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Dokument 62019CO0418

Domstolens beslut (tionde avdelningen) av den 29 januari 2020.
Silgan Closures GmbH och Silgan Holdings, Inc. mot Europeiska kommissionen.
Överklagande – Artikel 181 i domstolens rättegångsregler – Konkurrens – Artikel 101 FEUF – Avtal mellan företag – Marknad för metallförpackningar – Förordning (EG) nr 773/2004 – Artikel 2.1 – Beslut att inleda förfarandet – Talan om ogiltigförklaring – Avvisning – Rättsakt mot vilken talan inte kan väckas – Effektivt domstolsskydd – Uppenbart att överklagandet delvis inte kan upptas till prövning och delvis är ogrundat.
Mål C-418/19 P.

ECLI-nummer: ECLI:EU:C:2020:43

ORDONNANCE DE LA COUR (dixième chambre)

29 janvier 2020 (*)

« Pourvoi – Article 181 du règlement de procédure de la Cour – Concurrence – Article 101 TFUE – Accords entre entreprises – Marché des emballages métalliques – Règlement (CE) no 773/2004 – Article 2, paragraphe 1 – Décision d’ouverture de la procédure – Recours en annulation – Irrecevabilité – Acte non susceptible de recours – Protection juridictionnelle effective – Pourvoi, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondé »

Dans l’affaire C‑418/19 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 29 mai 2019,

Silgan Closures GmbH, établie à Munich (Allemagne),

Silgan Holdings Inc., établie à Stamford (États-Unis),

représentées par Mes H. Wollmann, D. Seeliger, R. Grafunder et V. Weiss, Rechtsanwälte,

parties requérantes,

l’autre partie à la procédure étant :

Commission européenne,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (dixième chambre),

composée de M. I. Jarukaitis (rapporteur), président de chambre, MM. M. Ilešič et C. Lycourgos, juges,

avocat général : M. M. Szpunar,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 181 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        Par leur pourvoi, Silgan Closures GmbH et Silgan Holdings Inc. demandent l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 15 mars 2019, Silgan Closures et Silgan Holdings/Commission (T‑410/18, ci-après l’« ordonnance attaquée », EU:T:2019:166), par laquelle celui-ci a rejeté comme étant irrecevable leur recours tendant à l’annulation de la décision C(2018) 2466 final de la Commission, du 19 avril 2018, en vertu de laquelle cette institution a ouvert une procédure d’application de l’article 101 TFUE dans l’affaire AT.40522 – Pandora (ci-après la « décision litigieuse »).

 Le cadre juridique

2        Le considérant 32 du règlement (CE) no 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101] et [102 TFUE] (JO 2003, L 1, p. 1), énonce :

« Il convient de consacrer le droit des entreprises intéressées d’être entendues par la Commission [européenne], de donner aux tiers dont les intérêts peuvent être affectés par une décision l’occasion de faire valoir au préalable leurs observations, ainsi que d’assurer une large publicité des décisions prises. [...] »

3        L’article 4 de ce règlement dispose que, « [p]our l’application des articles [101] et [102 TFUE], la Commission dispose des compétences prévues par le présent règlement ».

4        L’article 5, premier alinéa, dudit règlement prévoit, à sa première phrase, que « [l]es autorités de concurrence des États membres sont compétentes pour appliquer les articles [101] et [102 TFUE] dans des cas individuels ».

5        L’article 6 du même règlement précise que « [l]es juridictions nationales sont compétentes pour appliquer les articles [101] et [102 TFUE] ».

6        L’article 11 du règlement no 1/2003, intitulé « Coopération entre la Commission et les autorités de concurrence des États membres », dispose, à son paragraphe 6 :

« L’ouverture par la Commission d’une procédure en vue de l’adoption d’une décision en application du chapitre III dessaisit les autorités de concurrence des États membres de leur compétence pour appliquer les articles [101] et [102 TFUE]. Si une autorité de concurrence d’un État membre traite déjà une affaire, la Commission n’intente la procédure qu’après avoir consulté cette autorité nationale de concurrence. »

7        L’article 25 de ce règlement, relatif à la prescription en matière d’imposition de sanctions, précise, à son paragraphe 3 :

« La prescription en matière d’imposition d’amendes ou d’astreintes est interrompue par tout acte de la Commission ou d’une autorité de concurrence d’un État membre visant à l’instruction ou à la poursuite de l’infraction. [...] »

8        Le règlement (CE) no 773/2004 de la Commission, du 7 avril 2004, relatif aux procédures mises en œuvre par la Commission en application des articles [101] et [102 TFUE] (JO 2004, L 123, p. 18), tel que modifié par le règlement (CE) no 622/2008 de la Commission, du 30 juin 2008 (JO 2008, L 171, p. 3) (ci-après le « règlement no 773/2004), énonce, à son considérant 10 :

« Pour respecter les droits de la défense des entreprises, la Commission doit donner aux parties concernées le droit d’être entendues avant qu’elle n’arrête une décision. »

9        L’article 2 du règlement no 773/2004, intitulé « Ouverture de la procédure », prévoit, à son paragraphe 1 :

« La Commission peut décider d’ouvrir la procédure en vue d’adopter une décision en application du chapitre III du règlement [no 1/2003] à tout moment, mais au plus tard à la date à laquelle elle rend une évaluation préliminaire au sens de l’article 9, paragraphe 1 dudit règlement, émet une communication des griefs ou adresse aux parties une demande de manifestation d’intérêt à prendre part à des discussions en vue de parvenir à une transaction, ou bien à la date de publication d’une communication en application de l’article 27, paragraphe 4, dudit règlement, selon celle de ces dates qui vient en premier. »

10      L’article 10 bis de ce règlement régit la procédure de transaction dans les affaires d’entente.

11      Le règlement (CE) no 139/2004 du Conseil, du 20 janvier 2004, relatif au contrôle des concentrations entre entreprises (« le règlement CE sur les concentrations ») (JO 2004, L 24, p. 1), énonce, à ses considérants 8, 17 et 18 :

« (8)      Les dispositions à arrêter dans le présent règlement devraient s’appliquer aux modifications structurelles importantes dont l’effet sur le marché s’étend au-delà des frontières nationales d’un État membre. Ces concentrations devraient, en règle générale, être examinées exclusivement au niveau de [l’Union], en application du système du “guichet unique” et conformément au principe de subsidiarité.

