre 2008, M. W., nouveau secrétaire général du CESE (ci-après le ‘secrétaire général’), est entré en fonctions.
17 Le jour suivant, le secrétaire général a envoyé une note de service par laquelle il informait le personnel qu’il assurerait l’intérim du poste, alors vacant, de directeur de la direction des ressources humaines et financières.
18 Il est constant que, peu après la nomination de M. W. comme secrétaire général, les relations entre celui-ci et le requérant se sont dégradées, ce dernier reprochant notamment au secrétaire général d’exercer des pressions ‘illégitimes’ sur le service juridique.
19 Le 7 décembre 2009, le requérant a déposé au CESE une note adressée au président du CESE (ci-après le ‘président’) ainsi qu’aux présidents des trois groupes de partenaires sociaux qui composent le CESE, en leur qualité de membres du bureau du CESE. Dans cette note, à laquelle étaient jointes des annexes et une documentation, le requérant, se référant expressément à l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut, a informé le bureau du CESE (ci-après le ‘bureau’) de l’existence de graves et nombreuses irrégularités qu’auraient commises, dans l’exercice de leurs fonctions, le secrétaire général et, dans une moindre mesure, le chef de l’unité ‘Recrutement, carrières, formation’ de la direction des ressources humaines et financières. Le requérant dénonçait en particulier :
– l’existence de pressions exercées sur le service juridique ;
– le refus de prononcer une sanction disciplinaire à l’encontre d’un fonctionnaire coupable de faits délictueux et de saisir l’OLAF de ces faits ;
– le pourvoi irrégulier de postes de directeur au sein du CESE.
20 Dans cette même note, le requérant demandait au bureau, notamment :
– d’‘engage[r] une enquête administrative [avec pour objectif d’]établir les faits et les irrégularités produites’ ;
– de lui ‘communique[r] le délai évoqué dans l’article 22 ter, [paragraphe] 1, [sous] b, du [s]tatut’ ;
– de ‘prendre les mesures pour restaurer le bon fonctionnement du [secrétariat général]’ ;
– de ‘garantir l’indépendance du [s]ervice juridique dans les conditions exigées par la jurisprudence de la Cour de [j]ustice [de l’Union européenne]’ ;
– de ‘déduire les responsabilités de nature personnelle qui s’imposent après l’intervention nécessaire de l’OLAF’.
21 Toujours dans la note du 7 décembre 2009, le requérant sollicitait également, en se fondant sur l’article 24 du statut, l’assistance du bureau afin que celui-ci prenne les ‘mesures nécessaires pour la cessation du harcèlement moral pratiqué à [son égard]’ par le secrétaire général.
22 Par courriels du même jour, le requérant a informé les autres membres du bureau qu’il venait de déposer à l’intention de chacun d’eux, dans les locaux de leurs groupes respectifs, une enveloppe contenant la copie de la note du 7 décembre 2009. Selon le requérant, ces enveloppes ne seraient pas parvenues à leurs destinataires, le président et les trois présidents de groupe ayant fait obstacle à leur distribution.
23 Le 10 décembre 2009, le président a donné instruction à son chef de cabinet de procéder à un ‘examen préliminaire’ des informations communiquées par le requérant dans la note du 7 décembre 2009.
24 En exécution de cette instruction, le chef de cabinet du président a procédé à l’audition des personnes concernées par la note du 7 décembre 2009. Le requérant a en particulier été entendu à deux reprises, le 15 décembre 2009 et le 14 janvier 2010.
25 Fin janvier 2010, le chef de cabinet du président a établi un rapport concernant les allégations de harcèlement moral et d’irrégularités commises au sein du CESE formulées par le requérant dans la note du 7 décembre 2009. Dans ce rapport, le chef de cabinet du président a considéré que ces allégations n’étaient pas fondées. Il a en particulier indiqué que, s’il existait un ‘climat tendu’ entre le service juridique et le secrétariat général, cette ‘difficulté sembl[ait] […] due pour l’essentiel à une divergence d’opinion sur le rôle du [service juridique]’ et que ‘[l]es divers épisodes qualifiés de harcèlement n[’étaient] que des manifestations de cette divergence, le cas échéant aggravées par des différences culturelles importantes dans le domaine juridique ainsi que par le caractère personnel des intervenants’.
26 Au cours d’un entretien ayant eu lieu le 22 février 2010, le président a invité le requérant à retirer les demandes figurant dans sa note du 7 décembre 2009.
27 Par courrier du 26 février 2010, le requérant a rejeté cette invitation, expliquant que, ‘après avoir estimé en toute conscience qu’il y avait des conduites irrégulières […], [il] ne p[ouvait] maintenant [s]e contredire sans avoir le sentiment d’être en infraction par rapport à l’article 21 du [s]tatut’. Le requérant insistait, par ailleurs, ‘sur le fait qu’il n’y a[vait] aucun intérêt ou conflit personnel dans [s]a démarche qui rest[ait] strictement professionnelle’.
28 Par décision no 088/10 A du 3 mars 2010 (ci-après la ‘décision du 3 mars 2010’), le président, ‘sur la base d’un mandat que lui a[vait] confié le [b]ureau le 16 février 2010’, a rejeté l’ensemble des demandes figurant dans la note du 7 décembre 2009, ‘les faits invoqués ne p[ouvant] être qualifiés d’infraction pénale ni de violation des dispositions statutaires en matière disciplinaire’.
29 Dans cette même décision, dans laquelle était mentionné qu’une conciliation a[vait] été tentée, mais que […] [le requérant] n’a[vait] pas accepté la solution proposée’, le président a considéré que ‘le grief de persécution au travail par le [s]ecrétaire général ou tout autre fonctionnaire n’[était] pas justifié, dès lors que les rares éléments de preuve disponibles en la matière [allaient] dans un sens contraire aux arguments invoqués par le plaignant’ et que ‘l’accusation d’abus de pouvoir et d’exercice abusif des pouvoirs du [b]ureau […] par le [s]ecrétaire général n’[était] pas attestée’.
30 Par ailleurs, toujours dans cette décision, le président a indiqué que ‘[l]e [s]ecrétaire général confiera[it] [au requérant] une tâche correspondant à ses qualifications et à son grade, assortie du maintien de l’indemnité de chef d’unité en vue de sa prochaine accession à une charge de cette nature si aucune n’[était] immédiatement disponible, mais dans une unité autre que le service juridique’.
31 Enfin, le président a ajouté que ‘[l]e secrétaire général indiquera[it] les autres mesures administratives susceptibles de favoriser le bon déroulement de l’activité administrative et propices à ce que soient surmontés les incompréhensions et les différends au sein du secrétariat général, dans le respect des principes de bonne administration et de l’exercice par les différentes structures des compétences, des responsabilités et des pouvoirs qui sont les leurs’.
32 La décision du 3 mars 2010 a été communiquée au requérant le jour de son adoption dans sa version originale, en langue italienne, puis, le 10 mars suivant, dans des versions en langues espagnole et française.
33 Le 24 mars 2010, le président a adopté un ‘addendum’ à la décision du 3 mars 2010, dans lequel il était précisé que les ‘mesures [de transposition] de la décision [du 3 mars 2010], qui ser[aient] prises par le [s]ecrétaire général, ser[aient] exécutées sous l’autorité du [p]résident’ (ci-après l’‘addendum du 24 mars 2010’).
34 Par la décision no 133/10 A de ce même 24 mars 2010, le président, ‘ayant consulté et avec l’accord du [s]ecrétaire général’, a mis fin, ‘dans l’intérêt du service’ et ‘avec effet immédiat’, aux fonctions de chef du service juridique exercées par le requérant et a précisé que celui-ci ‘ser[ait] réaffecté, en qualité de chef d’unité et avec son poste, auprès d’un autre service du CESE, à partir du [6] avril 2010’ (ci-après ‘la décision mettant fin aux anciennes fonctions’).
35 Par décision no 184/10 A du 13 avril 2010, le président, ‘ayant consulté et avec l’accord du [s]ecrétaire général’, a, ‘pour des raisons fonctionnelles’, affecté le requérant à la direction de la logistique ‘en qualité de [c]hef d’unité et avec son poste […] afin notamment de s’occuper des affaires juridiques concernant les contrats et les appels d’offre[s]’. Il était prévu que ladite décision prenne effet à la date du 6 avril 2010 (ci-après la ‘décision de réaffectation’).
36 Par note du 3 juin 2010, le requérant a, conformément à l’article 90, paragraphe 2, du statut, introduit une réclamation à l’encontre :
– de la décision du 3 mars 2010 ;
– de l’addendum du 24 mars 2010 ;
– de la décision mettant fin aux anciennes fonctions ;
– de la décision de réaffectation. »
Procédure en première instance et arrêt attaqué
3 Conformément à l’article 91, paragraphe 4, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), sans attendre la décision sur la réclamation, le requérant a introduit, le 7 juin 2010, un recours devant le Tribunal de la fonction publique de l’Union tendant, d’une part, à l’annulation des décisions visées par la réclamation et, d’autre part, à l’allocation de dommages et intérêts. Le recours a été enregistré sous la référence F-41/10. Le même jour, le requérant a également saisi le Tribunal de la fonction publique d’une demande en référé tendant à l’octroi du sursis à l’exécution de ces décisions.
4 Par ordonnance du 14 juillet 2010, le président du Tribunal de la fonction publique a rejeté la demande en référé.
5 Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a examiné :
– premièrement, les conclusions du requérant tendant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010 et de l’addendum du 24 mars 2010 ;
– deuxièmement, les conclusions tendant à l’annulation de la décision mettant fin aux anciennes fonctions et de la décision de réaffectation ;
– troisièmement, la demande en indemnité du requérant.
6 Au préalable, le Tribunal de la fonction publique a notamment précisé, en ce qui concerne le cadre juridique du litige, ce qui suit :
«11. Le 11 octobre 1999, le CESE a adopté la décision no 363/99 A relative aux conditions et modalités des enquêtes internes en matière de lutte contre la fraude, la corruption et toute activité illégale préjudiciable aux intérêts des Communautés.
12. L’article 2 de la décision no 363/99 A, intitulé « Obligation d’information », dispose :
« Tout fonctionnaire ou agent du [CESE] qui acquiert la connaissance d’éléments de fait laissant présumer l’existence d’éventuels cas de fraude, de corruption et de toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts des Communautés, ou de faits graves, liés à l’exercice d’activités professionnelles, pouvant constituer un manquement aux obligations des fonctionnaires et agents des Communautés, susceptible[s] de poursuites disciplinaires et, le cas échéant, pénales ou un manquement aux obligations analogues des membres, des dirigeants ou des membres du personnel non soumis au statut, en informe sans délai son chef de service ou son directeur général, ou, s’il l’estime utile, son secrétaire général ou l’[OLAF] directement.
Le secrétaire général, et les chefs de service (ou les dirigeants) du [CESE] transmettent sans délai à l’[OLAF] tout élément de fait dont ils ont connaissance laissant présumer l’existence d’irrégularités visées au premier alinéa.
Les dirigeants, fonctionnaires et agents du [CESE] ne doivent en aucun cas subir un traitement inéquitable ou discriminatoire du fait d’une communication visée aux premier et deuxième alinéas.
Les membres qui acquièrent la connaissance de faits visés au premier alinéa en informent le président du [CESE] ou, s’ils l’estiment utile, l’[OLAF], directement. »
1. Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010 et de l’addendum du 24 mars 2010
7 À titre liminaire, le Tribunal de la fonction publique a précisé la teneur de la note du 7 décembre 2009 dans les termes suivants :
« 44 Dans la note du 7 décembre 2009, le requérant a saisi l’administration de faits susceptibles d’être regroupés en deux catégories distinctes.
45 En premier lieu, l’intéressé a dénoncé des faits qui le concernaient directement. Il a en particulier mis en cause le secrétaire général pour des faits de harcèlement moral, celui-ci ayant pris la forme, pour l’essentiel, de pressions ‘illégitimes’ exercées sur le service juridique. Il a demandé à l’administration de lui prêter assistance en application de l’article 24, premier alinéa, du statut, cette assistance devant consister, principalement, à soustraire le service juridique de la responsabilité directe du secrétaire général (ci-après la ‘demande d’assistance’).
46 En second lieu, toujours dans la note du 7 décembre 2009, l’intéressé a également attiré l’attention sur des faits qui, s’ils ne le concernaient pas directement, étaient susceptibles, de son point de vue, de porter atteinte aux intérêts du CESE. Ont ainsi été dénoncés, en particulier, le refus du secrétaire général de prononcer, à l’encontre d’un fonctionnaire coupable de faits délictueux, une sanction disciplinaire, les irrégularités entachant la procédure de pourvoi des postes de directeur de la direction A des travaux consultatifs et de la direction des ressources humaines et financières, ou encore l’usurpation par le secrétaire général des prérogatives du bureau en matière de nomination d’autres fonctionnaires du CESE. Le requérant a demandé que ces informations soient communiquées immédiatement à l’OLAF en application de l’article 22 bis, paragraphe 2, du statut (ci-après la ‘demande de saisine de l’OLAF’).
47 La teneur de la note du 7 décembre 2009 ainsi définie, il convient de constater que, par la décision du 3 mars 2010, le président a rejeté tant la demande d’assistance que la demande de saisine de l’OLAF et a en outre indiqué au requérant qu’il ferait dans l’avenir l’objet d’une réaffectation dont les modalités seraient précisées par le secrétaire général. Par la suite, dans l’addendum du 24 mars 2010, le président a ajouté que les modalités de la réaffectation du requérant seraient exécutées sous son autorité. »
8 Ces précisions ayant été apportées, le Tribunal de la fonction publique a statué successivement :
– sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010, en tant que celle-ci a indiqué que le requérant ferait l’objet d’une réaffectation, et sur les conclusions tendant à l’annulation de l’addendum du 24 mars 2010 ;
– sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010, en tant que celle-ci a rejeté la demande de saisine de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) ;
– sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010, en tant que celle-ci a rejeté la demande d’assistance.
Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010, en tant que celle-ci a indiqué que le requérant ferait l’objet d’une réaffectation, et sur les conclusions tendant à l’annulation de l’addendum du 24 mars 2010
9 Le Tribunal de la fonction publique a déclarées irrecevables, aux points 49 à 51 de l’arrêt attaqué, les conclusions du requérant tendant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010, en tant que celle-ci aurait indiqué qu’il ferait l’objet d’une réaffectation, ainsi que les conclusions du requérant visant à l’annulation de l’addendum du 24 mars 2010.
10 Le Tribunal de la fonction publique a rappelé, à cet égard, que la simple manifestation, de la part de l’autorité compétente, d’une intention de prendre, dans l’avenir, une décision spécifique n’est pas susceptible de créer des droits ni des obligations correspondants pour les fonctionnaires intéressés. Les actes mentionnés au point 9 ci-dessus ne feraient donc pas grief au requérant.
Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010, en tant que celle-ci a rejeté la demande de saisine de l’OLAF
11 Le Tribunal de la fonction publique a également déclarées irrecevables les conclusions du requérant tendant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010, en tant que celle-ci a rejeté la demande de saisine de l’OLAF. Cette irrecevabilité a été constatée, aux points 59 à 64 de l’arrêt attaqué, dans les termes suivants :
« 59 La question que doit trancher le Tribunal [de la fonction publique] est celle de savoir si et dans quelle mesure la décision, par laquelle un supérieur hiérarchique ayant reçu d’un fonctionnaire des informations telles que celles visées à l’article 22 bis, paragraphe 1, premier alinéa, du statut estime ne pas devoir les communiquer à l’OLAF, constitue, ou non, un acte faisant grief à ce fonctionnaire.
60 Une telle question appelle une réponse négative dans le cas particulier où les informations émanant du fonctionnaire ayant alerté ses supérieurs hiérarchiques concernent des faits qui, bien que portant atteinte aux intérêts de l’Union ou révélant un grave manquement par un ou plusieurs membres du personnel aux obligations des fonctionnaires, ne le concernent pas directement.
61 En effet, il convient de rappeler que, aux termes mêmes de l’article 22 bis du statut, un fonctionnaire qui entend dénoncer l’existence d’une activité illégale éventuelle ou d’un grave manquement aux obligations des fonctionnaires peut communiquer directement à l’OLAF les éléments de preuve dont il estime disposer en rapport avec l’existence de ces irrégularités. Ainsi, dans l’hypothèse où la personne informée par le fonctionnaire refuse de saisir l’OLAF, ce fonctionnaire bénéficie toujours de la faculté de s’adresser directement à l’OLAF.
62 En outre, il est de jurisprudence constante qu’un fonctionnaire n’est pas habilité à agir dans l’intérêt de la loi ou des institutions et ne peut faire valoir, à l’appui d’un recours, que les griefs qui lui sont personnels (ordonnance du Tribunal de première instance du 7 juillet 1998, Moncada/Commission, T-178/97, point 39). Or, accepter qu’un fonctionnaire ayant alerté son supérieur hiérarchique de l’existence d’irrégularités ne le concernant pas directement puisse former un recours contre le refus de ce supérieur hiérarchique de communiquer ces informations à l’OLAF reviendrait à admettre que ce fonctionnaire soit autorisé à agir dans l’intérêt de la loi. Une telle conclusion est toutefois faite sans préjudice de la possibilité pour ce fonctionnaire, dans l’hypothèse où il estimerait avoir subi une décision portant atteinte à ses intérêts du fait de l’information donnée à ses supérieurs hiérarchiques, de former un recours contre une telle décision.
63 En l’espèce, ainsi qu’il a été dit, les faits dénoncés par le requérant dans la demande de saisine de l’OLAF ne le concernaient pas directement, puisqu’il y mettait en cause, en particulier, le refus du secrétaire général de prononcer une sanction disciplinaire contre un fonctionnaire du CESE, le pourvoi irrégulier de postes de directeur au sein du CESE ou encore l’usurpation par le secrétaire général des prérogatives du bureau en matière de nomination d’autres fonctionnaires du CESE.
64 Il en résulte que la décision du 3 mars 2010, en tant que celle-ci a rejeté la demande de saisine de l’OLAF, ne constitue pas un acte faisant grief au requérant et que, par suite, les conclusions tendant à l’annulation de cette décision doivent, dans cette mesure, être rejetées comme irrecevables. »
Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010, en tant que celle-ci a rejeté la demande d’assistance
12 Le Tribunal de la fonction publique a rejeté, aux points 65 à 102 de l’arrêt attaqué, les trois moyens avancés par le requérant au soutien de ses conclusions à l’encontre du rejet de sa demande d’assistance.
13 Ces moyens étaient tirés :
– premièrement, de l’incompétence de l’auteur de l’acte, de la violation de la procédure et de la méconnaissance de l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union, en ce que, d’une part, la décision du 3 mars 2010 aurait dû être adoptée par le bureau, et non par le président, et, d’autre part, les membres du bureau n’auraient pas eu accès à la demande d’assistance ;
– deuxièmement, de la violation de l’article 86 du statut, de l’annexe IX du statut, de la décision du président du Comité économique et social européen (CESE) no 635/05 A portant dispositions générales d’exécution relatives aux procédures disciplinaires et aux enquêtes administratives (ci-après les « DGE de l’annexe IX du statut »), et du principe du respect des droits de la défense, en ce que le président se serait borné à faire procéder par son chef de cabinet à un simple examen préliminaire au lieu d’ouvrir une enquête administrative ;
– troisièmement, de la violation de l’article 24 du statut et de l’obligation d’assistance, de la méconnaissance de l’article 31, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux et de l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation, en ce que le requérant aurait été victime de harcèlement moral.
14 S’agissant, plus particulièrement, du premier moyen, le Tribunal de la fonction publique a rappelé, aux points 69 et 70 de l’arrêt attaqué, que, conformément à l’article 72, paragraphe 1, troisième tiret, du règlement intérieur du CESE (ci-après le « règlement intérieur »), les pouvoirs dévolus par le statut à l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») sont exercés, en ce qui concerne les fonctionnaires des grades AD 13, AD 12 et AD 11, par le président, sur proposition du secrétaire général. Or, à la date où le rejet de la demande d’assistance a eu lieu, le requérant était fonctionnaire de grade AD 13. C’était donc à bon droit que cette décision avait été prise par le président.
15 Le bureau n’étant pas compétent, le Tribunal de la fonction publique a également rejeté comme inopérant, au point 71 de l’arrêt attaqué, le grief tiré de l’existence d’irrégularités procédurales affectant la décision du 3 mars 2010, en ce que notamment les membres du bureau n’auraient pas été associés au traitement de la demande d’assistance.
16 S’agissant du deuxième moyen, le Tribunal de la fonction publique a, d’abord, fait observer, au point 76 de l’arrêt attaqué, que, après avoir procédé à l’audition du requérant les 15 décembre 2009 et 14 janvier 2010, et des personnes mises en cause dans la demande d’assistance, le chef de cabinet du président a établi, en janvier 2010, un rapport circonstancié dans lequel il a examiné et discuté le bien-fondé des différentes accusations formulées par le requérant à l’encontre du secrétaire général.
17 Dans ces conditions, le Tribunal de la fonction publique a considéré, aux points 75 et 76 de l’arrêt attaqué, que le CESE avait procédé à une enquête afin d’établir les faits à l’origine de la demande d’assistance en collaboration avec l’auteur de celle-ci, conformément à la jurisprudence (arrêt de la Cour du 26 janvier 1989, Koutchoumoff/Commission, 224/87, Rec. p. 99, points 15 et 16 ; arrêts du Tribunal du 21 avril 1993, Tallarico/Parlement, T-5/92, Rec. p. II-477, point 31, et du 5 décembre 2000, Campogrande/Commission, T-136/98, RecFP p. I-A-267 et II-1225, point 42).
18 Le Tribunal de la fonction publique a, ensuite, rejeté, au point 77 de l’arrêt attaqué, l’argument selon lequel le CESE aurait dû ouvrir une enquête administrative au sens de l’article 86, paragraphe 2, du statut, des articles 1er et 2 de l’annexe IX du statut et de l’article 2 des DGE de l’annexe IX du statut. En effet, le Tribunal de la fonction publique a relevé que les enquêtes administratives visées par ces dispositions s’inséraient dans une procédure disciplinaire et ne devaient être ouvertes que lorsque des éléments de preuve laissaient présumer l’existence d’un manquement aux obligations auxquelles le fonctionnaire était tenu. Or, en l’espèce, le Tribunal de la fonction publique a constaté que la demande d’assistance ne contenait aucun élément qui aurait justifié, sans même procéder préalablement à un examen préliminaire, l’ouverture d’une telle enquête administrative de nature disciplinaire à l’encontre du secrétaire général.
19 Enfin, le Tribunal de la fonction publique a rejeté, au point 78 de l’arrêt attaqué, le grief selon lequel le CESE aurait, en violation des droits de la défense, omis de communiquer au requérant, préalablement au rejet de la demande d’assistance, les conclusions du rapport établi par le chef de cabinet du président ainsi que les différents comptes rendus des auditions organisées dans le cadre de l’enquête menée par celui-ci. En effet, selon le Tribunal de la fonction publique, la procédure ouverte par la demande d’assistance ne saurait être regardée comme une procédure ouverte à l’encontre du requérant (arrêt du Tribunal du 27 juin 2000, K/Commission, T-67/99, RecFP p. I-A-127 et II-579, point 72). Ainsi, la décision du 3 mars 2010, en tant que celle-ci a rejeté la demande d’assistance, ne figurait pas au nombre des décisions pour lesquelles les droits de la défense doivent être respectés.
2. Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision mettant fin aux anciennes fonctions et de la décision de réaffectation
20 Le Tribunal de la fonction publique a rejeté, aux points 103 à 180 de l’arrêt attaqué, les sept moyens avancés par le requérant à l’encontre de la décision mettant fin aux anciennes fonctions et de la décision de réaffectation.
21 Ces moyens étaient tirés, premièrement, de l’incompétence de l’auteur de l’acte, deuxièmement, de la violation des droits de la défense du requérant, troisièmement, de la violation de l’obligation de motivation, quatrièmement, de la violation des articles 12 bis, 22 bis et 86 du statut, cinquièmement, de l’erreur manifeste dans le cadre de l’appréciation de l’intérêt général du service, sixièmement, de la violation du devoir de sollicitude et du principe de bonne administration, et, septièmement, de la violation de l’article 22 ter, paragraphe 1, du statut.
22 S’agissant, plus particulièrement, du deuxième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense du requérant, le Tribunal de la fonction publique a considéré, aux points 116 à 118 de l’arrêt attaqué, que, dans la décision du 3 mars 2010, le président avait informé le requérant de son intention de procéder à sa réaffectation. Ainsi, il était loisible au requérant de formuler toute observation sur le projet de réaffectation qui le visait. Sur cette base, le deuxième moyen a été rejeté.
23 S’agissant du quatrième moyen, tiré d’une violation des articles 12 bis, 22 bis et 86 du statut, le Tribunal de la fonction publique a reconnu, au point 132 de l’arrêt attaqué, que le requérant avait subi un préjudice à la suite de la communication de sa note du 7 décembre 2009, car, en raison même de l’envoi de cette note, il avait été privé de ses fonctions de responsable du service juridique qu’il exerçait depuis le 1er juin 1997.
24 Toutefois, le Tribunal de la fonction publique a précisé, au point 133 de l’arrêt attaqué, que ce préjudice ne saurait caractériser une violation par le CESE des articles 12 bis et 22 bis du statut qu’à la condition qu’il soit établi que le requérant a effectivement communiqué, de bonne foi, des éléments laissant présumer l’existence, d’une part, d’un harcèlement moral dont il aurait été victime, et, d’autre part, d’une activité illégale, notamment une fraude ou une corruption, ou d’un grave manquement aux obligations des fonctionnaires.
25 Le Tribunal de la fonction publique a précisé, au point 134 de l’arrêt attaqué, que, pour déterminer si un fonctionnaire a fait usage de bonne foi du droit de divulgation prévu aux articles 12 bis et 22 bis du statut, il devait prendre en considération un « certain nombre de facteurs ». Ces facteurs ont été décrits aux points 135 à 138 de l’arrêt attaqué dans les termes suivants :
« 135 Le Tribunal [de la fonction publique] doit d’abord vérifier si les informations que le fonctionnaire décide de communiquer à sa hiérarchie ou, le cas échéant, directement à l’OLAF, concernent des irrégularités présentant, dans l’hypothèse où elles auraient effectivement été commises, un caractère d’évidente gravité. En témoigne à cet égard le fait que l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut cite la fraude ou la corruption au nombre des activités illégales dont la dénonciation est prévue et ajoute que celles-ci doivent être ‘préjudiciables aux intérêts [de l’Union]’. De même, toujours selon l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut, un manquement aux obligations des fonctionnaires ne peut être dénoncé qu’à la condition qu’il soit ‘grave’.