[...]

(17)      Il convient de conférer à la Commission, sous réserve du contrôle de la Cour de justice [de l’Union européenne], une compétence exclusive pour appliquer le présent règlement.

(18)      Les États membres ne devraient pas pouvoir appliquer leur droit national de la concurrence aux concentrations de dimension communautaire, à moins que ceci ne soit prévu par le présent règlement. [...] Le présent règlement ne peut fixer un délai unique à l’adoption des décisions finales en vertu du droit national en raison de la diversité des législations nationales. »

12      L’article 9 du règlement no 139/2004, intitulé « Renvoi aux autorités compétentes des États membres », dispose, à son paragraphe 3 :

« Si la Commission considère que, compte tenu du marché des produits ou services en cause et du marché géographique de référence [...], un tel marché distinct et une telle menace[, au sens du paragraphe 2 de cet article 9,] existent :

a)      soit elle traite elle-même le cas conformément au présent règlement ;

b)      soit elle renvoie tout ou partie du cas aux autorités compétentes de l’État membre concerné en vue de l’application du droit national de la concurrence dudit État.

Si, au contraire, la Commission considère qu’un tel marché distinct ou une telle menace n’existent pas, elle prend une décision à cet effet qu’elle adresse à l’État membre concerné et traite elle-même le cas conformément au présent règlement.

Dans les cas où un État membre informe la Commission [...] qu’une concentration affecte un marché distinct à l’intérieur de son territoire, qui n’est pas une partie substantielle du marché commun, la Commission renvoie tout ou partie du cas afférent à ce marché distinct, si elle considère qu’un tel marché distinct est affecté. »

13      L’article 21 de ce règlement, intitulé « Application du règlement et compétence », précise :

« 1.      Le présent règlement est seul applicable aux concentrations telles que définies à l’article 3 [...]

2.      Sous réserve du contrôle de la Cour de justice [de l’Union européenne], la Commission a compétence exclusive pour arrêter les décisions prévues au présent règlement.

3.      Les États membres n’appliquent pas leur législation nationale sur la concurrence aux concentrations de dimension communautaire.

Le premier alinéa ne préjuge pas du pouvoir des États membres [...] de prendre, après renvoi, conformément à l’article 9, paragraphe 3, premier alinéa, point b), ou paragraphe 5, les mesures strictement nécessaires en application de l’article 9, paragraphe 8. »

 Les antécédents du litige

14      Les antécédents du litige, tels qu’ils ressortent de l’ordonnance attaquée, peuvent être résumés comme suit.

15      Les requérantes sont des sociétés actives, notamment, dans le secteur des emballages métalliques sous forme de récipients et de dispositifs de fermeture. Au cours de l’année 2015, le Bundeskartellamt (Office fédéral des ententes, Allemagne) (ci-après le « BKartA ») a ouvert une enquête à l’égard de plusieurs sociétés de ce secteur, dont des sociétés relevant du groupe auquel appartiennent les requérantes. Dans le cadre de cette enquête, les sociétés relevant de ce groupe ont présenté une demande de clémence et ont collaboré avec le BKartA en fournissant des renseignements. Une réunion destinée à préparer une transaction s’est tenue entre ce dernier et les représentants de celles-ci le 8 septembre 2016.

16      Par la décision litigieuse, la Commission a, conformément à l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 773/2004, ouvert une procédure d’application de l’article 101 TFUE à l’égard de plusieurs sociétés actives dans le secteur des emballages métalliques, dont les requérantes.

 La procédure devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

17      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 4 juillet 2018, les requérantes ont introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse.

18      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 14 septembre 2018, la Commission a excipé de l’irrecevabilité de ce recours, en faisant valoir que la décision litigieuse ne constituait pas un acte attaquable, au sens de l’article 263 TFUE, dès lors qu’elle ne produisait pas d’effets de droit obligatoires de nature à affecter les intérêts des requérantes en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de ces dernières.

19      Par actes déposés au greffe du Tribunal, respectivement les 18 et 26 septembre 2018, la République fédérale d’Allemagne et le Conseil de l’Union européenne ont demandé à intervenir dans la procédure au soutien des conclusions de la Commission.

20      Par l’ordonnance attaquée, le Tribunal a rejeté le recours des requérantes comme étant irrecevable, en relevant que la décision litigieuse ne produisait que des effets propres à un acte de procédure et n’affectait donc pas, en dehors de leur situation procédurale, la situation juridique des requérantes. À cet égard, il a notamment considéré que l’interruption de la prescription résultant de l’adoption de cette décision ne dépassait pas les effets propres à un acte de procédure, affectant exclusivement la situation procédurale de l’entreprise visée par l’enquête.

21      En outre, conformément à l’article 144, paragraphe 3, de son règlement de procédure, le Tribunal a décidé qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur les demandes d’intervention de la République fédérale d’Allemagne et du Conseil.

 Les conclusions des requérantes devant la Cour

22      Par leur pourvoi, les requérantes demandent à la Cour :

–         d’annuler l’ordonnance attaquée ;

–         de rejeter l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission devant le Tribunal ;

–         de renvoyer l’affaire à ce dernier pour qu’il statue au fond, et

–         de condamner la Commission aux dépens.

 Sur le pourvoi

23      En vertu de l’article 181 du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de rejeter ce pourvoi totalement ou partiellement par voie d’ordonnance motivée.

24      Il y a lieu de faire application de cette disposition dans la présente affaire.

25      Au soutien de leur pourvoi, les requérantes font observer, à titre liminaire, qu’une décision d’ouverture de la procédure, telle que la décision litigieuse, a notamment un effet sur la prescription des poursuites, tant en vertu de l’article 25 du règlement no 1/2003 que, en l’espèce, en vertu du droit allemand, selon lequel les actes de poursuites engagés par la Commission ont pour effet de prolonger la possibilité pour le BKartA de sanctionner les infractions au droit de la concurrence. La présente affaire serait caractérisée par la circonstance que l’adoption par la Commission de la décision litigieuse a modifié le déroulement de l’affaire qui était en cours devant le BKartA et a, conformément au droit allemand applicable, entraîné l’interruption du délai de prescription des poursuites à l’égard des requérantes.

26      En conséquence, au terme de la procédure engagée au niveau de l’Union européenne, le BKartA pourrait poursuivre son enquête à l’encontre des requérantes, sans que la prescription puisse lui être opposée. Il s’agirait d’une atteinte massive à leurs intérêts. En effet, l’enquête du BKartA était dirigée non pas contre elles, mais contre d’autres sociétés appartenant au même groupe et, en application du droit allemand, cette enquête n’avait interrompu le cours de la prescription qu’à l’égard de ces sociétés, en tant que seules personnes morales visées. La décision litigieuse aurait donc constitué le premier acte interruptif de la prescription à l’égard des requérantes.

27      L’annulation de cette décision aurait pour conséquence d’écarter, en droit allemand, toute sanction contre les requérantes, à tout le moins en ce qui concerne certains éléments de fait établis par le BKartA. Or, le Tribunal n’aurait consacré qu’une seule phrase dans les motifs de l’ordonnance attaquée, au point 26 de celle-ci, aux effets de ladite décision sur la possibilité de sanctionner les requérantes en Allemagne. Cette ordonnance serait ainsi entachée de plusieurs erreurs de droit, détaillées dans le cadre des six moyens qu’elles soulèvent au soutien de leur pourvoi.

 Sur le premier moyen

 Argumentation des requérantes

28      Par leur premier moyen, les requérantes font valoir que, au point 26 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a omis de motiver la raison pour laquelle il avait considéré que les effets de la décision litigieuse sur la prescription étaient de nature purement procédurale.

29      En outre, il résulterait des points 24 et suivants de l’arrêt du 28 mars 2019, Cogeco Communications (C‑637/17, EU:C:2019:263), que les règles applicables à la prescription relèvent non pas du droit de la procédure, mais du droit matériel. Cela serait confirmé par la directive (UE) 2019/1 du Parlement européen et du Conseil, du 11 décembre 2018, visant à doter les autorités de concurrence des États membres des moyens de mettre en œuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur (JO 2019, L 11, p. 3). En effet, celle-ci n’imposerait pas la transposition rétroactive de son article 29, portant sur les règles relatives aux délais de prescription applicables à l’imposition d’amendes et d’astreintes, alors qu’une application immédiate serait la règle s’agissant des dispositions de nature purement procédurale.

 Appréciation de la Cour

30      En premier lieu, dans la mesure où, par le premier moyen du pourvoi, les requérantes reprochent au Tribunal d’avoir omis de mentionner la raison pour laquelle il avait considéré que les effets de la décision litigieuse sur la prescription étaient de nature purement procédurale, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation d’un arrêt ou d’une ordonnance doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement du Tribunal, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la décision prise et à la Cour d’exercer son contrôle juridictionnel (arrêts du 8 mai 2013, Eni/Commission, C‑508/11 P, EU:C:2013:289, point 74 et jurisprudence citée, ainsi que du 13 décembre 2018, Union européenne/Kendrion, C‑150/17 P, EU:C:2018:1014, point 80).

31      Le fait que le Tribunal se fonde sur la jurisprudence de la Cour afin de motiver sa décision ne porte nullement atteinte au caractère suffisant et adapté de cette motivation (voir, par analogie, ordonnance du 26 septembre 2019, PITEE Fogyasztóvédelmi Egyesület/Commission, C‑358/19 P, non publiée, EU:C:2019:794, point 18). En effet, l’obligation de motivation qui s’impose au Tribunal ne l’oblige pas à fournir un exposé qui suivrait, de manière exhaustive et un par un, tous les raisonnements articulés par les parties au litige et cette motivation peut donc être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles le Tribunal n’a pas fait droit à leurs arguments et à la Cour de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle (arrêts du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 372, ainsi que du 11 septembre 2014, MasterCard e.a./Commission, C‑382/12 P, EU:C:2014:2201, point 189).

32      En l’espèce, au point 26 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a considéré que, d’une part, « l’interruption de la prescription entraînée par l’adoption de la décision [litigieuse] ne dépasse pas les effets propres à un acte de procédure affectant exclusivement la situation procédurale et non la situation juridique de l’entreprise visée par l’enquête », en se fondant à cet égard sur le point 17 de l’arrêt du 11 novembre 1981, IBM/Commission (60/81, EU:C:1981:264), et, d’autre part, « [c]ette appréciation relative au caractère purement procédural de ces effets est valable non seulement au regard de l’interruption de la prescription prévue à l’article 25 du règlement no 1/2003, mais aussi au regard de l’interruption de la prescription des pouvoirs qu’ont les autorités nationales d’imposer des sanctions prévues, le cas échéant, par le droit national ».

33      Il ressort ainsi de ce point 26 que le Tribunal a appuyé les considérations exposées dans celui-ci sur la jurisprudence de la Cour développée au sujet d’un acte par lequel la Commission avait décidé d’engager une procédure en application des dispositions du règlement no 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [81] et [82 CE] (JO 1962, 13, p. 204), depuis remplacé par le règlement no 1/2003, et selon laquelle l’interruption de la prescription résultant de l’engagement d’une telle procédure ne dépasse pas les effets propres à un acte de procédure et n’affecte pas, en dehors de la situation procédurale de l’entreprise concernée, la situation juridique de cette dernière.

34      Ce faisant, le Tribunal a fait apparaître de façon claire et non équivoque, au sens de la jurisprudence rappelée aux points 30 et 31 de la présente ordonnance, la raison pour laquelle il a retenu ces considérations. L’argumentation des requérantes tirée d’un défaut de motivation de l’ordonnance attaquée sur ce point doit, par conséquent, être écartée comme étant manifestement non fondée.

35      En second lieu, dans la mesure où, par le premier moyen du pourvoi, les requérantes allèguent que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que l’interruption de la prescription résultant de l’adoption de la décision litigieuse ne dépassait pas les effets propres à un acte de procédure affectant exclusivement la situation procédurale de l’entreprise visée par l’enquête, il convient de relever, d’une part, que l’arrêt du 28 mars 2019, Cogeco Communications (C‑637/17, EU:C:2019:263), qu’elles invoquent à cet égard et qui portait sur la conformité, au regard du droit de l’Union, d’une règle nationale relative à la prescription des actions en dommages et intérêts en matière d’infractions au droit de la concurrence, ne permet pas de soutenir leur position.