136 Le deuxième facteur à prendre en compte est l’authenticité ou, à tout le moins, le caractère vraisemblable des informations divulguées. En effet, l’exercice de la liberté d’expression, dont relève la possibilité pour un fonctionnaire de dénoncer un harcèlement moral ou l’existence de faits illégaux ou d’un grave manquement aux obligations des fonctionnaires, comporte des devoirs et des responsabilités, et quiconque choisit de divulguer de telles informations doit vérifier avec soin, dans la mesure où les circonstances le permettent, qu’elles sont exactes et dignes de crédit. Ainsi, le fonctionnaire qui dénonce des irrégularités relevant, de son point de vue, du champ d’application des articles 12 bis et 22 bis du statut est tenu de s’assurer que les accusations qu’il porte reposent sur des faits exacts ou, à tout le moins, qu’elles sont fondées sur une ‘base factuelle suffisante’ (voir Cour eur. D. H., arrêt Heinisch c. Allemagne du 21 juillet 2011, no 28274/08, § 79). À cet égard, il a été jugé que l’article 22 bis du statut visait seulement la communication de faits concrets dont une première appréciation a pu conduire le fonctionnaire qui les communique à présumer raisonnablement l’existence d’une activité illégale ou d’un manquement grave et que cette disposition doit, en outre, se concilier avec les obligations d’objectivité et d’impartialité qui s’imposent aux fonctionnaires, avec l’obligation de veiller à la dignité de leur fonction et avec leur devoir de loyauté, ainsi qu’avec l’obligation de respecter l’honneur et la présomption d’innocence des personnes visées (arrêt du Tribunal du 13 janvier 2011, Nijs/Cour des comptes, F-77/09, points 66 à 70).
137 Le Tribunal [de la fonction publique] doit également prendre en considération les moyens utilisés par le fonctionnaire pour procéder à la divulgation et, s’agissant en particulier d’irrégularités relevant de l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut, il doit vérifier si le fonctionnaire s’est adressé à l’autorité ou instance compétente, à savoir ‘son supérieur hiérarchique direct ou son directeur général ou encore, s’il le juge utile, le secrétaire général, ou toute personne de rang équivalent, ou directement l’[OLAF]’.
138 Enfin, le mobile du fonctionnaire qui dénonce des illégalités est un autre facteur pour l’appréciation du point de savoir si celui-ci a agi de bonne foi […] ».
26 À la lumière de ces considérations, le Tribunal de la fonction publique a examiné, aux points 140 à 151 de l’arrêt attaqué, le bien-fondé du moyen du requérant tiré de la violation des articles 12 bis, 22 bis et 86 du statut, comme suit :
« 140 En l’espèce, il est constant que, dans la note du 7 décembre 2009, le requérant a porté, en des termes graves, des accusations à l’encontre principalement du secrétaire général, l’accusant de l’avoir harcelé moralement et de s’être prêté à des activités illégales, constitutives, pour certaines d’entre elles, d’infractions au regard du code pénal belge.
141 Or, le Tribunal [de la fonction publique] considère que la note du 7 décembre 2009 ne contenait aucun élément pouvant laisser présumer un harcèlement moral au sens de l’article 12 bis du statut, ou une activité illégale ou un grave manquement aux obligations des fonctionnaires au sens de l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut.
142 En effet, en premier lieu, le requérant a fait grief au secrétaire général de l’avoir harcelé moralement, en ayant notamment exigé de lui qu’il établisse des avis juridiques erronés en droit. Toutefois, le requérant n’a apporté, ainsi qu’il a été dit plus haut, aucun élément permettant d’établir, ou à tout le moins de supposer, qu’il aurait été victime de comportements ayant porté atteinte à sa personnalité, à sa dignité ou à son intégrité physique ou psychique.
143 En deuxième lieu, le requérant a également dénoncé le secrétaire général comme s’étant abstenu de saisir l’OLAF du cas d’un fonctionnaire ayant soustrait du matériel appartenant au CESE, et comme n’ayant prononcé aucune sanction disciplinaire à l’encontre de ce fonctionnaire. Toutefois, un tel agissement de la part du secrétaire général ne saurait être qualifié d’illégalité ou de grave manquement aux obligations des fonctionnaires au sens de l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut, compte tenu, notamment, de la valeur modeste du matériel soustrait par le fonctionnaire en cause et de l’avis du conseil de discipline de ne lui infliger aucune sanction disciplinaire. Au demeurant, il importe de souligner que, sur le fondement de l’article 3, sous b), de l’annexe IX du statut, le secrétaire général a adressé une mise en garde à ce fonctionnaire.
144 En troisième lieu, le requérant a accusé le secrétaire général d’avoir méconnu tant les dispositions de l’article 27 du [règlement (CE, Euratom) no 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 248, p. 1)] que les dispositions de l’article 21, paragraphe 1, de l’annexe IX du statut. En effet, selon le requérant, le secrétaire général aurait donné instruction pour que soit réglée à l’avocat du fonctionnaire mentionné au point précédent une somme de 32 019 euros, correspondant à des frais d’honoraires exposés par cet avocat non seulement dans le cadre de la procédure disciplinaire ouverte à l’encontre dudit fonctionnaire, mais également à l’occasion de l’enquête menée préalablement à l’ouverture de la procédure disciplinaire. Or, ainsi que le rappelle le requérant, l’article 21, paragraphe 1, de l’annexe IX du statut prévoit qu’une institution est tenue de prendre en charge uniquement les frais occasionnés au cours d’une procédure disciplinaire qui n’a abouti au prononcé d’aucune sanction.
145 Toutefois, il n’est pas établi que les honoraires en question n’auraient pas été exposés exclusivement à l’occasion de la procédure disciplinaire engagée contre le fonctionnaire coupable de faits délictueux. En outre, même si le requérant, en sa qualité de chef du service juridique, a pu légitimement s’interroger sur le montant de cette somme au regard de procédures similaires en matière de fonction publique européenne, il ne ressort pas du dossier que, compte tenu de la durée de la procédure disciplinaire et du nombre de séances tenues par le conseil de discipline, cette somme aurait été manifestement excessive et que, par suite, l’instruction donnée par le secrétaire général de régler celle-ci aurait justifié la demande de saisine de l’OLAF.
146 En quatrième lieu, toujours dans la note du 7 décembre 2009, le requérant a dénoncé les irrégularités qui auraient entaché, en 2009, les procédures de pourvoi des emplois de directeur de la direction A des travaux consultatifs et de directeur des ressources humaines et financières, irrégularités concernant principalement les qualifications requises pour occuper ces emplois, la composition des panels de sélection ou l’examen des candidatures. Or, s’il est vrai que le chef de cabinet du président a lui-même confirmé, dans son rapport d’enquête, l’existence d’‘erreurs […] regrettables’, il ne ressort pas des pièces du dossier que celles-ci auraient revêtu le caractère de gravité des irrégularités visées à l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut. Enfin, l’intéressé a lui-même précisé dans la note du 7 décembre 2009, d’une part, que le candidat retenu pour le poste de directeur de la direction A des travaux consultatifs l’avait été au terme d’une procédure exempte de ‘possibilités pratiques d’erreurs ou de fraudes’, d’autre part, que la procédure organisée pour le recrutement du directeur des ressources humaines et financières avait finalement été annulée peu avant l’envoi de la note du 7 décembre 2009.
147 En cinquième lieu, contrairement aux allégations figurant dans la note du 7 décembre 2009, il ne ressort pas des pièces du dossier que le secrétaire général aurait usurpé les pouvoirs du bureau ou du président dans la nomination de certains hauts fonctionnaires du CESE. Par ailleurs, s’il est vrai que, à la date d’envoi de la note du 7 décembre 2009, le secrétaire général exerçait depuis plus d’un an les fonctions de directeur des ressources humaines et financières par intérim, une telle situation, même qualifiée d’‘anormale’ par le chef de cabinet du président dans son rapport d’enquête, ne présentait pas un caractère de gravité telle qu’elle pouvait faire l’objet d’une dénonciation en application de l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut. Il en va de même du reproche fait par le requérant au secrétaire général de ne pas avoir décrit avec suffisamment de précision la nature des fonctions et des attributions du secrétaire général adjoint.
148 En sixième et dernier lieu, le requérant a également mis en cause, dans la note du 7 décembre 2009, le chef de l’unité ‘Recrutement, carrières, formation’ de la direction des ressources humaines et financières, l’accusant d’avoir méconnu l’article 11 bis, paragraphe 1, du statut, aux termes duquel ‘[d]ans l’exercice de ses fonctions, le fonctionnaire ne traite aucune affaire dans laquelle il a, directement ou indirectement, un intérêt personnel, notamment familial ou financier, de nature à compromettre son indépendance […]’. À cet égard, il ressort en effet des pièces du dossier que ce chef d’unité de la direction des ressources humaines et financières était candidat à l’emploi de directeur de cette même direction et qu’il s’est efforcé de convaincre des membres du service juridique du caractère erroné d’un avis rendu par celui-ci concernant la possibilité pour un fonctionnaire de grade AD 14 de soumettre sa candidature à cet emploi. Toutefois, compte tenu des responsabilités exercées par ce chef d’unité, l’expression par celui-ci d’un désaccord avec le contenu d’un avis du service juridique ne saurait, en tant que telle, révéler une méconnaissance par ce fonctionnaire des obligations résultant de l’article 11 bis, paragraphe 1, du statut.
149 Ainsi, les informations contenues dans la note du 7 décembre 2009 ne révélaient pas l’existence d’irrégularités administratives d’une gravité telle qu’elles laissaient présumer l’existence d’un harcèlement moral dont aurait été victime le requérant ni, d’une manière plus générale, l’existence d’une activité illégale, notamment une fraude ou une corruption, ou d’un grave manquement aux obligations des fonctionnaires au sens de l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut.
150 Par ailleurs, alors que l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut prévoit que le fonctionnaire qui entend faire usage de son droit de dénonciation garanti par cet article doit ‘en informe[r] son supérieur hiérarchique direct ou son directeur général ou encore, s’il le juge utile, le secrétaire général, ou toute personne de rang équivalent’, il convient de relever que le requérant ne s’est pas borné à adresser la note du 7 décembre 2009 au président ainsi qu’aux présidents de groupe, mais que, par courriel envoyé le jour même du dépôt de la note du 7 décembre 2009, le requérant a informé les autres membres du bureau qu’il venait de déposer dans les locaux de leur groupe, à l’intention de chacun d’eux, une enveloppe contenant la copie de ladite note. En ayant entendu donner une publicité particulièrement étendue aux accusations figurant dans cette note, l’intéressé a méconnu l’obligation de faire preuve de la plus grande prudence et de la plus grande retenue dans la publicité donnée à des allégations relevant de la compétence de l’OLAF (arrêt Nijs/Cour des comptes, précité, point 80).
151 Dans ces conditions, le requérant n’est pas fondé à prétendre que les décisions mettant fin aux fonctions antérieures et de réaffectation, qui ne lui ont pas, au demeurant, retiré sa qualité de chef d’unité, auraient été adoptées en violation de l’article 12 bis, paragraphe 2, et de l’article 22 bis, paragraphe 3, du statut, ou auraient constitué une sanction déguisée en méconnaissance de l’article 86 dudit statut. »
27 Dès lors, le quatrième moyen avancé par le requérant au soutien de ses conclusions visant à l’annulation de la décision mettant fin aux anciennes fonctions et de la décision de réaffectation a été rejeté.
3. Sur la demande en indemnité du requérant
28 Le Tribunal de la fonction publique a observé, au point 184 de l’arrêt attaqué, que l’examen des griefs présentés à l’appui des conclusions en annulation n’avait révélé aucune illégalité entachant les décisions attaquées et, donc, aucune faute de nature à engager la responsabilité de l’administration. Dans ces conditions, les conclusions du requérant tendant à la réparation des préjudices matériel et moral qu’il aurait subis du fait de l’illégalité des décisions attaquées ont été rejetées.
29 Par ailleurs, le Tribunal de la fonction publique a relevé que, dans le cas où le requérant entendrait également solliciter la condamnation du CESE à réparer un préjudice résultant de fautes de service qui seraient dépourvues de lien étroit avec les conclusions en annulation, une telle prétention serait irrecevable, faute pour le requérant d’avoir saisi l’administration d’une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut.
30 Sur la base des considérations qui précèdent, le Tribunal de la fonction publique a rejeté le recours dans son ensemble.
Procédure devant le Tribunal et conclusions des parties
31 Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 5 décembre 2012, le requérant a introduit le présent pourvoi. Le 21 février 2013, le CESE a déposé le mémoire en réponse.
32 Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 15 mars 2013, le requérant a demandé, conformément à l’article 143, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, de pouvoir déposer un mémoire en réplique. Par décision du 22 mars 2013, le président de la chambre des pourvois a admis cette demande. Le requérant a déposé le mémoire en réplique le 3 mai 2013. Le CESE a déposé le mémoire en duplique le 17 juin 2013.
33 Par lettre du 16 juillet 2013, le requérant a formulé une demande, au titre de l’article 146 du règlement de procédure, aux fins d’être entendu dans le cadre de la phase orale de la procédure.
34 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (chambre des pourvois) a fait droit à cette demande et a ouvert la procédure orale.
35 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience qui s’est déroulée le 25 février 2014.
36 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler l’arrêt attaqué ;
– en conséquence, accorder au requérant le bénéfice de ses conclusions de première instance et, partant :
– annuler la décision du 3 mars 2010 ;
– annuler l’addendum du 24 mars 2010 ;
– annuler la décision mettant fin aux anciennes fonctions ;
– annuler la décision de réaffectation ;
– condamner le CESE au paiement de 17 500 euros à titre de dommages et intérêts ;
– condamner le CESE à l’ensemble des dépens.
– condamner le CESE à l’entièreté des dépens des deux instances.
37 Le CESE conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le présent pourvoi dans son intégralité ;
– à titre subsidiaire, adjuger au CESE ses conclusions de première instance ;
– condamner le requérant aux dépens de l’instance.