36      En effet, aux points 24 à 33 de cet arrêt, dont les requérantes se prévalent en substance, la Cour a relevé, tout d’abord, que l’article 22, paragraphe 1, de la directive 2014/104/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 novembre 2014, relative à certaines règles régissant les actions en dommages et intérêts en droit national pour les infractions aux dispositions du droit de la concurrence des États membres et de l’Union européenne (JO 2014, L 349, p. 1), prévoit que les dispositions nationales adoptées afin de se conformer aux dispositions substantielles de celle-ci ne s’appliquent pas rétroactivement. Elle a ainsi, en substance, relevé que ces dispositions nationales ne s’appliquent pas avant l’expiration du délai de transposition de cette directive. La Cour a relevé, ensuite, que le législateur national concerné avait décidé, en application de la marge d’appréciation qui lui était conférée à cet égard par l’article 22, paragraphe 2, de ladite directive, que les règles nationales transposant les dispositions procédurales de la même directive ne s’appliquaient pas aux actions en dommages et intérêts introduites avant l’expiration du délai de transposition de celle-ci. La Cour a, enfin, déduit de ces constatations que la directive 2014/104 n’était « en tout état de cause » pas applicable ratione temporis au litige qui était en cause dans l’affaire ayant donné lieu audit arrêt.

37      Il ne saurait donc être considéré que, par le même arrêt, la Cour aurait qualifié les règles de prescription de règles de droit matériel ou de règles de droit procédural. Par suite, aucun élément ne saurait en être utilement tiré par les requérantes au soutien de leur argumentation visée au point 35 de la présente ordonnance.

38      D’autre part, le fait que la directive 2019/1 n’impose pas la transposition rétroactive de son article 29 n’est manifestement pas davantage de nature à établir l’erreur de droit alléguée. En effet, le fait qu’un délai de transposition unique ait été prévu pour l’ensemble des dispositions de cette directive ne saurait aucunement fonder la qualification des règles prévues à cet article 29 de règles de droit procédural ou de règles de droit matériel et, par suite, ne saurait établir le bien-fondé de l’argumentation des requérantes.

39      Cette seconde partie de l’argumentation des requérantes est, par suite, manifestement non fondée et, par conséquent, le premier moyen du pourvoi doit être écarté comme étant manifestement non fondé.

 Sur le deuxième moyen

 Argumentation des requérantes

40      Par leur deuxième moyen, les requérantes font valoir que la thèse du Tribunal, exposée au point 26 de l’ordonnance attaquée, selon laquelle les mesures de la Commission affectant exclusivement les droits procéduraux d’un requérant ne peuvent pas faire l’objet de recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE est, en tout état de cause, erronée.

41      Cet article du traité FUE devrait être interprété à la lumière de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »). Or, il résulterait de la jurisprudence de la Cour, en particulier des arrêts du 18 mars 2010, Alassini e.a. (C‑317/08 à C‑320/08, EU:C:2010:146), ainsi que du 15 septembre 2016, Star Storage e.a. (C‑439/14 et C‑488/14, EU:C:2016:688), que le droit à une protection juridictionnelle effective garanti par cet article doit être respecté également lorsque sont en cause des « désavantages procéduraux », lesquels peuvent alors devoir être écartés afin que le respect du droit consacré audit article soit assuré.

42      Le Tribunal et la Cour auraient d’ailleurs à plusieurs reprises jugé qu’un recours en annulation tendant exclusivement à protéger le requérant d’une atteinte à ses droits procéduraux était recevable. Ainsi, d’une part, ils auraient reconnu la faculté pour une entreprise d’introduire un recours en annulation contre l’acte de la Commission procédant au classement d’une plainte en matière d’aides d’État ou encore contre une décision de la Commission de ne pas ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE.

43      D’autre part, le Tribunal aurait admis la possibilité d’introduire un recours contre une décision de la Commission de renvoyer à une autorité nationale un cas de concentration notifiée, adoptée en vertu de l’article 9 du règlement no 139/2004, faculté qu’il aurait fondée sur le fait que l’entreprise concernée devait s’expliquer devant une autre autorité dans le cadre d’une autre procédure. Le cas d’espèce serait analogue, dès lors qu’il résulterait de la décision litigieuse, pour l’entreprise concernée, un changement d’autorité compétente, de règles de procédure et de régime juridique.

 Appréciation de la Cour

44      En premier lieu, dans la mesure où, par le deuxième moyen du pourvoi, les requérantes font grief au Tribunal d’avoir, au point 26 de l’ordonnance attaquée, commis une erreur de droit en omettant de tenir compte, lors de son interprétation de la notion d’« acte attaquable », au sens de l’article 263 TFUE, de l’article 47 de la Charte, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, cet article 47 n’a pas pour objet de modifier le système de contrôle juridictionnel prévu par les traités, notamment les règles relatives à la recevabilité des recours formés directement devant la juridiction de l’Union, ainsi qu’il découle également des explications afférentes audit article 47, lesquelles doivent, conformément à l’article 6, paragraphe 1, troisième alinéa, TUE et à l’article 52, paragraphe 7, de la Charte, être prises en considération pour l’interprétation de celle-ci. Partant, l’interprétation de la notion d’« acte attaquable » à la lumière de l’article 47 de la Charte ne saurait aboutir à écarter cette condition de recevabilité sans excéder les compétences attribuées par le traité FUE aux juridictions de l’Union (arrêts du 3 octobre 2013, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil, C‑583/11 P, EU:C:2013:625, point 97, ainsi que du 25 octobre 2017, Roumanie/Commission, C‑599/15 P, EU:C:2017:801, point 68 et jurisprudence citée).

45      À cet égard, aucun argument contraire utile ne saurait manifestement être tiré des arrêts invoqués par les requérantes, mentionnés au point 41 de la présente ordonnance, dès lors qu’ils sont sans rapport avec l’article 263 TFUE.

46      En deuxième lieu, dans la mesure où, au soutien du deuxième moyen du pourvoi, les requérantes se prévalent de la jurisprudence du juge de l’Union relative à la recevabilité de certains recours en matière d’aides d’État, identifiés au point 42 de la présente ordonnance, il suffit de relever que cette jurisprudence se fonde sur la circonstance que, lorsque, sans ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE, la Commission constate, par une décision prise sur le fondement de l’article 108, paragraphe 3, TFUE et de l’article 4 du règlement (UE) 2015/1589 du Conseil, du 13 juillet 2015, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO 2015, L 248, p. 9), qu’une mesure étatique ne constitue pas une aide incompatible avec le marché intérieur, les bénéficiaires des garanties de procédure qui sont prévues à l’article 108, paragraphe 2, TFUE en faveur des intéressés ne peuvent en obtenir le respect que s’ils ont la possibilité de contester cette décision devant le juge de l’Union. Ainsi, c’est pour ces motifs que celui-ci déclare recevable un recours visant à l’annulation d’une telle décision, introduit par un intéressé, au sens de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, lorsque l’auteur de ce recours tend, par l’introduction de celui-ci, à faire sauvegarder les droits procéduraux qu’il tire de cette dernière disposition (arrêt du 17 juillet 2008, Athinaïki Techniki/Commission, C‑521/06 P, EU:C:2008:422, point 36 et jurisprudence citée).

47      En outre, ce sont les mêmes motifs qui ont conduit la Cour à admettre également la recevabilité d’un recours en annulation introduit par un plaignant contre un acte de la Commission par lequel celle-ci met fin à la procédure préliminaire d’examen déclenchée par ce dernier en raison du fait que l’enquête entamée n’avait pas permis de conclure à l’existence d’une aide, au sens de l’article 107 TFUE, dès lors que, par un tel acte, la Commission refuse implicitement d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE et prive ainsi également les bénéficiaires des garanties de procédure prévues à l’article 108, paragraphe 2, TFUE de la possibilité d’en obtenir le respect (voir, en ce sens, arrêt du 17 juillet 2008, Athinaïki Techniki/Commission, C‑521/06 P, EU:C:2008:422, points 52, 53 et 61).

48      En revanche, une décision d’ouverture de la procédure, au sens de l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 773/2004, n’a pas pour effet de priver les destinataires de celle-ci de leurs droits procéduraux. Au contraire, cette procédure a été aménagée précisément en vue de permettre aux entreprises concernées de faire connaître leur point de vue et d’éclairer la Commission le plus complètement possible avant qu’elle ne prenne une décision affectant leurs intérêts. Elle vise donc à créer, en faveur de celles-ci, des garanties procédurales et, ainsi qu’il ressort du considérant 32 du règlement no 1/2003 et du considérant 10 du règlement no 773/2004, à consacrer le droit des entreprises d’être entendues par la Commission (voir, par analogie, arrêt du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, EU:C:1981:264, point 14), ce que le Tribunal a d’ailleurs rappelé à bon droit au point 17 de l’ordonnance attaquée.

49      La jurisprudence en matière d’aides d’État invoquée par les requérantes ne permet donc manifestement pas d’étayer la démonstration relative à l’erreur de droit qu’elles allèguent.

50      En troisième lieu, la décision litigieuse ne saurait être assimilée à une décision de renvoi à l’autorité compétente d’un État membre adoptée en application de l’article 9 du règlement no 139/2004. Ainsi qu’il ressort de l’article 21, paragraphes 1 et 3, comme des considérants 8, 17 et 18 de ce règlement, le contrôle des concentrations de dimension communautaire, au sens de ce dernier, relève en principe de la compétence exclusive de la Commission et de l’application exclusive des dispositions du droit de l’Union en matière de contrôle des concentrations.

51      Dans ce cadre, une décision de renvoi à une autorité nationale adoptée conformément à l’article 9, paragraphe 3, dudit règlement est constitutive de la compétence de l’autorité nationale concernée pour connaître du cas, ou de la partie du cas, dont elle a été saisie et fonde également cette autorité à appliquer, à ce cas, ou à cette partie du cas, dont elle a été saisie, son droit national de la concurrence. Une telle décision affecte donc la situation juridique des entreprises concernées, dès lors que, notamment, elle soumet le cas, ou la partie du cas, qui lui a été renvoyé à un critère de contrôle matériel différent de celui applicable en vertu du droit de l’Union.

52      En revanche, dans le cadre du règlement no 1/2003, l’application des articles 101 et 102 TFUE repose sur les compétences parallèles de la Commission et des autorités nationales de concurrence ainsi que, le cas échéant, des juridictions nationales, comme cela ressort des articles 4 à 6 de ce règlement [voir, en ce sens, arrêts du 20 janvier 2016, DHL Express (Italy) et DHL Global Forwarding (Italy), C‑428/14, EU:C:2016:27, point 58, ainsi que du 23 novembre 2017, Gasorba e.a., C‑547/16, EU:C:2017:891, point 23]. Une décision d’ouverture de la procédure, au sens de l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 773/2004, n’est donc pas constitutive de la compétence de la Commission pour appliquer l’article 101 TFUE, cette compétence ne dépendant pas de l’adoption d’une telle décision, ni n’entraîne de modification du critère de contrôle matériel applicable.

53      Il découle de ce qui précède que le deuxième moyen du pourvoi doit être écarté comme étant manifestement non fondé.

 Sur le troisième moyen

 Argumentation des requérantes

54      Par leur troisième moyen, les requérantes soutiennent que, au point 26 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a également commis une erreur de droit consistant à avoir assimilé l’interruption de la prescription prévue à l’article 25, paragraphe 3, du règlement no 1/2003 à l’interruption de la prescription en application du droit allemand. Le Tribunal aurait ainsi considéré que la décision litigieuse et la poursuite ultérieure de la procédure devant le BKartA formaient une seule et même unité juridique. Cette appréciation serait cependant contraire à l’arrêt du 20 janvier 2016, DHL Express (Italy) et DHL Global Forwarding (Italy) (C‑428/14, EU:C:2016:27), dont il ressortirait que la Commission et les autorités de concurrence nationales agissent de façon autonome, dans le cadre de compétences parallèles.