Sur le pourvoi
38 À l’appui du pourvoi, le requérant soulève cinq moyens. Le premier moyen est tiré d’une violation de la notion d’acte faisant grief et d’une dénaturation du dossier en déclarant irrecevables certaines de ses conclusions. Le deuxième moyen dénonce une violation des droits de la défense ainsi que de l’article 41 de la charte des droits fondamentaux, en ce que le CESE ne l’aurait pas entendu avant de décider de sa réaffectation par la décision du 3 mars 2010. Le troisième moyen, qui a trait à la décision mettant fin aux anciennes fonctions et à la décision de réaffectation, est tiré d’une violation des articles 12 bis, 22 bis et 86 du statut et de l’obligation de motivation ainsi que d’une dénaturation du dossier. Le quatrième moyen est tiré d’une dénaturation du dossier ainsi que d’une violation de l’article 86 du statut, de l’annexe IX du statut, des DGE de l’annexe IX du statut, des droits de la défense et de l’obligation de motivation, en l’absence d’ouverture d’une enquête administrative. Dans le cadre du cinquième moyen, le requérant dénonce une violation des règles relatives à la compétence de l’auteur de l’acte, de l’article 22 bis du statut ainsi que de l’article 72 du règlement intérieur, en ce qu’il revenait au bureau de se prononcer sur la demande qu’il a formulée dans sa note du 7 décembre 2009.
39 Il y a lieu d’observer que les premier, deuxième, quatrième et cinquième moyens concernent la décision du 3 mars 2010, alors que le troisième moyen a trait aux décisions mettant fin aux anciennes fonctions et de réaffectation. Il convient d’examiner les moyens du requérant dans cet ordre.
1. Sur le premier moyen, relatif à la recevabilité des conclusions en annulation de la décision du 3 mars 2010
40 Le premier moyen du requérant s’articule, en substance, en deux branches. Dans le cadre de ces deux branches, le requérant conteste l’irrecevabilité de ses conclusions en annulation de la décision du 3 mars 2010, en ce que celle-ci contiendrait, d’une part, une décision de le réaffecter et, d’autre part, le rejet de la demande de saisine de l’OLAF.
Sur la première branche du premier moyen, relative à l’irrecevabilité des conclusions visant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010 en tant que celle-ci déciderait de la réaffectation du requérant
41 Le requérant dénonce une violation de la notion d’« acte faisant grief » lorsque le Tribunal de la fonction publique a déclaré irrecevables les conclusions visant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010, en ce que celle-ci déciderait de sa réaffectation.
42 En effet, cette décision ne constituerait pas une simple déclaration d’intention. Le CESE aurait, au contraire, décidé de façon définitive de réaffecter le requérant. Cette décision ferait donc grief à ce dernier, contrairement à ce que le Tribunal de la fonction publique a jugé. Selon le requérant, c’est donc bien le 3 mars 2010 qu’il a été privé de ses fonctions.
43 Dans la réplique, le requérant ajoute que la décision du 3 mars 2010 est la base juridique de la décision de réaffectation et que son contenu doit être examiné pour se prononcer, en toute connaissance de cause, sur la légalité de cette réaffectation. Par ailleurs, le requérant fait valoir qu’il conteste la qualification juridique des faits opérée par le Tribunal de la fonction publique et non des constats factuels.
44 Le CESE s’interroge, d’abord, sur l’intérêt à agir du requérant, et plus généralement sur le caractère opérant de cette branche. En tout état de cause, cette branche ne serait pas fondée dès lors que la décision du 3 mars 2010 n’affectait pas directement et immédiatement les intérêts du requérant. Par ailleurs, en affirmant qu’il aurait été privé de ses fonctions le 3 mars 2010, le requérant contesterait les faits, ce qui serait irrecevable au stade du pourvoi.
45 Il y a lieu de rappeler que, conformément à la jurisprudence, constituent des actes faisant grief les seules mesures émanant de l’autorité compétente et renfermant une prise de position définitive de l’administration qui produit des effets juridiques obligatoires de nature à affecter directement et immédiatement les intérêts du requérant, en modifiant, de façon caractérisée, la situation juridique de celui-ci (voir ordonnance du Tribunal du 13 décembre 2011, Marcuccio/Commission, T-311/09 P, non encore publiée au Recueil, point 74, et la jurisprudence citée).
46 En l’espèce, le Tribunal de la fonction publique a considéré, à bon droit, que la décision du 3 mars 2010 était limitée à l’annonce d’une réaffectation future du requérant, dont la date et les modalités n’avaient pas encore été définies. Il ne saurait donc être soutenu, comme le fait le requérant, qu’un tel acte a causé des effets juridiques obligatoires de nature à affecter directement et immédiatement ses intérêts, conformément à la jurisprudence mentionnée au point 45 ci-dessus. Le fait que le contenu de la décision du 3 mars 2010 puisse être pertinent dans le cadre de l’examen de la légalité de la décision de réaffectation qui est intervenue par la suite ne permet pas de conclure que la décision du 3 mars 2010, en tant que simple annonce d’une telle décision, fait grief au requérant.
47 Il résulte de ce qui précède que le Tribunal de la fonction publique n’a pas violé la notion d’« acte faisant grief » en déclarant irrecevables les conclusions du requérant tendant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010, en ce qu’elle aurait impliqué, selon lui, sa réaffectation.
48 La première branche du premier moyen doit, dès lors, être rejetée, sans qu’il soit besoin d’examiner les arguments du CESE concernant l’absence d’intérêt à agir du requérant et le caractère inopérant de cette branche.
Sur la seconde branche du premier moyen, relative à l’irrecevabilité des conclusions visant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010 en tant que celle-ci rejetait la demande de transmission de l’information à l’OLAF
49 À l’appui de la seconde branche, le requérant allègue d’abord que le Tribunal de la fonction publique a dénaturé le dossier en procédant à une catégorisation inexacte et réductrice des faits dénoncés dans la note du 7 décembre 2009. Il soutient ensuite que la qualification du rejet de sa demande de transmission des informations à l’OLAF est inexacte.
Sur la dénaturation du dossier résultant d’une catégorisation inexacte et réductrice des faits dénoncés par le requérant
50 Le requérant fait observer que, aux points 44 à 46 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a regroupé les faits dénoncés dans la note du 7 décembre 2009 en deux catégories. La première catégorie concernerait le harcèlement moral qu’il a subi et la demande d’assistance qui y est relative. La seconde catégorie concernerait la demande de saisine de l’OLAF pour des faits préjudiciables aux intérêts du CESE qui ne concernaient pas directement le requérant. Or, selon le requérant, cette catégorisation est inexacte et réductrice, dénature le dossier et fait obstacle à une appréhension globale des faits visés dans la note du 7 décembre 2009. En effet, si certains faits étaient identifiés par le requérant, dans ladite note, comme relevant du harcèlement moral, ils étaient également inclus parmi les faits signalés au titre de l’article 22 bis du statut et visés dans la demande de saisine de l’OLAF. Il s’agirait en particulier des pressions illégitimes exercées sur le service juridique dont le requérant était le chef, des insultes proférées et des pressions exercées à son égard, ainsi que du pourvoi irrégulier du poste de directeur de la direction des affaires générales du CESE, en raison des modifications apportées irrégulièrement à l’avis de vacance publié pour ce poste.
51 De même, certains faits dénoncés seraient couverts par chacune des quatre demandes adressées au bureau.
52 Le CESE soutient que le requérant n’a pas démontré une dénaturation des faits. En réalité, le requérant chercherait à mettre en cause la constatation factuelle figurant au point 63 de l’arrêt attaqué, selon laquelle les faits dénoncés dans sa demande de saisine de l’OLAF ne le concernaient pas directement.
53 En premier lieu, il convient de constater que l’affirmation du requérant selon laquelle « certains faits dénoncés » seraient couverts par chacune des quatre demandes adressées au bureau n’est nullement étayée.
54 Or, conformément à la jurisprudence, lorsqu’un requérant allègue une dénaturation d’éléments de preuve par le Tribunal, il doit indiquer de façon précise les éléments qui auraient été dénaturés par cette juridiction et démontrer les erreurs d’analyse qui, dans son appréciation, auraient conduit le Tribunal à cette dénaturation (voir arrêt de la Cour du 9 juin 2011, Comitato « Venezia vuole vivere » e.a./Commission, C-71/09 P, C-73/09 P et C-76/09 P, Rec. p. I-4727, point 152, et la jurisprudence citée). L’argument du requérant doit, dès lors, être rejeté comme irrecevable.
55 En second lieu, en ce qui concerne l’argument du requérant relatif à la dénaturation du dossier, en ce que le Tribunal de la fonction publique aurait considéré que sa demande de saisine de l’OLAF ne s’appuyait que sur des faits ne le concernant pas directement, il convient de relever que, aux points 43 à 46 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a interprété la teneur de la note du 7 décembre 2009 dans le sens qu’elle contenait deux demandes intégralement distinctes, à savoir :
– d’une part, une dénonciation de faits de harcèlement moral sous la forme, pour l’essentiel, de pressions illégitimes exercées sur le service juridique, accompagnée d’une demande d’assistance sur la base de l’article 24 du statut (arrêt attaqué, point 45) ;
– d’autre part, une demande de saisine de l’OLAF en application de l’article 22 bis du statut, signalant des faits qui ne concernaient pas directement le requérant, mais étaient selon lui susceptibles de porter atteinte aux intérêts du CESE (arrêt attaqué, point 46).
56 En dissociant ainsi les illégalités alléguées concernant directement le requérant, qui auraient uniquement été invoquées à l’appui de sa demande d’assistance, de celles invoquées au soutien de sa demande de transmission à l’OLAF d’informations, lesquelles ne concerneraient pas directement le requérant, le Tribunal de la fonction publique a dénaturé le contenu de la note du 7 décembre 2009.
57 En effet, l’interprétation de la note susmentionnée, retenue aux points 45 et 46 de l’arrêt attaqué, est en contradiction avec la teneur de ladite note, dans laquelle le requérant a invoqué explicitement, parmi les irrégularités signalées au titre de l’article 22 bis du statut, certains faits le concernant directement, tels que l’exercice de pressions illégitimes sur le service juridique dont il était le chef d’unité.
58 À cet égard, il ressort en particulier du point 5.2 de la note du 7 décembre 2009 que les faits se rapportant à ces pressions sont mentionnés à l’appui des allégations relatives, d’une part, à des manquements graves aux obligations des fonctionnaires signalés au titre de l’article 22 bis du statut et, d’autre part, au harcèlement moral invoqué à l’appui de la demande d’assistance.
59 En outre, au point 9.2 de ladite note, relatif en substance à la demande d’assistance consistant à soustraire le service juridique de la responsabilité du secrétaire général pour le placer sous la responsabilité directe du président du CESE, le requérant a souligné la nécessité d’ouvrir une enquête administrative. Or, au point 9.1 de la même note, relatif à la nécessité d’engager une enquête administrative et de rétablir le bon fonctionnement du secrétariat général, le requérant avait déjà affirmé qu’il y avait lieu d’informer immédiatement l’OLAF en vue de l’ouverture d’une enquête administrative, conformément aux dispositions de la décision no 363/99 A. Tout en insistant sur le fait que la décision finale revenait au CESE, le requérant avait en particulier fait valoir, à l’appui de cette demande d’information de l’OLAF concernant l’ensemble des irrégularités alléguées, indépendamment de la question de savoir si elles le concernaient directement ou non, que le CESE n’avait pas « les moyens techniques et humains pour engager une enquête administrative de cette nature sur son secrétaire général », tandis que l’OLAF avait « les moyens pour le faire avec l’impartialité nécessaire ».
60 Or, au point 63 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a constaté que, « ainsi qu’il [avait] été dit, les faits dénoncés par le requérant dans la demande de saisine de l’OLAF ne le concernaient pas directement […] »
61 En admettant que le Tribunal de la fonction publique se soit ainsi référé à l’interprétation de la note du 7 décembre 2009 retenue aux points 45 et 46 de l’arrêt attaqué, force est de constater que sa conclusion, citée au point 60 ci-dessus, se fonde sur une dénaturation de ladite note (voir points 55 à 59 ci-dessus). L’existence d’une telle dénaturation est corroborée par l’énumération, au même point 63 de l’arrêt, des faits dénoncés au titre de l’article 22 bis du statut, laquelle omet en particulier de mentionner les pressions illégitimes qui auraient été exercées par le secrétariat général sur le service juridique.
Sur la qualification inexacte du rejet de la demande de transmission des informations à l’OLAF
62 Le requérant fait valoir que le Tribunal de la fonction publique a conclu, à tort, aux points 53 à 64 de l’arrêt attaqué, que le rejet de la demande de transmission des informations à l’OLAF, contenu dans la décision du 3 mars 2010, ne lui faisait pas grief, car les informations dénoncées ne le concernaient pas directement.
63 Selon le requérant, la transmission des informations à l’OLAF par le supérieur hiérarchique à la suite de la dénonciation des faits, imposée par l’article 22 bis du statut, renforce la protection du fonctionnaire qui dénonce les illégalités en cause. En l’espèce, le fait pour les dirigeants du CESE d’avoir refusé d’informer l’OLAF aurait eu pour effet de mettre en cause la bonne foi du requérant dans la façon dont il a exécuté l’obligation d’information qui lui était imposée par l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut. Partant, le refus de saisine de l’OLAF constituerait bien une décision lui faisant grief.
64 Le CESE conteste cette argumentation.
65 S’agissant, en premier lieu, de l’argument du requérant selon lequel le refus des dirigeants du CESE d’informer l’OLAF aurait eu pour effet de mettre en cause sa bonne foi, il y a lieu de constater qu’il est d’ordre factuel, spéculatif et non étayé. En outre, il présuppose, à tort, qu’un fonctionnaire qui informe sa hiérarchie d’irrégularités au sens de l’article 22 bis du statut ferait davantage preuve de bonne foi qu’un fonctionnaire qui s’adresse directement à l’OLAF. Or, la protection qu’accorde l’article 22 bis, paragraphe 3, du statut aux fonctionnaires agissant de bonne foi vaut tant pour ceux qui s’adressent à leur hiérarchie que pour ceux qui s’adressent directement à l’OLAF. L’argument du requérant doit, dès lors, être rejeté.