55      Si la procédure devant la Commission et celle devant le BKartA sont deux procédures distinctes, une approche juridique sélective des influences réciproques entre ces deux procédures ne saurait être admise. Dès lors que les régimes de clémence de l’Union et nationaux sont indépendants les uns des autres, il devrait en aller de même des dispositions régissant l’interruption de la prescription. Les effets de la décision litigieuse sur la procédure ouverte en Allemagne constitueraient, par conséquent, un aspect supplémentaire, allant au-delà des effets juridiques de la simple ouverture de la procédure par la Commission, ce que le Tribunal aurait méconnu dans l’ordonnance attaquée.

 Appréciation de la Cour

56      Au point 26 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a, certes, ainsi que cela a déjà été exposé au point 32 de la présente ordonnance, considéré que son appréciation relative au caractère purement procédural des effets de l’interruption de la prescription, résultant de l’adoption de la décision litigieuse, était valable non seulement au regard de l’interruption de la prescription prévue à l’article 25 du règlement no 1/2003, « mais aussi au regard de l’interruption de la prescription des pouvoirs qu’ont les autorités nationales d’imposer des sanctions prévues, le cas échant, par le droit national ».

57      Toutefois, il ne résulte pas de ces considérations que, par celles-ci, le Tribunal aurait jugé que la procédure ouverte par la décision litigieuse et la procédure éventuelle qui serait, le cas échéant, engagée à l’issue de celle-ci par le BKartA à l’encontre des requérantes formeraient une seule et même unité juridique. En effet, par lesdites considérations, le Tribunal s’est limité à affirmer que l’interruption d’un délai de prescription a des effets uniquement procéduraux sur la situation de l’entité concernée, qu’il s’agisse de l’effet interruptif prévu par le droit de l’Union ou d’un effet interruptif prévu, comme en l’espèce, par le droit national.

58      Reposant ainsi clairement sur une lecture erronée de l’ordonnance attaquée, le troisième moyen du pourvoi doit être écarté comme étant manifestement non fondé.

 Sur le quatrième moyen

 Argumentation des requérantes

59      Par leur quatrième moyen, les requérantes font valoir que, pour écarter les effets de la décision litigieuse sur la procédure ouverte en Allemagne, elles ne disposent d’aucune autre voie de droit qu’un recours en annulation, au titre de l’article 263 TFUE, contre celle-ci. Par conséquent, en déclarant leur recours irrecevable, le Tribunal les aurait privées de leur droit fondamental à une protection juridictionnelle effective tel qu’il est garanti à l’article 47 de la Charte.

60      En vertu du droit allemand, l’interruption de la prescription des poursuites à leur égard ne dépendrait que du fait que la Commission est saisie d’une procédure dans la même affaire et qu’elle a adopté certains actes concrets, à savoir, en l’espèce, la décision litigieuse. La question de savoir si la Commission était habilitée à cet effet ne serait pas examinée par les autorités ou les juridictions allemandes. Les requérantes ne bénéficieraient donc, à cet égard, d’aucune protection devant les juridictions nationales.

61      Leur droit de former un recours en annulation contre la décision finale qui serait adoptée par la Commission ne leur garantirait pas non plus une protection juridictionnelle effective et complète à cet égard. Si la procédure ouverte par la décision litigieuse n’aboutit pas, la Commission décidant de classer l’affaire sans adopter de décision, elles ne disposeraient d’aucun acte juridique leur permettant d’attaquer l’interruption, du fait de l’intervention de la Commission, de la prescription au niveau national. En outre, même si une décision finale était adoptée par cette institution, un recours contre celle-ci ne leur permettrait pas de bénéficier d’une protection juridictionnelle complète, une telle décision finale ne portant pas sur le point de savoir si la Commission était déjà compétente pour traiter l’affaire au moment de l’ouverture de la procédure. Ainsi, même si une telle décision finale était annulée par les juridictions de l’Union, la question de la régularité de l’ouverture de la procédure ne serait pas tranchée et les requérantes resteraient tributaires du délai de prescription prolongé, prévu dans le droit allemand.

 Appréciation de la Cour

62      En premier lieu, en ce que, par le quatrième moyen du pourvoi, les requérantes allèguent de nouveau que le Tribunal a violé l’article 47 de la Charte en rejetant leur recours comme étant irrecevable, il suffit de rappeler qu’il résulte de la jurisprudence citée au point 44 de la présente ordonnance que cet article n’a pas pour objet de modifier le système de contrôle juridictionnel prévu par les traités, notamment les règles relatives à la recevabilité des recours formés directement devant la juridiction de l’Union. Ce quatrième moyen doit, par conséquent, dans cette mesure, être écarté comme étant manifestement non fondé.

63      En second lieu, s’agissant de l’argumentation exposée aux points 60 et 61 de la présente ordonnance, par laquelle les requérantes font valoir, en substance, que le fait que le droit allemand ne prévoit pas, selon elles, de possibilité de contester l’interruption du délai de prescription résultant de l’adoption de la décision litigieuse devrait conduire à admettre que la décision litigieuse puisse faire l’objet d’un recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE, il convient de relever, d’une part, que, si, au terme de la procédure administrative, la Commission devait adopter une décision affectant les intérêts des requérantes, cette décision pourrait faire, en vertu de l’article 263 TFUE, l’objet d’un recours juridictionnel dans le cadre duquel il serait loisible aux requérantes d’invoquer tous moyens utiles.

64      À cet égard, et ainsi qu’il ressort de cette disposition, il y a lieu de rappeler que la question de la compétence de l’auteur de l’acte relève du contrôle exercé par le juge de l’Union dans le cadre d’un tel recours. Il appartiendra, dès lors, à ce dernier d’apprécier si des illégalités ont été commises au cours de la procédure administrative et si celles-ci sont de nature à affecter la légalité de la décision prise par la Commission au terme de la procédure administrative (voir, par analogie, arrêt du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, EU:C:1981:264, point 24).

65      D’autre part, quant à l’hypothèse selon laquelle, si la Commission décidait de classer l’affaire sans adopter de décision, les requérantes seraient privées de toute possibilité de contester l’interruption de la prescription intervenue au niveau national, il suffit de relever que la prétendue insuffisance des voies de recours au niveau national qu’elles allèguent à cet égard, outre qu’elle n’est pas établie, ne saurait, en tant que telle, avoir d’incidence sur la notion d’« acte attaquable », au sens de l’article 263 TFUE.

66      Le quatrième moyen du pourvoi doit, par conséquent, être écarté comme étant dans son ensemble manifestement non fondé.