66 En second lieu, le requérant réitère l’argument selon lequel le Tribunal de la fonction publique a fait une application erronée du critère qu’il a fixé aux points 60 et 62 de l’arrêt attaqué. Il rappelle que, selon ce critère, le refus d’un supérieur hiérarchique, qui a reçu d’un fonctionnaire des informations telles que celles visées à l’article 22 bis, paragraphe 1, premier alinéa, du statut, de communiquer ces informations à l’OLAF ne saurait constituer un acte faisant grief si ces informations ne concernent pas le fonctionnaire directement.
67 À cet égard, il convient d’observer que, en tout état de cause, indépendamment de la question de savoir si les illégalités dénoncées par un fonctionnaire le concernent ou non directement, un tel refus ne saurait en principe lui faire grief, car le fonctionnaire peut, à tout moment, communiquer les informations à l’OLAF directement, sans l’intervention d’un supérieur hiérarchique. En effet, comme rappelé par le Tribunal de la fonction publique au point 61 de l’arrêt attaqué, il ressort du libellé de l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut que le fonctionnaire peut, s’il le juge utile, s’adresser directement à l’OLAF. L’article 2 de la décision no 363/99 A confirme cette faculté (voir point 105 ci-après). Ainsi, dans l’hypothèse où la personne informée par le fonctionnaire refuse de transmettre l’information à l’OLAF, ce fonctionnaire bénéficie toujours de la possibilité de s’adresser directement à l’OLAF. Partant, un tel refus ne saurait en principe affecter sa situation juridique et statutaire, y compris lorsque les illégalités alléguées le concernent directement.
68 En l’espèce, même si, comme il ressort des points 55 à 61 ci-dessus, l’appréciation du Tribunal de la fonction publique, selon laquelle le refus des supérieurs hiérarchiques de transmettre l’information à l’OLAF ne faisait pas grief au requérant, est inexacte dans la mesure où elle se fonde sur la constatation selon laquelle les faits dénoncés au titre de l’article 22 bis du statut ne l’auraient pas concerné directement, la constatation selon laquelle ce refus ne constituait pas un acte faisant grief demeure, en tout état de cause, légalement justifiée sur la base des considérations exposées au point 67 ci-dessus.
69 À cet égard, il convient de rappeler que, lorsque les motifs d’un arrêt du Tribunal de la fonction publique révèlent une violation du droit de l’Union, mais que son dispositif apparaît fondé pour d’autres motifs, le pourvoi doit être rejeté (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 9 juin 1992, Lestelle/Commission, C-30/91 P, Rec. p. I-3755, point 28).
70 En conséquence, il y a lieu de rejeter la seconde branche du premier moyen.
71 Eu égard à l’ensemble de ces considérations, le premier moyen doit être rejeté dans son ensemble.
2. Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense ainsi que de l’article 41 de la charte des droits fondamentaux
72 Le requérant fait valoir que le Tribunal de la fonction publique a méconnu ses droits de la défense et l’article 41 de la charte des droits fondamentaux en concluant, au point 118 de l’arrêt attaqué, qu’il avait été en mesure de faire connaître son point de vue avant la décision de réaffectation, intervenue le 3 mars 2010.
73 Le CESE rétorque que ce moyen avancé dans le cadre du pourvoi n’est qu’une simple répétition du moyen déjà avancé en première instance. En tout état de cause, le moyen ne serait pas fondé.
74 Ainsi qu’il ressort des points 45 à 47 ci-dessus, le Tribunal de la fonction publique a conclu, à bon droit, que la décision du 3 mars 2010, en tant qu’elle se limitait à annoncer la future réaffectation du requérant, ne constituait pas un acte faisant grief au requérant, contrairement à ce que prétend ce dernier.
75 Le requérant ne conteste pas dans le cadre du pourvoi que, à la suite de la notification de la décision du 3 mars 2010, il aurait pu présenter des observations et formuler des souhaits ou des demandes sur sa future réaffectation.
76 Dès lors, le Tribunal de la fonction publique n’a pas violé les droits de la défense du requérant, ni l’article 41 de la charte des droits fondamentaux en considérant que le requérant avait été en mesure de faire connaître son point de vue avant la décision de réaffectation.
77 Le deuxième moyen du requérant doit donc être rejeté.
3. Sur le quatrième moyen, tiré d’une dénaturation du dossier ainsi que d’une violation de l’article 86 du statut, de l’annexe IX du statut, des DGE de l’annexe IX du statut, des droits de la défense et de l’obligation de motivation
78 Le requérant estime que le Tribunal de la fonction publique a méconnu les obligations incombant à une AIPN saisie d’une demande d’assistance et qu’il a dénaturé le dossier lorsqu’il a considéré, au point 76 de l’arrêt attaqué, que le CESE avait satisfait à l’obligation de procéder à une enquête et que le chef de cabinet avait établi un rapport circonstancié dans lequel il avait examiné et discuté le bien-fondé des différentes accusations formulées par le requérant à l’encontre du secrétaire général.
79 En effet, le requérant fait observer que le mandat du chef de cabinet, qui n’est pas mentionné dans l’arrêt attaqué, indiquait qu’il devait effectuer un examen préliminaire en vue d’un rapport du président au bureau et effectuer, à la suite de chaque audition, un compte rendu succinct. Or, il n’y aurait pas eu de compte rendu, ni de rapport du président. Le requérant en conclut qu’il ne pouvait pas y avoir eu d’enquête ou d’analyse minutieuse du recours et de la plainte, comme indiqué dans la décision du 3 mars 2010.
80 Le Tribunal de la fonction publique n’aurait pas davantage examiné, en méconnaissant à tout le moins son devoir de motivation, la critique du requérant, formulée dans la réplique en première instance, relative à l’absence d’impartialité de l’examen préliminaire et de la personne qui en avait été en charge. Dans la réplique, le requérant précise qu’il n’avait pas formulé cette critique dans la requête en première instance, car il n’a eu accès au rapport du chef de cabinet qu’à un stade ultérieur.
81 Enfin, selon le requérant, c’est à tort que le Tribunal de la fonction publique aurait écarté, au point 77 de l’arrêt attaqué, la nécessité d’une enquête administrative au sens de l’article 86, paragraphe 2, du statut, au motif que la demande d’assistance ne contenait aucun élément qui aurait justifié, sans même procéder préalablement à un examen préliminaire, l’ouverture d’une telle enquête. Les nombreux points de l’arrêt attaqué consacrés à l’analyse des griefs du requérant concernant le harcèlement et les irrégularités dénoncées conformément à l’article 22 bis du statut prouveraient le contraire. Dans la réplique, le requérant précise qu’il vise à contester l’appréciation juridique des faits opérée par le Tribunal de la fonction publique au point 77 de l’arrêt attaqué. Le requérant relève également que le rapport établi par le chef de cabinet du président n’a pas constitué l’enquête administrative visée notamment par l’article 2 des DGE de l’annexe IX du CESE.
82 Le CESE conteste les arguments du requérant, qu’il estime comme étant irrecevables ou non fondés.
83 À cet égard, il y a lieu de constater, à l’instar du CESE, que, sous le couvert d’une contestation de l’appréciation juridique des faits opérée par le Tribunal de la fonction publique et d’une dénaturation du dossier, le requérant vise à contester, dans le cadre du présent moyen, certaines appréciations factuelles opérées par ce dernier, à savoir, premièrement, que le chef de cabinet avait établi un rapport circonstancié dans lequel il avait examiné et discuté le bien-fondé des différentes accusations formulées par le requérant à l’encontre du secrétaire général, et, deuxièmement, que la demande d’assistance ne contenait aucun élément qui aurait justifié, sans même procéder préalablement à un examen préliminaire, l’ouverture d’une telle enquête administrative de nature disciplinaire à l’encontre du secrétaire général.
84 Or, l’appréciation des faits ne constitue pas, sous réserve du cas de la dénaturation des éléments de preuve produits devant ce juge, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle du Tribunal statuant sur pourvoi (voir, en ce sens, ordonnances de la Cour du 16 septembre 1997, Koelman/Commission, C-59/96 P, Rec. p. I-4809, point 31, et du Tribunal du 7 décembre 2011, Mioni/Commission, T-274/11 P, non encore publiée au Recueil, point 18).
85 S’agissant de l’absence de réponse du Tribunal de la fonction publique à l’argument du requérant selon lequel le rapport préliminaire n’avait pas été rédigé dans des conditions d’impartialité, il convient de rappeler que l’obligation, pour le Tribunal de la fonction publique, de motiver ses décisions n’implique pas que celui-ci réponde dans le détail à tous les arguments invoqués par les parties, en particulier lorsqu’ils ne revêtent pas un caractère suffisamment clair et précis et ne reposent pas sur des éléments de preuve circonstanciés (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 2 mars 2010, Doktor/Conseil, T-248/08 P, non encore publié au Recueil, point 64, et la jurisprudence citée).
86 En l’espèce, ainsi que le souligne le CESE, l’argument tiré de l’absence d’impartialité du chef de cabinet du président du CESE formulé par le requérant était lapidaire et démuni de tout élément de preuve.
87 Dans ces conditions, le Tribunal de la fonction publique n’a pas violé l’obligation de motivation en ne répondant pas de manière explicite à cet argument.
88 Il résulte de ce qui précède que le quatrième moyen du requérant doit être rejeté comme étant partiellement irrecevable et partiellement non fondé.
4. Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation des règles relatives à la compétence de l’auteur de l’acte, de l’article 22 bis du statut ainsi que de l’article 72 du règlement intérieur
89 Le requérant estime que le Tribunal de la fonction publique a violé l’article 22 bis du statut et l’article 72 du règlement intérieur en considérant, au point 70 de l’arrêt attaqué, que la décision du 3 mars 2010, en tant que celle-ci avait rejeté la demande d’assistance, a été prise à bon droit par le président.
90 Le requérant fait valoir à cet égard que, si son AIPN était bien le président, la note du 7 décembre 2009 était adressée à l’une des autorités compétentes visées par l’article 22 bis du statut, à savoir le bureau du CESE. Cette autorité était, en outre, l’AIPN du secrétaire général. La compétence du bureau serait confirmée par le fait que la décision du 3 mars 2010 se référait à un mandat que le bureau aurait donné à son président. Le requérant conteste d’ailleurs l’existence d’un tel mandat. Le bureau étant compétent pour répondre à la demande du requérant, c’est à tort que le Tribunal de la fonction publique a estimé, au point 71 de l’arrêt attaqué, que les membres du bureau n’auraient pas dû être associés au traitement de cette demande.
91 Le CESE conteste les arguments du requérant.
92 Il convient de rappeler que, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 57 ci-dessus, la note du 7 décembre 2009 mentionnait, parmi les faits illégaux signalés sur la base de l’article 22 bis du statut, certains faits que le requérant qualifiait également de harcèlement moral au sens de l’article 12 bis du statut, et à l’égard desquels il formulait une demande d’assistance sur la base de l’article 24 du statut.
93 Or, comme le souligne à juste titre le CESE, les points 66 à 72 de l’arrêt attaqué portent uniquement sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010 « en tant que celle-ci a rejeté la demande d’assistance » formulée par le requérant sur la base de l’article 24 du statut.
94 Le requérant ne conteste pas que, conformément à l’article 72, paragraphe 1, troisième tiret, du règlement intérieur, le président est son AIPN. C’est donc à bon droit que le Tribunal de la fonction publique a rejeté le moyen du requérant tiré de l’incompétence du président pour rejeter la demande d’assistance du requérant.
95 Les arguments avancés par le requérant ne sauraient infirmer ce constat.
96 D’une part, le simple fait que la note du 7 décembre 2009 ait été adressée par le requérant au bureau du CESE ne rend pas ce dernier compétent pour statuer sur la demande d’assistance.
97 D’autre part, la circonstance, invoquée par le requérant, que le bureau avait donné mandat au président pour répondre au requérant, peut s’expliquer par le fait que la note du 7 décembre 2009 incluait également une demande de saisine de l’OLAF sur la base de l’article 22 bis du statut.
98 Dans ces conditions, le cinquième moyen doit être rejeté.
5. Sur le troisième moyen, tiré d’une violation des articles 12 bis, 22 bis et 86 du statut et de l’obligation de motivation ainsi que d’une dénaturation du dossier
99 Le troisième moyen du requérant est subdivisé en trois branches. La première branche a trait à l’obligation d’alerter sa hiérarchie, imposée au fonctionnaire par l’article 22 bis du statut. La deuxième branche est tirée d’une interprétation erronée des articles 12 bis et 22 bis du statut et d’une violation de l’obligation de motivation. La troisième branche, avancée à titre subsidiaire, dénonce une application erronée des conditions de l’article 22 bis du statut.
Sur la première branche du troisième moyen, relative à l’obligation imposée par l’article 22 bis du statut
100 Le requérant fait valoir que, contrairement à ce que le Tribunal de la fonction publique aurait établi aux points 54 à 56, 134 et 136 de l’arrêt attaqué, l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut ne confère pas au fonctionnaire le droit ou la possibilité d’alerter sa hiérarchie, mais une obligation. Le Tribunal de la fonction publique aurait donc violé ces dispositions.
101 Dans la réplique et lors de l’audience, le requérant a précisé que sa critique visait l’ensemble de l’arrêt attaqué, car le Tribunal de la fonction publique aurait énoncé de façon « transversale » le principe selon lequel l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut prévoyait un droit et non une obligation, en particulier dans le cadre de l’examen des conditions de mise en œuvre de cette disposition. Or, les conditions d’appréciation de l’exercice d’un droit seraient différentes de celles de l’exercice d’une obligation lorsqu’il est question d’apprécier la bonne foi du fonctionnaire.
102 Premièrement, le CESE fait valoir que cette branche n’est pas fondée. Le Tribunal de la fonction publique, qui a cité intégralement l’article 22 bis du statut dans l’arrêt attaqué, n’aurait nullement méconnu que cette disposition prévoyait aussi une obligation. Deuxièmement, le CESE fait valoir, en substance, que cette branche est également inopérante, dans la mesure où le requérant ne précise pas l’incidence de l’erreur prétendument commise par le Tribunal de la fonction publique sur les conclusions auxquelles celui-ci est arrivé dans l’arrêt attaqué.