 Sur le cinquième moyen

 Argumentation des requérantes

67      Par leur cinquième moyen, les requérantes font valoir que la décision litigieuse produit également d’autres effets autonomes qui ne pourraient être annulés par un recours dirigé contre la décision finale. Ainsi, par sa décision d’ouverture de la procédure, la Commission déciderait du régime de sanction applicable, à savoir, en l’espèce, le régime de sanction d’une violation du droit de la concurrence prévu par le droit de l’Union, lequel ne serait pas harmonisé avec les régimes de sanction prévus dans le droit des États membres.

68      En outre, une telle décision aurait un impact sur les entreprises ayant déjà coopéré avec une autorité de concurrence dans une procédure nationale en cours. En l’espèce, les requérantes n’auraient eu aucune raison d’envisager d’adresser une demande de clémence à la Commission après que le BKartA a ouvert la procédure en Allemagne, dans la mesure où l’attribution de l’affaire aurait alors été réglée et où, dans le cadre de celle-ci, une société du même groupe aurait pleinement coopéré et ainsi « gagné » le droit d’être mieux traitée qu’elle ne l’aurait été en l’absence d’une telle coopération, dans une décision du BKartA qui infligerait une amende. La décision litigieuse priverait les requérantes de ce régime de faveur et de leur confiance à cet égard.

69      Ces éléments ne seraient pas remis en cause dans l’ordonnance attaquée. Le Tribunal aurait cependant considéré, aux points 20 et 21 de celle-ci, que les effets produits par l’article 11, paragraphe 6, du règlement no 1/2003 ne portent pas préjudice à l’entreprise poursuivie, mais lui sont favorables. Or, cela n’aurait été le cas que si la décision litigieuse avait durablement et définitivement privé de fondement la procédure ouverte en Allemagne. Toutefois, ainsi qu’il résulterait de l’arrêt du 14 février 2012, Toshiba Corporation e.a. (C‑17/10, EU:C:2012:72), tel n’aurait pas été le cas. La règle de prescription applicable garantirait même que le BKartA ne soit pas lié par les limitations dans le temps qui lui auraient été autrement opposables.

70      La faculté théorique que les requérantes ont de contester une décision finale de la Commission leur offrirait une protection juridictionnelle insuffisante. En effet, le fait qu’elles ne peuvent contester la compétence de la Commission que dans le cadre d’un recours dirigé contre la décision définitive les priverait de la possibilité de participer à une procédure de transaction, en application de l’article 10 bis du règlement no 773/2004, une décision adoptée au titre de cette disposition ne pouvant, selon elles, être remise en cause par les entreprises concernées devant le Tribunal, à défaut pour ces dernières de pouvoir justifier d’un intérêt à agir. C’est aussi pour cette raison que la décision litigieuse devrait, dans les circonstances particulières de l’espèce, être qualifiée d’acte attaquable, au sens de l’article 263 TFUE.

 Appréciation de la Cour

71      Il résulte de l’article 256 TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 169, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt ou de l’ordonnance dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande, sous peine d’irrecevabilité du pourvoi ou du moyen concerné. Ne répond pas à cette exigence le pourvoi ou le moyen du pourvoi qui, sans même comporter une argumentation visant spécifiquement à identifier l’erreur de droit dont serait entaché l’arrêt ou l’ordonnance dont l’annulation est demandée, se limite à reproduire les moyens et les arguments déjà présentés devant le Tribunal. En effet, un tel pourvoi ou moyen constitue en réalité une demande visant à obtenir un simple réexamen de la requête présentée devant le Tribunal, ce qui échappe à la compétence de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (voir, en ce sens, arrêts du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 51, ainsi que du 26 janvier 2017, Villeroy & Boch/Commission, C‑625/13 P, EU:C:2017:52, point 69 et jurisprudence citée).

72      Or, par le cinquième moyen du pourvoi, les requérantes se limitent, pour l’essentiel et sans identifier de manière spécifique une quelconque erreur de droit qui aurait été commise à cet égard par le Tribunal, à faire valoir divers éléments, déjà invoqués en première instance, dont il résulterait que leur recours aurait dû être déclaré recevable par le Tribunal, alors que ces éléments ont, en substance, été écartés aux points 23 à 25, 27 et 28 de l’ordonnance attaquée. Ce cinquième moyen doit, par conséquent, dans cette mesure, être écarté comme étant manifestement irrecevable.

73      Par ailleurs, dans la mesure où les requérantes critiquent les points 20 et 21 de l’ordonnance attaquée, il y a lieu de constater que, à ce point 20, le Tribunal a relevé que « la conséquence prévue à l’article 11, paragraphe 6, du règlement no 1/2003, selon laquelle l’ouverture de la procédure visée par la décision [litigieuse] dessaisit les autorités de concurrence des États membres de leur compétence pour appliquer l’article 101 TFUE au regard des faits faisant l’objet de cette procédure [...], consiste à mettre les requérantes à l’abri de poursuites parallèles de la part de ces autorités » et que « [c]ette conséquence ne porte donc pas atteinte à leurs intérêts », en renvoyant à cet égard au point 18 de l’arrêt du 11 novembre 1981, IBM/Commission (60/81, EU:C:1981:264).

74      Au point 21 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a ajouté que « [c]ette conclusion est valable non seulement lorsque aucune autorité nationale n’a entamé de procédure en la matière, mais aussi, à plus forte raison, lorsqu’une telle autorité a entamé une telle procédure et s’en voit dessaisie en vertu de [cet] article 11, paragraphe 6 », étant donné que, « si une décision d’ouvrir une procédure d’application de l’article 101 TFUE n’affecte pas la situation juridique de l’entreprise visée lorsque celle-ci ne fait, jusqu’alors, l’objet d’aucune autre procédure, il en est d’autant plus ainsi lorsque l’entreprise en question est déjà mise en cause dans le cadre d’une enquête ouverte par une autorité nationale ».