103 Il découle du libellé et de la finalité de l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut que cet article impose aux fonctionnaires ayant connaissance de faits laissant présumer l’existence de certaines irrégularités ou de comportements fautifs graves, une obligation d’en informer soit leur hiérarchie, soit l’OLAF.
104 En effet, l’article 22 bis du statut instaure un système d’alerte s’imposant en principe à tous les fonctionnaires, dans le but de protéger les intérêts de l’Union contre des activités illégales éventuelles préjudiciables aux intérêts de l’Union, ou des conduites pouvant constituer des manquements graves aux obligations des fonctionnaires de l’Union. Partant, cet article vise, pour des fonctionnaires ayant connaissance de faits pouvant laisser présumer l’existence d’activités illégales ou de manquements graves, à déclencher une procédure qui permette à l’OLAF de décider de mener ou non une enquête, afin d’assurer la sauvegarde d’intérêts de l’Union contre des comportements irréguliers susceptibles de relever de poursuites administratives ou pénales, comme l’énoncent en particulier le considérant 6 et l’article 2, paragraphe 1, deuxième alinéa, sous b), de la décision 1999/352/CE, CECA, Euratom de la Commission, du 28 avril 1999, instituant l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) (JO L 136, p. 20).
105 En outre, cette obligation d’information est confirmée par la décision no 363/99 A, par laquelle le CESE, au titre de son autonomie administrative, a confié à l’OLAF la mission d’effectuer en son sein des enquêtes administratives destinées à y rechercher les faits graves, liés à l’exercice d’activités professionnelles, pouvant constituer un manquement aux obligations des fonctionnaires de l’Union, ainsi qu’il ressort du considérant 4 de cette décision. En effet, l’article 2 de ladite décision, intitulé « Obligation d’information », énonce que tout fonctionnaire ou agent du CESE ayant connaissance de tels faits graves, susceptibles de poursuites disciplinaires et, le cas échéant pénales, ou d’illégalités portant atteinte aux intérêts de l’Union, est tenu d’en informer sans délai son chef de service ou son directeur général. Si le fonctionnaire l’estime utile, il a la faculté d’en informer son secrétaire général ou l’OLAF directement.
106 Il ressort de ces considérations que l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut prévoit, dans l’intérêt de l’Union, une obligation qui s’impose, en principe, à tous les fonctionnaires. Cet article ne contient cependant pas de dispositions concernant des cas où les illégalités ou les manquements graves résultent de comportements qui peuvent également être qualifiés de harcèlement au sens de l’article 12 bis, paragraphes 3 et 4, du statut. Or, dans ces cas particuliers, le fonctionnaire concerné bénéficie des droits conférés par l’article 12 bis du statut et dispose, à cet égard, de la possibilité de présenter une demande d’assistance fondée sur l’article 24 du statut. L’obligation générale d’information imposée par l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut peut dès lors s’avérer incompatible avec la protection spéciale que l’article 12 bis, paragraphe 2, première phrase, du statut entend explicitement conférer à la victime de harcèlement. Partant, il y a lieu de considérer que le fonctionnaire qui s’estime harcelé ne saurait être tenu de dénoncer les faits de harcèlement. Néanmoins, il ne saurait être exclu qu’il puisse, s’il le souhaite, dénoncer les faits de harcèlement sur le fondement de l’article 22 bis, dans l’intérêt de l’Union, le harcèlement « pouvant constituer un grave manquement aux obligations des fonctionnaires » au sens de cet article.
107 En l’espèce, le Tribunal de la fonction publique a interprété de manière erronée les dispositions de l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut. En effet, il ressort de l’emploi des termes « droit » aux points 54 et 55 de l’arrêt attaqué, « possibilité » aux points 56 et 136 de l’arrêt attaqué, et « choisit » au point 136 de l’arrêt attaqué, que le Tribunal de la fonction publique a considéré que l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut conférait un droit au fonctionnaire, et qu’il a de ce fait méconnu le caractère en principe obligatoire de cette disposition, sous réserve de la situation particulière d’un fonctionnaire s’estimant victime de harcèlement constitutif d’une illégalité ou d’un manquement graves.
108 Toutefois, comme il ressort du point 108 ci-dessus, dans le cas particulier d’un fonctionnaire qui s’estime victime de harcèlement, comme c’est le cas du requérant, celui-ci a une simple faculté, sur le fondement de l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut, de dénoncer les faits de harcèlement. L’argument du requérant est donc inopérant.
109 Contrairement à ce que le CESE fait valoir, le requérant a bien précisé l’incidence de cette erreur de droit sur l’appréciation, par le Tribunal de la fonction publique, de la bonne foi du requérant lorsqu’il a transmis sa note du 7 décembre 2009 à ses supérieurs hiérarchiques. Ces conséquences seront examinées dans le cadre de la troisième branche du présent moyen (voir points 139 à 164 ci-après).
110 La première branche du troisième moyen doit, dès lors, être accueillie.
Sur la deuxième branche du troisième moyen, tirée d’une interprétation erronée des articles 12 bis et 22 bis du statut et d’une violation de l’obligation de motivation
111 Le requérant avance deux griefs au soutien de cette branche, par laquelle il conteste la définition des critères d’appréciation de la bonne foi retenue dans l’arrêt attaqué. Il invoque, premièrement, la nécessité d’effectuer un examen individuel au regard de l’article 12 bis du statut par rapport à l’article 22 bis du statut et, deuxièmement, le caractère erroné de l’interprétation des conditions d’application de l’article 22 bis du statut par le Tribunal de la fonction publique.
Sur le premier grief, relatif à la nécessité d’effectuer un examen individuel au regard de l’article 12 bis du statut par rapport à l’article 22 bis du statut
112 Le requérant soutient que les articles 12 bis et 22 bis du statut ont des champs d’application différents et qu’ils ne sauraient faire l’objet d’un examen unique. Or, les critères retenus par le Tribunal de la fonction publique pour apprécier la bonne foi du requérant au sens de ces deux dispositions auraient principalement été définis en fonction du seul article 22 bis du statut. Ce faisant, le Tribunal de la fonction publique aurait méconnu la spécificité de l’article 12 bis du statut et violé son obligation de motivation.
113 Le CESE conteste les arguments du requérant.
114 Il ressort tant de l’article 12 bis, paragraphe 2, du statut que de l’article 22 bis, paragraphe 3, du statut que le fonctionnaire qui fournit des informations au sens de ces deux dispositions « ne subit aucun préjudice de la part de l’institution, pour autant qu’il ait agi de bonne foi ». Ainsi, la bonne foi est imposée comme condition d’application des deux dispositions.
115 Certes, le requérant fait observer, à juste titre, que les articles 12 bis et 22 bis du statut ont des champs d’application différents. En effet, la notion de harcèlement est définie explicitement aux paragraphes 3 et 4 de l’article 12 bis et se distingue des notions d’« activité illégale […] préjudiciable aux intérêts de [l’Union] » et de « grave manquement aux obligations des fonctionnaires de [l’Union] », visées à l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut.
116 Cependant, en l’espèce, il y a lieu de rappeler que, dans la note du 7 décembre 2009, les manquements graves invoqués à l’appui des allégations de harcèlement, tels que les pressions illégitimes exercées par le secrétaire général sur le service juridique, n’ont pas uniquement fait l’objet d’une demande d’assistance de la part du requérant, fondée sur les articles 12 bis et 24 du statut, en vue d’obtenir la protection du CESE contre ces pratiques, mais ont également été signalées sur la base de l’article 22 bis du statut. Dans ces conditions, le requérant ayant décidé de se prévaloir de la faculté d’informer ses supérieurs hiérarchiques, sur la base de l’article 22 bis du statut, des illégalités également constitutives selon lui de harcèlement, il était tenu de se conformer aux conditions énoncées par cet article (voir point 114 ci-dessus).
117 C’est dans ce contexte que le Tribunal de la fonction publique a, certes, énoncé quatre critères, mais a apprécié la bonne foi du requérant au regard de trois critères qu’il a au préalable définis de la manière suivante. Au point 135 de l’arrêt attaqué, il a affirmé que les irrégularités dénoncées au titre de l’article 22 bis du statut devaient présenter un caractère d’évidente gravité. Le contenu du premier critère, relatif à la gravité, a ainsi été spécifié en relation avec l’article 22 bis du statut. Le deuxième critère, relatif au caractère vraisemblable des informations divulguées, a été défini, au point 136 de l’arrêt attaqué, aux fins de l’appréciation de la bonne foi de l’intéressé, au regard tant de l’article 12 bis que de l’article 22 bis du statut. Quant au troisième critère, relatif aux moyens utilisés par le fonctionnaire pour procéder à la divulgation, il a été défini au point 137 de l’arrêt attaqué, lequel spécifie le contenu de ce critère en ce qui concerne en particulier les dénonciations au titre de l’article 22 bis du statut.
118 Or, dans le cadre du premier grief, le requérant s’est limité à faire observer sommairement que les articles 12 bis et 22 bis du statut ont des champs d’application différents et nécessitent un examen particulier, sans préciser pour autant en quoi les critères d’appréciation de la bonne foi, examinés par le Tribunal de la fonction publique, seraient erronés dans le cadre de l’analyse de la bonne foi du fonctionnaire concerné, lorsqu’il signale, comme en l’espèce, des faits de harcèlement non seulement dans le cadre d’une demande d’assistance fondée sur les articles 12 bis et 24 du statut, mais également sur la base de l’article 22 bis du statut. Le requérant n’a pas non plus apporté de précisions à cet égard dans le cadre du second grief, examiné ci-après, relatif aux critères d’appréciation de la bonne foi définis dans l’arrêt attaqué.
119 Il convient, dès lors, de rejeter le premier grief avancé par le requérant.
Sur le second grief, tiré d’une interprétation erronée des conditions d’application de l’article 22 bis du statut
120 Le requérant fait valoir que le Tribunal de la fonction publique a défini de manière erronée les conditions d’application de l’article 22 bis, paragraphe 3, du statut, en exigeant, pour établir la bonne foi du fonctionnaire concerné, que l’activité illégale dénoncée soit grave et que les informations divulguées soient authentiques ou vraisemblables, et en attachant de l’importance aux moyens utilisés par le fonctionnaire pour la transmission de ces informations. Même si l’intitulé du second grief a trait uniquement aux conditions d’application de l’article 22 bis du statut, le requérant fait valoir également dans le cadre de ce grief que l’article 12 bis du statut n’impose pas non plus que les informations divulguées soient authentiques ou vraisemblables.
– Gravité de l’activité illégale dénoncée
121 Selon le requérant, il ressort de la lecture de l’article 22 bis du statut que la condition de la gravité n’est pas imposée lorsqu’il s’agit de l’obligation de dénoncer des activités illégales préjudiciables aux intérêts de l’Union. L’article 22 bis du statut n’énumérerait la fraude et la corruption qu’à titre d’exemples d’activités illégales. La gravité des actes dénoncés serait, en revanche, explicitement prévue dans la seconde hypothèse visée par cette disposition, à savoir la dénonciation d’une conduite d’un fonctionnaire en rapport avec l’exercice de ses fonctions pouvant constituer un « grave manquement » à ses obligations.
122 Le CESE conteste les arguments du requérant.
123 À cet égard, il y a lieu de constater que l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut vise des actes illégaux « préjudiciables aux intérêts de l’Union », ce qui implique nécessairement que ces actes présentent un certain degré de gravité. De même, les exemples donnés dans cette disposition, à savoir la fraude et la corruption, sont intrinsèquement graves. Dans ces conditions, conformément à sa finalité (voir point 104 ci-dessus), le mécanisme d’alerte prévu par l’article 22 bis ne devrait être déclenché que dans des situations où les informations apportées visent des comportements qui revêtent une certaine gravité. En effet, comme le relève par ailleurs le Tribunal de la fonction publique à la fin du point 136 de l’arrêt attaqué, cette disposition doit se concilier avec les obligations d’objectivité et d’impartialité qui s’imposent aux fonctionnaires, avec l’obligation de veiller à la dignité de leur fonction et avec leur devoir de loyauté ainsi qu’avec l’obligation de respecter l’honneur et la présomption d’innocence des personnes visées.
124 Il résulte de ce qui précède que le Tribunal de la fonction publique n’a pas commis d’erreur, au point 135 de l’arrêt attaqué, en imposant la gravité des faits ou des comportements dénoncés comme condition d’application de l’article 22 bis, paragraphe 3, du statut.
– Authenticité ou caractère vraisemblable des informations transmises par le fonctionnaire
125 Le requérant fait valoir que ni l’article 22 bis du statut ni l’article 12 bis du statut ne sauraient requérir du fonctionnaire de devoir s’assurer que les irrégularités ou les accusations reposent sur des faits exacts. Conformément à la jurisprudence, il suffirait que soient communiqués des faits concrets dont une première appréciation a pu conduire le fonctionnaire à présumer raisonnablement l’existence d’une activité illégale ou d’un manquement grave (arrêt du Tribunal de la fonction publique du 13 janvier 2011, Nijs/Cour des comptes, non encore publié au Recueil, point 66). Le fonctionnaire qui réclame la protection ne devrait apporter qu’un commencement de preuve, l’institution devant prendre les mesures appropriées, en engageant notamment une enquête, afin d’établir les faits à l’origine de la plainte. L’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme, Heinisch c. Allemagne du 21 juillet 2011 (no 28274/08, § 79), cité par le Tribunal de la fonction publique, n’infirmerait pas ces constats, dès lors que cet arrêt a été rendu au regard de la liberté d’expression, dont l’exercice suppose l’authenticité de l’information divulguée. Par ailleurs, l’exercice d’une telle liberté serait un droit, contrairement à l’obligation imposée par l’article 22 bis du statut.
126 Le requérant ajoute que, lorsque l’arrêt attaqué se réfère, au point 136, aux devoirs d’objectivité et d’impartialité, au respect de la dignité de la fonction, au respect de l’honneur des personnes et à la présomption d’innocence au soutien du deuxième facteur qu’il a énoncé, il impose des obligations qui ne sont pas prévues par l’article 22 bis du statut. Ces obligations auraient été définies dans l’arrêt Nijs/Cour des comptes, point 25 supra, dans le contexte de mesures disciplinaires prises à l’égard du requérant en raison de la divulgation d’informations par ce dernier, et non aux fins de l’interprétation de l’article 22 bis du statut. Le Tribunal de la fonction publique se serait d’ailleurs limité à examiner dans cet arrêt l’article 22 ter du statut.
127 Le CESE est d’avis que le requérant prétend contester, à tout le moins indirectement, les constats factuels figurant aux points 139 à 149 de l’arrêt attaqué, ce qui serait irrecevable au stade d’un pourvoi. En toute hypothèse, les arguments du requérant seraient soit inopérants, soit non fondés.
128 À cet égard, il y a lieu de constater que les fonctionnaires sont soumis à plusieurs obligations statutaires. Il s’agit non seulement de l’obligation prévue à l’article 22 bis du statut, mais également des obligations d’objectivité, d’impartialité et de loyauté découlant de l’article 11, premier alinéa, du statut, ainsi que de dignité de la fonction visée à l’article 12 du statut. En outre, le fonctionnaire se doit, comme tout citoyen, de respecter le principe de la présomption d’innocence et la dignité d’autrui.
129 Partant, lorsqu’un fonctionnaire communique des informations au titre des articles 12 bis et 22 bis du statut, il ne saurait s’affranchir de ses autres obligations et devoirs. Au contraire, il doit faire preuve de discernement, afin de ne pas nuire indûment à ses collègues ou au bon fonctionnement de son service. Or, la communication d’informations non vraisemblables ou de faits dépourvus de tout fondement est susceptible d’avoir de tels effets préjudiciables.
130 S’agissant de l’argument relatif à la nature des faits sur lesquels les illégalités ou les irrégularités reposent, il suffit de constater qu’il se fonde sur une interprétation erronée de l’arrêt attaqué. Contrairement à ce que le requérant soutient, le Tribunal de la fonction publique n’a aucunement établi que le fonctionnaire devait s’assurer que les irrégularités ou les accusations reposaient sur des faits exacts. En effet, au point 136 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a jugé que le fonctionnaire devait « s’assurer que les accusations qu’il port[ait] reposent sur des faits exacts, ou, à tout le moins, qu’elles [étaient] fondées sur une ‘base factuelle suffisante’ ». En ce qui concerne la notion de « base factuelle suffisante », le Tribunal de la fonction publique a précisé que cette condition était remplie dès lors que le fonctionnaire communiquait des faits concrets authentiques ou, à tout le moins, vraisemblables et dont une première appréciation a pu le conduire à présumer raisonnablement l’existence d’une activité illégale ou d’un manquement grave, au sens de l’article 22 bis du statut. Il en va de même concernant la dénonciation des pratiques de harcèlement au sens de l’article 12 bis du statut.
131 Ensuite, au point 149 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a conclu que la note du 7 décembre 2009 ne contenait aucun élément laissant présumer l’existence d’un harcèlement moral. Cette constatation n’est pas en contradiction avec le principe établi au point 136 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique s’étant limité à juger que, en l’espèce, les faits communiqués ne laissaient pas présumer l’existence d’un harcèlement. Ainsi, l’argument du requérant ne peut pas prospérer, dans la mesure où il reproche au Tribunal de la fonction publique d’avoir fait une constatation qui ne ressort pas de l’arrêt attaqué, à savoir que le fonctionnaire doit communiquer des faits exacts.
132 À la lumière de ce qui précède, les arguments du requérant ne sauraient être accueillis.
– Moyens utilisés par le fonctionnaire pour la transmission des informations
133 Le requérant fait valoir que la façon dont le fonctionnaire a diffusé l’information n’est pas un critère pertinent pour apprécier la bonne foi du fonctionnaire. Au contraire, l’article 22 bis du statut prévoit plusieurs modes de communication dans la mesure où le fonctionnaire peut s’adresser à « son supérieur hiérarchique direct ou [à] son directeur général ou encore, s’il le juge utile, [au] secrétaire général, ou toute personne de rang équivalent, ou directement [à] l’[OLAF] ». En toute hypothèse, le requérant se serait bien adressé à l’une des autorités visées par l’article 22 bis du statut. Dans la réplique, le requérant précise que conclure le contraire constituerait une dénaturation du dossier.
134 Le CESE rétorque que la pertinence du critère d’appréciation de la bonne foi, qui a trait aux moyens de communication de l’information, ressort d’une simple lecture de l’article 22 bis du statut et que Tribunal de la fonction publique a fait une correcte appréciation de ce facteur en l’espèce. Par ailleurs, le requérant entendrait remettre en cause des constatations factuelles et la nature du courrier qu’il a adressé aux autres membres du bureau, ce qui serait irrecevable au stade du pourvoi.
135 À cet égard, il convient de rappeler, d’une part, que les informations visées à l’article 22 bis du statut sont souvent de nature délicate et, d’autre part, que les fonctionnaires sont tenus d’appliquer cette disposition avec discernement (voir point 129 ci-dessus). Le choix de divulguer ces informations au-delà de la sphère des personnes explicitement désignées par cette disposition est donc pertinent pour apprécier si le fonctionnaire a agi de bonne foi.
136 Dans ces conditions, le Tribunal de la fonction publique n’a pas commis d’erreur en estimant, au point 137 de l’arrêt attaqué, que les moyens utilisés par le requérant pour diffuser les informations étaient un facteur d’appréciation pertinent dans le cadre de l’application de l’article 22 bis, paragraphe 3, du statut.
137 Enfin, l’argument du requérant selon lequel il s’était bien adressé à l’une des autorités visées par l’article 22 bis du statut ne concerne pas la définition d’un critère d’appréciation de la bonne foi par le Tribunal de la fonction publique, mais l’application concrète de ce critère. Cet argument sera dès lors analysé ci-après dans le cadre de la troisième branche du troisième moyen (voir points 139 à 164 ci-après).
138 Il résulte de tout ce qui précède que le second grief du requérant et, partant, la deuxième branche du troisième moyen doivent être rejetés.
Sur la troisième branche du troisième moyen, tirée d’une application erronée des conditions de l’article 22 bis du statut
139 Le requérant fait valoir que, en toute hypothèse, les conditions d’application de l’article 22 bis du statut ont été irrégulièrement appliquées par le Tribunal de la fonction publique. Même si l’intitulé de cette branche se réfère uniquement à l’article 22 bis du statut, le requérant dénonce également une application erronée des conditions de l’article 12 bis du statut.
140 En particulier, le requérant fait valoir que le Tribunal de la fonction publique s’est rendu coupable de violations du contrôle de l’erreur manifeste et de dénaturations du dossier. Dans la réplique, le requérant ajoute qu’il vise à contester la qualification juridique des faits opérée par le Tribunal de la fonction publique.
141 Le requérant avance, en substance, trois griefs au soutien de cette branche.
142 En premier lieu, le requérant estime avoir apporté suffisamment d’éléments permettant de présumer raisonnablement l’existence tant d’un harcèlement moral que d’activités illégales ou de manquements graves au sens des articles 12 bis et 22 bis du statut. Il insiste, à cet égard, premièrement, sur l’analyse détaillée que le Tribunal de la fonction publique a faite, aux points 84 à 102 de l’arrêt attaqué, des griefs relatifs au harcèlement moral, ce qui démontrerait que ces derniers n’étaient pas sans substance, deuxièmement, sur le caractère étayé de la note du 7 décembre 2009 et de ses annexes, troisièmement, sur les enquêtes qui auraient été engagées par la suite par l’OLAF et par le médiateur européen concernant certains faits dénoncés par le requérant, et, quatrièmement, sur les irrégularités et problèmes constatés par le chef de cabinet lui-même dans son rapport préliminaire.
143 En deuxième lieu, le requérant fait valoir que le Tribunal de la fonction publique a appliqué un critère d’appréciation erroné dans son examen, aux points 142 à 149 de l’arrêt attaqué, des éléments qu’il avait dénoncés dans sa note du 7 décembre 2009. En effet, le Tribunal de la fonction publique, bien que se référant, aux points 141 et 149 de l’arrêt attaqué, à des faits laissant présumer un harcèlement moral au sens de l’article 12 bis du statut, ou une activité illégale ou un grave manquement aux obligations des fonctionnaires au sens de l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut, se serait livré, au points 142 et 144 à 148 de l’arrêt attaqué, à un examen détaillé des faits dénoncés dans la note du 7 décembre 2009 non pour apprécier si lesdits faits pouvaient conduire à la présomption visée par les articles 12 bis et 22 bis du statut, mais, au contraire, pour vérifier si ces faits établissaient l’authenticité d’un harcèlement, d’une activité illégale ou d’un grave manquement aux obligations des fonctionnaires.
144 En troisième lieu, le requérant dénonce plusieurs dénaturations du dossier. Le Tribunal de la fonction publique aurait omis d’examiner la promotion irrégulière avec effet rétroactif d’une fonctionnaire, évoquée au point 86 de l’arrêt attaqué, et n’aurait pas évoqué les enquêtes engagées par le médiateur et l’OLAF concernant certains faits qu’il avait dénoncés dans la note du 7 décembre 2009, ni le fait que, avant de soumettre cette note, le requérant avait tenté, sans succès, à plusieurs reprises de trouver une solution à cette situation qui était préjudiciable tant pour lui que pour l’institution. Le requérant fait également valoir que le Tribunal aurait dénaturé le dossier en statuant, au point 150 de l’arrêt attaqué, qu’il n’avait pas respecté les formes de communication prescrites par l’article 22 bis du statut. En effet, le requérant aurait particulièrement veillé à une communication mesurée de l’information en ne s’adressant pas d’emblée à tous les membres du bureau, mais uniquement à certains d’entre eux.
145 En quatrième lieu, le requérant a souligné, lors de l’audience, que le Tribunal de la fonction publique a examiné les différents faits invoqués de façon isolée, sans jamais les analyser dans leur ensemble.
146 Le CESE fait valoir, en premier lieu, que le requérant fait une lecture erronée de l’arrêt attaqué lorsqu’il affirme que le Tribunal de la fonction publique a vérifié, aux points 142 à 149 de l’arrêt attaqué, si les faits dénoncés par le requérant étaient établis. En effet, le Tribunal de la fonction publique aurait uniquement examiné si la note du 7 décembre 2009 contenait des éléments permettant objectivement de présumer raisonnablement l’existence d’agissements contraires aux articles 12 bis et 22 bis du statut et aurait conclu que ce n’était pas le cas.
147 En second lieu, le CESE fait observer que le requérant entend, en réalité, remettre en question les appréciations factuelles du Tribunal de la fonction publique aux points 142 à 150 de l’arrêt attaqué, ce qui serait irrecevable au stade d’un pourvoi. Même en considérant que les arguments du requérant se limitent à contester une qualification juridique des faits, ils ne seraient pas fondés.
148 À titre liminaire, il y a lieu d’observer que la question de savoir si un fonctionnaire a agi de bonne foi ne saurait s’apprécier de façon abstraite et nécessite la prise en compte de tous les éléments du contexte dans lequel le fonctionnaire a transmis les informations dénonçant certains faits à sa hiérarchie. En l’espèce, il ressort des points 18 et 85 à 100 de l’arrêt attaqué que les relations entre le requérant en sa qualité de chef du service juridique, d’une part, et le secrétaire général, d’autre part, s’étaient considérablement détériorées. Il en ressort également que l’administration n’a pas réagi aux difficultés que le requérant éprouvait et qui avaient généré des dysfonctionnements comme l’exclusion du chef du service juridique d’une affaire qu’il devait normalement traiter, évoquée aux points 89 et 90 de l’arrêt attaqué. De plus, le requérant rappelle, sans être contredit par le CESE, qu’il a cherché à plusieurs reprises à trouver une solution à la situation de travail détériorée avant de déposer la note du 7 décembre 2009.
149 Il y a lieu d’observer également que, ainsi qu’il a été constaté aux points 103 à 106 ci-dessus, l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut prévoit en principe une obligation d’information, et non un droit ou une faculté. Or, comme le souligne à juste titre le requérant, l’existence d’une obligation est susceptible d’avoir une incidence sur la réponse qu’il convient de donner à la question de savoir si un fonctionnaire a agi de bonne foi, au sens de l’article 22 bis, paragraphe 3, du statut, lorsqu’il communique des informations visées au paragraphe 1 de cet article. En effet, la marge d’appréciation du fonctionnaire, qui a connaissance de faits qui sont susceptibles de tomber sous le champ d’application de ce paragraphe 1, est moins large dans une situation où il est soumis à une obligation de communication que dans une situation où il peut librement décider de le faire. Dans le premier cas, il s’expose au risque de se voir infliger une sanction au sens de l’article 86 du statut, alors qu’un tel risque n’existe pas s’il décide de ne pas faire usage d’une faculté.
150 Par conséquent, le fonctionnaire qui éprouve des doutes quant à l’applicabilité de l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut sera plus enclin à communiquer des informations lorsqu’il est soumis à une obligation, que dans le cas inverse.
151 Certes, en l’espèce, une telle obligation d’information ne s’imposait en principe au requérant qu’en ce qui concerne les illégalités qui ne le concernaient pas directement, et non en ce qui concerne les agissements qualifiés de harcèlement moral (voir point 106 ci-dessus).