75      L’argumentation des requérantes selon laquelle, en statuant ainsi, le Tribunal a commis une erreur de droit, dès lors qu’il a omis de tenir compte du fait que le dessaisissement du BKartA leur serait défavorable en raison de l’effet interruptif de la prescription au niveau national que le droit allemand attache à la décision litigieuse, repose cependant sur la prémisse selon laquelle cet effet interruptif va au-delà des effets propres à un acte de procédure affectant exclusivement leur situation procédurale. Or, il résulte de l’examen du premier moyen du pourvoi que les requérantes ne sont pas parvenues à établir le bien-fondé de cette prémisse. Cette argumentation doit, par suite, également être écartée comme étant manifestement non fondée.

76      Le cinquième moyen du pourvoi doit, par conséquent, être écarté comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondé.

 Sur le sixième moyen

 Argumentation des requérantes

77      Par leur sixième moyen, les requérantes font observer que, au point 18 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a refusé de leur reconnaître le droit de former un recours au titre de l’article 263 TFUE au motif qu’il ne voulait pas répondre de manière anticipée aux questions de droit qu’elles avaient soulevées. Ce faisant, il aurait violé le principe de proportionnalité, au sens de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, lequel n’autoriserait des limitations à l’exercice des droits reconnus par celle-ci que dans le respect du principe de proportionnalité ainsi que si elles sont nécessaires et répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union ou au besoin de protection des droits et libertés d’autrui.

78      À cet égard, il serait déterminant de savoir si, à supposer qu’il ait examiné le recours des requérantes au fond, le Tribunal aurait effectivement dû trancher des questions appelées à être clarifiées dans le cadre de la procédure administrative en cours devant la Commission, de telle sorte qu’il y aurait un risque de confusion des procédures administratives et judiciaires. Ce n’est que si l’existence d’un tel risque avait été concrètement établie par le Tribunal qu’il aurait été fondé à considérer qu’admettre la recevabilité du recours porté devant lui l’aurait conduit à porter une appréciation sur des questions sur lesquelles la Commission n’a pas encore eu l’occasion de se prononcer. Or, un tel risque ne serait pas avéré en l’espèce.

79      La question juridique soulevée par le recours de première instance aurait simplement été de savoir si les principes de subsidiarité et de proportionnalité, tels qu’ils sont prévus à l’article 5 TUE, doivent être respectés lorsque la Commission décide de l’attribution des affaires, conformément à l’article 11, paragraphe 6, du règlement no 1/2003. Une réponse affirmative à cette question aurait entraîné l’annulation de la décision litigieuse sans qu’une question de fait doive être examinée par le Tribunal, la décision litigieuse ne contenant aucune motivation à cet égard. Les craintes exprimées par le Tribunal au point 18 de l’ordonnance attaquée ne seraient donc pas justifiées.

80      La question de savoir si les restructurations de sociétés effectuées par certaines des entreprises incriminées par le BKartA au cours de l’année 2017 justifiaient une réattribution de l’affaire à la Commission au regard des principes de subsidiarité et de proportionnalité constituerait également une question de droit. La confusion entre la procédure administrative subséquente à la décision litigieuse et la procédure judiciaire, crainte par le Tribunal, ne serait donc pas non plus envisageable.

 Appréciation de la Cour

81      Au point 18 de l’ordonnance attaquée, seul visé dans le sixième moyen du pourvoi, le Tribunal a relevé qu’admettre un recours en annulation dirigé contre l’engagement d’une procédure d’application de l’article 101 TFUE « pourrait obliger le juge de l’Union [...] à porter une appréciation sur des questions sur lesquelles la Commission n’a pas encore eu l’occasion de se prononcer, et aurait ainsi pour conséquence une anticipation des débats au fond et une confusion des différentes phases des procédures administratives et judiciaires ». Il en a déduit qu’un tel recours « serait donc incompatible avec les systèmes de répartition des compétences entre la Commission et le juge de l’Union et les voies de recours, prévus par le traité [FUE], ainsi qu’avec les exigences d’une bonne administration de la justice et d’un déroulement régulier de la procédure administrative de la Commission », en renvoyant au point 20 de l’arrêt du 11 novembre 1981, IBM/Commission (60/81, EU:C:1981:264).

82      À cet égard, il y a lieu de relever, en premier lieu, que, en tant que, par leur argumentation, les requérantes soutiennent, en substance, que les conditions de recevabilité des recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE portent une atteinte disproportionnée à leur droit à une protection juridictionnelle effective, elles font de nouveau valoir que, en statuant ainsi à ce point 18, le Tribunal a violé ce droit. Or, il résulte de la jurisprudence rappelée au point 44 de la présente ordonnance que cette argumentation doit être écartée comme étant manifestement non fondée.

83      En second lieu, en tant que, par leur argumentation, les requérantes font grief au Tribunal d’avoir considéré qu’admettre la recevabilité de leur recours le conduirait à anticiper les débats au fond, alors qu’un examen concret de celui-ci lui aurait permis de déterminer qu’un tel risque d’anticipation n’existait pas en l’espèce et ne pouvait donc pas justifier l’irrecevabilité de leur recours, il convient de constater que, si, certes, audit point 18, le Tribunal a adopté les considérations exposées au point 81 de la présente ordonnance, il ressort toutefois d’une lecture d’ensemble de l’ordonnance attaquée que le Tribunal a, à titre principal, fondé l’irrecevabilité du recours des requérantes qui était porté devant lui sur le fait que la décision litigieuse ne constituait pas un acte attaquable, au sens de l’article 263 TFUE, celle-ci ne produisant pas d’effets de droit obligatoires de nature à affecter les intérêts des requérantes en modifiant de façon caractérisée leur situation juridique. Les considérations formulées au même point 18 doivent, par suite, être considérées comme étant surabondantes et cette argumentation doit donc être écartée comme étant manifestement inopérante.

84      Par conséquent, le sixième moyen du pourvoi doit être écarté dans son ensemble.

85      Aucun des moyens invoqués par les requérantes n’étant accueilli, il convient de rejeter le pourvoi dans son intégralité comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondé.

 Sur les dépens

86      Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, du même règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance. La présente ordonnance étant adoptée sans que le pourvoi ait été signifié à l’autre partie à la procédure et, par conséquent, avant que celle-ci n’ait pu exposer de dépens, il convient de décider que les requérantes supporteront leurs propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (dixième chambre) ordonne :

1)      Le pourvoi est rejeté comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondé.

2)      Silgan Closures GmbH et Silgan Holdings Inc. supportent leurs propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.

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