152 Cependant, il convient de souligner que, eu égard à son niveau de responsabilité, le chef du service juridique d’une institution ou d’un organe est davantage sensible à ses obligations statutaires. En l’espèce, il appartenait dès lors au Tribunal de la fonction publique d’examiner si le requérant, en sa qualité de chef du service juridique du CESE, pouvait légitimement se sentir tenu de signaler, dans les conditions énoncées à l’article 22 bis du statut, les illégalités alléguées qui, à les supposer établies, étaient avant tout susceptibles de porter atteinte au bon fonctionnement de certains services du CESE, y compris pour ce qui est des pressions du secrétaire général sur le service juridique qualifiées de harcèlement moral dans la note du 7 décembre 2009 (voir point 116 ci-dessus).
153 Il s’ensuit que le Tribunal de la fonction publique aurait dû prendre en compte le contexte dans lequel la communication des informations a eu lieu en l’espèce dans le cadre de l’appréciation des critères d’examen de la bonne foi. L’approche parcellaire du Tribunal de la fonction publique a vicié son analyse de ces critères.
154 S’agissant du premier critère, relatif à la gravité des faits dénoncés, le Tribunal de la fonction publique a estimé que ne pouvaient pas être considérés comme étant graves l’absence de sanction disciplinaire par le secrétaire général d’un fonctionnaire qui avait soustrait du matériel au CESE et le refus de saisine de l’OLAF concernant ce cas (arrêt attaqué, point 143), l’acceptation par le secrétaire général du paiement d’un montant d’honoraires à un avocat externe, sur lequel le requérant « a pu légitimement s’interroger » (arrêt attaqué, points 144 et 145), les « erreurs regrettables » constatées par le chef de cabinet du président du CESE dans son analyse des procédures de pourvoi des emplois de directeur de la direction A des travaux consultatifs et de directeur des ressources humaines et financières du CESE (arrêt attaqué, point 146), le fait que le secrétaire général ait occupé ad interim le poste de directeur des ressources humaines de façon relativement longue et qui a été qualifié d’« anormal » par le même chef de cabinet du président du CESE (arrêt attaqué, point 147), ainsi que le fait que le secrétaire général n’ait pas décrit avec suffisamment de précision la nature des fonctions et des attributions du secrétaire général adjoint (arrêt attaqué, point 147).
155 Or, il y a lieu de constater, à l’instar du requérant, que le Tribunal de la fonction publique a examiné chacun de ces cinq faits de façon isolée sans analyser si leur cumul pouvait constituer un comportement grave qui devait être dénoncé par le requérant dans le respect de l’obligation prévue par l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut. En effet, le Tribunal de la fonction publique n’a pas tenu compte de ce que ces faits, mentionnés au point 154 ci-dessus, ne concernaient pas directement le requérant, qui aurait ainsi été tenu de les communiquer en application de l’article 22 bis du statut, si ceux-ci avaient pu laisser présumer l’existence d’un manquement grave aux obligations des fonctionnaires. Par ailleurs, le Tribunal de la fonction publique n’a pas non plus examiné si le cumul de ces cinq faits avec les autres pratiques dénoncées par le requérant et qui le concernaient directement, examinées aux points 142 et 148 de l’arrêt attaqué, pouvait être considéré comme étant un comportement grave dans son ensemble.
156 S’agissant du deuxième critère, relatif au caractère authentique ou vraisemblable des informations transmises, il y a lieu de constater que le Tribunal de la fonction publique, contrairement à ce qu’il a formellement conclu aux points 141 et 149 de l’arrêt attaqué, n’a pas toujours apprécié in concreto si les informations communiquées dans la note du 7 décembre 2009 pouvaient être considérées comme des faits authentiques ou, à tout le moins, vraisemblables « laissant présumer » l’existence d’un harcèlement, d’une activité illégale ou d’un grave manquement aux obligations des fonctionnaires de l’Union. En effet, comme le souligne le requérant, le Tribunal de la fonction publique a, en réalité, cherché à savoir à plusieurs reprises si les faits dénoncés permettaient d’établir ces comportements au lieu de vérifier si ces faits laissaient présumer leur existence.
157 En ce qui concerne, d’une part, des faits dénoncés par le requérant comme étant des illégalités ou de graves manquements au sens de l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut, le Tribunal de la fonction publique a conclu, au point 147 de l’arrêt attaqué, que, selon les pièces du dossier, le secrétaire général n’avait pas usurpé certains pouvoirs, alors qu’il aurait dû examiner si les informations contenues dans ces pièces pouvaient laisser présumer l’existence d’une telle usurpation. Pareillement, au point 148 de l’arrêt attaqué, le Tribunal de la fonction publique a positivement conclu que les faits dénoncés ne constituaient pas une violation par le chef d’unité « Recrutement, carrière, formation » de l’article 11 bis du statut au lieu de vérifier si ces faits pouvaient en laisser présumer l’existence.
158 En ce qui concerne, d’autre part, les faits dénoncés par le requérant sur la base de l’article 12 bis du statut, le Tribunal de la fonction publique a, certes, affirmé, au point 142 de l’arrêt attaqué, que le requérant n’avait apporté aucun élément permettant d’établir, « ou à tout le moins de supposer » qu’il aurait été victime de comportements pouvant être qualifiés de harcèlement moral. Toutefois, le Tribunal de la fonction publique s’est limité à justifier cette affirmation en renvoyant à ce qui « a[vait] été dit plus haut » dans l’arrêt attaqué. À supposer que le Tribunal de la fonction publique ait fait un renvoi à son analyse, faite aux points 62 à 72 de l’arrêt attaqué, relative au moyen du requérant ayant trait à l’existence d’un harcèlement moral, il convient de relever que cette analyse visait à déterminer si l’existence d’un harcèlement moral pouvait être considérée comme établie et n’avait aucun rapport avec l’appréciation de la bonne foi. En effet, aux points 62 à 72 susmentionnés, le Tribunal de la fonction publique a vérifié la réalité des agissements reprochés au secrétaire général par le requérant et a déterminé si ces agissements ont eu pour effet de porter effectivement atteinte à la personnalité, à la dignité ou à l’intégrité physique ou psychique de celui-ci au sens de l’article 12 bis, paragraphe 3, du statut. Or, pour apprécier la bonne foi du requérant, le Tribunal de la fonction publique aurait dû examiner de manière concrète si ces agissements pouvaient être considérés comme des faits authentiques ou, à tout le moins, vraisemblables laissant présumer l’existence d’un harcèlement moral.
159 S’agissant du troisième critère, relatif aux modalités de communication, le Tribunal de la fonction publique observe, au point 150 de l’arrêt attaqué, que le requérant a adressé un courriel à tous les membres du bureau les informant qu’il venait de déposer dans les locaux de leur groupe, à l’intention de chacun d’eux, une enveloppe contenant la copie de sa note du 7 décembre 2009. Le requérant aurait ainsi entendu donner une publicité particulièrement étendue à sa note du 7 décembre 2009 et il aurait donc méconnu l’obligation de faire preuve de la plus grande prudence et de la plus grande retenue dans la publicité donnée à des allégations. Le Tribunal se réfère, à cet égard, à la jurisprudence Nijs/Cour des comptes, précitée.
160 Il incombait au Tribunal de la fonction publique d’apprécier, au vu des circonstances de l’espèce, si une telle obligation avait été respectée par le requérant.
161 Premièrement, il y a lieu d’observer à cet égard que la divulgation à la presse dont il est question dans l’affaire Nijs/Cour des comptes n’a aucun rapport avec la diffusion en interne aux membres du bureau qui constituent, ensemble, l’un des organes du CESE et qui peuvent de ce fait être qualifiés « de personne de tout rang équivalent » au rang des supérieurs hiérarchiques visés par l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut. De plus, le Tribunal de la fonction publique n’explique aucunement les raisons pour lesquelles le requérant aurait dû limiter la diffusion de sa note au président et aux présidents des trois groupes faisant partie du bureau, et non à tous ses membres.
162 Deuxièmement, le Tribunal de la fonction publique aurait dû tenir compte de ce que le requérant n’a transmis aux membres du bureau que la note de onze pages qui résumait les comportements dénoncés, expliqués de manière détaillée dans les nombreuses annexes jointes à cette note.
163 Troisièmement, pour apprécier si la façon d’agir du requérant pouvait être considérée comme mesurée, le Tribunal de la fonction publique aurait dû examiner si la communication de la note du 7 décembre 2009, qui ne saurait être analysée comme un fait isolé, ainsi qu’il a été relevé au point 147 ci-dessus, faisait suite à une série d’événements et d’incidents.
164 Dans ces conditions, il y a lieu d’accueillir la troisième branche du troisième moyen.
165 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu d’accueillir les première et troisième branches du troisième moyen du pourvoi et d’annuler l’arrêt attaqué en ce qu’il a rejeté le quatrième moyen avancé par le requérant en première instance et conclu, au point 151 de l’arrêt attaqué, que ce dernier n’était pas fondé à prétendre que les décisions mettant fin aux fonctions antérieures et de réaffectation auraient été adoptées en violation de l’article 12 bis, paragraphe 2, et de l’article 22 bis, paragraphe 3, du statut, ou auraient constitué une sanction déguisée en méconnaissance de l’article 86 dudit statut.
166 Le pourvoi est rejeté pour le surplus.
Sur le renvoi de l’affaire devant le Tribunal de la fonction publique
167 Conformément à l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe I du statut de la Cour, lorsque le pourvoi est fondé, le Tribunal annule la décision du Tribunal de la fonction publique et statue lui-même sur le litige. Il renvoie l’affaire devant le Tribunal de la fonction publique pour qu’il statue lorsque le litige n’est pas en état d’être jugé.
168 En l’espèce, la question de savoir si le requérant a transmis les informations contenues dans la note du 7 décembre 2009 de bonne foi au sens de l’article 12 bis, paragraphe 2, et de l’article 22 bis, paragraphe 3, du statut implique une réappréciation des faits et des circonstances pertinents, fondée sur un examen des éléments de preuve soumis au Tribunal de la fonction publique à la lumière des critères indiqués dans le présent arrêt. Dès lors, il y a lieu de renvoyer l’affaire devant le Tribunal de la fonction publique pour qu’il statue sur les conclusions du requérant tendant à l’annulation de la décision mettant fin aux fonctions antérieures et de la décision de réaffectation ainsi que sur la demande de réparation du préjudice subi, en ce qu’elle repose sur cette annulation, et de réserver les dépens.
Sur les dépens
169 L’affaire étant renvoyée devant le Tribunal de la fonction publique, il convient de réserver les dépens afférents à la présente procédure de pourvoi.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)
déclare et arrête :
1) L’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (première chambre) du 25 septembre 2012, Bermejo Garde/CESE (F-41/10), est annulé en ce qu’il rejette les conclusions de M. Moises Bermejo Garde tendant à l’annulation de la décision du Comité économique et social européen (CESE) no 133/10 A, du 24 mars 2010, mettant fin à ses fonctions antérieures et de la décision du CESE no 184/10 A, du 13 avril 2010, relative à sa réaffectation.
2) Le pourvoi est rejeté pour le surplus.
3) L’affaire est renvoyée devant le Tribunal de la fonction publique.
4) Les dépens sont réservés.
Jaeger |
Kanninen |
Van der Woude |
Signatures
Table des matières
Faits à l’origine du litige
Procédure en première instance et arrêt attaqué
1. Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010 et de l’addendum du 24 mars 2010
Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010, en tant que celle-ci a indiqué que le requérant ferait l’objet d’une réaffectation, et sur les conclusions tendant à l’annulation de l’addendum du 24 mars 2010
Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010, en tant que celle-ci a rejeté la demande de saisine de l’OLAF
Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010, en tant que celle-ci a rejeté la demande d’assistance
2. Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision mettant fin aux anciennes fonctions et de la décision de réaffectation
3. Sur la demande en indemnité du requérant
Procédure devant le Tribunal et conclusions des parties
Sur le pourvoi
1. Sur le premier moyen, relatif à la recevabilité des conclusions en annulation de la décision du 3 mars 2010
Sur la première branche du premier moyen, relative à l’irrecevabilité des conclusions visant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010 en tant que celle-ci déciderait de la réaffectation du requérant
Sur la seconde branche du premier moyen, relative à l’irrecevabilité des conclusions visant à l’annulation de la décision du 3 mars 2010 en tant que celle-ci rejetait la demande de transmission de l’information à l’OLAF
Sur la dénaturation du dossier résultant d’une catégorisation inexacte et réductrice des faits dénoncés par le requérant
Sur la qualification inexacte du rejet de la demande de transmission des informations à l’OLAF
2. Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense ainsi que de l’article 41 de la charte des droits fondamentaux
3. Sur le quatrième moyen, tiré d’une dénaturation du dossier ainsi que d’une violation de l’article 86 du statut, de l’annexe IX du statut, des DGE de l’annexe IX du statut, des droits de la défense et de l’obligation de motivation
4. Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation des règles relatives à la compétence de l’auteur de l’acte, de l’article 22 bis du statut ainsi que de l’article 72 du règlement intérieur
5. Sur le troisième moyen, tiré d’une violation des articles 12 bis, 22 bis et 86 du statut et de l’obligation de motivation ainsi que d’une dénaturation du dossier
Sur la première branche du troisième moyen, relative à l’obligation imposée par l’article 22 bis du statut
Sur la deuxième branche du troisième moyen, tirée d’une interprétation erronée des articles 12 bis et 22 bis du statut et d’une violation de l’obligation de motivation
Sur le premier grief, relatif à la nécessité d’effectuer un examen individuel au regard de l’article 12 bis du statut par rapport à l’article 22 bis du statut
Sur le second grief, tiré d’une interprétation erronée des conditions d’application de l’article 22 bis du statut
– Gravité de l’activité illégale dénoncée
– Authenticité ou caractère vraisemblable des informations transmises par le fonctionnaire
– Moyens utilisés par le fonctionnaire pour la transmission des informations
Sur la troisième branche du troisième moyen, tirée d’une application erronée des conditions de l’article 22 bis du statut
Sur le renvoi de l’affaire devant le Tribunal de la fonction publique
Sur les dépens
* Langue de procédure : le français.